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Le roman et la nouvelle au XVIIe siècle


2019-2020

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RÉSUMÉ
Au XVIIe siècle, le classicisme règne, imposant ses codes en littérature. Toutefois, le roman et
la nouvelle y échappent plus facilement car ils ne sont pas jugés "nobles". Ils ont de plus en
plus de succès ; les nouvelles deviennent courantes. On se pose alors la question de la
définition des deux genres, qui demeure assez floue. L'amour est souvent central dans ces
récits, sa représentation est d'ailleurs jugée dangereuse, voire même amorale. De nombreuses
critiques s'élèvent donc contre romans et nouvelles, particulièrement car de plus en plus de
femmes prennent la plume ou se plongent dans la fiction. Toutefois, si au début le métier
d'écrivain n'est pas jugé sérieux, bientôt le succès des romans et des nouvelles dans la vie
mondaine finit par avoir raison des attaques morales, et une reconnaissance grandissante des
genres se met en place.

I Roman et nouvelle, les définitions du XVIIe siècle

A Entre roman et nouvelle, une limite floue


Étymologiquement, le terme "roman" désigne un récit en prose écrit en langue vernaculaire (c'est-
à-dire écrit en langue romane, le français populaire, et non en latin). Toutefois, au XVIIe siècle, la
définition du roman en tant que genre littéraire se voit mêlée à celle de nouvelle. Les différences
entre les deux restent floues. Ainsi, La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette, aujourd'hui
considéré comme un roman, est qualifié de nouvelle lors de sa parution.

Souvent, on définit la nouvelle comme étant un récit de fiction en prose mais plus court que le
roman. Dans son ouvrage Le Roman au XVIIe, Nathalie Grande cite Scarron écrivant en 1655 que
les nouvelles sont de "petites histoires". Il est néanmoins difficile de définir à quel moment
"commence le court", et à quel moment "commence le long".

EXEMPLE

Pour le critique René Godenne, la nouvelle n'est rien d'autre qu'un "petit roman".

On date les origines de la nouvelle au milieu du XIVe siècle. En effet, c'est entre 1349 et 1351 que
Boccace écrit Décaméron en Italie. Le genre arrive en France au XVIe siècle avec des ouvrages
comme Cent Nouvelles nouvelles, publié en 1486 ou Heptaméron de Marguerite de Navarre,
publié en 1558. C'est au XVIIe siècle que sont traduites en français les Nouvelles exemplaires de
Cervantes, un classique du genre.

En général, dans ces recueils, on trouve une structure narrative identique :

Un récit-cadre
Plusieurs histoires rapportées par différents narrateurs, sans lien entre elles
Le récit-cadre permet d'unir les différentes histoires ou "nouvelles".
EXEMPLE

Dans Heptaméron de Marguerite de Navarre, des personnages se réunissent dans une


abbaye dans les Pyrénées pour se protéger de violentes pluies. Afin de passer le temps,
chacun d'eux raconte une anecdote différente.

La nouvelle se rapproche donc du roman, puisqu'il y a une tentative pour unifier les histoires
entre elles, les nouvelles entre elles, même s'il s'agit d'un simple prétexte pour rapporter
différents récits et créer des recueils. Toutefois, au XVIIe siècle, les nouvelles sont également
publiées de façon indépendante dans des périodiques. Elles ne sont alors plus rattachées à un
récit-cadre et se suffisent à elles-même.

On trouve plusieurs définitions du terme "nouvelle" au cours du XVIIe siècle. Ainsi, dans le
Dictionnaire de Richelet en 1693, il est écrit qu'une nouvelle "raconte ce qui se passe de
nouveau". Il faut le prendre ici dans le sens d'un récit d'aventures récentes, comme les nouvelles
que l'on lit dans le journal. Le terme "nouvelle" permet d'ailleurs un rapprochement avec un cadre
spatio-temporel proche des lecteurs et souligne le caractère récent ou même actuel des textes.

Jean Sgard
La nouvelle, par ses exigences de vraisemblance, de concision, de
concentration des effets, a aussi entraîné les romanciers vers la
forme du roman court, ce genre nouveau, véritablement classique,
qui règne encore aujourd'hui, mais pour lequel, au XVIIe siècle, on
ne disposait pas de nom particulier. Le roman court, qui tend à se
généraliser à partir de 1670, est l'aboutissement d'un immense
effort pour discipliner la forme du grand récit romanesque.

Le Roman français à l'âge classique 1600 - 1800


2000

La définition que Jean Sgard donne ici de la


nouvelle prouve qu'au XVIIe siècle la
différence entre roman et nouvelle n'est pas
INTERPRÉTATION évidente. Toutefois, on peut noter que le
"roman court", donc la nouvelle, est associé
à la vraisemblance et la discipline.

La nouvelle se distingue du roman par le fait qu'elle est moins éloignée de la réalité, elle raconte
souvent des faits plus proches du lecteur, elle paraît ainsi plus vraisemblable. D'ailleurs, dans Les
Nouvelles françaises ou les Divertissements de la Princesse Aurélie, Segrais écrit en 1657 que
les nouvelles rapportent les choses "comme elles sont". On peut ainsi souligner qu'au XVIIe
siècle, la nouvelle est liée à une forme de réalisme. Madame de Lafayette est d'ailleurs reconnue
pour apporter de la vraisemblance à ses récits. Dans Sentiments sur les lettres et sur l'histoire
écrit en 1683, Du Plaisir attribue même aux nouvellistes le titre "d'historiens", soulignant l'aspect
"réaliste" de leurs récits.

Ainsi, les différences entre roman et nouvelle restent floues, mais le roman est souvent
considéré comme plus long et relatant des récits plus éloignés dans le temps que la nouvelle.
Nouvelle et roman sont souvent associés au XVIIe siècle, les critiques à
l'encontre de l'un sont valables pour l'autre : ils font partie de la fiction en
prose et sont moins considérés que le théâtre ou la poésie.
REMARQUE

B Le thème central de l'amour dans les romans et nouvelles


Le terme "roman" renvoie à un récit plein d'aventures et de rebondissements, centré sur une
histoire d'amour. L'intrigue sentimentale est souvent au cœur des nouvelles et des romans. Elle
peut même faire partie de la définition du roman ou de la nouvelle dans certains dictionnaires du
XVIIe siècle.

Antoine Furetière
[Les nouvelles sont des] livres fabuleux qui contiennent des
histoires d'amour et de chevalerie, inventées pour divertir et
occuper les fainéants.

Dictionnaire de Furetière
1690

Ici, Antoine Furetière ne s'attarde pas


simplement sur l'importance de l'amour dans
les nouvelles, il les condamne en même
INTERPRÉTATION temps comme étant uniquement une
occupation pour "fainéants".

L'amour est parfois considéré comme le sujet essentiel du roman ou de la nouvelle.

Pierre-Daniel Huet
[Les romans sont] des fictions d'aventures amoureuses, écrites en
prose avec art, pour le plaisir et l'instruction des lecteurs. Je dis des
fictions, pour les distinguer des histoires véritables. J'ajoute,
d'aventures amoureuses, parce que l'Amour doit être le principal
sujet du Roman.

Traité de l'origine du roman


1670

Ici, Pierre-Daniel Huet insiste sur le caractère


central de l'amour dans le roman, utilisant
même le modal "devoir" pour renforcer son
INTERPRÉTATION propos.

Il faut dire que le XVIIe siècle est celui de l'amour par excellence : amour précieux, amour galant,
amour pastoral, toutes les formes d'amour sont discutées dans la littérature et dans les salons.
Mademoiselle de Scudéry dessine d'ailleurs la célèbre "Carte de Tendre ou Carte du pays de
Tendre". Il s'agit de la carte d'un pays imaginaire qui représente le sentiment amoureux et ses
nuances. On y découvre les différentes formes d'amour, de l'amitié à l'indifférence, de la
tendresse à la passion.

"Carte de Tendre ou Carte du pays de Tendre", Mademoiselle de Scudéry, XVIIe siècle

Dans les romans du début du XVIIe siècle, l'amour est d'abord vu comme positif. Il permet la
rédemption des personnages qui peuvent accéder au bonheur.

EXEMPLE

Dans le roman pastoral d'Honoré d'Urfé L'Astrée (1607 - 1627), l'amour est représenté de
façon positive. L'auteur raconte l'amour parfait qui lie Astrée et Céladon, leur permettant de
résister à tous les obstacles.

La deuxième moitié du XVIIe siècle est davantage marquée par des romans dans lesquels
l'amour provoque des désordres et mène à la perte des héros. En ce qui concerne les femmes,
même si elles tentent de rester vertueuses, elles sont victimes du désir que les hommes leur
porte. La passion est destructrice, incontrôlable et la vertu ne suffit pas à être protégée. Ainsi
dans La Princesse de Clèves roman de Madame de La Fayette, l'héroïne quoique très vertueuse
souffrira de la lutte entre ses convictions morales et la passion. C'est le cas des récits de
Madame de Lafayette qui met toujours en garde contre l'amour.

EXEMPLE
Dans "La Princesse de Montpensier", l'amour éloigne l'héroïne Marie de l'idéal de vertu et lui
fait prendre des décisions qui s'avèrent dramatiques pour sa réputation.

II Les critiques envers le roman et la nouvelle

A Le discours négatif des critiques


Le discours critique autour du roman et de la nouvelle au XVIIe siècle est surtout négatif. En
effet, ils se voient condamnés car ils ne répondent pas aux exigences de pureté de la morale
chrétienne. On leur reproche particulièrement de faire l'apologie de l'amour profane. Le père
Bourdaloue les accuse ainsi de porter l'amour jusqu'à une idolâtrie destructrice.

Qu'est-ce, à le bien définir, que le roman ? Une histoire, disons mieux une fable proposée
sous la forme d'histoire, où l'amour est traité par art et par règles ; où la passion dominante
et le ressort de toutes les autres passions, c'est l'amour ; où l'on affecte d'exprimer toutes
les faiblesses, tous les transports, toutes les extravagances de l'amour ; où l'on ne voit que
maximes d'amour, où il n'y a point d'intérêt qui ne soit immolé à l'amour, fût-ce l'intérêt le
plus cher selon les vues humaines, qui est celui de la gloire ; où un homme ne se gouverne
plus que par l'amour : tellement que l'amour est toute son occupation, toute sa vie, tout son
objet, sa fin, sa béatitude, son Dieu.

Louis Bourdaloue
Sermons pour les dimanches depuis Pâques jusques à La Pentecôte, "Sermon pour le troisième dimanche après Pâques.
Sur les divertissements du monde." -
1716 - 1726

Louis Bourdaloue accuse le roman de n'avoir qu'une seule valeur,


destructrice, l'amour.

INTERPRÉTATION

Les censeurs du XVIIe siècle reprochent au roman et à la nouvelle de donner trop de liberté à
l'imagination des lecteurs, les éloignant des valeurs véritables et de la morale. Les passions
décrites dans les récits fictifs sont dangereuses, les histoires mensongères, le lecteur est
corrompu par la fiction littéraire. Finalement, on accepterait ces récits s'ils étaient moraux, s'ils
défendaient les idéaux chrétiens, la bienséance, s'ils poussaient le lecteur à la vertu, ce qu'ils
sont accusés, dans leur ensemble, de ne pas faire.

Abbé Huet
La fin principale du roman […] est l'instruction des lecteurs, à qui il
faut toujours faire voir la vertu couronnée et le vice châtié.

Lettre à Monsieur de Segrais : De l'origine des romans.


1678
Dans cette citation, l'abbé Huet signifie bien
que le roman doit avoir un but, et ce but est
de condamner le vice et de louer la vertu. Le
INTERPRÉTATION genre romanesque peut être valorisé mais
seulement s'il défend la morale chrétienne.

En 1671, Charles Sorel parle des nouvelles dans De la connaissance des bons livres comme de
"petites histoires détachées qu'on a appelées des nouvelles ou des historiettes". Il leur reproche
d'être "folles" et "impertinentes", proposant un "libertinage horrible" car "toutes les passions et
tous les vices sont en leur règne". On comprend bien que les critiques contre le roman et la
nouvelle sont morales, on craint qu'ils "pervertissent" les lecteurs, leur donnant une fausse idée
du monde, des sentiments et des valeurs. Cela est d'autant plus vrai que les lecteurs se
composent d'un grand nombre de femmes, le "beau sexe", mais aussi le "sexe faible". On estime
qu'il faut les préserver de toutes les possibles "tentations".

B Écrire ou lire des romans et des nouvelles, un passe-temps


féminin
Le XVIIe siècle est particulièrement important en littérature car de plus en plus de femmes se
mettent à écrire. Elles le font surtout dans le genre du roman et de la nouvelle qui ne sont pas
considérés comme nobles, bien qu'elles prennent souvent des pseudonymes masculins ou
publient anonymement.

Si de plus en plus de femmes se mettent à écrire, c'est parce que bon nombre d'entre elles
tiennent salon régulièrement. Ces intellectuelles, intéressées par les choses de l'esprit, ont
compris que pour demeurer libres, elles devaient de pas faire étalage de leurs connaissances.
Dans les salons, centrées autour de la maîtresse de maison, elles côtoient des hommes et
abordent de nombreux sujets littéraires, philosophiques ou scientifiques, lisent des poèmes ou
des textes littéraires. Cependant, ces femmes doivent toujours rester sur leurs gardes et veiller à
ne pas trop briller en public. Mademoiselle de Scudéry, dans son ouvrage Artamène ou le grand
Cyrus, oppose la femme savante qui fait l'étalage de ses connaissances, devenant ainsi
insupportable, et Sapho, une femme intelligente, douce, et sachant s'adapter à tous et à toutes
les situations sans jamais s'imposer.

EXEMPLE

Madame de Villedieu est, avec Mademoiselle de Scudéry et Madame de Lafayette, l'une des
femmes de lettres à succès du XVIIe siècle.

D'ailleurs, de plus en plus de romans et nouvelles ont pour personnages principaux des héroïnes.
Leurs rôles sont souvent valorisés.

EXEMPLE

Le XVIIe siècle voit la naissance de nombreuses héroïnes en littérature : celles de Madame


de Lafayette, la princesse de Montpensier et la princesse de Clèves, en sont d'éclatants
exemples.
Si les femmes prennent la plume et deviennent centrales dans les récits de fiction, c'est parce
que le lectorat change. En effet, les lecteurs sont de plus en plus nombreux. Ils appartiennent
surtout à la noblesse, qui a le loisir de lire et les moyens d'acheter des livres. Mais surtout, dès le
XVIIe siècle, plusieurs contemporains soulignent que les lecteurs sont surtout des lectrices. C'est
le cas de Jean Chapelain qui affirme, dans une lettre datée du 8 novembre 1660 à Georges
Scudéry, que le lectorat est surtout constitué de "gens de cœur et femmes délicates". C'est
également le cas de Charles Sorel, déplorant dans De la connaissance des bons livres, en 1671,
que l'oisiveté conduise "les femmes et les filles" à s'adonner à la lecture de romans.

Cette prédominance du féminin inquiète plus qu'elle ne plaît. Écrire des


romans, lire des romans, deviennent des occupations féminines, jugées
ainsi moins nobles que d'autres. C'est d'ailleurs parce que de nombreuses
REMARQUE femmes lisent que le discours critique à l'égard du roman et de la nouvelle
se fait sévère : cela entraîne à la rêverie, la mélancolie, et peut même
pervertir l'esprit.

Au XVIIe siècle naît d'ailleurs le courant de la "préciosité", mouvement dans lequel les femmes se
trouvent au centre, raison pour laquelle l'amour galant et la délicatesse sont au cœur de
nombreux récits. En effet, dans leurs salons, les précieuses exigent des récits à la hauteur d'un
idéal de perfection et de pureté.

C Le métier d'écrivain, une occupation frivole


Au début du XVIIe siècle, le métier d'écrivain est jugé assez sévèrement, écrire n'apporte pas de
considérations sociales, on juge l'occupation frivole. C'est d'ailleurs pour cette raison que de
nombreux auteurs pratiquent l'anonymat ou utilisent des pseudonymes. En général, leurs
contemporains savent qui a écrit telle ou telle œuvre, mais dans la pratique, les noms réels des
auteurs n'apparaissent pas, en particulier si ce sont des femmes.

EXEMPLE

En 1662, Madame de Lafayette publie "La Princesse de Montpensier" de façon anonyme. En


1670, elle publie Zayde sous le nom de son ami Jean Regnault de Segrais. En 1678, La
Princesse de Clèves est publié anonymement.

EXEMPLE

Madame de Villedie accepte que son nom figure sur les romans qu'elle publie. Elle fait partie
des rares écrivains du XVIIe siècle qui le font.

Le titre même de "romancier" n'est pas attribué aux écrivains. En effet, au XVIIe siècle, l'auteur de
romans est appelé "romaniste". Dans le Dictionnaire de Furetière, on réalise ainsi que le titre de
"romancier" est donné uniquement aux auteurs de romans de chevalerie. Par ailleurs, lorsque les
romanciers écrivent des préfaces, ils se justifient souvent, s'excusent pour les éventuelles fautes
d'impression, comme s'il fallait à tout prix faire passer le message que le roman et la nouvelle ne
sont pas des genres très importants, que tout cela n'est qu'une occupation anodine.
III Une reconnaissance croissante de la nouvelle et du roman
au cours du XVIIe siècle

Les petites histoires ont entièrement détruit les grands romans. Cet avantage n'est l'effet
d'aucun caprice. Il est fondé sur la raison, et je ne pourrais assez m'étonner de ce que les
fables à dix ou douze volumes aient si longtemps régné en France, si je ne savais que c'est
depuis peu seulement que l'on a inventé les nouvelles.

Du Plaisir
Sentiments sur les lettres et sur l'histoire - 1683

Dans cet extrait, Du Plaisir témoigne du succès du genre de la


nouvelle qui a fini par s'imposer au XVIIe siècle.

INTERPRÉTATION

A Le développement de la nouvelle et du roman


Les différents genres liés au roman et à la nouvelle se développent particulièrement au XVIIe
siècle. On trouve ainsi :

Les histoires tragiques qui traitent de crimes abominables.


Le roman comique qui s'intéresse particulièrement au cocuage.
Le roman baroque qui mêle de nombreuses intrigues.
Les nouvelles historiques et galantes qui s'inspirent de l'Histoire.
Les historiettes qui rapportent essentiellement des ragots.

EXEMPLE

Les Rencontres funestes ou Fortunes infortunées de notre temps écrit par Jean-Pierre
Camus et sorti en 1644 est un recueil contenant des histoires tragiques.

EXEMPLE

L'un des plus célèbres romans comiques du XVII est Le Roman comique de Paul Scarron,
publié en 1651.

EXEMPLE

Les Aventures de Télémaque de Fénelon est un roman baroque qui paraît en 1699.

EXEMPLE

La Princesse de Clèves est un roman historique et galant de Madame de Lafayette publié en


1678.
Les contes de fées se développent particulièrement au XVIIe siècle. Si l'on
retient surtout Perrault, les femmes sont pourtant nombreuses à avoir
brillamment investi le genre. Ainsi, Marie-Catherine d'Aulnoy s'est illustrée
REMARQUE avec de nombreux contes comme "La Biche au bois" ou "L'Oiseau bleu".
Les contes de fées sont parfois associés à des nouvelles dans les écrits
du XVIIe siècle.

Les nouvelles ont du succès car leur narration repose sur la simplicité et se concentre sur une
intrigue, un temps de crise précis. En effet, le roman baroque qui est populaire au XVIIe siècle est
un genre touffu voire complexe dans lequel le lecteur suit de multiples intrigues, de multiples
personnages, et dont l'histoire est souvent fort peu vraisemblable. Les nouvelles permettent de
revenir à quelque chose de plus simple. Par ailleurs, relatant particulièrement des sujets plus
récents et proches des lecteurs, les nouvelles suscitent d'autant plus leur intérêt.

La nouvelle est également prisée par les écrivains car elle est un laboratoire dans lequel
s'élaborent des thèmes et des techniques de narration nouveaux. Ainsi, on peut dire que le XVIIe
siècle prépare toutes les formes que va développer ensuite le genre romanesque. Cette liberté
explique pourquoi le roman et la nouvelle ne sont pas considérés comme des genres nobles et
échappent au devoir de célébrer les mérites du roi Louis XIV. Ils sont beaucoup moins codifiés
par exemple que la comédie et la tragédie au théâtre.

Par ailleurs, si le genre a de plus en plus de succès, c'est également car les lecteurs sont de plus
en plus nombreux. Ils font partie de la noblesse et de la grande bourgeoisie, mais également de
la moyenne bourgeoisie. Cette évolution correspond à l'évolution sociale des romanciers, mais
également à la baisse du prix des livres. En effet, au début du siècle le livre est un article de luxe,
mais il devient de plus en plus accessible. La baisse de qualité du papier et l'impression et la
reliure de petits formats dits "in-douze" (16 cm x 9 cm) permettent cette baisse de prix.

Au XVIIe siècle, les critiques se réfèrent particulièrement à Poétique


d'Aristote pour définir les règles de la littérature. Le roman a été exclu de
cet ouvrage. D'ailleurs, même lorsque Nicolas Boileau rédige son Art
REMARQUE poétique en 1674, il n'aborde pas le genre romanesque. Le vers prime à
l'époque classique, raison pour laquelle le roman, en prose, est souvent
dédaigné.

Les nouvelles ont également du succès car le lectorat préfère les histoires véritables et se
détourne des romans nobles ou des romans fleuves qui s'inspirent de la tradition de l'épopée.

EXEMPLE

Le roman pastoral d'Hornoré d'Urfé, L'Astrée, compte plus de cinq milles pages et développe
près de quarante histoires.

B L'influence du roman et de la nouvelle sur la vie mondaine


Les romans et les nouvelles connaissent un tel succès qu'ils influencent beaucoup la vie
mondaine. En effet, certains essaient de parler comme dans les livres. C'est le cas notamment
de Mlle de Scudéry. De nombreux salons se développent dans lesquels on traite de culture et de
littérature. C'est le cas des salons de :

Madame d'Auchy, qui propose d'ailleurs de fonder une "académie femelle".


Madame de Rambouillet qui est devenue célèbre pour son salon dans la "chambre bleue".
Madame de Sablé qui souhaite vivement traiter de la façon dont les sentiments sont évoqués
en littérature.
Les romans passent de main en main, les nouvelles sont échangées, les mondains parlent
beaucoup de littérature et débattent des sujets qui y sont abordés.

Le succès de ces deux formes de littérature coïncide avec le succès de la revue Le Mercure
galant. Ce magazine de divertissement culturel est fondé en 1672 par Jean Donneau de Visé et
paraît mensuellement. On y trouve :

L'actualité politique avec les chroniques de la cour, les nominations et promotions des
personnages de cour, l'état des campagnes militaires, etc.
La rubrique mondaine avec les naissances, les mariages, les décès, les dates des bals et
autres mondanités, etc.
Les comptes-rendus détaillant les spectacles, la mode, les nouveaux jeux, les publications
récentes, etc.
Cette revue permet la publication d'un grand nombre de nouvelles. En effet, entre sa fondation en
1672 et la mort de son fondateur en 1710, l'équivalent de 370 nouvelles sont publiées. Très
populaire, Le Mercure galant popularise la nouvelle qui devient un sujet de discussions
mondaines. Il faut d'ailleurs noter que les nouvelles s'inspirent souvent d'un événement mondain.

IV Le mouvement précieux

Le XVIIe siècle est particulièrement marqué par le mouvement précieux. L'autre grand courant du
XVIIe siècle est le classicisme, qui cherche à codifier la littérature et valorise une langue
structurée, naturelle et vraisemblable, en insistant sur la morale. La préciosité reprend ces codes,
mais le mouvement se concentre surtout sur la femme et cherche à lui donner une place plus
importante dans la société.

R. Bray
La préciosité, si l'on prend le terme dans son sens le plus strict, est
un mouvement d'idées qui se développe à Paris au milieu du XVIIe,
plus précisément entre 1650 et 1660. Sa croissance est aussi
rapide que son déclin.

Article "préciosité" dans le Dictionnaire des Lettres françaises XVIIe


1996

Les précieux entendent également se distinguer par le langage. Ainsi, de nombreux néologismes
ont été créés comme :

Enthousiasmer
Encanailler
Bravoure
Pommade
Incontestable
De nombreuses périphrases propices à l'exagération sont trouvées :

"Les commodités de la conversation" pour "le fauteuil"


"Le siège de Vulcain" pour "la cheminée"
Ces expressions feront l'objet de railleries dans la comédie de Molière Les Précieuses ridicules.

L'auteur précieux s'attache à ciseler particulièrement son récit. Le précieux entend néanmoins se
libérer de certaines règles trop rigides afin de trouver son idéal.

Georges Mongrédien
L'esprit précieux marque la revanche de l'imagination, trop bridée
par l'idéal classique ; c'est le baroque à côté de la pureté et de la
sobriété ; c'est l'imagination romanesque face à la raison classique
; c'est l'esprit de finesse opposé à l'esprit de géométrie.

La Vie littéraire au XVIIe siècle


1947

L'auteur précieux se plaît à parler des passions, à décrire avec sensibilité les mouvements de
l'âme, toujours en essayant de rendre le texte aussi épuré que possible.

Jean Giraudoux
Être précieux, c'est désespérer alors qu'on espère toujours, c'est
brûler de plus de feux que l'on n'en alluma, c'est tresser autour des
mots révérés une toile avec mille fils et dès qu'on souffle, une
pensée l'effleure, c'est le cœur qui s'élance du plus noir de sa
cachette, la tue, suce son doux sang. C'est Mademoiselle de
Rambouillet couvrant de sa blanche main tous les mots cruels et
nous les rendant ensuite, le mot courroux, le mot barbare,
inoffensifs, comme les détectives qui changent le revolver du
bandit en un revolver porte-cigares.

Suzanne et le Pacifique
1921

C'est de 1654 à 1661 que le mouvement précieux est à son apogée. À l'origine, on trouve des
auteurs qui veulent réformer le langage et des femmes qui exigent des textes traitant de l'amour
de façon idéal, avec une langue galante et épurée. C'est une recherche de la distinction, de l'idéal.

Les textes de Madame de Lafayette sont qualifiés de précieux. Ainsi, dans La Princesse de
Clèves, lorsque la princesse renonce à Nemours et se retire du monde, Madame de Lafayette
répond aux normes précieuses : il faut que l'amour reste pur et idéal.

Le mouvement précieux a été critiqué pour plusieurs raisons :

Si les sujets peuvent être moraux (c'est le cas avec Madame de Lafayette), les salons qui se
développent avec le mouvement sont jugés douteux, car femmes et hommes y sont très
proches.

L'amour y est peint de façon idéale mais souvent ridicule.


Intellectuellement, les sujets ne semblent pas sérieux mais restent superficiels.
La langue est jugée empruntée et les clichés foisonnent.
Le mouvement est jugé essentiellement féminin.

Molière se moque particulièrement des précieuses avec sa pièce Les


Précieuses ridicules mettant en scène deux provinciales qui, voulant
passer pour des précieuses, poussent l'absurde à ses extrémités.
REMARQUE

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