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 98-070-A-05

Sémiologie cutanée夽
A. Kieny, D. Lipsker

Résumé : En dermatologie, tout comme dans les autres disciplines médicales, le diagnostic repose sur
l’interrogatoire, l’examen physique et parfois certains examens complémentaires. Cependant, du fait de
l’accessibilité directe de la peau à l’inspection et à la palpation, le nombre de maladies à expression
cutanée est très grand et, plus qu’ailleurs, l’examen physique joue un rôle considérable.
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Mots-clés : Examen clinique ; Peau ; Lésions élémentaires ; Arrangement ; Distribution ; Morphologie

Plan  Démarche diagnostique


■ Introduction 1 L’examen dermatologique doit se faire sous un bon éclairage. Il
■ Démarche diagnostique 1 inclut l’examen de toute la peau, des phanères (cheveux, ongles,
■ Reconnaître les lésions élémentaires 2
dents) et des muqueuses. Trois niveaux d’observation, dans l’ordre
Est-ce que la lésion est palpable ? 2
de priorité suivant, doivent être précisés (Tableaux 1 et 2) [2, 5–10] :
Est-ce que la surface de la peau est normale ? 6
• la distribution des lésions : elle domine le raisonnement diag-
Est-ce que la consistance de la peau est normale ? 6
nostique. La discussion diagnostique devant une éruption
Lésions intriquées 7
généralisée est différente de celle d’une lésion unique, indépen-
damment de leur arrangement ou de leur nature. La distribution
■ Autres signes 7 peut parfois suggérer le mécanisme lésionnel (exemple : photo-
■ Signe fonctionnel : prurit 7 distribution) ;
■ Conclusion 7 • l’arrangement des lésions entre elles : c’est un élément parfois
déterminant qui, lorsqu’il est particulier (exemple : linéarité,
annularité), est souvent plus informatif que la nature des lésions
élémentaires. La plupart des lésions linéaires sont provoquées
par des agents exogènes, dont le malade peut avoir connais-
 Introduction sance ou non (exemple : phytophotodermatose) ;
• la nature et les caractéristiques de la (ou des) lésion(s) élémen-
En dehors de rares maladies se manifestant exclusivement par taire(s) : ce sont les éléments déterminants dans tous les cas où
du prurit, un signe fonctionnel spécifique de l’appareil tégumen- la distribution et/ou l’arrangement des lésions ne sont pas suf-
taire, toutes les maladies dermatologiques donnent des signes fisamment discriminants pour poser un diagnostic d’emblée. Il
physiques. Néanmoins, les modes de réponse de la peau aux dif- faut alors décrire le plus précisément ces lésions. Le rôle essen-
férentes maladies et aux traumatismes qu’elle subit sont limités. tiel de l’interrogatoire est souvent sous-estimé dans les traités
Toutes les affections qui touchent la peau se manifestent ainsi de dermatologie. L’interrogatoire doit s’efforcer de préciser la
par un nombre limité de lésions, définies par leurs caractéris- date de début, la localisation des premières lésions, l’extension
tiques comme la consistance, la taille, la forme, le relief ou la et/ou les modifications, la présence de signes fonctionnels cuta-
couleur [1–3] . Ces modifications sont appelées les lésions élémen- nés (prurit, douleur, etc.) et extracutanés, les circonstances
taires et il s’agit des lésions les plus simples auxquelles on peut déclenchantes, les diagnostics antérieurement proposés et les
ramener les diverses affections cutanées et à l’aide desquelles traitements déjà appliqués. En raison du nombre important de
on peut les décrire [3, 4] . Ces lésions élémentaires constituent la dermatoses liées à l’environnement (eczéma de contact, mor-
terminologie dermatologique sine qua non pour décrire une mala- sure d’insecte, brûlure solaire, toxidermie, etc.), les conditions
die cutanée. Pour être classée en lésion élémentaire, une lésion de survenue des lésions, les conditions de travail et au domicile,
doit pouvoir être identifiée facilement sans être confondue avec l’horaire des lésions (par rapport au travail, à l’alimentation,
une autre. Cependant, l’identification exacte des lésions élémen- etc.) ainsi que la chronologie des prises médicamenteuses
taires et le recensement de toutes les lésions présentes nécessitent sont souvent des informations anamnestiques capitales. Il faut
un œil entraîné. L’association de certaines lésions élémentaires également garder à l’esprit que pratiquement toutes les mala-
constitue de véritables syndromes. Enfin, il ne faut pas perdre dies peuvent être responsables de manifestations cutanées, qui
de vue que les lésions cutanées peuvent être évolutives et chan- peuvent parfois les révéler. Cela implique de tenir compte de
ger, et qu’une même maladie peut en comporter différents types. l’ensemble des antécédents et des autres signes cliniques (don-
Ainsi, dans la varicelle par exemple, les lésions élémentaires sont nées d’interrogatoire et d’examen physique) dans l’élaboration
vésiculeuses, de distribution cutanéomuqueuse, sans configura- du diagnostic. Enfin, l’accessibilité immédiate de la peau à la
tion remarquable, évoluant vers l’ombilication et la formation de biopsie permet une démarche anatomoclinique dans toutes les
croûtes. situations où le diagnostic ne s’impose pas d’emblée.

EMC - Dermatologie 1
Volume 25 > n◦ 4 > novembre 2023
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0319(23)48531-7
98-070-A-05  Sémiologie cutanée

 Reconnaître les lésions


élémentaires “ Point fort
Reconnaître les lésions élémentaires est une chose facile pour • Un bon éclairage est essentiel pour un examen derma-
l’œil entraîné du dermatologue, mais peut être une tâche difficile
pour le médecin non habitué à l’examen de la peau. On peut tou- tologique.
tefois correctement les identifier en répondant aux trois questions • Il faut examiner toute la peau, les muqueuses, les che-
suivantes (Fig. 1). veux et les ongles.
• L’interrogatoire est très important en dermatologie,
même si l’examen physique permet parfois un diagnostic
Est-ce que la lésion est palpable ? immédiat. La peau étant l’interface avec notre environne-
Lésion non palpable : macule ment, les dermatoses de cause exogène sont fréquentes
Lorsque la lésion n’est pas palpable, il s’agit d’une anomalie
et seule l’anamnèse permet d’en déterminer l’agent étio-
exclusivement visible, le plus souvent une modification locali- logique.
sée de la couleur de la peau. Ces lésions s’appellent des macules • De nombreuses maladies « internes » peuvent avoir une
(Fig. 2). On les distingue en fonction de leur couleur. Les macules expression cutanée. Dans certaines situations, il est donc
rouges méritent une mention particulière. L’érythème est une essentiel de tenir compte des signes extracutanés et des
antécédents.
Tableau 1.
Éléments de description d’une dermatose.
- Distribution des lésions
rougeur localisée ou diffuse de la peau, s’effaçant à la vitropres-
- Arrangement des lésions
sion, c’est-à-dire lorsqu’on exerce une pression avec un objet
- Identification de la lésion élémentaire
transparent pour chasser le sang des vaisseaux dermiques super-
- Couleur de la lésion
- Taille de la lésion
ficiels. Il peut être permanent, paroxystique, réticulé (livedo) et
- Forme, disposition et contour de la lésion parfois bleuté (érythrocyanose). La couleur varie du rose pâle
- Profondeur de la lésion au rouge foncé. L’érythème diffus associe volontiers des lésions
- Anomalies de la surface planes et des lésions palpables (papules) réalisant ainsi, lorsqu’il
- Consistance de la lésion est d’apparition brutale, un exanthème maculopapuleux (Fig. 3).
Lorsque les lésions qui constituent l’exanthème sont des macules

Tableau 2.
Distribution, arrangement et forme des lésions cutanées.
Distribution
Extension - Localisée - Généralisée
- Régionale - Universelle
Caractéristiques - Selon une structure anatomique ou embryologique
(vaisseau, lymphatique, métamère, ligne de Blaschko, etc.)
- Photodistribution (face, décolleté, dos des mains et des
avant-bras)
- Zones exposées (aux points de pression, aux frottements,
aux aéroallergènes, etc.)
- Distribution folliculaire
- Distribution aux régions séborrhéiques (sourcil, sillon
nasogénien, préthoracique, etc.)
- Distribution aux régions apocrines (régions axillaire,
pubienne et mammaire)
- Distribution « endogène » (symétrie, atteinte simultanée
de plusieurs plis)
- Zones « bastions » de certaines dermatoses (psoriasis,
lichen, gale, syphilis secondaire, atopie, dermatite
herpétiforme, etc.)
Arrangement des lésions entre elles
- Isolées - Groupées (amas,
- Confluentes en bouquet,
- Annulaires corymbique)
- Linéaires
Forme de la lésion
- Ronde, ovale
- En « cocarde » (plusieurs anneaux
concentriques dont un au moins est
palpable)
- Discoïde, nummulaire
- Annulaire, circinée
- Polycyclique, pétaloïde (réalisé par la
fusion de lésions arrondies vides ou
pleines respectivement)
- Stellaire
- Linéaire, digitée
- Serpigineuse
- Réticulée, cribriforme

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Figure 1. Arbre décisionnel. Algorithme du


Lésion palpable ? diagnostic des principales lésions élémentaires.
Les altérations de la consistance et/ou de
l’épaisseur de la peau (comme la sclérose ou
l’atrophie par exemple) n’ont pas été incluses
Oui Non dans cet algorithme. Astérisque : en réalité, la
surface d’une pustule, d’une vésicule ou d’une
bulle est altérée, car soulevée par le contenu
Surface cutanée Macule liquidien de la lésion.
altérée ? Purpura
Télangiectasie

Non Oui

Contenu solide Contenu liquide* Ulcération Lésions intriquées :


Kératose, corne toute autre lésion
Squame avec une altération
Croûte cutanée

Papule Vésicule
Plaque Bulle
Nodule Pustule
Nouure

Figure 2. Macule blanche ou achromique avec îlots de repigmentation Figure 3. Exanthème maculopapuleux au cours d’une toxidermie.
autour des follicules pileux au cours d’un vitiligo.

rouges qui ont tendance à confluer tout en respectant des inter-


valles de peau saine, on parle d’exanthème morbilliforme. Lorsqu’il
s’agit de lésions de couleur rose bien individualisées mesurant en
général moins de 2 cm, on parle de roséole. Lorsqu’il s’agit d’une
rougeur intense, diffuse, qui conflue sans laisser d’intervalle de
peau saine et qui donne l’impression d’un granité à la palpation,
on parle d’exanthème scarlatiniforme. Enfin, un érythème diffus,
d’évolution prolongée, grave, touchant plus de 90 % de la surface
corporelle, s’accompagnant d’emblée ou très rapidement d’une
desquamation, est appelé une érythrodermie.
La cyanose correspond à une modification de la couleur de la
peau réalisant une teinte bleu violacé, avec abaissement de la tem-
pérature locale, touchant souvent les extrémités et les muqueuses.
Certaines lésions rouges non palpables correspondent à une Figure 4. Télangiectasies résultant d’une dilatation des vaisseaux super-
dilatation permanente des petits vaisseaux du derme superficiel ficiels du derme et disparaissant à la vitropression.
sous la forme de petites lignes sinueuses de quelques millimètres
se vidant facilement à la vitropression : il s’agit de télangiectasies
(Fig. 4). La poïkilodermie est un syndrome défini par l’association purpuriques limitées de petites dimensions ; vibices des stries
d’une atrophie cutanée, d’une pigmentation réticulée et de télan- linéaires purpuriques plus ou moins larges et plus ou moins allon-
giectasies. gées ; ecchymoses des plaques purpuriques étendues à contours
Une rougeur permanente, ne s’effaçant pas à la vitropression, plus ou moins irréguliers comportant souvent des teintes variées.
témoignant d’une hémorragie intracutanée, est appelée purpura. Le purpura peut parfois être palpable (papule purpurique) (Fig. 5).
Le purpura peut être circonscrit ou étendu et peut passer suc- Parfois, une lésion non palpable peut conserver une couleur
cessivement par différentes teintes allant du rouge au bleu, au normale mais devenir visible du fait d’une transparence inhabi-
vert, au jaune pour laisser persister à sa suite, de façon passagère tuelle de la peau, laissant apparaître les vaisseaux, devenant lisse
ou durable, une séquelle brune. On appelle pétéchies des lésions et prenant un aspect en « papier de cigarette » : il s’agit alors d’une

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Figure 5. Purpura pétéchial et


palpable au cours d’une vasculite
leucocytoclasique.

Figure 7. Papules regroupées en « anneau » au cours d’un granulome


annulaire.

Figure 8. Deux plaques érythé-


mateuses des jambes au cours d’un
syndrome de Sweet.

Figure 6. Multiples papules en « dôme », confluentes par endroits au


cours d’une amylose papuleuse.

macule atrophique. Pour certains, les lésions planes squameuses


(exemple : pityriasis versicolor) sont classées parmi les macules.

Lésion palpable
Lorsque les lésions sont palpables, il faut déterminer leur
contenu (solide ou liquidien), leur taille et leur localisation
(derme, hypoderme). Certaines lésions deviennent palpables
exclusivement du fait d’une altération de la surface de la peau
(cf. infra).
Lésion de contenu solide
La papule est définie comme une lésion palpable de petite taille Figure 9. Plaque de lichénification réalisant un épaississement de la
(< 10 mm), de contenu non liquidien. Il s’agit en général de lésions peau avec exagération de ses sillons. À noter également la présence
surélevées dépassant le niveau de la peau adjacente (Fig. 6). Vue d’érosions linéaires liées au grattage.
d’en haut, une papule peut être ronde, ovale, ombiliquée (petite
dépression centrale) ou polygonale. Vue de profil, elle peut être
plane, en dôme, sessile, pédiculée ou acuminée. La surface peut lésion ronde ou hémisphérique (exemple : carcinome basocel-
être lisse, érosive, ulcérée ou nécrotique, recouverte de squames, lulaire nodulaire) (Fig. 10, 11). Certains auteurs appellent tout
de croûtes ou de squames-croûtes. Enfin, la distribution peut être nodule dépassant 20 mm une tumeur. Les tumeurs ne possèdent en
folliculaire ou non. Les papules par prolifération ou dépôts épider- général pas de caractère inflammatoire et ont tendance à croître.
miques (exemple : verrue plane) ont habituellement des limites Tout nodule de grande taille (souvent plus de 5 cm), à extension
nettes, alors que les papules dermiques (exemple : granulome hypodermique, est appelé nouure (Fig. 12). Les gommes sont des
annulaire) sont moins bien limitées (Fig. 7). productions hypodermiques qui se présentent à leur phase de cru-
Le terme de plaque est employé pour désigner des lésions en dité comme une nouure, mais passent ensuite par une phase de
relief, plus étendues en surface qu’en hauteur et mesurant plus de ramollissement débutant au centre de la gomme, pour aboutir à
1 cm (exemple : syndrome de Sweet) (Fig. 8). l’ulcération avec issue d’un liquide (gommeux) bien particulier
La lichénification est davantage un syndrome lésionnel nosologi- (exemple : gomme syphilitique).
quement défini qu’une véritable lésion élémentaire. Elle consiste Les végétations sont des excroissances d’allure filiforme, digi-
en un épaississement de la peau avec exagération de ses sillons, tée ou lobulée, ramifiées en « chou-fleur », de consistance molle.
qui rend apparent son quadrillage normal. Dans les petits losanges La surface de la lésion est formée d’un épiderme aminci et rosé,
ainsi dessinés se développent des papules plus ou moins saillantes. ou est couverte d’érosions suintantes et d’ulcérations (exemple :
On note souvent une pigmentation brun jaunâtre ou violine, de végétation vénérienne, iodide) (Fig. 13). Elles saignent facilement
petites squames adhérentes et des excoriations. Elle résulte d’un après un léger traumatisme. Les verrucosités sont des végétations
prurit compliqué de grattages ou de frottements répétés (Fig. 9). dont la surface est recouverte d’un enduit corné, hyperkératosique
Le nodule est une masse palpable, non liquidienne, mesu- souvent grisâtre, plus ou moins épais (exemple : verrue vulgaire,
rant plus de 10 mm. Généralement, on entend par nodule une kératose séborrhéique) (Fig. 14).

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Figure 10. Multiples nodules et Figure 14. Végétation à surface kératosique,


tumeurs au cours d’un mycosis définissant la verrucosité, au cours d’une verrue
fongoïde. périunguéale.

Figure 15. Vésicule au cours


d’une dyshidrose.

Figure 11. Nodule arrondi à centre ulcéré et


kératosique au cours d’un kératoacanthome.

Un cordon est une lésion plus facilement palpable que visible et


dont la sensation lors de la palpation évoque une corde ou une
ficelle (exemple : thrombose veineuse superficielle ou artérite tem-
Figure 12. Nouures des deux porale). Ces lésions sont linéaires et plus ou moins sinueuses. Leur
jambes au cours d’un érythème taille est très variable. La reconnaissance aisée de ces cordons jus-
noueux. tifie qu’ils soient classés parmi les lésions élémentaires. Un sillon
est un petit tunnel dans la peau qui héberge habituellement un
parasite. Il s’agit souvent de lésions millimétriques à peine visibles
et/ou palpables.
Enfin, une sclérose cutanée (cf. infra) est une anomalie de
la consistance de la peau, avant tout palpable, de même que
l’œdème.

Lésions de contenu liquidien


Lorsqu’il s’agit de lésion de contenu liquidien (il faut percer
le toit de la lésion avec un vaccinostyle ou une aiguille en cas
de doute pour s’assurer du contenu liquidien), les lésions sont
distinguées en fonction de l’aspect du liquide qu’elles contiennent
et de leur taille. Ainsi, une lésion liquidienne, dont le liquide est
clair, mesurant moins de 10 mm, est appelée vésicule ; elle est
appelée bulle lorsqu’elle dépasse 10 mm [11] .
Les vésicules sont parfois évidentes, réalisant une lésion trans-
lucide qui peut être arrondie (hémisphérique) (Fig. 15), conique
(acuminée) ou avoir une dépression centrale (ombiliquée). Mais
elles sont souvent fragiles et passagères, pouvant se rompre en réa-
lisant un suintement, des érosions, des croûtes à bords arrondis,
émiettés ou polycycliques.
On distingue les bulles sous-épidermiques, dont le toit est solide et
qui peuvent reposer sur une peau normale, érythémateuse ou urti-
carienne (exemple : pemphigoïde ou porphyrie cutanée tardive),
des bulles épidermiques, fragiles, souvent spontanément rompues,
se présentant alors comme une érosion bordée d’une collerette
(exemple : pemphigus). Les bulles peuvent contenir un liquide
clair (Fig. 16), trouble ou hémorragique. En cas de lésion bulleuse
très superficielle, sous-cornée, la fragilité de la lésion est extrême,
expliquant la présentation habituelle post-bulleuse arrondie et
squamocroûteuse (exemple : impétigo bulleux).
Lorsque le liquide contenu dans la lésion est d’emblée trouble
ou purulent, on parle de pustule. Parmi les pustules, on distingue
les lésions folliculaires, qui sont acuminées et centrées par un poil
(exemple : folliculite) des lésions non folliculaires, en général plus
Figure 13. Végétations vénériennes. planes et non acuminées (Fig. 17). Ce deuxième type de pustule est
en général de siège intraépidermique, très superficiel, sous-corné,

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d’excoriation est parfois employé pour désigner une érosion secon-


Figure 16. Bulles au cours d’un
daire à un traumatisme, le plus souvent le grattage. Une fissure est
pemphigus.
une érosion linéaire. Une ulcération est une perte de substance
cutanée plus profonde qui touche l’épiderme et le derme et qui,
si elle guérit, laisse une cicatrice. Les papilles dermiques ne sont
plus visibles et l’ulcération peut se recouvrir d’un enduit fibrineux,
d’une croûte sérosanglante (une ulcération peut saigner) ou d’une
plaque noire (nécrose). La différence entre ces deux lésions repose
donc sur la profondeur de la perte de substance. Un ulcère est une
perte de substance chronique (> 1 mois) sans tendance à la guéri-
son spontanée. Les ulcérations aux points de pression réalisent les
escarres. Une fistule est un pertuis cutané, de profondeur variable,
qui correspond à une communication anormale d’une structure
profonde à la surface de la peau. La fistule peut laisser sourdre un
Figure 17. Pustules ombiliquées liquide clair, trouble ou purulent.
au cours d’une varicelle. Les squames se définissent comme des lamelles de cellules cor-
nées à la surface de la peau. Elles sont peu adhérentes et se
détachent facilement. Elles sont spontanément visibles ou appa-
raissent après un grattage à l’aide d’une curette à bord mousse. Il
est aussi possible de frotter la peau à l’aide d’un morceau de tissu
noir, ce qui les rend apparentes. Il est classique de distinguer :
• des squames scarlatiniformes : squames en grands lambeaux
traduisant une production cornée brutale, intense et transitoire
(exemple : scarlatine) ;
• des squames en « collerette » : squames fines, adhérentes au
centre mais non en périphérie, recouvrant une lésion inflam-
matoire (exemple : pityriasis rosé de Gibert) ;
• des squames pityriasiformes : petites squames fines, peu
adhérentes, blanchâtres et farineuses. Elles sont typiques du
pityriasis capitis (pellicules du cuir chevelu), mais elles peuvent
se voir dans la plupart des dermatoses érythématosquameuses
communes ;
• des squames ichtyosiformes : grandes squames polygonales
comme des écailles de poisson. Les éléments squameux se
détachent habituellement d’un tégument très sec ;
• des squames psoriasiformes : squames blanches, brillantes,
lamellaires, argentées, larges et nombreuses. Elles corres-
pondent à une parakératose sur le plan histologique et sont
caractéristiques du psoriasis.
Une kératose se définit comme un épaississement corné plus
large qu’épais. Elle se caractérise sur le plan clinique par des
Figure 18. Multiples pustules non folliculaires sur fond érythémateux lésions circonscrites ou diffuses très adhérentes et dures à la pal-
au cours d’une pustulose exanthématique. pation. La sensation à la palpation est tout à fait particulière, car
la kératose donne à la peau une impression de dureté rigide qui
s’avère irréductible à la pression du doigt. Au frottement s’ajoute
ne laissant parfois apparaître que des microérosions circulaires une impression de rugosité. L’exploration à la curette confirme
(exemple : psoriasis pustuleux) (Fig. 18). l’impression de dureté ; c’est tout juste si l’on parvient à détacher
quelques squames.
Est-ce que la surface de la peau est normale ? Une corne est une kératose plus épaisse ou plus haute que large.
Une croûte est un dessèchement superficiel d’un exsudat, d’une
Toutes les lésions cutanées peuvent comporter une altération sécrétion, d’une nécrose ou d’une hémorragie cutanée. Elle donne
de la surface cutanée. Ces altérations sont alors des adjectifs lieu à une sensation de rugosité à la palpation. Elle adhère plus ou
permettant de mieux décrire les lésions. Ailleurs, une altération moins aux lésions qu’elle recouvre, mais contrairement aux kéra-
de la surface de la peau peut être la seule lésion identifiable, toses, elle peut toujours être détachée à la curette. Il faut toujours
comme par exemple dans les kératodermies palmoplantaires qui faire tomber la croûte pour examiner la lésion qu’elle recouvre
sont la conséquence d’un épaississement de la couche cornée de (ulcération, tumeur, etc.).
l’épiderme. La description précise des altérations de la surface La gangrène et la nécrose désignent une portion de tissu cutané
d’une lésion permet de prévoir une partie des modifications his- non viable qui tend à s’éliminer. Elles se caractérisent par une
tologiques sous-jacentes. Ces altérations indiquent ce qui se passe perte de la sensibilité selon tous les modes, un refroidissement puis
dans l’épiderme et dans la couche cornée. Une surface cutanée secondairement une coloration noire et la formation d’un sillon
normale signe l’absence de lésion épidermique (en dehors des d’élimination entre les tissus nécrosés et les tissus sains (Fig. 19).
anomalies de la pigmentation), traduisant que le processus patho-
logique a lieu dans le derme et/ou l’hypoderme. La surface de la
peau normale est lisse et le microrelief cutané peut être distingué. Est-ce que la consistance de la peau
Une altération de la surface cutanée se caractérise habituellement est normale ?
par une perte du microrelief et/ou un épaississement localisé de la
couche cornée et/ou une desquamation et/ou une impression de Certaines lésions sont essentiellement dues à une modification
rugosité à la palpation et/ou un suintement et/ou une fissuration, de la consistance de la peau qui devient trop ou pas assez souple.
une érosion ou une ulcération. Ces lésions sont surtout apparentes à la palpation. L’atrophie cuta-
Une érosion est une perte de la partie superficielle de la peau née se définit par la diminution ou la disparition de tout ou partie
(épiderme) qui guérit sans laisser de cicatrice. Il s’agit d’une lésion des éléments constitutifs de la peau (épiderme, derme, hypoderme
humide, suintante, se recouvrant secondairement d’une croûte, ou deux, voire trois compartiments). Elle se présente comme un
et dont le plancher est recouvert de multiples petits points rouges amincissement du tégument qui se ride au pincement superfi-
(0,1 à 0,2 mm) correspondant aux papilles dermiques. Le terme ciel, perdant son élasticité, son relief et prenant un aspect lisse et

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Figure 19. Altérations de la sur-


face de la peau. Gangrène en
plaque superficielle au cours d’une
“ Point fort
angiodermite nécrotique.
Il faut toujours préciser la distribution d’une dermatose,
chercher un arrangement et/ou une configuration remar-
quable et repérer toutes les lésions élémentaires présentes.
En s’aidant des trois questions suivantes, il est possible
d’identifier les principales lésions élémentaires :
• Est-ce que la lésion est palpable ?
• Est-ce que la surface de la lésion est altérée ?
• Est-ce que la consistance de la peau est normale ?

acquise). Une bulle qui s’étend alors que l’on exerce une pression
verticale sur son sommet est un équivalent de ce signe.
Une pression verticale permet aussi de rechercher la dépressi-
bilité d’un œdème (signe du « godet »), d’apprécier un temps de
recoloration capillaire (le temps qu’il faut pour obtenir une cou-
leur normale, rose, de la peau après blanchiment par la pression),
nacré. Les vaisseaux dermiques sont souvent visibles. L’atrophie de rechercher des altérations du derme dans certaines lésions,
de l’hypoderme (lipoatrophie) provoque une dépression visible sur comme dans les neurofibromes ou les anétodermies qui sont
la surface cutanée. dépressibles.
L’altération ou la disparition du tissu élastique entraîne une Le pincement de la peau permet, l’épiderme et le derme
perte de l’élasticité de la peau. La peau devient alors lâche et ne étant mobiles sur l’hypoderme, de localiser les lésions hypoder-
retrouve plus son aspect initial après un pincement, mais garde miques ou plus profondes au-dessus desquelles la peau se laisse
la marque qu’on lui a imprégnée. Il se forme des ridules, des rides, normalement plisser. Les nodules intradermiques, comme les
voire un authentique cutis laxa (relâchement de la peau qui pend dermatofibromes, peuvent également être localisés ainsi car le
et qui ne revient pas sur elle quand on l’étire). Toutes ces lésions plissement de la peau entraîne la formation de fossettes au-dessus
correspondent à des plis cutanés permanents dans une topogra- des lésions.
phie où la peau n’est habituellement pas constamment plissée. Le grattage, par l’ongle ou à l’aide d’une curette mousse (de
Parfois, c’est seulement au palper qu’on peut détecter l’atrophie. Brocq), de certaines lésions permet de faire apparaître la des-
Ainsi, la palpation de l’anétodermie donne au doigt la sensation de quamation caractéristique du psoriasis (signe de « la bougie » :
pénétrer dans une véritable dépression, alors qu’à l’inspection, la blanchiment initial, puis si l’on persiste, le signe de la « rosée
peau à cet endroit semble au contraire faire saillie. sanglante » : hémorragie punctiforme inframillimétrique des vais-
La sclérose est une augmentation de consistance des éléments seaux superficiels des papilles dermiques) ou de provoquer un
constitutifs du derme et parfois de l’hypoderme, rendant le glisse- purpura linéaire (exemple : amylose).
ment des téguments plus difficile. Le tégument est induré et perd
sa souplesse normale. L’atrophie s’associe souvent à une sclérose
cutanée pour donner lieu à un état scléroatrophique. Une cica-  Signe fonctionnel : prurit
trice peut ainsi être atrophique, scléroatrophique ou au contraire
hypertrophique. Le prurit est le seul signe fonctionnel spécifique de la peau. C’est
une sensation qui provoque le besoin de se gratter. Il peut être
localisé (exemple : cuir chevelu), régional (exemple : un membre)
Lésions intriquées ou diffus. Sa chronologie et ses circonstances d’apparition doivent
Toutes les lésions précédentes peuvent s’associer et réaliser de être précisées : diurne, nocturne, à l’effort, à l’eau, etc. Son inten-
vrais syndromes. Ainsi, les macules, les papules et les plaques sité rend compte de la gêne entraînée et on peut distinguer trois
rouges sont souvent squameuses et réalisent le groupe des affec- niveaux :
tions érythématosquameuses. Les papules peuvent réaliser de • intermittent, tolérable ;
nombreuses associations lésionnelles dont la reconnaissance est • permanent, durable mais résistible, surtout diurne ;
essentielle : papulovésicule, papulopustule, papule kératosique, • incoercible, irrésistible, insomniant.
papule nécrotique, etc. La sclérose et l’atrophie sont souvent asso- Un prurit peut être lésionnel, entraînant alors des signes sur
ciées (scléroatrophie). Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue la peau comme par exemple des nodules fermes, très durs à
qu’une même maladie peut se manifester par différentes lésions la palpation dans le cadre du prurigo nodulaire (de Hyde). Des
élémentaires. Ainsi, une dermatose aussi commune que le psoria- lésions de grattage non spécifiques sont fréquentes : érosions
sis peut être classée, selon les malades, tantôt parmi les lésions linéaires, papules excoriées, lichénification, pigmentation, etc. Il
papuleuses ou papulosquameuses, tantôt parmi les pustules, tan- peut aussi s’intégrer dans une dermatose prurigineuse et accom-
tôt parmi les érythrodermies. De plus, chez le même malade, pagner des lésions dermatologiques plus spécifiques, qu’il faut
plusieurs types de lésions peuvent coexister. toujours rechercher. Parfois, elles sont évidentes comme dans
l’urticaire, mais parfois elles peuvent être discrètes comme les
 Autres signes sillons scabieux. Le prurit est dit « sine materia » en l’absence
de toute lésion dermatologique élémentaire.
La palpation linéaire ferme à l’aide d’une pointe mousse permet Les autres signes fonctionnels en rapport avec des affections
de rechercher un dermographisme. La friction de certaines lésions cutanées (douleur, dysesthésie, troubles de la transpiration, into-
provoque une réaction urticarienne, appelée signe de Darier, carac- lérance à la chaleur, etc.) ne sont pas abordés ici.
téristique des mastocytoses.
Une traction de la peau normale et/ou péribulleuse permet
parfois de provoquer un décollement cutané : ce signe de Nikolsky  Conclusion
se produit dans les maladies bulleuses intraépidermiques, dans la
nécrolyse épidermique toxique (syndrome de Lyell) et dans cer- En dermatologie, plus que dans n’importe quelle autre dis-
taines maladies bulleuses jonctionnelles (épidermolyse bulleuse cipline médicale, l’examen physique est l’élément déterminant

EMC Dermatologie 7
98-070-A-05  Sémiologie cutanée

de la démarche diagnostique. Une connaissance parfaite de la [4] Committee on Nomenclature, International League of Dermatological
sémiologie dermatologique est donc indispensable. Il est donc Societies. Glossary of basic dermatologic lesions. Acta Derm Venereol
essentiel de connaître – et de savoir reconnaître – les différentes 1987;130(Suppl.):1–16.
lésions décrites dans ce chapitre. L’examen dermatologique doit [5] Arndt KA, Robinson JK, Leboit PE, Wintroub BU. Cutaneous medi-
permettre d’identifier la ou les lésions élémentaires, de reconnaître cine and surgery. An integrated program in dermatology. Philadelphia:
une éventuelle configuration et/ou arrangement remarquable et W.B. Saunders; 1996.
d’apprécier la distribution des lésions. Cette démarche permet de [6] Champion RH, Burton JL, Burns DA, Breathnach SM. Textbook of
diagnostiquer de nombreuses maladies, sans recours aux examens dermatology. Oxford: Blackwell Scientific Publication; 1998.
complémentaires, un privilège rare à notre époque. [7] Goldsmith LA, Lazarus GS, Tharp MD. Adult and pediatric dermato-
logy: a color guide to diagnosis and treatment. Philadelphia: FA Davis;
1997.
[8] Lawrence CM, Cox NH. Physical signs in dermatology. Color atlas
Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
and text. London: Wolfe publishing; 1993.
d’intérêts en relation avec cet article.
[9] Sams WM, Lynch PJ. Principles and practice of dermatology. Edin-
burgh: Churchill Livingstone; 1990.
[10] Saurat JH, Lachapelle JM, Lipsker D, Thomas L. Dermatologie et
 Références infections sexuellement transmissibles. Paris: Elsevier Masson; 2009.
[11] Nast A, Griffiths CE, Hay R, Sterry W, Bolognia JL. The 2016 Inter-
national League of Dermatological Societies’ revised glossary for the
[1] Ashton R. Teaching non-dermatologists to examine the skin: a
description of cutaneous lesions. Br J Dermatol 2016;174:1351–8.
review of the literature and some recommendations. Br J Dermatol
1994;132:221–5.
[2] Jackson R. Morphological diagnosis of skin disease. A study of the Pour en savoir plus
living gross pathology of the skin. Ontario: Manticore Publishers; 1998.
[3] Lipsker D. Lésions élémentaires de la peau : séméiologie cutanée. EMC Lipsker D. Guide de l’examen clinique et du diagnostic en dermatologie.
(Elsevier Masson, SAS, Paris), Dermatologie, 98-045-A-10, 2007. Paris: Elsevier Masson; 2010.

A. Kieny, Chef de clinique, assistant hospitaliser.


D. Lipsker, Professeur des Universités, praticien hospitalier (dan.lipsker@chru-strasbourg.fr).
Faculté de médecine et clinique dermatologique, Université de Strasbourg, Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place de l’Hôpital, 67091 Strasbourg
cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Kieny A, Lipsker D. Sémiologie cutanée. EMC - Dermatologie 2023;25(4):1-8 [Article 98-070-A-05].

夽 Pourcitation, ne pas utiliser la référence ci-dessus de cet article, mais la référence de la version originale publiée dans EMC – Traité de Médecine
Akos 2020;23(1):1-8 [Article 2-0646].
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/S1634-6939(19)41509-3

8 EMC - Dermatologie
 98-710-A-10

Dermatoses associées aux hémopathies


malignes
C. Lepelletier, J.-D. Bouaziz

Résumé : Les hémopathies malignes sont définies par un trouble de la multiplication et/ou de la diffé-
renciation des cellules d’une lignée hématopoïétique lymphoïde ou myéloïde. En dehors des événements
infectieux et de la iatrogénie, on distingue deux principaux types de manifestations cutanées des hémo-
pathies malignes : les localisations cutanées spécifiques, correspondant à l’envahissement de la peau
par des cellules tumorales, et les dermatoses satellites liées à une dysrégulation immunitaire induite par
le clone tumoral (dermatoses neutrophiliques, dermatoses bulleuses auto-immunes, manifestations vas-
culaires). Dans les deux cas, reconnaître ces manifestations cutanées est un enjeu diagnostique majeur
pour le dermatologue, ces manifestations pouvant faire découvrir l’hémopathie ou modifier la prise en
charge de celle-ci du fait de leur impact pronostique.
© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Hémopathie myéloïde ; Localisation spécifique ; Dermatose satellite ; Dermatose neutrophilique ;


Prurit ; Gammapathie monoclonale de signification cutanée ; Infection cutanée

Plan • les localisations cutanées spécifiques, correspondant à un enva-


hissement le plus souvent dermique par des cellules tumorales ;
■ Introduction 1 • les dermatoses satellites, dont la nature et la physiopathologie
sont très variables d’une hémopathie à une autre.
■ Localisations spécifiques cutanées 1
Les dermatoses le plus fréquemment rencontrées en fonction
Localisations cutanées des hémopathies myéloïdes 1
de l’hémopathie sous-jacente sont résumées dans le Tableau 1.
Localisations cutanées des hémopathies lymphoïdes 3
Les hémopathies malignes primitivement cutanées (lym-
■ Dermatoses satellites des hémopathies malignes 4 phomes cutanés primitifs) ne sont pas abordées dans ce chapitre.
Dermatoses satellites des hémopathies myéloïdes. 4
Dermatoses satellites des hémopathies lymphoïdes 6

 Localisations spécifiques cutanées


■ Conclusion 8

Les localisations spécifiques correspondent à une localisation


cutanée des cellules hématopoïétiques clonales, qu’elles soient
 Introduction issues de la moelle osseuse ou des tissus lymphoïdes. Elles cor-
respondent le plus souvent à des papules, nodules, plaques ou
Les hémopathies malignes sont définies par un trouble de tumeurs infiltrés, en particulier au cours des hémopathies myé-
la multiplication et/ou de la différenciation des cellules d’une loïdes.
lignée hématopoïétique. On distingue, en fonction de la lignée
atteinte, les hémopathies myéloïdes (leucémies aiguës myéloïdes
[LAM], syndromes myélodysplasiques [SMD] et myéloprolifératifs Localisations cutanées des hémopathies
[SMP]) des hémopathies lymphoïdes (leucémies aiguës lym-
phoïdes, leucémies lymphoïdes chroniques [LLC], lymphomes et
myéloïdes
gammapathies monoclonales liées à un clone plasmocytaire). L’infiltration de la peau par des cellules blastiques, ou leu-
Des manifestations cutanées peuvent révéler le diagnostic de kemia cutis (LC), a une incidence très variable en fonction de
l’hémopathie, indiquer un tournant évolutif de la maladie, ou l’hémopathie sous-jacente. Elle pourrait être présente dans 3 à 8 %
bien être de nature iatrogène (infections, toxicité des chimiothé- des LAM et jusqu’à 50 % des formes hyperleucocytaires (ancien-
rapies). nement dénommées LAM4 et LAM5) [1] . Les LAM représenteraient
En dehors des événements infectieux (Fig. 1, 2) et de la iatro- 80 % des hémopathies associées aux LC [2] .
génie, on distingue deux principaux types de manifestations Cliniquement, il s’agit le plus souvent de lésions multiples à
cutanées des hémopathies malignes : type de papulonodules violacés ou érythémateux, très fermes, à

EMC - Dermatologie 1
Volume 25 > n◦ 4 > novembre 2023
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0319(23)85692-8
98-710-A-10  Dermatoses associées aux hémopathies malignes

Tableau 1.
Principales manifestations dermatologiques en fonction des hémopathies.
Hémopathie Localisations spécifiques cutanées Dermatoses satellites
LAM Leukemia cutis a (LAM4, 5) Dermatoses neutrophiliques (SS, HEN, PG)
Vascularites
SMD Leukemia cutis a Dermatoses neutrophiliques a (SS)
Rare : myelodysplasia cutis Vascularites
Polychondrite atrophiante
SMP Exceptionnelles a Acrosyndromes
Hyperviscosité
Prurit aquagénique
Dermatoses neutrophiliques
LAL Exceptionnelles (nodules ± ulcérés)
LLC Infiltration violine des extrémités, isomorphisme Vascularite
Cryoglobulinémie
« Papulose T »
Pemphigus paranéoplasique
Lymphome Exceptionnelles (nodules ± ulcérés) Prurit sine materia
Attention, atteinte cutanée précoce : LAI, LCDP Pemphigus paranéoplasique
Cryoglobulinémie
Vascularite
Gammapathie monoclonale Rares : plasmocytome, spicules folliculaires, Amylose AL
macroglobulinose Cryoglobulinémie
POEMS
Cutis laxa
Syndrome de Schnitzler
Scléromyxœdème
Xanthomes, xanthogranulomes
Dermatoses neutrophiliques (PG, PSC, EED)

EED : erythema elevatum diutinum ; HEN : hidradénite eccrine neutrophilique ; LAI : lymphome angio-immunoblastique ; LAL : leucémie aiguë lymphoblastique ; LAM : leu-
cémie aiguë myéloïde ; LCDP : leucémie à cellules dendritiques plasmacytoïdes ; LLC : leucémie lymphoïde chronique ; PG : pyoderma gangrenosum ; POEMS : polyneuropathy,
organomegaly, endocrinopathy, monoclonal component, skin changes ; PSC : pustulose sous-cornée ; SMD : syndrome myélodysplasique ; SMP : syndrome myéloprolifératif ;
SS : syndrome de Sweet.
a
Manifestation cutanée réputée péjorative dans le pronostic de l’hémopathie.

Figure 2. Multiples lésions nécrotiques sur fond érythémateux chez un


patient atteint d’une aspergillose invasive (cliché de la photothèque de
l’hôpital Saint-Louis, Paris).

Figure 1. Bulle nécrotique sur fond inflammatoire au cours d’un


ecthyma gangrenosum à Pseudomonas aeruginosa (cliché de la photo- vaisseaux en entraînant leur destruction. Elle peut se présenter
thèque de l’hôpital Saint-Louis, Paris). sous la forme de lésions purpuriques infiltrées ou d’une éruption
vésiculobulleuse [3] .
Au cours des LAM, la LC est le plus souvent précoce et peut
surface brillante et lisse, siégeant avec prédilection sur les extré- révéler la maladie. Sa survenue est de mauvais pronostic, comme
mités et le tronc (Fig. 3) [2] , apparaissant rapidement en quelques l’ont montré plusieurs études, et notamment une étude de cohorte
jours à quelques semaines. Les lésions sont parfois hémorragiques, rétrospective très récente [4] . Une biopsie cutanée est donc indis-
et le plus souvent indolores et non prurigineuses. Il n’y a habituel- pensable afin de documenter la LC, qui peut aboutir à une
lement pas de signes épidermiques, l’infiltrat cellulaire siégeant intensification de traitement. La biopsie cutanée montre un infil-
avec prédilection dans le derme. Une hypertrophie gingivale peut trat dermique dense constitué de cellules blastiques exprimant le
également être présente. Rarement, l’atteinte cutanée peut être cluster de différenciation 68 (CD68), le CD33 et la myélopéroxy-
unique (nodule verdâtre du tronc dans le cadre des sarcomes myé- dase en immunohistochimie.
loïdes, anciennement appelés chloromes). Au cours des SMD, deux types de localisations spécifiques
Un sous-type particulier de LC est la vascularite leucémique, peuvent être observés : la LC et la myelodysplasia cutis. La LC
qui correspond à l’infiltration des cellules blastiques dans les présente habituellement les mêmes caractéristiques cliniques et

2 EMC - Dermatologie
Dermatoses associées aux hémopathies malignes  98-710-A-10

générale aisé, car survenant après plusieurs mois ou années


d’évolution d’une hémopathie connue. Contrairement aux
hémopathies myéloïdes, cette atteinte spécifique ne révèle
qu’exceptionnellement la maladie et n’est pas un facteur pronos-
tique per se.
Plusieurs types d’hémopathies lymphoïdes se manifestent tou-
tefois par des tableaux particuliers et trompeurs qui sont à
connaître.
Le lymphome angio-immunoblastique (LAI) est un lym-
phome T périphérique non hodgkinien rare, dérivé des
lymphocytes T helper folliculaires. Le dermatologue est en pre-
mière ligne dans le diagnostic de cette affection de pronostic
redoutable, les manifestations cutanées annonçant fréquemment
la maladie et étant présentes dans 40 à 50 % des cas. Le tableau
clinique est polymorphe : il s’agit le plus souvent d’un exan-
thème maculopapuleux peu spécifique, mimant un exanthème
viral ou une toxidermie, particulier par son caractère prolongé et
l’association progressive à des manifestations dysimmunitaires,
Figure 3. Multiples tumeurs infiltrées du tronc de leukemia cutis (cliché des signes généraux, une polyadénopathie et une splénomé-
de la photothèque de l’hôpital Saint-Louis, Paris). galie. Il peut également se présenter sous la forme de lésions
urticariennes, de vascularite, de plaques ou de nodules infiltrés.
L’histologie est d’interprétation difficile (infiltrat lymphocytaire
dermique peu spécifique), et la suspicion diagnostique doit impé-
“ Point important rativement être communiquée au pathologiste, qui recherche
l’expression de marqueurs T helper folliculaires (CXC motif che-
mokine ligand 13 [CXCL13], programmed cell death 1 [PD1], B-cell
Infections et hémopathies lymphoma 6 [BCL6], CD10) et d’Epstein-Barr encoded RNA (EBER)
Le risque infectieux est clairement majoré chez les patients pour étayer le diagnostic [9, 10] .
atteints d’hémopathies malignes (insuffisance médullaire, Au cours des LLC, l’atteinte cutanée spécifique peut être de deux
types : isolée, se présentant le plus souvent comme une infiltration
iatrogénie).
violine touchant le nez et les oreilles, ou associée à une patholo-
Dans ce contexte, les infections cutanées : gie infectieuse ou néoplasique non liée, telle que des cicatrices
• sont le plus souvent primitives (inoculation de germes de varicelle ou une maladie de Bowen (recrutement de cellules
nosocomiaux ou de réservoir environnemental) ; elles tumorales vers les zones inflammatoires ou isomorphisme) [11] .
peuvent toutefois également survenir au cours d’une La présence d’un infiltrat lymphocytaire atypique monotypique
septicémie (se traduisant souvent par des lésions mono- fait parfois découvrir le diagnostic. Toutefois, la présence d’une
morphes des extrémités et du tronc) ou par extension atteinte cutanée spécifique ne semble pas avoir de signification
d’une infection profonde ; pronostique [11] .
• peuvent prendre un aspect clinique faussement rassu- Les leucémies à cellules dendritiques plasmacytoïdes (LCDP)
rant en cas de neutropénie ; sont des hémopathies rares, mais de très mauvais pronostic,
• doivent faire pratiquer systématiquement une biop- touchant plutôt les sujets de plus de 65 ans. Là encore, le der-
matologue est en première ligne diagnostique, puisque la peau
sie cutanée avec envoi en bactériologie, mycologie et est atteinte dans 90 % des cas [12, 13] , le plus souvent à la phase
anatomopathologie, la sémiologie clinique étant peu spé- initiale. Il s’agit le plus souvent de papules ou nodules ecchymo-
cifique dans ce contexte (aspect similaire par exemple tiques (Fig. 4), siégeant sur le tronc, fréquemment associés à des
de bulle hémorragique d’évolution nécrotique sur fond cytopénies et à des signes généraux.
érythémateux pour un ecthyma gangrenosum à Pseudomo- Le lymphome T de l’adulte (adult T-cell leukemia/lymphoma
nas aeruginosa ou pour un embole septique au cours d’une [ATLL]) est une hémopathie secondaire au human T-lymphotropic
aspergillose invasive). virus 1 (HTLV-1), qui est endémique aux Caraïbes et au Japon. Des
lésions cutanées spécifiques sont présentes dans plus de la moi-
tié des cas [14] . Celles-ci peuvent être très variées, et notamment
ressembler au mycosis fongoïde, dont elles doivent être distin-
histologiques qu’au cours des LAM, mais peut parfois être de guées [15, 16] . Les formes érythrodermiques et papulonodulaires
présentation trompeuse (exanthème maculopapuleux). La LC au sont de mauvais pronostic.
cours des SMD est de très mauvais pronostic, car annonçant le L’atteinte cutanée spécifique au cours des myélomes multiples
plus souvent une transformation du SMD en LAM [5, 6] . (plasmocytome cutané secondaire) est exceptionnelle, mais de
La myelodysplasia cutis correspond à l’infiltration du derme par très mauvais pronostic [17] . Il s’agit le plus souvent de nodules
des cellules tumorales, mais non blastiques, et se présenterait le rosés multiples, plus rarement de plaques infiltrées, survenant
plus souvent sous la forme de plaques érythémateuses annulaires, après plusieurs années d’évolution de l’hémopathie. La biop-
associées à de la fièvre et des arthralgies, avec un bien meilleur pro- sie cutanée montre un infiltrat fait de plasmocytes atypiques
nostic que la LC. La distinction histologique entre les deux entités et parfois de cellules plasmablastiques. Cette entité ne doit
repose sur des critères cytologiques et immunohistochimiques [6] . pas être confondue avec le plasmocytome cutané primitif, qui
Au cours des SMP, l’atteinte cutanée spécifique est très rare, appartient aux lymphomes B cutanés primitifs. Au cours des
surtout rapportée au cours des leucémies myélomonocytaires gammapathies monoclonales et de la maladie de Waldenström,
chroniques [7] , et serait également de mauvais pronostic [8] . l’immunoglobuline (Ig) monoclonale peut également être retrou-
vée sous forme intacte dans la peau : il s’agit de l’exceptionnelle
hyperkératose folliculaire spiculée siégeant avec prédilection sur
Localisations cutanées des hémopathies le nez et les extrémités [18, 19] et de la macroglobulinose cutanée.
lymphoïdes Celle-ci se manifeste par des petites papules couleur peau nor-
male parfois excoriées, ombiliquées ou hémorragiques des faces
Les leucémies aiguës lymphoblastiques et les lymphomes B d’extension des extrémités (Fig. 5). Elles sont le plus souvent
et T systémiques peuvent exceptionnellement envahir la peau asymptomatiques et n’auraient pas de signification pronostique.
sous la forme de nodules ou de tumeurs nécrotiques ou La biopsie cutanée montre un dépôt d’IgM monotypique dans le
ulcérées d’apparition très rapide. Le diagnostic est en règle derme superficiel.

EMC - Dermatologie 3
98-710-A-10  Dermatoses associées aux hémopathies malignes

Figure 4. Nodule ecchymotique du front chez un patient atteint de Figure 5. Petites papules hémorragiques du talon correspondant à une
leucémie à cellules dendritiques plasmacytoïdes (cliché de la photothèque localisation cutanée de maladie de Waldenström (cliché de la photo-
de l’hôpital Saint-Louis, Paris). thèque de l’hôpital Saint-Louis, Paris).

On distingue ainsi les manifestations cutanées spécifiques qui intacts dans le derme superficiel et un œdème sous-épidermique
peuvent faire découvrir l’hémopathie (LC, LAI, LLC, LCDP, ATLL) parfois massif. On distingue les SS classiques, qui rendraient
et celles qui peuvent modifier la prise en charge de celle-ci du fait compte de près de 60 % des cas [21] (femme jeune, postinfec-
de leur impact pronostique (LC, SMP). tieux), les SS médicamenteux (10 % des cas) et les SS associés à
des néoplasies. Au sein de ces derniers, les hémopathies myéloïdes
sont de loin les plus fréquentes (80 % des SS associés aux néopla-
 Dermatoses satellites sies), et en particulier les LAM et les SMD [22] . Les SS au cours
des LAM surviennent le plus souvent dans les 7 jours suivant
des hémopathies malignes le début de la chimiothérapie (azacytidine, inhibiteurs de FMS-
like tyrosine kinase 3 [FLT3], acide tout transrétinoïque [ATRA]) et
Il s’agit de manifestations cutanées en lien avec l’hémopathie sont d’évolution rapidement favorable, sous corticoïdes ou spon-
sous-jacente. On préfère dans ce contexte le terme de derma- tanément. La chimiothérapie ne doit pas être contre-indiquée [23]
toses « satellites » au terme de « paranéoplasiques », leurs et la survenue de SS ne semble pas avoir de signification pro-
évolutions respectives pouvant parfois être dissociées. Leur phy- nostique. Les SS au cours des SMD sont de présentation plus
siopathologie est très variable. Comme pour les localisations atypique : absence de fièvre et d’arthralgies, cytopénies, caractère
spécifiques, reconnaître ces dermatoses est un enjeu diagnos- chronique et/ou récidivant, histologie histiocytoïde [22, 23] . Le SS
tique majeur, puisqu’elles peuvent soit révéler une hémopathie, histiocytoïde se différencie histologiquement de la myelodyspla-
soit avoir une signification pronostique et modifier la stratégie sia cutis dans laquelle l’infiltrat dermique est constitué de cellules
thérapeutique. Les examens complémentaires de première inten- tumorales (cellules immatures de taille moyenne, ayant un cyto-
tion recommandés devant ces dermatoses possiblement satellites plasme éosinophilique abondant et un noyau incurvé en « noix
d’une hémopathie maligne sont résumés dans le Tableau 2. de cajou » ou une anomalie pseudo-Pelger [6] ). Le SS peut précéder
la découverte du SMD de plusieurs années. Sa survenue chez un
patient âgé et/ou la présence des atypies ci-dessus doit faire pro-
Dermatoses satellites des hémopathies poser une surveillance hématologique prolongée. Le SS pourrait
myéloïdes. indiquer une acutisation du SMD et être de mauvais pronostic [23] .
La survenue de SS au cours des hémopathies myéloïdes pourrait
Dermatoses neutrophiliques être expliquée par la différenciation des cellules myéloïdes tumo-
Les dermatoses neutrophiliques (DN) appartiennent au spectre rales en PNN d’allure mature infiltrant la peau, sous l’effet d’un
des maladies auto-inflammatoires polygéniques. Elles sont carac- traitement favorisant ou du fait du phénotype tumoral [24] . Les SS
térisées par un infiltrat de polynucléaires cutané stérile, la sont plus rarement rapportés au cours des SMP et des hémopathies
possibilité de formes de transition d’une forme à une autre, la lymphoïdes.
bonne réponse aux corticoïdes et la fréquente association à une Toujours parmi les DN, l’hidradénite eccrine neutrophilique
pathologie sous-jacente [20] . Les pathologies le plus fréquemment (HEN) se caractérise classiquement par la survenue brutale de
associées varient en fonction du type de DN. plaques ou nodules inflammatoires siégeant sur le haut du corps,
Au sein de ces DN, le syndrome de Sweet (SS) est caractérisé par mais la présentation peut être très polymorphe. L’évolution est
l’apparition brutale, parfois après un syndrome pseudo-grippal, toujours spontanément favorable en moins de 2 semaines. Le
de papulonodules érythématoviolacés bien limités, sensibles, diagnostic est histologique, mettant en évidence de façon carac-
d’aspect mamelonné, siégeant avec prédilection sur le haut du téristique un infiltrat fait de PNN matures autour des glandes
corps, et s’accompagnant fréquemment de fièvre, d’arthralgies sudoripares. Il survient quasi constamment après l’administration
et d’un syndrome inflammatoire biologique. La biopsie cutanée de cytarabine pour une LAM. Là encore, la survenue d’une HEN
montre un infiltrat de polynucléaires neutrophiles (PNN) matures ne doit pas contre-indiquer la poursuite de la chimiothérapie.

4 EMC - Dermatologie
Dermatoses associées aux hémopathies malignes  98-710-A-10

Tableau 2.
Conduite à tenir pour rechercher une hémopathie devant une dermatose possiblement paranéoplasique.
Tableau clinicohistologique Hémopathie sous-jacente Autres étiologies possibles (liste Examens complémentaires systématiques de
possible non exhaustive) première intention à la recherche d’une hémopathie
Dermatose neutrophilique LAM Maladies inflammatoires du tube NFS
SMD digestif ; rhumatismes Frottis sanguin
MGUS inflammatoires ; connectivites ; Électrophorèse des protéines sériques
LLC grossesse ; néoplasies solides... Si sexe masculin et âge > 50 ans : ajouter myélogramme
avec cytologie, cytogénétique, biologie moléculaire
Si âge > 65 ans : ajouter immunofixation
Polychondrite atrophiante SMD Idiopathique NFS, frottis sanguin
Si sexe masculin et âge > 50 ans : ajouter myélogramme
avec cytologie, cytogénétique, biologie moléculaire
Vascularites SMD Maladies auto-immunes et NFS
Lymphomes inflammatoires, Frottis sanguin
cryoglobulinémie, infections Dosage des LDH
(endocardite infectieuse, VHC...), Scanner ou PET-scanner a
iatrogénie, néoplasies solides...
Prurit aquagénique SMP Urticaire aquagénique NFS
Frottis sanguin
Si technique disponible : recherche des
mutations JAK2/CALR/MPL
Prurit sine materia Maladie de Hodgkin Cholestase, dysthyroïdie, carence NFS
martiale, séropositivité VIH, Frottis sanguin
insuffisance rénale chronique, Dosage des LDH
iatrogénie... Scanner ou PET-scanner a
Pemphigus paranéoplasique Lymphomes Néoplasies solides NFS
LLC Frottis sanguin
Maladie de Castleman Dosage des LDH
PCR sanguine HHV8
Phénotypage lymphocytaire (recherche d’une
population monotypique)
Scanner ou PET-scanner a

HHV8 : herpèsvirus humain 8 ; LAM : leucémie aiguë myéloïde ; LDH : lactates-déshydrogénases ; LLC : leucémie lymphoïde chronique ; MGUS : gammapathie monoclonale
de signification indéterminée ; NFS : numération formule sanguine ; PCR : polymérisation en chaîne ; PET : positon emission tomography ; SMD : syndrome myélodysplasique ;
SMP : syndrome myéloprolifératif ; VHC : virus de l’hépatite C ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine.
a
Scanner thoraco-abdomino-pelvien injecté ou PET-scanner selon les disponibilités locales, les contre-indications éventuelles du patient, les éléments d’orientation
diagnostique.

Le pyoderma gangrenosum est plus rare au cours des hémopathies récidivante du cartilage des oreilles, du larynx, de l’arbre trachéo-
myéloïdes. Il se manifeste par un ou plusieurs ulcères doulou- bronchique et du nez. Des manifestations dermatologiques sont
reux, le plus souvent localisés aux membres inférieurs, d’extension présentes chez 20 à 40 % des patients [27] : il s’agit de DN, d’aphtose
rapidement centrifuge, à bordure nette et creusée de clapiers puru- bipolaire, de purpura nécrotique. Une atteinte cardiaque et/ou
lents. Le diagnostic positif repose sur un faisceau d’arguments articulaire peut également être associée. Parmi les patients atteints
cliniques, histologiques et microbiologiques. Lorsqu’il est asso- de PCA, ceux qui avaient également un SMD étaient plus âgés,
cié aux hémopathies myéloïdes, il serait plus volontiers bulleux, de sexe masculin, avec davantage de signes généraux, de DN,
intéressant le chef, avec des bordures hémorragiques entourées une atteinte réfractaire au traitement de fond et un moins bon
d’un halo gris-bleu [22] . Il a également été rapporté au cours des pronostic.
gammapathies monoclonales. On recherche ainsi de façon systématique un SMD devant une
L’erythema elevatum diutinum et la pustulose sous-cornée sont PCA, en particulier lorsque le diagnostic est porté chez un sujet
surtout rapportés en association avec les gammapathies mono- masculin de plus de 55 ans.
clonales et sont abordés plus bas.

Syndrome VEXAS
Vascularite des petits vaisseaux et périartérite
Les manifestations auto-inflammatoires décrites ci-dessus (DN,
noueuse PCA, vascularite), survenant chez des sujets de sexe masculin
La survenue de vascularite des petits vaisseaux et de périarté- à partir de 50–60 ans en association avec un SMD, ou plus
rite noueuse paranéoplasique au cours d’hémopathies myéloïdes, rarement avec une gammapathie monoclonale de signification
en particulier de SMD, a été rapportée [1] . L’atteinte cutanée est indéterminée (MGUS), sont fréquemment associées à la présence
plus fréquente que les autres atteintes viscérales et serait pré- d’une mutation somatique de UBA1. Il s’agit d’un gène impliqué
coce, pouvant précéder le diagnostic d’hémopathie dans un quart dans l’ubiquitination (modification post-traductionnelle d’une
des cas [25] . La présentation clinicohistologique ne serait toutefois protéine, pouvant notamment entraîner sa destruction par le pro-
pas spécifique. Il convient, bien sûr, de distinguer une vascu- téasome). L’équipe à l’origine de cette découverte a proposé le
larite paranéoplasique d’une infiltration des vaisseaux par des terme de VEXAS syndrome (vacuoles, E1 enzyme, X-linked, autoin-
cellules blastiques (LC à type de vascularite) et des vascularites flammatory, somatic) [28] . Les manifestations cutanées sont très
infectieuses. fréquentes au cours de ce syndrome (83,5 à 88 % des patients
selon les séries [28, 29] ) et le premier symptôme rapporté dans près
de deux tiers des cas [30] . Il s’agit le plus souvent de maculopa-
Polychondrite chronique atrophiante pules érythémateuses multiples du tronc, arciformes, évoluant par
La polychondrite chronique atrophiante (PCA) est une connec- poussées, parfois de livedo et de réactions aux points d’injection.
tivite rare, associée aux SMD chez près d’un patient sur six Les biopsies cutanées montrent un infiltrat dermique de cellules
d’après une étude rétrospective récente [26] (beaucoup plus rare- myéloïdes immatures associées en proportion variable à des PNN
ment aux lymphomes). Elle est caractérisée par une inflammation matures, des lymphocytes, des histiocytes [30] . Il s’y associe de

EMC - Dermatologie 5
98-710-A-10  Dermatoses associées aux hémopathies malignes

façon variable de la fièvre, une altération de l’état général, une


atteinte pulmonaire ou oculaire, une PCA, des thromboses vei-
neuses [29] . Des anomalies hématologiques, le plus souvent un
SMD, sont présentes dans la moitié des cas.

Manifestations vasculaires
Au cours des SMP, on peut observer des manifestations vascu-
laires en lien avec l’hyperviscosité sanguine : livedo, phlébites
superficielles (polyglobulie de Vaquez), ulcères de jambe (leucé-
mie myéloïde chronique), érythermalgie. Cette dernière est un
acrosyndrome se manifestant de façon paroxystique à la chaleur
par la survenue d’un érythème chaud et douloureux des extré-
mités, soulagé par l’immersion de celles-ci dans l’eau froide. Elle
peut être d’origine génétique, idiopathique, ou secondaire à un
SMP. La survenue d’une érythermalgie après l’âge de 40 ans doit
systématiquement faire rechercher une polyglobulie de Vaquez,
une thrombocytémie essentielle, plus rarement un autre SMP.

Prurit aquagénique
L’apparition d’un prurit aquagénique est très évocatrice de SMP
et doit systématiquement le faire rechercher [31] . Il est à distinguer Figure 6. Kératodermie palmaire lichénoïde chez une patiente atteinte
cliniquement de l’urticaire aquagénique. Le prurit aquagénique d’un pemphigus paranéoplasique d’une maladie de Castleman (cliché de
serait présent chez plus de 40 % des patients atteints de poly- la photothèque de l’hôpital Saint-Louis, Paris).
globulie de Vaquez, et évoluerait dans la moitié des cas avant
le diagnostic de l’hémopathie. Le prurit survient après un court
contact avec l’eau et dure plusieurs minutes après l’arrêt de la sti- Dermatoses bulleuses auto-immunes
mulation. Il est souvent d’intensité modérée, mais peut conduire Des dermatoses bulleuses auto-immunes peuvent être observées
à une véritable hydrophobie chez les patients atteints. au cours des hémopathies lymphoïdes. Le pemphigus paranéo-
plasique (PNP) se manifeste par des lésions cutanéomuqueuses
Ulcérations muqueuses polymorphes, pouvant associer des bulles flasques, un signe de
Nikolsky, des bulles tendues, des lésions lichénoïdes (Fig. 6) et
La présence d’ulcérations muqueuses serait la principale une atteinte muqueuse souvent étendue. Une chéilite lichénoïde,
manifestation dermatologique au cours des syndromes hyperéo- une conjonctivite pseudo-membraneuse, une bronchiolite oblité-
sinophiliques (SHE) myéloïdes et serait de mauvais pronostic [32] . rante sont très évocatrices. Certains auteurs ont proposé le terme
L’histologie montre un infiltrat riche en éosinophiles. Des hémor- de « syndrome paranéoplasique auto-immun multiorgane [34] »
ragies sous-unguéales et des papuloses lymphomatoïdes ont plutôt que de PNP devant le caractère polymorphe des lésions
également été rapportées. Ce SMP survient exclusivement chez cutanées — lichénoïdes, érythème polymorphe-like ou pemphi-
les hommes et est volontiers associé à des cytopénies, une spléno- goïde bulleuse-like —, les atteintes viscérales fréquentes et le taux
mégalie, des événements thromboemboliques, des manifestations élevé de mortalité (estimée à 57 % dans une série récente portant
pulmonaires. Une hypervitaminose B12 et une élévation de la tryp- sur les PNP associés aux hémopathies malignes [35] ) les distin-
tase sont évocatrices. guant des pemphigus profonds et superficiels. La biopsie cutanée
montre volontiers une vacuolisation de la basale et des nécroses
kératinocytaires en plus de l’acantholyse. Le « double marquage »
Dermatoses satellites des hémopathies en immunofluorescence directe (dépôts linéaires d’IgG et de C3
lymphoïdes le long de la jonction dermoépidermique et dépôts intraépi-
dermiques en résille) est également très évocateur. L’étude en
Prurit sine materia immunofluorescence indirecte peut trouver des anticorps antisub-
Un prurit sine materia intense et généralisé peut révéler une stance intercellulaire, y compris sur vessie de rat, et l’immunoblot
maladie de Hodgkin (il serait présent chez 30 % des patients). détecte des anticorps antiplakines [35, 36] . Les principales néopla-
Il est donc indispensable de rechercher, chez tout patient pré- sies associées à ce PNP sont les lymphomes B non hodgkiniens,
sentant un prurit sine materia, une notion d’altération de l’état la maladie de Castleman et la LLC B. Les néoplasies solides sont
général, de la fièvre, des sueurs nocturnes, une polyadénopathie, bien plus anecdotiques. Des dermatoses à dépôts linéaires d’IgA et
une organomégalie. La réalisation d’un bilan minimal devant des épidermolyses bulleuses acquises ont également été rapportées
tout prurit (numération formule sanguine, dosage des lactates- dans ce contexte.
déshydrogénases, radiographie de thorax) semble ainsi nécessaire.
D’autres syndromes lymphoprolifératifs peuvent se manifester Manifestations satellites des syndromes
initialement par un prurit, en particulier les SHE lymphoïdes et
les lymphoproliférations T. hyperéosinophiliques lymphoïdes
Des manifestations cutanées seraient révélatrices d’un SHE lym-
phoïde dans plus d’un tiers des cas [37] . Celles-ci sont extrêmement
Pseudo-réactions aux piqûres d’insectes polymorphes [32] : urticaire superficielle et angio-œdème, derma-
Des dermatoses à éosinophiles ou pseudo-réactions aux piqûres tose eczématiforme parfois érythrodermique, prurigo nodulaire,
d’insectes peuvent être observées, principalement au cours des prurit sine materia. La biopsie cutanée révèle un riche infiltrat éosi-
LLC, mais également au cours d’autres lymphoproliférations B. nophilique devant faire évoquer le diagnostic, qui est confirmé
Il s’agit de lésions papuleuses ou vésiculeuses, prédominant au par une hyperéosinophilie circulante et la présence d’un clone
chef, prurigineuses et évoluant de façon subintrante. La biopsie lymphocytaire T circulant de phénotype anormal.
cutanée montre un infiltrat dermique dense, souvent folliculo-
trope, constitué de lymphocytes T et d’éosinophiles. Un clone B
peut être présent dans la peau. Cette entité, pour laquelle le terme Dermatoses neutrophiliques
de « papulose T associée aux hémopathies B » a récemment été Des DN peuvent être observées chez les patients porteurs d’une
proposé [33] , peut parfois précéder le diagnostic de l’hémopathie. Ig monoclonale. Il s’agit le plus souvent de myélome multiple et

6 EMC - Dermatologie
Dermatoses associées aux hémopathies malignes  98-710-A-10

Figure 7. Purpura des plis de flexion au cours d’une amylose AL (cliché Figure 8. Petites papules couleur chair ou cireuses rétro-auriculaires,
de la photothèque de l’hôpital Saint-Louis, Paris). très évocatrices de scléromyxœdème (cliché de la photothèque de
l’hôpital Saint-Louis, Paris).

de MGUS d’isotype IgA [38] . Les DN semblent évoluer de façon


dissociée par rapport à l’hémopathie.
L’erythema elevatum diutinum se manifeste par des papulo- On observe plus rarement des papulonodules classiquement
nodules de couleur chair à violine, siégeant sur les faces « cireux », un syndrome sclérodermiforme, une macroglossie.
d’extension des membres (interphalangiennes, métacarpopha- L’atteinte cardiaque et rénale de l’amylose AL peut mettre en jeu
langiennes, coudes, genoux...), parfois prurigineux. La biopsie le pronostic vital. La biopsie cutanée ou de la graisse abdominale
cutanée montre un infiltrat dermique dense de PNN, de topogra- peut fréquemment permettre le diagnostic.
phie essentiellement périvasculaire. La dapsone est le traitement L’Ig peut également se déposer sous forme de cryoprotéines
de choix. dans les vaisseaux au cours des cryoglobulinémies de type I
La pustulose sous-cornée est une DN rare, correspondant à (monoclonale) et de type II (contingent monoclonal associé à un
l’apparition rapide de pustules de grande taille, non folliculaires, contingent polyclonal), entraînant une vasculopathie thrombo-
siégeant sur une peau érythémateuse, avec parfois un hypopion. sante. Les manifestations cutanées classiques de celle-ci sont un
Les lésions adoptent souvent une disposition annulaire et prédo- purpura réticulé (ou « stellaire ») siégeant sur les zones exposées
minent sur le tronc et les grands plis. au froid (oreilles, nez, extrémités), devenant ensuite nécrotique de
Une gammapathie monoclonale serait la deuxième cause de façon parfois très extensive (purpura nécrotique en carte de géo-
pyoderma gangrenosum paranéoplasique après les hémopathies graphie), un syndrome de Raynaud, une urticaire. Des atteintes
myéloïdes, en particulier après l’âge de 65 ans [39, 40] . neurologiques périphériques, rénales ou cardiaques, sont pos-
Des SS ont également été décrits, souvent après un traitement sibles.
par bortézomib, au cours des hémopathies associées à une IgG L’Ig monoclonale peut avoir une activité d’autoanticorps
monoclonale. responsable de manifestations cutanées : il peut s’agir de xan-
thodermie (activité antiriboflavine), de xanthomes plans et de
Gammapathies monoclonales de signification xanthogranulomes nécrobiotiques (activité antilipoprotéines),
d’angio-œdèmes acquis (activité anti-C1q inhibiteur).
cutanée La présence d’une Ig monoclonale peut être associée à une sécré-
Le terme de « gammapathies monoclonales de signification tion anomale de cytokines. Au cours du syndrome de Schnitzler,
clinique [41] », et plus précisément de « gammapathies monoclo- l’hyperproduction d’interleukine 1 (IL-1) est responsable d’une
nales de signification cutanée [19] », a récemment été proposé pour urticaire neutrophilique, de fièvre, d’arthralgies et de douleurs
rendre compte des situations où une Ig monoclonale détermine osseuses. Le syndrome POEMS (polyneuropathy, organomegaly, endo-
des complications significatives, mais non comprises dans les cri- crinopathy, monoclonal component, skin changes) est associé à une
tères de gravité hématologiques classiques de la gammapathie. franche élévation du taux sérique de vascular endothelial growth fac-
Notamment, le taux d’Ig n’est pas corrélé à la sévérité des tableaux tor (VEGF) et d’IL-6. Un syndrome de Raynaud, une acrocyanose,
rencontrés. Des dermatoses variées peuvent ainsi être observées, une leuconychie, une hypertrichose, un syndrome sclérodermi-
aussi bien dans le cadre d’une MGUS que d’un myélome multiple, forme, une hyperpigmentation, une lipoatrophie ou bien des
d’une maladie de Waldenström ou d’une hémopathie lymphoïde hémangiomes gloméruloïdes peuvent être observés et doivent
sécrétant une Ig. Elles peuvent être classifiées en fonction de leur faire évoquer le diagnostic. Une sécrétion locale de VEGF est
mécanisme supposé : dépôts de paraprotéines intactes ou modi- probablement responsable des exceptionnels AESOP (adenopathy
fiées, activité biologique de la paraprotéine, sécrétion anormale extensive skin patch overlying plasmocytoma).
de cytokines, mécanisme inconnu. Enfin, certaines entités clinicohistologiques associées aux Ig
L’Ig peut se déposer dans la peau sous forme de plaques monoclonales sont de mécanisme encore inconnu. C’est notam-
amyloïdes (amylose AL), entraînant des hématomes faciles, un ment le cas de l’exceptionnel scléromyxœdème, au cours duquel
purpura parfois ecchymotique dans les zones de friction (région on observe de multiples petites papules couleur chair (Fig. 8) et
palpébrale, cou, grands plis) (Fig. 7), des bulles hémorragiques. un syndrome sclérodermiforme. Des dépôts de mucine peuvent

EMC - Dermatologie 7
98-710-A-10  Dermatoses associées aux hémopathies malignes

également atteindre, les articulations et le cœur. Le dermato- [8] Vitte F, Fabiani B, Bénet C, Dalac S, Balme B, Delattre C, et al. Spe-
neuro-syndrome fait toute la gravité de la maladie [42] . C’est cific skin lesions in chronic myelomonocytic leukemia: a spectrum of
également le cas de la cutis laxa acquise, se manifestant par une myelomonocytic and dendritic cell proliferations: a study of 42 cases.
peau lâche et fripée en raison d’une élastolyse de tout le derme [43] . Am J Surg Pathol 2012;36(9):1302–16.
Cette élastolyse touche également le tissu bronchopulmonaire et [9] Botros N, Cerroni L, Shawwa A, Green PJ, Greer W, Pasternak S,
peut être responsable de multiples prolapsus viscéraux. et al. Cutaneous manifestations of angioimmunoblastic T-cell lym-
phoma: clinical and pathological characteristics. Am J Dermatopathol
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 Conclusion [10] Oishi N, Sartori-Valinotti JC, Bennani NN, Wada DA, He R, Cappel
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Les manifestations dermatologiques au cours des hémopathies 2019;46(9):637–44.
sont extrêmement variées par leur présentation clinique et leur [11] Thiesen I, Wehkamp U, Brüggemann U, Ritgen M, Murga Penas EM,
mécanisme physiopathologique. Le dermatologue est souvent Klapper W, et al. Skin involvement by chronic lymphocytic leukae-
en première ligne dans la reconnaissance précoce de ces mani- mia is frequently associated with unrelated neoplastic or inflammatory
festations cliniques, qui peuvent permettre de découvrir une cutaneous disease and is not indicative of general disease progression.
hémopathie et d’en modifier la prise en charge thérapeutique. Br J Dermatol 2019;180(1):227–8.
L’apport de l’histologie est essentiel. La collaboration entre derma- [12] Brüggen MC, Valencak J, Stranzenbach R, Li N, Stadler R, Jonak C,
tologue, hématologue et anatomopathologiste est indispensable. et al. Clinical diversity and treatment approaches to blastic plasmacy-
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hémopathie sous-jacente : et al. Revised adult T-cell leukemia-lymphoma international consensus
◦ des papulonodules infiltrés, violacés ou ecchymo- meeting report. J Clin Oncol 2019;37(8):677–87.
tiques ; [16] Miyashiro D, Sanches JA. Cutaneous manifestations of adult T-cell
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◦ un prurit sine materia ou aquagénique ;
[17] Woo YR, Kim JS, Lim JH, Hwang S, Kim M, Bae JM, et al. Preva-
◦ chez le sujet d’âge moyen : une dermatose neu- lence and clinicopathologic characteristics of multiple myeloma with
trophilique, un acrosyndrome, une polychondrite cutaneousinvolvement: a case series from Korea. J Am Acad Dermatol
chronique atrophiante, une vascularite des petits vais- 2018;78(3):471–8.e4.
seaux ou une périartérite noueuse. [18] Alegría-Landa V, Cerroni L, Kutzner H, Requena L. Paraprotein depo-
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polyadénopathie, doivent faire craindre un lymphome [20] Wallach D, Vignon-Pennamen MD. From acute febrile neutrophilic
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• En cas de suspicion de manifestation cutanée associée à Am Acad Dermatol 2006;55(6):1066–71.
une hémopathie, l’apport de l’histologie est souvent essen- [21] Cohen PR. Sweet’s syndrome — a comprehensive review of an acute
tiel. Il est indispensable de communiquer au pathologiste febrile neutrophilic dermatosis. Orphanet J Rare Dis 2007;2:34.
[22] Lepelletier C, Bouaziz JD, Rybojad M, Bagot M, Georgin-Lavialle
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C. Lepelletier (clemence.lepelletier@aphp.fr).
J.-D. Bouaziz.
Service de dermatologie, Hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Lepelletier C, Bouaziz JD. Dermatoses associées aux hémopathies malignes. EMC - Dermatologie
2023;25(4):1-9 [Article 98-710-A-10].

EMC - Dermatologie 9
 98-725-A-10

Xanthomes
J. Kaikati, F. Stéphan

Résumé : Les xanthomes sont des lésions bénignes de couleur jaune orangé constituées d’un dépôt de
lipides de localisation principalement cutanée ou tendineuse. Histologiquement, il s’agit d’une infiltration
d’histiocytes spumeux chargés en cholestérol et triglycérides. Les xanthomes peuvent être la manifesta-
tion clinique de divers troubles lipidiques primaires ou secondaires, ou d’autres maladies sous-jacentes.
Les xanthomatoses sont classées en deux types : dyslipoprotéinémique et normolipidique. Les xantho-
matoses dyslipoprotéinémiques primitives sont le témoin d’une hyperlipoprotéinémie primitive familiale
ou plus rarement la manifestation d’affections héréditaires exceptionnelles (xanthomatose cérébrotendi-
neuse, sitostérolémie, maladie de Tangier). Les xanthomatoses dyslipoprotéinémiques secondaires sont
d’étiologie variable : néoplasique, hématologique, hépatique, néphrotique, endocrinologique, métabo-
lique ou médicamenteuse. Quant aux xanthomatoses normolipidiques, elles sont rares et nécessitent
des investigations à la recherche de localisations extracutanées et de pathologies associées telles que
des dyscrasies plasmocytaires, des syndromes lymphoprolifératifs ou un diabète insipide. Ces xanthoma-
toses normolipidiques comportent les xanthogranulomes nécrobiotiques, la xanthomatose disséminée de
Montgomery, les xanthomes plans diffus, les xanthogranulomes juvéniles et les xanthomes papuleux. Le
traitement des xanthomes repose essentiellement sur le traitement de l’étiologie dans les formes dysli-
pidémiques. Il existe différentes modalités thérapeutiques chimiques, physiques ou chirurgicales pour le
traitement symptomatique des xanthomes.
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Mots-clés : Xanthomes ; Xanthomes normolipidiques ; Xanthomes dyslipidémiques ;


Dyslipidémie familiale ; Xanthélasma

Plan leurs localisations anatomiques suggèrent souvent la nature de la


maladie associée.
■ Introduction 1
■ Formes cliniques 1
■ Particularités anatomopathologiques 2  Formes cliniques
■ Physiopathologie 3
Les xanthomes présentent des caractéristiques communes mais
■ Étiologies 3 ont des formes cliniques très diversifiées.
■ Traitements 8
■ Annexe A. Effets indésirables des statines 10
■ Annexe B. Effets des inhibiteurs de l’absorption du Xanthélasma
cholestérol sur les lipides 11 C’est la forme la plus fréquente de xanthome cutané. Il s’agit
■ Annexe C. Effets sur les lipides et effets indésirables des
d’un dépôt riche en lipides, principalement en cholestérol [1] .
séquestrants d’acides biliaires 11 Des papules et des plaques molles et jaunâtres apparaissent plus
■ Annexe D. Effets des inhibiteurs des PCSK9 11 fréquemment vers le canthus interne de la paupière inférieure,
■ Annexe E. Effet des fibrates sur la morbidité et la mortalité et moins fréquemment au niveau de la paupière supérieure. La
cardiovasculaires 11 majorité des lésions sont symétriques (Fig. 1). Elles peuvent être
uniques ou multiples, et sont le plus fréquemment observées chez
les personnes âgées de plus de 50 ans. Le xanthélasma peut être
associé à une dyslipidémie, un diabète ou une dysthyroïdie. On
estime que 50 % des cas présentent une anomalie du bilan lipi-
 Introduction dique [2] . Lee et al. ont proposé une classification en quatre grades
en fonction de la localisation et de l’étendue des lésions [3] .
Les xanthomes sont des plaques ou des nodules constitués d’un Dans des situations plus rares, le xanthélasma peut être la mani-
dépôt de lipides principalement cutané ou tendineux. Caracté- festation cutanée de la maladie d’Erdheim-Chester (26 % des cas).
risés par leur couleur jaune orangé, les xanthomes représentent Hormis le xanthélasma, cette maladie peut se présenter par des
le signe clinique de divers troubles lipidiques primaires, secon- papules punctiformes rouge brun du visage ou du tronc. Il s’agit
daires, ou d’autres maladies sous-jacentes. Leurs morphologies et d’une forme d’histiocytose non langerhansienne, qui se manifeste

EMC - Dermatologie 1
Volume 25 > n◦ 4 > novembre 2023
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0319(23)43954-4
98-725-A-10  Xanthomes

et le périoste. Les sites de prédilection sont les tendons calca-


néens, les tendons du dos des mains et des doigts, les coudes,
les genoux et les talons. Les xanthomes tendineux se développent
en association avec les mêmes types de dyslipidémie que les xan-
thomes tubéreux [2] . Des études ont montré que le xanthome du
tendon calcanéen constitue un facteur de risque cardiovasculaire
indépendant. L’évaluation de son épaisseur pourrait constituer un
instrument d’estimation de la sévérité de la coronaropathie [5] .

Xanthochromie striée palmaire


Il s’agit d’une infiltration oblongue plane de couleur jaune
orangé (xanthoma striatum palmare) ou d’une simple teinte jau-
Figure 1. Xanthélasma. Figure partagée après l’autorisation de H. nâtre le long des plis de flexion palmaires (xanthochromia striata
Adamski et D. Bligny (service de dermatologie CHU de Rennes). palmaris). La xanthochromie striée palmaire est presque pathog-
nomonique de la dysbêtalipoprotéinémie primaire. Par ailleurs,
cette forme de xanthome peut parfois être observée en association
avec le diabète, l’hypothyroïdie et la cirrhose biliaire primitive [6] .

Xanthomes plans disséminés


Ce sont des extensions en nappe de lésions maculopapuleuses
jaune orangé habituellement situées au niveau des aisselles, du
cou, des épaules et des fesses [2] . Ce type de xanthome n’est géné-
ralement pas associé aux dyslipidémies mais peut être révélateur
de maladies lymphoprolifératives [7] .

Xanthomes verruciformes
Ils constituent une forme rare qui se développe principale-
ment dans la cavité buccale d’adultes de la cinquième ou sixième
décennie, avec une prédilection masculine. Il s’agit habituelle-
Figure 2. Xanthomes tubéreux. Figure partagée après l’autorisation de ment d’une lésion solitaire, bien circonscrite, asymptomatique,
H. Adamski et D. Bligny (service de dermatologie CHU de Rennes). érythémateuse ou jaune brun, de 3 à 20 mm de diamètre, par-
fois papillomateuse ou ulcérée, qui se développe au niveau de la
gencive. Les patients sont normolipidémiques. Le diagnostic dif-
principalement par des lésions osseuses présentes dans environ férentiel clinique comprend les verrues virales, la leucoplasie et le
95 % des cas. La base génétique de cette maladie concerne la carcinome spinocellulaire [8] .
voie RAS-MEK-ERK avec, dans 50 % des cas, une mutation BRAF- Les xanthomes verruciformes de la peau, qui sont extrêmement
V600E. Le diagnostic de la maladie d’Erdheim-Chester repose sur rares, ont été décrits à divers endroits. La localisation anogénitale a
des caractéristiques cliniques, radiologiques et histopathologiques cependant été la plus rapportée. En dehors des muqueuses, le xan-
typiques. Le pronostic dépend de l’étendue de l’atteinte systé- thome verruciforme se présente généralement comme un nodule
mique, en particulier de l’atteinte neurologique [4] . gris ou rosé, ou comme une plaque à surface verruqueuse. Il est
caractérisé par sa chronicité, son évolution bénigne, et l’absence
de récidive après excision locale [9] .
Xanthomes éruptifs Des xanthomes verruciformes ont été décrits en associa-
Ils sont caractérisés par une éruption brutale de papules jau- tion avec un lupus érythémateux discoïde, un lichen scléreux,
nâtres de 1 à 4 mm de diamètre entourées d’un halo érythémateux, un lichen plan, une épidermolyse bulleuse, une hémidyspla-
disposées volontiers au niveau des fesses, de la partie postérieure sie congénitale avec syndrome d’érythrodermie ichtyosiforme et
des cuisses, des coudes et de la région lombaire. Les xanthomes de malformations des membres (syndrome CHILD : congenital
éruptifs sont liés à une hypertriglycéridémie sévère (triglycé- hemidysplasia, ichthiosiform nevus, limb defects) [10, 11] , et en compli-
rides [TG] > 11,2 mmol/l) et peuvent être le signe annonciateur cation d’un lymphœdème chronique [12] .
d’une hyperchylomicronémie. L’éruption survient généralement
3 semaines après l’augmentation du taux de TG plasmatiques [2] .
 Particularités
Xanthomes tubéreux anatomopathologiques
Les xanthomes tubéreux sont des nodules jaunâtres, de 3 mm à
L’examen histopathologique révèle le plus souvent la présence
plusieurs centimètres de diamètre, qui se trouvent dans le derme
de fibroblastes, d’histiocytes qualifiés de spumeux et parfois de
et le tissu sous-cutané. Ils apparaissent généralement sur la peau
cellules géantes multinucléées de Touton. On les trouve majo-
en périarticulaire, ou sur les fesses (Fig. 2). Les patients atteints
ritairement au niveau du derme réticulaire. Les lipides peuvent
d’hypercholestérolémie autosomique dominante, de dysbêtalipo-
être reconnus en lumière polarisée sous la forme de cristaux biré-
protéinémie familiale, de bêtasitostérolémie ou de xanthomatose
fringents. Des colorations (noir Soudan, O red oil) permettent
cérébrotendineuse sont sujets à développer des xanthomes tubé-
de confirmer la nature lipidique des dépôts intracellulaires. La
reux [2] .
coloration noir Soudan est utilisée sur prélèvement congelé mais
ne peut pas être utile sur prélèvement fixé au formol tamponné.
Xanthomes tendineux L’utilisation de ces colorations reste limitée en routine. La teneur
en TG ou en cholestérol dépend non seulement de l’âge de
Ils se présentent sous la forme de nodules ou de fuseaux durs la lésion xanthomateuse mais diffère aussi selon le sous-type
mais mobiles, recouverts de peau normale. Ils infiltrent les ten- clinique. De manière générale, les xanthomes s’accompagnent
dons, les sites d’insertion tendineuse, les ligaments, les fascias initialement d’une réaction inflammatoire qui est suivie de

2 EMC - Dermatologie
Xanthomes  98-725-A-10

Tableau 1.
Formes cliniques de xanthomes, particularités histologiques et association aux hyperlipidémies primaires [12] .
Type de xanthome Xanthélasma Xanthome éruptif Xanthome tubéreux Xanthome Xanthome plan Xanthome
tendineux disséminé verruciforme
Cause IIa I IIa IIa Aucune Aucune
d’hyperlipidémie IIb IV IIb IIb
primaire associée V III III
IV IV
Localisation Derme superficiel Derme réticulaire Derme réticulaire et Derme réticulaire et Derme superficiel Anomalies
histologique superficiel hypoderme hypoderme dermoépidermiques
Particularités Macrophages Lésions précoces : Lésions précoces : Lésions précoces : Fibrose minime Acanthose massive
histologiques Spumeux dans le nombreux cellules histiocytes, Similitudes avec le mais régulière,
derme superficiel, histiocytes xanthomateuses lymphocytes et xanthogranulome papillomatose
autour des vaisseaux Lésions tardives : prédominantes neutrophiles, aspect nécrobiotique variable,
sanguins et des cellules spumeuses Lésions tardives : biréfringent des parakératose et
annexes caractéristiques fibrose dans le dépôts à la lumière hyperkératose
prédominantes derme réticulaire et polarisée Neutrophiles et
parfois dans Lésions tardives : débris
l’hypoderme fibrose dans le neutrophiliques
derme réticulaire et dans la couche
parfois dans cornée
l’hypoderme Élargissement des
crêtes épidermiques
avec nécrose
kératinocytaire
centrale

l’apparition d’histiocytes spumeux, puis d’une fibrose séquel- 10 à 100 fois du taux de TG circulants. Il s’agit d’une maladie rare,
laire [13] . Les particularités histologiques des sous-types cliniques qui touche une personne sur un million, de transmission auto-
sont présentées dans le Tableau 1. somique récessive. Des mutations de la lipoprotéine-lipase (LPL)
entraînent une accumulation de chylomicrons plasmatiques, res-
ponsables d’une hypertriglycéridémie [15, 16] . Les patients atteints
 Physiopathologie d’hyerchylomicronémie présentent des défauts héréditaires quan-
titatifs ou qualitatifs de la LPL. Ces mutations concernent le
Le développement des xanthomes débute par une extravasation gène de la production de la LPL ou des gènes liés à la fonc-
locale accrue de lipides à travers la paroi vasculaire vers l’espace tion de la LPL, qui comprennent, entre autres, APOC2, APOA5,
interstitiel des tissus conjonctifs. Les monocytes et les macro- GPIHBP1 et LMF1 [17] . De nombreuses mutations restent incon-
phages internalisent les particules lipidiques par phagocytose ou nues. Des études génétiques sont disponibles et peuvent confirmer
par des récepteurs spécifiques. Ainsi se forment les cellules spu- les diagnostics dans des situations particulières. Cette maladie est
meuses. Les situations qui favorisent cette cascade d’événements caractérisée par des xanthomes éruptifs, une lipémie rétinienne,
sont : les concentrations locales élevées de lipides dans le tissu une hépatosplénomégalie et des épisodes de pancréatite. La plu-
conjonctif, la présence de lipoprotéines qualitativement diffé- part des patients se présentent dans la très petite enfance ou au
rentes à des concentrations normales, une extravasation accrue début de l’âge adulte, mais la maladie peut s’annoncer à tout
de lipides (par augmentation de la perméabilité vasculaire ou par âge. Pour poser le diagnostic, le taux de TG doit être supérieur
inflammation chronique), la synthèse de lipides in situ et leur à 880 mg/dl sur trois prises de sang consécutives, avec peu/pas
dépôt dans les histiocytes, et le dysfonctionnement du transport d’efficacité des traitements hypolipémiants standards. Le régime
inverse du cholestérol [2] . restrictif en graisses demeure le meilleur moyen de contrôler la
maladie [16] .

 Étiologies
Certaines formes cliniques de xanthome sont évocatrices d’une
étiologie (Tableau 1). Habituellement, le bilan lipidique permet de
“ Point fort
distinguer les xanthomatoses dyslipoprotéinémiques des xantho-
matoses normolipidiques. Profil lipidique dans l’hyperchylomicronémie
(type I selon la classification de Fredrickson)
• Cholestérol total élevé en raison de la présence de cho-
Xanthomatoses dyslipoprotéinémiques lestérol dans les chylomicrons
• TG supérieurs à 880 mg/dl
Elles peuvent être primitives (familiales) ou secondaires.
• Cholestérol à lipoprotéines de base densité (LDL-C) bas,
Dyslipoprotéinémies primitives inférieur à 70 mg/dl
• Cholestérol à lipoprotéines de haute densité (HDL-C)
Depuis les années 1960, la classification de Fredrickson a per-
bas, inférieur à 40 mg/dl
mis de définir les principales classes de dyslipidémies familiales.
• Apolipoprotéine B (apo B) 100 basse ou normale
Elle repose sur des profils lipoprotéiques anormaux et distincts.
• Sérum lactescent
Cette classification demeure un outil potentiellement utile pour
décrire les différents phénotypes de ces troubles lipidiques malgré
les avancées génétiques et moléculaires [14] .
Hyperchylomicronémie (type I) Hypercholestérolémie de type IIa
L’hyperchylomicronémie familiale, également appelée hyperli- L’hypercholestérolémie familiale (HF) est une maladie autoso-
poprotéinémie de type 1 ou déficit en lipoprotéine-lipase (LPLD), mique dominante caractérisée par un taux élevé de cholestérol
est une dyslipidémie génétique caractérisée par une élévation de total et de LDL-C, un taux légèrement abaissé de HDL-C et des

EMC - Dermatologie 3
98-725-A-10  Xanthomes

concentrations normales de TG. Il s’agit d’un déficit partiel ou enrichies en cholestérol, due à l’altération de la clairance hépa-
total des récepteurs aux LDL provenant de mutations du gène tique des VLDL et des chylomicrons médiés par l’apo E. Un défaut
responsable du récepteur du LDL-C apo B/E ou apo B-100. Envi- de l’apo E2/E2 est le facteur causal majeur. Les défauts de cette
ron 70 à 95 % des cas d’HF résultent de mutation hétérozygote de protéine responsables des concentrations élevées de particules
l’un des trois gènes (APOB, LDLR, PCSK9). L’hypercholestérolémie résiduelles (y compris les lipoprotéines de densité intermédiaire
familiale peut être homozygote ou hétérozygote. La forme hétéro- [IDL]), sont hautement athérogènes et conduisent au développe-
zygote a une prévalence de 1/500 tandis que la forme homozygote ment de xanthomes palmaires pathognomoniques de la maladie.
a une prévalence de 1/1 million [18] . La plupart des personnes Les xanthomes tubéroéruptifs sont, néanmoins, les xanthomes les
atteintes de HF homozygote présentent une coronaropathie plus fréquemment observés dans ce type de dyslipidémie. La dys-
sévère durant la deuxième décennie. Sur le plan clinique, elle est lipidémie de type III est généralement cliniquement silencieuse
caractérisée par des xanthomes (xanthomes tendineux, tubéreux, dans la population pédiatrique. Les premières manifestations
palpébraux et parfois plans interdigitaux), des arcs cornéens, et apparaissent à 20 ans.
par des maladies cardiovasculaires survenant à un jeune âge. L’HF
serait responsable de 2 à 3 % des infarctus du myocarde chez les
moins de 60 ans [19] . Le diagnostic de HF peut également être éta-
bli par l’identification d’une mutation pathogène de l’un des trois
gènes. “ Point fort
Profil lipidique de la dysbêtalipoprotéinémie
(type III selon la classification de Fredrickson)
“ Point fort • Cholestérol total élevé
• TG très élevés
• LDL-C élevé
Profil lipidique dans l’hypercholestérolémie de • HDL-C bas
type IIa selon la classification de Fredrickson • IDL-C élevé
• Cholestérol total supérieur à 310 mg/dl chez un adulte, • Sérum lactescent
cholestérol total supérieur à 230 mg/dl chez un enfant
• TG normaux
• LDL-C élevé, supérieur à 190 mg/dl chez un adulte,
supérieur à 160 mg/dl chez un enfant Hypertriglycéridémie de type IV [23]
• HDL-C bas Connue sous le nom d’hypertriglycéridémie familiale, cette
• Apo B-100 élevée maladie comporte une élévation isolée des VLDL produits par
• Sérum clair le foie. Ce phénotype est relativement fréquent. La transmis-
sion est autosomique dominante. La résistance à l’insuline
peut diminuer l’activité de la LPL et contribuer davantage
à l’hypertriglycéridémie augmentant le risque de pancréatite
Hyperlipidémies mixtes aiguë. Les taux normaux de LDL permettent de distinguer
Elles regroupent le type IIb et le type III. l’hyperlipidémie de type IV de celle de type IIb. Dans
Hyperlipidémie combinée (type IIb) [20, 21] . Elle est géné- l’hypertriglycéridémie familiale, les TG sont transportés dans
ralement causée par une hyperlipidémie combinée familiale, le plasma principalement par les VLDL, alors que dans
entraînant des concentrations élevées de LDL et de lipoprotéines l’hyperlipidémie de type I, les taux élevés de TG résultent
de très basse densité (VLDL). Elle associe les formes IIa et IV. Le de l’accumulation de chylomicrons. Bien que les VLDL trans-
profil lipidique de cette maladie est athérogène : hypercholesté- portent de l’apo B et soient considérées comme athérogènes,
rolémie avec LDL petites et denses, HDL-C bas, taux élevé de TG l’augmentation du risque de maladie cardiovasculaire liée à
et concentrations élevées d’apo B. On parle de « triade lipidique l’hypertriglycéridémie familiale est modeste compte tenu des taux
athérogène ». Sa prévalence est de 1/200 naissances. La dyslipi- normaux de LDL et d’apo B. Cependant, cette dyslipidémie est
démie de type IIb est souvent associée au diabète de type 2, au associée à l’obésité et au diabète qui participent à l’augmentation
syndrome métabolique et à l’insuffisance rénale chronique (IRC). du risque cardiovasculaire. Sur le plan cutané, des xanthomes
Les patients présentant ce type de dyslipidémie ont un risque élevé éruptifs peuvent être observés, mais sont rares par rapport aux
de coronaropathie. La pathogénie découle d’une augmentation de dyslipidémies hyperchylomicronémiques.
la production hépatique de VLDL, bien que les mécanismes exacts
contribuant à la surproduction de VLDL ne soient pas encore
clairs.
“ Point fort
“ Point fort Profil lipidique de l’hypertriglycéridémie familiale
(type IV selon la classification de Fredrickson)
• Cholestérol total élevé
Profil lipidique dans l’hyperlipidémie de type IIb • TG très élevés
selon la classification de Fredrickson • LDL-C normal
• Cholestérol total élevé • HDL-C normal
• TG élevés • Apo B-100 normale ou basse
• LDL-C élevé, LDL petites et denses • Sérum lactescent
• HDL-C bas
• Apo B-100 élevée
• Sérum clair
Hypertriglycéridémie combinée de type V
Il s’agit d’une élévation combinée de VLDL et des chylomi-
crons. Les mécanismes génétiques à l’origine de cette affection
Dysbêtalipoprotéinémie (type III) [22] . Ce type de dyslipi- résultent d’une combinaison des mutations responsables de dys-
démie est caractérisé par l’accumulation de particules résiduelles lipidémies de types I et IV. Généralement, cette maladie survient

4 EMC - Dermatologie
Xanthomes  98-725-A-10

à l’âge adulte avec une fréquence de 1 sur 1 000. Le diag- des taux élevés de LDL-C et de phytostérols (sitostérol, campesté-
nostic d’hyperlipoprotéinémie de type V est considéré comme rol, stigmastérol). Les taux sériques de sitostérol sont supérieurs
définitif si les deux conditions suivantes sont rencontrées : la ou égaux à 1 mg/dl ; ils peuvent être mesurés par chromatogra-
mise en évidence d’une augmentation des VLDL en plus de phie. Le traitement repose principalement sur un régime pauvre
l’hyperchylomicronémie et l’absence de déficit en LPL, de déficit en phytostérols. Un traitement par ézétimibe permet de diminuer
en apo C-II ou d’anomalie de l’apolipoprotéine E. Les mani- les taux de lipides et d’augmenter la tolérance quotidienne aux
festations cliniques comportent des xanthomes éruptifs, une phytostérols alimentaires. La combinaison du traitement médi-
hépatosplénomégalie, une lipémie rétinienne et des douleurs épi- cal au régime alimentaire a permis une amélioration des signes et
gastriques récurrentes avec ou sans pancréatite. Les taux de TG des symptômes, la réduction des taux de cholestérol total et LDL,
à jeun dépassent 1 000 mg/dl, avec une augmentation du cho- la réduction de la taille et du nombre des xanthomes, voire leur
lestérol total et des concentrations basses de cholestérol LDL et résolution complète [29] .
HDL [23] . Maladie de Tangier. C’est une maladie autosomique récessive
caractérisée par un taux sérique de HDL-C bas, le plus souvent
inférieur à 5 mg/dl dans les atteintes bialléliques. Il s’agit d’une
mutation du gène ATP-binding cassette transporter A1 (ABCA1), qui
“ Point fort joue un rôle clé dans la génération des particules HDL à partir
du cholestérol et des phospholipides cellulaires [30] . Les signes
cliniques sont secondaires à l’accumulation de cholestérol dans
Profil lipidique de l’hypertriglycéridémie combi- les organes : amygdales pharyngées de couleur orangée, hépa-
née de type V selon la classification de Fredrickson tosplénomégalie, opacité cornéenne, neuropathie périphérique et
• Cholestérol total élevé parfois xanthomes cutanés et profonds. Il est possible d’observer
une thrombocytopénie et des altérations de la morphologie et de
• TG très élevés (> 1 000 mg/dl)
la fonction plaquettaire. La concentration sérique de HDL-C est
• LDL-C normal ou bas inférieure à 25 mg/dl et celle d’apo A-I est inférieure à 20 mg/dl.
• HDL-C normal ou bas Il existe par ailleurs une hypertriglycéridémie. Bien que les taux
• Apo B-100 normale ou basse de LDL-C soient relativement bas, cette maladie s’accompagne
• Sérum lactescent d’évènements cardiovasculaires prématurés [31] . Il n’existe aucun
traitement curatif actuellement disponible.

Dyslipoprotéinémie primitive avec accumulation de stérols Dyslipoprotéinémies secondaires


inhabituels Il existe des dyslipoprotéinémies acquises, secondaires à des
Il s’agit d’affections héréditaires exceptionnelles. étiologies diverses : néoplasiques, hématologiques, hépatiques,
Xanthomatose cérébrotendineuse (XCT). C’est une maladie néphrotiques, endocrinologiques, métaboliques et médicamen-
rare, de transmission autosomique récessive, due à des mutations teuses.
bialléliques dans le gène CYP27A1. L’enzyme déficitaire est la sté-
rol 27-hydroxylase, qui appartient à la famille du cytochrome Malignités
P450, responsable de la conversion des chaînes latérales du cho- Hémopathies malignes. Des xanthomes tubéroéruptifs et des
lestérol en acides biliaires. Par conséquent, dans cette maladie, xanthomes plans ont été observés chez des patients présentant des
la production d’acides biliaires est réduite [24] . Il existe une accu- anomalies hématologiques telles que des gammapathies mono-
mulation de précurseurs biliaires, tels que le cholestanol dans le clonales, un myélome multiple, un lymphome et diverses formes
plasma et les tissus [25] . La XCT peut survenir à tout âge, mais de leucémie. Les anticorps monoclonaux, produits en excès par les
la plupart des manifestations cliniques apparaissent au cours de plasmocytes malins de la moelle osseuse, forment des complexes
la première ou de la deuxième décennie. Une diarrhée et une avec les lipoprotéines plasmatiques, ce qui retarde la clairance
cataracte sont fréquentes à l’adolescence. Cette leucodystrophie des chylomicrons ou des VLDL, entraînant une hyperlipidémie
métabolique peut se manifester par des xanthomes tendineux nor- combinée ou une dysbêtalipoprotéinémie. Ces complexes sont
molipidiques et s’accompagner d’atteinte neurologique (retard reconnus par les récepteurs scavengers (« éboueurs ») des macro-
mental, ataxie cérébelleuse). Il existe une incidence élevée de phages dermiques et responsables du phénotype spumeux typique
coronaropathie en raison d’une athérosclérose précoce [26] . Le de ces cellules [32] . Par ailleurs, des xanthomes verruciformes oraux
diagnostic repose sur un dosage sanguin du ␤-cholestanol et la ont été décrits chez des patients atteints de maladie du greffon
mesure des alcools biliaires urinaires. Une étude génétique des contre l’hôte chronique (cGVHD) et devraient être retenus parmi
membres de la famille peut être envisagée et permettrait un diag- les diagnostics différentiels des lésions orales chez les patients
nostic précoce [27] . Le traitement consiste en l’administration des atteints de cGVHD [8] .
acides biliaires qui font défaut. L’acide chénodésoxycholique est Cancers solides. Certaines tumeurs solides (cancer du sein, de
le traitement standard. L’atteinte neurologique dans la XCT est l’ovaire, de la prostate, etc.) ont également été mises en relation
irréversible. L’initiation précoce du traitement est importante. La avec des concentrations élevées de LDL-C et de TG. La physiopa-
présence des xanthomes est un signe de mauvaise réponse aux thologie reste controversée [33] .
traitements. La XCT est de pronostic sombre ; le décès survient Causes hépatiques. Les causes hépatiques de la dyslipidé-
généralement entre la quatrième et la sixième décennie à la suite mie comprennent une obstruction des voies biliaires aboutissant
d’une détérioration neurologique, d’une paralysie pseudobulbaire à l’accumulation de cholestérol sérique. Ce cholestérol peut se
ou d’un infarctus aigu du myocarde [26] . contenir dans un nouveau type de lipoprotéine (LP-X, LP-Y et LP-
Sitostérolémie. Il s’agit d’une maladie métabolique hérédi- Z) [34, 35] . Les causes d’obstruction biliaire chronique comprennent
taire rare (1/200 000) caractérisée par des taux élevés de stérols entre autres la cirrhose biliaire primitive, l’obstruction biliaire
végétaux, tels que le sitostérol. Elle est due à des mutations secondaire et le syndrome d’Alagille [36] . Elles sont responsables
homozygotes ou hétérozygotes des gènes ABCG5 ou ABCG8, res- d’hypercholestérolémie qui, à long terme, induit la formation de
ponsables d’une perte de fonction de protéines ABCG5 et ABCG8 xanthomes plans, de xanthélasmas, de xanthomes tubéreux, de
transporteuses de stérols dans la bile et l’intestin. Ces protéines xanthomes diffus et de xanthochromie striée palmaire. Le traite-
jouent normalement un rôle important dans l’excrétion sélective ment consiste à résoudre le problème responsable de l’obstruction.
des stérols végétaux dans l’intestin, empêchant l’absorption des La majorité des cas de transplantation hépatique se sont accom-
stérols végétaux alimentaires [28] . Les manifestations cliniques de pagnés d’une disparition des xanthomes [37, 38] .
la sitostérolémie sont diverses et de gravité variable. On trouve des Causes métaboliques et endocrinologiques. Elles
xanthomes tendineux et tubéreux, une athérosclérose prématu- comprennent la grossesse, le syndrome métabolique, les
rée, une macrothrombocytopénie, une anémie hémolytique, des troubles thyroïdiens, le syndrome néphrotique et les causes
arthralgies, une splénomégalie, et une hypercholestérolémie avec médicamenteuses.

EMC - Dermatologie 5
98-725-A-10  Xanthomes

Grossesse. Les modifications hormonales qui ont lieu au


cours d’une grossesse normale sont responsables d’une aug-
mentation disproportionnée de la lipogenèse par rapport à la
lipolyse [39] . Les xanthomes éruptifs peuvent se développer mais
disparaissent généralement en quelques semaines après la correc-
tion de l’hypertriglycéridémie [40] .
Diabète. La dyslipidémie diabétique comprend une chylomi-
cronémie, une hypertriglycéridémie, une augmentation des LDL,
une diminution du HDL-C, et une augmentation des VLDL. Par
conséquent, tous les types de xanthomes peuvent être obser-
vés [41] .
Hypothyroïdie. La dyslipidémie due à l’hypothyroïdie peut
mimer des phénotypes de type IIa ou III. Il existe un risque accru
de formation de xanthomes tendineux ou éruptifs [42, 43] .
Syndrome néphrotique. Dans le syndrome néphrotique, le cho-
lestérol total, les TG, les VLDL, les IDL, les LDL, la lipoprotéine a
et le rapport cholestérol total/HDL-C sont tous augmentés [44] .
Les xanthomes éruptifs sont une complication bien connue du
syndrome néphrotique chez l’adulte mais sont une complication
rare du syndrome néphrotique de l’enfant [45] . Le développement
de xanthomes éruptifs associés au syndrome néphrotique n’est
pas fréquent malgré des périodes d’hyperlipidémie extrême. Ceci
s’explique par la nature transitoire de l’hyperlipidémie néphro-
tique [46] . Figure 3. Xanthomatose disséminée de Montgomery. Figure partagée
Origine médicamenteuse. Les diurétiques, les bêtabloquants, après l’autorisation de H. Adamski et D. Bligny (service de dermatologie
les progestatifs, les contraceptifs oraux combinés contenant des CHU de Rennes).
progestatifs de « deuxième génération », le danazol, les agents
immunosuppresseurs, les inhibiteurs de protéase et les anticon-
vulsivants inducteurs d’enzymes ont un effet négatif sur le profil C3, C4, biopsie ostéomédullaire, tomodensitométrie thoraco-
lipidique [47] . Certains médicaments, par exemple l’isotrétinoïne, abdomino-pelvienne, dosage des cryoglobulines et bilan lipidique
l’acitrétine et les antipsychotiques, élèvent principalement le taux complet [49] .
de TG [48] . Le traitement dépend de l’atteinte hématologique associée, de
l’extension des lésions cutanées et de l’atteinte extracutanée [49] .
S’il s’agit de xanthogranulome nécrobiotique cutané localisé, les
Xanthomatoses normolipidiques corticoïdes par voie topique intralésionnelle, la radiothérapie,
l’exérèse chirurgicale et des thérapies systémiques ont été propo-
Il s’agit d’un ensemble de maladies regroupées au sein des his- sés. Dans le cas d’atteinte diffuse, des agents alkylants peuvent
tiocytoses non langerhansiennes, avec un bilan lipidique le plus être associés à une corticothérapie [49, 53] .
souvent normal.

Xanthomatose disséminée de Montgomery


Xanthogranulome nécrobiotique La xanthomatose disséminée (XD) est une histiocytose non lan-
Maladie granulomateuse classée parmi les histiocytoses non gerhansienne rare qui apparaît dans l’enfance ou au début de
langerhansiennes, le xanthogranulome nécrobiotique se mani- l’âge adulte avec un sex-ratio homme/femme de 2/1. Clinique-
feste par des plaques xanthomateuses et/ou des nodules multiples ment, elle est caractérisée par l’apparition de petites papules ou
jaune orangé, rouge brunâtre ou même bleu violet avec une dis- de nodules jaune brun disséminés répartis symétriquement avec
tribution préférentielle au niveau des régions périorbitaires, mais une atteinte préférentielle des paupières (Fig. 3), des plis axillaires
pouvant siéger sur la tête, le cou et le tronc. Son caractère affi- et inguinaux et des fosses anté-ulnaires et poplitées [54] . Avec le
chant et défigurant s’accompagne d’une altération majeure de la temps, les lésions augmentent en nombre formant des nappes
qualité de vie. Des manifestations extracutanées sont également xanthomateuses confluentes parfois verruqueuses.
connues et conditionnent le pronostic. Le granulome nécro- La xanthosidéro-histiocytose disséminée est une variante de
biotique peut être la cause d’uvéites, de sclérites, de sinusites, la XD dans laquelle les lésions ont une bordure annulaire, une
de péricardites, d’infiltration myocardique, d’hépatomégalie, de consistance pseudochéloïdienne et une distribution essentielle-
neuropathies périphériques, d’hypertrophie des ganglions lym- ment céphalique. Cette variante se distingue par des dépôts
phatiques. Il peut être révélateur ou associé à une paraprotéinémie importants de fer et de lipides dans les macrophages et le tissu
en rapport avec des dyscrasies plasmocytaires ou à des troubles conjonctif, responsables de la couleur brun gris des lésions [55] .
lymphoprolifératifs. L’évolution clinique des patients atteints de Dans la XD, les atteintes muqueuses et des organes internes
granulome nécrobiotique peut être indolente ou agressive [49, 50] . sont responsables de la morbidité et de la mortalité de la maladie.
Sur le plan histologique, le xanthogranulome nécrobiotique est Les atteintes extracutanées sont à rechercher systématiquement
caractérisé par des granulomes palissadiques avec un infiltrat lym- car elles conditionnent le pronostic. La tomographie par émis-
phoplasmocytaire et des zones de nécrobiose. Les cellules géantes sion de positions (TEP) au 18-fluorodésoxyglucose (18-FDG) ou la
multinucléées à corps étranger ou type Touton et les fentes de tomodensitométrie peuvent être utiles pour définir l’étendue de
cristaux de cholestérol sont souvent retrouvées [50] . la maladie et la réponse au traitement des lésions viscérales (en
La physiopathologie reste inconnue mais l’hypothèse d’une l’absence de recommandations établies pour le bilan d’extension
interaction paraprotéine-lipoprotéine a été proposée [51] . Une à réaliser) [56] . L’atteinte de l’oropharynx et du larynx est fréquente
autre hypothèse serait le dépôt de protéines monoclonales et peut être la cause d’une dysphagie, d’une dysphonie et d’une
sériques dans la peau, induisant une réponse granulomateuse [52] . obstruction des voies respiratoires. Les atteintes conjonctivales et
Le bilan extracutané a pour but de rechercher les signes cornéennes peuvent être la cause d’une cécité [54] .
d’extension viscérale et osseuse. Il convient de réaliser numération Un diabète insipide, parfois transitoire, est associé à la XD
de formule sanguine (NFS), panel d’examens biologiques complet dans 40 % des cas ; il témoigne d’une atteinte hypophysaire [57] .
(comportant un bilan hépatorénal), électrophorèse des protéines Une atteinte du système nerveux central peut se manifester par
sériques et dosages des chaînes légères avec immunofixation, une épilepsie, une hydrocéphalie ou une ataxie [58] . Des arthrites
vitesse de sédimentation, complément hémolytique 50 (CH50), inflammatoires et des lésions osseuses ostéolytiques ont été

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Xanthomes  98-725-A-10

Figure 4. Xanthomes plans diffus cutanés. Figure partagée après


l’autorisation de H. Adamski et D. Bligny (service de dermatologie CHU
de Rennes). Figure 5. Xanthogranulome juvénile. Figure partagée après
l’autorisation de H. Adamski et D. Bligny (service de dermatologie
CHU de Rennes).
décrites [57] . La XD peut s’associer à des gammapathies monoclo- Xanthogranulome juvénile (XGJ)
nales, des myélodysplasies et des myélomes [55] . Le plus souvent,
aucune anomalie lipidique n’est mise en évidence [59] . C’est l’histiocytose non langerhansienne la plus fréquente.
L’évolution de la maladie est variable. Parmi les patients Il s’agit d’une affection cutanée bénigne autorésolutive. Cette
atteints de XD, un tiers a une rémission complète, un tiers une pathologie concerne principalement les enfants de moins d’un
rémission partielle et un tiers une progression de la maladie. an mais peut être observée chez des enfants plus âgés, et
La rémission spontanée laisse souvent des zones d’atrophie ou plus rarement à l’âge adulte. La fréquence est d’environ
d’anétodermie [60] . 1/1 000 000 enfants. Les lésions sont présentes dès la naissance
Sur le plan histopathologique, il existe des cellules géantes de dans plus de 15 % des cas [66] .
Touton et un infiltrat cellulaire inflammatoire de lymphocytes, de Le XGJ se présente sous forme de deux variétés cliniques qui
plasmocytes et de neutrophiles [57] . Les immunomarquages sont peuvent coexister :
positifs pour le groupe de différenciation 68 (CD68), le CD163 et • la variété micronodulaire forme de multiples papules hémi-
parfois le facteur XIIIa [59] . sphériques de 2 à 5 mm de diamètre, d’abord de couleur rouge
Un traitement local peut être proposé en cas de gêne esthé- brun, puis jaunes, distribuées sur la partie supérieure du corps ;
tique ou fonctionnelle, avec des résultats parfois satisfaisants. • la forme macronodulaire, plus fréquente, est caractérisée par des
L’exérèse chirurgicale dans les formes de xanthomes localisés et nodules rouge brun ou jaunes de 1 à 2 cm de diamètre (Fig. 5).
accessibles est indiquée mais les récidives sont fréquentes. Les La localisation la plus courante du XGJ est la tête et le cou, suivie
traitements ablatifs par laser CO2 ont permis d’avoir un résultat par la partie supérieure du torse, les membres supérieurs, puis les
esthétique et fonctionnel mais avec risque franc de récidive [61] . membres inférieurs [66] .
La cryothérapie, les injections intralésionnelles de corticoïdes et Parmi les sites extracutanés, l’atteinte de la muqueuse orale
l’électrocoagulation ont été proposées. Les essais cliniques pour est possible mais rare. Le XGJ oral se présente sous la forme
l’utilisation d’agents systémiques dans le traitement de la XD sont d’un nodule jaune solitaire sur la face latérale de la langue ou
généralement décevants [62, 63] . la ligne médiane du palais dur. Divers sites peuvent de même être
atteints [66] . L’atteinte oculaire survient généralement avant l’âge
de 2 ans et touche préférentiellement l’iris. Elle peut engendrer
des complications de type glaucome ou hyphéma, voire entraîner
Xanthomes plans diffus une cécité [67] . Le XGJ peut s’associer aux taches café-au-lait et à la
Les xanthomes plans normolipémiques diffus constituent un neurofibromatose de type 1 (NF1). Les patients combinant XGJ et
sous-type rare d’histiocytose non langerhansienne caractérisée NF1 ont un risque au moins 20 fois plus élevé de développer une
par un xanthélasma et des xanthomes plans diffus de la tête, leucémie myélomonocytaire juvénile [68] .
du cou, du tronc et des membres sans anomalie lipidique pou- La pathogénie n’est pas encore entièrement élucidée. Des études
vant évoquer un pseudoxanthome élastique (Fig. 4) [64] . L’atteinte génétiques menées sur des cas pédiatriques de XGJ ont permis
muqueuse est très rare. Il existe des présentations atypiques d’identifier des mutations dans différents gènes (MAP2K1, NTRK1,
comme une atteinte uniforme de la moitié supérieure du corps, etc.) [66] .
dont le diagnostic différentiel serait la caroténodermie [65] . Histologiquement, les XGJ précoces sont formés de cellules
Les xanthomes plans diffus sont associés à des maladies sys- histiocytaires vacuolées sans infiltration lipidique significative,
témiques et peuvent en être des signes précoces. Les lésions mêlées à quelques lymphocytes et éosinophiles dans le derme.
cutanées peuvent précéder de plusieurs années le développement Dans des lésions plus matures, un infiltrat granulomateux se
de maladies systémiques, en particulier le myélome multiple et forme et contient des cellules spumeuses, des cellules géantes à
les gammapathies monoclonales. D’autres pathologies associées corps étranger, des cellules géantes de Touton. En immunohis-
ont été décrites, de type hémopathies et lymphomes. Il convient tochimie, les cellules expriment CD163, CD11b, CD11c, CD36,
donc d’effectuer un suivi rapproché [64] . CD68, facteur XIIIa et vimentine [59] .
La physiopathologie des xanthomes plans diffus n’a pas encore La dermoscopie d’un XGJ a un aspect caractéristique de « soleil
été entièrement établie. Dans les situations avec association couchant », un fond jaune orangé avec des zones jaunes plus
à une gammapathie, il semble que les immunoglobulines G pâles [69] .
(IgG) seraient liées aux LDL circulants, formant des complexes Chez les nourrissons ne présentant que quelques lésions cuta-
anticorps-LDL vulnérables à la phagocytose par les macrophages. nées et aucun symptôme ou signe systémique, l’évaluation doit
Les traitements des xanthomes plans diffus sont souvent déce- inclure NFS, bilan hépatique complet, bilan biologique de base et
vants mais plusieurs options ont été tentées, comme le laser ou la examen ophtalmologique. Les patients qui ont un grand nombre
chirurgie. Le traitement d’un myélome associé est sans effet sur de lésions, des symptômes systémiques ou des anomalies bio-
les xanthomes. logiques doivent être évalués par une imagerie par résonance

EMC Dermatologie 7
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magnétique (IRM) du cerveau et de l’abdomen. S’il existe des Exérèse chirurgicale


signes ou symptômes d’une atteinte cardiaque, une IRM car-
C’est le traitement de choix du xanthélasma depuis des décen-
diaque et une échocardiographie doivent être réalisées. En cas de
nies. Selon la classification de Lee et al., une simple excision avec
cytopénie, il est nécessaire d’évaluer la moelle osseuse par un myé-
ou sans blépharoplastie et épicanthoplastie médiane est suffisante
logramme ou une biopsie ostéomédullaire avec cytométrie de flux,
pour les lésions de grades I et II, tandis que dans les cas avancés,
analyse cytogénétique et séquençage génétique d’exomes [66] .
une chirurgie de décapsulation, des lambeaux locaux et des greffes
Le XGJ est généralement autorésolutif en 1 à 5 ans, parfois
de peau peuvent être réalisés [3, 73] .
avec une atrophie, une hyperpigmentation ou une anétodermie
séquellaires. Chez la majorité des patients ayant une maladie loca-
lisée et exclusivement cutanée, l’évolution est bénigne. Aucun Laser ablatif
traitement n’est donc généralement nécessaire. Dans les situations Il s’agit d’une option thérapeutique idéale pour le xanthélasma
où la maladie est plus étendue, avec atteinte multisystémique, en raison de sa localisation superficielle. Son principe est la des-
l’indication du traitement se pose si la présence du XGJ interfère truction des cellules spumeuses périvasculaires par la chaleur.
avec la fonction normale de l’organe concerné [66] . Plusieurs types de laser ont été employés mais les lasers CO2 et
Le XGJ a de nombreux diagnostics différentiels, notamment erbium : yttrium aluminium garnet (Yag) ont le plus grand poten-
histiocytose langerhansienne, molluscum contagiosum, héman- tiel, avec une élimination complète des lésions en une à trois
giome, nævus de Spitz et neurofibrome [66] . séances [74] .
L’histiocytose anaplasic lymphoma kinase (ALK)-positive est un
rare sous type d’histiocytose qui présente des similitudes cli-
niques, histologiques et immunophénotypiques avec le XGJ dans Radiofréquence
ses formes multiples avec atteinte extracutanée. L’histologie est Il existe peu de rapports publiés sur l’utilisation de l’énergie de
celle du XGJ dans près d’un tiers des cas, tandis que la majorité des radiofréquence dans le traitement du xanthélasma. Le mécanisme
histiocytoses ALK-positives présentent un aspect plus cellulaire d’action repose sur l’énergie thermique, qui induit une agitation
et monomorphe plus dense, sans histiocytes spumeux, et parfois ionique avec vaporisation au niveau cellulaire [75] .
une prédominance de cellules fusiformes ou épithélioïdes. Malgré
les ressemblances morphologiques et histologiques, l’histiocytose
Acide trichloracétique (TCA)
ALK-positive reste une entité distincte qui, sur le plan cytogé-
nétique, est caractérisée par la fusion kinesin family member 5B Le TCA est une modalité de traitement destructeur abordable
(KIF5B)-ALK et, sur le plan clinique, présente une implication et qui peut être répétée. Le TCA est utilisé par voie topique à des
neurologique fréquente [70] . concentrations de 50 à 100 %. Le TCA à 100 % donne les meilleurs
résultats dans les lésions papulonodulaires, alors que le TCA à
100 % ou à 70 % donne des résultats équivalents dans le xan-
Xanthome papuleux
thélasma en plaques. Pour les lésions maculeuses, le TCA à 50 %
C’est une entité clinicopathologique rare caractérisée par une est suffisant [76] . Ce traitement est plus efficace pour les petites
éruption de papulonodules de 2 à 15 mm, de couleur jaune lésions [77] . Les taux de récidive varient de 25 à 39 % [77] . Des cas
orangé. Les lésions peuvent être uniques ou multiples et dissé- de phénomène de Koebner ont été observés [76] .
minées, mais sans tendance à la fusion ou à la coalescence. Le
xanthome papuleux se développe surtout chez les jeunes adoles-
Cryothérapie
cents et chez les personnes d’âge moyen. Chez les sujets jeunes,
il peut être autorésolutif. L’atteinte muqueuse est possible mais il Son mécanisme d’action dans le traitement du xanthélasma
n’y a pas d’atteinte systémique, ni d’anomalie lipidique [71] . repose sur la vasoconstriction et la formation de microthrombus,
Sur le plan histologique, le xanthome papuleux est caracté- responsables d’une ischémie tissulaire et d’une mort cellulaire. La
risé par un épiderme normal ou atrophique avec aplatissement cryothérapie par l’azote liquide est une procédure ambulatoire,
des crêtes, prolifération cellulaire à prédominance spumeuse et simple et efficace [77, 78] .
nombreuses cellules géantes de Touton, certaines contenant du
collagène. Les cellules expriment le CD68 mais pas le facteur XIIIa, Pingyangmycine
le CD1a ou la protéine S100 [59, 72] .
Les xanthomes papuleux se distinguent des xanthomes dissémi- Également connue sous le nom de bléomycine A5, c’est un
nés par plusieurs caractères. Ils n’ont pas tendance à fusionner et traitement du xanthélasma dont le mécanisme d’action n’a pas
ne prennent pas une coloration rouge brun. Ils épargnent les plis encore été exploré. Des études suggèrent que les histiocytes
cutanés et ne présentent aucune association au diabète insipide. spumeux diminuent en nombre et en taille après l’injection intra-
Histologiquement, les cellules inflammatoires, présentes dans les lésionnelle de pingyangmycine [79] .
xanthomes disséminés, sont absentes dans les xanthomes papu-
leux.
D’autres diagnostics différentiels des xanthomes plans sont les Prise en charge d’une dyslipidémie
chéloïdes, les histiocytomes, les nævus de Spitz, les acanthomes à
La pierre angulaire du traitement des xanthomes avec dysli-
cellules claires, etc.
pidémie consiste à traiter l’hyperlipidémie sous-jacente, par des
Les options thérapeutiques comprennent l’excision chirurgi-
changements de mode de vie et des médicaments.
cale et le laser CO2 .

Modifications du mode de vie


 Traitements Réduction du poids, arrêt du tabac et augmentation de
l’activité physique ont démontré une efficacité évidente dans
La prise en charge des xanthomes associés à une dyslipo- l’amélioration des profils lipidiques [80, 81] . La nicotine contenue
protéinémie primitive ou secondaire repose évidemment sur le dans le tabac cause une diminution du taux de HDL et une aug-
traitement de la cause sous-jacente. Un traitement local est parfois mentation des LDL et VLDL. Elle est de même responsable de
nécessaire. l’accumulation de lipides dans la paroi artérielle. Une perte de 3 à
5 % du poids permettrait de réduire le taux de TG et la glycémie [82] .

Traitements du xanthélasma Traitements médicamenteux


Il existe de multiples modalités thérapeutiques pour le Les taux de lipides devraient être dosés 8 semaines après le début
traitement du xanthélasma. Les indications, avantages et incon- ou l’ajustement d’un traitement hypolipémiant. Quand l’objectif
vénients des divers traitements sont exposés dans le Tableau 2. lipidique est atteint, le contrôle devient annuel [81] .

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Xanthomes  98-725-A-10

Tableau 2.
Indications, avantages et inconvénients des traitements du xanthélasma.
Traitement topique Indications Avantages Inconvénients
Exérèse chirurgicale – Association à une hyperlipidémie – Moins de risques de déformation – Nécessité d’une anesthésie
primaire des paupières générale ou locale
– Atteinte des quatre paupières – Meilleure tolérance de la – Cicatrice parfois visible
– Formes récidivantes cicatrice – Ectropion
– Lésions du derme profond ± atteinte – Taux de récidive réduit – Troubles pigmentaires
du muscle, de hauteur ≥ 5 mm, de séquellaires
consistance dure et de durée d’évolution
≥ 1 an ou avec blépharochalasis
Lasers – Localisation superficielle – Absence de saignement – Cicatrices et troubles
– Mauvais candidats pour l’exérèse – Peu d’inflammation pigmentaires séquellaires (hypo
chirurgicale : patients sous périlésionnelle et de douleur ou hyperpigmentation
anticoagulants, ou personnes âgées avec – Faible risque d’infection superficielle)
laxité cutanée et risque accru d’ectropion secondaire – Érythème persistant
– Lésions limitées au derme superficiel, – Plus grande tolérance – Brûlures graves
de hauteur ≤ 5 mm, de consistance – Perte minimale de tissus – Lésions cornéennes ou
molle, et de durée d’évolution ≤ 1 an – Bons résultats fonctionnels et perforation oculaire
cosmétiques – Coût élevé
– Résultats reproductibles
Radiofréquence – Lésions de zones délicates (à proximité Facile, sûre, rapide, peu coûteuse – Douleur, prurit, brûlure, œdème
des yeux) et érythème
– Lésions limitées au derme superficiel, – Hypo et hyperpigmentations
de hauteur ≤ 5 mm, de consistance séquellaires
molle, et de durée d’évolution ≤ 1 an – Ectropion
– Lésions multiples ou en plaques avec – Faible niveau de preuve
des bords mal définis
Acide trichloroacétique (TCA) – Plus efficace pour les petites lésions Simple et peu coûteux – Hyper et hypopigmentations
– Lésions limitées au derme superficiel, post-inflammatoires
de hauteur ≤ 5 mm, de consistance – Irritation et douleur
molle, et de durée d’évolution ≤ 1 an – Cicatrice et atrophie
– TCA à 100 % pour lésions – Ectropion
papulonodulaires
– TCA à 70 % pour le xanthélasma en
plaques.
– TCA à 50 % pour les lésions maculeuses
Cryothérapie Lésions limitées au derme superficiel, de – Séances relativement indolores – Plusieurs séances nécessaires
hauteur ≤ 5 mm, de consistance molle, – Efficacité – Hyper et hypopigmentations
et de durée d’évolution ≤ 1 an –Résultats acceptables d’un point post-inflammatoires
de vue cosmétique – Œdème et possible formation de
– Peu de complications majeures bulles
Pingyangmycine Non établies spécifiquement – Peu de dommages des tissus – Œdème temporaire accompagné
périlésionnels d’un léger prurit
– Caractère peu invasif, abordable – Hypopigmentation persistante
et rentable
– Bonne récupération

Statines LDL-C à atteindre. Ces taux sont d’autant plus bas que le risque
Mécanisme d’action. Il consiste en l’inhibition de l’étape cardiovasculaire du patient est élevé [83] .
limitante de la biosynthèse du cholestérol en inhibant Effets indésirables (Annexe A). Bien que les statines soient
l’enzyme hydroxy-3-méthyl glutaryl coenzyme A-réductase généralement très bien tolérées, elles ont quelques effets indési-
(HMG-CoA-réductase). La réduction du cholestérol intracellu- rables spécifiques sur les muscles, la régulation du métabolisme
laire favorise l’expression accrue du récepteur des LDL à la du glucose et les accidents vasculaires cérébraux hémorragiques.
surface des hépatocytes. Cela permet une augmentation de
l’absorption des LDL par le foie, une diminution des concen- Inhibiteurs de l’absorption du cholestérol (Annexe B)
trations plasmatiques de LDL et d’autres lipoprotéines porteuses L’ézétimibe inhibe l’absorption intestinale du cholestérol ali-
d’apo B. mentaire et biliaire au niveau de la bordure en brosse de l’intestin
Effet sur le LDL-C. La réduction du taux de LDL dépend de la par action sur la protéine Niemann-Pick C1-like 1 (NPC1L1). La
nature et de la dose de la statine administrée. Les statines les plus quantité de cholestérol délivrée au foie est donc réduite. Le foie
puissantes sont l’atorvastatine, la rosuvastatine et la pitavastatine. réagit en augmentant l’expression du récepteur des LDL, ce qui
Un traitement est qualifié d’« intensité élevé » s’il réduit le taux entraîne une augmentation de la clairance des LDL dans le sang.
de LDL de plus de 50 %. Il est dit d’« intensité modérée » si le taux
de LDL est réduit de 30 à 50 %. Séquestrants d’acides biliaires (Annexe C)
Effet sur les TG. Les statines réduisent généralement les taux Les acides biliaires sont synthétisés dans le foie à partir du cho-
de TG de 10 à 20 % par rapport aux valeurs initiales. lestérol et libérés dans la lumière intestinale, puis réabsorbés selon
Effet sur les HDL. Les élévations des taux de HDL varient en le cycle entérohépatique. La cholestyramine et le colestipol sont
fonction de la dose des différentes statines ; ces élévations étaient tous deux des résines d’échange se liant aux acides biliaires. Les
comprises entre 1 et 10 % [83] . médicaments de cette classe empêchent la réabsorption des acides
Selon les recommandations de l’European Society of Cardio- biliaires et du cholestérol dans le sang. Le foie, appauvri en bile,
logy/European Atherosclerosis Society (ESC/EAS) de 2019, les augmente la demande hépatique en cholestérol et l’expression
projets thérapeutiques dépendent du niveau de risque cardiovas- du récepteur des LDL, ce qui entraîne une diminution des LDL
culaire. Les objectifs thérapeutiques se définissent par les taux de circulantes.

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Inhibiteurs de PCSK9 (Annexe D) Plasmaphérèse


Ces molécules ciblent une protéine (PCSK9) impliquée dans le L’aphérèse de la lipoprotéine apo B a été approuvée par la
contrôle du récepteur des LDL. Une concentration ou une fonc- Food and Drug Administration (FDA) pour les patients qui ne
tion élevée de cette protéine dans le plasma réduit l’expression parviennent pas à atteindre les objectifs de LDL-C malgré un trai-
de ce récepteur alors qu’une concentration ou une fonction plus tement médical standard. Elle est surtout utilisée chez les patients
faible de PCSK9 est liée à des niveaux plus faibles de LDL-C dans atteints d’hypercholestérolémie familiale homozygote. Comme
le plasma. pour la dialyse, les effets indésirables sont l’hypotension, l’anémie
Le mécanisme d’action est lié à la réduction du taux plasma- et les céphalées. La plasmaphérèse est une procédure similaire
tique de PCSK9 qui n’est plus disponible pour se lier au récepteur qui est utilisée en cas de chylomicronémie grave pour éliminer
des LDL. Par conséquent, l’expression des récepteurs des LDL à la les chylomicrons dans le cadre d’épisodes graves de pancréatite
surface des cellules augmente et les taux de LDL-C circulants sont récurrente [83] .
réduits.
Actuellement, les seuls inhibiteurs de PCSK9 autorisés sont deux
anticorps monoclonaux humains : l’alirocumab et l’évolocumab. Traitement des dyslipoprotéinémies primitives
Le traitement par statine augmente les taux sériques de PCSK9 Hyperchylomicronémie (type I) et hypertriglycéridémie
circulants. L’effet optimal de ces anticorps monoclonaux a été combinée de type V
démontré en association avec des statines [84] . La modification du mode de vie seule n’est généralement
pas suffisante ; elle doit donc être complétée par une prise
Lomitapide en charge médicamenteuse. Parmi les traitements médicamen-
La protéine microsomale de transfert des TG est responsable teux actuellement disponibles, les plus couramment utilisés
du transfert des TG et des phospholipides du réticulum endo- sont les fibrates, l’acide nicotinique, ainsi que les statines.
plasmique à l’apo B. Il s’agit d’une étape nécessaire pour la Leur efficacité dans la réduction des lipides chez les personnes
formation des VLDL. Le lomitapide, inhibiteur de cette protéine atteintes d’hyperchylomicronémie de type I est cependant insuf-
microsomale, est un traitement de l’hypercholestérolémie fami- fisante [16, 23] .
liale homozygote, administré par voie orale. Une surveillance de
la fonction hépatique au cours du traitement est nécessaire [83] . Hypercholestérolémie de type IIa
Outre la réduction des facteurs de risque cardiovasculaire, une
Mipomersen
pharmacothérapie reste nécessaire, par une statine en première
C’est un oligonucléotide antisens capable de se lier à l’acide intention [19] .
ribonucléique (ARN) messager de l’apo B-100. Il est responsable
de la dégradation sélective de ces molécules d’ARN. Le mipomer-
Hyperlipidémies mixtes
sen est indiqué pour réduire le LDL-C chez les patients atteints
d’hypercholestérolémie familiale homozygote. Les réactions au Les statines restent le traitement de première intention pour ce
site d’injection sont les effets indésirables les plus fréquents. Le type d’hyperlipidémie. Certains privilégient les statines qui ont
mipomersen peut être la cause d’une stéatose hépatique [83] . des propriétés avantageuses dans la réduction des TG [21] .

Fibrates Hypertriglycéridémie de type IV


Molécules. Il existe trois molécules principales de fibrates : Les fibrates représentent la classe thérapeutique de première
clofibrate, fénofibrate et gemfibrozil. intention. L’acide nicotinique peut être utilisé en complément de
Mécanisme d’action. Les fibrates sont des agonistes des traitement [23] .
récepteurs activés par les proliférateurs de peroxysomes (PPAR-␣),
agissant par l’intermédiaire de facteurs de transcription régulant
diverses étapes du métabolisme des lipides et des lipoprotéines. Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
Les fibrates sont efficaces pour abaisser les taux de TG à jeun et d’intérêts en relation avec cet article.
postprandiaux.
Effets sur les lipides. L’impact sur les profils lipidiques varie
selon le type de fibrates. Globalement, les fibrates induisent une
réduction de 50 % du taux de TG, une réduction de moins de  Annexe A. Effets indésirables
20 % du taux de LDL-C, et une augmentation du taux de HDL-C des statines
inférieure à 20 % (Annexe E).
Effets indésirables et interactions. Les fibrates sont géné- Effets indésirables musculaires
ralement bien tolérés. Des troubles gastro-intestinaux ont été
rapportés dans 2 % des cas. La myopathie, l’élévation des enzymes La myopathie est l’effet indésirable le plus fréquent. Il est par-
hépatiques, la cholélithiase et la pancréatite représentent les effets ticulièrement important de tenir compte de l’interaction avec
indésirables les plus connus. Le gemfibrozil inhibe le métabolisme les traitements médicamenteux concomitants qui augmentent le
des statines par la voie de la glucuronidation, ce qui entraîne une risque de myopathie et de rhabdomyolyse.
augmentation marquée des concentrations plasmatiques de sta-
tines, et augmente le risque de myopathie. La combinaison de
fénofibrate et de statines comporte un risque moindre de myopa- Effets indésirables hépatiques
thie [83] .
Une légère élévation de l’alanine-aminotransférase (ALAT) se
Acides gras n-3 produit chez une minorité de patients le plus souvent traités par
Mécanisme d’action. Les acides gras n-3 (ou oméga-3) (acides des statines potentes ou à des doses élevées.
eicosapentaénoïque [EPA] et docosahexaénoïque [DHA]) per-
mettent de réduire les lipides sériques et les lipoprotéines, en
particulier les concentrations de VLDL. Le mécanisme sous-jacent Autres effets indésirables
est mal compris. Ils auraient une capacité à interagir avec les PPAR
et à diminuer la sécrétion d’apo B. Les patients traités par statine présenteraient un risque de déve-
Effets sur les lipides. Les acides gras n-3 réduisent les TG, lopper un diabète de type 2.
mais leurs effets sur les autres lipoprotéines sont négligeables. Leur Les statines font partie des causes médicamenteuses pouvant
administration semble être sûre et dépourvue d’interactions clini- déclencher une dermatomyosite. Les patients ayant des antécé-
quement significatives. Les effets indésirables les plus fréquents dents familiaux de dermatomyosite devraient être informés de ce
sont des perturbations gastro-intestinales. risque [85] .

10 EMC - Dermatologie
Xanthomes  98-725-A-10

 Annexe B. Effets des inhibiteurs  Annexe E. Effet des fibrates sur


de l’absorption du cholestérol sur la morbidité et la mortalité
les lipides cardiovasculaires
L’ézétimibe en monothérapie à 10 mg/j réduit le LDL-C de 15 La réduction du risque cardiovasculaire semble être proportion-
à 22 % chez les patients hypercholestérolémiques. L’association nelle au degré de réduction du taux de cholestérol non HDL. Des
ézétimibe-statine a entraîné une réduction supplémentaire de études portant sur le gemfibrozil ont montré une réduction signi-
15 % du LDL-C par rapport à l’effet de la même statine en mono- ficative de l’incidence de maladies cardiovasculaires, alors que
thérapie. celles portant sur le fénofibrate n’ont pas montré de diminution
Cette molécule est utilisée en deuxième intention, surtout en de l’incidence d’évènements cardiovasculaires.
adjuvant aux statines lorsque l’objectif thérapeutique n’est pas
encore atteint à la dose maximale tolérée ou lorsque les statines
ne peuvent pas être prescrites [83] .
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Département de dermatologie et vénérologie, Université Saint-Joseph, Rue de Damas, BP 17-5208 – Mar Mikhaël, 1104 2020 Beyrouth, Liban.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Kaikati J, Stéphan F. Xanthomes. EMC - Dermatologie 2023;25(4):1-13 [Article 98-725-A-10].

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