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Saint-Pierre-et-Miquelon
(France)

Collectivité française d'outre-mer

Capitale: Saint-Pierre
Population: 6092 habitants (août 2020)
Langue officielle: français
Groupe majoritaire: français (100 %)
Groupes minoritaires: aucun
Statut politique: collectivité d'outre-mer de la République française
Articles constitutionnels (langue): art. 2 et 75-1 de la Constitution de 1992 de la République française (modifiée par la Loi
constitutionnelle no 92-554 du 25 juin 1992
Lois linguistiques: loi no 75-620 du 11 juillet 1975 relative à l'éducation (loi Haby) ; loi no 84-52 du 26 janvier 1984 sur
l'enseignement supérieur ; loi d'orientation no 89-486 du 10 juillet 1989 sur l'éducation (loi Jospin) ; décret no 93-535 du 27
mars 1993 portant approbation du cahier des missions et des charges de la Société nationale de radiodiffusion et de télévision
française pour l'outre-mer (RFO) ; loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française (1994) ; Code de l'éducation
(2000) ; Loi d'orientation pour l'outre-mer (2000) ; Loi no 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir
de l'école (loi Fillon).

1 Situation géographique
Les îles de Saint-Pierre et de Miquelon constituent un petit archipel de 242 km² situé à quelque 25 km au sud-ouest de la province canadienne de
Terre-Neuve-Labrador (superficie de 112 200 km²), à 300 km de Sydney (Nouvelle-Écosse), à 1800 km de Montréal (Québec) et à 4279 km de
Paris.

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Cet archipel compte deux îles principales, l’île de Saint-Pierre au sud-est et l’île de Miquelon (reliée à l’île de
Langlade par une bande de sable), auxquelles s’ajoutent quelques îlots (voir la carte agrandie) qui ont été tour
à tour occupés, puis abandonnés, tels l'île aux Pigeons, l'île aux Vainqueurs et l'île Verte (Green Island).

Saint-Pierre-et-Miquelon a obtenu le statut de département d’outre-mer (DOM) en 1976 et celui de collectivité


territoriale à statut particulier de la République française en 1985, puis en 2003 celui de COM ou collectivité
d'outre-mer. Ce statut accorde à Saint-Pierre-et-Miquelon des institutions spécifiques, comme c'est le cas à la
Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Wallis-et-Futuna. Il n’existe que deux villes: Saint-
Pierre, le chef-lieu, avec 5800 habitants, et Miquelon avec 710 habitants.

Le drapeau de cette collectivité d'outre-mer rappelle l'histoire de la colonisation de l'archipel par les Français.
Le bleu représente l'océan Atlantique et le voilier jaune commémore le voyage de l'explorateur Jacques Cartier
en 1535. Sur la hampe de gauche, on peut observer (de haut en bas) le drapeau du Pays basque (l'Ikurrin),
puis celui de la Bretagne (l'hermine) et celui de la Normandie (les deux léopards), rappelant ainsi les origines
principales des colons français. Rappelons que le léopard est dans le bestiaire médiéval un «cousin du lion».
En effet, le léopard se disait mot à mot: "lion" (<leo) et "panthère" (<pard), ce qui signifie «bâtard du lion». Le
mot «léopard» vient du latin "leopardus", issu de "leo" («lion») et de "pardus" («panthère»).

Historiquement, l'héraldique française a désigné les «lions» d'Angleterre par le mot «léopard», un animal «bâtard» et «mauvais», sans aucun
doute par allusion aux rois d'Angleterre, bâtards, et ne pouvant revendiquer le trône de France. Rappelons aussi que le duc Guillaume II de
Normandie (1027-1087) fut appelé en Angleterre «William the Bastard» (Guillaume le Bâtard); il devint ensuite «William the Conqueror»
(Guillaume le Conquérant) et roi d'Angleterre de 1066 à 1087.

2 Données démolinguistiques
Ce petit archipel français d’Amérique du Nord ne compte que 6100 habitants, pratiquement tous francophones. La quasi-totalité de la population
(87,7 %) habite à l’île Saint-Pierre juste longue de huit kilomètres (26 km²). L’île de Miquelon et l’île de Langlade, d’une superficie totale de 216
km², ne comptent que 770 habitants.

2.1 Les origines

Les habitants actuels des îles de Saint-Pierre et de Miquelon sont les descendants de Français (provinces du Pays basque, de Bretagne et de
Normandie) et d’Acadiens arrivés dans l’archipel à partir de la Conquête anglaise de 1763, bien que la recolonisation de l'archipel ne soit datée
que de 1816. En réalité, les Saint-Pierrais d’origine acadienne constituent la souche la plus ancienne de la population, même s'ils sont
aujourd’hui minoritaires dans l’archipel. L’histoire de Saint-Pierre-et-Miquelon est là pour nous rappeler la présence ancienne des Acadiens à
travers les déportations successives et les nombreux rapatriements qu’ils ont subis.

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Quant aux descendants d’origine basque qui habitent encore l’archipel, ils ont perdu leur langue depuis de nombreuses décennies. D’après
certains témoignages, il semble que plusieurs d’entre eux parlaient encore le basque jusqu’au début du XXe siècle. La plupart des Basques qui se
sont établis dans l’archipel devaient sans doute parler le labourdin étant donné qu’ils venaient de la province basque du Labourd (en basque:
Lapurdi).

Enfin, pour ce qui est des descendants bretons et normands, ils ont vite adopté le français, comme le firent d’ailleurs tous les colons établis en
Nouvelle-France au XVIIe et au XVIIIe siècles. Cependant, plusieurs centaines de Normands sont aussi venus s'établir lors d'une vague plus tardive
au XIXe siècle; ils venaient majoritairement de la région de la baie du Mont-Saint-Michel, ainsi que des villes de Grandville et d'Avranches.
Aujourd’hui, même si l’accent des habitants de l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon semble s’apparenter parfois à celui des Acadiens et des
Normands, les Saint-Pierrais et les Miquelonnais parlent un français qui n’a rien à envier à celui de la Métropole.

2.1 La langue parlée aujourd'hui

Bien que les habitants de ce petit archipel français soit situé en Amérique du Nord, ils ne parlent pas le français des Québécois ni celui des
Acadiens. D'une part, l'origine des uns et des autres diffèrent sensiblement, mais les Saint-Pierrais ont néanmoins conservé une certaine filiation
à la fois bretonne, basque, normande, acadienne, parisienne, anglaise et irlandaise. En somme, les locuteurs de l'archipel parlent un français
assez proche du parisien avec des particularités locales. Par comparaison avec les Québécois et les Acadiens, les Saint-Pierrais n'on conservé
qu'un nombre restreint d’archaïsmes, de dialectalismes et d'anglicismes. Parmi les particularités saint-pierraises, on note un certain vocabulaire
d'origine maritime:

- embarquer dans son lit = «se coucher»;


- embarquer en voiture ou débarquer de l’auto = monter, descendre;
- amarrer = attacher»: amarrer ses chaussures; amarrer une vache dans un pré;
- chavirer un champ = labourer
- débouquer d’une vallée = «sortir à l’improviste»;
- mouiller = s’arrêter (≠ jeter l’ancre);
- larguer = laisser partir: larguer une vache dans un champ;
- arrimer = ranger : arrimer des bosses de sucre;

Voici quelques autres exemples:

Particularités locales Mots empruntés


Aux Canadiens:
catin («poupée»); se greyer («se munir»), bordée («forte chute de
pile («tas») : une pile de foin, une pile de morues; neige»), garrocher («lancer»), etc.
balle («botte») : une balle de foin;
ravager («cueillir») : aller ravager des fraises; Aux Acadiens:
poêle de cuisine (fourneau»); crémi («glace marine, sans cohésion»), dégelis («dégel local»), neige
basque («qui tombe en gros flocons»), le temps se graisse («se gâte»),
trempé-mouillé = être surpris par une grosse averse; pilot de neige («banc de neige»),
il n’y a pas de presse = «vous avez tout votre temps»;

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ce n’est pas gênant = «c’est bien», «c’est entendu»; Aux Anglais:
tout de suite (≠ immédiatement) > «maintenant», «en truck («camion»), plug («fusible»), starter («démarreur»), poker
ce moment»: il neige tout de suite, je vais bien tout («tisonnier»), mop («faubert»), smatte («en bonne forme»), clabord
(«planche en déclin»), Chrismas («Noël»),
de suite;
coup de poudrin = poudrerie (au Québec). Aux Amérindiens:
cacaouite (< kakaoui ) et moyac = canards migrateurs ;

En somme, le français saint-pierrais correspond à un français régional proche du français parisien, avec la présence d'un petit nombre
d'archaïsmes, d'emprunts au français acadien et québécois, voire à l'anglais.

Cette différence avec le français canadien ou québécois vient du fait que les populations canadienne et saint-pierraise n'ont pas la même origine.
Les ancêtres des Canadiens actuels, qu'ils soient québécois, acadiens ou franco-ontariens, sont arrivés en Nouvelle-France bien avant la
Conquête de 1763; ils ont conservé une grande partie de leurs particularités langagières de la Vieille France, notamment les prononciations du
Grand Siècle, parce qu'ils n'ont connu que sur le tard les changements linguistiques apportés par la Révolution française.

Or, la population de Saint-Pierre-et-Miquelon tire son origine de la recolonisation française de 1816, alors que les prononciations du Grand Siècle
étaient devenues désuètes en France. Les Français du petit archipel saint-pierrais ont apporté avec eux les nouvelles prononciations issues de la
Révolution française. Alors que les Saint-Pierrais sont arrivés avec une prononciation fondée sur l'usage de la bourgeoisie parisienne du XIXe
siècle, les Canadiens conservaient encore leur prononciation héritée du français du XVIIe siècle. Ce sont les Parisiens qui ont imposé la norme
du français moderne. Ce faisant, l'ancien usage du «français du roy», conservé au Canada, a été réduit au rang d'une prononciation populaire et
paysanne.

3 Données historiques

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Longtemps avant l'arrivée des Européens, les îles de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon avaient été habitées par
des populations amérindiennes, les Béothuks. Nous savons qu'ils habitaient l'île de Terre-Neuve en 200 avant notre
ère et qu'ils furent progressivement chassés par les Européens à partir du XVe siècle. Les Français, pour leur part,
encouragèrent leurs alliés micmacs de Terre-Neuve à liquider les Béothuks, car les pêcheurs voulaient ainsi protéger
leurs propriétés et leurs biens. Quant aux Britanniques du XVIIe siècle, ils menèrent la vie dure aux Béothuks en se
livrant à des massacres systématiques, afin de les refouler vers l'intérieur des terres jusqu'à leur disparition complète,
la dernière Béothuk connue s'étant éteinte en 1829 à St. John's de Terre-Neuve.

Avant toute exploration officielle, des pêcheurs bretons et normands s’établirent vers 1504 sur une base saisonnière
à Saint-Pierre et vinrent pêcher dans les eaux de Terre-Neuve où la morue était abondante; des Basques sont venus
chasser la baleine sur les bancs de Terre-Neuve à la même époque. Mais c’est le navigateur portugais João Alvares
Fagundes (ou José Alvarez Faguendes) qui, après avoir abordé les côtes de la Nouvelle-Écosse, le golfe Saint-
Laurent et la côte sud de Terre-Neuve, découvrit officiellement, le 21 octobre 1520, l’archipel de Saint-Pierre-et-
Miquelon qu’il appela alors l’île des Onze Mille Vierges (Ilhas do Arcepelleguo das Onze Mil Virgens) en souvenir
d’une légende attribuée à sainte Ursule et à ses compagnes.

Les Portugais conservèrent très peu longtemps ces îles qui, d’ailleurs, ne gardèrent pas leur nom originel («archipel des Onze Mille Vierges»),
car en 1530 l'appellation des îles de Saint-Pierre fit son apparition sur les cartes marines.

3.1 Une possession française

L’archipel passa rapidement sous souveraineté française lorsque, le 5 juin 1536, Jacques Cartier y aborda avec
deux bateaux, la Grande Hermine et l'Émérillon, au retour de son second voyage au Canada. Il y séjourna six jours et
constata la présence de plusieurs navires «tant de France que de Bretagne». Il profita de son séjour pour en prendre
officiellement possession au nom de François Ier, roi de France. Cartier écrivit en 1536:

Nous fumes ausdictes yles sainct Pierre, où trouvasmes plusieurs navires, tant de France que de Bretaigne, depuis le jour sainct
Bernabé, XIe de juing, jusques au XVIe jour dudict moys, que appareillasmes desdictes ysles sainct Pierre et vynmes au cap de
Raze.

Ce n'est pas Jacques Cartier qui avait nommé ainsi l'île Saint-Pierre, car il n'avait fait que reprendre une
dénomination déjà connue sur des cartes de 1530. Dans les années qui suivirent, les prêcheurs basques et malouins
utilisèrent les dénominations isle de sainct Pierre et isle de Miquetõ ou Miclon ou Miquelu (plus tard: Miquelon) pour
désigner l'archipel.

Pour sa part, il semble que le mot Miquelon ait une origine basque espagnole, puisque San Miguel (saint Michel ou Michaël) est le patron des
Basques espagnols. D'ailleurs, Samuel de Champlain employa en 1612 les dénominations de «ile Miquelon-Langlade» et de «ille aux basques».

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Selon cette théorie, le nom de San Miguel aurait été modifié successivement en Micqueto, Micquelle, Micklon, Miclon, Miquelo, Miquetongo,
Micquelu, Miquellon, Milchon, Maquelon et enfin Miquelon.

Enfin, le toponyme Langlade ne proviendrait aucunement du nom du chevalier français Charles Michel de Langlade, qui vécut de 1729 à 1801 et
effectua de longs séjours au Canada et aux États-Unis. Le mot Langlade est plutôt un dérivé d'un autre toponyme correspondant jadis au «cap
d'Angleterre» ou England (selon une carte de Denis de Rotis, datée de 1674) ou encore «cap de Langlais» ou Langlois (selon une carte de
Belleorme, datée de 1694). Le terme se serait progressivement modifié en «Langland», puis «Langlade» à la française. D'ailleurs, des cartes très
anciennes témoignent d'une île baptisée «Terra England» dès 1610.

Cependant, c’est seulement vers 1604 que des établissements sédentaires furent fondés, dont la ville de Saint-Pierre, par des pêcheurs bretons,
normands et basques. Après le passage de Cartier, de nombreux Bretons, tout particulièrement de Saint-Malo, continuèrent à utiliser Saint-Pierre
comme base de pêche saisonnière.

3.2 La colonie de Plaisance

À partir de 1650, l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon fit partie de la colonie française de


Plaisance. L'archipel passa sous la juridiction directe du gouverneur qui résidait, depuis 1662, à
Plaisance. Cette colonie formait alors une entité distincte du Canada, de l'Acadie et de la
Louisiane en Nouvelle-France. Située au sud-ouest de la péninsule d'Avalon, la ville de Plaisance
(aujourd'hui Placentia) fut choisie par Louis XIV pour servir de capitale administrative pour les
habitants français de l’île de Terre-Neuve, afin de ne pas laisser toute la grande île aux Anglais. À
ce moment-là, pêcheurs français et anglais vivaient dans une certaine harmonie; les Français
occupaient surtout le sud, alors que les Basques, les Normands et le Bretons s'étaient réservé la
côte ouest. De leur côté, les Anglais exploitaient la côte est où ils avaient fondé St John's. Le
baron Louis-Armand de Lahontan (1666-1715) résume ainsi l'importance du port de Plaisance:

C'est le seul port de toute l'Amérique d'où les François puissent tirer de la morue seche en temps de
guerre, puisque les autres endroits à sçavoir Saint Pierre, l'ile Percée, &c sont des ports ouvers sans
fortifications, si apparence d'i pouvoir en faire.

À l'apogée de leur présence à Terre-Neuve (Plaisance), soit entre 1678 et 1688, les Français (incluant les Basques) consacraient à la pêche
environ 20 000 personnes (environ le quart de tous les marins de la Nouvelle-France) et quelque 300 navires, ce qui représentait en gros le
double de l'effort des Britanniques sur l'île. Mais la colonie de Terre-Neuve s’avéra d'une grande fragilité et, malgré tous les efforts financiers et
militaires du roi, elle fut considérée comme perdue dès 1690. En fait, des problèmes internes d'ordre économique, l'incompétence des
gouverneurs français, les maigres ressources agricoles du territoire, ainsi que des tensions ethniques entre Basques, Malouins, Rochelais et
Normands contribuèrent à affaiblir la colonie de Plaisance, donc du petit archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon. La perte de Terre-Neuve en 1713
constituera la première phase d'encerclement des colonies du Canada et de l'Acadie par les Britanniques.

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3.3 Les chassés-croisés franco-britanniques

Dès la fin du XVIIe siècle et lors de la guerre de Succession d'Espagne (1701-1713), tous les établissements français en Amérique du Nord, donc
celui de Saint-Pierre-et-Miquelon, connurent une situation d’instabilité en raison des incessants conflits entre la Grande-Bretagne et la France. En
effet, de 1690 à 1814, l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon fut pris et repris neuf fois alternativement par les Anglais et les Français, et, à quatre
reprises, il fut totalement dévasté et tous les habitants déportés. Un véritable chassé-croisé de déportés, de maisons et de terres brûlées durant
un siècle et demi pour un si minuscule territoire de 242 km² (principauté de Monaco aujourd'hui : 1,95 km².

Les Basques et les Malouins n'ont jamais conservé leur langue dans l'archipel, car non seulement ils parlaient généralement le français, mais ils
furent constamment déportés par les Anglais, ce qui excluait toute permanence de la population.

En 1697, le traité de Ryswick (aujourd'hui Rijswijk, ville néerlandaise de la région de La Haye) mit fin à la guerre de la ligue d'Augsbourg entre
Louis XIV et la Grande Alliance. Le traité confirma la puissance de la France en Amérique. Les Français conservèrent donc les colonies de
l'Acadie et de Plaisance à Terre-Neuve, tandis que les Anglais retrouvaient leurs anciens établissements dans l'île; les Anglais retrouvaient aussi
les postes de la Compagnie de la Baie d'Hudson, sauf les trois de la baie James pris par Pierre Le Moyne d'Iberville entre 1686 et 1697. L'île de
Terre-Neuve resta donc sous une double administration: anglaise au nord avec St John's, française au sud avec Plaisance. Mais les conflits entre
Français et Anglais recommencèrent de plus belle. Il y eut des attaques de la part des Français ou des Anglais presque tous les ans, sauf en
1707, entre 1702 et 1708. En 1711, la marine britannique attaqua Plaisance; bien qu'elle disposât de 15 bâtiments, de 900 canons et de 4000
hommes, elle ne réussit pas à prendre la ville. Si les Français de Plaisance avaient gagné presque toutes les batailles sur l'île, la France avait
perdu la guerre en Europe.

Puis, par le traité d’Utrecht de 1713, la France perdait l'île de Terre-Neuve (incluant la ville et le fort de Plaisance), les pêcheries du Labrador et
l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon devenu St. Peter's Island. Elle ne conservait que l'île du Cap-Breton rebaptisée île Royale pour le
ravitaillement de ses escadres et de ses flottilles de pêche, ainsi que l'île Saint-Jean (l'actuelle île du Prince-Édouard), qui devait servir de colonie
agricole pour la garnison de la forteresse. La construction de la forteresse de Louisbourg ne commença qu'en 1719 et elle ne sera achevée qu'en
1743, mais le gros œuvre était terminé en 1728. Une partie de la population de Saint-Pierre-et-Miquelon fut alors déportée à l'île Royale restée
française avec l'île Saint-Jean. Parmi les Saint-Pierrais et Miquelonnais qui vécurent l’exode de 1713, certains furent déportés en Nouvelle-
Angleterre ou en Grande-Bretagne. Saint-Pierre devint un petit port de pêche terre-neuvien anglais. Dès la cession de Terre-Neuve à l'Angleterre,
les pêcheurs anglais héritèrent des installations des Français et l'île vit arriver de nombreux colons venus du sud-ouest de l'Angleterre; à partir de
1720, d'autres immigrants vinrent en grand nombre du sud-est de l'Irlande. De majoritairement française, l'île de Terre-Neuve devint très
majoritairement anglo-irlandaise, y compris le petit archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.

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Néanmoins, la France a pu conserver encore longtemps le droit de pêcher dans les eaux de
Terre-Neuve et de sécher la morue sur les côtes, sans y construire d'établissements
permanents. À partir de 1713, les activités des pêcheurs français furent limitées à ce qu'on
appellera plus tard le "French Shore", c'est-à-dire la côte nord de l'île, entre Bonavista et
jusqu'à la pointe Riche à l'ouest. Le traité de Paris de 1763 agrandira la zone de pêche en
incluant l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon comme point de ravitaillement.

En 1783, le traité de Versailles allait entraîner d'autres modifications de la zone de pêche


française. Le "French Shore" s'étendrait désormais entre le cap St John et le cap Ray, et les
droits des Français sur cette zone seraient inscrits dans une déclaration. En 1904, les droits de
pêche français allaient être furent définitivement abolis.

Après la défaite des Plaines d’Abraham à Québec en 1759 et la fin de la guerre de Sept Ans en Europe (1763), la France perdit toutes ses
colonies d’Amérique du Nord, mais récupéra le petit archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui avait été perdu lors du traité d’Utrecht (1713). La
France réussit à conserver ses privilèges sur le «French Shore» terre-neuvien, tout en utilisant Saint-Pierre comme base des opérations pour
maintenir son lucratif commerce sur de vastes secteurs de la côte de Terre-Neuve.

Par le traité de Paris de 1763, c’est le secrétaire d’État aux Affaires étrangères, le duc de Choiseul, qui avait réussi à obtenir, en guise de
«dédommagement» de la part du gouvernement britannique, la restitution des deux petites îles au sud de Terre-Neuve. Après de longues
négociations, la Grande-Bretagne accepta la restitution de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon à certaines conditions. Voici les clauses des
articles 5 et 6 du traité (en version originale française):

Article 5

Les Sujets de la France auront la Liberté de la Pêche, & de la Secherie, sur une Partie des Côtes de l'Isle de Terre-Neuve, telle qu'elle est specifiée par l'Article
13. du Traité d'Utrecht [...] Et Sa Majesté Britannique consent de laisser aux Sujets du Roy Très Chretien la Liberté de pêcher dans le Golphe St Laurent, à
Condition que les Sujets de la France n'exercent la dite Pêche, qu'à la Distance de trois Lieues de toutes les Côtes appartenantes à la Grande Bretagne, soit
celles du Continent, soit celles des Isles situées dans le dit Golphe St Laurent.[...]

Article 6

Le Roy de la Grande Bretagne cede les Isles de St Pierre & de Miquelon, en toute Proprieté, à Sa Majesté Très Chretienne, pour servir d'Abri aux Pêcheurs
François; Et Sa dite Majesté Très Chretienne s'oblige à ne point fortifier les dites Isles, à n'y établir que des Batimens civils pour la Commodité de la Pêche, & à
n'y entretenir qu'une Garde de cinquante Hommes pour la Police.

Cependant, les déclarations annexées au traité et présentées dans un langage ambigu allaient entraîner d'autres conflits dans les années
ultérieures.

Dès 1763, quelque 800 Acadiens victimes du «Grand Dérangement» (déportation) de 1755 vinrent trouver refuge dans l’archipel de Saint-Pierre-
et-Miquelon et s’installèrent pour la plupart à Miquelon. Certains Acadiens de la Nouvelle-Écosse avaient été déportés en Virginie en 1755,
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expédiés en Angleterre en 1756, puis dirigés vers la France en 1763 avant de venir s'installer dans le petit archipel français. En 1767, le
gouvernement français rapatria les Acadiens en France sous prétexte que les ressources des îles ne suffisaient pas pour subvenir aux besoins
des nouveaux habitants. Dès l'année suivante, le gouvernement français changea d’avis et les renvoya à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Pour une seconde fois depuis le traité d'Utrecht, la France conserva ses droits de pêche sur les côtes terre-neuviennes. D’ailleurs, l’opinion
publique britannique a longtemps reproché à son gouvernement d’avoir cédé, malgré la défaite française de 1760, ce minuscule territoire en
Amérique du Nord, ainsi que des droits de pêche jugés trop considérables dans des eaux territoriales «anglaises» réputées comme les plus
poissonneuses du monde.

Au moment de la guerre de l’Indépendance américaine (1775-1782), la France prit parti pour les Américains, ce qui justifia une nouvelle
invasion britannique, par représailles. En 1778, une escadre anglaise dirigée par l’amiral anglais John Montaguë s'empara des îles de Saint-
Pierre-et-Miquelon, détruisit toutes les installations de l’archipel et déporta tous les habitants (au nombre d’environ 1300) vers la France. Par voie
de conséquence, les malheureux Acadiens furent à nouveau déportés vers la France; ils s’installèrent sur le long du littoral atlantique.

Quelques années plus tard, le traité de Versailles de 1783 restitua l’archipel à la France et quelque 600 Acadiens retournèrent à Saint-Pierre...
pour peu de temps. Les droits de pêche français se poursuivirent sur presque toute la côte nord de Terre-Neuve à partir de 1713, puis furent
modifiés en 1783 pour se restreindre sur la côte ouest de l'île jusqu'en 1904, avant de cesser complètement.

En 1789, la Révolution française éclata. Alarmé par le sort réservé au clergé français, le missionnaire Jean-Baptiste Allain décida d'émigrer aux
îles de la Madeleine (au Québec) avec de nombreux paroissiens. Le 14 mai 1793, les Anglais dirigés par l’amiral King attaquèrent à nouveau
l’archipel. Les Français durent capituler et la population de 1200 habitants, dont forcément tous les Acadiens, fut encore une fois déportée,
d’abord en Nouvelle-Écosse (Halifax), aux îles Anglo-Normandes et en Angleterre, puis partiellement rapatriée en France. Saint-Pierre redevint
un petit port de pêche à la fois terre-neuvien et anglais, car les Britanniques s’installèrent une nouvelle fois en lieu et place des Français.

En 1796, en guise de représailles, l’amiral français Richerie reprit l’archipel, chassa lui aussi les occupants — anglais cette fois-là — et détruisit
toutes les installations des pêcheurs. Pendant une vingtaine d’années, seuls les oiseaux et les mammifères sauvages habitèrent pacifiquement le
petit archipel.

À l'article 15, le traité d’Amiens (1802) rendait Saint-Pierre-et-Miquelon à la France:

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS, BONAPARTE, premier Consul, PROCLAME loi de la République le décret suivant, rendu par le Corps législatif le 30
floréal an X, conformément à la proposition faite par le Gouvernement le 16 du même mois], communiquée au Tribunat le lendemain.

XV. Les pêcheries sur les côtes de Terre-Neuve, des îles adjacentes, et dans le golfe de Saint-Laurent, sont remises sur le même pied où elles étaient avant la
guerre. Les pêcheurs français de Terre-Neuve, et les habitans des îles Saint-Pierre et Miquelon, pourront couper les bois qui leur seront nécessaires, dans les
baies de Fortune et du Désespoir, pendant la première année, à compter de la notification du présent traité.

Toutefois, la France perdit à nouveau son archipel en 1803, parce que la Grande-Bretagne était en guerre contre la France de Napoléon. Après la
défaite de Waterloo de juin 1815, les diplomates français réussirent à faire inclure, dans les clauses du second traité de Paris de 1815, la
rétrocession — définitive? — à la France des îles de Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, le second traité de Paris, daté du 20 novembre 1815 et
motivé par la résurgence napoléonienne des Cent Jours, aggrava pour la France les conditions du traité du 31 mai 1814 (premier traité), car
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l'article 1er indiquait que, sauf stipulation contraire, «les frontières de la France seront telles qu'elles étaient en 1790». Au cinquième alinéa, on lit
le texte suivant : «Tous les territoires et districts enclavés dans les limites du territoire français, telles qu'elles ont été déterminées par le présent
article, resteront réunis à la France.» En ce qui concerne les colonies, les territoires sont composés notamment de la Martinique, de la
Guadeloupe et ses dépendances (la Marie-Galante, la Désirade, les Saintes et la partie française de Saint-Martin), de la Guyane française, de
l'île de La Réunion et des îles de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Période Nombre d'années Régime


1604-1713 109 France
1713-1763 50 Grande-Bretagne
1763-1778 25 France
1778-1783 5 Grande-Bretagne
1783-1793 10 France
1793-1796 2 Grande-Bretagne
1696-1802 6 Inoccupé
1802-1803 1 France
1803-1816 13 Grande-Bretagne
1816- - France

En juin 1816, les anciens colons et leurs familles revinrent s’installer dans l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, mais ils débarquèrent sur «une
terre aussi nue qu’au jour de sa découverte», car tout avait été rasé par les Britanniques. On peut donc affirmer que la population actuelle de
Saint-Pierre-et-Miquelon tire son origine de la recolonisation de 1816 et que les Acadiens constituent la souche de la population la plus ancienne.

Il faut toutefois préciser que les Acadiens de l’île de Saint-Pierre sont issus des Acadiens installés dans la colonie de Terre-Neuve, plus
précisément de la «capitale française» de Plaisance. Ces Acadiens se sont réfugiés à Louisbourg en 1713 avant de parvenir à Saint-Pierre en
1758. Quant aux Acadiens de Miquelon, ils sont surtout originaires de Beaubassin et de Beauséjour, en Nouvelle-Écosse. On peut aussi affirmer
que les Acadiens des îles Saint-Pierre-et-Miquelon furent ceux qui ont subi le plus grand nombre de déportations: en effet, par quatre fois, ils ont
été délogés.

3.4 Une petite colonie définitivement française

Depuis cette époque, l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon est toujours resté sous juridiction française, mais les destructions dans l’archipel
continuèrent autrement. En effet, à trois reprises, soit en 1844, en 1865 et en 1867, de graves incendies anéantirent chaque fois soit une partie
soit la quasi-totalité de la ville de Saint-Pierre. Bref, la colonisation française sur ce petit archipel n’aura jamais été facile, car à plusieurs reprises
dans le passé les colons français n’ont trouvé que «le vide et le désert». À cela s’ajoute le fait que l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon s’est
fréquemment trouvé dans un environnement hostile puisque les pêcheurs de Terre-Neuve ont souvent contesté les droits de pêche français en
arrêtant les pêcheurs saint-pierrais et miquelonnais, et en confisquant leurs chaloupes.
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En 1783, le traité de Versailles avait entraîné des modifications dans la zone de pêche française. La France, alliée des États-Unis, avait obtenu
que le "French Shore" s'étende désormais entre le cap St John et le cap Ray, et les droits des Français sur cette zone devaient être inscrits dans
une déclaration. L'article 5 du traité de Versailles de 1783 modifiait la zone de pêche, alors que l'article 6 cédait en toute propriété les îles de
Saint-Pierre et de Miquelon au roi de France :

Article 5

[Le roi de France] pour prévenir les querelles qui ont eu lieu jusqu'à présent entre les deux nations […], consent à renoncer au droit de pêche […] depuis le cap
de Bonavista jusqu'au cap Saint-Jean […] et [le roi de Grande-Bretagne] consent de son côté que la pêche […] s'étende jusqu'à l'endroit appelé Cap Ray […].

Article 6

Le Roy de la Grande Bretagne cede les Isles de St Pierre & de Miquelon, en toute Proprieté, à Sa Majesté Très Chretienne, pour servir d’Abri aux Pêcheurs
François; Et Sa dite Majesté Très Chretienne s’oblige à ne point fortifier les dites Isles, à n’y établir que des Batimens civils pour la Commodité de la Pêche, & à
n’y entretenir qu’une Garde de cinquante Hommes pour la Police.

De son côté, la Déclaration du roi de Grande-Bretagne précisait ce qui suit:

[…] S. M. le Roi de Grande-Bretagne prendra les mesures les plus positives pour empêcher ses sujets d'interrompre de quelque façon que ce soit leur
concurrence, la pêche des Français (…) et, à cette fin, demandera à ce qu'on retire les établissements fixes qui s'y sont installés […].

L'article 13 du traité d'Utrecht, et la façon de pratiquer la pêche reconnue de tout temps devra être le plan selon lequel la pêche sera pratiquée à cet endroit, et
ne devra pas être modifiée par l'une ou l'autre des parties […].

S. M. le Roi de Grande-Bretagne, en cédant les îles de Saint-Pierre et Miquelon à la France, les considère cédées aux fins d'abri pour les pêcheurs français, et
en pleine confiance que ces possessions ne deviendront pas motif de jalousie entre les deux nations […].

Pour les Français, la déclaration signifiait que la Grande-Bretagne avait accepté, sans l'affirmer en toutes lettres, le principe d'une pêche côtière
exclusive, et avait cédé les îles de Saint-Pierre et de Miquelon sans aucune condition. Mais pour les Anglais, il importait que la pêche côtière
exclusive ne soit pas reconnue formellement, tandis que le texte imposait comme condition que les îles de Saint-Pierre et de Miquelon ne
pourraient jamais constituer une menace pour les intérêts britanniques. Au cours du siècle qui allait suivre, les traités entre la France et la
Grande-Bretagne suscitèrent de nombreux conflits entre les gouvernements de France, du Royaume-Uni et de Terre-Neuve.

À partir de 1892, l'île aux Marins (alors «île aux Chiens» jusqu'en 1931) fut érigée en municipalité et disposa d'une mairie, d'une église, d'un
phare, d'écoles primaires, de lavoirs, de séchoirs, de monument aux morts, etc. On y dénombrait une population d'environ 700 habitants et de
quelque 150 bâtiments.

En 1904, la France finit par perdre ses droits d'employer les rivages de la côte ouest de Terre-Neuve, le French Shore, en vertu d'une «entente
cordiale», qui permettait à la France de conserver seulement le droit de pêcher dans les eaux terre-neuviennes, situées entre le cap St John et le
cap Ray. Autrement dit, les pêcheurs français conservaient le droit de pêcher concurremment entre les mêmes limites, mais n'étaient plus
autorisés à accoster ou à utiliser la côte. Voici les articles 1 et 2 de la Convention anglo-française sur la pêche à Terre-Neuve de 1904:
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Article 1er

La France renonce aux privilèges à elle consentis en vertu de l'article 13 du traité d'Utrecht, tels que confirmés et modifiés par les dispositions ultérieures.

Article 2

La France conserve pour ses ressortissants, sur un pied d'égalité avec les sujets britanniques, le droit de pêcher dans les eaux territoriales de la partie de la
côte de Terre-Neuve située entre le cap St. John et le cap Ray […], ce droit devant être exercé durant la saison de pêche habituelle […].

En réalité, cette «entente cordiale» du 8 avril 1904 limitait les droits de pêche des Français aux Grands Bancs et dans les eaux territoriales de
Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette entente allait rester en vigueur jusqu'en 1972.

La décennie de 1930 avait entraîné le déclin de l'île aux Marins et la disparition de la municipalité. La population de l'île émigra progressivement
vers l'île Saint-Pierre, mais la dernière école ne ferma qu'en 1963; le dernier habitant quitta l'île aux Marins en 1965.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le Canada voisin prépara, avec l'accord des États-Unis, un projet de débarquement pour prendre
possession des îles de Saint-Pierre-et-Miquelon. Certains croyaient que des émissions radiophoniques pro-Vichy aidaient les U-Boot allemands
présents sur les bancs de Terre-Neuve. Toutefois, la grande prudence du premier ministre canadien, William Lyon Mackenzie King (1935-1948),
ne permit pas de mettre ces plans à exécution.

En 1941, Charles de Gaulle demanda à l'amiral Émile Muselier de libérer Saint-Pierre-et-


Miquelon à l'insu des autorités canadiennes et au grand scandale des États-Unis, ce qui suscita
la méfiance de Franklin Roosevelt à l'égard du général de Gaulle. Le 20 juillet 1967, Charles de
Gaulle, alors président de la République française, exprima sa reconnaissance aux insulaires en
faisant escale, sur le croiseur Le Colbert, à Saint-Pierre, avant de poursuivre son voyage vers
Québec (le 23 juillet) et Montréal (le lendemain) où il prononcera son célèbre «Vive le Québec
libre».

Seize ans plus (1982), tard, François Mitterrand deviendra le second président de la République
à visiter l'archipel. Le 7 septembre 1999, ce fut le tour de Jacques Chirac de se rendre à Saint-
Pierre-et-Miquelon en tant que président de la République, puis François Hollande en 2014.

Les habitants de Saint-Pierre, en grande partie, ont aujourd'hui délaissé la pêche; c'est maintenant la fonction publique qui occupe la plupart des
Saint-Pierrais. Sur une population de quelque 6000 habitants, près de 60 % des gens travaillent d'une façon ou de l'autre pour la fonction
publique. Les fonctionnaires français qui acceptent de quitter la France pour venir travailler dans l'archipel voient leur salaire majoré de 70 % pour
la durée de leur contrat.

3.4 Un département français d’outre-mer

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En 1976, l’archipel obtint le statut de département français d’outre-mer. Par la loi du


17 juillet 1976, Saint-Pierre-et-Miquelon passa du statut territorial fixé par le décret
d'octobre 1946 et par la loi-cadre dite Gaston Deferre de 1956-1957, à celui de
département d'outre-mer. Conçu comme une «promotion» symbolique et comme une
affirmation vis-à-vis du Canada, ce nouveau statut fut mal accueilli dans l’archipel,
notamment parce que l’instauration d’une sorte de «cordon douanier européen»
perturba l'économie locale qui ne pouvait plus fonctionner librement avec l’Amérique
du Nord, et contribua ainsi à augmenter le coût de la vie. La Métropole permit
certaines dérogations en ce qui a trait aux échanges commerciaux avec l'Amérique
(Canada et États-Unis), mais il aurait fallu tellement de concessions que la
départementalisation s’avéra un échec.

À partir de 1977, un long conflit opposa le Canada et la France au sujet des 200 milles
marins que réclamaient les deux pays autour de leurs côtes. Le tout se termina le 10
juin 1992 lorsque, dans un jugement sans appel (sentence arbitrale), la Cour
internationale de justice de La Haye accorda à Saint-Pierre-et-Miquelon un couloir de
12 milles marins de largeur et de 200 milles marins de longueur orienté en direction
nord-sud (voir la carte). Enfin, en 1985, Saint-Pierre-et-Miquelon obtint le statut de
collectivité territoriale de la République française.

4 La collectivité d'outre-mer
En France, les lois dites de décentralisation (loi du 2 mars 1982) ont instauré une nouvelle répartition des compétences entre l’État et
l’organisation territoriale. Cette «organisation territoriale» repose principalement sur trois niveaux d'administration: la commune, le département et
la région. Sur le plan juridique, une collectivité territoriale est une personne morale de droit public (avec une dénomination, un territoire, un
budget, du personnel, etc.), disposant de compétences propres et d'une certaine autonomie par rapport au pouvoir central. Autrement dit,
commune, département et région disposent d'une liberté d'administration dans le cadre des lois de la République qui délègue des pouvoirs de
décision à des élus afin qu'ils administrent eux-mêmes les communes, le département ou la région. Quant aux collectivités territoriales, elles
disposent d’une plus large autonomie de décision, notamment les collectivités territoriales à statut particulier comme Paris, Marseille, Lyon, mais
aussi l’île de Corse, l’île Mayotte et l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Dans ce dernier cas, c’est la loi du 11 juin 1985 qui érigea Saint-Pierre-et-Miquelon au statut de collectivité territoriale de la République française.
Le gouvernement français légalisa officiellement l'autonomie fiscale et douanière, et élargit encore certaines compétences. Depuis, l'archipel est
doté d'un Conseil général de 19 membres élus: Miquelon-Langlade élit quatre conseillers et Saint-Pierre, quinze. Le Conseil général, qui est
assisté d'un comité économique et social, a des compétences propres en matière fiscale et douanière ainsi qu’en matière d'urbanisme et de
logement.
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En 2003, Saint-Pierre-et-Miquelon devint une collectivité d'outre-mer. Les collectivités d’outre-mer (COM) sont une création de la révision
constitutionnelle du 28 mars 2003. Régies par l’article 74 de la Constitution, elles sont destinées à remplacer les anciens territoires d’outre-mer
(TOM). Celle de Saint-Pierre-et-Miquelon compte deux municipalités : Saint-Pierre et Miquelon-Langlade. L'archipel est représenté par un député,
un sénateur et un conseiller au Conseil économique et social; le préfet réside à Saint-Pierre. Quant à l'administration judiciaire, elle comprend un
tribunal supérieur d'appel, un tribunal de première instance et un conseil de contentieux administratif.

5 Une politique linguistique de non-intervention


L’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon est à la fois un département français et une collectivité territoriale à statut particulier. Par rapport à la
France, seules certaines adaptations ont été prévues par la loi du 11 juin 1985. Cependant, celles-ci ne concernent pas la langue puisque les
habitants de l’archipel parlent le français. Cela étant dit, Saint-Pierre-et-Miquelon fait partie de la France et la politique linguistique qui y est
appliquée tient compte de cette réalité juridique incontournable. En vertu de l’article 2 de la Constitution, le français demeure la langue officielle
de Saint-Pierre-et-Miquelon: «La langue de la République est le français.» Dans les faits, c’est la politique du laisser-faire que l’on pratique dans
l’archipel puisque aucune intervention n’est nécessaire.

5.1 L'administration

Toute l'administration locale fonctionne uniquement en français. Les tribunaux ne procèdent également qu’en français. Il en est de même pour le
Conseil général, le Comité économique et social, la gendarmerie nationale, les commerces, les loisirs, la radiotélévision, etc. Le Centre
hospitalier François-Dunan de Saint-Pierre ne pouvant couvrir tous les besoins et les spécialités, un accord a été conclu entre la Caisse de
prévoyance sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon et des hôpitaux canadiens, celui de St-John’s (Terre-Neuve et Labrador) recevant le plus de
patients de l'archipel; les services ne sont pas toujours en français.

5.2 L'éducation

L'enseignement à Saint-Pierre-et-Miquelon est le même qu'en France (métropole) et suit un calendrier identique. D’après les données du
Secrétariat d’État à l’outre-mer du gouvernement français, les effectifs s'élèveraient à 1506 élèves et recevaient un enseignement exclusivement
français, sauf pour les cours de langues étrangères (anglais). Les établissements publics de l'archipel se composent de quatre écoles primaires,
d'un collège avec une annexe à Miquelon, d'un lycée d'État et d'un lycée professionnel à Saint-Pierre. L'enseignement privé, sous contrat
d'association avec l'État, compte quatre écoles primaires et un collège avec une section technique. En 2016, on comptait quelque 1300 élèves
scolarisés.

Pour les études supérieures, les jeunes se rendent en France; il existe un système de bourses financé par le Conseil général. L'anglais est très
courant, et est généralement parlé comme langue seconde par la majorité de la population : il est très utile pour le secteur du tourisme, car
l'archipel reçoit de nombreux touristes anglophones américains et canadiens. De plus, les Saint-Pierrais ont besoin de l'anglais pour effectuer
leurs liaisons aériennes et Saint-Pierre et St John's, puis Paris.

Il faut ajouter également une loi adoptée par l’Assemblée nationale française: la Loi d'orientation pour l'outre-mer (ou loi 2000-1207 du 13
décembre 2000) entrée en vigueur le 14 décembre 2000. Ce sont les articles 33 et 34 de cette loi qui concernent tous les DOM-TOM. À l’article
33, on apprend que «l’État et les collectivités locales encouragent le respect, la protection et le maintien des connaissances, innovations et
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pratiques des communautés autochtones et locales fondées sur leurs modes de vie traditionnels et qui contribuent à la conservation du milieu
naturel et l'usage durable de la diversité biologique» et qu’à l’article 34 que «les langues régionales en usage dans les départements d'outre-mer
font partie du patrimoine linguistique de la Nation» et qu’elles «bénéficient du renforcement des politiques en faveur des langues régionales afin
d'en faciliter l'usage». D’après la Loi d’orientation d’outre-mer, la loi n° 51-46 du 11 janvier 1951 relative à l'enseignement des langues et dialectes
locaux leur est applicable.

5.3 Les médias

Pour ce qui est des médias, ils fonctionnent en français. Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficie de cinq stations
de radio en français, toutes sur la bande FM (les dernières stations en onde moyenne ont été converties en
FM en 2004). Pour la télévision, il existe une chaîne locale: Saint-Pierre et Miquelon 1re. Les chaînes
françaises sont aussi accessibles: France 2, France 3, France 4, France 5, France 24 et Arte.

Le fournisseur local de télécommunications (SPM Telecom) diffuse plusieurs stations de télévision nord-
américaines sur son réseau de chaînes câblées.

En ce qui a trait aux territoires d'outre-mer (DOM-TOM), le Cahier des missions et des charges de Réseau-France outre-mer (RFO) fait aussi
allusion «à la promotion et à l'illustration de la langue française». Voici ce qu'énonce l'article 7 du décret no 93-535 du 27 mars 1993 portant
approbation du cahier des missions et des charges de la Société nationale de programme Réseau France Outre-mer (JO-28/03/93-p.5146):

Article 7

La société contribue à la promotion et à l'illustration de la langue française dans le respect des recommandations du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Elle
veille à la qualité du langage employé dans ses programmes.

5.4 L'affichage

L'affichage commercial est exclusivement français. En fait, c’est «la France en terre d’Amérique», comme le dit la publicité. Même les édifices de
l’administration publique ont conservé une architecture d’allure métropolitaine. Bien sûr, les Saint-Pierrais peuvent parler en anglais aux touristes,
mais leur insularité et leur statut de collectivité territoriale française les mettent à l’abri de toute assimilation et de toute insécurité linguistique

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On comprendra que les lois linguistiques françaises s’avèrent peu utiles dans cet archipel en raison de l’homogénéité linguistique des habitants et
de leur insularité. L'archipel ne dispose pas pour des raisons économiques de liaison directe régulière, ni maritime, ni aérienne avec la métropole
distante de 4000 km, et ce, malgré une nouvelle piste de 1800 mètre pouvant recevoir des gros transporteurs. Néanmoins, les compagnies Air
Saint-Pierre et ASL Airlines France se sont associées pour assurer la desserte de Saint-Pierre-et-Miquelon, au départ de Paris-CDG durant l’été,
du 19 juin au 4 septembre. La commercialisation des vols est assurée par Air Saint-Pierre.

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Il est tout de même insolite qu'il n'existe presque pas de liens touristiques entre l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon et le Québec francophone.
Il est certes possible de prendre un vol à partir de Montréal à titre strictement individuel, mais le tarif est encore plus élevé que celui de Montréal-
Paris aller-retour. Les vols directs entre le Canada et l'archipel ne sont possibles que pour Montréal, Halifax et Sydney (Nouvelle-Écosse),
Moncton (Nouveau-Brunswick) et St. John's (Terre-Neuve). Le nombre total annuel de passagers est d'environ 26 000, dont près de 10 000 pour
la seule liaison Saint-Pierre/Saint-Jean de Terre-Neuve, parce que cette ville sert de «centre urbain» pour les habitants de l'archipel.

Dernière mise à jour: 13 oct. 2023

Bibliographie
BONIN, Henriette. Saint-Pierre-et-Miquelon, Montréal, Éditions Leméac, 1970, 127 p.

LANDRY, Nicolas. Plaisance - Terre-Neuve 1650-1713, Québec, Les Éditions du


Septentrion, 2008, 406 p.

LEHUENEN, Joseph. Le rôle des pêcheurs morutiers basques, bretons et normands


dans la découverte de l'Amérique du Nord, du XVIe à la fin du XVIIIe siècle, Congrès de
Rome, 8 octobre 1981,
[http://209.205.50.254/encyspmweb/musee/lehuenen.html].

POIRIER, Michel. Les Acadiens aux îles Saint-Pierre-et-Miquelon, 1758-1828, trois


déportations, trente années d'exil, Moncton, Éditions d'Acadie, 1984, 523 p.

POULET, Georges. Histoire: Saint-Pierre-et-Miquelon, Paris, Académie des sciences


d'outre-mer,
[http://209.205.50.254/encyspmweb/gp/].

France (État) DOM-TOM Amérique du Nord

La colonie française de Plaisance (1650-1713)

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Bibliographie portant sur la Nouvelle-France

Histoire de l'Acadie

Accueil: aménagement
linguistique dans le monde

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