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Ecriture personnelle

Les maisons fonctionnent-elles comme des miroirs de l’identité ?

Depuis le XXème siècle, la maison tient une place prépondérante dans le cœur des hommes :
des magasins, lui rendant honneur, fleurissent dans toutes les villes de l’hexagone ; les
concours de la plus belle maison sont aussi organisés. Or, notre individualité peut-elle être
mise en exergue grâce aux habitations ? Nous verrons, dans un premier temps, que notre
maison reflète notre singularité ; dans un second temps, nous montrerons qu’elle peut
également renvoyer une image différente.

Certes, la maison met en valeur notre identité. En effet, dès l’achat ou la location
d’une maison, nous mettons tout en œuvre pour effacer la trace des anciens locataires ou
propriétaires. Ainsi, nous pouvons aménager d’une autre façon l’intérieur ou l’extérieur, tout
casser et reconstruire, changer les couleurs afin que la maison nous ressemble. Nous
pouvons aussi inventer d’autres formes de maisons afin qu’elles soient originales.
« Domespace » est une maison en forme de dôme, située dans une forêt.
De plus, notre habitation révèle notre personnalité parce qu’elle est le prolongement
d’une ou plusieurs personnes. D’une part, elle exprime la force de caractère de ses
occupants, leurs idées, leurs pensées. D’autre part, nous agissons comme si la maison
représentait une personne ; nous la chérissons, nous l’idéalisons. Anne Chaté, dans « Les
noms des maisons, fragments d’un discours sur soi ? », Ethnologie française, abonde dans ce
sens en démontrant que certains individus donnent à leur maison le prénom de leur enfant
ou de l’être aimé.
Enfin, la maison raconte notre intimité. D’abord, en mettant des photographies sur
les murs, nous évoquons notre histoire. Puis, notre cocon est le théâtre de nos joies et de
nos peines : naissance d’enfants, divorces, décès. Par exemple, François Vigouroux, dans
L’Ame des maisons, explique que non seulement la maison révèle notre caractère mais
encore elle fonctionne comme si elle était en nous. De même, dans Villa Amalia, de Pascal
Quignard, La mère de l'héroïne, Marthe Hidelstein, habite une grande maison qui a été
construite par son grand-père. Elle reste dans cette maison, remplie de souvenirs, et attend
son époux.

Par conséquent, les maisons mettent bien en valeur notre identité. Toutefois, parfois,
il est impossible d’habiter dans un lieu qui nous est propre, soit parce nous n’avons pas les
moyens de posséder une maison ; soit nous avons été obligés de quitter notre résidence.
Nous ne pouvons donc pas nous projeter comme le stipule Emilie Massemin, dans
Reporterre.net, “Le calvaire d’une famille mal logée à Paris”, 5 janvier 2020. En effet, les
familles qui proviennent de pays étrangers peinent à trouver un logement permanent. Dans
le même esprit, Armelle Vincent, dans l’article « L’Amérique confrontée au drame des
expulsions », évoque la crise des subprimes de 2007 (prêts immobiliers à risque). Aux Etats-
Unis, des milliers d'habitants sont expulsés de leur maison. Ils quittent leur résidence la nuit,
honteux ; la plupart d’entre eux demandent à leurs familles de les héberger.
De surcroît, certaines maisons ne laissent transparaître aucun secret nous concernant
car elles n’appartiennent à personne. Les maisons abandonnées n’ont pas d’âme et nous
n’osons pas nous imposer et laisser notre empreinte. Le poème « Dans ma maison » de
Jacques Prévert, illustre cette idée. Le poète a trouvé une maison dont les murs sont tout
blancs et il attend d’autres personnes. De plus, Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie,
explique qu’il ne supporte plus son appartement parisien et part vivre six mois, en Sibérie,
dans la cabane d’un ancien prisonnier du Goulag. Il a mis dans ses cartons seulement des
livres et des vivres.
Pour finir, certaines habitations ne reflètent aucune singularité car elles sont
standardisées. Certains architectes préfèrent construire des maisons identiques, dans des
lotissements, en privilégiant les fonctionnalités et en abandonnant l’originalité et
l’esthétisme. Tel est le cas de « La cité radieuse de Marseille ». En effet, même si Le
Corbusier souhaitait le bien-être et le confort aux habitants, il a construit une machine à
habiter avec des pièces identiques et meubles intégrés, enlevant ainsi la possibilité de
s’approprier le logement.

En somme, toutes les maisons ne reflètent pas la personnalité de leurs occupants. Les
maisons sont comme les arbres qui vivent des centaines d’années : les individus passent et
les maisons résistent à l’épreuve du temps.

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