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Quand l’agriculture produit

notre gaz
PICARDIE
À Senlis, une part du gaz consommé par les habitants vient du méthaniseur à la
sortie de la ville. Il est l’œuvre d’agriculteurs qui transforment la matière
végétale en gaz naturel.
(/node/653a88d6f0b0d)

Par Pascal Mureau (/517/dpi-authors/pascal-mureau)


 Temps de lecture: 4 min
Journaliste
Publié: 29 Avril 2018 à 17h11

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I
ci ou là, s’élèvent des protestations en pleine campagne. Pourtant, produire du
gaz à partir des déchets de l’agriculture est une idée bien acceptée. Alors que le
gouvernement vient d’annoncer une simplification des procédures, la
méthanisation a même de beaux jours devant elle. « Il n’y a pas une seule périphérie
de ville où des agriculteurs ne sont pas déjà en contrat avec GRDF. Il s’agit
généralement d’un groupement de trois ou quatre exploitants avec 1 000 hectares
de grandes cultures », résume Pierre-Henri Roland, céréalier dans le sud de l’Oise.

À 38 ans, l’agriculteur fait partie de cette nouvelle génération qui mise sur la « green
economy » à la française. « Peu de temps après être revenu dans la ferme familiale,
j’ai vite compris que nous sommes très dépendants des banques, des aides
européennes et des cours mondiaux », explique l’intéressé. En 2014, ils sont quatre
céréaliers, Pierre-Henri Roland à leur tête, qui décident de se diversifier en créant
d’emblée l’un des plus gros méthaniseurs de France. En bordure de l’autoroute A1 à la
sortie de Senlis, l’énorme digesteur, à 600 mètres du plus proche voisin, passe
inaperçu. D’autant que les odeurs redoutées ne sont pas au rendez-vous.

Il y aura bientôt un an, le 29 août 2017, la société Valois-Energie envoie son premier
gaz dans le réseau de Senlis. « Notre objectif initial était de produire 200 m3/heure,
correspondant à la consommation estivale de la ville », explique Pierre-Henri
Roland. Après un agrandissement du site, les quatre actionnaires, qui ont investi 6
millions dans l’affaire, espèrent passer d’ici la fin de l’année à 400 m3/heure. Ainsi
leur installation couvrirait également une partie des besoins de Chantilly.
Actuellement, les deux communes sont dépendantes du gaz fossile de Norvège. La
méthanisation a donc pour conséquence de réduire la facture énergétique
française.

De la pulpe de betterave

dans les tuyaux


En arrivant sur le site, on est frappé par la présence de mini-falaises recouvertes de
bâches. Ce sont les matières végétales concassées, maïs, seigle, pulpe de
betteraves, qui finiront chauffées à 40º dans le ventre du digesteur, une citerne
colossale de 6 000 m3, soit environ deux bassins olympiques. À chaque jour, ses
arrivages de matières premières. Mais la recette moyenne est composée de 15 % de
maïs ou de seigle en cultures dédiées, 30 à 40 % de CIVE (cultures intermédiaires
non comestibles entre deux récoltes), encore 30 à 40 % de pulpes de betteraves ; le
reste sont des déchets des fermes ou des conditionneurs qui ne savent que faire
des oignons ou des pommes de terre impropres à la vente.

« Il y a encore quelques années, notre coopérative agricole payait 70 euros la tonne


pour se débarrasser des poussières de blés, orge ou colza. Aujourd’hui, le
méthaniseur paye pour les avoir », résume Pierre-Henri Roland. À la fin de chaque
cycle, les digestats de la méthanisation sont réutilisés comme fertilisants pour les
surfaces agricoles. La boucle est bouclée.

Valois-Energie songe désormais à créer une station de gaz naturel pour véhicules
(GNV). Les nombreuses plateformes logistiques alentour pourraient être ses
premiers clients.

PASCAL MUREAU

Les Hauts-de-France, terre de méthanisation

Selon le recensement de la Chambre régionale d’agriculture, les Hauts-de-France


comptent déjà 25 unités de méthanisation agricole en production. À ce jour, quatre
sites, notamment à Senlis (Oise) et Epaux-Bézu (Aisne), injectent directement le
biogaz dans le réseau local de gaz naturel. Les autres unités fonctionnement selon
le mode de la cogénération, consistant à produire de l’électricité et de la chaleur. À
Soyécourt (Somme), l’endiverie avait été l’une des premières exploitations, en 2014,
à utiliser ses déchets pour couvrir ses besoins en chauffage et en éclairage. « On a
essuyé les plâtres au niveau mécanique. Depuis, des progrès ont été faits », note
Marthe François, en charge de la gestion du site. En revanche, à Drucat (Somme), le
méthaniseur de la « ferme des 1 000 vaches », qui devait fonctionner à partir des
bouses, n’a jamais été construit. Alors que la société subit plusieurs procédures
juridiques, le dossier est en « stand-by ». À noter que le Pas-de-Calais et le Nord
sont de loin les départements qui ont vu éclore le plus de ces centrales biogaz.
Selon la Chambre d’agriculture, neuf nouveaux projets sont en voie d’achèvement,
également dans l’Aisne et l’Oise.

Poursuivez votre lecture sur ce(s) sujet(s) :

Agriculture(/650/iptc/agriculture) Gaz naturel(/8143/iptc/gaz-naturel) Ressources naturelles(/3084/iptc/ressources-naturelles) Senlis (Oise

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