Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Forêt tropicale
L'origine de foresta est plus controversée. On a longtemps évoqué une origine germanique, par
un terme vieux bas francique *forhist non attesté, avec perte du [h] à l'époque
mérovingienne *forist, qui serait un dérivé du vieux bas francique *forha « sapin » (cf.
allemand Föhre « pin sylvestre », anglais fir « sapin »), le suffixe -ist ayant une valeur collective,
d'où le sens de « sapinière, forêt de sapins ». Cette explication est aujourd'hui délaissée, l'origine
de foresta semblant bien plutôt romane, mais avec deux hypothèses concurrentes cependant.
Selon une première hypothèse, fondée sur le sens juridique donné à foresta par les mérovingiens
et les carolingiens, il proviendrait du latin classique forum (forum puis tribunal)14. Bien que
favorisée par les ouvrages étymologiques français, aucune forme intermédiaire permettant
d'appuyer cette hypothèse n'est cependant donnée.
Une hypothèse alternative beaucoup plus argumentée fait dériver foresta directement du
latin foris, « dehors, extérieur »15 (forum dérivant lui-même de foris) et plus précisément
de forestis « ce qui est en dehors, hors de l’enclos » au sens de ce qui est en dehors de là où
l’homme vit, où réside le pouvoir16. Le grammairien Placidus connaît déjà un
adjectif forasticus (« extérieur »)15 dérivé de foris ; cet adjectif subsiste dans l'italien forastico, le
sicilien furestico, l’ancien occitan foresgue (« sauvage », « rude », « rétif »). De plus,
l'italien forestiere a le sens d'« étranger, homme du dehors », de même que l'ancien
provencal forestiero « qui est en dehors (de la commune), étranger ». L'ancien
français forestier avait également le sens d'étranger, et l'italien actuel foresta conserve le sens de
« vaste zone inculte, où la végétation, et en particulier les arbres, croissent spontanément ».
Ainsi, le terme foresta aurait pu désigner à l'époque gallo-romaine les espaces restés sauvages,
en dehors, à l'extérieur, de ceux mis en valeur par les communautés villageoises (ces derniers
contenant aussi des bois aménagés et exploités), les rois et seigneurs francs se réservant par la
suite l'usage de ces territoires. On aurait ainsi un croisement de sens intéressant entre foresta
« espace sauvage, en dehors du domaine cultivé », et sauvage, de l'ancien français salvage, du
latin silvaticus, « forestier ».