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historique de droit français et étranger (1922-)
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LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR RÉFÉRÉ
(1) L'auteur de cet article a bien voulu adapter pour la Revue , en la développant,
riatroductioo historique, en néerlandais, d'un livre qu'il a publié en 1947 : Het Kort
geding. Zwolle, W. E. J. Tieenk Willink, un vol. in-8° de vit-286 p. [N. D. L. R.].
(2) Conférez sur ce processus summarius la description la plus ancienne de Johannes de
Faseolis dans son De summariis cognitionibusy édité en 1928 par Wahrmund daps son
livre Quellen sur Geschichte des römUnh- kanonischen Processes im Mittelalter ,
IV. Band, V. Heft. Le traité de Johannes dé Faseolis est reproduit presque mot à mot dans le
Speculum judiciale de Durantis, lib. 1, part. I, tit. 9, § 8, et lib. IV, part. I, tit. I, § 9.
Comparez en outre, pour l'histoire du procès sommaire : le canon Saepe , Clem. De ver-
borum. signißcatione (Cl. V, 11, 2) et les commentaires y afférents; cf. aussi, Jo. Petrus
de Ferrarijs, Aurea Practica , tit. Forma, libelli in actione reali , in verbo Summa -
rie; Rebuffe, Tractatus de sententiis executoriis , à l'article 48 de l'Ordonnance de
Charles Vili, sub vocibus : « sommairement en matière de nouvelleté »; finalement, le
titre XVII de l'Ordonnance française de procedure civile de 1657 et les commentaires y
afférents.
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260 E. -M. MEIJEUS. [2 J
trionale (1) n'a pas plus son historien que le
Toulouse (2).
Le référé de Paris n'est pas mieux loti, q
rencontrées à ce jour avec les ordonnance
quer par l'origine peu systématique de cet
Le référé tire son origine de deux manière
aussi un champ d'application en dehors d
nance sur référé et le jugement ou ordon
première que la procédure parisienne doit
a décidé du caractère et de la façon de procé
2. - Les ofûciers judiciaires qui éprou
l'exercice de leurs fonctions, ou bien avaient la faculté de les décider
eux-mêmes, ou bien devaient faire un rapport de leurs constatations et
en référer au juge pour décision, de là le nom de rapport ou référé.
C'est ainsi que le Style des commissaires du xiv® siècle distinguait
entre les judices commissarii et les commissarii referendarii (3). Ces
derniers doivent leur nom au fait que curia mandat ipsis quod inqui -
rant et référant (4).
A Paris, pareil référé était d'usage, par exemple, lorsque le magistrat,
huissier ou commissaire, éprouvait des difficultés à l'occasion d'une
apposition de scellés (5) ou d'une question d'inventaire (6).
(1) Le « vlotvaardig recht » (=: droit flottable) est i' l'origine le droit spécial des marins
prêts à partir. Comparez avec ce droit flottable le velo levato de la lex de submersis, C., De
naufragiis (C., XI, 6, 5). A la fin du moyen âge, il est devenu une procédure abrégée pour
tousles cas d'urgence. Plusieurs villes de la Hollande septentrionale avaientleur « vlotrollen ».
Ceux de Horne surtout soat importants. Van der Vorm a édité et commenté une turbe
concernant le droit flottable dans son Rechtsgeleerde verhandeling over het vlotrechtvan
Westfriesland en No or d- H oliando 1743.
(2) Voir un exposé détaillé du soit-montré au xviii0 siècle dans Rodier, Questions sur
l'ordonnance de Louis XIV du mois d'avril 1667 , tit. XI, art. Il, qu. 2. Ce soit-
montré est 1res. voisin du référé parisien. Qu'on en juge : Toutes les matières provisoires,
celles qui ne tourh^nt pas au principal, comme les demandes en provision alimentaire, les
demandes en élargissement, les demandes en mainlevée provisoire d'une saisie, soit de la
part du débiteur saisi, soit de la part des tiers acquéreurs ; la demande en remise et vente
des fruits ou meubles saisis; les demandes en doublement ou tiercement des baux judi-
ciaires; les demandes en distraction de certains fonds saisis, si lávente par dèci et est déjà
Ordonnée ; les comptes des séquestres; les demandes concernant les réparations à faire aux
biens saisis; les demandes en liquidation d'intérêts; les exécutions des arrêts ou les con-
testations sur l'exécution des arrêts, et d'autres demandes de cette nature, peuvent être
jugées sur soit-montré (Rodier, loc. cit ., p. 157).
(3) Voir Enquêtes et procès, dans l'édition de Guilhiermoz, pp. 246 et 247, n°* 38r
39 et 40.
(4) Du Breuil, Stylus Parlamenti , t. XXVII, n08 1, 7, 9, 15, 17, 20, 46 et 48; Gui-
Ihiermoz, p. 246, n° 37 et p. 252, n° 68.
(5) Praticien du Ghâtelet de Paris , 1773, p. 581, n. 2 : « Lorsque l'officier n'a
point de caractère pour décider sur l'apposition, v. g. lorsque c'est un commissaire, etc.,
il doit en référer au juge du territoire, pour faire ordonner ce qu'il appartiendra... Le
(6) Voir la note page suivante.
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13] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR REFERE. 261
Ce qui était souvent appelé référé, est désigné ici comme rapport.
A côté de cela, à l'article 6 du même règlement, il est question des
ordonnances par provision.
4. - La procédure française a emprunté à la procédure romano-cano-
nique du moyen âge les jugements ou ordonnances de provision. Le
droit romain contient quelques textes allouant, comme mesure provi-
soire, à la charge de leur père ou grand-père, ou contre les héritiers de
ceux-ci, des aliments à ceux qui prétendent être légalement fils ou petit-
fils (1). Déjà dans ces textes il est déclaré que cette allocation ne peut
commissaire ayant statué sur l'opposition qu'il en sera référé à M. le Lieutenant civil, il se
transporte chez ce magistrat, qui, après avoir entendu son rapport et les dires des parties
qui comparoissent, ordonne ce qu'il juge convenable; son ordonnance doit être rédigée,
sur le procès-verbal même du commissaire, comme il se pratique dans tous les référés qui
se font à l'occasion des appositions et levées de scellés ». - Ibidem , p. 597, à la levée
de scellés : « S'il y a contestation sur ce choix (des notaires pour faire l'inventaire et d'un
huissier priseur pour la grisée et la vente), le commissaire surseoit et en réfère à M. le
Lieutenant civil, qui, après avoir entendu les parties, règle ce qu'il juge à propos suivant
les circonstances ».
(6) Ibidem , p. 605 : « Lorsqu'il arrive quelques contestations entre les parties, dans le
cours de l'inventaire, les notaires, qui ont encore moins de caractère que le commissaire
pour décider, doivent les renvoyer devant le juge : à Paris, M. le Lieutenant civil rend
son ordonnance dont il garde la minute, à la différence de celles qui émanent de lui, au
sujet d'un référé fait pendant le cours d'une apposition ou levée de scellés, lesquelles
£omme on a vu, se transcrivent sur Ih procès- verbal même du commissure ».
(1) D., V, 2, 27, 3 : « De inofficioso testamento nepos contra patruum suum vel
ulium, scriptum heredem pro portione egerat et optinuerat, sed scriptus heres appel -
laverai : placuit interim propter inopia>n pupilli alimenta pro modo facultatum ,
quae per inofficiosi testamenti accusationem pro parte ei vindicabantur , decerni
eaque adversarium ei subministrare necease habere usque ad finem litis ».
D., XXV, 3, 7 : « Si neget qui maritus fuisse dicitur matrimonium esse contr ac-
tum eo , quod earn quae se uxorem fuisse dicit ancillam esse probare paratus sit
alimenta quidem liberis praestare interim compel lendum, sin autem constiterit
earn servam fuisse , nihil ei, qui pascendos curavit , ex hoc praeiudicium generare
respondi ».
D., XXV, 3, 5, 8 et 9 : « Si vel parens neget filium idcircoque alere se non debere
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262 E. -M. MKIJERS. [4]
influencer la décision au principal :
rare (1).
Les ordonnances de provision étaient très nombreuses et variées dans
la pratique française du moyen âge. Mais leur origine s'est encore
longtemps décelée par le fait que l'allocation d'aliments était le cas le
plus fréquent parmi ceux dans lesquels le juge ordonnait une provision.
Dans l'ancien langage français, le mot provision ( provisio ), aussi bien
que le terme ordonnance (ordinatio), désigne une mesure du juge ins-
pirée non pas par les règles du droit positif, mais par des motifs d'équité
et d'efficacité (2). Plus particulièrement, on a voulu désigner par là une
mesure ayant un caractère provisoire. Du Breuil, qui, dans son Stylus
Parlamenti de 1330, a traité dans un court chapitre de provisione et
modo faciendi earn , ne la mentionne d'ailleurs qu'à propos de litiges
pendants. Au profit d'une veuve qui réclame sa dot ou son douaire, d'un
exécuteur testamentaire qui réclame les biens de l'hérédité, ou d'un fils
ou d'une fille qui introduit une hereditatis petitio pour obtenir son héri-
tage, on peut accorder une provision procurant à l'intéressé, au cours de
la procédure, les moyens de subsistance et les fonds nécessaires à sa
poursuite (3).
Jean Le Coq, dans ses Quaestiones , nousraconte un procès qu'il a plaidé
devant le Parlement en 1391 (4). D'abord, il n'avait pas demandé une
provision, bien que le cas le permît, parce qu'il concernait une succession
paternelle : quamvis caderet quia erat pro parte majori res conten -
contendat, vel filins neget parentem, summatim indices oportet super eare cognos-
cere ; si constiterit filium vel parentem esse, tunc ali iubebunt ; ceterum si non
constiterit , nec dt cement alimenta. Meminisse autem oportet, etsi pronuntiave-
rint ali opor tere, attamen earn rem praeiudicium non f acere veritati : nec enirn
hoc pronuntiatur filium esse, sed ali debere : et ita divus Marcus rescripsit ».
D., I, 6, 10 : « Si iudex nutrivi vel ali oportere pronuntiaverit, dicendum est de
veritate quaerendum , filius sit an non : ncque enim alimentorum causa veritati
facit praeiudicium ».
(1) Voir les textes D., XXV, 3, 7, D., XXV, 3, 5, 9 et D., I, 6, 10.
(2) Voir le Style de la Chambre des enquêtes du *ive siècle, édité par Guilhiermoz :
N° 134. « Circa hoc,prout occurrit, posset dici quod judicantes incuria sequuntur
in judie an do quandoque viamrigoris siv e juris, quando que e quitatem, quandoque
miscent equitai<m cum rigore , quandoque viam ordinacionis seu provisionis ex
aliqua causa smgulari, quandoque superaddunt rigorem rigori, ut est eciam sepe
dictum». N° 141. « Item, periculosum est multum judicare nisi bene audiverit quis
omnia et singula contenta in processibus, et impossibile ; ymo eciam, si diligenter
audiverit , difficile satis est facere judicium rigoris sive que procedunt per viam
juris communis, diffioilius judicium equitatis, difficilissimum judicium mixtum
rigore et equità te, et similiter procedere per viam ordinacionis seu provisionis ».
N® 165. « Idem dici potest ubi curia procedit per viam ordinacionis seu provisionis
quia non debet specifice apparere que causa movit dominos sic ordinantes, sed debet
ibi poni : ordinavit curia , et ex causa , tale quid , etc . ».
(3) Du Breuil, é<lit. Aubert, cap. XXXII, pp. 220-222.
(4) Questiones Johannis Galli , édition Marguerite Boulet, 1944, n° 241, p. 287.
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[õ] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR REFERE. 263
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264 E. -M. MEÍJERS. [6]
nances royales, Pierre Rebuffe a i
praejudicialibus seu provisionalib
tard, Jean Papon le suivit, avec une
Recueil ď arrests notables des cours souveraines de France, livre XVIII,
titre I.
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[7j LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SÛR REFERE. 2fi5
/En raison du caractère d'urgence, l'examen du cas n'était fait que som-
mairement (1). L'adjudication de la demande était complètement laissée
au libre jugement du juge (2). La sentence était toujours exécutoire par
provision et, pour la reconnaître comme telle, il était souhaitable de
dire, dans le dictum du jugement, que la sentence avait été donnée par
provision (3).
dos predecesseurs faisans mention des alimens, doiiaires, médicamens et autres provisions
demeurans en leurs forces et vertu » ; - celle de Louis XII à Blois, de novembre 1507,
article 222, identique à l'article 51 de l'ordonnance de 1493; - celle de François 1" à
Is-sur-Tille, d'octobre 1535, chap. XII, art. 13 : « Nos iuges pourront adiuger provision en
matiere de dot,, repetition d'icelle et plusieurs autres cas amplement contenus et declarez
en nos Ordonn. et lesquelles seront executees nonobstant l'appel, à caution selon nosd.
Ordon. ch. XVI, art. 23 : Ordonn. que toutes sentences baillées par maniere.de provision, par
nos juges ressortissans sans moyen, en matiere de dot ou repetition ďicelle ou doüairef
dation , etc., d'inventaire , reddition de compte de tutelle , interdiction , etc.-, de pas-
, sages et chemins en executions , de testamene , quand les executeurs de testament le
requerront^ pour les frais funeraux et pieux légats, enfaict de contraindre à rendre
compte les receveurs des communautez des villes des deniers de leurs receptes , res-
titution de depost contre le dépositaire , en recreance de prinse de bestes par iustice
et autres biens qui se consument en pasture et autrement par longue garde , d'ali-
mens, medicamens , loyers et salaires de serviteurs , de trois ans desdits serviteurs ,
soient lesdites matieres introduites en premiere instance ou par appel, et aussi en provi-
sions adiugees sur obligations receües sous seel royal ou provençal, ou de nous, seront
executees à caution, que sera tenu bailler celuv qui aura obtenu, nonobstant l'appel
interietté et relevé et sans preiudice d'iceluy. Et quant ausdils serviteurs en baillant par eux
caution, etc. force et vigueur » ; - celle de François Ier à Villers-Cotterets, d'août 1539,
art. 91 : « Que les sentences de provisions, d 'alimens et médicamens , données par les
juges subalternes jusqu'à la somme de vingt livres parisis seront executees nonobNtant
l'appel, et sans préjudice d'icelui, en baillant caution, comme de iuges royaux »; - celle
d'Henri II à Paris, de juin 15591, art. 14 : « Outre que toutes les sentences de nosdits pré-
vosts et chastelains provisoirement données en matière de dot, douaire , création de
tutelles et curatelles , confection d'inventaires , interdictions de biens à prodigues et
insensez, de réfection de ponts et passages , et tout ce qui dépend du fait et matière ,
de police , salaires et loyers , alimens et médicamens , à quelques sommes de deniers
qu'elles montent, de sequestre de chose roturière et non noble , où le cas requiert
prompte expédition, et que par lesdites sentences ne sera offensé ne diffamé l'honneur du
condamué, seront executoires nonobstant l'appel et sans prejudice d'icelui; le tout suivant
nos Ordonnances ès cas et charges y déclarez, excepté les sentences de fournissement, com-
plaintes, recréance et réintegrande, l'expédition desquelles nonobstant l'appel, nous vout
Ions, suivant nos anciennes ordonnances, estre seulement permise à nos juges ressortissans
immédiatement en nostredite Cour de Parlement ». - Ajoutez une note de Guénois, dans
La Conférence des Ordonnances royaux , 1610 (fol. 538 v°), à l'ordonnance de Louis XII ;
« Voy. 4 arrests cottez par Papon, liv. 15, tit. 4, où il interprète l'Ordonn. de Louys XII
avoir lieu, etiam pour doiiaire, combien qu'elle ne parle que de dot (arrest du 3 mars 1550),
et dit outre qu'elle s'entend en action personnelle. - P. G. ».
(1) Kebuffe, loc. cit., art. 1, glose 6 : « Summaria saltem cognitio in provisione requiri-
tur »; art. 3, glose 1, n° 14 : « Summarie haec provisio tractari et fieri debet, ne fame pereat
vidua et detur afflictio afflicto ». - Voir aussi Aeg. Bellamera, dec. 85.
(2) Kebuffe, loc. cit., Prae fatio, n° 30 : « Ego tarnen vidi semper provisionem concedi
arbitrio iudicis » ; Papon, loc. cit., n° 9 : « Toutesfois telle taxe provisionnelle est arbi-
traire aux juges ayant esgard à la qualité des parties et au doute du faict et de la
matiere ».
(3) Voir Rebuffe, loc. cit., Praefatio, n°141,et art. 3, glose 10; Papon, ¿oc. cit., n°19. - Je
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266 E. -M. MEIJERS. [8j
Rebuffe et Papon partent de la sup
est faite pendente lite principali e
demande définitive. Les praticien
demande principale : « et où la c
demande et requiers provision à moy
Néanmoins, à chaque état du proc
duite (1). Nulle part même, Rebuff
qufe le procès principal ne soit déj
personne laïque est blessée par un e
demande provisoire et la demande
par provision relève de la compéten
pale, de celle du juge ecclésiastiqu
rente alimentaire, à prendre sur
demanderesse, est admissible avant
l'héritier ne soit entamée (3).
Ordinairement, nulle provision ne
ment (4).
7. - u ressort de ce qui précède que la demande par provision n'était
pas caractérisée par ce qui était demandé. Le caractère provisoire se
manifestait par l'examen sommaire de l'afïaire, la liberté du juge d'or-
donner ce qu'il jugeait équitable et utile, et par le fait que l'ordonnance
ne restait valable que jusqu'au moment où un jugement était prononcé
par la voie normale.
Toutefois, l'on relevait déjà à l'époque une tentative à caractériser
la décision par provision par certaines qualités matérielles du dictum.
On trouve d'anciens jugements portant que la provision ne peut contenir
qu'une fraction déterminée de la demande principale (5). Et un arrêt
signale par ailleurs que le mot provision, dans la sentence ou ordonnance de provision
et dans Veocécution par provision, pour être des choses différentes, exprime la même
idée, c'est-à-dire une provision nécessaire par l'urgence du cas et seulement valable tant
qu'une décision sur le principal ou sur un titre exécutoire définitif n'est pas intervenue.
L'emmêlement de la sentence de provision et de l'exécution par provision est activé par
l'usage de décider dans le même jugement sur la provision et le principal; ce jugement
était alors exécutoire nonobstant appel, étant une sentence de provision.
(1) Rebuffe, loc. cit., Praefatio , n08 27 et 70 et glose 2t n° 14 et n°5; Papon, loc. cit ...
n°' 2 et 3. Voir aussi Joan. Gillus, quest. 234, citant un arrêt de 1391.
(2) Rebuffe, loc. cit., Praefatio, n° 32; Papon, n08 11 et 12, citant des arrets de
décembre 1533 et du 2 juin 1548. - Voir aussi l'arrêt cité par le même, n° 41, à la fin :
la Cour ordonne que les héritiers du vendeur jouiront, sans caution, pendant le procès,
par provision, et renvoie les parties sur le principal devant autre juge.
(3) Rebuflfe, loc. cit., art. 3, glose 1, n° 14 : « Aliquando adiudicata fuit provisio muiim
aDtequam haeres dęclarasset se baeredem; ...tamen ad provisionem mulieris capientur
pecuniae ex bonis haereditatis iacemis ». - Papon, loc. cit ., n° 42, et liv. 15, tit. 4, n° 15,
avec des arrêts du 11 décembre 1523 et du 9 décembre 1544.
(4) Papon, loc. cit ., n*B 36 et 41 (à la fin).
(5) Il en est ainsi décidé, surtout a propos d une demande d aliments contre une suces-
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|9ļ LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SÛR RÉFÉRÉ. 267
sion. Du Breuil, loc. cit., XXXII, 3, dit qu'habituellement un quart des revenus était
accordé comme aliments. Voir aussi Masuer, in rubr. De possessione , § Item et recre-
dentia. En sens contraire, Rebuffe, loc. cit., Praefatio , n° 30, et Pnpon, loc. cit ., n° 9 :
« souvent pour le tout, comme s'il est question de contrat, il doit, par provision, estre
entretenu pendant le proces. Et ainsi fut iugé par arrest du 3 juillet 1523 contre la vefve
de feu Jean Tessier ».
(1) Rebuffe, loc . cit., Praefatio , n° 134.
(2) Papon, loc. cit., n° 9.
(3) Dictionnaire de droit et de pratique, sub voce Sentence provisionnelle.
(4) A propos de la rescission : Charondas, Réponses, liv. 5, rép. 31 ; Boniface, t. II,
liv. 4, tit. 19, ch. 5. A propos du cas de faux : Expilly, Arrêts, arr. 33.
(5) Le Vest, arrêt 52; Bouchel, La bibliothèque ou thrésor du droit françois, sub voce
Provision, p. 1112, col. 2, n°47; Boniface, t. IV, liv. 9, tit. 4, ch. 10.
(6) De Ferrière, Dictionnaire , sub voce Provision : « Les provisions sont arbitraires
et elles sont plus ou moins fortes, suivant qu'il plaît au juge, qui doit les régler par rapport
à la qualité des parties et aux circonstances de fait ».
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268 E. -M. MEIJERS. [IO]
sion, à cohabiter avec son mari; il n'y
lorsqu'un ordre semblable serait donn
d'adultère (1). Gomme préjudice irrépa
l'exécution d'une contrainte par corps,
la honte découlant de la prison ne s
gent (2).
9. - L'ordonnance de 1667 pour les matières civiles ne s'est occupée
qu'incidemment des jugements provisoires. Au XVII® titre, articles 14 et
15, sont considérées comme jugements exécutoires nonobstant appel :
« les sentences de provision en toutes matières sommaires qui n'excéde-
ront la somme de mille livres », et « les sentences de provision s'il y a
contrats, obligations, promesses reconnues ou condamnatious précé-
dentes par sentences dont il n'y ait point d'appel ou qu'elles soient exé-
cutoires nonobstant l'appel ». L'article suivant, article 16, défend ensuite
à tous les juges d'enlever aux jugements mentionnés la force exécutoire
par une défense ou surséance. Enfin, l'article 17 stipule que quand la
provision et la cause définitive sont en état de procédure simultanément,
un seul et même jugement serarendu pour les deux (3).
10. - Ces prescriptions n'ont que peu influencé la pratique des pro-
visions à Paris. L'article 16 est même tout à fait tombé en désuétude (4).
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[llļ LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR REFERE. 269
Au Châtelet, il existait des règles propres pour la procédure qui ont été
codifiées par I'édit de 4685.
Selon l'article 13 de cet édit, les demandes provisoires, ainsi que les
demandes sommaires inférieures à mille livres, devaient être intentées
devant le Lieutenant civil, présidant la Chambre civile, qui tenait séance
chaque mercredi et samedi. Néanmoins, l'article 6 du même'édit permet-
tait, dans quelques cas urgents et spécialement énumérés, de s'adresser
au Lieutenant civil et d'obtenir ainsi une comparution des parties le
jour même dans son Hôtel, après quoi le Lieutenant civil pouvait
ordonner par provision ce qu'il estimait juste :
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270 E. -M» MKIJERS. [42]
pour le Châtelet de Paris, art. 6 et 7; l'a
rendu pour le présidial d'Angoulême, a
même année, rendu pour le présidial d
nouveau Recueil , t. I, p. 553 et t. II, p.
41. - La procédure à l'Hôtel du Lieute
une innovation, créée en 1685. En effe
de Parlement pour la taxe des dépens ad
sous le chef Châtelet :
Pour les référés qui se feront au Lieutenant civil hors la vacation, sera
taxé au Procureur : 3 livres.
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f 13 j LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SÛR REFERE. 271
Encore en 1740, Cl.-J. de Ferrière, dans son Dictionnaire de droit et
de pratique , ne donne au référé que son sens originel :
Référé est le rapport d'un incident qui s'est formé dans le cours d'un
acte judiciaire, lequel requérant célérité, doit être préliminairement décidé
par le juge en son Hôtel, après avoir ouï les raisons de part et d'autre.
Par exemple, quand un sergent qui a fait une saisie et exécution de
meubles refuse de prendre pour gardien celui qui lui est présenté par le
débiteur, il donne assignation au débiteur par devant Monsieur le Lieute-
nant civil en son Hôtel, à deux heures de relevée le même jour, pour en
voir ordonner (1).
Pour Denisart, lui aussi, seul l'article 9 de l'édit de janvier 1685 règle
le référé devant le juge du Châtelet :
3. - Au Châtelet, les référés se font en l'Hôtel du juge et non à l'au-
dience, suivant l'article 9 de l'édit du mois de janvier 1685 ; et lorsque c'est
le cas d'en faire, le procès-verbal du commissaire doit indiquer le jour et
l'heure que se fera le rapport ou référé , afin que les parties puissent s'y
trouver, soit en personne, soit par procureur, pour expliquer leurs raisons.
i
(1) Loc. citãJ sub voce Référé. - Voir é^ilemant le même, ai mot Lieutenant civil :
« Il faut se pourvoir en son Hôtel pour tout ce qui requiert célérité. Par exemple, c'est lui
qui règle les contestations arrivées à l'occasion des scellés, inventaires, etc., et le rapport
qui lui en est fait s'appelle communément Référé ». Voir aussi Ch. Desmarqueis, Nouveau
stile du Châtelet de Paris, 3e édit.. 1746, pp. 258 et 292.
(2) Collection de décisions nouvelles et de notions relatives à la jurisprudence
actuelle , t. IV, sub voce Référé.
(3) Loc. cit.% n° 4 : « L'usage est encori au Châtelet d'éirire, sur le procès-verbal
même du commissaire qui procède au scellé, l'ordonnance que M. le Lieutenant civil rend
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272 E. -M. MBIJERS. [l4ļ
appel parce qu'elles n'ont pour objet
Dans le cours du scellé un référé dans la
si un référé a lieu, celui-ci est traité à l
Ainsi également quand un huissier r
d'une saisie exécutoire, il doit soumet
de référé et indiquer à la partie le
prendre ses conclusions et auxquels le
En matière de référés, le juge du lieu
le titre XXIII, article 5, de l'ordonnance
a lieu à un endroit situé à proximité
exécuté, il appartient plutôt au jug
référer (4).
43 - C'est à partir du temps de Pige
de 1773, la procédure au Châtelet, qu
sens plus général, pour désigner aus
l'article 9 de l'édit de 1685 que les dem
fusion des deux en une rubrique, les r
le cours de la procédure était pareil.
à comparaître immédiatement ou à un
civil, des conclusions des parties prise
men sommaire du cas, suivi d'une déc
une ordonnance (5). A côté de ces an
différence importante : à la demande
définitive, sans qu'elles se distinguas
était de caractère procédural : elle rés
d'instruire la cause, les différents m
statuer, et dans le différent effet du j
provisoire, étaient décisifs la nécessité
l'efficacité de la mesure demandée et le résultat d'un examen sommaire
de l'affaire. Sur la demande définitive, on procédait d'après des règles
sur les référés qui lui sont faits, dans ces cas Jà sans qu'il soit besoin du ministère du
greffier ».
(1) Loc. cit., n# 5.
(2) Loc. cit., n08 6 et 7. - Voir également Denisart, sub voce Scellé , n° 65 : « S'il y
a contestation pour cette nomination, elle se décide comme toutes les autres qui peuvent
survenir relativement à l'inventaire dans le cours du scellé, c'est-à-dire sur-le-champ et par
provision, si c'est un juge qui procède à la levée des scellés; ou par la voie du référé, si
l'officier qui lève les scellés n'a pas caractère pour juger ».
(3) Loc. cit., n° 8.
(4) Loc. cit., n° 12.
(5) Lorsqu'un huissier rencontrait des ditticultés d execution, I ordonnance n était pas non
plus écrite, du temps de Pigeau, au-dessous du procès-verbal de l'huissier; mais le Lieu-
tenant civil dressait procès-verbal de la séance, sous lequel il mettait son ordonnance. Voir
Pigeau, Procédure civile, I, 615, et Praticien , p. 431, n. 3.
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[I5j LB DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR REFERE. 273
de droit fixes; le juge déterminait les droits des parties après une ins-
truction aussi approfondie que possible; le jugement dans l'instance défi-
nitive enlevait à l'ordonnance provisoire tout effet pour l'avenir. Par
contre, au différend constaté dans un rapport d'un officier judiciaire on
opposait l'instance au fond, avec une différence matériellej ils se faisaient
face comme incident et comme principal point de litige. La décision sur
l'incident n'avait pas un caractère provisoire, en ce sens que l'incident
pouvait encore faire l'objet d'une procédure normale (1). Elle était pro^
visoire seulement parce que la décision sur le fond invalidait la décision
sur l'incident. C'est pourquoi le jugemeut du Lieutenant civil dit, à
propos de cesTéférés : « Au principal renvoyons les parties à l'audience
et cependant ordonnons, etc..., ce qui sera exécuté nonobstant et sans
préjudice de l'appel ».
Le référé était prédestiné ainsi à une procédure ballottée : d'un côté on
ne voyait que des différences procédurales entre un jugement par provi-
sion et le jugement principal; de l'autre côté, on faisait une difïérence
matérielle entre l'objet d'une demande en référé et celui d'une demande
principale.
14. - Pigeau, ayant vingt trois ans, fit paraître en 1773 son Praticien
du Châielet de Paris et de toutes les jurisdictions ordinaires du
Royaume . C'était le premier manuel utile aux avocats, procureurs et
huissiers du Châtelet. Six ans plus tard, il refondit cet ouvrage de jeu-
nesse et l'édita en deux volumes : La procédure civile du Châtelet de
Pariset de toutes les jurisdictions ordinaires du Royaume , ouvrage
qui connut en 1787 une deuxième édition augmentée. Sous le règne de
Napoléon, Pigeau fut d'abord membre de la Commission de rédaction du
Gode et plus tard professeur à Paris. Pendant ce professorat, il écrit
encore deux nouveaux manuels de procédure. Le premier, intitulé Pro-
cédure civile des tribunaux de France , dont la première édition date
de 1807, suit, en ce qui concerne la classification et l'exécution, autant
que possible son ouvrage de 1779. Le second, qui parut après sa mort en
1827, portait comme titre : Commentaire sur le Code de procédure
civile ; cet ouvrage, expliquant le Code article par article, ne donne
(1) Ainsi, par exemple, lorsqu'en référé une ouverture de portes est ordonnée, Pigeau,
Procédure civile du Châtelet de Paris , 1779, donne la conclusion suivante et la décision
en référé y conforme : « Pour voir dire qu il sera procédé à la saisie-exécution de ses
meubles et effets, à l'effet de quoi, tenu ledit sieur Pierre de faire ouverture, t;«nt de la
porte d'entrée de son logement sus-désigné, que des portes, coffres, c mmcies, armoires et
autres meubles et endroits fermant à clef étant en dedans dudit logement; sinon, permis
audit sieur Paul de les faire ouvrir par un serrurier, en présence du premier Commissaire
requis et de deux voisins, en la manière accoutumée; comme aussi tenu ledit si^ur Pierre
de donner bon et solvable gardien des meubles et effets qui seront saisis, sinon, permis à
l'huissier qui procédera à ladite saisie-exécution, d'établir un de ses assistans aux frais
dudit sieur Pierre, pour y rester jusqu'à la vente » (t. I, p. 614).
Rev. hist. - 4* sér., T. XXV. 18
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274 E. -M. MEIJBRS. [46 J
presque rien qu'on ne peut déjà trouver
part une comparaison des articles avec l
rédaction.
Les observations consacrées par Pigeau au référé se retrouvent déjà,
pour la plupart, dans son ouvrage le plus ancien, le Praticien du Chd-
telet. Dans la Procédure civile du Châtelet il ne cite que quelques cas
nouveaux dans lesquels un référé pouvait avoir lieu, ainsi que quel-
ques formules relatives au référé.
15. - Pigeau parle d'un référé et d'une assignation en référé, aussi
bien en cas de jugement par le Lieutenant civil de difficultés survenues
pendant des opérations judiciaires - par exemple, la non-ouverture de
portes ou cotîres en cas d'une saisie-exécution (1); l'opposition à la
saisie par le débiteur, la femme de celui-ci ou une tierce-personne (2);
l'opposition faite à une saisie revendication (3) ; des difficultés en cas
d'un inventaire (4) ou d'un scellé (5), - que dans les cas exigeant une
décision provisoire et mentionnés dans l'article 6 de l'édit de 1685 (6),
On voit clairement que cet auteur s'efforce de ne considérer les cas de
l'article 6 que comme des exemples.
Ainsi, il donne comme règle générale :
Toutes les fois qu'un cas requiert célérité, au point que l'on ne peut,
sans courir de risque, s'en tenir à demander seulement permission d'assi-
gner au premier jour d'audience, pour faire décider sur ce cas il faut avoir
recours à l'autorité du juge, qui peut, en sa maison ou son Hôtel, statuer
provisoirement ce qu'il jugera convenable, en attendant que l'on puisse
faire décider définitivement sur le différend à l'audience (7).
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I 17] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR RÉFÉRÉ. 275
pour dettes (1), etc. D'autre part, il ue néglige pas les restrictions qtie
comporte l'article 6 : pour les dettes ¿étrangers, non mentionnées dans
l'article, le recours du référé ne s'ouvre pas (2); pas davantage en cas
d'opposition à la contrainte par corps de marchands faite à un jour où
l'on n'entrait pas au Châtelet (3).
16. - Le référé commençait par une assignation en référé à l'heure du
jour môme ou du jour suivant, indiquée par le Lieutenant civil du Châ-
telet.
L'opinion de Denisart, selon laquelle l'application de l'article 6 de l'édit
nécessite toujours une requête préalable au Lieutenant civil, suppliant la
permission d'assignation, n'est pas acceptée dans le cas où on n'a pais le
temps d'attendre réponse à la requête (4). Etant donné que l'article 6 est
rédigé en des termes généraux, la demande provisoire devant le Lieute-
nant civil du Châtelet est également permise quand, pour la demande
définitive, un autre juge est compétent, par exemple le Prévôt des mar-
chands (5). Et puisque l'article n'en fait pas mention non plus, il n'est
pas exigé que la cause principale soit déjà pendante (6). D'un autre côté,
la litispendance du principal n'empêche pas un référé. L'auteur cite une
ordonnance sur référé du 14 avril 1770 dans laquelle, après opposition à
un jugement d'expulsion par défaut, l'expulsion fut ordonnéesurréféré(7).
La comparution par procureur est usuelle, mais pas nécessaire (8).
L'instruction de la cause se fait sommairement (9). Lorsque le Lieute-
nant civil a entendu dans son Hôtel les parties ou la partie comparante,
il statue par une ordonnance sur référé(lO). Ces ordonnances sur référé
sont exécutables nonobstant appel (14) et, parce que l'édit n'en souffle
mot, même sans qu'un cautionnement soit nécessaire (12).
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276 E.-M. MEIJERS. [48]
Les ordonnances rendues sur référ
tibles d'opposition (1). Par contre, la
juge d'appel un arrêt de défense, c
avant que l'appel soit décidé (2). Pou
nance sur référé est analogue à celui
Elle n'a aucune influence sur la pro
dience ordinaire : « La décision que l
que provisoire et ne touche point au fo
il ne peut juger qu'à l'audience; à l'ef
suivant un arrêt de règlement du leř f
17. - La Procédure civile de Pigea
illustrent l'action du référé au xvme siècle.
Il donne le modèle suivant d'une requête ayant pour but de pouvoir
assigner en référé :
A Monsieur le Prévôt de Paris ou Monsieur le Lieutenant civil.
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f 49] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR RÉFÉRÉ. 277
tailleur d'habits à Paris, lequel nous a dit qu'en vertu de notre ordonnance
sur requête de ce jourd'hui, il a fait assigner à comparoir en notre Hôtel
par-devant nous, heure présente, le sieur Pierre, bourgeois de Toulouse,
pour voir dire que par provision ce dernier seroit tenu, sur la signification
de noire ordonnance à intervenir, de lui payer la somme de 300 livres pour
fournitures d'habits par lui faites audit sieur Pierre et que ce dernier avoit
promis de lui payer aussitôt la livraison, sinon qu'il y seroit contraint par
les voies ordinaires de droit, en vertu de notredite ordonnance; et allendu
qu'il est six heures sonnées, que ledit sieur Pierre n'est comparu ni per-
sonne pour lui, nous a requis défaut et pour le profit qu'il nous plût lui
adjuger ses conclusions, et a signé... Signé...
Desquels dire, comparution et réquisition avons, audil Me A..., audit nom,
donné acte; et après avoir entendu B..., procureur du sieur Pierre, au
principal avons les parties renvoyé dans les délais de l'ordonnance; et
cependant, attendu que le sieur Pierre est étranger en cette ville, ordonnons
que par provision il sera tenu de payer à la partie d'A... la "somme de
300 livres pour les fournitures d'habits en question, et ce, sur la significa-
tion de notre ordonnance, sinon, disons qu'en vertu d'icelle, il y sera con-
traint par les voies ordinaires de droit. Ce qui sera exécuté nonobstant
l'appel et sans y préjudicier. Signé... (1).
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278 K.-M. MEIJBRS. [20]
Après permission, ajournement et com
tence suivante fut rendue :
18. - Si l'on consulte dans les archives du Ghàtelet les minutes et les
brouillons des ordonnances sur référé dans la deuxième moitié du
xvme siècle, on trouve que les différends d'exécution, de scellés et d'in-
ventaires - les référés au sens originel - dominent encore fortement*
Le Lieutenant civil faisait déjà usage, pour les difficultés d'exécution, de
formules imprimées, contenant un procès-verbal de la demande, au-
dessous de laquelle la décision judiciaire était également imprimée. Res-
taient seulement à remplir quelques données variant toujours, comme les
dates et noms des parties, et le Lieutenant civil pouvait signer la sen-
tence.
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[2i] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR RÉFÉRÉ. 279
Est comparu dame Angélique- Viel oire Chastelain, épouse de Mre Jacques
de Laloue, chevalier, seigneur Dumasgelier, authorisée par nous à la pour-
suite de ses droits, assistée de M® Nicolas Allix Le..., son procureur,
laquelle nous a dit qu'elle comparait pour satisfaire à notre ordonnance
étante au bas de sa requête affin de separation de corps, à nous présentée
le 26 février dernier; qu'en exécution d'icelle a fait assigner par exploit
fait par Lemoyne, premier huissier-audiencier des eaux et forest de la
Haute Marche, le 7 de ce mois, controllé à Sallagnac- Bourg le 8, ledit sieur
Dumasgelier, son mary, à comparoir ce jour d'huy, lieu et heure, par-
devant nous pour être les parties entendus en présence l'une de l'aulre sur
les faits portés en saditte requête; qu'à son égard elle persiste pleinement
en iceux et en cas de dénégation demande à être authorisée à en faire
preuve tant par titres que par témoins; requiert deffaut contre ledit sieur
son mary dans le cas où il ne comparaitroit pas et, au surplus, qu'à reflect
de se faire adjuger les conclusions par elle prise en saditte requête dans
lesquelles elle persiste également, requiert qu'il vous plaise renvoyer les
parties à l'audience, sous la réserve de tous les droits et "actions. Et ont
signé :...
De laquelle comparution et dire nous avons donné acte, et après avoir
entendu ladite dame Dumasgelier, laquelle a persévéré dans ses faits, et
Pilon, substituant Beguier, procureur dudit Sr Dumasgelier, lequel pour
sa partie a soutenu laditte dame Dumasgelier non recevable dans sa
demande et dans les faits par elle allégués.
Pour estre fait droit renvoyons les parties à l'audience, les fins de non-
recevoir jointes aux deflenses au contraire.
Et cependant laditte dame Dumasgelier continuera de demeurer chez
ladite Lebrun, sa tante, jusques à ce qu'il en ait été aultrement ordonné,
ce qui sera exécuté nonobstant et sans préjudice de l'appel (2).
(1) Les deux séries de registres se trouvent parmi les registres du Châtelel, conservés
aux Archives nationales (Y 7979 8217, minutes de référés, 1681-1791; Y 821<8247, brouil-
lons, 1777-1790).
(2) Une même provision pouvait être aussi ordonnée au cas où le mari intentait une
telle d< mande. Voici un exemple tiré du Registre des brouillons : Décision du 13 août
4777 (Cochon v. Cochon) :
« ...à l'audience.
Et cependant la femme tenue de se retirer dans tel couvent, communauté ou maison
qui sera choisi par le mary et par nous approuvé, à l'effet de quoy le mary *e retirera par
devers l'ordinaire pour luy être indiqué un couvent ou communauté où la femme puisse
êtjre reçue, sinon choisira telle maison ou pension qu'il jugera convenable; ei fera assigner
par-devaDt nous saditte femme pour être ordonné sur le choix dudit couvent, communauté
ou maison ce qu'il appartiendra. »
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280 E.-M. MEIJERS. f 22 Ì
Et voici le dispositif du 31 octobre 179
Nicolet v. Ballot pour les administrateu
sieur :
...Au principal à l'audience.
Et cependant disons que le bail fait entre les parties sera exécuté sui-
vant sa forme et teneur. En conséquence, les parties de Ballot tenues de
vuiiier la salle dont il s'agit, sinon la partie de Chiquard autorisée à les
expulser et à faire mettre leurs efïets sur le carreau ou à lés faire séques-
trer, à l'effet de qnoy^et encor de refus d'ouverture de portes, disons
qu'elle serait faite par un serrurier en présence de deux voisins et du
premier commissaire requis, lequel, si besoin est, constatera l'état des lieux
par récolement sur l'état dressé eptre les parties.
Et néanmoins disons qu'il sera surcis à l'expulsion jusque au sept janvier
prochain, auquel jour lesdites parties de Ballot seront tenues de vuider
les lieux, pendant lequel tems lesdites parties de Ballot continueront de
jouir de ladite salle.
Sur la demande anfin de dommages-interêts de la partie de Chiquard
par elle formée incidam ment, renvoyons les parties à l'audience, les droits
et défenses au contraire de la partie de Ballot réservées.
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[23] LE DÉVELOPPEMENT DES ORDONNANCES SUR REFERE. 281
du différend mais une mesure pour faire face aux nécessités du moment.
Par le renvoi du principal à l'audience ordinaire, on enlevait pour ainsi
dire à l'ordonnance le caractère de jugement du différend, et ainsi la
liberté du juge ordinaire de juger sans restriction était mise hòrs de
doute (1).
20. - Pour connaître le caractère véritable d'une ordonnance par pro-
vision, il suffit encore aujourd'hui de relire la remarque faite par Marc-
Aurèle, le premier qui ait constaté qu'une provision ne peut pas faire
préjudice au principal. Lorsqu'on lui demanda si, dans une demande
provisoire d'aliments le juge peut s'occuper de la question dela paternité
au cas où le défendeur nie que le demandeur soit son fils, l'empereur
répondit ainsi :
« Si vel parens negetfilium idcircoque alere se non debere contendat,
vel filius neget parentem, summatim iudices oportet super ea re
cognoscere ; si constiterit filium vel parentem esse, tune ali iubebunt,
ceterum si non constiterit, nec decernent alimenta. Meminisse autem
oportet , etsi pronuntiaverint alioportere, attamen earn rem praeiudi-
eium non f acere veritati; nec enim hoc pronuntiatur , filium esse , sed
ali debere » (D., XXV, 3, 5, 8 et 9).
Voilà le sens exact de la formule employée encore aujourd'hui par l'ar-
ticle 809 du Gode de procédure civile : « ne faire pas préjudice au prin-
cipal ». Pendant toute l'histoire de la provision en France on a donné le
même sens à cette expression. Seulement, au xixe siècle, la jurisprudence
a commencé à défendre aux juges de référé de faire usage des motifs qui
ont rapport à la demande principale. Tout de même le sens réel de l'ex-
pression ne s'est jamais perdu tout à fait. Il y a toujours eu une minorité en
France pour soutenir que l'article 809 du Code de procédure civile, pres-
crivant que les ordonnances de référé ne font aucun préjudice au prin-
cipal, signifie que le juge du principal n'est pas lié par ce qui a été décidé
en référé, que la question de droit ne peut pas être décidée en référé,
mais que rien n'empêche le juge du référé d'examiner sommairement
cette question afin d'utiliser le résultat de cet examen pour motiver son
ordonnance (2).
Notre étude historique renforcera peut-être l'opinion de cette minorité.
Ley de. E.-M. Meijers.
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