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PREFACE

La nécessité de réformer le système fiscal de la Côte d’Ivoire s’est imposée aux différents
Premiers Ministres qui se sont succédés à la tête du gouvernement depuis 2013, eu égard au
poids des défis à relever tant au plan du renforcement du rendement fiscal qu’à celui de la
recherche de la compétitivité de l’économie ivoirienne.
Prenant en compte les résultats des réflexions et des travaux organisés successivement sous
l’égide de Monsieur Kablan Duncan et de feu Gon Coulibaly, et tenant compte des évolutions
récentes, le Premier Ministre Patrick ACHI a mis en place, par arrêté, le Cadre d’Élaboration des
Réformes Fiscales dont les travaux sont placés sous sa responsabilité directe.
L’objectif assigné à ce Cadre par Monsieur le Premier Ministre le 4 juillet 2022, à l’occasion de
l’installation du Comité Scientifique, est d’élaborer un projet de réformes fiscales
ambitieuses, se traduisant par des mesures d’optimisation du rendement du système fiscal,
de renforcement de la compétitivité et de l’attractivité de l’économie ivoirienne.
Les travaux du Comité Scientifique ont effectivement débuté le 15 juillet 2022 et se sont
achevés le 14 octobre 2022.
L’engouement et le sérieux qu’ont connu les travaux ont montré que le Chef du
Gouvernement, en prenant cette initiative, venait combler une forte attente.
À l’heure de la production de ce rapport, je voudrais saluer la très bonne qualité de la
collaboration qui a régné lors des travaux. Les Structures techniques d’appui ont été constantes
tout au long de ces trois mois de travaux, en termes de disponibilité, d’écoute et de production
d’inputs pour l’élaboration du rapport.
Ces travaux se sont déroulés dans un esprit de dialogue constructif et sans langue de bois et
l’ensemble des mesures proposées ont emporté l’adhésion de tous, tant en ce qui concerne
les mesures de gouvernance que celles relatives à l’amélioration de l’environnement fiscal de
l’activité économique. Cette disponibilité et la flexibilité, qui allaient parfois au-delà des règles
qui encadrent la gestion administrative, ont fortement contribué à la qualité de ce rapport.
Il convient d’exprimer toute ma reconnaissance à Monsieur le Premier Ministre, Son Excellence,
Monsieur Patrick ACHI pour l’honneur qu’il m’a fait en portant son choix sur ma modeste
personne, pour présider les travaux du Comité scientifique de cet important cadre.
J’associe, tout naturellement, à ces remerciements, le Secteur privé à travers la
Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire et son Président, Monsieur Jean Marie
ACHAH, pour l’appui inestimable qu’ils ont apporté à l’organisation et au bon déroulement de
nos travaux.
Je tiens à exprimer ma sincère gratitude au Directeur de Cabinet du Premier Ministre pour
l’appui et les initiatives entreprises pour le bon déroulement des travaux.
Je souhaite que ce rapport suive un cheminement qui aboutisse au Conseil des Ministres, afin
que les mesures proposées, malgré leur coût budgétaire à court terme, engagent l’ensemble
des membres du Gouvernement et aient des chances d’être appliquées.
Le comité scientifique n’ayant pas été en mesure d’effectuer le chiffrage du coût budgétaire
des reformes proposées, il conviendrait de confier ce chiffrage aux services spécialisés du
Ministère du Budget et du Portefeuille de l’Etat ou à un Cabinet privé.

2
Puissent ces mesures rythmer la marche de la Côte d’Ivoire vers l’atteinte de la vision d’une
Côte d’Ivoire Solidaire, que le Chef de l’Etat a fixée comme Objectif de son Programme du
Gouvernement.

KESSE Feh Lambert,


Conseiller spécial du Premier Ministre,
Président du Comité scientifique du Cadre d’Élaboration des Réformes Fiscales

3
SOMMAIRE

Acronymes et abréviations………………………………………………………………………………………………………… 5

Introduction………………………………………………………………………………………………………………………………. 6

I- Mesures de renforcement du rendement du système fiscal………………………………………….. 10

II- Mesures d’amélioration de la compétitivité de l’économie ivoirienne…………………………… 21

III- Mesures spécifiques en faveur des Ports autonomes…………………….………………………………. 29

IV- Mesures techniques………………………………………………………………………………………………………. 30

V- Mesures de privilèges fiscaux…………………………………………………………………………………......... 32

VI- Mesures institutionnelles……………………………………………………………………………………….......... 39

VII- La gestion des coûts attendus…………………………….……………………………………………………..….. 42

VIII-Annexe .…………………………………………………………………………………………………………………………. 44

4
ACRONYMES ET ABREVIATIONS

ATAF : Forum sur l’Administration fiscale africaine


BCEAO : Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest
CAF : Coût Assurance Fret
CEPICI : Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire
CGECI : Confédération générale des Entreprises de Côte d’Ivoire
CMU : Couverture Maladie Universelle
CNPS : Caisse nationale de Prévoyance sociale
EME : Entreprise de monnaies électroniques
GAFAM: Google, Apple, Facebook, Amazone, Microsoft
MAC : Convention multilatérale relative à l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale
OCDE : Organisation de Coopération et de Développement économiques
PME : Petites et moyennes Entreprises
TIC : Technologies de l’Information et de la Communication
TOB : Taxe sur les opérations bancaires
TVA : Taxe sur la valeur ajoutée
UEMOA : Union économique et monétaire Ouest Africaine

5
INTRODUCTION

Son Excellence Monsieur Alassane OUATTARA, Président de la République a engagé depuis


2011, un vaste programme de réformes touchant à tous les domaines de la vie de la nation.
La nécessité d’entreprendre une réforme profonde du système fiscal ivoirien s’inscrit dans ce
cadre avec une problématique articulée autour de deux défis :
- la recherche de l’efficacité du système fiscal : en effet, le taux de pression fiscale qui
rend compte du degré d’efficacité d’un système fiscal, s’établit, pour notre pays à
13%, largement en deçà des normes internationales, notamment du niveau de 20%
recommandé par l’UEMOA ;
- l’attractivité et de la compétitivité de l’économie ivoirienne : le taux d’imposition total,
qui mesure le pourcentage du bénéfice commercial qu’une entreprise consacre au
paiement de ses impôts et taxes, s’élevait à 48,3% en Côte d’Ivoire en 2019. Ce taux
particulièrement élevé est de 36,5% pour les pays à économie performante d’Asie
Pacifique, de 31,6% pour l’Asie Centrale et l’Europe de l’Est. Quant aux moyennes
africaine et mondiale, elles se situent respectivement à 47,0% et 40,1%. Ce niveau élevé
du taux d’imposition total met en évidence le caractère à la fois pesant et peu attrayant
du système fiscal ivoirien, qui fait supporter l’essentiel de la charge fiscale par les
entreprises du secteur formel.
Face à ce constat, le Gouvernement a fait le choix de rebâtir le système fiscal ivoirien en vue
d’améliorer l’attractivité de la Côte d’Ivoire en matière d’investissements et de renforcer la
compétitivité de son économie.
A cet effet, plusieurs initiatives ont été entreprises en matière de réformes fiscales.

1- Initiatives du Gouvernement en matière de réformes fiscales


La volonté de réformer le système fiscal ivoirien apparaît comme une constante dans les
préoccupations du Gouvernement depuis 2014.
1°- Création de la Commission de Réforme Fiscale
Le 5 septembre 2014, le Premier Ministre Daniel Kablan DUNCAN a créé, par arrêté, la
Commission de Réforme Fiscale. Cette Commission, à composition diversifiée, comprenait
notamment des représentants des Ministères à missions économiques et ceux du secteur
privé à travers ses principales faitières et de la société civile.
Elle avait pour mission de proposer au Gouvernement, tant en matière de fiscalité de porte que
de fiscalité intérieure, des mesures visant à :
- renforcer l’efficacité et le rendement du système fiscal ivoirien ;
- améliorer l’environnement fiscal des affaires pour répondre aux besoins de
compétitivité de l’économie ;
- mettre en place une fiscalité locale performante.
En exécution de sa mission, la Commission a procédé à des revues documentaires et effectué
des benchmarks afin de s'inspirer des bonnes pratiques fiscales à travers le monde.

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A la fin de ses travaux, elle a produit un Rapport contenant plus de 70 mesures, répondant
aux principales préoccupations exprimées par l'ensemble des acteurs du système fiscal,
notamment le Gouvernement, les Administrations publiques, le secteur privé et la société civile.
Toutefois, ce rapport n’a pu être examiné par le Conseil des Ministres afin de partager les
mesures préconisées avec l’ensemble des membres du Gouvernement et de faciliter sa mise en
œuvre.

2°- Comité de Suivi des Réformes Fiscales


Le 13 février 2018, le Premier Ministre feu Amadou Gon COULIBALY, reprenant ce dossier, a mis
en place, par arrêté, le Comité de Suivi des Réformes Fiscales. Placé sous la présidence du
Ministre en charge du Budget, ce Comité, composé de représentants de l’Etat et du secteur
privé, avait pour objet :
- de réexaminer les mesures contenues dans le Rapport de la Commission de Réforme
fiscale de 2014 ;
- d’adapter certaines de ces mesures aux évolutions économiques récentes ainsi qu’au
progrès des Administrations fiscales ;
- d’établir un chronogramme d’exécution s’étalant sur plusieurs années, dans l’esprit de
la prévisibilité souhaitée par le secteur privé.
Les travaux de ce Comité n’ont pas produit de résultats notables.

3°- Groupe de travail « compétitivité du système fiscal et douanier »


Un groupe de travail dédié aux réformes fiscales et douanières a été mis en place par le
Premier Ministre Jérôme Patrick ACHI au lendemain du séminaire gouvernemental, tenu du
21 au 23 avril 2021 au Palais Présidentiel. Le secteur privé, qui a pris part à ce séminaire, a
exposé un ensemble de préoccupations qui recoupent, pour l’essentiel, les recommandations
issues des travaux de la Commission de Réforme Fiscale de 2014.
Les résultats des travaux de ce Groupe de travail lui ont été présentés le 4 novembre 2021. Il
a instruit l’ensemble des parties prenantes, notamment son Cabinet, le Ministère en charge
du Budget et le secteur privé, à l’effet de procéder à un réexamen des mesures de la
Commission de Réforme Fiscale de 2014 et d’établir un programme pour sa mise en œuvre
avant la fin du 1er semestre 2022.

4°- Cadre d’Élaboration des Réformes Fiscales


Donnant suite à ses instructions du 4 novembre 2021, Monsieur le Premier Ministre Patrick
ACHI a créé, par l’arrêté n°0258/PM/CAB du 24 février 2022, le Cadre d’Elaboration des
Réformes Fiscales dont les travaux sont placés sous sa responsabilité directe.
Il comprend trois (3) organes hiérarchiquement ordonnés qui sont :
- le Comité d’Orientation : il est présidé par le Premier Ministre lui-même et est
composé des Ministres en charge du Budget, de l’Economie et des Finances, du Plan

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et du Développement, du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion des PME, ainsi
que du Directeur de Cabinet du Premier Ministre. Il est également chargé de définir
les grandes orientations et les objectifs des réformes à élaborer, de fixer le périmètre
et le contenu de celles-ci. In fine, le Comité d’Orientation valide les propositions issues
des travaux du Comité Scientifique et du Comité Technique ;
- le Comité Technique : il a en charge l’examen des réformes proposées par le Comité
Scientifique et de les soumettre à la validation du Comité d’Orientation. Il est également
chargé d’organiser des échanges avec les partenaires techniques et financiers. Il est
présidé par le Directeur de Cabinet du Premier Ministre et comprend les conseillers
sectoriels du Premier Ministre ;
- le Comité Scientifique : il a pour mission de revisiter le Rapport de la Commission de
Réforme Fiscale de 2014, de recueillir les besoins des Ministères techniques et ceux
du secteur privé, de les examiner, de les traduire en propositions de réformes et de
les soumettre au Comité Technique. Placé sous la présidence du Conseiller spécial du
Premier Ministre en charge des réformes fiscales, il comprend les représentants des
Ministères à missions économiques et financières, du secteur privé et des Chambres
consulaires. Cette composition mixte a été retenue pour respecter la tradition de
dialogue qui existe entre l’Etat et le secteur privé.

2- Objectif de la réforme et méthodologie de travail

1°- Objectif de la réforme


L’objectif assigné au Cadre d’Élaboration des Réformes Fiscales par le Premier Ministre à
l’occasion de l’installation du Comité Scientifique le 4 juillet 2022, est d’élaborer un projet de
réformes fiscales ambitieux, se traduisant par des mesures d’optimisation du rendement du
système fiscal, de renforcement de la compétitivité et de l’attractivité de l’économie ivoirienne.
Ces orientations s’articulent autour des axes suivants :
- le renforcement du rendement du système fiscal par l’élargissement de l’assiette et la
lutte contre la fraude fiscale et douanière ;
- l’allègement du poids de l’impôt en vue de rendre attractive la destination Côte
d’Ivoire en matière d’investissements ;
- la simplification des procédures, notamment par la généralisation de la digitalisation
afin de mettre le système fiscal à la portée de tous les contribuables ;
- l’amélioration de la gouvernance fiscale.
Ces grandes orientations ont été traduites en thèmes généraux, sectoriels, techniques,
spécifiques et institutionnels.

2°- Méthodologie de travail


Pour l’examen des différents thèmes, le Comité Scientifique a adopté une méthodologie de
travail participative. Celle-ci a consisté en :

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- l’organisation d’exposés et de conférences animés par des experts et des personnes-
ressources issus de l’Administration publique et du secteur privé ;
- la présentation, par un consultant, des résultats des revues documentaires, à la
recherche de bonnes pratiques fiscales à travers le monde ;
- l’exposé des propositions de réformes issues du Rapport de la Commission de
Réforme fiscale de 2014 dénommé "Réformer le système fiscal et douanier pour
soutenir le développement de la Côte d’Ivoire" ;
- l’organisation des débats et l’élaboration des propositions de réformes.
Deux importants exposés ont été faits en prélude aux travaux du Comité scientifique. Il s’agit de
:
- la « Vision Côte d’Ivoire 2030 » par le Directeur adjoint de cabinet du Premier Ministre
en charge du secteur privé qui retrace les grandes orientations du Gouvernement en
matière économique et qui met le secteur privé au cœur du développement national ;
- la « Côte d’Ivoire 2040 : le défi du meilleur » par le Directeur exécutif de la
Confédération générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI) qui expose les
principales préoccupations du secteur privé en vue de la transformation structurelle
de l’économie nationale.
Le présent Rapport qui a sanctionné les travaux du Comité Scientifique, intitulé « Pour une
fiscalité douce et efficace » s’appuie sur :
- les propositions du Rapport de la Commission de Réforme fiscale de 2014 dont les
principales mesures n’ont pu être mises en œuvre ;
- les recommandations et suggestions tirées des communications et des débats ;
- les enseignements relevés dans les revues documentaires.
S’il ne peut être nié que des efforts considérables ont été faits depuis 2011 en vue
d’améliorer le système fiscal ivoirien, il n’en demeure pas moins qu’il existe encore des
marges de manœuvre pour optimiser ce système fiscal.

9
I- Mesures de renforcement du rendement du système fiscal

Le potentiel fiscal de la Côte d’Ivoire, malgré d’importants progrès réalisés ces dernières années,
est érodé par la fraude sous toutes ses formes, tant au plan national qu’international et par le
développement incontrôlé du secteur informel qui représente environ 49 % du PIB, selon
l’Institut National de la Statistique.
Les mesures proposées ont pour but d’améliorer le rendement du système fiscal à travers la
lutte contre la fraude, la réduction du secteur informel et l’imposition de certaines niches
fiscales.

A- Mesures de lutte contre l’évasion et la fraude fiscales


Ces mesures visent la formalisation et l’encadrement du secteur informel, la poursuite de la
rationalisation des exonérations fiscales et la lutte contre la fraude fiscale internationale.

1- Les mesures pour la formalisation et l’encadrement du secteur informel


L’expansion du secteur informel, refuge des produits de la fraude fiscale et de la contrebande,
a pour effet de faire transférer, sur le secteur formel, l’essentiel du poids des prélèvements
professionnels.
En effet, selon les statistiques de la Direction Générale des Impôts, sur 2 849,3 milliards de
francs de recettes fiscales réalisées en 2021, la part de recettes produites par les grandes
entreprises est de 1 935,6 milliards de francs, soit 67,9 %1.
Ce déséquilibre de la charge fiscale, néfaste à l’équité fiscale et à la saine concurrence entre
tous les opérateurs économiques, doit être corrigé. Les mesures ci-après proposées peuvent y
contribuer.

1-1- Au titre de la fiscalité intérieure


1°-L’adoption d’une loi interdisant les ventes dans les rues, aux carrefours et aux
abords des marchés
A ce jour, il n’y a aucun texte interdisant les ventes dans les rues, aux carrefours et aux abords
des marchés. Ce vide juridique doit être comblé afin que les rues et les carrefours cessent d’être
les déversoirs des marchandises issues de la fraude et de la contrebande. Il convient donc de
prendre une loi interdisant formellement l’exercice du commerce dans ces lieux.

2°-L’obligation pour les collectivités locales d’aménager des espaces dédiés aux
activités commerciales
Cette mesure vise à favoriser la sédentarisation des petits opérateurs économiques du
secteur dit informel et à faciliter leur immatriculation dans les fichiers de l’Administration

1
Source : Direction Générale des Impôts.

10
fiscale. Des programmes d’investissements doivent être conçus dans ce sens par les autorités
locales et soumis au Gouvernement.

3°-L’utilisation massive des technologies de l’information et de la communication


(TIC) dans la gestion des Impôts et des Douanes
Des avancées notables ont été accomplies en matière d’utilisation des TIC dans la gestion des
Impôts et des Douanes, notamment en matière de recouvrement.
Ces efforts doivent se poursuivre par la mise en place de nouvelles applications afin de
parvenir, à moyen terme, à la digitalisation des opérations fiscales et douanières.
Dans ce sens, les mesures ci-après sont proposées :
- la mise en œuvre effective de la facture électronique, notamment dans le commerce
de détail ;
- la gestion digitalisée des opérations d’assiette, des procédures fiscales et douanières ;
- la création d’une plateforme unique de toutes les Administrations publiques,
notamment celles impliquées dans les activités économiques et financières en vue de
parvenir à l’interopérabilité de toutes les bases de données ;
- l’interopérabilité entre les systèmes et les plateformes des Administrations fiscale et
douanière et les plateformes et systèmes des opérateurs économiques, des
entreprises et des organisations professionnelles impliquées dans la transmission
d’informations financières et comptables ;
- l’institution d’une obligation de création de registres numériques des salariés et de
fichiers des informations économiques et commerciales détenues par les entreprises
et leur transmission par voie électronique aux Administrations fiscale et douanière ;
- l’utilisation de tous les moyens de communication digitale pour sensibiliser les
populations à l’exécution volontaire des obligations fiscales.

4°-L’immatriculation fiscale de tous les opérateurs économiques


Il est recommandé les mesures ci-après :
- rendre effective l’obligation d’immatriculation fiscale de tous les opérateurs
économiques quels que soient leur taille et leur secteur d’activités.
Sont visés notamment, les opérateurs du secteur informel et les opérateurs déjà
immatriculés par les services des collectivités territoriales. Ces derniers doivent passer
de l’immatriculation locale, c’est-à-dire celle effectuée par les services des mairies, à
l’immatriculation nationale auprès des services de l’Administration fiscale. Ces
opérations d’immatriculation, sauf cas de fraude avérée, ne devraient pas avoir, dans un
premier temps de conséquence sur les régimes d’imposition d’origine des opérateurs
concernés, afin de les revêtir d’un caractère incitatif et de leur donner des chances de
succès.
Le Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI) qui héberge le
Guichet unique des formalités d’entreprises, chargé entre autres de l’immatriculation

11
fiscale, doit mettre en place des solutions techniques et pratiques appropriées, en
collaboration avec les collectivités locales, les tribunaux et l’Administration fiscale,
pour une prise en compte accélérée des données de ces immatriculations massives. Il
doit également fédérer toutes les initiatives qui sont prises ou envisagées en cette
matière, par les différents ministères techniques ;
- mettre en place des dispositifs incitatifs afin d’obtenir l’adhésion des petites
entreprises à ces programmes d’identification fiscale. Dans ce sens et afin d’inciter au
paiement des impôts et de contribuer à l’amélioration du civisme fiscal, il est proposé
de coupler les procédures fiscales avec celles appliquées en matière de cotisations
sociales ;
- rejeter dans les transactions commerciales et les déclarations fiscales, les factures
émanant d’entreprises non immatriculées au fichier de l’Administration fiscale.

5°-Le renforcement de la qualité et de la fiabilité de la documentation fiscale


La qualité des documents fournis à l’Administration fiscale et leur fiabilité constituent un gage
de la sincérité des déclarations fiscales. A cet effet, il est recommandé :
- de rendre obligatoire la tenue de la comptabilité informatisée attestée par les
professionnels du chiffre inscrits au tableau de l’Ordre des Experts-Comptables ;
- de ne conférer foi qu’aux seuls états financiers détenus par le Guichet unique de
dépôt des états financiers créé à cet effet à la Direction Générale des Impôts.

1-2- Au titre de la fiscalité de porte


Le Comité fait les propositions ci-après en matière de lutte contre la fraude douanière :
- engager une coopération effective entre les Douanes ivoiriennes et celles des
principaux pays qui exportent vers la Côte d’Ivoire. Cette coopération doit inclure
l’échange électronique de données entre les Administrations douanières de sorte
à disposer, en temps réel, des informations relatives aux marchandises expédiées
vers notre pays, et en particulier, sur leurs bases taxables ;
- instituer, en matière de groupage terrestre des marchandises, à la charge des
opérateurs concernés, l’obligation de produire la liste détaillée de colisage par
propriétaire, par nature et quantité des marchandises, ainsi que l’obligation de
requérir de chacun des membres du groupage, un numéro d’immatriculation
fiscale en vue de l’accomplissement par ces derniers, des formalités de
dédouanement ;
- renforcer les capacités opérationnelles de l’Administration des Douanes, en la
dotant de moyens techniques modernes conséquents : les scanners de haute
précision, les scanners mobiles, les drones, les navettes, les avions, les matériels
de vidéosurveillance et les brigades cynophiles pour la surveillance des frontières,
le système de géolocalisation et de scellés électroniques des cargaisons pour la
surveillance des marchandises en transit.

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2- La rationalisation des exonérations fiscales et douanières
Les exonérations fiscales et douanières sont devenues, au fil des années, dans le système
fiscal ivoirien, les principaux instruments d’incitation fiscale.
Elles sont contenues dans divers textes particuliers dont les principaux sont, notamment, les
conventions de partenariat public-privé, le Code des Investissements, le Code minier et le
Code pétrolier. Les manques à gagner de ces mesures se sont chiffrés, en 2019 à 381,7 milliards
de francs2 . Le principal prélèvement en cause est la taxe sur la valeur ajoutée.
Le niveau élevé de ces manques à gagner oblige à les encadrer et à les maîtriser. Dans ce
sens, il est proposé :
- de poursuivre la mise en œuvre du plan de rationalisation des exonérations
adopté par le Gouvernement3, tout en préservant l’objectif économique et social qui
a guidé l’instauration de celles-ci ;
- d’instituer des mesures correctives afin de contenir les déviations qu’elles
induisent, notamment, en termes de fraude et d’évasion fiscales. Ainsi, la préférence
doit désormais être donnée à l’utilisation des crédits et réductions d’impôts ou, au
besoin, des subventions budgétaires ;
- d’accompagner les suppressions des exonérations contenues dans le Code général
des Impôts en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), en raison du caractère
sensible de certains produits et services concernés. Cet accompagnement devrait
se traduire entre autres, par l’adoption de taux réduits pour les produits tels que
les engrais, les aliments pour bétail, les farines de céréales et du taux zéro pour les
produits alimentaires d’origine naturelle.
Afin de réduire l’importance de la fraude liée à ces exonérations en la matière qui motive la
demande de leur suppression, il convient de digitaliser leur gestion.

3- Les mesures de lutte contre la fraude fiscale internationale


Les fraudes fiscales à l‘international comportent de graves conséquences. En effet, elles font
transférer les ressources publiques du pays au Trésor des pays étrangers, notamment ceux
hébergeant les maisons-mères des filiales locales. L’Administration fiscale doit donc se doter
de moyens afin de les combattre.
Dans ce sens, les mesures proposées visent à intensifier les échanges de renseignements, le
renforcement de la législation en matière de prix de transfert et l’engager de discussions avec
les pays d’origine des marchandises aux fins de l’institution d’une facture électronique
sécurisée.

3-1- L’utilisation de l’échange de renseignements à des fins fiscales


Il est recommandé à court terme, l’adhésion de la Côte d’Ivoire à la Convention multilatérale
relative à l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, en abrégé « MAC », élaborée

2
Données issues de la présentation du Ministère du Budget et du Portefeuille de l’Etat sur le thème relatif à la
suppression des exonérations et des régimes spéciaux.
3
Communication en Conseil des Ministres enregistrée sous le rôle n° 0000503 du 25 mars 2019.

13
par le Conseil de l’Europe et l’Organisation de Coopération et de Développement
économiques (OCDE) en 1988.
Cette convention institue entre les Etats signataires, l’échange automatique de renseignements
d’ordre fiscal et financier, aux fins de lutter efficacement contre l’érosion des bases imposables.
La Côte d’Ivoire n’a à ce jour, pas encore adhéré à cette convention qui comporte des dispositifs
importants en matière de lutte contre la fraude.
Dans le même sens, la Côte d’Ivoire doit adhérer à l’accord relatif à l’assistance mutuelle en
matière fiscale du Forum sur l’Administration fiscale africaine (ATAF) qui permet l’échange
d’informations fiscales entre les pays africains.

3-2- Le renforcement de la législation fiscale en matière de prix de transfert


Il se développe, sur le plan international, des pratiques frauduleuses liées à la manipulation
des prix de transfert. Ces formes de fraudes impactent négativement le rendement de l’impôt
sur les bénéfices et de l’impôt sur les dividendes dans les pays de source des revenus ou des
matières premières concernées.
Cette situation a conduit le G20 en 2012, à instruire l’OCDE à l’effet de proposer des solutions
pour réformer le régime international d’imposition des sociétés. Cette démarche a donné
naissance à l’initiative sur « l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices » plus
connue sous le nom de BEPS4 (Base Erosion and Profit Shifting).
Il faut préciser que les prix de transfert se définissent, selon l'OCDE, comme « les prix
auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des
services à des entreprises associées ». Il s’agit des prix auxquels les sociétés d'un même
groupe domiciliées dans différents Etats, réalisent des transactions entre elles.
La manipulation des prix de transfert à l’intérieur des groupes de sociétés ou d’entreprises
associées, est devenue une pratique courante fortement combattue à la fois sur le plan
national et sur le plan international.
Pour faire face au risque d’érosion des bases imposables, la communauté fiscale
internationale à travers l’OCDE, s’est accordée sur un principe selon lequel le prix de transfert
doit correspondre au « prix de pleine concurrence ». Selon ce principe, les prix des
transactions pratiquées entre entreprises apparentées doivent être identiques à ceux qui
auraient été fixés pour ces mêmes transactions, si celles-ci avaient eu lieu entre entreprises
indépendantes placées dans les mêmes situations.
Dans le cas où le prix de transfert est inférieur au prix de pleine concurrence, les
Administrations fiscales sont fondées à faire des rappels de droits.
En Côte d’Ivoire, ce principe est consacré dans la législation fiscale. En pratique, les contrôles
effectués par les services des Impôts ont mis en évidence la manipulation des prix de transfert
dans nombre de secteurs d‘activités et notamment dans celui des grands produits agricoles
d’exportation et des mines.

4
https://www.icrict.com/icrict-in-thenews/2019/2/5/prix-de-transfert-comment-les-multinationales-excellent-
dans-lvasion-fiscale.

14
Concernant les métaux, notamment l’or, des avancées ont été enregistrées dans la recherche
de solutions grâce à la détermination d’une valeur de référence sur le marché mondial, au
contraire des grands produits agricoles d’exportation tels que le cacao, le café, l’anacarde, la
banane et le coton. Pour ces produits, la problématique des prix de transfert se pose avec
acuité.
S’agissant du cas particulier du cacao, la détermination des prix de transfert par les sociétés
locales, qui sont pour la plupart des filiales entièrement contrôlées par des maisons-mères à
l’étranger et à qui elles effectuent la totalité de leurs livraisons, est contestée par
l’Administration fiscale.
De cette situation, naissent de façon récurrente, de difficiles contentieux en raison de
l’existence de plusieurs types de prix qui sont :
- le prix CAF de référence fixé par le Conseil du Café Cacao. Ce prix prévoit toutes les
charges supportées localement sur les fèves de cacao, y compris la rémunération des
entreprises exportatrices. Ce prix CAF correspond au prix moyen pondéré des ventes
réalisées par anticipation et des ventes réalisées en cours de campagne ;
- le prix de confirmation de vente ou prix de déblocage pour la concession des droits
d’exportations des fèves de cacao : c’est le prix convenu entre la société exportatrice
locale et le Conseil du Café Cacao ou entre le client à l’étranger et le Conseil du Café Cacao
;
- le prix de contrepartie commerciale qui est le prix effectif de vente des fèves de cacao.
Ce prix est celui qui est effectivement négocié et pratiqué entre la filiale exportatrice et
sa société mère à l’étranger ou le client à l’étranger.
Les exportateurs ivoiriens considèrent le prix CAF, qui est en réalité un prix administratif, comme
étant le prix de pleine concurrence. Cette position est contestée par l’Administration fiscale. En
la matière, il n’y a, malheureusement, aucun repère dans la recherche de solution, ni au plan
de la doctrine administrative, ni au plan de la loi. Il urge donc de combler ce vide juridique afin
de renforcer la contribution de ce secteur aux recettes fiscales qui demeure faible.
En effet, les montants de l’impôt sur les bénéfices et de l’impôt sur le revenu des valeurs
mobilières tirés en 2021 du cacao, principal produit d’exportation de notre pays, s’établissent,
respectivement à 6,7 milliards de francs et de 431,1 millions de francs pour un chiffre
d’affaires global de 2 064,1 milliards de francs. Le bénéfice réalisé par les entreprises du
secteur est de 22,1 milliards de francs, soit 1,07 % du chiffre d’affaires, ce qui apparaît bien
faible5. En termes de comparaison, l’impôt sur les bénéfices du secteur du cacao, principal impôt
sur l’exploitation, représente 0,3 % du chiffre d’affaires contre 5,40 %6 dans les
télécommunications en 2021.
Dans le but d’apporter des réponses à la problématique des prix de transfert dans le secteur du
cacao et de permettre à l’Etat de tirer un meilleur profit de ce grand produit d’exportation, au
plan fiscal le Comité propose, les mesures ci-après :
- pour les fèves, fixer par la loi, le prix de pleine concurrence au niveau du prix de
contrepartie commerciale. Ce prix doit correspondre aux données du London

5
Source : Direction générale des Impôts.
6
Données fournies par l’Union nationale des Entreprises de Télécommunications (UNETEL).

15
International Financial Futures and options Exchange ou LIFFE, précisément au prix
de clôture à la date du contrat de contrepartie en tenant compte du différentiel
d’origine. Le prix de pleine concurrence ainsi déterminé ne doit, en aucun cas, être
inférieur au prix de déblocage ;
- pour les produits transformés, appliquer un coefficient dit ratio de transformation,
au prix de vente du produit concerné sur le marché mondial. Ce coefficient doit
être calculé chaque année à partir des données commerciales recueillies tant sur
le plan local que sur le plan international. En cas de changement notable sur le
marché, ce prix pourra être corrigé en fin d’exercice.
Le Gouvernement ne peut laisser prospérer cette pratique de fraude face à laquelle
l’Administration fiscale se trouve totalement désarmée.
En tout état de cause, et compte tenu de la complexité de la problématique des prix de
transfert, il est très fortement recommandé :
- le renforcement de la règlementation fiscale par l’instauration de la possibilité de
conclure des accords préalables en matière de prix de transfert. Ainsi, le prix de
transfert peut faire l’objet d’accord avec les entreprises, comme le recommande
l’OCDE ;
- le recours systématique par l’Administration fiscale à des experts nationaux et
internationaux. Il y aura un prix à payer et le Gouvernement ne doit pas lésiner sur
les moyens en raison de l’importance des enjeux financiers en cause.

B- Création de nouveaux prélèvements


1- La taxe pour la protection de l’environnement
Pour faire face aux défis environnementaux et de développement durable, le Comité propose
le financement de la protection de l’environnement par la création de taxes, quand cela est
possible. Ainsi, il est proposé :
- la création d’une taxe environnementale sur l’exploitation des ressources
naturelles ;
- le réaménagement de la taxe sur les déchets en plastique pour le financement de
l’assainissement du plan lagunaire, fluvial, maritime et des bassins versants.

2- La taxation de l’économie numérique


Tous les secteurs d’activités, à l’échelle mondiale utilisent les technologies de l’information et
de la communication pour accroître leur productivité, créer de nouveaux débouchés sur les
marchés et réduire leurs coûts d’exploitation. Ce mouvement aboutit à une numérisation de
plus en plus poussée de l’économie. La dématérialisation des opérations qui en résulte fait
disparaître les frontières entre les Etats et met à l’épreuve le cadre fiscal national et
international.
En Côte d’Ivoire, l’économie numérique est dominée par les entreprises du secteur des
télécommunications qui sont en plein essor. En 2021, avec un chiffre d’affaires de 1 140
milliards de francs, ce secteur représente 3,6 % du PIB et une contribution aux recettes

16
fiscales de 287 milliards de francs7. Malgré ce niveau de recettes fiscales, tous impôts
confondus, le secteur des télécommunications se caractérise par une grande faiblesse des
bénéfices commerciaux déclarés. En 2021, le montant des bénéfices réalisés s’élève
seulement à 61 milliards de francs.
Cette situation s’explique en partie par le poids de la parafiscalité qui s’élève à près de 116
milliards de francs8 et qui entame lourdement le rendement des impôts leaders tels que
l’impôt sur les bénéfices et l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières.
Les entreprises du secteur dénoncent une pression fiscale élevée qui est due également à
l’absence d’une taxation appropriée des géants du numérique (Google, Apple, Facebook,
Amazone, Microsoft, etc.) en Côte d’Ivoire.
Compte tenu de la complexité de l’industrie du numérique, perméable à l’évasion fiscale, il
convient, afin d’assurer un contrôle fiscal efficace et de parvenir à une meilleure imposition
optimale du secteur, de recourir de façon systématique à des experts nationaux et
internationaux.

3- L’imposition des géants du numérique (GAFAM)


Face à l’importance des enjeux liés à la taxation de l’économie numérique notamment des
géants du numérique (GAFAM), il est proposé que la Côte d’Ivoire intensifie sa coopération avec
les instances internationales en charge de cette matière. Il est donc recommandé que
l’Administration fiscale désigne un représentant permanent, spécialiste des questions de
l’économie numérique, au niveau du cadre inclusif de l’OCDE, pour participer et assurer la
continuité des négociations en cours.
Dans le même sens, notre pays doit accélérer le processus de son adhésion au Forum sur
l’Administration Fiscale Africaine (ATAF) afin d’aider à la prise en compte des préoccupations
nationales sur les sujets débattus au sein de ce forum.
Dans l’attente des conclusions des travaux de ces forums, il est proposé :
- l’institution d’une taxe sur le revenu généré par les services numériques en Côte
d’Ivoire comme c’est le cas dans certains pays, la France notamment. Les activités
imposables visées comprennent les services de marché en ligne, les services de
publicités en ligne, les services de médias sociaux et la vente ou l’octroi de licence de
données recueillies des utilisateurs ;
- l’accélération de la création, en cours, de la plateforme dédiée à la déclaration et au
paiement en ligne de la TVA par les exploitants de plateformes de ventes en ligne ou des
services numériques non établis sur le territoire ivoirien ;
- la redéfinition, en matière d’économie numérique, de la notion « d’établissement
stable ».

7
Données fournies par l’Union nationale des Entreprises de Télécommunications (UNETEL).
8
Données fournies par l’Union nationale des Entreprises de Télécommunications (UNETEL).

17
4- L’imposition des institutions de microfinance

Il est de plus en plus constaté l’entrée des sociétés commerciales, notamment des banques
classiques, dans le secteur des microfinances. Cette situation, source d’évasion fiscale,
pourrait s’expliquer par l’existence des avantages fiscaux accordés à ce secteur d’activités.
Aussi conviendrait-il d’exclure les sociétés de capitaux exerçant dans le domaine de la
microfinance, du champ d’application des exonérations prévues en matière d’impôt sur les
bénéfices et d’impôt sur le revenu des créances.

5- L’imposition des entreprises du secteur des technologies de l’information et de la


communication
Il est recommandé pour une meilleure imposition de l’ensemble des acteurs du secteur des
technologies de l’information et de la communication :
- d’instituer une retenue à la source sur les rémunérations versées aux petits
opérateurs par les entreprises du secteur formel afin de contribuer à une meilleure
fiscalisation des petits opérateurs économiques de ce secteur d’activité et de s’assurer
qu’ils sont effectivement identifiés fiscalement ;
- d’instituer l’obligation pour les entreprises formelles de ce secteur, de communiquer à
l’Administration fiscale, le répertoire de tous leurs co-contractants.

6- L’imposition du foncier en zones urbaines


L’imposition foncière comprend l’impôt sur le patrimoine immobilier, l’impôt sur le revenu
foncier, la taxe d’habitation (non encore appliquée) et toutes les taxes appliquées sur les
procédures d’accession à la propriété foncière.
Des efforts importants sont consentis en vue de mettre le rendement de ces prélèvements en
adéquation avec l‘immense potentiel fiscal existant.
Afin d’améliorer le rendement de cet impôt, la Côte d’Ivoire doit, en raison des importants
efforts d’équipement des villes en infrastructures de toutes natures, s’engager sur la voie
d’une imposition nuancée du foncier nu ou bâti.
L’adoption d’une telle mesure passe par la détermination des valeurs marchandes des biens
immobiliers de chaque ville et quartier.
L’existence des valeurs vénales dans les villes et quartiers peut contribuer à la détermination de
ces valeurs marchandes et les commissions existantes doivent être renforcées pour engager
efficacement ce travail d’envergure.
La réforme proposée doit conduire à :
- alléger la fiscalité dans les zones à faibles équipements publics ;
- renforcer la fiscalité dans les villes et quartiers de haut standing.

18
7- Les mesures de renforcement des ressources fiscales des collectivités locales
Pour renforcer les ressources des collectivités locales, il est proposé la création d’une
nouvelle taxe, le relèvement de la quote-part des recettes de certains impôts d’Etat
rétrocédés aux collectivités locales, la mise en application de la taxe d’habitation et la
rationalisation de la fiscalité locale.

7-1- La création de la taxe de développement local


Cette taxe, dont la création est proposée à titre temporaire (2 à 3 ans), est destinée à
compenser les pertes éventuelles de recettes liées aux mesures d’allègement de la fiscalité
sur l’économie. Prélevée à un faible taux, elle sera assise sur le chiffre d’affaires des
entreprises du régime du réel d’imposition. Les ressources tirées de cette taxe, comme celles
de la taxe d’habitation, seront intégralement versées aux communes.

7-2- L’opérationnalisation de la taxe d’habitation


La taxe d’habitation existe dans notre législation fiscale. Cette taxe est due par tous les habitants
de la commune, à titre de propriétaire et de locataire, afin de contribuer à la couverture des
dépenses de celle-ci. Les difficultés de sa mise en œuvre pourraient être corrigées par son
intégration dans la facture d’électricité ou de l’eau.

7-3- Le relèvement de la quote-part des impôts d’Etat rétrocédés aux


collectivités locales
Les ressources financières devant accompagner le transfert de compétences de l’Etat aux
collectivités locales demeurent insuffisantes.
Ainsi, en vue de renforcer les ressources des collectivités locales, il est proposé les mesures ci-
après :
- relever la quote-part des impôts d’Etat rétrocédés aux collectivités locales. Il s’agit,
notamment de la taxe d’État de l’entreprenant, de l’impôt des microentreprises,
de la patente-transport, de la taxe sur les véhicules à moteur (vignette) ;
- déterminer la répartition de l’impôt sur le patrimoine foncier par la loi et non par
acte règlementaire comme c’est le cas actuellement ;
- affecter les recettes de l’impôt sur le revenu foncier en totalité au Budget de
l’Etat.

7-4- L’institution d’un mécanisme de reversement automatique des ressources


dédiées aux collectivités locales
Le reversement des impôts recouvrés au profit des collectivités territoriales n’est pas régulier.
Cela pose en pratique des problèmes aux élus dans le cadre de l’exécution de leurs programmes
d’investissement destinés notamment à la réalisation d’infrastructures sociales pour
l’amélioration du bien-être des populations. Cette situation constitue également une contrainte
majeure pour l’exécution optimale du budget de ces collectivités.

19
En conséquence, il est proposé de mettre en place un mécanisme de reversement automatique
de tous les impôts ou quotités d’impôts et taxes prélevés au profit des collectivités territoriales.

7-5- L’institution d’une péréquation au profit des communes en zones rurales


La politique de décentralisation est handicapée par des écarts constatés entre le niveau de
développement et d’équipement des grandes communes, particulièrement celles d’Abidjan et
des petites communes, notamment celles de l’intérieur du pays.
Cette disparité s’explique en général par la faiblesse des activités économiques et le faible
niveau de réalisation des infrastructures immobilières, principales sources des recettes
fiscales locales.
En vue de soutenir le développement des petites localités, il convient de renforcer leurs
ressources financières par la mise en place d’un système de solidarité intercommunale qui
consistera à créer un fonds de péréquation afin que les communes les plus riches soutiennent
celles qui sont les moins nanties.
En conséquence, il est proposé de créer un Fonds de péréquation des collectivités
territoriales qui sera alimenté par un pourcentage des impôts fonciers des communes les plus
riches de Côte d’Ivoire. Les recettes de la patente-transport et de la vignette doivent également
alimenter ce fonds. Les règles de répartition de ces ressources communes devraient tenir
compte du niveau des recettes propres mobilisées par ces collectivités territoriales.

7-6- La rationalisation de la fiscalité locale


Adoptée en 2003, la loi n° 2003-489 du 26 décembre 2003 portant régime financier, fiscal et
domanial des collectivités territoriales n’apparaît plus adaptée aux réalités actuelles dues à
l’évolution et aux besoins des collectivités locales.
Ainsi, il est recommandé de la réviser dans le cadre d’un groupe de travail à mettre en place.
Cette revue permettra de revisiter la nomenclature des taxes locales afin de supprimer celles
qui seraient redondantes et de renforcer celles qui sont insuffisamment mobilisées.

20
II- Mesures d’amélioration de la compétitivité de l’économie ivoirienne

Le système fiscal ivoirien se caractérise par un niveau élevé du taux d’imposition totale. Ce
taux traduit le pourcentage du bénéfice consacré au paiement des impôts dans un pays. Il est
de 48,3 % en Côte d’Ivoire contre une moyenne de 36,5 % pour les pays à économie
performante d’Asie Pacifique et de 31,6 % pour l’Asie Centrale et l’Europe de l’Est. Quant aux
moyennes africaine et mondiale, elles se situent respectivement à 47,0 % et 40,1 %.9
Par ailleurs, il ressort des résultats des revues documentaires que sur la période 2018-2020, le
flux des investissements directs étrangers de la Côte d’Ivoire représentait 1 % du PIB contre
1,2 % en Afrique du Sud, 1,9 % au Maroc et 2,4 % au Rwanda10.
Cette situation traduit le manque de compétitivité de notre économie et appelle l’adoption
de mesures urgentes conduisant à la mise en place d’une fiscalité douce.
Dans ce cadre, il est proposé des mesures d’allègement du poids de la fiscalité, aussi bien au
double plan global et sectoriel qu’au plan des procédures.

A- Allègement du poids global de la fiscalité


Le niveau élevé du taux d’imposition total met en évidence le caractère à la fois inéquitable et
peu attrayant du système fiscal ivoirien, qui fait supporter en raison de la fraude au sein du
secteur informel, l’essentiel de la charge fiscale par les entreprises du secteur moderne.
Les mesures proposées visent la réduction de certains taux, la suppression de certains
prélèvements et le renforcement de la neutralité de la TVA.

1- La suppression d’impôts
Les mesures de suppression concernent les impôts dont le caractère antiéconomique est avéré.
Elles concernent :
1-1- La patente commerciale
La suppression de cette taxe qui est prélevée du seul fait de l’exercice d’une activité
professionnelle, se justifie par son caractère désuet et anti-investissement qui est fortement
décrié.
1-2- L’impôt minimum forfaitaire
Ce prélèvement est acquitté sur les résultats déficitaires. Il ne traduit pas, de ce fait, la faculté
contributive réelle des entreprises concernées et donne le sentiment de pénaliser les
contribuables en difficultés.
1-3- La contribution nationale pour le développement économique, culturel et social
de la nation concernant le personnel local
Cette mesure vise à réduire la charge fiscale globale sur les salaires du personnel local.

9
Source : Cabinet PWC.
10
Source : Cabinet PWC.

21
1-4- Les prélèvements à la source à la charge des opérateurs économiques connus
des fichiers de l’Administration fiscale
L’existence de retenues à la source se justifie, notamment, par la volonté de fiscaliser les
opérateurs économiques non immatriculés au fichier de l’Administration fiscale. Pour cette
raison, l’appliquer aux opérateurs fiscalement immatriculés apparaît comme une double
imposition.
1-5- L’impôt foncier sur les bâtiments en cours de construction
La législation fiscale prévoit l’imposition des bâtiments en cours de construction à l’impôt sur
le patrimoine foncier. Une telle disposition est non seulement antiéconomique, mais elle va à
l’encontre du principe de l’imposition des bâtiments à l’achèvement.
En vue d’alléger la charge fiscale des entreprises, il est proposé de supprimer cette
disposition.

2- La réduction des taux de certains prélèvements


Cette mesure qui apparaît comme une composante importante de la recherche de la fiscalité
douce vise à réduire le poids de l’impôt.
Elle concerne les impôts suivants :
2-1- La taxe sur la valeur ajoutée
Il est proposé de faire passer le taux normal de la TVA de 18 à 15% et le taux réduit de 9 à 5%.
Cette réduction de taux, notamment l’institution d’un taux réduit à faible niveau, permettra
d’introduire certains secteurs actuellement exclus du champ d’application de la TVA tels que les
assurances et les banques et de taxer d’autres qui ne le sont pas, sans que cette
imposition n’ait un impact à la hausse sur les prix des biens et services concernés. Il s’agit
notamment, des engrais, des aliments pour bétails, des farines de céréales et des produits
alimentaires naturels d’origine locale.
2-2- L’impôt sur le bénéfice industriel et commercial
Il est recommandé de ramener le taux de cet impôt de 25 à 20% pour tous les secteurs d’activité,
y compris le secteur des technologies de l’information et de la communication, actuellement
soumis à un taux majoré de 30 %.
La législation fiscale prévoit en outre, une double limitation de 5 % du chiffre d’affaires et de
20 % des frais généraux pour la déductibilité des sommes versées entre sociétés apparentées.
Eu égard à l’évolution de la législation fiscale internationale et compte tenu du fait que cette
disposition constitue aujourd’hui une limite au principe de pleine concurrence, il est proposé
de la supprimer.
2-3- L’impôt sur le revenu des valeurs mobilières
Une réduction du taux de droit commun de 15 à 10 % est proposée pour l’impôt sur les
revenus des valeurs mobilières afin de favoriser les placements dans les entreprises.

22
Le taux de 10 % devra être ramené à 5 % pour les petites et moyennes entreprises et pour les
sociétés cotées à la Bourse régionale des Valeurs mobilières.
2-4- La fiscalité foncière rurale
1°-L’accession à la propriété foncière en milieu rural
Les coûts de l’accession en pleine propriété en milieu rural sont dissuasifs et hors de portée des
populations. Il convient de les réduire afin d’inciter les populations à l’immatriculation de leurs
parcelles. Pour cela, l’Etat doit aider à la réduction des coûts des formalités d’accès à la
propriété foncière en :
- s’impliquant davantage dans la fixation des coûts techniques ;
- procédant à une réduction drastique de la fiscalité appliquée.
2°-L’impôt foncier sur les exploitations agricoles
Les tarifs actuels apparaissent dissuasifs et incitent à la fraude. Il convient de les réduire afin
d’obtenir l’adhésion des propriétaires concernés. Les différents recensements en cours au
niveau des organisations interprofessionnelles agricoles doivent aider à l’application de cette
mesure.

3- Le réaménagement et la rationalisation de la parafiscalité et des taxes administratives


Le nombre et la diversité des taxes parafiscales et des recettes de services rendent notre
système fiscal complexe. Leur poids pèse lourdement sur les entreprises, réduit les résultats
imposables et nuit au rendement de l’impôt sur les bénéfices et de l’impôt sur le revenu des
valeurs mobilières.
En effet, les recettes des taxes parafiscales et des recettes de services sont respectivement
estimées en 2021, à 142 milliards de francs et à 38 milliards de francs.
Il urge donc, en vue de la promotion d’un système fiscal simple et transparent, d’engager un
plan de réduction de la parafiscalité et des recettes de services, comme celui qui a été engagé
en matière d’exonérations et de soumettre préalablement leur création à la loi. En tout état
de cause, leur gestion doit être confiée à des régisseurs du Trésor dûment nommés.
Il convient également de rendre obligatoire la publication d’un rapport annuel sur les recettes
de services par le Ministère en charge de Budget.

4- Renforcement de la neutralité de la TVA


Par nature, la TVA ne doit pas constituer une charge pour l’entreprise qui y est assujettie. Afin
de parfaire sa neutralité, il est proposé les mesures ci-après :
- le renforcement du régime de déduction par l’extension de celui-ci à tous les frais dès
lors que ceux-ci sont engagés dans l’intérêt de l’exploitation. Il s’agit notamment des
frais de mission, des bâtiments sociaux et des meubles meublants ;
- l’introduction du taux zéro de la TVA dans la législation ivoirienne : il s’agit à la fois
d’une mesure à caractère économique et social pour permettre à certains secteurs
d’activités de bénéficier des avantages de la TVA sans que cela ait un impact sur les
prix de vente des produits concernés. Les secteurs visés sont ceux des produits

23
alimentaires naturels et halieutiques. Le régime du taux zéro se traduit par le
remboursement de la TVA supportée sur les coûts de production ;
- l’institution d’un régime de franchise de TVA au profit des entreprises qui exportent
plus de 90% de leur production ;
- l’assujettissement du secteur des assurances à la TVA en remplacement de la taxe sur
les contrats d’assurances, afin de permettre aux entreprises du secteur de bénéficier
des avantages de la TVA.

5- Mesures destinées à favoriser l’installation de sièges de groupes de sociétés étrangères


Les sièges de groupes de sociétés étrangères et des quartiers généraux installés dans un pays
sont des centres de décisions de groupes internationaux chargés de coordonner les activités
du groupe dans une zone géographique ou une région donnée. La présence de ces groupes
en Côte d’Ivoire comporte donc des avantages directs et indirects en matière économique.
Elle mérite d’être encouragée par un régime spécial. Aussi, les mesures suivantes sont-elles
proposées :
- instituer un régime d’intégration fiscale des bénéfices au profit de groupes de sociétés
holdings et filiales installées en Côte d’Ivoire. Ce régime permet de consolider les
résultats des sociétés au sein du groupe ;
- instituer un régime incitatif au profit des quartiers généraux installés en Côte
d’Ivoire comportant une exonération de l’impôt sur les bénéfices et de la contribution
employeur au titre des salaires versés au personnel expatrié.

6- Droits d’enregistrement, de timbres et de publicité foncière


La réduction des taux des droits d’enregistrement et de publicité foncière effectuée entre
2016 et 2021 couplée au développement de l’activité économique, s’est traduite par une
hausse de recettes de 17,4 à 39,8 milliards de francs sur la période11.
Il est donc proposé de poursuivre cette politique de réduction des taux, notamment, en matière
de cession de fonds de commerce, de mutation à titre gratuit et onéreux des immeubles,
de successions, de baux emphytéotiques et de conventions de trésoreries et de comptes
courants associés.
Par ailleurs, il convient d’engager une réflexion plus profonde pour la modernisation, la
simplification et la rationalisation des droits d’enregistrement et de timbres.

B- Allègement de la fiscalité sectorielle


Il est proposé une réduction du poids de la fiscalité sur certains secteurs d’activités dont
l’importance est avérée dans l’économie nationale. Il s’agit des secteurs agricole, agro-
industriel, des ressources animales et halieutiques, de l’écologie, des énergies renouvelables,

11
Source : Direction générale des Impôts.

24
des technologies de l’information et de la communication et des entreprises émettrices de
monnaies électroniques.

1- Les secteurs agricole et agro-industriel


Le secteur agricole est confronté à de nombreux défis dont l’insécurité foncière, l’absence
d’industrie semencière, l’accès limité au financement, le sous-développement de la recherche
scientifique et le faible niveau de mécanisation.
Le secteur agro-industriel quant à lui, fait face à des difficultés telles que l’approvisionnement
des unités de production et le coût élevé des facteurs de production.
Face à ces contraintes, le Gouvernement a adopté, en plus des dispositions du Code des
Investissements, des mesures sectorielles visant à encourager les investissements dans ces
secteurs. Ce dispositif d’incitation doit être complété par les mesures nouvelles ci-après :
1-1- Le secteur agricole
Les mesures proposées sont :
- la simplification des procédures et la réduction des coûts liés à l’acquisition de la
propriété foncière ;
- la réduction de la taxe sur les opérations bancaires au profit des exploitants agricoles ;
- l’exonération ou la réduction des droits de douane sur les matériels et les
équipements destinés à la modernisation de l’agriculture et à la recherche agricole ;
- l’exonération de droits de douane sur les matériels et équipements destinés à
l’industrie semencière, de plantules, de production des engrais et produits
phytosanitaires ;
- l’institution du taux zéro de la TVA sur les produits agricoles alimentaires d’origine
naturelle.
1-2- Le secteur de l’agro-industrie
Pour ce secteur, il est proposé :
- d’exonérer de droits de douane les matériels et équipements destinés aux industries
de transformation, de conditionnement et de conservation des produits agricoles
alimentaires ;
- d’accorder l’exonération de droits de douane aux unités locales de fabrication de
matériels agricoles et d’équipements de transformation de produits alimentaires ;
- d’octroyer des crédits d’impôts pour investissements dans le secteur.

2- Le secteur des ressources animales et halieutiques


En vue d’accompagner la politique de l’autosuffisance en ressources animales et halieutiques,
il est proposé :

25
- d’étendre le taux zéro de la TVA aux produits du secteur ;
- d’exonérer des droits de douane les intrants et matériels d’insémination, les
équipements et matériels de production des aliments pour les ressources animales
et halieutiques ;
- d’octroyer des crédits d’impôts pour investissements aux acteurs de ce secteur.

3- L’écologie
La Côte d’Ivoire fait face à de nombreux défis environnementaux et de développement durable.
Il s’agit notamment de la pollution environnementale, de la dégradation des sols, de la perte
de la diversité biologique et des changements climatiques.
Pour faire face à ces défis, il est recommandé d’exonérer de la taxe sur les opérations
bancaires les prêts consentis par les banques et établissements financiers pour le
financement des projets à impact environnemental avéré, notamment les projets de
réduction des pollutions, les projets de valorisation des ressources et du couvert forestier.

4- Les énergies renouvelables


Dans le but de promouvoir la production des énergies renouvelables, il est proposé :
- d’accorder des crédits d’impôts aux entreprises de production des énergies
renouvelables ;
- d’exonérer des droits de douane les matériels et équipements destinés à la production
des énergies renouvelables ;
- d’étendre les crédits d’impôts aux entreprises qui produisent et utilisent, pour leurs
besoins, les énergies propres ou renouvelables ;
- d’exonérer de droits de douane les équipements d’installations de bornes
électroniques ;
- de réduire les droits de douane sur les importations de véhicules électriques.

5- Les institutions de microfinance


Les systèmes financiers décentralisés sont connus comme étant des instruments de
développement économique destinés aux très petites entreprises, aux petites et moyennes
entreprises et aux personnes à revenu faible. Divers avantages fiscaux sont prévus. Ils ont
permis d’enregistrer, au niveau de la population active, un taux de pénétration des
institutions de microfinance de 7,9 % en 2014 à 13,2% en 202012.
Afin de contribuer à l’inclusion financière de toute la population et d’encourager l’épargne, il
est recommandé :
- d’exonérer d’impôt sur le revenu des créances les produits des comptes d’épargne de
la clientèle des institutions de microfinance ;

12
Source : Association Professionnelle des Systèmes Financiers Décentralisés de Côte d’Ivoire.

26
- d’exonérer de la taxe sur les opérations bancaires, les opérations de refinancement
des institutions de microfinance auprès des banques en vue de réduire le coût du
crédit à leur clientèle.

6- La taxation des entreprises du secteur des technologies de l’information et de la


communication

Pour ce secteur, les mesures ci-après sont proposées :


- appliquer, en raison de la charge fiscale élevée, supportée par les acteurs de ce
secteur, le taux de droit commun de l’impôt sur les bénéfices aux entreprises
concernées ;
- exonérer de droits de douane, les matériels informatiques conformément à la
politique du Gouvernement qui vise à assurer l’inclusion numérique.
7- L’imposition des entreprises émettrices de monnaies électroniques
Les entreprises émettrices de monnaies électroniques (EME) sont assujetties aux différentes
taxes spéciales appliquées au secteur des technologies de l’information et de la communication,
alors qu’elles sont soumises à la règlementation de la BCEAO. La charge fiscale induite de
cette situation handicape les activités des opérateurs du secteur qui doivent contribuer à la
bancarisation de la population décidée par le Gouvernement.
Les taxes spéciales concernées sont la taxe sur les entreprises de télécommunications et des
technologies de l’information et de la communication et les entreprises effectuant les
opérations de transfert d’argent (TSETIC), la taxe pour le développement des nouvelles
technologies en zones rurales (TDNTIC) et le prélèvement au profit de la promotion de la culture
(TPC).
Il est recommandé :
- d’exclure du champ d’application de ces taxes spéciales, les entreprises émettrices de
monnaies électroniques qui n’exercent pas réellement les activités de
télécommunication ;
- de soumettre ces entreprises à la TVA au taux réduit ;
- de supprimer le droit de timbre appliqué aux dépôts de somme d’argent.

C- Allègement des procédures


1- Réduction des formalités en matière d’accession à la propriété foncière
Il est recommandé d’alléger les formalités d’accession à la propriété foncière et de réduire les
coûts liés à l’immatriculation foncière rurale.
Par ailleurs, il est proposé de confier les procédures d’accession à la pleine propriété foncière
aux conservateurs des hypothèques qui sont des fonctionnaires de type particulier car soumis
à des responsabilités pénales et pécuniaires en cas d’erreur ou de faute professionnelle.

27
2- Adoption par voie législative d’un Livre de procédures des vérifications douanières
Les procédures relatives à la vérification douanière ont été prises par voie règlementaire.
Pour donner plus de force à ces textes, il est recommandé de transformer toutes les
dispositions en vigueur en lois et de les codifier dans un texte unique.

28
III- Mesures spécifiques en faveur des ports autonomes

Il s’agit essentiellement d’aménager le régime fiscal des ports autonomes pour assurer leur
compétitivité.
En effet, le décret portant approbation des statuts des ports prévoit la création au profit de
ces entités d’un régime fiscal de faveur. Toutefois, ce régime particulier n’est pas, jusqu’à ce
jour, mis en place.
Compte tenu, d’une part, de l’importance des programmes d’investissements que les ports
doivent exécuter et d’autre part, des lourdes charges de fonctionnement auxquelles ils
doivent faire face, il est proposé en leur faveur le régime fiscal ci-après :

A- En matière d’investissements
Il est proposé :
- d’exonérer les ports autonomes des droits de douanes sur les acquisitions de biens et
services destinés à la réalisation des grands travaux d’extension ;
- de mettre en place un mécanisme de financement de la TVA supportée dans le cadre
de ces grands travaux.

B- En matière d’exploitation
Il est recommandé :
- d’inciter les ports autonomes à exercer l’option prévue pour l’application de la TVA sur
les locations d’immeubles nus pour leur permettre de bénéficier pleinement des
avantages liés à cette taxe ;
- d’exonérer les ports de l’impôt sur les bénéfices.

29
IV- Mesures techniques

Il s’agit essentiellement :
- d’une part, de rationaliser le système d’imposition des revenus des personnes
physiques ;
- et, d’autre part, d’instituer un impôt sur les sociétés en remplacement de l’impôt sur
les bénéfices industriels et commerciaux.

A- Rationalisation du système de taxation des revenus des personnes physiques


La complexité du dispositif fiscal actuel de taxation du revenu des personnes physiques
impose de le simplifier et d’atténuer les inégalités induites. Ainsi, il est recommandé les
aménagements ci-après :

1- La suppression de l’impôt général sur le revenu


L’impôt général sur le revenu, malgré ses avantages indéniables en matière de justice fiscale,
comporte cependant des inconvénients inhérents à la complexité de son système. De plus,
son application est subordonnée à la production spontanée des déclarations par les
contribuables.
Ce système présente des limites qui expliquent la grande faiblesse du rendement de cet
impôt, estimé en 2016, à moins de trois milliards de francs pour une population fiscale d’à peine
500 contribuables déclarés13.
Face à cette situation et au regard de la suspension de l’impôt général sur le revenu, il est
recommandé de le supprimer et de le remplacer par un système de prélèvements libératoires
pour chaque catégorie de revenus.

2- La mise en place d’un système d’imposition libératoire par catégorie de revenus


En l’état actuel de la culture et de la mentalité fiscale des populations, il est recommandé
l’adoption d’un système d’imposition par catégorie de revenus.
Dans ce système, toutes les catégories de revenus sont soumises à un prélèvement à taux
proportionnel unique. Il s’agit de l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux, de l’impôt
sur le bénéfice non commercial, de l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, de l’impôt sur
le revenu des créances, de l’impôt sur les salaires, de l’impôt sur le revenu foncier. S’y ajoutent,
les prélèvements sur le secteur informel qui doivent être assimilés à des impôts sur le revenu.
Cette proposition doit s’accompagner de la généralisation du système de la retenue à la
source qui est un moyen efficace de recouvrement.

13
Annexe fiscale à la loi n° 2016-116 du 8 décembre 2016 portant Budget de l’Etat pour l’année 2017, article 4.

30
3- Introduction graduelle de la progressivité dans l’imposition des revenus catégoriels
Le système d’impositions libératoires des revenus catégoriels préconisé doit être limité dans
le temps et évoluer à moyen ou long terme vers un système de taux progressifs, plus juste et
équitable.

B- Institution d’un impôt sur les sociétés


Il est recommandé pour les personnes morales, de transformer l’impôt sur les bénéfices
industriels et commerciaux en impôt sur les sociétés.

31
V- Mesures de privilèges fiscaux

A- Adoption d’une loi spéciale sur les privilèges fiscaux


Dans le but d’accompagner l’option libérale choisie par notre pays, le Gouvernement a mis en
place un ensemble de privilèges fiscaux consistant en des exonérations, des abattements de
bases imposables et des crédits d’impôts.
Sans nier leur impact sur la promotion des investissements, ces mesures génèrent
d’importants manques à gagner au détriment du Trésor public. A cet égard, il apparaît
nécessaire de les encadrer dans une loi qui définit les grands principes à observer en la
matière.
Dans ce sens, il est recommandé que notre pays se dote d’une loi spéciale sur les privilèges
fiscaux. Ce texte de référence devra revêtir le caractère d’une loi organique ou à défaut, être
une annexe à la loi organique de 2014 sur les lois de Finances.
La loi spéciale sur les privilèges fiscaux sera mise en œuvre à travers des textes spécifiques qui
doivent strictement se conformer aux grandes orientations contenues dans ce dispositif général
de référence.
Les principales orientations proposées portent sur :
- la limitation restrictive des secteurs stratégiques. Les secteurs proposés sont
l’agriculture, l’agro-industrie, les PME industrielles et de services, l’habitat, le tourisme
et l’hôtellerie ;
- la définition des priorités nationales dont notamment le développement régional et le
contenu local ;
- la détermination de la nature des avantages à octroyer, leur ampleur et leur durée.
Dans ce cadre, la priorité doit être accordée aux crédits d’impôts et à la réduction
d’impôts, en remplacement des exonérations pures et simples ;
- la désignation des impôts, droits et taxes pouvant faire l’objet de privilèges fiscaux.
Ces impôts doivent être des prélèvements à la charge du promoteur, à l’exclusion,
notamment des impôts de tiers.
Il est proposé de mettre les principaux textes particuliers existants ou à créer en conformité
avec les principes contenus dans la loi sur les privilèges fiscaux. Ces Codes sont :
- pour les Codes existants : le Code général des Impôts, le Code des Douanes, le Code
des Investissements, le Code minier et le Code pétrolier.
- pour les Codes à créer : le Code du Développement des PME, le Code de Promotion de
l’Habitat social et économique et le Code des Partenariats Public-Privé.

B- Les Codes existants


1- Le Code Général des Impôts et le Code des Douanes
Le Code Général des Impôts et le Code des Douanes comportent déjà un certain nombre de
privilèges fiscaux de moindre ampleur au profit des entreprises en activité ou à créer.

32
Ces dispositions doivent être réaménagées, l’objectif étant d’élargir le champ des avantages
de droit commun en vue de rendre exceptionnel le recours au Code des Investissements.
Ainsi, il est proposé pour les entreprises nouvelles :
- une réduction dégressive de l’impôt sur les bénéfices sur une période qui ne peut
excéder cinq ans ;
- l’octroi de crédits d’impôts ;
- la suspension de la TVA au moment de la création ;
- l’exonération de droits de douane sur les acquisitions de biens d’équipements.
Le bénéfice de ces dispositions devra être acquis d’office, sur autorisation du Directeur
Général des Impôts ou du Directeur Général des Douanes.

2- Le Code des Investissements


Le Code des Investissements, principal outil de promotion des grands investissements doit
être réaménagé en deux volets, à savoir :
- les privilèges fiscaux ordinaires ou de droit commun applicables à l’ensemble des
secteurs d’activités éligibles ;
- les privilèges fiscaux exceptionnels réservés aux secteurs prioritaires qui sont
l’agriculture, l’agro-industrie, le tourisme et l’hôtellerie. Pour ces secteurs, des
mesures spécifiques d’envergure sont proposées.
Les avantages accordés dans le cadre du Code des Investissements peuvent être renforcés en
fonction des priorités nationales, du contenu local et du volume des investissements
programmés.

3- Le Code Minier
Les avantages fiscaux dans le secteur minier sont accordés dans le cadre des conventions
signées entre le Gouvernement et l’entreprise. Il est à noter que ces conventions comportent
généralement des dispositions fiscales plus favorables que celles prévues dans le Code minier,
ce qui paraît anormal, l’exonération relevant du domaine de la loi.
Pour cette raison, il est proposé de limiter désormais les dispositions des conventions
minières signées avec l’Etat aux seuls aspects techniques liés à l’activité minière et de se référer
au Code Minier pour les dispositions fiscales.

4- Le Code Pétrolier
Les sociétés pétrolières, par une interprétation abusive des dispositions du Code pétrolier et
des contrats de partage de production, incluent les impôts de tiers dans la part de pétrole
versée en nature à l’Etat.
Il s’agit notamment des impôts sur les traitements et salaires, de l’impôt sur le revenu des
valeurs mobilières, de l’impôt sur le revenu des créances et de la retenue au titre de l’impôt
sur les bénéfices non commerciaux. Les sociétés pétrolières sont chargées de les retenir à la
source et de les reverser au Trésor public pour le compte des contribuables concernés qui ne
sont pas visés par le Code Pétrolier.

33
Il est recommandé d’affirmer dans le Code Pétrolier et dans les contrats de partage de
production, que la part de pétrole versée en nature à l’Etat, par les sociétés pétrolières ne
comprend pas les impôts de tiers.
Par ailleurs, il est proposé d’instituer une obligation de transmission à l’Administration fiscale
par les entreprises pétrolières, de l’ensemble de leurs coûts pétroliers, des volumes et valeurs
du pétrole et du gaz vendus. Elles doivent également communiquer les détails des coûts
supportés par leurs prestataires de services pétroliers.

C- Les Codes à créer


1- Le Code du Développement des PME
Compte tenu de l’importance des PME dans l’activité économique, il apparaît impérieux de leur
consacrer un corpus juridique spécial en vue d’assurer leur plein épanouissement.
Le dispositif proposé comporte des mesures de droit commun et des dispositions fiscales
particulières.
Il est proposé dans un but de simplification des procédures, que les mesures de droit
commun soient accordées par les Administrations fiscale et douanière tandis que celles relevant
du régime spécial seront octroyées par un guichet spécial PME ouvert au sein du CEPICI.
1-1- Régime fiscal de droit commun
Le Comité propose, en raison de leur niveau bas, de réaménager les seuils des régimes
d’imposition.
1°- Les régimes d’imposition
- Les régimes du forfait :
de 0 à 10 millions de francs : très petites entreprises soumises à la taxe
communale d’entreprenant (anciennement de 0 à 5 millions de francs) ;
de 10 millions de francs à 50 millions de francs : petites entreprises relevant de
la taxe d’Etat de l’entreprenant (anciennement de 5 millions à 50 millions de
francs) ;
de 50 millions de francs à 200 millions de francs : moyennes entreprises
soumises au régime des microentreprises avec une possibilité d’option pour le
régime du réel simplifié d’imposition à partir de 50 millions de francs de chiffre
d’affaires.
- Les régimes du réel d’imposition :
de 200 millions de francs à 500 millions de francs : moyennes entreprises
relevant du régime du réel simplifié d’imposition ;
de 500 millions de francs à trois (3) milliards de francs : moyennes entreprises
soumises au régime du réel normal d’imposition.
Dans le but de promouvoir le développement des PME, il est proposé d’adopter les mesures
spécifiques ci-après.

34
2°- L’aménagement de la fiscalité applicable
- Les régimes du forfait
Les mesures proposées sont destinées à alléger la fiscalité applicable aux PME relevant de la
taxe d’Etat de l’entreprenant, c’est-à-dire, celles réalisant un chiffre d’affaires de 10 à 50
millions de francs, en phase d’investissements et en phase d’exploitation.
Pour les entreprises en phase d’investissements, il est proposé une exonération des droits de
douane pour les acquisitions de biens d’équipements.
S’agissant des PME en phase d’exploitation, il est recommandé de fixer un taux unique de
1,5 % sur le chiffre d’affaires pour la détermination de la taxe d’Etat de l’entreprenant.
En ce qui concerne les PME relevant du régime des microentreprises, il est proposé en phase
d’investissements une exonération des droits de douane pour les acquisitions de biens
d’équipements, et en phase d’exploitation, un taux d’imposition de 2,5 % du chiffre d’affaires
pour la détermination de l’impôt des microentreprises.
- Les régimes du réel d’imposition
En phase d’investissements, il est proposé d’exonérer les PME de la taxe sur les opérations
bancaires (TOB) pour les prêts destinés à l’acquisition des biens d’investissements,
d’équipements et à la constitution de leurs fonds de roulement. L’exonération proposée
porte également sur les droits de douane et la TVA pour les acquisitions de biens
d’investissements et d’équipements.
En phase d’exploitation, les avantages accordés portent sur l’impôt sur les bénéfices, l’impôt
sur le revenu des valeurs mobilières, la TVA et les droits d’enregistrement.
Au titre de l’impôt sur les bénéfices, il est proposé :
d’accorder aux PME nouvelles, une exonération totale de l’impôt sur les bénéfices sur
les deux premières années de leur création ;
de fixer le taux de l’impôt sur les bénéfices pour les PME à 10 % ;
d’accorder aux grandes entreprises une réduction de 25 % de l’impôt sur la part de
bénéfices résultant des contrats de sous-traitances avec les PME.
En ce qui concerne l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, il est recommandé :
de réduire le taux de l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières de 15 à 5 % pour les
petites et moyennes entreprises.
S’agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, il est suggéré :
d’exonérer de la taxe sur la valeur ajoutée, l’énergie utilisée par les PME industrielles
pour leur fonctionnement.
En matière de droits d’enregistrement et de promotion des centres de gestion agréés, il est
proposé :
d’exonérer les PME du droit de bail ;
Par ailleurs, il convient d’adopter des mesures incitatives au profit des experts-comptables et
des conseils fiscaux pour les inciter à créer des CGA pour l’encadrement des contribuables.

35
Cette mesure ne peut s’appliquer que si les comptes du contribuable sont certifiés par un
expert-comptable agréé.
1-2- Mesures spécifiques en matière d’investissements
Pour encourager l’installation des PME industrielles et de services relevant d’un régime réel
d’imposition, un régime spécial mérite d’être aménagé.
Sont concernées par ce régime fiscal, les PME industrielles et de services relevant d’un régime
réel d’imposition. Les privilèges fiscaux qui leur sont accordés le sont en fonction de la phase
d’investissement ou de la phase d’exploitation.
1°- En phase d’investissements et de développement d’activités, il est proposé au
profit de ces PME :
- l’exonération de droits de douane et la suspension de la TVA sur les acquisitions de
biens d’investissement y compris le matériel informatique ;
- l’exonération de TOB pour les prêts destinés aux acquisitions de biens d’équipement
et à la constitution de fonds de roulement ;
- l’exonération du droit de bail.
2°- En phase d’exploitation, les mesures suivantes sont recommandées :
- En matière d’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux :
accorder l’exonération de l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux
sur une période de 3 ans maximum pour la zone d’Abidjan. Cette durée est
portée à cinq ans pour les investissements réalisés à l’intérieur du pays;
fixer, au terme de la période d’exonération, un taux dégressif en matière
d’impôt sur les bénéfices, sur une période de deux ans pour la zone d’Abidjan
et de trois ans pour l’intérieur du pays ;
octroyer un crédit d’impôt de 50 % maximum du montant des investissements
réalisés et imputable sur toutes les autres natures d’impôts.
- En matière d’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, réduire de moitié, le taux de
l’impôt.
- En matière de redevance industrielle, réduire de 75 % maximum, le montant de la
redevance industrielle.
- En matière d’impôt sur le patrimoine foncier et d’impôt sur le revenu foncier, réduire
de 50 % maximum, le montant de l’impôt sur le patrimoine foncier et de l’impôt sur le
revenu foncier.

-
2- Le Code de Promotion de l’Habitat économique et social
Selon les statistiques du Ministère en charge de la Construction, le déficit en logements est
estimé aujourd’hui à plus de 600 000 unités, avec un accroissement de 10 % chaque année.
Dans le but de parvenir à résorber ce déficit, il est recommandé d’adopter par une loi portant
Code de Promotion de l’Habitat économique et social, des mesures d’incitation fiscales au

36
profit des entreprises de promotion immobilière. Les privilèges fiscaux à accorder aux sociétés
de promotion immobilière concernent :
- les logements destinés à la vente directe ;
- les logements destinés à la location-vente ;
- les logements destinés à la location simple ;
- les résidences universitaires et les internats.
Les privilèges fiscaux bénéficient aux maisons basses et aux bâtiments en hauteur à caractère
économique et social et sont octroyés dans des conditions allégées.
Ainsi, il est proposé les mesures suivantes :
1°-En phase d’investissements
- Accorder l’exonération des droits de douane sur les acquisitions des matériaux non
produits localement et destinés à la construction des logements ;
- réduire de moitié, le montant de la TOB sur les prêts accordés aux promoteurs
immobiliers par les banques.
2°-En phase d’exploitation
- Réduire de 60 % maximum, le montant de l’impôt sur les bénéfices. Pour les grands
investissements dans l’habitat, est proposé de porter ce taux à 75 % maximum ;
- réduire de 30 % maximum, le montant de l’impôt sur le revenu des valeurs
mobilières ;
- réduire de 50 % maximum, le montant de l’impôt sur le patrimoine foncier et de
l’impôt sur le revenu foncier pendant 10 ans, aussi bien pour le promoteur que pour
l’acquéreur ;
- exonérer de TOB, les crédits accordés aux primo-acquéreurs par les banques.
S’agissant des constructions de logements destinés à la location-vente, la location simple, aux
résidences universitaires et aux internats, ces mesures sont accordées sous la condition que
l’Etat intervienne dans la fixation du montant des loyers.

3- Le Code des Partenariats Public-Privé


Le partenariat public-privé constitue de plus en plus un moyen de financement des grands
projets d’investissements.
On distingue trois types de contrats de partenariat public-privé :
- le contrat de partenariat public-privé à paiement public ;
- le contrat de partenariat public-privé à paiement usagers ;
- le contrat de partenariat public-privé à paiement mixte.
Les avantages fiscaux accordés dans le cadre des contrats de partenariat public-privé se
limitent en général à l’exonération des droits de douane et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

37
Si l’application de l’exonération des droits de douane n’appelle pas d’observations particulières,
il n’en est pas de même en ce qui concerne l’exonération de la TVA qui constitue une
source importante d’évasion fiscale.
Ainsi, il est proposé de mettre en place un mécanisme de prise en charge par l’Etat de la TVA
appliquée aux projets. Le mécanisme proposé distingue les contrats de partenariat public- privé
à paiement public de ceux à paiement usagers.
Pour les contrats de partenariat public-privé à paiement public, il est recommandé de
mettre en place un mécanisme de financement public permettant la prise en charge
de la TVA par l’Etat. En effet, pour ce type de contrat, l’entreprise supporte la TVA et
les droits de douane pour lesquels elle est obligée de se financer auprès des banques
à des taux élevés. Ce qui contribue à renchérir le coût du projet.
En remplacement de l’exonération de la TVA actuellement pratiquée, il doit être proposé un
mécanisme de crédit garanti par l’Etat sur le moyen terme. Les charges liées à ce crédit
doivent être supportées par l’État ou intégrées dans le coût du projet.
Pour les contrats de partenariat public-privé à paiement usagers, il convient de faire
supporter la TVA et par l’entreprise dans la mesure où le paiement du service fourni
est facturé directement aux utilisateurs.

38
VI- Mesures institutionnelles

Une véritable réforme de fonds doit être engagée en matière de Gouvernance fiscale comme
c’est le cas dans plusieurs pays à travers le monde y compris en Afrique.
En effet, il est établi qu’aucun système fiscal, quelles que soient ses qualités, ne peut donner
un meilleur rendement, s’il n’est pas conduit par une gouvernance institutionnellement forte.
Dans ce sens, les mesures suivantes sont proposées.

1- L’amélioration de la gouvernance fiscale et douanière


Les mesures d’amélioration de la gouvernance traitent de la lutte contre la fraude et le
développement de l’incivisme fiscal.
Ainsi, il est proposé :
1°- Sur le plan national : la création de deux Agences autonomes chargées des Impôts et
des Douanes
La mesure proposée vise la séparation de la fonction de politique fiscale de celle de la gestion
opérationnelle du système fiscal. Elle conduit à engager notre pays, comme bon nombre d’Etats
à travers le monde, dans un mode de gestion moderne de notre système fiscal.
Il s’agit en effet, d’adapter les principes d’organisation et de fonctionnement des services aux
défis de l’efficacité, en assurant une séparation nette, entre la fonction de politique fiscale et
celle de gestion opérationnelle :
- la fonction de politique fiscale est exercée par le Gouvernement notamment, par le
ministère de tutelle des Agences des Impôts et des Douanes. Au sein de ce ministère,
il est proposé la création d’une direction centrale de la Politique fiscale. Cette
direction centrale sera chargée de proposer les grandes réformes fiscales, d’assurer leur
suivi et d’évaluer leur impact socio-économique et financier ;
- la fonction de gestion opérationnelle du système fiscal sera confiée à deux agences
dont l’une sera en charge des Impôts et l’autre des Douanes. Pour une meilleure
efficacité, ces agences doivent être dotées de moyens conséquents et d’une véritable
autonomie au triple plan administratif, financier et de la gestion des ressources
humaines.
La forme juridique de ces agences pourrait être celle d’un établissement public de type
particulier, doté de la personnalité morale.
Cette formule vise à responsabiliser davantage les dirigeants des Régies financières dans
l’exécution des programmes annuels arrêtés et dans l’atteinte des résultats, conformément aux
obligations qu’ils auront prises dans le cadre des contrats de performance. Ces contrats de
gestion seront signés avec la tutelle, le contrôle et le suivi d’exécution en seront assurés par
une structure de supervision qui pourrait être un Conseil d’administration ou un Conseil de
gestion.
L’objectif visé est d’introduire dans la gestion des Régies financières un mode de gestion de type
privé, avec notamment, ses exigences en matière de souplesse des procédures, de
transparence et de reddition des comptes.

39
Ces agences doivent être dotées de moyens conséquents déterminés par un pourcentage des
recettes fiscales et douanières recouvrées.

2°- Sur le plan local : élargissement des compétences de l’Administration fiscale à la


fiscalité locale
Il est préconisé la mise en place, au sein de chaque commune et région, d’une Administration
fiscale locale, chargée de mobiliser les ressources fiscales et de gérer le contentieux.
Ces services locaux, dotés d’une certaine autonomie par rapport au pouvoir politique et
administratif local, seront animés par des agents fiscalistes encadrés par la Direction de la
Fiscalité locale logée au sein de l’Agence des Impôts.
Cette mesure permettra d’assurer la transparence des recouvrements des ressources fiscales
et le transfert de celles-ci dans les Trésoreries locales.

2- La gestion des contrôles fiscaux et douaniers


L’impôt relève du domaine de la loi. De ce fait, les règles d’assiette, de liquidation, de
contrôle, de recouvrement et de contentieux en matière fiscale sont pour l’essentiel, contenues
dans des textes légaux, à savoir le Code Général des Impôts, le Livre de Procédures fiscales et le
Code des Douanes.
Aux termes de ces dispositions légales, seules les Administrations fiscale et douanière sont
compétentes pour effectuer les contrôles fiscaux et douaniers en contrepartie du système fiscal
déclaratif.
Toutefois, en l’état actuel des choses, outre les Administrations fiscale et douanière qui, de
par la loi, ont la charge des contrôles fiscaux et douaniers, d’autres administrations se sont vues
confier par voie administrative, les mêmes attributions.
Cette situation crée une confusion qui est source d’insécurité juridique.
Il est donc proposé d’exclure expressément les contrôles fiscaux et douaniers menés sur les
entreprises, du champ de compétence de toute administration autre que celles des Impôts et
des Douanes.

3- La création d’un Tribunal spécialisé en matière fiscale et douanière


Ce tribunal, conçu sur le modèle du Tribunal de Commerce, sera chargé de connaître du
contentieux fiscal et douanier dans sa phase juridictionnelle.
La création de ce tribunal vise également à aider au renforcement des droits et garanties des
contribuables et contribuera à améliorer sensiblement cet aspect du climat des affaires.
En attendant la création de ce tribunal, il est proposé la création au sein des juridictions de
commerce, d’une chambre spécialisée dans le traitement des affaires fiscales.

40
4- La création d’une Autorité nationale de Promotion du Civisme fiscal
Cette proposition prend en compte l’impérieuse nécessité d’opérer un changement radical de
mentalité des ivoiriens vis-à-vis de l’impôt.
L’Autorité nationale de Promotion du Civisme fiscal sera chargée de mettre en œuvre un
programme national de promotion du civisme fiscal en direction de toutes les couches
sociales de la population, y compris les pouvoirs publics et les autorités politiques pour
valoriser voire sublimer le devoir fiscal dans notre pays.
Cette Autorité nationale doit avoir l’ancrage le plus élevé possible et prendre en compte,
notamment :
- la redevabilité de l’impôt, en particulier à l’endroit des autorités politiques et
administratives ;
- la formation et la sensibilisation des opérateurs économiques à leurs obligations
fiscales et comptables ;
- la publication d’un rapport annuel sur l’état du civisme fiscal, la situation de la fraude
fiscale et de la corruption en matière fiscale en Côte d’Ivoire ;
- l’amélioration du consentement à l’impôt en valorisant l’effort fiscal des citoyens.
Dans ce sens, les responsables politiques doivent changer de discours et faire
comprendre aux citoyens que les grandes réalisations de l’Etat sont la matérialisation
de leur effort fiscal.

41
VII- La gestion des coûts attendus

Les conclusions des travaux du Comité Scientifique du Cadre d’Elaboration des Réformes
Fiscales répondent pour l’essentiel aux grandes préoccupations relayées par l’ensemble des
acteurs du système fiscal, notamment les Administrations publiques et le secteur privé.
Cependant, certaines des mesures préconisées engendreront des pertes de recettes dont le
chiffrage doit être effectué. Il s’avère donc nécessaire que ce chiffrage des coûts soit confié aux
services spécialisés du Ministère du Budget et du Portefeuille de l’Etat ou à un cabinet privé.
Cela permettra d’élaborer un chronogramme qui intègre les différentes contraintes aussi
bien budgétaires, qu’économiques.
Ainsi, il convient de noter que les réformes identifiées se caractérisent par leur cohérence
globale et doivent pour cette raison, être examinées dans leur ensemble. La combinaison des
effets négatifs des unes et des effets positifs des autres devrait assurer leur équilibre global
et, in fine, la sécurité des recettes.
Il faudrait donc éviter de tomber dans la tentation qui consisterait à ressortir ces mesures de
façon isolée, en les détachant de cette cohérence générale, pour les intégrer, selon les
besoins du moment, dans les Lois de Finances annuelles, en dehors d’un chronogramme de
mise en œuvre, établi en fonction de diverses contraintes relevées.
Les coûts, qui pourraient être à l’origine des craintes sont à la fois directs, indirects et généraux.
Les baisses de recettes résident dans les propositions de réduction des taux de TVA, d’impôt
sur les BIC, ainsi que dans la suppression de certains prélèvements, notamment la patente, la
contribution nationale pour le développement économique et social et l’impôt minimum
forfaitaire. Elles ressortent également des régimes particuliers proposés notamment en
faveur des PME et de l’habitat économique et social.
La réduction des pertes liées à ces mesures proviendra des gains attendus des créations de
nouvelles taxes proposées.
Mais il conviendrait d’aller au-delà de ce calcul « mécanique » et de prendre en compte les
effets indirects de certaines mesures en raison de leur impact bénéfique sur l’économie.
Ainsi, la suppression de certains prélèvements tels que la patente, l’impôt minimum
forfaitaire, certaines taxes spéciales ou parafiscales sont de nature à impacter positivement le
rendement des impôts sur les BIC et sur le revenu des valeurs mobilières, du fait de l’allègement
des charges déductibles dans les comptes des entreprises que la mesure entraînera.
Les différentes mesures de lutte contre la fraude, proposées au plan national comme à
l’international, devraient renforcer l’efficacité du système fiscal.
S’agissant des effets généraux positifs non chiffrables attendus, ils concernent les réductions
de taux de prélèvements et de propositions d’organisation et de gouvernance.
Ainsi :
- la réduction du taux de la TVA permettra de relancer la consommation et d’augmenter
les recettes de cette taxe ;

42
- l’allègement des taux et des tarifs d’impôts rendra la fraude peu rentable et
découragera les candidats à la fraude. La baisse du niveau général de la fiscalité
allègera le poids de l’impôt sur l’économie et sur les ménages. En effet, le paiement
de celui-ci, rendu facile, limitera les résistances au devoir fiscal ;
- les propositions relatives à la gouvernance fiscale avec la création des Agences
autonomes des Impôts et des Douanes induiront, pour les responsables choisis selon
leur mérite, une obligation de résultat qui les exposera à des sanctions en cas de faute
ou d’insuffisance de résultat ;
- la création des tribunaux spécialisés en matière fiscale, renforcera positivement la
lutte contre la fraude ;
- l’établissement d’un programme national d’éducation au civisme fiscal, animé par une
Autorité indépendante à ancrage élevé, fera émerger la soumission à l’obligation
fiscale comme une norme sociale. L’accomplissement du devoir fiscal ainsi érigé en vertu
célébrée, rendra moins douloureux le paiement des impôts ;
- certaines de ces mesures doivent être soumises à des études préalables ;
- l’organisation d’une bonne redevabilité de l’impôt proposée par le Comité, permettra
de montrer au contribuable la bonne utilisation de sa contribution aux charges de
l’Etat et à celles de développement du pays.
Au total, ces mesures d’organisation, d’éducation et de gouvernance favoriseront le
changement de comportement du citoyen face à l’impôt et son refus de rentrer dans les chaînes
de fraude et de corruption.
Au demeurant, les réformes préconisées rentrent dans le cadre d’une démarche de
changements, porteurs de progrès et susceptibles d’entraîner des coûts, mais ceux-ci ne
devraient pas constituer un frein à la marche en avant. La nécessité d’études préalables pour
certaines mesures et leur application progressive dans le temps, dans un chronogramme de
mise en œuvre bien agencé, devraient permettre de lever les craintes en matière budgétaire.
Il faut saisir l’opportunité qu’offre la forte croissance que connaît l’économie ivoirienne pour
engager des réformes courageuses de notre système fiscal.

43
ANNEXE 1
ARRETE N°0585/PM/CAB DU 20 MAI 2022 PORTANT
CREATION, ATTRIBUTIONS, ORGANISATION ET
FONCTIONNEMENT DU CADRE D'ELABORATION DES
REFORMES FISCALES

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49
ANNEXE 2
ARRETE N°07341PM/CAB DU 07 JUILLET 2022
PORTANT NOMINATION DES MEMBRES DU COMITE
SCIENTIFIQUE DU CADRE D'ELABORATION DES
REFORMES FISCALES

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