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Titre du mémoire :
A mes chers Parents M’hammed & Wassila, au delà des expressions, aucune
dédicace ne pourrait exprimer ma gratitude pour tous les sacrifices déployés pour
moi. Que Dieu vous préserve bonne santé et longue vie.
Je dédie ce mémoire.
Remerciement
recherche. J’ai bien profité de ses conseils précieux et de sa riche expérience pour
finaliser ce travail
Je remercie également tous les membres du jury pour l’honneur qu’ils m’ont fait
Je suis également très reconnaissant envers mes confrères qui m’ont fourni un
TITRE INTRODUCTIF : LE PRIX DE TRANSFERT : UNE PREOCCUPATION CROISSANTE POUR LES GROUPES DE
SOCIETES ............................................................................................................................................................... 5
TITRE I : LE CADRE REGLEMENTAIRE ET NORMATIF & TYPOLOGIE DES RISQUES INHERENTS AU PRIX DE
TRANSFERT...........................................................................................................................................................14
INTRODUCTION A LA PREMIERE PARTIE ............................................................................................................................. 14
SECTION 1 –LE CADRE REGLEMENTAIRE ET NORMATIF ...................................................................................................... 15
SECTION 2–METHODES DE DETERMINATION DU PRIX DE TRANSFERT ...................................................................................... 22
SECTION 3: ANALYSE DES RISQUES INHERENTS AU PRIX DE TRANSFERT ................................................................................ 27
SECTION 4 : INCIDENCES DES RISQUES LIES AU PRIX DE TRANSFERT SUR LES RESPONSABILITES DU COMMISSAIRE AUX COMPTES ........ 42
CONCLUSION PREMIERE PARTIE....................................................................................................................................... 48
TITRE III :SYNTHESE DES TRAVAUX ET RAPPORTS D’AUDIT EN RELATION AVEC LE PRIX DE TRANSFERT .............123
EME
INTRODUCTION 3 PARTIE ......................................................................................................................................... 123
SECTION 1 – FINALISATION DE LA MISSION : ................................................................................................................. 123
SECTION 2 : LE PRIX DE TRANSFERT ET LES RAPPORTS DU COMMISSAIRE AUX COMPTES ......................................................... 131
CONCLUSION TROISIEME PARTIE.................................................................................................................................... 137
ETUDE EMPIRIQUE SUR L’AUDIT DES TRANSACTIONS INTERGROUPES ET LE PRIX DE TRANSFERT PAR LES
COMMISSAIRES AUX COMPTES EN TUNISIE .......................................................................................................138
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................................................185
Introduction générale
Introduction générale
Cette évolution a encore pris une envergure importante en débouchant sur le phénomène de la
globalisation de l’économie mondiale au point que certains économistes contemporains évoquent
la notion du « village mondial »1. Cette approche a été surtout adoptée par l’organisation de
coopération et de développement économique (OCDE), une des principales organisations
économiques du vingtième siècle qui joue un rôle consultatif et modérateur pour l’économie
mondiale et qui encourage le libre échange pour favoriser l’innovation et le gain de productivité.
Cette vision a clairement favorisé la montée en puissances des groupes de sociétés présents dans
plusieurs pays moyennant la création de filiales. Pour des raisons stratégiques, ces filiales
procèdent à des transactions entre elles qui nécessitent d’être facturées à l’instar des autres
transactions avec l’hors groupe. On assiste alors à la naissance d’un concept dit « prix de
transfert » qui va jouer le rôle de l’étalon de mesure pour la valorisation des échanges
économiques intergroupes.
L’OCDE est intervenue dans ce cadre et a recommandé que les prix de transferts pratiqués par
les groupes soient déterminés en respectant le principe de pleine concurrence c'est-à-dire les prix
qui reflètent objectivement les conditions normales du marché.
1
HOUSSET, Nicolas, 2004, "les prix de transfert : quelles sont les moyens à la disposition des groupes internationaux pour
permettre dans le domaine des prix de transfert, une optimisation économique et fiscale de leur résultat", Ecole Supérieure de
Commerce de LILLE.
1
Introduction générale
La Tunisie a par ailleurs connu un tournant économique et politique important à partir de 2011
avec la révolution qui a changé profondément l’environnement socioéconomique et par
conséquence le pays se trouve face à de nouveaux défis dont principalement la relance
économique, la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent.
La Tunisie a par ailleurs, adhéré à la convention multilatérale de l’OCDE le 25/01/2018 qui est
bien un événement marquant et ce pour montrer ses intensions de renforcer la transparence
fiscale.
Tous ces éléments ne peuvent qu’influer significativement sur la mission du commissaire aux
comptes lors de l’audit des transactions intergroupes. Ce dernier se trouve encore une fois dans
un milieu turbulent caractérisé par des pressions de l’environnement économique et politique qui
rendent l’audit des prix de transfert une tache sensible.
Par ailleurs, ces prix de transfert présentent toujours le risque d’être manipulés par les sociétés
du groupe. Les conséquences qui en découlent sont souvent importantes et bien néfastes pouvant
générer d’une part, des redressements fiscaux colossaux, et d’autre part, des faits délictueux à
révéler au procureur de la république. Ces risques sont souvent très significatifs et pourraient
même compromettre la continuité de l’exploitation. L’enjeu est alors devenu majeur pour les
commissaires aux comptes des groupes de sociétés.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente recherche qui vise à mettre en exergue les
différents types de risques dont le commissaire aux comptes peut faire face lors de l’exercice de
sa mission et qui risquent de générer des anomalies significatives au niveau des états financiers..
Il en résulte alors que l’audit des prix de transfert nécessite la mise en place d’une approche
spécifique en réponse aux risques évalués.
Par ailleurs pour exercer sa mission, le commissaire aux comptes pourrait faire face à certaines
limites et difficultés dont notamment l’insuffisance claire au niveau du cadre réglementaire qui
régit les prix de transfert en Tunisie, l’influence de la stratégie du groupe exercée sur ses filiales,
l’obligation de la non immixtion dans la gestion mise à sa charge, en plus des responsabilités
encourues de plus en plus aggravées, ce qui rend le déroulement de la mission d’audit délicat vu
une difficulté pour mettre en œuvre les diligences nécessaires.
Ainsi, à travers cette étude, nous essayerons d’évaluer l’incidence de la problématique des prix
de transfert sur la mission du commissaire aux comptes, et présenter un ensemble de diligences
2
Introduction générale
qu’il serait pertinent d’intégrer dans le cadre de la démarche d’audit des états financiers et ce en
apportant des éléments de réponse aux différentes questions suivantes :
• Dans quelle mesure le commissaire aux comptes peut-il évaluer le risque provenant des
prix de transfert retenus par l’entreprise auditée sans pour autant violer le principe
fondamental de non immixtion dans la gestion ?
• Comment le commissaire aux comptes pourrait t-il mettre en valeur l’effet du prix du
transfert, lorsqu’il est significatif, sur la démarche globale d’audit et quelles seraient les
diligences qui s’imposent depuis la phase de planification de la mission jusqu’à
l’opinion lui permettant d’avoir une assurance raisonnable quant à la sincérité, la
régularité et l’image fidèle des comptes certifiés ?
• Quel est l’impact du prix de transfert sur le risque d’audit des états financiers des sociétés
du groupe et quelles sont les diligences à mettre en œuvre pour répondre à ce risque
spécifique évalué ?
• Quelles sont les diligences spécifiques à mettre en œuvre par les commissaires aux
comptes des sociétés du groupe pour préserver les intérêts des minoritaires face à un
intérêt du groupe plus prépondérant ?
Après avoir présenté les définitions et les notions de base ainsi que la place prépondérante du
prix de transfert au sein des groupes de sociétés, La première partie de ce mémoire sera
consacrée pour l’étude du cadre réglementaire du prix de transfert en Tunisie, ainsi qu’une
présentation des différentes méthodes agréées par l’OCDE pour déterminer le prix de transfert.
Dans cette même partie nous passerons en revue les différents types de risques inhérents au prix
de transfert avec une analyse détaillée pour mettre en exergue l’enjeu et l’incidence du prix de
transfert sur la mission de commissariat aux comptes.
Ensuite, la deuxième partie proposera une méthodologie d’audit orientée vers le prix de transfert
qui commence depuis la planification jusqu’à la mise en œuvre de la démarche d’audit, en
exposant un ensemble de diligences détaillées et spécifiques au prix de transfert présentés dans
le cadre d’une méthodologie structurée appuyée par des questionnaires d’audit.
3
Introduction générale
Pour terminer, une attention particulière est également accordée aux pratiques appliquées sur le
terrain dans le contexte tunisien, par le biais d’une enquête sous forme de questionnaire menée
auprès des commissaires aux comptes pour connaitre l’importance allouée au prix de transfert
dans le cadre de leurs démarches d’audit.
4
Titre introductif : Le prix de transfert : une préoccupation croissante pour les groupes de sociétés
En dépit du poids que représentent les groupes dans les différents flux économiques, le droit
Tunisien, à l’instar de la plupart des législations, ne leur reconnaît pas d’existence juridique.
C’est une entité purement économique qui reste dépourvue de la personnalité morale.
Les premiers auteurs qui ont tenté de définir le groupe se sont basés principalement sur l’aspect
économique de ce dernier.
Le groupe ne dispose pas de la personnalité juridique, et ne dispose pas d’un patrimoine propre.
La notion de groupe est une notion en premier lieu économique qui se base sur la réunion de
deux éléments:
• Un lien de dépendance (financière, juridique, économique...) : Il en résulte une
domination généralement exercée par la majorité et qui se traduit par un droit d’influence
dans la gestion des filiales;
• Une direction unique capable de lui apporter des techniques de gestion générale, une aide
financière, commerciale…etc.
Selon Claude Champaud : « Le groupe est une unité de contrôle patrimonial destinée à assurer
une unité de décision économique »2.
Selon le même auteur, « Il y a groupe industriel de sociétés lorsque des sociétés par actions,
ayant des activités identiques, proches ou complémentaires, sont soumises à une direction
économique unique résultant du contrôle de leur patrimoine par l’une d’entre elles qui exerce sa
domination par le jeu de multiples participations financières».
Une autre définition présente le groupe comme étant « …un ensemble de sociétés qui, tout en
étant juridiquement distinctes, se trouvent cependant liées les unes aux autres de telle sorte que
2
Thèse Rennes,1961 « Le pouvoir de concentration de la société par action » cité par Laure Nuit-potier dans « les groupes de
sociétés », collection de droit en question, page 9
5
Introduction générale
l’une d’entre elles, qualifiée de société mère ou de société dominante, est en mesure d’imposer,
en fait ou en droit, une unité de décision aux autres composantes du groupe qui se trouvent ainsi
dans la situation de sociétés dominées »2.
Le mémento « Groupes de sociétés » Francis Lefebvre définit le groupe comme « …un ensemble
constitué de plusieurs sociétés ayant chacune son existence juridique propre mais unies entre
elles par des liens divers en vertu desquels l’une d’elles, dite société mère, qui tient les autres
sous sa dépendance, exerce un contrôle sur l’ensemble, et fait prévaloir une unité de décision ».
Juridiquement, le groupe, dans son ensemble, n’a pas de personnalité morale, ne dispose pas
d’un patrimoine, d’engagements sociaux, de possibilité d’action en justice ou de mise en
règlement judiciaire.
Le code des sociétés commerciales a défini le groupe des sociétés 3 comme un ensemble de
sociétés ayant chacune sa personnalité juridique mais liées par des intérêts communs, en vertu
desquels, l’une d’elle dite société mère, tient les autres sous son pouvoir de droit ou de fait et y
exerce son contrôle, assurant ainsi une unité de décision.
La notion de contrôle est définie par le même article comme suit : « Est considérée comme étant
contrôlée par une autre société, toute société :
• Dont une autre société détient une fraction du capital lui conférant la majorité des droits
de vote, seule ou en vertu d’un accord conclu avec d’autres associés, ou
• Dont une autre société y détient la majorité des droits de vote, seule ou en vertu d’un
accord conclu avec d’autres associés, ou
• Dont une autre société y détermine, en fait, les décisions prises dans les assemblées
générales en vertu des droits de vote dont elle dispose en fait
La société mère est présumée exercer ce contrôle lorsqu’elle dispose directement ou
indirectement d’une fraction des droits de vote supérieure à 40% et qu’aucun autre actionnaire ne
détient directement ou indirectement une fraction de ces droits supérieure à 30% ».
Une participation directe ou indirecte dans le capital de chacune des sociétés appartenant au
groupe des sociétés doit être détenue par la mère.
Est considérée filiale, toute société dont plus de cinquante pour cent du capital est détenu
directement ou indirectement par la société mère et ce, abstraction faite des actions ne conférant
pas à leur porteur des droits de vote.
3
Article 461 du code des sociétés commerciales
6
Introduction générale
La loi de finance pour la gestion 2001 a reconnu pour la première fois la notion du groupe à
l’échelle fiscale et ce par l’instauration du régime d’intégration des résultats au niveau du code
de l’IRPP et de l’IS.
Ce régime définit des conditions sous lesquelles une société dite « mère » se substitue à d’autres
sociétés appelées « filiales » pour le paiement de l’impôt sur les sociétés (IS) sur la base d’un
résultat global en tenant compte des résultats bénéficiaires et déficitaires réalisés par toutes les
sociétés. La société mère doit détenir directement ou indirectement au moins 75% du capital de
ses autres filiales et doit être cotée à la bourse des valeurs mobilières de Tunis (BVMT) ou bien
elle doit s’engager à introduire des actions à la BVMT dans un délai ne dépassant pas la fin
d’année qui suit celle de l’entrée au régime d’intégration des résultats.
Par ailleurs, bien que le code de l’IRPP et de l’IS ne s’est pas prononcé sur la définition du
groupe, la doctrine administrative au niveau de la note commune NC 33 /2010, a défini les liens
de dépendance entre les sociétés selon que cette dépendance est juridique ou de fait. D’après
cette note commune, « sont considérées entreprises ayant des liens de dépendance, les entreprises
ayant des relations spéciales telles que définies par les législations en vigueur ». La dépendance
juridique est ainsi liée à l’exercice du pouvoir de décision soit directement soit par personne
interposée, ou à la possession de la majorité absolue des droits de vote dans les assemblées
d’actionnaires ou d’associés même dans le cas des sociétés dont le siège est situé à l’étranger.
Elle renvoie aussi à l’article 461 du code des sociétés commerciales pour définir et clarifier les
liens de dépendance juridiques.
Concernant la dépendance de fait, elle est tributaire de l’existence soit d’un contrat soit d’une
relation qui établit une obligation pour l’une des sociétés de rendre des comptes à l’autre et de
mener ses opérations selon les conditions qui lui impose.
La NC 33-2010 a ainsi adopté une conception large de la notion de groupe et ce, afin de se
prémunir contre le risque de minoration des impôts par la manipulation du prix de transfert.
En France, il existe deux régimes dérogatoires au principe de la personnalité fiscale 4 :
• Un régime dit « d’intégration fiscale » qui permet la compensation des résultats positifs
et négatifs de l’ensemble des sociétés d’un groupe dont la société mère détient au moins,
directement ou indirectement 95% des droits de vote.
4
Consolidation des bilans 2006 – Hammadi ben Amor, Editions RaoufYaich
7
Introduction générale
La définition comptable du groupe est introduite progressivement pour les entreprises ayant
l’obligation d’établir des états financiers consolidés. Premièrement, L’article 24 de la loi 96-112
portant système comptable des entreprises a instauré au niveau de son article 24 l’obligation
d’établir des comptes consolidés par les entreprises qui contrôlent totalement ou partiellement les
opérations de direction d’une ou de plusieurs entreprises et leurs choix financiers ou qui exercent
une influence notable sur le déroulement de leurs activités. Par la suite, la définition comptable
est apparue au niveau de la NCT 35 relative aux états financiers consolidés qui stipule la
définition suivante : « Un groupe est une mère et toutes ses filiales ». Elle a repris simplement la
définition de l’IAS 27.
Le patrimoine est considéré comme étant l’ensemble des propriétés d’une entité juridique,
physique ou morale. Il s’étend sur les biens immobiliers mobiliers ou immatériels ainsi que les
autres actifs monétaires et non monétaires.
Ce même patrimoine doit être bien identifié par rapport à celui des associés que par rapport des
autres entités légales faisant partie du groupe et c’est dans ce sens que le code des sociétés
commerciales a consacré également le principe de séparation de patrimoine à travers des
dispositions qui sanctionnent l’abus de biens et l’abus de droit et ce, dans le but de conserver
l’actif social et préserver les intérêts des minoritaires.
Le principe de séparation de patrimoine est essentiel car il consacre le principe des entités
distinctes conçu par l’OCDE. En effet, selon les dispositions de l’article 9 du modèle de
convention fiscale concernant le revenu et la fortune : « le principe de pleine concurrence adopte
la démarche consistant à traiter les membres d’un groupe multinational comme des entités
distinctes et non comme des sous ensemble indissociables d’une seule entité unifiée » 5 . En
respectant ce principe, chaque entité du groupe est imposée sur le bénéfice qu’elle réalise.
5
Principe de l’OCDE applicable en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des
administrations fiscales 2010 p37
8
Introduction générale
Selon le droit commercial, il désigne «l'intérêt de l'entreprise organisée comme personne morale
avec une autonomie juridique poursuivant ses fins propres, dans un intérêt qui est l'intérêt
général commun des actionnaires… » 6.
Il découle ainsi, que la notion d’intérêt social peut être analysée suivant deux courants de
pensées :
Dans ce cadre, il pourrait être défini ainsi : « l’intérêt supérieur de la personne morale elle-
même, c’est-à-dire de l’entreprise considérée comme un agent économique autonome,
poursuivant des fins propres, distinctes notamment de celles de ses actionnaires, de ses salariés,
de ses créanciers, de ses fournisseurs et de ses clients, mais qui correspondent à leur intérêt
général commun, qui est d’assurer la propriété et la continuité de l’entreprise» 7.
D’après cette approche, l’objectif final est de satisfaire les intérêts des associés. Il s’agit, dans ce
cas, d’une vision contractuelle selon laquelle la société est traduite comme « un contrat par
lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d’affecter en commun leurs apports, en vue de
partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourraient résulter de l’activité de la
société » 8.
Selon le professeur Gérard SOUISSI 9 : « L’intérêt du groupe est une notion beaucoup plus large
que l’intérêt de la société qui contrôle : il s’agit en fait d’éviter que la politique générale du
groupe ne soit conduite uniquement dans l’intérêt de la société mère et que peu à peu,
directement ou indirectement, les sociétés dominées soient vidées de leur substance en
alimentant et en renflouant sans cesse la société mère. En cela, la notion d’intérêt du groupe est
utile car elle sauvegarde l’équilibre financier des différentes sociétés pour le plus grand avantage
des actionnaires qui ne font pas partie de la société mère »
6
SCHMIDT, D, (1995), "de l’intérêt social", JCP Edition 1995, P 488.
7
Rapport du groupe de travail du Conseil National du Patronat Français et de l’Association Française des Entreprises Privées
(CNPF-AFEP) sur le conseil d’administration des sociétés cotées.
8
Article 2 du Code des Sociétés Commerciales promulgué par la loi n° 2000-93 du 3 novembre 2000.
9
Gérard Souissi: « l’intérêt de groupe et l’intérêt social » dans semaine juridique ; 1975, tome 1 : 11816 études et commentaires
9
Introduction générale
la CNCC 10 précise qu’il s’agit « d’un intérêt commun à tous les participants du groupe, cet
intérêt étant d’obtenir un enrichissement global supérieur à la somme des profits qu’aurait pu
réaliser chaque société prise isolément »
Selon le site du ministère des finances français le prix de transfert est « tout flux intragroupe tels
que achat et vente de bien et de services, redevances, intérêt garantie, honoraires, cession ou
concession de biens incorporels tels que les marques, brevets, savoir-faire), refacturation des
couts… ».
L’OCDE définit les prix de transfert dans un contexte international comme « les prix auxquels
une entreprise transfère des biens corporels, actifs incorporels, ou rend des services à des
entreprises associées résidentes ou établies dans des états différents ». Deux entreprises sont
dites « associées » lorsque l’une d’entre elles participe directement ou indirectement à la
direction, au contrôle ou au capital de l’autre, ou si « les mêmes personnes participent
directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital».
Cette définition est donnée par l’OCDE, aussi bien dans son rapport « principes applicables en
matière de prix de transfert » que dans son « modèle de conventions fiscales ».
La notion du « prix de transfert » selon l’OCDE est fortement rattachée avec les transactions
internationales c’est-à-dire lorsqu’il y a passage frontalier. Toutefois, étant donné le vide
juridique en Tunisie en matière du prix de transfert, nous avons jugé pertinent de retenir la
définition de l’OCDE pour les transactions intergroupes en Tunisie sans qu’il y’aurait forcément
un passage frontalier.
Le rôle primordial assigné au prix de transfert est la valorisation des transactions intra-groupes.
Toutefois, d’autres rôles peuvent lui être assignés.
L’émergence du prix de transfert résulte du développement des échanges intra-groupes. En effet,
l’accroissement de ces échanges à mis à la charge des dirigeants l’obligation d’optimiser la
performance générale du groupe en utilisant efficacement les prix de transfert.
10
Définition donnée par Daniel OHL et reprise par la CNCC , étude juridiques décembre 1991, page 114
10
Introduction générale
Le groupe favorise toujours les entités les plus performantes et les plus compétitives : il leur
attribue, en priorité, les ressources disponibles pour obtenir le meilleur retour sur investissement.
La méthode de détermination des prix de transfert permet d’optimiser les résultats financiers du
groupe et ce en baissant les coûts de chaque entité le composant. Il en résulte que la pertinence
des choix en matière de prix de transfert maximise le profit de tout le groupe.
Les groupes accordent une importance aux prix de transfert comme moyen d’optimisation fiscale
étant donné que l’intérêt du groupe n’est pas reconnu dans la plupart des législations fiscales.
En effet, lorsque le groupe comprend des filiales qui réalisent des bénéfices et d’autres des
déficits, la tendance serait de transférer une partie des résultats des filiales bénéficiaires vers les
filiales déficitaires.
Le même raisonnement peut être utilisé sur le plan international en transférant une partie des
bénéfices réalisés dans les pays à forte pression fiscale vers les pays à fiscalité allégée ou
privilégiée. L’OCDE a instauré alors le principe de pleine concurrence comme ligne de
démarcation entre optimisation et évasion fiscales. Dans ce cadre, le modèle de l’OCDE a
énoncé dans ses principes la notion « d’intervalle de pleine concurrence », il s’agit d’une marge
11
Introduction générale
de manœuvre légale donnée aux groupes pour choisir le prix qui permette la meilleure
optimisation du bénéfice global.
C’est dans ce cadre que s’inscrit le rapport de l’OCDE de 1979 intitulé «Principes applicables en
matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations
fiscales».Ce rapport est d’envergure internationale. Les états, que ce soit membres ou pas, de
l’OCDE, se sont basés sur les principes édictés par l’OCDE pour définir des dispositifs
règlementaires visant la lutte contre l’évasion fiscale.
Le prix de transfert peut être conçu comme un outil de mise en place des stratégies de
l’entreprise ou encore du groupe.
Des illustrations ont été fournies par des chercheurs comme notamment Dearden 11. Selon cet
auteur, l’entreprise s’approvisionne en interne, soit obligatoirement pour préserver la
confidentialité des processus de fabrication ou en cas d’absence de marché pour le produit à
acheter, soit librement pour sécuriser ses transactions si le marché est considéré instable. Dans
ces situations, le prix de transfert est déterminé par la majoration du cout standard d’une marge.
Toutefois, si l’entreprise peut choisir entre l’approvisionnement interne ou externe ou s’il existe
un marché assez concurrentiel pour le produit, elle peut appliquer le prix du marché à moyen
terme.
Le modèle le plus récent est celui développé par R. Eccles 12. Ce dernier définit trois types de
groupes auxquels correspondent trois types de prix de transfert que nous synthétisons ci –après :
11
Cité par Gervais (1991)
12
Coût de revient de la dernière unité vendue (Voir étude de Henri BOUQUIN dans le contrôle de gestion, 1997.
12
Introduction générale
Les groupes de type « Les prix de transfert seront Cette méthode donnerait une
Conglomérat » avec une fixés sur la base des prix du meilleure vision de la rentabilité des
dominance de la stratégie marché. différentes entités.
financière
Les groupes fortement Les prix de transfert seront Cette méthode permettrait d’avoir
intégrés verticalement (où les fixés sur la base du coût une vision exacte de la rentabilité de
transactions internes sont plus marginal. chaque entité et d’optimiser les
nombreuses). résultats du vendeur final (sur le
marché externe).
Les groupes ayant une Les prix de transfert seront Cette méthode donnerait une
stratégie matricielle (ayant à la fixés sur la base des prix du meilleure vision de la rentabilité des
fois une stratégie d’intégration marché. différentes entités, et assurerait
et de diversification) l’équité envers les responsables
d’unités du groupe.
Ce modèle montre que toute politique de prix de transfert a pour objectif ultime de maximiser les
profits du groupe. Les prix de transfert constituent donc, avant tout, un outil économique et de
gestion, et non une contrainte fiscale uniquement.
13
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Cette première partie du mémoire sera consacrée à l’étude de l’ensemble des facteurs qui influent
sur la mission du commissaire aux comptes en relation avec le prix de transfert. Nous avons alors
choisi de l’entamer avec une étude de son cadre général et réglementaire. En effet, les prix de
transfert sont d’une importance majeure étant donné l’accroissement des transactions réalisées
entre des sociétés du même groupe. Ils doivent, à l’instar des autres prix de facturation pour les
transactions hors groupe, refléter les mêmes conditions du marché libre abstraction faite de tout
lien de dépendance. Et c’est dans ce cadre que s’intègre le principe de pleine concurrence (ou
«Arm Length Principle») adopté par l’OCDE considéré comme principe directeur pour la
détermination des prix de transfert. Nous avons alors exposé les différentes méthodes de
détermination du prix de transfert en relation avec ce principe.
Il en découle que si l’entité décide de passer outre le principe de pleine concurrence dans la
détermination des prix de transfert, Elle risquerait de se faire exposer à des risques dont les
conséquences peuvent peser lourdement à moyen et long terme.
Dans cette première partie, nous allons aussi exposer les différents risques inhérents liés à la
mission d’audit du prix de transfert ainsi que leurs incidences sur la responsabilité encourue par
le commissaire aux comptes.
14
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
En plus de la réglementation fiscale, qui fera l’objet de notre développement qui suit, le prix de
transfert est régi par d’autres textes juridiques aussi importants qui feront aussi l’objet d’un
développement détaillé.
L’article 48 Septies du code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur
les sociétés donne à l’administration la possibilité de sanctionner les entreprises qui manipulent
indument leurs bénéfices imposables en utilisant le prix de transfert et ce lorsque les conditions
suivantes se trouvent réunies :
• Le prix de transfert est sensiblement différent (à la hausse ou à la baisse) des prix de
cession pratiqués par l’entreprise à l’ égard de tiers indépendants ou de celui appliqué par
des entreprises indépendantes dans des transactions similaires.
• Les opérations entre sociétés dépendantes impliquent des dépenses ou charges non
justifiées.
• Il découle de ces opérations une minoration de l’impôt dû par la société.
Par ailleurs, la loi de finance pour l’année 2010 ; dans son article 51prévoit l’application des
mêmes dispositions, ci-dessus citées, aux entreprises étrangères résidentes de pays n’ayant pas
conclu de conventions de non double imposition avec la Tunisie.
Pour l’application de ces dispositions, la charge de preuve en matière du prix de transfert
incombe à l’administration. Elle doit prouver l’existence de prix de transfert qui correspondent
par exemple à des prestations fictives ou excessivement chères en comparaison avec celles qui
serait observées sur le marché dans les mêmes conditions. Ce principe fait l’exception et il est
contraire à la règle générale selon laquelle il incombe au contribuable de prouver que
l’administration a indument majoré sa base d’imposition.
La note commune 33-2010 est la principale source de jurisprudence. Elle est conçue pour
clarifier le régime fiscal du prix de transfert prévu par l’article 51 de la loi n° 2009-71 du 21
15
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
décembre 2009 portant loi de finances pour l’année 2010 qui a prévu des dispositions pour
redresser les bénéfices ayant été transférés indument d’une entité à d’autres apparentées du fait
de l’adoption de conditions et financières qui diffèrent de celles adoptées par des entités
indépendantes. Pour appliquer ce redressement, l’administration doit apporter la preuve que :
• les transactions ayant entraîné le transfert de bénéfices ont lieu entre des entreprises ayant
des liens de dépendance,
• les transactions ont entraîné une minoration de l’impôt dû
L’OCDE a prévu et organisé les plus importantes règles en matière de prix de transfert en
préconisant les principes et méthodes à suivre lors de la valorisation des échanges intra-groupes
transfrontaliers.
L’OCDE fournit un cadre de référence fiscal pour le traitement des opérations intergroupes. Il a
certes focalisé ses recherches et apport normatif pour tous ce qui est transactions
transfrontalières, mais nous considérons que les acquis théoriques de l’OCDE pourraient aussi
être extrapolés aux transactions intergroupes dans le cadre d’un même pays.
Dans son rapport datant de juillet 1995, révisé en 2010, et intitulé « principes applicables en
matière de prix de transfert à l’intention des entreprises et des administrations fiscales », l’OCDE
a identifié les sociétés concernées comme étant les entreprises associées ayant des nationalités
différentes.
Les transactions visées comportent les opérations relatives à l’achat ou la vente de biens
corporels ou incorporels et de services.
Sont considéré des entreprises associées, celles dont l’une participe directement ou
indirectement dans le capital de l’autre ou bien elle participe à sa gestion ou encore celles
soumises à un contrôle commun.
Par ailleurs, nous considérons que les principes de l’OCDE demeurent aussi valables pour les
transactions intergroupes pour les entités apparentées implantées dans le territoire tunisien étant
16
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
donné que le cadre normatif international est riche et pourrait être considéré comme adéquat
pour l’ensemble des transactions sur le territoire Tunisie.
Selon la version juillet 2008, les dispositions du commentaire du modèle des conventions OCDE,
stipulent que les autorités fiscales d’un état contractant peuvent, pour calculer l’impôt payable
par les entreprises associées, rectifier la comptabilité des entreprises si, par suite des relations
spéciales existant entre ces dernières, leurs livres ne font pas apparaitre les bénéfices réels
imposables qu’elles réalisent dans cet état. Il est évidement normal de prévoir une rectification
13
Les principes directeurs du prix de transfert : VANDANDAELE claudine
17
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
en pareil cas. Les dispositions de ce paragraphe ne s’appliquent que lorsque des conditions
spéciales ont été convenues ou imposées entre deux entreprises.
Selon la version de juin 2010, une nouvelle version du rapport de l’OCDE traitant des principes
applicables en matière de prix de transfert est apparue et elle est destinée pour les multinationales
et les administrations fiscales. L’étendue de ce principe a été développée d’avantage.
Selon ces dispositions 14, les administrations fiscales ne doivent pas présumer automatiquement
que des entreprises associées aient essayé de se livrer à des manipulations concernant leurs
bénéfices. Il se peut qu’il soit réellement difficile de déterminer un prix sur le marché libre.
Toutefois, il faudrait garder à l’esprit qu’il serait éventuellement nécessaire d’opérer des
ajustements pour s’aligner avec le principe de pleine concurrence. Ce dernier s’impose quelles
que soient les obligations contractuelles des parties.
Par ailleurs, le projet OCDE présenté lors du sommeil des G20 en 2015 sur l’érosion de la base
d’imposition et le transfert de bénéfices a exposé de nouvelles recommandations, dont la plus
importante est celle d’associer, pour la première fois, la notion de création de valeur au prix de
pleine concurrence. En effet le prix de transfert doit non seulement correspondre au prix de
pleine concurrence mais aussi il doit être synonyme d’une création de valeur ajoutée au sein
même du groupe.
c- Notion de comparaison :
La notion du prix de pleine concurrence se base essentiellement sur la comparaison entre les
conditions d’une opération entre entreprises liées et celles qui seraient observées entre des
entreprises non liées. L’objectif recherché étant de neutraliser l’influence des sociétés mères sur
les transactions intergroupes.
La comparaison implique l’homogénéité des termes à comparer. Autrement dit, il est nécessaire
que la transaction en question soit identifiable et similaire avec d’autres transactions entre parties
indépendantes qui se déroulent dans un cadre juridique, économique et stratégique comparable et
qui encourent le même risque d’activité.
14
Extrait du chapitre 1 traitant du principe de pleine concurrence au niveau du rapport<<principes de l’OCDE applicables en
matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales 2010>>
18
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Par ailleurs, la transaction à comparer peut être une vente ou une prestation de services ou encore
un droit incorporel. Elle peut être aussi avec contrepartie monétaire ou compensée par une autre
prestation.
La convention fiscale internationale de non double imposition consiste en un traité, ratifié par au
moins deux états dont la valeur juridique qui lui est attribuée est supérieure aux lois internes des
pays signataires 15
L’objectif primordial des conventions fiscales de non double imposition est d’éliminer toute
double imposition des contribuables ressortissant des deux états contractants. Elles contiennent
des dispositions permettant de répartir et d’affecter la charge d’impôt aux deux systèmes fiscaux
des états adhérents.
L’avantage recherché par la Tunisie est de mieux sécuriser dans les échanges avec les états
contractants et définir un cadre propice pour les échanges économiques.
En adhérant aux conventions de non double imposition, la Tunisie préserve ainsi son droit à
imposer, offre un dispositif d’incitations fiscales efficaces au profit des étrangers pour instaurer
une meilleure attractivité pour les investisseurs
La Tunisie a adopté durant les deux dernières décennies une politique d’ouverture économique
sur le monde. D’ailleurs, la mise en exécution du plan de redressement structurel et l’ouverture
15
Ce principe est aussi consacré par l’article 2 du code de l’IRPP & de l’IS
19
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
de ses frontières confirment cette orientation. En outre, et depuis mai 1990, la Tunisie a adhéré à
l’organisation mondiale de commerce et a ratifié un accord pour l’instauration d’une zone de
libre-échange avec les pays de l’Union européenne.
La convention est analysée article par article et les analyses sont suivis par le texte intégral s’y
rapportant. Cette analyse est générale et toute difficulté dans l’interprétation par le contribuable
pourrait faire l’objet d’une clarification spécifique par la direction générale des études et
législations fiscales (DGELF) suite à une demande émanant de tout contribuable intéressé.
Il est à rappeler que les modèles des conventions de l’OCDE incitent les pays membres à
interpréter les conventions selon leurs législations et pratiques fiscales internes lorsqu’elles ne
sont pas contradictoires avec les dispositions de la convention.
L’article 475 CSC prévoit l’application de procédures juridiques spécifiques pour le contrôle des
conventions réglementées conclus entre les sociétés appartenant à un même groupe ou ayant des
dirigeants en commun.
D’après cet article, le commissaire aux comptes devrait élaborer un rapport spécial sur ces
conventions qui sera soumis par la suite à l’assemblée générale des actionnaires pour
approbation, cette procédure s’applique pour chacune des sociétés parties à la transaction.
Les conventions se rapportant à des opérations courantes conclus à des conditions normales
restent hors du champ d’application de cet article.
Une analyse supplémentaire est fournie au niveau de la partie contrôle des conventions de la
présente recherche
Pour préserver l’intérêt social des établissements de crédit , la loi no 2001-65 du 10 juillet 2001 a
prévu une procédure réglementaire qui doit s’appliquer aux transactions bancaires, ainsi que les
20
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
autres opérations survenues entre ces établissements et les parties ayant des liens économiques
avec eux. Dans ce cadre, L’article 23 de la loi n° 2001-65 du 10 juillet 2001 relative aux
établissements de crédit a défini les personnes « ayant des liens » avec l’établissement de crédit
comme étant :
• Les actionnaires, leurs conjoints, ascendants et descendants possédant plus de 5% du
capital de l’établissement de crédit.
• Le président-directeur général de l’établissement de crédit, le président du conseil
d’administration, le directeur général, les membres du conseil d’administration, les
directeurs généraux adjoints, les membres du conseil de surveillance, les membres du
directoire et les commissaires aux comptes ainsi que les conjoints des personnes
susvisées, leurs ascendants et leurs descendants,
• Les entreprises dont le capital ou une partie du capital est détenue par les personnes citées
ci-dessus.
• Les entreprises dont le directeur, un membre du conseil d’administration, du directoire ou
du conseil de surveillance est l’une des personnes citées ci-dessus.
• Toute entreprise contrôlée ou sous influence de l’établissement de crédit.
Par ailleurs, l’article 29 de la même loi définit la procédure règlementaire à observer en stipulant
ce qui suit : « Est soumise à l’autorisation préalable du conseil d’administration ou du conseil de
surveillance et à l’approbation de l’assemblée générale des actionnaires, toute convention passée
directement ou indirectement ou par personne interposée entre l’établissement de crédit et les
personnes ayant des liens avec lui telles que visées à l’article 23 de la présente loi. »
Sont exclues de ces dispositions les opérations courantes intervenues dans les conditions
normales telles que définies précédemment.
La loi de la concurrence consacre le principe de la concurrence loyale. Selon ce principe, tous les
échanges commerciaux et économiques doivent se faire à leur juste prix (fair value) qui interdit
explicitement l’application de prix préférentiels pour des parties au détriment des autres. Ce
principe est fortement lié avec le principe de la pleine concurrence instauré par l’OCDE et qui
est considéré comme base des prix de transfert justes.
Cette loi consacre le principe de la libre détermination des prix par le mécanisme de la
concurrence. Elle interdit toutes pratiques qui pourraient altérer la concurrence comme les
ententes entre professionnels, les abus dus à une position dominante, la fixation de tarifs
21
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
minimums ou discriminatoires, le refus de vendre, les ventes conditionnelles. Cette loi consacre
la transparence pour fixer les prix et détermine un cadre légal pour les opérations de
concentration économique qui implique des prix de transferts déterminés selon le principe du
marché concurrentiel.
Selon cette méthode, le prix de pleine concurrence est celui qui serait pratiqué par des entreprises
indépendantes lors d’une transaction identique, et dans des circonstances similaires. Le prix de
pleine concurrence serait alors le prix de marché de référence, après avoir subi des ajustements.
Exemple d’application :
Une société Allemande F vend un produit P à sa filiale italienne S. le produit P est coté
quotidiennement en Italie sur les marchés. Si la filiale S s’approvisionnait sur le marché national
italien, elle achèterait ce produit P à 260 la tonne à un instant t. Le prix de transfert par tonne de
F vers S, doit donc être similaire, soit 260. D’autre part, si la société allemande assure la
livraison du produit et facture à sa filiale un prix rendu, le prix de marché devra donc être corrigé
du cout de transport. Si le transport est estimé à 30par tonne, le prix de transfert par tonne de F
vers S sera donc évalué à 290par tonne (260+30).
Le prix de revente minoré dit aussi « resale minus », est défini comme suit :
Modalités de calcul :
La marge brute est déterminée par référence au marché libre. Elle est égale à la rémunération
brute (%du prix de vente) qu’une entreprise comparable et indépendante aurait perçu pour des
prestations similaires et tenant compte des risques assumés
22
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Marge brute = dépenses d’exploitation + frais sur vente liées aux prestations assumées +
bénéfice « convenable »
Domaine d’application :
Exemple d’application :
Une société Française F distribue en France un produit P pour sa maison mère Allemande A.
Une société française F’, indépendante de la société A, distribue un produit P1 (similaire à P)
pour le compte de la société A. Pour cela, A paie une commission à F’ de 20% sur les ventes. La
principale différence fonctionnelle entre les deux entités est que A assume le risque de garantie
après-vente dans le cadre de la transaction avec l’entreprise F’, alors que c’est F qui assume ce
risque dans l’autre cas. La détermination du prix de transfert du produit P de la société A à la
société F peut, selon la méthode du prix de revente, se déterminer de la manière suivante :
Selon cette méthode, appelée aussi «cost plus», le prix de transfert est déterminé comme suit:
Prix de transfert = prix de revient de l’entreprise associée + marge sur prix de revient
Modalité de calcul :
L’objectif étant de ne pas biaiser le prix par une éventuelle efficience ou inefficience de la
société.
En pratique on pourrait se référer au cout standard complet. Dans ce cas, l’entité ne supportera
aucun risque étant donné que l’ensemble des charges sera refacturé avec une marge.
23
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
La marge sur prix de revient est la rémunération brute (sous forme d’un pourcentage du prix de
revient) qu’une entreprise similaire et indépendante aurait perçue en contre partie des prestations
fournies en tenant compte des risques assumés.
Domaine d’application :
Cette méthode est généralement destinée aux activités industrielles : fabrication, d’assemblage,
transformation… Elle pourrait aussi être utilisée pour les activités de prestations de services qui
entrainent la refacturation de l’ensemble des charges d’exploitation.
Exemple d’application :
Supposons qu’une étude de marché a montré que la marge moyenne sur les trois années
antérieures pratiquée au niveau des transactions sur des produits similaires vendus à des clients
indépendants est de 15%.
Le prix de transfert de la société A vers sa société mère C sera donc déterminé ainsi :
24
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Comme indiqué par son nom, la méthode de partage des profits consiste à partager un profit
entre sociétés du groupe.
Modalité de calcul :
Prix de transfert= Bénéfice Total de l’ensemble des transactions intragroupes réparti entre les
entités du groupe y ayant contribué
Première étape : il faut calculer la somme des bénéfices que les parties ont tiré de l’ensemble des
transactions effectués.
Deuxième étape : le bénéfice ainsi calculé doit être réparti entre les sociétés du groupe, selon leur
contribution aux opérations réalisées en tenant compte des fonctions exercés, des actifs utilisés,
et des risques encourus par chaque entité du groupe.
Domaine d’application :
Exemple d’application :
Un produit fabriqué par une société A avec un prix de revient de 200, et revendu pour un
montant de 2 000 par une société de distribution B dont les couts sont de 600, et le profit global
de cette transaction sera de :
Ce profit global devra être partagé entre A et B en fonction de leurs contributions au profit (en
fonction des faits d’espèces : actifs utilisés, charges d’exploitation, nombre d’employés, etc. Une
clé combinant ces différentes grandeurs pourra être utilisée). Si on retient le critère des charges
d’exploitations, on aboutit aux calculs suivants:
25
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Cette méthode est basée sur le profit net qu’auraient réalisé des entreprises similaires ou
comparables. Elle est considérée comme la méthode de référence, car elle converge parfaitement
avec les directives de l’OCDE.
Modalités de calcul :
La marge nette correspond à celle qui aurait réalisé des entreprises indépendantes lors de
transactions comparables et dans des conditions normales.
Domaine d’application :
Exemple d’application :
I est un distributeur Italien. Il vend des marchandises achetées à sa société mère M Française,
Son chiffre d’affaire est de 10 000 (provenant exclusivement des marchandises achetées auprès
de la société mère M). Les couts d’exploitation sont de 2 500 (25% du chiffre d’affaires). Les
entités comparables font une marge nette de pleine concurrence égale à 10%. Le prix de transfert
est calculé comme suit :
26
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Selon l’ISA 315, l’auditeur doit acquérir une connaissance de l’entité et de son environnement, y
compris de son contrôle interne, qui soit suffisante pour lui permettre d’identifier et d’évaluer le
risque que les états financiers contiennent des anomalies significatives
Le risque d’une mission d’audit est le risque que le professionnel exprime une opinion
inappropriée alors que les états financiers comportent des anomalies significatives 16 . Le risque
d’audit est composé des éléments suivants :
1. Risque Inhérent (RI) : Le risque inhérent (ou risque général de l'entreprise) est le risque
qu'une erreur significative se produise compte tenu des particularités de l'entreprise auditée,
de ses activités, de son environnement, de la nature de ses comptes et de ses opérations.
2. Risque lié au Contrôle (RLC) : lié à l'existence d'erreurs significatives dans les états
financiers d'une entreprise, dues à l’absence de procédures de contrôle interne efficaces ou à
une inexistence de procédures.
3. Risque de Non Détection (RND) : lié à l'existence d'erreurs significatives dans les états
financiers d'une entreprise, dues à l'incapacité de l'auditeur à les détecter en supposant que
l'environnement externe et l'environnement interne de l'entreprise aient fonctionné de
manière efficace pour empêcher l'insertion d'erreurs dans les états financiers).
Le risque inhérent est alors une composante importante du risque d’audit que nous allons essayer
d’éclaircir dans sa relation avec le prix de transfert. Nous allons alors examiner les différents
types de ces risques inhérents en mettant en exergue leur origines ce qui permettra au
commissaire aux comptes d’effectuer son audit en connaissance de cause de l’envergure des prix
de transfert et son impact sur le risque inhérent global de la mission.
Au cours de notre recherche, nous avons pu constater que le prix de transfert génère un risque
inhérent d’audit très important. C’est-à-dire même si le commissaire aux comptes met en œuvre
tous les tests d’audit appropriés (test de procédure et contrôle substantifs) il risquera d’exprimer
une opinion inappropriée à cause des spécificités même du prix de transfert.
16
Hechmiabdelwahed: Résumé du guide IFAC pour l’utilisation des normes ISA pour l’audit des PME – Page5
27
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Le risque inhérent trouve ses origines dans l’ambigüité et l’insuffisance des textes de loi qui
régissent le prix de transfert en Tunisie, dans l’environnement de l’entité, dans l’entité en tant
que telle ainsi que dans les limites opposées aux commissaires aux comptes pour auditer le prix
de transfert dans les groupes.
L’examen du cadre réglementaire des prix de transfert dans le contexte tunisien, nous amène à
constater qu’il n’y a aucune définition apportée à cette notion. Même la définition prévue par
l’OCDE dans son rapport « principes applicables en matière de prix de transfert » et à travers
son« modèle de conventions fiscales »17, elle présente quelques insuffisances, à savoir :
• L’OCDE définit le prix de transfert dans un contexte international, ainsi, l’expression « prix
de transfert » correspond aux prix appliqués entre entités appartenant au même groupe et
résidentes d'États différents.
• Selon cette définition, le terme « prix de transfert » est toujours associé de qualitatif
«économique»18. Il est abordé d’un point de vue économique plutôt que juridique.
Bien que l’article 51 de la loi de finances 2010 a instauré des règles spécifiques aux prix de
transfert en Tunisie, Elle demeure insuffisante dans la mesure où elle est restée muette quant aux
méthodes de calcul et de détermination du prix de transfert pouvant être appliquées entre les
entreprises associées.
17
L’OCDE définit les prix de transfert comme étant "les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs
incorporels, ou rend des services à des entreprises associés
18PELLEFIGUE, Julien, dans une thèse de doctorat en sciences économiques soutenue le 13 septembre 2012 sous le titre
"théorie économique de la réglementation des prix de transfert", a utilisé les termes « prix de transfert économique » et «
prix de transfert monétaire ».
28
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
En plus, les conventions de non double imposition signées par la Tunisie n’ont pas précisé de
méthodes applicables pour la détermination des prix de transfert. Les textes de droit des sociétés
n’ont pas présenté de méthodes précises non plus.
Le législateur tunisien, à travers l’article 51 de la loi de finances 2010 n’a pas précisé
explicitement des exigences spécifiques en matière de documentation des prix de transfert. 19Les
dispositions en vigueur prévoient uniquement des obligations d’ordre général ayant des liens
indirects avec les prix de transfert, à savoir l’article 59 du code de l’IRPP 20et de l’IS et les
articles 6 et 7 du CDPF 21.
La mise en place d’une documentation des prix de transfert est devenue un « Must » 22 non
seulement aux grandes multinationales mais aussi bien aux PME.
La documentation des prix de transfert dans le contexte tunisien, reste à notre avis insuffisante
voir même absente et gagne à faire l’objet d’un texte de loi spécifique.
En France et avec l’apparition des nouvelles règles apportées par la loi de finances rectificative
de2009, une obligation formelle de documentation spécifique des prix de transfert a été instaurée
et ce en plus des obligations générales de justification des charges et des prix intra-groupe
présentés dans le cadre du CGI.
Un prix de transfert mal documenté génère inévitablement un risque fiscal accru. Les sanctions
en cas d’une documentation inexistante ou insuffisante peuvent varier du renversement de la
charge de la preuve au rejet de la comptabilité.
Pour évaluer le risque inhérent éventuel généré par une documentation fiscale insuffisante, le
commissaire aux comptes doit voir si l’entité auditée est entrain de consigner par écrit, les
démarches et procédures qu’elle a entrepris pour se conformer au principe de pleine concurrence
en matière de prix de transfert.
19
Yamen YAICH, "La gestion des risques fiscaux relatifs au prix de transfert au sein des entreprises liées implantées en Tunisie
en matière d’impôts directs", P 114, mémoire pour l’obtention du diplôme national d’expert comptable, Tunisie, 2012.
20Article 59 § VI du code de l’IRPP et de l’IS : "Les personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés doivent joindre à
leurs déclarations de l'impôt sur les sociétés un état selon un modèle établi par l'administration de leurs participations
dépassant 10% du capital d'autres sociétés et comportant notamment, la raison sociale des sociétés, leur siège social, leur
matricule fiscal et le taux de participation dans le capital desdites sociétés".
21Article 6 du CDPF : "L'administration fiscale…, demander tous renseignements, éclaircissements ou justifications
concernant la situation fiscale du contribuable…notamment de comparaisons avec des données relatives à des
exploitations, des sources de revenu ou des opérations similaires".
Article 7 du CDPF : "L'administration fiscale peut demander…des états détaillés de leur patrimoine et des éléments de
leur train…".
22Leslie Van, BEN BRADEN, " Prix de transfert : hier, méconnus et dépréciés, aujourd'hui, célèbres mais redoutés !", article
Une documentation exhaustive fournit une assurance raisonnable pour le commissaire aux
comptes quant à la conformité du prix de transfert à la réglementation en vigueur.
Dans ce cadre, La loi de finance pour la gestion 2010 a rendu obligatoire la documentation du
prix de transfert. Toutefois cette obligation est restée ambigüe et n’a pas été suivi par des
clarifications supplémentaires au niveau des notes communes.
Les cadres normatifs et comptables disponibles sont uniquement ceux existant au niveau de la
norme comptable tunisienne NCT 39 «informations sur les parties liées » et la norme
internationale d’audit ISA 550 « parties liées ». Toutefois ces normes sont d’ordre général et
traitent de la règlementation des parties liées sans aborder spécifiquement la problématique du
prix de transfert. En effet, on remarque clairement que ces normes n’ont pas clarifié le concept
de prix de transfert ni défini des procédures de documentation qui sont deux prérogatives
importantes prévues par l’OCDE.
Ces normes se sont contentées par la définition du cadre général du prix de transfert sans préciser
par exemples les obligations en matière d’informations à fournir ou la documentation à fournir
bien que la norme comptable NCT 39 a adopté les trois méthodes traditionnelles préconisées par
l’OCDE 23, et a expressément disposé dans son §11 que « La comptabilisation d'un transfert de
ressources est normalement basée sur le prix arrêté par les parties, entre des parties non liées,
le prix est un prix dans un cadre de concurrence normale. Les parties liées peuvent avoir un
degré de flexibilité dans l'établissement du prix que l'on ne rencontre pas dans les transactions
entre parties non liées ».
Pour les groupes de sociétés exerçant en Tunisie, La législation fiscale tunisienne gagnerait à
s’inspirer des exemples des pays membres de l’OCDE comme la France pour définir et mettre en
place les procédures de détermination et de documentation des prix de transfert .
23
NCT 39 §12 : “Plusieurs méthodes sont utilisées pour fixer les prix des transactions entre Parties liées
NCT 39 - §13:” Une façon de déterminer le prix d’une transaction entre des parties liées est de recourir à la méthode du prix
comparable non contrôlé »
NCT 39 - §14 : « Lorsque les biens sont transférés entre des parties liées avant leur vente à une partie indépendante, la méthode
du prix de revente est souvent utilisé »
NCT 39 - §15 : « Une autre approche est la méthode du cout majoré
30
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
L’acte anormal de gestion est un acte ou une opération qui se traduit par une écriture comptable
affectant le bénéfice imposable que l’administration entend écarter comme étrangère ou contraire
à l’intérêt de l’entreprise 24.
♦ L’octroi d’un avantage à une autre personne, physique ou morale par la stipulation d’un
prix et de manière générale de conditions anormales
♦ L’absence de contrepartie à l’octroi de cet avantage, ce qui démontre que l’acte est étranger
à l’intérêt de l’entreprise
La théorie de l’acte anormal de gestion ne résulte pas d’un texte légal mais c’est un concept
jurisprudentiel trouvant ses fondements à la fois en droit fiscal et en droit des sociétés.
L’article 12 du code de l’IRPP et l’IS, dispose que : « le résultat net est établi après déduction de
toutes charges nécessitées par l’exploitation».
D’après ce qui précède, Il s’avère que l’acte anormal de gestion est principalement un acte qui
ne s’intègre pas dans le cadre de l’intérêt social.
Dans le cadre de son activité, l’entreprise doit supporter des charges liées à son exploitation qui
s’intègrent dans le cadre de son intérêt. Il en résulte qu’une décision non conforme à l’intérêt
social pourrait engendrer une minoration de son actif net, est sans doute un acte anormal de
gestion.
Dans ce sens, l’article 14 du code de l’IRPP et de l’IS exclut des charges déductibles, les
dépenses dites « somptuaires » c’est-à-dire n’entrent pas dans le cadre de l’intérêt social.
Par ailleurs, l’article 11 du code de l’IRPP et l’IS en stipulant que : « Le résultat net est
déterminé d’après les résultats d’ensemble des opérations de toute nature », il a élargi le champ
d’application de la théorie de l’acte anormal de gestion qui pourrait être évoquée par exemple en
24
CE27-07-1984 n°34.588 : RJF 1984 n°1233
31
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
cas de renonciation à des recettes et généralement à tout type de profit et trouve ainsi son
fondement légal en droit fiscal tunisien.
En France, la loi prévoit que, pour la détermination des bénéfices imposables, les frais et charges
ne sont admis en déduction que dans la mesure où ils sont exposés dans l’intérêt de l’exploitation
ou dans le cadre d’une gestion commerciale normale. 25
La théorie de l’acte anormal de gestion est une notion qui trouve ses origines dans le droit des
sociétés et dont l’objectif principal est de préserver les intérêts des minoritaires et des autres
actionnaires dans les sociétés de capitaux.
En droit des sociétés, les actes qui ne sont pas conformes à l’intérêt social sont sanctionnés par
la loi. En effet, dans les SARL, l’article 116 du CSC interdit expressément la conclusion de
certains types de conventions qui sont contraires à l’intérêt social de la société et consacre la
nullité des conventions conclues nonobstant cette interdiction 26.
Le même traitement est aussi prévu pour les sociétés anonymes (SA), en effet, l’article 200 et
252 du CSC prévoit l’interdiction de pareille convention lorsque la société est administrée
respectivement par un conseil d’administration ou selon le mode directoire et conseil de
surveillance 27.
Une distinction devrait avoir lieu entre les actes anormaux de gestion et le transfert des bénéfices
sur le plan juridique 28 . Ces deux principes peuvent avoir des effets contradictoires sur une
transaction entre entités liées c’est le cas d’une transaction avec une entité située dans un paradis
fiscal, dans ce cas le transfert de bénéfice dûment documenté et justifié existe, mais peut t- on le
25
Francis, LEFEBVRE, "Les impôts dans les affaires internationales", P 759.
26
Cet article 116 du CSC interdit, en effet, à la société d'accorder des emprunts à un gérant sous quelque forme que ce soit ainsi
que de cautionner ou d'avaliser ses engagements envers les tiers. L'interdiction s'étend aux représentants légaux des personnes
morales associées ainsi qu'aux conjoints, ascendants et descendants des personnes visées ci-dessus.
27
Article 200 Al 6 (nouveau) ajoutée par la loi n° 2005-65 du 27 juillet 2005 complétant et modifiant le code des sociétés
commerciales, dispose qu’il est interdit au président ou le directeur général, les directeurs généraux adjoints et les membres du
conseil d'administration, et à leurs conjoints ascendants, descendants et à toute personne interposées pour le compte de l’un d’eux
de solliciter, sous quelque forme que ce soit, des emprunts auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert, en
compte courant ou autre, ainsi que de faire cautionner ou avaliser par elle leurs engagements envers les tiers, et ce sous peine de
nullité du contrat.
Aussi, l’article 252 du CSC, dispose que les dispositions de l’article 200 du CSC sont applicables aux dispositions conclues entre
la société et les membres du directoire, le directeur général unique ou les membres du conseil de surveillance.
28
Yamen YAICH, "La gestion des risques fiscaux relatifs au prix de transfert au sein des entreprises liées implantées en Tunisie
en matière d’impôts directs", P 52, mémoire pour l’obtention du diplôme national d’expert comptable-2011
32
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
qualifier comme acte anormal ? Dans tous les cas l'administration fiscale pourrait en utiliser
pour motiver ses redressements. Dans d’autres cas, ces deux notions peuvent être
complémentaires plutôt que contradictoires. Par exemple, les contrôleurs peuvent s'appuyer sur
la théorie des actes anormaux de gestion alors qu’il pourrait aussi évoquer des prix de transfert
non fondés.
Par ailleurs, dans un même groupe de sociétés, les relations entre sociétés mères et filiales
comprennent bien souvent l’octroi de subventions, d’aides, de prêts sans intérêts, d’abandons de
créances, etc.
« Lorsqu’il s’agit, non pas de cession d’éléments d’actifs, mais de ventes de marchandises ou de
prestations de services, il n’est pas anormal pour une société de pratiquer, à l’égard d’une
filiale dont elle détient la quasi-totalité du capital, une politique de prix préférentiels 29».
Cette politique ne doit constituer nullement un acte anormal de gestion tant que ces prix ont été
fixés dans l’intérêt global du groupe toutefois elle pourrait constituer une infraction à la règle
prévue par l’article 51 de la loi de finances pour l’année 2010 puisque ces prix préférentiels sont
obligatoirement différents des prix de pleine concurrence.
Les actes normaux de gestion génèrent un risque inhérent fiscal important pour le commissaire
aux comptes. En effet, lorsqu’un acte est qualifié d’anormal par l’administration fiscale il
pourrait générer des redressements importants. Le problème pourrait se poser si le commissaire
aux comptes, en exerçant son jugement professionnel, le considérait comme normal, dans ce cas
il risquera de donner une opinion d’audit inappropriée.
29
YAICH (R.), « Théorie fiscale », Editions Raouf YAICH.
30
GOOSSENS (M.A.), 1998, « Définition Prix de Transfert », Mémoire pour l’obtention du diplôme de DESS de droit fiscal et
douanier, Faculté de Droit des Sciences Economiques et de Gestion de Rouen, P
33
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Le risque inhérent juridique est aussi important étant donné que les actes anormaux de gestion
sont toujours liés aux abus de biens sociaux, d’où un risque inhérent qui touche directement la
responsabilité pénale du commissaire aux comptes.
L’abus des biens sociaux est un délit qui consiste à ce qu’un dirigeant de société commerciale ou
civile, utilise en connaissance de cause les biens, les crédits, les pouvoirs ou les voix de la
société à des fins personnelles directes ou indirectes 31.
L’infraction d’abus de biens sociaux est décrite dans le code des sociétés commerciales en
Tunisie, dans les articles 146 §3 et 223 §4, elle incrimine l’infraction commise par les dirigeants,
dans le cadre des SARL et des SA, de faire « de biens ou crédit de la société, un usage qu’ils
savaient contraire à l’intérêt de celle-ci, dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre
société ou une autre entreprise dans laquelle ils étaient intéressées directement ou indirectement,
ou ils font usage de pouvoir qu’ils détenaient ou des voix qui étaient en leur possession et qu’ils
savaient contraire à l’intérêt de la société dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre
société ou une autre entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement ».
Ainsi, pour que l’abus des biens sociaux soit concrétisé et que la responsabilité des dirigeants
soit engagée, deux éléments doivent impérativement se présenter :
• L’usage des biens et crédit doit être contraire à l’intérêt social ;
• L’usage des biens et crédit doit être utilisé dans le besoin personnel des dirigeants ;
32
L’article 146 et 223 du CSC prévoient, à l’encontre des gérants des SARL et des dirigeant des
SA des peines corporelles d’emprisonnement et des amendes.
Le prix de transfert risque d’être validé par le commissaire aux comptes alors qu’il pourrait
dissimuler un abus de biens sociaux suite à une application erronée. Ce risque inhérent est
toujours présent même en cas de mise en œuvre de toutes les procédures d’audit nécessaires.
31
Abus des biens sociaux", juillet 2010 encyclopédie libre : https://fr.wikipedia.org/
32
Article 146 alinéa 3 du CSC : "Sont punis d'un emprisonnement d'un an à 5 ans et d'une amende de 500 à 5.000 dinars : 3-
(…) ou qui, de mauvaise foi ont fait, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt de celle-ci,
dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre société ou une autre entreprise dans laquelle ils étaient intéressés
directement ou indirectement, ou ils font usage de pouvoirs qu'ils détenaient ou des voix qui étaient en leur possession et qu'ils
savaient contraire à l'intérêt de la société dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre société ou une autre entreprise
dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement".
Article 223 alinéas 3 et 4 du CSC : "Sont punis d'une peine d'emprisonnement d'un an au moins et de cinq ans au plus et d'une
amende de deux mille à dix mille dinars ou de l'une de ces deux peines seulement : (…)
3- Les membres du conseil d'administration qui, de mauvaise foi, ont fait des biens ou du crédit de la société un usage qu'ils
savaient contraire à l'intérêt de celle-ci dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre société dans laquelle ils étaient
intéressés directement ou indirectement
4- les membres du conseil d'administration qui, de mauvaise foi, ont fait des pouvoirs qu'ils possédaient ou des voix dont ils
disposaient, un usage qu'ils savaient contraire aux intérêts de la société dans un dessein personnel ou pour favoriser une autre
société dans laquelle ils étaient intéressés d'une manière quelconque".
34
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Ces risques inhérents sont en relation directe avec l’environnement externe économique et
financier dans lequel évolue l’entité auditée.
Il s’agit de pressions extérieures sur l’entité qui peuvent finir par générer des anomalies
significatives au niveau des états financiers.
Le prix de transfert est considéré comme l’un des principaux moyens utilisés pour réaliser un
transfert de bénéfices à l’étranger et ce dans le cadre de transactions internationales.
En effet, les entreprises disposent d’ «une certaine marge d’appréciation dans la fixation des prix
de transfert internes entre société d’un même groupe ce qui peut conduire à déplacer une partie
des bénéfices là où il sera le moins taxé». 33Ces bénéfices artificiels ne reflètent pas la réalité
économique et commerciale des transactions y afférentes et ne contribuent pas à la création de
valeur au sein du groupe comme le qualifie l’action 10 du rapport de l’OCDE présenté au G20 en
2015. Il en découle que cette manipulation du prix de transfert peut engendrer un risque fiscal
significatif. La sanction qui résulte d’une telle manœuvre est la réintégration de la charge
comptabilisée par l’entité sans qu’il y ait contrepartie effective et réelle pour elle ou encore
l’imposition des bénéfices indument transférés à d’autres entités liées.
En Tunisie, la loi de finances pour la gestion de l’année 2010 au niveau de l’article 51, est restée
muette quant aux méthodes de transfert de bénéfice qui peuvent exister. L’éclaircissement a été
fourni par la note commune n°33/2010 qui est venue pour clarifier ledit article en présentant une
liste indicative des manœuvres pouvant induire un transfert de bénéfices à savoir :
33
YAICH Raouf, 2005, "la concurrence fiscale et l’entreprise", Revue comptable et financière n°68.1
35
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
D’après l’ISA 315 § 11 : « L’auditeur doit acquérir une compréhension des facteurs sectoriels et
réglementaires, ainsi que des autres facteurs externes, de la nature de l’entité, y compris ses
activités, des objectifs et des stratégies de l’entité ainsi que des risques d’entreprise connexes
pouvant donner lieu à des anomalies significatives dans les états financiers; »
Ainsi, le commissaire aux comptes doit procéder à une appréciation et une compréhension du
marché dans lequel évolue l’entité auditée. Il évalue alors le risque du marché et la probabilité
qu’il génère des anomalies significatives au niveau des états financiers. Le risque de marché se
présente lorsque les conditions de vente deviennent défavorables qui pourrait être causé soit par
une concurrence accrue sur le marché, soit par une demande défavorable conditionnée par le
36
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
marché, ou l’incapacité de développer des marchés ou de positionner des produits pour cibler
une clientèle.
Afin de mettre en exergue le risque inhérent provenant du risque de marché, le commissaire aux
comptes devrait se poser les questions suivantes :
Le risque de change est un risque inhérent à impact important. Le risque de change est aggravé
par une fluctuation significative du cours de change. C’est le cas de notre monnaie nationale « le
Dinars » qui connait une période de glissement importante par rapport à l’Euro et au Dollar, Il
s’en suit que cette fluctuation importante génère un risque inhérent à deux niveau :
Le commissaire aux comptes doit alors prêter l’attention nécessaire en cas de fluctuations
importantes des taux de change et doit apprécier surtout le risque d’anomalies significatives
qu’elles peuvent engendrer sur les états financiers.
37
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Le commissaire aux comptes qui intervient dans le cadre d’une mission d’audit de société du
groupe, trouve des difficultés pour vérifier et valider les prix de transfert. Ces difficultés
proviennent entre autre, des conflits qui pourraient éventuellement exister entre l’intérêt de
l’entité et l’intérêt du groupe.
Le groupe de sociétés ne jouit pas de personnalité morale. Il en découle que chaque société
membre du groupe a une autonomie juridique qu’elle doit assumer pleinement, même en
l’existence d’une forte dépendance financière et économique vis-à-vis de la société qui contrôle
ses décisions. 34 Cela implique que l’intérêt social est la seule référence pour gérer l’entreprise.
Toutefois, et sur le plan pratique, l’application de tel principe s’avère difficile et met les
dirigeants dans une situation paradoxale. En effet, ils doivent d’une part respecter l’intérêt social
et d’autre part, satisfaire en même temps l’intérêt global du groupe.
Selon une approche purement juridique, seules les transactions intra-groupes réalisées en
privilégiant l’intérêt social se trouvent fondées. Ceci a été consacré par l’article 474 du CSC qui,
dans le cadre d’une opération financière intra-groupe exige que l’intérêt social soit préservé, et
que l’opération ne serve pas les intérêts personnels des dirigeants des sociétés concernées, 35 et
par l’article 476 du CSC qui stipule qu’un créancier d’une société appartenant à un groupe de
société ne peut réclamer le paiement de ses créances qu’à la société débitrice. Même si la mère
détient 100% du capital de filiale ne suffit pas, en soi, pour permettre aux créanciers de la société
contrôlée de poursuivre le paiement de leur créance envers la filiale auprès de sa mère pour la
simple raison que les deux sociétés ont des personnalités morales distinctes.
Selon une approche économique qui tient en compte l’importance des liens économiques et
capitalistiques existants entre les sociétés du même groupe, la jurisprudence française est
intervenue, en admettant qu’un intérêt commun de l’ensemble des sociétés du groupe permet de
justifier certains actes conclus entre des sociétés liées pour favoriser l’intérêt du groupe au
34SAAD, Slim, (2006), « Caractéristiques des opérations intra-groupe et diligences des commissaires aux comptes
consolidés », Mémoire pour l’obtention du diplôme national d’expert comptable en Tunisie, P 24.
35Article 474 du CSC : "…Ces opérations ne peuvent être effectuées qu'aux conditions suivantes :
- que l'opération financière soit normale et n'engendre pas de difficultés pour la partie qui l'a effectuée,
- que l'opération soit justifiée par un besoin effectif pour la société concernée et qu'elle ne résulte pas de
considérations fiscales. Que l'opération comporte une contrepartie effective ou prévisible pour la société qui l'a
effectuée, que l'opération ne vise pas la réalisation d'objectifs personnels pour les dirigeants de droit ou de fait des
sociétés concernées."
38
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
détriment de l’intérêt social 36. Toutefois, la jurisprudence tunisienne reste muette et consacre
ainsi l’approche juridique conservatrice qui donne la primauté à l’intérêt social
De ce fait, on peut conclure, que la mission du commissaire aux comptes s’avère de plus en plus
complexe dans un contexte de groupe notamment en matière d’appréciation de la régularité des
opérations intra-groupes. Cette complexité trouve son origine dans ce paradoxe
incompréhensible entre une approche juridique qui favorise l’intérêt social au détriment de
l’intérêt du groupe et une approche économique qui justifie certaines transactions par rapport à
l’intérêt du groupe sans qu’il soit besoin d’examiner sa conformité à l’intérêt social.
Pour maitriser les risques liés aux prix de transfert, l’OCDE a recommandé le recours au
principe de pleine concurrence qui exige que le prix de transfert pratiqué pour des transactions
entre sociétés liées soit déterminé par référence aux prix pratiqués par des entreprises
indépendantes.
Toutefois, le principe de pleine concurrence présente plusieurs contraintes qui compliquent sa
mise en œuvre à savoir :
- Difficultés de trouver des transactions comparables réalisées par des entreprises indépendantes
opérant dans des circonstances similaires,
- Difficultés pour absence de comptabilité analytique,
- Difficultés dues à la confidentialité des informations à obtenir pour évaluer les transactions sur
le marché libre.
Le principe de pleine concurrence implique la recherche d’un prix qui aurait été appliqué si la
transaction est réalisée par des entreprises indépendantes opérant dans des circonstances
similaires. Toutefois, le principe de pleine concurrence se trouve difficile à appliquer,
notamment dans le cas de groupes multinationaux produisant de façon intégrée des biens
36Arrêt Rozenblum du 4 février 1985 selon lequel la cour de cassation Française a jugé pour la première fois que
l’existence du groupe pouvait légitimer un acte caractéristique d’abus de biens sociaux. C'est-à-dire une action, qui en
dehors de l’appartenance de la société au groupe, aurait été illégitime et illicite.
39
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
hautement spécialisés, traitant des biens incorporels uniques ou fournissant des services
spécialisés 37.
Pour s’assurer que le prix de transfert est conforme avec le principe de pleine concurrence, il est
nécessaire d’avoir en place un système de comptabilité analytique qui permettra de déterminer le
cout de revient avec précision et d’apprécier le principe de pleine concurrence aisément sur des
bases arithmétiques. Toutefois, la mise en place d’un système de comptabilité analytique n’est
pas toujours évidente vue la contrainte avantage-coût au niveau des sociétés. Par ailleurs,
l’absence d’une comptabilité analytique rend la détermination d’un prix de transfert conforme au
prix de pleine concurrence une tâche assez difficile.
Le non immixtion à la gestion imposée au commissaire aux comptes dans le cadre de son audit
des états financiers pourrait constituer une limitation dans l’étendue des travaux d’audit. La
problématique qui se pose à ce niveau est la suivante : dans quelle mesure le commissaire aux
comptes peut-il s’assurer de la normalité des méthodes de détermination des prix de transfert
sans avoir à s’immiscer dans la gestion de l’entreprise auditée ?
37Rapport de l’OCDE : "principes applicables en matière des prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales
et des administrations fiscales", Chapitre I – Principe de pleine concurrence, PP 36.
38Rapport de l’OCDE : "principes applicables en matière des prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales
40
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Le principe de non immixtion à la gestion opposé au commissaire aux comptes trouve est
instauré par le droit des sociétés au niveau de l’article 266 du CSC qui stipule dans son alinéa
3qu’ « À l’exclusion de toute immixtion dans la gestion de la société, le ou les commissaires aux
comptes opèrent toutes vérifications et tous contrôles qu’ils jugent opportuns ».
Cette immixtion peut revêtir l’une des formes suivantes :
• intervenir carrément au niveau de la prise de décision et la direction de l’entreprise,
• effectuer un acte quelconque de gestion ;
• apprécier l’opportunité des actes de gestion qui ont été passés par les dirigeants ;
Pour le cas de l’audit du prix de transfert, nous pensons que la ligne de démarcation entre la non
immixtion à la gestion est l’appréciation de l’opportunité des actes est difficile à établir.
3-4-2-2- Application du principe de non immixtion dans le cadre de l’audit des prix de
transfert
Dans certains cas, le commissaire aux comptes peut fleurer l’immixtion dans la gestion. L’audit
des conventions conclues avec d’autres sociétés liées en est un exemple type. En effet, le
commissaire aux comptes doit vérifier si une telle convention est courante et si elle est conclue
dans des conditions normales, cela lui impose d’être bien informé sur les opérations habituelles
de la société dans le cadre de son activité pour apprécier lesdites conventions et par conséquent
apprécier la gestion de la société auditée en contravention avec le principe de non immixtion à la
gestion. Le cas se présente aussi dans le cadre de la procédure d’alerte que le commissaire aux
comptes est tenu de déclencher si un acte de gestion, dont notamment une transaction intra-
groupe, est de nature à menacer l’activité de l’entreprise ou à compromettre la continuité de son
exploitation.
L’appréciation de la normalité des transactions intra-groupes nécessite un examen des méthodes
de valorisation y afférentes pour s’assurer que ces transactions se sont déroulées dans des
conditions normales et dans l’intérêt de la société auditée.
Toutefois, la détermination des prix de transfert, reste purement une affaire de gestion, ce qui
donne la liberté aux entreprises de les fixer de la manière qu’elles jugent appropriée. Cette vision
est bien consacrée par la loi 39 qui, dans l’objectif d’appuyer la liberté de gestion des entreprises,
39 Article 266 du CSC : " À l’exclusion de toute immixtion dans la gestion de la société, le ou les commissaires
aux comptes opèrent toutes vérifications et tous contrôles qu’ils jugent opportuns"
41
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
limite le champ d’intervention du commissaire aux comptes et lui impose de ne pas s’immiscer
dans la gestion. Ce constat aggrave le risque inhérent d’audit, en effet le commissaire aux
comptes risque de ne pas déceler une manipulation des prix de transfert ce qui pourrait générer
une anomalie significative suite à une limitation légale de l’étendu de ses travaux imposée par le
principe de non immixtion dans la gestion.
Le commissaire aux comptes est tenu de contrôler la sincérité et la régularité des comptes publiés
par une société en exprimant une opinion sur les états financiers audités tout en assumant ses
responsabilités dans ce sens envers les utilisateurs des états financiers.
Dans ce cadre s’intègre l’article 4 de la loi n° 88-108 du 18 août 1988 ayant instauré pour la
première fois le concept de la responsabilité du commissaire aux comptes en cas de manquement
à ses obligations, et stipule expressément que « Les personnes inscrites au tableau de l’ordre
assument la responsabilité de leur travaux ».
Dans le cas spécifique du prix de transfert, le non respect du principe de pleine concurrence par
les entités auditées aurait un effet sur les responsabilités civile, pénale et disciplinaire du
commissaire aux comptes qui pourraient être invoquées en cas de non accomplissement de
certaines diligences et non respect de l’éthique professionnelle.
La responsabilité civile est instaurée par les articles 82 et 83 du COC 40, qui considèrent que toute
faute commise par une personne est susceptible d’être sanctionnée civilement si elle a causé un
40Article 82 du COC : "Tout fait quelconque de l'homme qui, sans l'autorité de la loi, cause sciemment et volontairement à
autrui un dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer le dommage résultant de son fait, lorsqu'il est établi
que ce fait en est la cause directe. Toute stipulation contraire est sans effet."
Article 83 du COC : "Chacun est responsable du dommage moral ou matériel qu'il a causé, non seulement par son fait, mais
par sa faute, lorsqu'il est établi que cette faute en est la cause directe. Toute stipulation contraire est sans effet…"
42
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
dommage en liaison directe avec elle. Ce qui signifie que cette responsabilité est fondée sur trois
composantes, à savoir, la faute, le préjudice et le lien de causalité entre la faute et le préjudice.
Cette règle de droit commun pourrait être extrapolée pour le cadre spécifique des mandats de
commissariat aux comptes.
Par ailleurs, le code des sociétés commerciales 41 , évoque la responsabilité civile du commissaire
aux comptes qui pourrait être engagée dans des conditions plus spécifiques.
La responsabilité civile pourrait être engagée soit pour des fautes commises directement par le
commissaire aux comptes soit pour des fautes commises par la direction de la société.
Lorsque le commissaire aux comptes commets des erreurs lors de l’exercice de ses fonctions, il
serait tenu tant à l’égard de la société qu’à l’égard des utilisateurs des états financiers. A titre
d’exemple de fautes, nous pourrions citer:
• Non accomplissement de certaines diligences professionnelles ;
• Non information aux associés d’une irrégularité quelconque ;
• Défaut de présentation du rapport à l’assemblée générale.
D’après l’article 272 du CSC, Le ou les commissaires aux comptes deviennent responsables
solidairement avec les membres du conseil d’administration ou du directoire des fautes
commises par ces derniers si ils ne les mentionnent pas aux actionnaires bien qu’ils en ont eu
connaissance.
D’une manière générale, pour qu'elle soit engagée, la responsabilité pénale suppose la réunion de
ces trois facteurs :
41Article 272 du CSC : "Les commissaires aux comptes sont responsables tant à l'égard de la société qu'à l'égard des tiers
des conséquences dommageables des négligences et fautes par eux commises dans l'exercice de leurs fonctions. Ils ne
sont pas civilement responsables des infractions commises par les membres du conseil d'administration ou les membres
du directoire sauf si en ayant eu connaissance, ils ne les ont pas révélés dans leur rapport à l'assemblée générale.
43
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
La responsabilité pénale du commissaire aux comptes a été évoquée par l’article 271 du CSC qui
déclare expressément que « Est puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de
mille deux cents à cinq mille dinars ou de l'une de ces deux peines seulement, tout commissaire
aux comptes qui aura sciemment donné ou confirmé des informations mensongères sur la
situation de la société ou qui n'aura pas révélé au procureur de la république les faits délictueux
dont il aura eu connaissance. Les dispositions de la loi pénale relative à la révélation du secret
professionnel sont applicables aux commissaires aux comptes ».
Le législateur Tunisien a fait du commissaire aux comptes non seulement un garant de la
transparence de l'information financière, mais aussi un garant de l'ordre public étant donné qu’il
est dans l’obligation de révéler les faits délictueux au procureur de la république.
Dans ce qui suit, nous évoquons les différentes infractions qui pourront engager la responsabilité
pénale du commissaire aux comptes :
1- Divulgation des informations mensongères sur la situation de la société :
Lorsque le commissaire aux comptes divulgue des informations erronées ou mensongères au
niveau de ses rapports ou lorsqu’il les confirme par écrit ou verbalement aux actionnaires ou à
des tiers, il est considéré comme ayant divulgué des informations mensongères.
2- Non révélation des faits délictueux au procureur de la république :
Le commissaire aux comptes a une obligation de moyens, qui lui impose de révéler au procureur
de la république les faits délictueux dont il a eu connaissance lors de l’accomplissement de ses
diligences 42 sans qu’il ne soit tenu de procéder à des recherches spécifiques pour ces infractions.
42
Article 271 du CSC : " Est puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de mille deux cents à cinq mille
dinars ou de l'une de ces deux peines seulement, tout commissaire aux comptes qui aura sciemment donné ou confirmé
44
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Pour le cas des transactions intergroupes, le champ d’investigation s’étale sur l’ensemble des
sociétés du groupe, le commissaire aux comptes est appelé à apprécier particulièrement les
circonstances et conditions dans lesquelles se déroulent les transactions avec les autres filiales.
Sur le plan pénal, les principales infractions susceptibles d’être évoquées en matière des prix de
transfert et des transactions intra-groupe et qui sont généralement entrepris par la direction
concernent, notamment : 45
des informations mensongères sur la situation de la société ou qui n'aura pas révélé au procureur de la république les
faits délictueux dont il aura eu connaissance. Les dispositions de la loi pénale relative à la révélation du secret
professionnel sont applicables aux commissaires aux comptes."
43Article 271 alinéa 2 du CSC : "…Les dispositions de la loi pénale relative à la révélation du secret professionnel sont
Le commissaire aux comptes doit appartenir à l’une des organisations professionnelles suivantes
à savoir l’ordre des experts comptables de Tunisie ou bien la compagnie des comptables de
Tunisie. Cette appartenance met à sa charge le respect des règles régissant la profession. Ainsi,
tout manquement à ses obligations professionnelles pourrait engager sa responsabilité
disciplinaire.
L’OECT exerce ses pouvoirs disciplinaires à travers sa chambre de discipline chargée de
constater et sanctionner les infractions à la réglementation professionnelle et au règlement
intérieur de l’ordre 46.
L’OECT est autonome pour apprécier l’envergure de la faute commise par le professionnel.
Selon l’article 27 de la loi n°88 – 108 du 18 août 1988, les sanctions susceptibles d’être
prononcées par la chambre de discipline sont :
• L’avertissement ;
• Le blâme écrit ;
• La suspension de l’ordre de 1 an à 5 ans ;
• La radiation du tableau de l’ordre ;
La loi No 2002-16 du 04/02/2002 a prévu les mêmes sanctions pour les commissaires aux
comptes membres de la CCT.
Il est à rappeler que l’action disciplinaire est indépendante de celle civile ou pénale. Les voies de
recours demeurent possibles devant la cour d’appel et devant le tribunal administratif en matière
de cassation.
46
Article 27 de la loi 88-108 du 18 août 1988 portant refonte à la législation relative à l’expert comptable : " Il est institué
auprès de l’ordre une chambre de discipline chargée notamment de sanctionner les infractions à la réglementation
professionnelle et au règlement intérieur de l’ordre et, en général, toutes infractions à l’une quelconque des règles de
l’ordre.
46
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Lorsque le commissaire aux comptes ne prend pas les mesures adéquates au niveau de ses
travaux dans le cas ou les prix de transfert pratiqués ne sont pas en conformité avec le principe
de pleine concurrence, il pourrait encourir des risques en remettant en cause sa responsabilité
tant à l’égard des tiers qu’à l’égard de la société elle-même, dans la mesure où il est le garant de
la régularité et la sincérité des comptes de la société auditée.
Une manipulation ou un choix erroné au niveau du prix de transfert pourrait générer un impact
sur les intérêts économiques reliant l’entité avec ses principaux partenaires économiques tels que
les employés, les bailleurs de fonds, les créanciers et l’état et aggrave d’avantage la
responsabilité du commissaire aux comptes pour les préjudices éventuels qu’ils peuvent subir.
a- Les employés :
Une manipulation ou un mauvais choix au niveau des méthodes de détermination du prix de
transfert risque de générer les effets suivants sur les salariés :
• Gèle des recrutements sur plusieurs années ;
• Augmentation du taux de rotation de personnel ;
• Modifications des méthodes de calcul des salaires ;
• Licenciement abusif de certains salariés ;
• Modification de la masse salariale (dans le cas où les salaires sont basés sur le résultat,
notamment les salaires des dirigeants) ;
b- Les bailleurs de fonds :
Les bailleurs de fond ne sont pas épargnés des risques générés par des fausses méthodes de
détermination des prix de transfert non conformes avec le principe de pleine concurrence.
En effet, les banques assurent un rôle important au niveau de l’appuie financier aux entités du
groupe et ce par leurs services connexes et en accordant les financements nécessaires pour le
fonctionnement de la filiale ainsi que l’ensemble du groupe et ce en se basant sur les états
financiers certifiés qui leur sont présentés. Il en découle que des états financiers biaisés à cause
du prix de transfert présentent de nombreux risques, à savoir :
• Décisions de financement prises de façon inappropriée à cause d’une mauvaise appréciation
de la situation financière de la société et du groupe ;
• Accords de financements non assorties de suffisamment de garanties;
• Pertes créances (prêts) accordées à des sociétés devenues déficitaires à cause des prix de
transfert ;
47
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
c- Les créanciers :
Un prix de transfert non conforme au prix de pleine concurrence est un prix qui génèrera
inévitablement une détérioration du patrimoine social, qui constitue le gage commun et exclusif
des créanciers qui risquent de ne plus recouvrer leurs créances surtout s’ils ne disposent pas des
garanties nécessaires auprès de la société concernée ou auprès du groupe.
d- L’Etat :
La manipulation des prix de transfert risquent d’affecter directement les recettes douanières et
fiscales des états ayant réalisé les transactions intra-groupes.
En effet, l’assiette des droits de douane est constituée par les prix des biens et services échangés
entre deux entités relevant de deux états aux tarifs douaniers différents. Cela pourrait inciter
certains groupes multinationaux à minorer les prix de transfert appliqués pour réduire les
paiements des taxes douanières dues.
D’autre part, en fixant leurs prix de transfert, les groupes opèrent des choix stratégiques qui
affectent directement l’assiette fiscale des états dans lesquels ils opèrent. Cette politique de prix
peut priver les gouvernements d’une partie des recettes fiscales.
Un constat que nous pouvons établir à la fin de cette première partie c’est la place prépondérante
qu’occupent les prix de transfert au sein des groupes de sociétés étant donné l’accroissement des
transactions intergroupes. Cette prépondérance croissante est due à ce que le prix de transfert est
un curseur important pour la performance financière du groupe.
Nous avons aussi procédé à une étude approfondie du cadre règlementaire du prix de transfert
aussitôt sur le plan national qu’international et nous avons constaté que le principe de pleine
concurrence est le principe directeur pour la détermination du prix de transfert conformément
aux recommandations de l’OCDE.
Nous avons, par la suite étudié les risques inhérents en relation directe avec le prix de transfert
ainsi que les répercussions sur les responsabilités du commissaire aux comptes. Nous avons pu
établir que ces risques proviennent principalement d’une carence législative et normative en
Tunisie ainsi que des limites règlementaires imposées aux commissaires aux comptes dans le
cadre de son audit dont principalement la non immixtion dans la gestion, un principe qui a été
bel et bien conçu par le code des sociétés commerciales.
48
Titre I : Le cadre réglementaire et normatif & typologie des risques inhérents au prix de transfert
Nous avons alors pu conclure que les risques inhérents liés au prix de transfert sont significatifs
et doit inciter le commissaire aux comptes à adapter les diligences d’audit générales au contexte
du prix de transfert et des transactions intergroupes dans l’objectif de maitriser ledit risque et
pouvoir émettre l’opinion d’audit adéquate.
L’enjeu qui se présente pour l’auditeur serait alors d’apporter les réponses aux problématiques
suivantes, à savoir :
• Dans quelle mesure le commissaire aux comptes peut-il mettre en œuvre sa démarche
d’audit du prix de transfert sans pour autant violer le principe fondamental de non
immixtion dans la gestion ?
• Dans quelles mesure il serait possible d’extrapoler l’approche d’audit par les risques au
prix de transfert ? et dans quelles mesures elle pourrait maitriser le risque inhérent lié au
prix de transfert à un niveau acceptable ?
• Quels seraient les diligences spécifiques à mettre en œuvre par le commissaire aux
comptes en réponse aux risques évalués ?
Dans la deuxième partie de ce mémoire, nous allons tenter d’apporter des éléments de réponses à
ces différentes problématiques soulevées, l’objectif étant de déterminer la réponse de l’auditeur
aux risques évalués provenant du prix de transfert dans le cadre de sa démarche d’audit globale.
49
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
La problématique du prix de transfert constitue, de nos jours, un enjeu majeur dans le cadre de
l’audit des groupes de sociétés dont le souci primordial est de garantir aux utilisateurs des états
financiers, dont notamment les minoritaires, la sincérité et la régularité requises par la loi.
Nous avons évoqué dans la partie précédente les différents risques inhérents qui pourraient surgir
et qui sont dus principalement aux difficultés et limites pouvant entourer l’audit du prix de
transfert et qui génèrent des zones de risque de plus en plus accrues pour l’auditeur.
Il en résulte que le commissaire aux comptes du groupe doit apporter des réponses aux questions
suivantes pour pouvoir mener convenablement son audit du prix de transfert, à savoir :
• Quelles sont les diligences et les tâches spécifiques à mettre en œuvre par le commissaire
aux comptes dans le cadre de l’audit des prix de transfert, afin d’exprimer l’opinion
adéquate sur la régularité et la sincérité des comptes et préserver ainsi les intérêts des
minoritaires face à un intérêt du groupe plus prépondérant ?
Au cours de cette deuxième partie, nous allons essayer d’apporter les réponses nécessaires. Pour
cela nous avons conçu deux chapitres en fonction des problématiques ci-dessus indiquées. Au
niveau du premier chapitre nous proposerons un plan d’audit adapté aux risques évalués du prix
de transfert. Au niveau du second chapitre, Nous évoquerons la mise en œuvre du plan d’audit
arrêté en proposant les diligences d’audit spécifiques en matière du prix de transfert.
50
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
En cas de litiges ultérieurs, cette lettre constitue un élément de preuve selon laquelle le
professionnel s’engage à réaliser les travaux demandés dans des conditions bien explicites et
reconnues.
Le contenu de la lettre de mission a été précisé par l’article 8 du code des devoirs professionnels,
qui stipule que la convention ou la lettre de mission doit comprendre les points suivants :
Par ailleurs et selon les normes professionnels, la lettre de mission, doit préciser le contexte et le
but de l’intervention, définir précisément les travaux à réaliser par le professionnel et délimiter le
champ d’action de ce dernier par rapport aux autres intervenants.
De même, elle doit préciser la nature des diligences qui seront réalisées, les exercices concernés
et le délai d’intervention en rappelant que les travaux réalisés ne constituent pas un audit
financier exhaustif étant donné que les travaux du commissaire aux comptes sont basés sur une
procédure d’échantillonnages statistiques en vue d’exprimer une opinion d’audit.
51
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
La lettre de mission précise aussi la nature du document livrable à la fin au client ainsi que les
délais impartis pour accomplir la mission.
La lettre de mission précise aussi le montant des honoraires et des frais de missions (débours)
ainsi que leurs conditions de règlement. Dans le cadre d’un mandat de commissariat aux
comptes, les honoraires sont fixés par un barème légal en fonction des trois critères suivants : le
total brut du bilan, le total chiffre d’affaire brut ainsi que le total des effectifs.
En tout état de cause, aucune diligence ne pourrait être mise en place par le commissaire aux
comptes et aucun document (rapport, conclusions écrites) ne doit être communiqué au client sans
avoir reçu, au préalable, la lettre de mission signée.
La lettre de mission doit être jointe en annexe de la lettre d’affirmation. Le commissaire aux
comptes est alors appelé à demander au dirigeant de signer une lettre dite d’affirmation en tenant
compte de la nature de l’intervention et avant d’entamer sa mission.
La lettre d’affirmation revêt une importance cruciale. En effet, par ce document, le dirigeant
affirme qu’il a informé le commissaire aux comptes de tous les éléments dont il avait eu
connaissance ainsi que les autres éléments susceptibles d’influer sur la situation fiscale et les
risques fiscaux.
La lettre d’affirmation ne peut pas se substituer avec les autres garanties et déclarations qui
peuvent être obtenues de la direction ainsi que de tout autre intervenant. Elle constitue un
engagement de la direction envers son commissaire aux comptes.
52
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
En ce qui concerne les transactions avec les parties liées qui nécessitent la détermination des prix
de transfert, la norme internationales ISA 550 « parties liées »47 impose à l’auditeur l’obtention
d’une déclaration écrite (lettre d’affirmation) de la direction, et, le cas échéant, des personnes
responsables de la gouvernance, qui contienne les informations suivantes :
Cette lettre est jointe en annexe au rapport permettant ainsi aux utilisateurs des états financiers
de savoir la nature des déclarations faites au commissaire aux comptes au cours de la mission.
A défaut d’obtention de cette lettre, le rapport final du commissaire aux comptes pourrait
contenir un paragraphe spécifique émettant des réserves sur la véracité des informations
collectées notamment lorsqu’il n’est pas en mesure de recueillir des éléments probants
supplémentaires pour compenser ceux qui auraient dû être obtenues en présence de la lettre
d’affirmation.
Par ailleurs, le commissaire aux comptes devrait expliquer les motifs d’un éventuel refus du
dirigeant à signer telle lettre et en tirer les conclusions quant à la fiabilité des informations
collectées ainsi que les conséquences sur son rapport. Désormais, si le professionnel le juge
opportun, il pourrait proposer des modifications de la lettre à la direction qui ne portent pas une
limitation dans l’étendue des travaux d’audit et ce, après avoir identifié sur quel domaine porte
les réticences.
47
Norme internationales d’audit ISA 550 « parties liées », paragraphe 26 et référence A48 et A49.
53
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
La notion de dépendance pourrait être abordée selon plusieurs sources de droit. Le commissaire
aux comptes devrait examiner les situations de dépendance en se référant aux différents textes
législatifs disponibles et ce dans l’objectif de garantir l’exhaustivité de telles situations.
A cet égard, l’article 2 - paragraphe II du Code de la TVA considère comme placée sous la
dépendance d’une autre entreprise ou effectivement dirigée par elle, toute entreprise dans
laquelle, directement ou par personnes interposées, cette autre entreprise exerce en fait le pouvoir
de décision. Il en est de même, toute entreprise, dans laquelle une autre entreprise, directement
ou par personne interposée, exerce des fonctions comportant le pouvoir de décision ou possède,
soit une part prépondérante dans le capital, soit la majorité absolue des susceptibles de
s’exprimer dans les assemblées d’associés ou d’actionnaires. Il en est également ainsi lorsque le
siège de l’entreprise dirigeante est situé hors de Tunisie, ou lorsque celle-ci n’assure qu’un rôle
de gestion et n’exploite personnellement aucun établissement industriel ou commercial. Le
même article 2 répute, à cet effet, personnes interposées au sens de ce qui précède, tant le
propriétaire, les gérants et administrateurs, les directeurs et employés salariés de l’entreprise
dirigeante, que le père et la mère, enfants et descendants, conjoint du propriétaire, des gérants,
des administrateurs ou directeurs de ladite entreprise subordonnée.
Le code de l’IRPP et de l’IS n’a pas défini clairement les liens de dépendance. Cependant, Il a
conçu un régime spécifique pour l’intégration des résultats concernant les groupes de sociétés
dont la mère est cotée à la BVMT.
Le régime fiscale d’intégrations des résultats consiste à ce que une société appelée société mère
se substitue aux sociétés dans le capital desquelles elle possède une participation directe ou
indirecte d’au moins 75%, dans l’objectif de payer l’IS sur la base d’un résultat d’ensemble.
54
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
La notion de dépendance n’est pas précisément définie par le Code des sociétés commerciales.
Toutefois, on peut établir le lien entre cette notion de dépendance et celle du « contrôle ». A cet
égard, l’article 461 du CSC définit le groupe de sociétés comme étant « un ensemble de sociétés
tout en ayant chacune sa personnalité juridique distincte, mais liées par des intérêts communs, en
vertu desquels l’une d’elles, dite société mère, tient les autres sous son pouvoir de droit ou de fait
et y exerce son contrôle, assurant, ainsi, une unité de décision ». Les sociétés que la société mère,
tient sous son pouvoir de droit ou de fait et y exerce son contrôle sont appelées filiales. Il en
résulte que le groupe se compose d’une société mère et d’un ensemble de filiales. D’après les
dispositions du CSC, nous pouvons conclure que deux sociétés ne seraient pas dépendantes en
l’absence de contrôle et par conséquent en l’absence d’un groupe de sociétés au sens de l’article
461 susvisé.
L’article 461 du CSC définit plusieurs genres de contrôle. Il considère comme étant contrôlée
par une autre société, toute :
• société contrôlée par une autre qui y détient une fraction du capital lui conférant la majorité
des droits de vote (contrôle de droit). Le cas le plus clair est celui du capital social détenu
dans une proportion au moins égale à 50% ;
• société contrôlée par une autre société qui y est détient la majorité des droits de vote, seul ou
en vertu d’un accord conclu avec d’autres sociétés ;
• société contrôlée par une autre qui y détermine, en fait, les décisions prises dans les
assemblés générales, en vertu des droits de vote dont elle dispose en fait (contrôle de fait) :
55
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
c’est le cas d’une société dont les titres sont répartis de manière très diluées entre ses
actionnaires. Dans ce cas, une société peut en contrôler une autre sans détenir une majorité
(plus de 50%) des droits de vote.
Le contrôle est dit direct lorsque la société détient une participation dans le capital de la société
contrôlée. En d’autres termes, la société qui contrôle est associée ou actionnaire dans la société
contrôlée. Le contrôle est indirect lorsque la détention s’opère par le biais d’autres sociétés
contrôlées. 49
Par ailleurs, le contrôle est présumé dés lors qu’une société détient directement ou indirectement
40% au moins des droits de vote dans une autre société, et qu’aucune autre société n’y détienne
une fraction supérieure à la sienne. Le contrôle est toujours apprécié en fonction des droits de
vote et non pas des proportions détenu dans le capital social.
Généralement, un titre (action, part social) donne droit à un seul droit de vote. Il en résulte que
lorsqu’on dispose de plus que 50% du capital, on contrôle généralement une société.
L’analyse de la dépendance sous l’angle juridique pourrait converger avec le droit comptable. En
effet, la consolidation, qui est une technique comptable obligatoire en vertu des dispositions de la
loi n° 96-112du 30 décembre 1996 relative au système comptable des entreprises ainsi que
l’article 471 du CSC , se base sur le concept du« périmètre de consolidation » . Fortement lié à la
dépendance, le périmètre de consolidation est différent du périmètre du groupe. Si ce dernier se
compose de la société mère et de ses filiales au sens juridique du terme, c’est-à-dire les sociétés
sur lesquelles la société mère exerce un contrôle de droit , un contrôle conjoint ou un contrôle de
fait, le périmètre de consolidation (qui est une notion comptable) a conçu un autre concept plus
large à savoir l’influence notable. En effet, le périmètre de consolidation se compose non
seulement, de la société mère et des sociétés contrôlées par elle (contrôle de droit, conjoint ou de
fait), mais aussi des sociétés qui ne sont pas contrôlées au sens juridique du terme, mais sur
lesquelles la société mère exerce une influence notable.
Par ailleurs, la norme comptable relative aux informations sur les parties liées (NCT39) présente
une autre notion apparentée à la notion de dépendance et prévoit de fournir des informations au
niveau des états financiers sur les relations avec les parties liées, l’objectif étant de permettre aux
49
Article 465 CSC
56
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
utilisateurs des états financiers de se faire une opinion sur les effets des relations entre parties
liées sur une entreprise présentant les états financiers. Selon cette norme, des parties sont
considérées être liées si une partie peut contrôler l’autre partie ou exercer une influence notable
sur l’autre partie lors de la prise de décisions financières et opérationnelles.
Il faudrait toutefois, faire une distinction par rapport aux éléments qui ne peuvent être
considérées comme des parties liées. On peut citer dans ce cadre :
• deux sociétés simplement parce qu’elles ont un dirigeant en commun sans qu’il puisse
influencer les politiques des deux sociétés dans leurs transactions communes,
• les bailleurs de fonds, les syndicats, les entreprises de services publics et les collectivités
locales, et ceci au cours de leurs transactions normales avec une entreprise et simplement en
raison de ces transactions (bien qu’ils puissent restreindre la liberté d’action d’une
entreprise ou participer à son processus décisionnel) et ;
• un client, fournisseur, franchiseur, distributeur, ou agent général unique avec lequel une
entreprise réalise un volume de transactions important, simplement en raison de la
dépendance économique qui en résulte
Reconnue par le droit des sociétés, la dépendance de fait signifie qu’une première entreprise
exerce directement ou indirectement un véritable pouvoir décisionnel dans une autre entreprise.
Même en l’absence d’un contrôle juridique à travers l’exercice du droit de vote, la dépendance
de fait peut résulter de l’existence de relations marquées par une certaine autorité
économique qu’exerce une entreprise à l’encontre d’une autre. Cette dépendance de fait est donc
le fruit de l’existence d’un faisceau d’indices concordants qui permettent de déduire qu’une
entreprise est capable d’imposer à une autre entreprise d’exercer son activité dans des conditions
économiques bien déterminées.
A titre d’exemple, la dépendance de fait peut exister si une entreprise est capable d’imposer à
une autre entreprise le prix des produits vendus, ou lorsque deux entreprises ayant les mêmes
structures administratives, utilisent le concours des mêmes représentants et se partagent les
commandes recueillies, ou lorsque une entreprise fabrique des biens sous une marque détenue
par une autre entreprise sans contrat de licence, alors que l’entreprise détentrice de la marque
57
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Même si la dépendance juridique ne peut être prouvée, le commissaire aux comptes doit prendre
en considération que l’entité auditée peut se trouver sous une dépendance de fait. Qui pourrait
être contractuelle ou résulter simplement des conditions de fait. Elle est mise en évidence si une
entreprise exerce un pouvoir sur une autre de manière à imposer ses choix économiques aux
moyens de clauses contractuelles ou par des relations étroites.
Généralement, apprécier les dépendances de fait n’est pas une tache facile pour le commissaire
aux comptes. Une attention particulière doit être prêtée pour les situations suspectes de
dépendance au niveau des relations commerciales (en amont ou en aval) et qui pourraient
influencer le prix de transfert pratiqué. En pratique, la jurisprudence peut fournir une référence
pour le commissaire aux comptes pour établir une dépendance de fait.
Le commissaire aux comptes doit vérifier et analyser ces contrats dans le but d’identifier leurs
termes et de rechercher une situation éventuelle qui montre qu’il y a « un déséquilibre » dans
leurs conditions commerciales ou financières. L’analyse de ces contrats, peut montrer un lien de
dépendance de fait lorsqu’on constate que le contrat n’est pas du gré à gré mais plutôt il montre
un rapport de force en faveur du cocontractant par rapport à l’entité auditée en imposant par
exemple des prix d’achat et de revente des produits ainsi que des délais de paiement anormaux,
et en intervenant dans les conditions de commercialisations et de gestion…
58
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Un entretien avec la direction du groupe ainsi que le service de contrôle de gestion est hautement
recommandée pour faire une analyse des transactions importantes et particulières et pour définir
de manière générale le fonctionnement des sociétés dans le groupe. Cette analyse pourra aboutir
à une schématisation détaillée des flux intergroupes.
La dépendance de fait pourrait être révélée au cours de la phase d’analyse des transactions, qui
permet ainsi au commissaire aux comptes d’avoir une vision claire de l’ensemble des
transactions réalisées et des conditions dans lesquelles elles ont été réalisées.
Le commissaire aux comptes doit recenser de manière complète et exhaustive les différents flux
entre l'entité auditée et les entités avec lesquelles elle a un lien de dépendance juridique ou de fait
(ou dans un pays à fiscalité privilégiée). Les tableaux ci-dessous récapitulent les documents
nécessaires permettant de rechercher et l’identifier les flux intragroupes 50 :
Pour chaque cocontractant et chaque type de flux recensé précédemment, il est important
d'obtenir les fonctions exercées par les parties en présence, l'explication du prix pratiqué, son
mode de détermination. Ces informations peuvent notamment ressortir des barèmes de prix, des
contrats signés et des factures émises ou reçues, mais les documents n'apportent généralement
pas toutes les informations nécessaires et une discussion avec les responsables de l'entité auditée
doit souvent compléter leur examen. Si les investigations démontrent que l'entité auditée réalise
des transactions similaires avec son groupe et avec des tiers, le commissaire aux comptes doit
essayer d'obtenir des éléments de comparaison entre les prix pratiqués pour chaque type de
transaction afin de déterminer le prix de pleine concurrence dans une situation donnée. Il faudra
également prendre connaissance des éléments ou circonstances particulières ayant pu influer sur
la politique tarifaire des flux ou éventuellement d’une non-politique tarifaire (renonciation à des
recettes).
Exemple : Les marges peuvent être anormalement basses en phase de démarrage en cas de
développement d’une stratégie de pénétration de marché.
Une redevance à prix majoré peut être la contrepartie d’une minoration de vente des produits
La liasse est l’outil de base pour visualiser, collecter et centraliser toutes les informations
nécessaires au processus de consolidation dans un format uniforme pour l’ensemble des sociétés
du groupe dans le but de faciliter leur traitement rapide.
L’examen des liasses de consolidation constitue une diligence importante pour le commissaire
aux comptes car elles permettent de bien visualiser les transactions intergroupes et par la suite
comprendre et analyser les bases de calcul du prix de transfert.
Le commissaire aux comptes doit tenir en compte une difficulté dans son examen de la liasse de
consolidation qui réside dans le plan des comptes de consolidation et leur interfaçage entre les
méthodes comptables suivies par les filiales et la méthode du groupe qui pourrait entrainer des
51
Amar José – Mission de documentation des prix de transfert en PME – Page 28 (mémoire d’expertise comptable)
60
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
limites lors de la préparation des liasses (rappelons que les textes réglementaires, normes
comptables tunisiens « NCT » ou International Financial Reporting Standards « IFRS », ne
fixent aucun format strict des comptes consolidés, souhaitant laisser une grande souplesse aux
entreprises). Cette question est d’autant plus importante pour un groupe détenant des filiales à
l’étranger qui peuvent ne pas appliquer le même plan des comptes.
• Comptes synthétiques (bilan, compte de résultat, et parfois tableau des flux de trésorerie) ;
• Annexes aux comptes (détail et mouvements des postes, annexes) ;
• Données intragroupes ;
• Autres informations.
Avant d’entamer sa mission, le commissaire aux comptes doit acquérir une connaissance
générale de l’entité à auditer afin de lui permettre d'analyser et d'évaluer les risques. Ce
processus doit lui permettre d'élaborer sa lettre de mission et de planifier son intervention. 52
Il en résulte que la prise de connaissance générale de l’entité et de son environnement constitue
une phase préalable et obligatoire 53 à toute mission d’audit. Elle permet au commissaire aux
comptes d’orienter ses travaux en fonction des risques et d’appréhender les aspects significatifs
lui permettant d’exercer son jugement professionnel.
Particulièrement, le commissaire aux comptes doit recueillir toutes les informations nécessaires
et acquérir une compréhension suffisante de tous les aspects en relation directe et indirecte avec
le prix de transfert. Ces informations comprennent :
52
Sofia, ABDELKADER, "Quelle démarche pour le commissaire aux comptes", article publié sur le site du cabinet d’expert comptable
Afynéo Audit et expertise - http://www.afyneo.com.
53
ISA 315 : "Compréhension de l’entité et de son environnement aux fins de l’identification et de l’évaluation des risques
d’anomalies significatives".
ISA 600 : Audits d’états financiers de groupe (y compris l’utilisation des travaux des auditeurs des composantes)-
considérations particulières" : § 17 "L’auditeur est tenu d’identifier et d’évaluer les risques d’anomalies significatives en
acquérant une compréhension de l’entité et de son environnement. L’équipe affectée à l’audit du groupe doit :
a) approfondir la compréhension du groupe, de ses composantes et de leurs environnements, y compris des contrôles à
l’échelle du groupe, qu’elle a acquise dans le cadre du processus d’acceptation ou de maintien de la mission;
b) acquérir une compréhension du processus de consolidation, y compris des instructions transmises aux composantes
par la direction du groupe."
61
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
• Une connaissance générale de tout le groupe auquel l’entité auditée fait partie à savoir :
historique, politiques, fonctionnement, secteurs d’activité, parties liées…,
• Une connaissance spécifique des transactions intergroupe en focalisant sur celles ayant
des relations avec l’activité de la société auditée.
Toutefois, cette prise de connaissance doit demeurer une préoccupation constante tout au long de
la mission, car des risques qui n’auraient pas été identifiées lors de la phase préliminaire peuvent
être relevés ultérieurement 54et avoir une incidence sur la stratégie de la mission.
La prise de connaissance générale et plus spécifiquement en matière du prix de transfert doit
demeurer comme aspect dynamique et progressif pour permettre au commissaire aux comptes de
répondre efficacement aux risques éventuellement détectés.
2-1-1-1-Analyse du marché
54
SAAD, Slim, (2006), « Caractéristiques des opérations intra-groupe et diligences des commissaires aux comptes consolidés »,
Mémoire pour l’obtention du diplôme national d’expert comptable en Tunisie P 91.
62
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’organigramme permet au commissaire aux comptes de comprendre le rapport des forces dans
le groupe ainsi que la place et l’influence de l’entité dans son groupe et qui pourra ainsi avoir des
répercussions sur le prix de transfert pratiqué.
a- Historique du groupe
b- Stratégie de groupe
La stratégie est définie comme étant « …la ligne directrice dictée par les dirigeants dont le but
est de fixer dans l’horizon, un point vers lequel l’entité doit tendre »55.
Le commissaire aux comptes devrait procéder à l’analyse de la stratégie qui sert de base au choix
des activités, de l’organisation et des procédures internes du groupe. La compréhension de la
stratégie du groupe représente alors une diligence cruciale et pourrait nécessiter un examen
détaillé. La stratégie adoptée affecte l’organisation des transactions du groupe ainsi que
l’évolution de la rentabilité dégagée par lesdites transactions. On distingue généralement trois
types de stratégies pouvant se combiner entre elles : la diversification, la spécialisation et
l’intégration verticale ou horizontale. Ces stratégies peuvent varier selon les domaines d’activité
stratégique en utilisant des outils comme la domination par les couts, la différenciation…
En d’autres termes, Toute entreprise est plus ou moins orientée par une politique générale,
explicite ou implicite, du groupe dirigeant. Fruit de leurs motivations, de leur formation, de leur
culture, mais aussi des pouvoirs qu'ils ont et auxquels ils sont confrontés, cette politique générale
peut être définie comme l'ensemble des principes directeurs et des grandes règles et normes qui
orientent en permanence l'action de l'entreprise 56.
55
Z. NORBERT, mémoire "les prix de transfert dans les groupes français de taille moyenne- Incidence sur la mission du
commissaire aux comptes" 1999
56
Lassaad MEZGHANNI, – support pédagogique : "Politique et Stratégie d’Entreprise" P 2, Faculté des Sciences Economiques et
de Gestion de Sfax.
63
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Nous pouvons alors déduire qu’une démarche d’audit par les risques ne pourrait être efficace que
suite à une bonne compréhension de la stratégie et de la vision du groupe qui mettra en exergue
l’influence des stratégies internes dictées par la mère. Il en résulte que le commissaire aux
comptes est tenu de procéder à des investigations sur la stratégie générale du groupe en
collectant des réponses aux questions suivantes indicatives et non exhaustives:
• Des questions identiques posées à plusieurs filiales donnent-elles des réponses
conciliables ? Sinon prévoir un contrôle plus approfondi à ce niveau.
• La stratégie annoncée par le groupe est-elle bien appliquée au niveau des filiales ?
• Existe-t-il des activités à abandonner ?
• Quels sont les nouveaux domaines d’activité à conquérir et pour quelles raisons?
• Quel est l’effet de la stratégie du groupe sur les prix de transfert, d’après les informations
recueillies ?
En définitive, le commissaire aux comptes doit comprendre des dirigeants, les objectifs à
poursuivre, les factures clés de succès caractérisant le système concurrentiel et affectant la
place de l’entité auditée dans le marché et par la suite déterminer sa contribution dans la
stratégie globale du groupe qui pourrait influer, en définitive sur les choix en termes de prix
de transfert et en guise d’exemple, la conquête d’un nouveau marché par le groupe peut
justifier des dépenses supplémentaires sur une période limitée. Elles doivent être réparties de
façon à ce que les entités qui vont bénéficier le plus des avantages économiques futurs
supporteront la quote part la plus importante. Ce qui impactera les choix des prix de transfert
à appliquer
circonstances et les besoins du groupe. Par exemple lorsqu’une entité du groupe a un poids de
trésorerie important à l’échelle du groupe, la tendance serait de concevoir des prix de transfert
orientés plus vers la couverture des besoins de trésorerie des autres entités. Cette prise en
considération par le commissaire aux comptes finira par avoir une influence sur la vision globale
et l’orientation générale de la mission d’audit.
Le commissaire aux comptes devrait avoir une description des produits ou des services qui
permet de comprendre les marchés sur lesquels intervient l’entité auditée et, par la suite, de
déceler de possibles comparaisons internes lorsque ces mêmes produits ou services sont à la fois
revendus à des sociétés affiliées et à des sociétés indépendantes.
Cette comparaison qui s’étend de la phase de prise de connaissance à la phase de mise en œuvre
des tests d’audit, permet de confronter le prix de transfert pratiqué dans le cadre des transactions
intergroupes au prix pratiqué pour les transactions hors groupe et recueillir par la suite des
éléments probants suffisants concernant la vraisemblance du prix de transfert pratiqué et sur le
respect de l’article 50 de la loi de finance pour l’année 2010.
La nature et le volume de la prestation de services seront les éléments essentiels pour vérifier la
comparabilité des transactions nécessaires pour valider les prix de transfert pratiqués ;
2-1-2-3-Analyse clients-fournisseurs
Le commissaire aux comptes doit obtenir la liste des principaux fournisseurs et les modes
d’approvisionnement avec ces derniers et par la suite vérifier si cette liste contient des entités
apparentées. Dans ce cas un examen détaillé du prix de transfert s’impose en vérifiant
65
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
l’exactitude et la vraisemblance des bases de calcul et en le comparant avec les prix pratiqués
dans le cadre des approvisionnements similaires réalisés auprès de fournisseurs tiers en dehors
du groupe.
Par analogie avec les fournisseurs, la clientèle pourra être limitée à des transferts intragroupes ou
être composée également, ou exclusivement, d’une clientèle hors groupe. L’analyse par
comparaison s’impose dans ce cadre pour ce qui est prix de transfert intragroupe à rapprocher
avec les autres prix pratiqués pour les transactions hors groupe.
Le commissaire aux compte doit analyser les clauses contractuelles en portant son intérêt sur les
aspects suivants : quantités des biens et services, caractéristiques techniques en relation avec le
domaine de l’activité de l’entité auditée, conditions de paiement, volume de la transaction, durée
du contrat, arrivée du terme et reconduction, garanties fournies …
Lorsque le commissaire aux comptes est face à des contrats importants qui englobent plusieurs
volets à la fois, l’objectif serait alors de définir pour chaque transaction, le régime applicable en
matière de prix de transfert. Cette tache peut s’avérer difficile pour le commissaire aux comptes
car ces contrats ne sont pas forcément actualisés et donc risquent de ne pas refléter la réalité, et
risquent aussi de ne pas être assez explicites. A titre d’exemple, un contrat de licence peut
concéder le droit de franchise avec un support technique sous forme d’un savoir faire. Le contrat
doit être scindé en deux partie l’une concerne le régime applicable à la franchise et le deuxième
concernera le régime applicable au service (support technique)
Par ailleurs, des contrats peuvent stipuler des transactions occultes non incluses dans le contrat et
compensées par d’autres qui méritent toute l’attention du commissaire aux comptes. A titre
d’exemple un contrat peut stipuler la réalisation pour 15 000 TND alors qu’en réalité la
prestation vaut 10 000 TND uniquement, le reliquat correspondant à des marchandises reçues
non facturées.
66
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Une entité peut exercer différentes fonctions au sein d’un groupe, elles peuvent varier et être de
différentes nature à savoir : la direction, marketing, fabrication, assemblage, prestations de
services, contrôle qualité, achats, distributions, sous-traitance…
L’analyse fonctionnelle permet de comprendre le rôle dédié à chaque entité au sein du groupe et
elle a pour objectif de déterminer la tête du groupe ou l’entrepreneur principal qui supporte les
principaux risques d’affaire et qui prend les décisions stratégiques. Il détient les principales
immobilisations incorporelles clés comme les brevets, marques et savoir faire. Généralement
l’entrepreneur principal coïncide avec la mère du groupe. En plus, l’analyse fonctionnelle permet
de connaitre le rôle attribué à chaque entité dans la chaine de valeur du groupe pour analyser son
poids économique pour lui attribuer une juste rémunération.
Le commissaire aux comptes est tenu de procéder à une analyse fonctionnelle du groupe pour
comprendre en définitive le rôle de l’entité auditée et son impact sur le risque d’audit global et
sur le prix de transfert de façon spécifique.
Le risque d’audit lié au prix de transfert varie selon l’importance de l’entité auditée et son rôle
dans le groupe ainsi que son aptitude à influer sur ses choix stratégiques.
L’analyse fonctionnelle doit s’attarder sur toutes les informations entrant dans la détermination
du prix de transfert à savoir :
67
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Les exposés suivants montrent avec des détails les fonctions pouvant être exercées par les entités
au sein du même groupe. Comme résultat, nous pouvons établir la grille d’analyse fonctionnelle
proposée par la DGI 57
2-2-1-1-Direction générale
La mission générale de ce service est de permettre l’optimisation des sources de capitaux ainsi
que leurs emplois, visant à augmenter la rentabilité tout en maitrisant le risque. Ce service
assure la tenue de la comptabilité, le service personnel, la gestion de trésorerie en plus de la
gestion fiscale. Il assure aussi les fonctions suivantes :
b- Développement stratégique
Cette fonction permet de fixer les choix stratégiques et l’organisation de l’activité. Cette fonction
est essentielle, car Toutes les décisions prises par cette fonction sont d’une importance majeure
car elles orienteront l’entité dans son ensemble.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction du développement
stratégique. Pour accomplir ces diligences, il pourrait se référer au questionnaire suivant:
57
« Les prix de transfert : guide à l’usage de PME » direction générale des impôts, ministre de l’économie, des finances et de
l’industrie, 2006
68
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
• Quels sont les principaux facteurs de succès affectant la place de l’entreprise sur le
marché ?
• Qui gère l’incidence de ces facteurs ?
• Qui décide des réactions à opposer aux concurrents ?
• Qui assure le suivi de l’influence des concurrents sur le marché ?
En définitive, le commissaire aux compte doit toujours prendre en considération que la stratégie
de l’entité qui rime forcément avec la stratégie du groupe aura un effet direct sur le prix de
transfert par exemple, une stratégie de développement sous forme d’expansion géographique
peut inciter le groupe à pratiquer des prix bas lorsque le nouveau secteur à conquérir est
caractérisé par une stratégie de domination par les prix ce qui affectera le prix de transfert
pratiqué avec la filiale à implanter dans ce nouveau secteur.
Les fonctions conception du produit et fabrication sont des activités noyau qui ont une incidence
directe sur la viabilité et la pérennité de l’entreprise. Ces activités s’étendent de la recherche et
développement au processus de production final.
C’est la fonction qui définit et conçoit le produit à fabriquer selon des caractéristiques
spécifiques et en se basant sur les attentes du marché.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction de conception des
produits qui est importante car elle définit principalement les coûts futurs de ces produits et par
la suite leurs prix de transfert dans le cadre des transactions intergroupes.
69
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
b- approvisionnement
C’est une fonction primordiale notamment pour les fabricants et industriels car elle influe
directement sur la marge bénéficiaire et par conséquent sur la compétitivité de l’entreprise. Cette
fonction peut être assurée soit par l’entité elle-même soit attribuée à une autre entité du groupe
qui centralisera tous les achats et ce dans un but de renforcer le pouvoir de négociation et obtenir
des marges plus confortables.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction
d’approvisionnement qui pourra influer considérablement sur les prix de transfert futurs.
Pour accomplir ces diligences, le commissaire aux comptes pourrait se référer au questionnaire
suivant:
Les produits peuvent être destinés à une autre entité qui se servira de ces derniers pour en
fabriquer d’autres produits ou directement à des consommateurs finaux.
Les produits fabriqués peuvent aussi être à destination des autres sociétés du groupes (fourniture
d’un sous produit ou d’un encours de produit fini pour une autre entité du groupe) ce qui pourrait
créer une zone de risque supplémentaire pour le commissaire aux comptes dans le cadre de
l’audit du prix de transfert.
70
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction de production. Pour
accomplir ces diligences, il pourrait se référer au questionnaire suivant:
d- planification de la production
Cette fonction est essentielle car elle détermine les produits à élaborer, la planification de la
production ainsi que le timing de leur fabrication et les volumes de production cibles.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction de planification de la
production qui vise à optimiser les coûts de production et peut influer sur la disponibilité des
produits sur le marché.
e- contrôle qualité
Cette fonction assure le respect les normes de qualité à suivre tout au long du processus de
fabrication. C’est une fonction maitresse dans le sens ou elle affecte directement la qualité des
71
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
produits fabriqués surtout dans un milieu concurrentiel caractérisé par une différenciation des
produits.
Dans un contexte intergroupe, la politique qualité qui touche tous le processus d’exploitation
devient un facteur déterminant pour les couts de revient des produits fabriqués et peut affecter
ainsi le prix de transfert.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction de contrôle qualité.
Pour accomplir ces diligences, il pourrait se référer au questionnaire suivant:
2-2-1-3-Commercialisation et distribution
Ce sont les étapes en relation avec la vente et le marketing qui comprennent les modalités de
commercialisation de communication et de distribution.
a- Vente et tarifications
Cette fonction a pour objectif de déterminer les prix en fonction des choix stratégiques de
l’entité. Les tarifs ainsi définis seront la résultante du positionnement sur le marché et la
demande sur les produits.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à analyser la fonction de vente. En effet, pour manipuler le
prix de transfert, le groupe aurait à agir le plus facilement sur cette fonction.
72
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
b- Marketing et publicité
Cette fonction conçoit la communication et les publicités adaptées aux produits. Elle contribue à
la notoriété de la marque.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences pour analyser la fonction de Marketing et publicité.
Le marketing et la publicité sont deux fonctions en forte relation, elles contribuent activement à
la préservation et au développement de la part de marché de l’entreprise et donc à sa pérennité.
La société mère peut engager des actions de publicité et marketing pour tous le groupe et
procède par la suite à la répartition de ces cout sur la base de clefs de répartition prédéfinis. Il
s’en suit alors qu’une attention particulière à ces transactions s’impose car elles pourraient
dissimuler une migration de bénéfices moyennant des prix de transferts artificiellement
excessifs.
c- Réseaux de distribution
Cette fonction permet de définir la logistique de vente pour être proche du client par le biais
d’une présence fréquente et orientée par segment de clientèle à travers une chaine de distribution
répartie sur le secteur géographique sur lequel opère l’entité. Cette fonction permet de créer une
adéquation entre les besoins des clients identifiés et les produits ou services offerts.
73
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Dans le contexte de groupe, et dans le cadre d’une optimisation des frais de logistique, la
direction du groupe peut définir des pôles de distribution par secteur géographique et ce lorsque
ledit groupe dispose d’une gamme étendue de produits offerts sur une multitude de zones
géographiques. Dans ce cas, une société du groupe pourrait être appelée à réaliser un chiffre
d’affaire avec d’autre entités apparentées. Dans ce cas le souci du prix de transfert pratiqué se
présente de manière prépondérante.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à analyser la fonction de distribution et particulièrement
lorsque elle est affectée par des transactions intergroupes. Pour accomplir ces diligences, il
pourrait se référer au questionnaire suivant:
d- Garantie
La garantie des produits consiste en la mise en place d’un service qui fait la gestion
administrative des produits défaillants avec une fonction financière chargée d’évaluer le cout
financier y afférent dû au remplacement des produits défectueux par un produit neuf.
La garantie est par conséquence un élément essentiel pour la préservation de l’image de marque
de l’entité. Elle peut être dictée par les choix du groupe en imposant une politique de garantie
pour toutes les filiales.
Elle a un impact financier direct et elle entre dans la base de détermination de la marge
commerciale. Il en résulte alors qu’une société doit se doter d’une procédure de suivi de la
garantie et d’une procédure claire pour le calcul de la provision y afférente.
74
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Dans un contexte intergroupe, la politique de garantie doit être similaire à celle appliquée pour
les autres entités et peut présenter un risque accru pour le commissaire aux comptes lorsque le
remplacement des produits défectueux entre les entités apparentées revête un caractère exagéré
ou carrément fictif.
Dans le cadre des diligences normales des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit
mettre en œuvre des diligences visant à comprendre et éclaircir la fonction de garantie. Pour
accomplir ces diligences, il pourrait se référer au questionnaire suivant:
Nous avons proposé au niveau des annexes une grille d’analyse des fonctions ainsi que les
risques y afférents
L’étude de la répartition des risques et des actifs au sein du groupe de société permettra au
commissaire aux comptes d’avoir une idée sur les manipulations qui pourraient éventuellement
être effectuées sur les conditions dans lesquelles se déroulent les flux intra-groupes et
notamment, les prix de transfert.
Le commissaire aux comptes doit avoir une compréhension de la composition et de la texture des
actifs qui composent les investissements du groupe dans son ensemble et de l’entité auditée plus
particulièrement. Elle constitue le deuxième élément de l’analyse fonctionnelle qui est le
recensement des actifs permettant de réaliser les fonctions exercées. On peut distinguer entre les
actifs liés à la production et les actifs liés à la commercialisation. Ces actifs, ayant une place
prépondérante dans la chaine de valeur, forment des atouts pour qui la création de la valeur
ajoutée. Dans ce cadre, le commissaire aux comptes doit recueillir des éléments probants
concernant l’évaluation de ces actifs, leur durée de vie utile estimée, le degré de protection et son
potentiel de profitabilité. Le potentiel de profitabilité est le potentiel de l’actif à générer des
avantages économiques futurs ou à économiser des couts.
75
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Les éléments corporels comprennent les équipements techniques ainsi que tous les autres
équipements tangibles en place.
L’existence des inventaires physiques des immobilisations de façon périodique est certainement
un élément probant important pour le commissaire aux comptes pour comprendre la consistance
de ces immobilisations et s’assurer de leur existence physique.
Les actifs incorporels sont liés à la fabrication et comprennent les brevets et le savoir-faire. Ils
émanent généralement des fonctions de recherche et développement de l’entreprise ou sont
générés par le processus de fabrication lui -même. Ces savoir-faire ne sont pas toujours brevetés.
Le commissaire aux comptes doit comprendre les procédures mises en place par la direction pour
recenser et identifier les actifs incorporels car ils affecteront sensiblement les prix de transfert
étant donné qu’ils sont susceptibles de faire l’objet de transactions intergroupes et générer des
flux internes importants. Dans ce cas, il devrait s’assurer que ces flux correspondent à une
création de valeur au sein du groupe conformément aux recommandations de l’OCDE en 2015.
Ces outils comprennent principalement des éléments incorporels étant donné que les éléments
corporels ne sont pas nombreux dans ce domaine et comprennent généralement les outils
classiques de distribution à savoir le matériel roulant, les aménagements des points de vente.
Le commissaire aux comptes doit comprendre le processus mis en place par la direction pour
identifier les actifs incorporels commerciaux qui peuvent affecter le risque lié au prix de transfert
dans un contexte de transactions intergroupes : en effet les actifs incorporels peuvent donner lieu
à des facturations intergroupes fictives visant un transfert illicite de bénéfice. A titre d’exemple,
une entité peut facturer à une autre entité apparentée des redevances de franchise excessives pour
utilisation d’un nom commercial.
76
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
2-3- Les outils pratiques de prise de connaissance pour le commissaire aux comptes
Pour accomplir ses travaux de prise de connaissance, le commissaire aux comptes dispose d’un
ensemble d’outils qui lui permettent de recueillir un nombre maximal d’informations sur le
groupe ainsi que les transactions intergroupes pour faciliter le déroulement de sa mission pour
les étapes suivantes.
Le commissaire aux comptes aura à utiliser les outils conçus dans le cadre d’un audit classique
pour le contexte spécifique du prix de transfert. Les principales techniques de prise de
connaissance sont les suivantes :
• L’examen des documents juridiques et financiers,
• L’entretien avec les dirigeants du groupe,
• La préparation d’un questionnaire de prise de connaissance,
• L’utilisation des rapports des autres auditeurs,
2-3-1- Examen des documents juridiques et comptables de l’entité et des principales entités
liées
L’examen des documents juridiques et financiers des sociétés du groupe par le commissaire aux
comptes lui permet de regrouper des informations importantes concernant les conditions de
réalisations des transactions intragroupes. Ce qui permet de mieux cibler les zones de risque
inhérent aux transactions intergroupes. Dans ce sens, nous pouvons évoquer les exemples
suivants :
• l’examen des états financiers et des rapports de gestions émis par les services financiers
des filiales permet à l’auditeur d’acquérir une compréhension de la répartition des actifs
et des risques entre les différentes sociétés de groupe, et de mieux assimiler et
comprendre la nature des opérations intergroupes.
• L’examen des principaux conventions conclues par les sociétés du groupe et celles
conclues avec les sociétés hors groupe est d’une utilité certaine car il permet au
commissaire aux comptes de comparer les conditions des transactions intergroupes par
rapport à celles du marché.
• La revue des « procès - verbaux des assemblées des actionnaires et des réunions des
responsables de la gouvernance », 58 permet à l’auditeur de mettre en lumière toutes les
conventions passées avec l’entité auditée.
58
ISA 550 "Parties liées" § 15 a.
77
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Certes, l’examen des documents ne présente pas de difficultés dans la société auditée, toutefois
pour recueillir des informations auprès des autres entités du groupe cela pourrait s’avérer
difficile étant donné les limites pouvant être opposées au commissaire aux comptes relatives
essentiellement au respect du secret professionnel. On peut alors conclure que plus le
commissaire aux comptes se trouve intégré au sein du groupe (assurant plusieurs mandats en
même temps), plus il aura un accès plus facile aux informations.
78
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Il doit aussi évaluer la nécessité de recourir à d’autres techniques de prise de connaissance telles
que le questionnaire dans le cas ou il s’avère difficile pour lui de recueillir des informations
auprès d’autres sociétés du groupes dont on n’est pas commissaire aux comptes. Ces entretiens
pourraient ne pas être effectués.
Dans le cadre de sa mission d’audit classique, le commissaire aux comptes doit préparer son
questionnaire de prise de connaissance générale, tout en s’attardant sur les aspects en relations
directe avec le prix de transfert et les transactions intergroupes de façon générale.
Le commissaire aux comptes doit adopter des questionnaires selon le secteur d’activité de la
filiale et du groupe. Pour certains aspects, il pourra utiliser des questionnaires standardisés pour
tous ce qui est commun à toutes les entreprises.
Le questionnaire doit être adressé non seulement aux dirigeants des sociétés du groupe mais
aussi il doit cibler plusieurs autres intervenants à l’instar des comptables, responsables audit
interne, directeurs financiers, contrôleurs de gestion, les responsables commerciaux, les
responsables de recouvrement, responsables juridiques.
Dans ce cadre, l’auditeur doit adopter un questionnaire structuré et orienté selon la démarche de
prise de connaissance. Il pourrait être à réponses ouvertes ou à réponses guidées selon des choix
multiples.
Les normes de l’IFAC, 59 permettent à l’auditeur de consulter les rapports des confrères exerçant
des missions dans les autres filiales du groupe. En effet c’est le moyen le plus objectif pour
recueillir des informations suffisantes et adéquates auprès d’autres sociétés du groupe dont on
n’est pas le commissaire aux comptes et vu la difficulté particulière de collecter ces
informations étant donné la contrainte du secret professionnel qui pourrait lui être opposée.
Le commissaire aux comptes doit exercer son jugement professionnel pour déterminer la portée
des procédures à mettre en œuvre pour affiner sa prise de connaissance de l’entité auditée et de
tout le groupe auquel elle appartient.
59
ISA 600 " Audits d’états financiers de groupe (y compris l’utilisation des travaux des auditeurs des composantes) —
Considérations particulières
79
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’examen du dossier juridique disponible de la mère est une procédure adéquate qui doit être
complétée par une documentation juridique du secteur d’activité dans lequel évolue la mère qui
vise à l’identification de son cadre juridique et fiscal.
Dans le même cadre, l’identification du cadre juridique pour les autres entités du groupe peut
aussi être d’une utilité certaine pour le commissaire aux comptes. Cette démarche permet de
mieux identifier les zones de risque pouvant affecter le prix de transfert.
La variété des cadres juridiques et notamment les législations fiscales dans lesquels évoluent les
entités du groupe peut générer un risque accru de transfert de bénéfices vers les entités
implantées dans les zones les plus avantageuses.
Il s’en suit alors que la compréhension des juridictions des entités du groupe qui effectuent avec
l’entité auditée des transactions significatives permet au commissaire aux comptes de déceler et
anticiper toute manipulation éventuelle du prix de transfert visant la dissimulation de situations
financières ou la migration illicite de bénéfice d’une entité à une autre
L’évaluation du contrôle interne est l’une des étapes les plus importantes dans la démarche
d’audit. Lorsque les transactions intergroupes revêtent un caractère significatif, une approche
d’évaluation du système de contrôle interne lié au prix de transfert s’impose. Dans ce qui suit,
nous focalisons notre analyse sur le contrôle interne lié au prix de transfert. Ainsi que les
diligences spécifiques que le commissaire aux comptes est tenu de mettre en place.
80
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
60Anita, CAMPION, 2000, "Améliorer le contrôle interne" article publié au site DELOITE CANADA :
www.corpgov.deloite.com
81
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
aux comptes doit procéder à l’analyse des procédures internes liées aux opérations
intra-groupe dans l’objectif de 61;
• Identifier les parties liées (les sociétés du groupe et les membres de leurs
directions),
• Identifier les opérations réalisées entre les sociétés du groupe,
• Comprendre les conditions de réalisations des dites opérations (autorisation,
valorisation,…),
Le premier objectif principal assigné au contrôle interne lié au prix de transfert et qui recherché
par le commissaire aux comptes est de s’assurer que ces procédures permettent de :
Le Deuxième objectif recherché est d’évaluer le risque que ces procédures ne détectent pas une
erreur dont la valeur arithmétique est supérieure ou égale à l’erreur tolérable. Il est à rappeler que
l’objectif final étant de déterminer le niveau de confiance procuré par le système de contrôle
interne en place de façon à alléger le recours aux tests substantifs ou de détail.
Toutefois, Le risque que la direction passe outre les procédures de contrôle interne demeure
toujours considérable et significatif en effet, même si le système de contrôle interne en place
procure un niveau de confiance acceptable, le risque d’ingérence de la direction devient élevé
lorsqu’elle procède à une manipulation du prix de transfert et par la suite de tout le résultat suite
à une pressions ou une influence exercée par le groupe pour favoriser une filiale au détriment
d’une autre ou dans le cadre d’une évasion fiscale.
61
SAAD, Slim, (2006), « Caractéristiques des opérations intra-groupe et diligences des commissaires aux comptes consolidés »,
Mémoire pour l’obtention du diplôme national d’expert comptable en Tunisie, P 112.
82
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Il en résulte alors que le commissaire aux comptes doit prendre en compte considérablement ce
risque en mettant en œuvre des tests de contrôle supplémentaire relatif au prix de transfert étant
donné son risque inhérent important.
Comme première étape, le commissaire aux comptes doit évaluer l’environnement de contrôle
relatif au prix de transfert. Un environnement de contrôle est acceptable lorsqu’il procure un ton
et un climat favorable pour les activités de contrôle en instaurant une prise de conscience du
contrôle interne dans l’organisation.
Par la suite, après avoir validé l’environnement de contrôle en place, le commissaire aux
comptes procède à une prise de connaissance des procédures écrites de contrôle et juger de leur
efficacité. On parle dans ce cas d’une évaluation préliminaire du contrôle interne qui doit dans
un second temps être confirmée ou infirmée par des tests de conformité.
• couvrent tous les aspects des échanges intra-groupes dont notamment l’exhaustivité et
l’exactitude ;
• permettent de s’assurer de la réalité des échanges ;
• permettent de s’assurer de l’exactitude et la régularité des prix de transfert.
Nous proposons au niveau des annexes, un questionnaire de contrôle interne détaillé par nature
de transaction.
83
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Nous citons dans ce contexte l’exemple d’un directeur technique recruté par la société mère pour
améliorer le rendement de ses deux filiales industrielles. Toutefois, ce salarié ne fait pas l’objet
d’une facturation de la société mère vers ses filiales. Cette situation va se traduire forcément par
une sous-estimation des stocks de produits finis au niveau des deux filiales car le coût de
production ne prend pas en charge le salaire de ce directeur technique. Ce cas montre qu’en
absence de procédures efficaces de contrôle interne, un risque de non détection serait élevé d’où
un risque d’anomalies significatives au niveau des états financiers
Lors de la planification et de la réalisation des travaux d’audit, et afin de réduire le risque d’audit
à un niveau acceptable, l’auditeur doit prendre en compte le risque que les états financiers
contiennent des anomalies significatives provenant de fraudes 62
L’auditeur doit faire preuve d’esprit critique tout au long de l’audit en étant conscient de la
possibilité qu’une anomalie significative provenant d’une fraude puisse exister et ce malgré son
expérience passée avec l’entité et sa conviction quant à l’honnêteté et l’intégrité de la direction et
des personnes constituant le gouvernement de l’entreprise 63
Le terme fraude désigne un acte intentionnel commis par un ou plusieurs dirigeants, par des
personnes constituant le gouvernement de l’entreprise, par des employés ou par des tiers
impliquant des manœuvres dolosives dans le but d’obtenir un avantage illégal.
La fraude peut être commise à différents niveaux de l’organigramme de l’entité, mais elle tend à
être significative quand c’est un niveau élevé de l’hiérarchie qui en est l’auteur.
62
ISA 240 - Paragraphe 3
63
ISA 240 - Paragraphe 24
84
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
En planifiant ses travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit prendre en considération que
la manipulation du prix de transfert est une source importante de fraude.
La fraude du prix de transfert concerne les manipulations des bases de calcul utilisées pour
déterminer les prix des transactions entre les sociétés liées
Transférer les bénéfices entre les différentes filiales selon leurs situations financières ou d’après
les systèmes fiscaux dans lesquels elles évoluent constitue des zones de risque pouvant affecter
la quasi-totalité des cycles de l’entreprise.
Lors de la planification des travaux d’audit, le commissaire aux comptes doit rester vigilent
quant aux conséquences juridiques néfastes de la fraude en matière du prix de transfert qui
pourrait conduire à des délits tels que l’élaboration de faux bilan par la direction et surtout la
distribution de dividendes fictives pour favoriser une filiale au détriment d’une autre.
Dans tous les cas, la planification des tests d’audit en matière de prix de transfert doit être faite
dans le cadre d’un esprit critique pour l’ensemble des transactions intergroupes qui restent le
moyen le plus vulnérable pour les transferts de bénéfices illicites entre les filiales.
85
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’examen des conventions réglementées s’intègre dans le cadre de la démarche même d’audit et
en constitue une partie prépondérante dans la mesure où il permet la détection et la validation des
prix de transfert éventuels et d’autre part de mettre en œuvre toutes les diligences spécifiques y
afférentes.
Le champ d’application ainsi que les démarches de vérification des conventions réglementées
ont été fixé par les articles 200 et suivants du code des sociétés commerciales pour les sociétés
anonymes ainsi que l’article 115 et 116 du même code pour les sociétés à responsabilité limitée.
En relation avec l’audit du prix de transfert par le commissaire aux comptes, l’esprit de l’article
200 CSC ainsi que l’article 115 du CSC qui sont les articles qui régissent les conventions
réglementées, est d’assurer une protection de l’intérêt social des sociétés et de protéger l’intérêt
des associés ou actionnaires en instaurant une procédure formalisée d’information dans le cadre
de rapport spécial du commissaire aux comptes.
Dans ce cadre, l’article 200 du code des sociétés 64 commerciales stipule que toute convention
conclue directement ou par personne interposée entre la société d’une part et le président du
conseil d’administration , son administrateur délégué, son directeur général, l’un des Directeurs
généraux adjoints, l’un des administrateurs , l’un des actionnaires personnes physiques y
détenant directement ou indirectement une fraction de droits de vote supérieure à 10% ou la
société la contrôlant au sens de l’article 461 du CSC, d’autre part, est soumise à l’autorisation
préalable du conseil d’administration en sachant que les dispositions de cet article s’appliquent
même si les personnes indiquées sont indirectement intéressées.
64
Article 200 CSC modifié - loi no 2009-16 du 16/03/2009 modifiant et complétant le Code des sociétés commerciales
86
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
D’autre part et en vertu du même article 200 du CSC, sont également soumises à l’autorisation
préalable les conventions conclues entre la société et une autre société lorsque le président
directeur général, le directeur général, l’administrateur délégué, l’un des directeurs généraux
adjoints, ou l’un des administrateurs est associé tenu solidairement des dettes de cette société,
gérant, directeur général, administrateur ou d’une façon générale, dirigeant de cette société.
L’intéressé ne peut prendre part au vote.
Une société peut être un membre du conseil d’administration qui est le cas généralement des
sociétés liées dans ce cas son représentant permanent dans le conseil est soumis aux mêmes
droits et obligations que la personne morale elle -même selon l’article 191 du CSC.
Nous constatons alors que toute convention conclue avec une société liée (au sens de l’article
461 du code des sociétés commerciales ou bien des sociétés ayant des dirigeants en commun)
doit être soumise à la procédure de contrôle des conventions réglementées.
Pour les sociétés à responsabilité limitée, l’article 115 du CSC stipule que toute convention
intervenue directement ou indirectement entre la société et son gérant associé ou non, ainsi
qu’entre la société et l’un de ses associés devra faire l’objet d’un rapport présenté à l’assemblée
générale soit par le gérant soit par le commissaire aux comptes s’il en existe un.
Il s’agit dans ce cas des conventions réglementées en raison de leur nature ou objet quelque soit
la qualité de la personne co-contractante.
En effet, en vertu de l’article 200 du CSC, quatre types de conventions réglementées avec les
tiers sont visées à savoir :
• La cession des fonds de commerce ou de l’un de leurs éléments ou leur location à un tiers
à moins qu’elles ne constituent l’objet de l’activité principale de la société,
• L’emprunt important conclu au profit de la société si les statuts en fixent un minimum,
• La vente des immeubles lorsque les statuts le prévoient,
• La garantie des dettes d’autrui à moins que les statuts ne prévoient une dispense de
l’autorisation dans la limite d’un seuil bien déterminé en sachant que ces disposition ne
s’appliquent pas aux établissement de crédit et d’assurance.
87
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’article 200 du CSC, au niveau de son Paragraphe 2 - Alinéa 5, a élargi le champ d’action de la
procédure de contrôle pour s’étendre aux rémunérations ou avantages attribués aux dirigeants
soit directement soit par le biais d’une société liée au sens de l’article 461 du CSC, et ce dans
une intention de limiter les transferts de fonds ou de bénéfices de manière illicite.
Les dirigeants concernés sont : le Président directeur général, le directeur général, les
administrateurs.
Une note d’orientation sur les diligences du commissaire aux comptes en matière de
rémunérations des dirigeants a été mise en place en mars 2010 par l’ordre des experts comptables
de Tunisie pour définir les éléments de rémunération à auditer et à porter dans le rapport spécial
et ce en référence à la norme IAS 24 relative aux parties liées. Ces éléments incluent les
avantages à court et à long termes, les avantages postérieurs à l’emploi, les indemnités de fin de
contrat de travail et les paiements en actions.
Par ailleurs, l’article 205 du CSC, ajoute une autre transaction soumise à la procédure de contrôle
qui est celle relative aux rémunérations exceptionnelles allouées aux administrateurs pour des
missions qui leur sont affectées par le conseil d’administration.
En vertu de l’article 200 CSC - paragraphe 3, les dirigeants (PDG, DG, DGA), les
administrateurs personnes physiques, leurs conjoints, ascendants, descendants, les représentants
permanents des personnes morales membres du conseil d’administration ainsi que les
actionnaires y compris leurs conjoints, ascendants et descendants sont interdits de conclure
certaines types de conventions à savoir les emprunts, avances, découverts en compte courant
auprès de la société ou recevoir des subventions ou se faire consentir des cautions ou avals
auprès de la société pour garantir leurs engagements envers les tiers.
Toutefois, et dans le contexte de groupe, l’article 474 du CSC permet la réalisation d’opérations
financières entre les entités d’un même groupe à condition que :
88
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
• l'opération financière soit normale et n'engendre pas de difficultés pour la partie qui l'a
effectuée,
• l'opération soit justifiée par un besoin effectif pour la société concernée et qu'elle ne résulte
pas de considérations fiscales,
• que l'opération comporte une contrepartie effective ou prévisible pour la société qui l'a
effectuée,
• que l'opération ne vise pas la réalisation d'objectifs personnels pour les dirigeants de droit ou
de fait des sociétés concernées.
Il en résulte que la convention interdite devient réglementée dans le cadre d’une transaction entre
sociétés de groupe.
Il s’agit des autres conventions qui n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 200
CSC du fait qu’il s’agit d’opérations courantes conclues à des conditions normales.
Les opérations courantes sont celles effectuées par la société de manière habituelle dans le cadre
de son activité. L’opération courante s’intègre dans le cadre de l’objet social et elle est effectuée
de façon habituelle.
Lorsque la convention est conclue avec un tiers, l’information du conseil incombe au PDG ou
DG étant donné qu’il est le représentant légal de la société.
65
Article 200 - paragraphe 3 - CSC
89
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’autorisation doit être préalable à la conclusion de la convention. Elle doit aussi être spéciale en
effet chaque convention doit faire l’objet d’une autorisation à part, en conséquence, une
autorisation globale vaut absence d’autorisation.
La dite autorisation doit résulter d’une véritable délibération du conseil comme étant un organe
collégial qui doit être suivi par un vote. L’intéressé ne doit pas prendre part au vote en ce qui
concerne l’autorisation sollicitée.
Après lecture du rapport du commissaire aux comptes, l’assemblée générale ordinaire statue sur
les conventions réglementées.
Il s’agit d’un contrôle à postériori, étant donné que les conventions peuvent commencer à
produire leurs effets directement après avoir été autorisée par le conseil.
L’assemblée délibère sur chaque convention de façon séparée et procède à un vote séparée pour
chaque convention. Les droits de vote revenant à la personne intéressée ne doivent pas être pris
en compte pour le calcul du quorum et de majorité.
66
Article 200 CSC - Paragraphe 4
90
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
La procédure de réglementation permet alors de fournir une meilleure sécurité financière pour le
prix de transfert en limitant le risque de détournement ou d’abus des biens sociaux de la société
auditée et pourrait trouver son origine dans des transactions intergroupes.
Toutefois, le commissaire aux comptes est tenu de bien vérifier le respect des procédures
juridiques relatives à ces conventions en mettant en place des diligences spécifiques.
Les diligences à mettre en place par le commissaire aux comptes en matière des conventions
réglementées s’intègre généralement dans le cadre de la démarche générale de l’audit du prix de
transfert. En effet les éléments probants à collecter ainsi que les objectifs d’audit convergent
dans les deux cas.
Ainsi, et dans le cadre de l’audit des conventions, le commissaire aux comptes doit réunir les
informations nécessaires sur les conventions dont il a été avisé ou qu’il a découvert dans le cadre
de sa mission. Il procède alors à la vérification de la sincérité de ces informations en s’assurant
de la concordance par rapport aux documents de base dont elles sont issues tels que les contrats,
la comptabilité, les PV…ainsi que le rapport spécial de l’année dernière pour identifier les
conventions antérieures qui continuent à produire leurs effets.
Le commissaire aux comptes n’est pas tenu de faire des investigations ciblées pour déceler
d’éventuelles conventions avec les tiers visés par la réglementation sauf s’il considère que les
déclarations ou informations fournies par la direction ne sont pas fiables. Le commissaire aux
comptes est tenu d’être vigilant quant à l’existence possible de telles conventions et doit souvent
opérer les recoupements avec les déclarations de la direction.
Les diligences à mettre en place concernent toutes les étapes de la démarche d’audit. En effet au
cours de la phase de prise de connaissance, une attention particulière doit être prêtée pour toute
information pouvant indiquer une transaction avec une partie ciblée par la réglementation à
l’instar des sociétés liées. Lors de la phase de mise en œuvre des travaux d’audit, il faudrait
mettre en exergue toutes les conventions conclues avec les parties liées telles que la société mère
ou les autres sociétés ayant des dirigeants en commun en recueillant toutes les informations à
introduire dans son rapport spécial comme l’identité des bénéficiaires, les conditions financières,
91
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
les ristournes et commissions, les délais de paiement, les intérêts stipulés , les sûretés conférées
ainsi que l’importance des biens ou services fournis par rapport aux autres transactions en amont
ou en aval. L’objectif recherché étant de mettre à la disposition des actionnaires toutes les
informations nécessaires pour se prononcer sur les opportunités de ces conventions par rapport à
la société et préserver ainsi leurs intérêts.
Le commissaire aux comptes est appelé dans ce sens à faire un suivi spécial pour les transactions
avec les personnes visées par la réglementation dont notamment les parties liées. Ces
transactions se manifestent dans les aspects suivants :
Nous rappelons à la fin que le commissaire aux comptes ne doit pas se prononcer sur l’intérêt de
telles conventions pour la société il doit rester impartial et agir en respectant le principe de
non-immixtion dans la gestion.
L’ISA 330 - Réponses de l’auditeur à l’évaluation des risques, précise « l’auditeur doit concevoir
et mettre en œuvre des tests sur les contrôles pertinents de manière à obtenir des éléments probants
suffisants et appropriés sur l’efficacité de leur fonctionnement ».
Le contrôle interne est une base sur laquelle le commissaire aux comptes peut s’appuyer s’il
s’avère pour lui que les procédures en place sont valables pour détecter les anomalies
significatives.
Le commissaire aux compte devrait s’assurer pendant cette étape que la compréhension acquise
lors de la phase de prise de connaissance pour les procédures de contrôle interne appliquées au
prix de transfert, demeure valable et que la conception de ces contrôles est conçue de façon à
permettre de déceler les anomalies significatives. L’auditeur devrait valider le bon
fonctionnement de ces contrôles. Il est appelé à mettre en œuvre les tests suivants :
92
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
• Test de permanence : dont l’objectif serait de savoir si les procédures qui sont jugés
comme efficaces par le commissaire aux comptes sont vraisemblables sur le plan pratique
dans la mesure où elles fonctionnent efficacement tout au long de l’exercice. 67
Le contrôle interne appliqué au prix de transfert présente certaines particularités, En effet les
tests de conformité à mettre en œuvre sur les contrôles identifiés doivent permettre de fournir
une assurance raisonnable concernant:
Le commissaire aux comptes devrait valider les procédures de détermination des prix de transfert
en apportant des réponses aux questions suivantes :
• Qu’elles sont les méthodes utilisées pour valoriser les transactions intergroupes ?
• Est-ce que les méthodes utilisées permettent de déterminer un « juste » prix de transfert ?
67
HENRI, Pierre et MADERS, Jean-Luc MASSELIN, (2006), "Contrôle interne des risques : Cibler – Évaluer –Organiser -
Piloter - Maîtriser", Edition d’organisation, P 63
93
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Les tests de conformité devraient, à ce niveau fournir des éléments probants sur l’exhaustivité
des échanges intergroupes sur tous les plans. Ils doivent couvrir les aspects suivants:
• L’enregistrement comptable des factures intra-groupes au niveau des comptes de bilan et
de résultat doit être exhaustif et effectué d’une façon qui les différencie des autres
transactions avec l’hors groupe ;
• Le suivi des livraisons de marchandises intergroupes doit être opéré sur la base de bons
de livraison spécifiques et pré- numérotés. Ce contrôle assure une revue périodique pour
s’assurer que toutes les livraisons sont facturées dans une série ininterrompue en
identifiant tous les sauts de numéros éventuels ;
• La réconciliation entre les comptes clients - fournisseurs intergroupe est effectuée de
manière systématique et elle est matérialisée. Tout écart éventuel est traité en temps réel.
Dans tous les cas, le commissaire aux comptes doit procéder à des tests de conformité pour
s’assurer de la vraisemblance des résultats recueillis dans la phase initiale de prise de
connaissance, il doit vérifier que les procédures de contrôles sont correctement appliquées et ne
sont pas contournées. Il pourra aussi entre autre, faire recours aux travaux des auditeurs internes
s’ils en existent pour corroborer les résultats recueillis.
Les prix de transfert sont évolutifs, ils sont susceptibles de changer en fonction des nouvelles
circonstances qui peuvent submerger. Le commissaire aux comptes est appelé à ce niveau de
vérifier que les bases de calcul du prix de transfert évoluent activement avec tout changement. Il
s’agit donc de valider la procédure de mise à jour de ces prix.
Le commissaire aux comptes doit vérifier l’existence d’une procédure correcte de mise à jour des
prix de transfert et de l’analyse des risques qui en découle. Son absence doit indiquer une zone
de risque importante.
94
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Pour valider cette procédure, le commissaire aux comptes pourrait faire recours au questionnaire
suivant :
• Comment se fait la mise à jour des prix de transfert et est ce qu’elle est exhaustive ?
• Est-ce que la mise à jour de calcul est validée par une personne compétente et dûment
habilitée ?
• Comment est déclenchée la mise à jour des prix de transfert ?
• Ces « signaux » de déclenchement sont-ils stables c'est-à-dire ils ne risquent pas de
disparaître ou de ne plus être applicables à court terme ?
Ainsi le commissaire aux comptes peut se forger une opinion sur la fiabilité des procédures de
contrôle interne relatives aux mises à jour des prix de transfert. Il doit ensuite consolider cette
opinion par des tests de conformité.
Les tests doivent fournir des éléments probants permettant de s’appuyer sur le contrôle interne. Il
s’apparentent aux autres tests de contrôle interne évoqués au niveau des sections précédentes.
Les tests de conformité doivent focaliser sur les aspects suivants :
Un système de contrôle interne acceptable doit être non seulement efficace mais évolutif et
fonctionne de façon synchronisée et harmonieuse avec la structure en place. Un système de
contrôle interne statique en matière de prix de transfert peut générer un risque important en
matière de détermination des prix de transfert.
95
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
déterminer l’impact direct sur la filiale auditée et ensuite s’assurer au cours de la phase de mise
en œuvre des tests de procédures que ces changements ont correctement impacté les prix de
transfert déjà en place.
Par exemple un changement structurel dans le groupe peut comprendre une nouvelle répartition
géographique des pouvoirs, (Exemple : suite à un changement, une filiale Tunisienne qui
reportait au siège en Europe devient reporter à un Hub régional à DUBAI) ce qui doit impliquer
une nouvelle refacturation des frais de siège sur des nouvelles bases, le commissaires aux
comptes doit s’assurer de l’existence des procédures administratives pour s’assurer que les
nouvelles bases de facturation des frais de siège sont acceptables et ne comportent pas des
aberrances.
Pour les changements futurs, le commissaire aux comptes doit rédiger une note dans son dossier
« N+1 » en indiquant quelles sont d’après lui les incidences que devraient normalement produire
ces changements sur les prix de transfert pour préparer efficacement ses supports d’audit pour
l’année qui suit.
De point de vue timing de réalisation des tests, l’analyse préalable et notamment les listes de
questions présentées précédemment, ainsi que les tests de conformité du contrôle interne, doivent
être effectués en cours d’année. Les tests de détail sont effectués à la clôture selon les résultats
recueillis des tests de conformité.
L’étendue des tests de détail à effectuer à ce stade dépend de la qualification du risque de trouver
une erreur significative. Etant donné le risque inhérent important lié au prix de transfert, tel que
développé dans les sections précédentes, le commissaire aux comptes doit donner une
importance aux tests de détail même si le système de contrôle interne en place peut fournir une
assurance raisonnable.
Les tests sur les détails devraient être précédés par une revue analytique. C’est une étape
indispensable qui sert à repérer les premières anomalies ou incohérence à faire suivre par la suite
par un examen plus approfondi des transactions à risque d’audit élevé.
96
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
L’objectif de cette diligence est de comparer les attentes du commissaire aux comptes, compte
tenu de sa connaissance de l’entité et de son secteur d’activité, aux évolutions enregistrées au
niveau des comptes. La démarche proposée est basée sur quatre étapes définies comme suit :
1- Développer des attentes : à partir des informations collectées tout au long de la mission ainsi
que entretiens faits avec les dirigeants de la société et du groupe.
2- Fixer des seuils : il s’agit à ce niveau de déterminer le seuil pour considérer qu’une variation
serait considérée comme anormale ou diffère significativement des attentes développées au
début.
3- Calculer les écarts : ce sont les variations qui peuvent être calculées par rapport aux prix de
transfert standard ou approuvé au cours de l’exercice passé.
4- Expliquer les écarts et synthétiser : le commissaire aux comptes aura à tirer les conclusions
nécessaire à l’issue de cette étape et qui pourraient soit confirmer ou infirmer les attentes
développées au niveau de la première étape de la revue analytique.
Les conclusions tirées à partir de cette revue analytique déterminent le champ d’application des
tests de détail à mettre en œuvre. Ces tests pourraient être effectués par des techniques de
sondage ou selon le simple jugement professionnel du commissaire aux comptes.
Il à rappeler les tests substantifs qui englobent la revue analytique ainsi que les tests sur les
détails ne sont pas prédéfinis ou standards mais plutôt ils doivent être adaptés selon le contexte
de chaque mission.
Le commissaire aux comptes pourrait opter soit pour une approche corroborative basée sur les
tests de détails soit sur une approche mixte basé sur le niveau de confiance acceptable fourni par
les procédures de contrôle interne en place complétée par des tests allégés. Dans ce cas, il se
suffira d’appliquer des sondages en validant les différents postes des états financiers concernés
en se basant sur les pièces justificatives probantes.
Dans le cadre d’une approche corroborative basée sur le maximum de tests de détail, le
commissaire aux comptes doit passer en revue tous les principaux contrats ou conventions intra-
groupes. Cette diligence lui permettra aussi de rédiger son rapport spécial. Il doit vérifier que ces
conventions respectent tout formalisme dicté par les dispositions légales. Il doit aussi vérifier que
97
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
ces conventions sont vraisemblables et donnent lieu à des factures en bonne et due forme pour
permettre leur déduction et minimiser ainsi tout risque fiscal.
Les conventions intergroupes à examiner et à valider par le commissaire aux comptes sont celles:
Outre les conventions intergroupes, le commissaire aux comptes « peut inspecter des documents
comptables ou autres documents susceptibles de fournir des informations sur les relations»68.
Ces documents sont généralement les suivants :
a- Documents juridiques :
• Registre des actionnaires et registre des placements : cette diligence permet au commissaire
aux comptes de connaitre les principaux actionnaires dont les personnes morales qui
pourraient éventuellement passer des transactions avec l’entité auditée avec tous les risques
liés au prix de transfert qui en découlent.
• Les procès-verbaux : les PV pourraient renseigner sur l’existence de transactions
intergroupes ainsi que les prix de transferts pratiqués et éventuellement les méthodes de
valorisation retenues.
• Les contrats et conventions avec l’hors groupe: Le commissaire doit accorder durant sa
mission l’attention nécessaire aux conventions importantes avec l’hors groupe qui pourraient
camoufler des parties liées non révélées et ce lorsqu’elles sont conclues dans des conditions
anormales.
• Divers documents déposés et/ou reçus par l’entité auprès des autorités de réglementation des
valeurs mobilières : Il s’agit du « prospectus » 69pour les sociétés côtés en bourses et des
conventions de transfert des valeurs mobilières ainsi que des attestation d’enregistrement des
actions en bourses.
68
ISA 550 "Parties liées", § A22, P 18.
69
Mohamed, AMOUS, (2003), "La certification des prospectus d’information : diligences, mise en oeuvre et responsabilité du
commissaire aux comptes", mémoire présenté en vue de l’obtention du diplôme national d’expert comptable, IHEC de Carthage,
2003
98
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
D’après l’article 51 de la loi de finances pour l’année 2010, on entend par transfert de bénéfices
par le biais de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente, toute transaction
effectuée par l’entité concernée avec ses partenaires avec qui elle a des liens de dépendance à des
prix différents de ceux pratiqués par des entreprises indépendantes exerçant une activité
analogue 70.
Il en résulte alors que le transfert de bénéfices pourrait prendre l’une des formes suivantes : soit
une majoration des prix d’achat soit une minoration des prix de vente.
En effet et dans tous les cas, l’administration fiscale considère que la majoration des prix d’achat
et la minoration des prix de vente dans le cadre des transactions intergroupes sont assimilées à
des avantages octroyés par l’entreprise concernée à une entreprise liée. Cela entraine une
minoration du bénéfice imposable et son transfert vers une autre entité. Pour apprécier ces
70
Note commune 33/2010, commentaire des dispositions de l’article 51 de la loi n° 2009-71 du 21 décembre 2009
portant loi de finances pour l’année 2010 relative à la rationalisation des transactions entre les sociétés ayant des liens de
dépendance : " L’article 51 de la loi de finances pour l’année 2010 prévoit que le redressement est opéré lorsqu’il y a eu
transfert de bénéfices par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente. C’est le cas où le prix des
transactions pratiqué par l’entreprise concernée avec ses clients avec qui elle a des liens de dépendance, diffère des prix
pratiqués avec ses autres clients ou des prix pratiqués par des entreprises indépendantes exerçant une activité analogue".
99
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
anomalies, le législateur tunisien stipule que le prix est considéré différent lorsqu’il est nettement
supérieur ou inférieur aux prix pratiqués avec les autres clients ou entre des entreprises
indépendantes ou au prix de la même marchandise ou du même service dans un marché
concurrentiel. 71
Par ailleurs, le commissaire aux comptes qui identifie des rabais, remises ou ristournes
significatifs consentis par l’entité auditée à d’autres entreprises de son groupe doit vérifier si de
telles pratiques existent également avec les clients extérieurs au groupe. Dans l’hypothèse où
l’entité ne pratique pas de ventes comparables (identité des produits vendus et comparabilité des
volumes) avec des clients extérieurs au groupe, le professionnel doit relever l’existence de cette
pratique et alerter sur le risque fiscal qu’elle peut engendrer, tout en indiquant que ce dernier doit
pouvoir être écarté si l’entité est en mesure de prouver que la pratique est conforme à celle du
marché.
En droit comparé Français, N’accomplit pas un acte anormal de gestion une entreprise qui
consent à une société cliente, dont le capital est détenu par ses propres associés, des remises
préférentielles supérieurs à celles accordées aux autres clients, dès lors que l’avantage ainsi
consenti se justifie par l’importance et la consistance de leurs relations commerciales, le chiffre
d’affaires réalisé représentant le double et parfois le triple de celui réalisé avec les autres clients
de l’entreprise 72
Le tableau suivant illustre des cas spécifiques pour des majorations des achats ou des
minorations des ventes avec des diligences spécifiques à mettre en œuvre par le commissaire aux
comptes 73 :
71
Note commune 33/2010, commentaire des dispositions de l’article 51 de la loi n° 2009-71 du 21 décembre 2009 portant loi de
finances pour l’année 2010 relatif à la rationalisation des transactions entre les sociétés ayant des liens de dépendance : "Le prix
est considéré différent lorsqu’il est nettement supérieur ou inférieur aux prix pratiqués avec les autres clients ou entre des
entreprises indépendantes ou au prix de la même marchandise ou du même service dans un marché concurrentiel".
72
CAA bordeaux 22-2-1990 N° 742 :RJF 6 /90n°655.
73
Amar José, mémoire pour l’obtention du diplôme d’expert comptable en France - page 28 - 2010
100
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Questions Commentaires
Les prix pratiqués s’écartent-ils des Si oui, de tels niveaux de prix sont-ils nécessaires pour
prix du marché ? permettre la conclusion d’affaires, compte tenu de l’état
de marché et des conditions de la concurrence ?
Les prix facturés à la société Si oui, la société auditée reçoit-elle une contrepartie
auditée aux sociétés liés font-ils équivalente à la majoration /minoration du prix
l’objet d’une majoration/minoration
significative ?
La société auditée consent-elle des Si oui, ceux-ci reflètent-ils les conditions normales par
délais de paiement inhabituels à ses rapport aux prix pratiqués ?
partenaires?
Le prix de vente à la société liée Si oui, un tel prix est-il conforme à l’intérêt commercial
est-il inférieur à celui proposé aux de la société auditée et quels sont les éléments permettant
autres clients ? d’apprécier la valeur d’un tel intérêt commercial ? la
différence se justifie –t- elle par un volume d’affaires plus
élevé, des conditions différentes ou des marchés
différents ?
Les taux de marges pratiqués pour Si oui, des conditions différentes justifient-elles les
les ventes aux sociétés liées sont-ils différences de taux de marges ?
inférieurs à ceux pratiqués sur le
marché?
La société auditée a-t-elle effectué Si oui, reflètent-elles un avantage de même contrepartie
des transactions avec des dont bénéficie la société auditée ?
partenaires correspondants à :
la vente d’éléments d’actifs à un
prix inférieur à la valeur réelle ou
bien la vente de titres à un prix
inférieur à la valeur réelle ?
Dans le cadre de ses diligences normales pour l’audit du prix de transfert, le commissaire aux
comptes peut se référer au guide ci-bas sous forme de questionnaire pour illustrer des situations
concrètes de test d’audit 74:
74
Amar José, mémoire pour l’obtention du diplôme d’expert comptable en France - page 30 - 2010
101
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Questions Commentaires
Les taux de commissions pratiqués sont-ils Si oui, entrent-ils dans la rémunération de
différents de ceux anormalement pratiqués par services de différentes nature ?
des entreprises similaires ?
L’assiette des commissions est-elle en ligne avec Si non, vérifier les conditions justifiant la
celle habituellement pratiquée dans le secteur différence pratiquée.
d’activité ?
Des suppléments de rémunération ont-ils été Si oui, sont-ils motivés par une contrepartie
versés en raison de difficultés financières de la attendue équivalente justifiant ce supplément de
société commissionnée ? rémunération ?
Les frais du siège sont des charges communes engagées par le groupe en vue d’entreprendre des
prestations en faveur de l’ensemble de ses filiales. La difficulté réside dans le fait qu’il n’existe
pas de règles spécifiques et claire pour la détermination des clefs de répartition de ces charges
communes entre les filiales d’où un vaste champ d’interprétation.
Le commissaire aux comptes doit rester vigilant sur les procédés de répartition, car les bases de
répartition ne sont pas les mêmes (différences de législations entre les pays, normes
comptables …) c’est pourquoi les éléments servant de base de répartition doivent être
comparables.
Le commissaire aux comptes peut se référer au questionnaire suivant pour auditer les frais du
siège 75
Questions Commentaires
La participation de la société auditée aux frais d’exploitation Si non, il faut s’assurer de la
de la société mère étrangère correspond-elle à des contrepartie reçue par la société
rémunérations normalement dues à celle-ci ? auditée
Si oui, il faut s’assurer que ces frais
La société auditée a-t-elle payé des frais la société mère au-
correspondent à des contreparties
delà des rémunérations normalement dues ?
supplémentaires.
75
Amar José, mémoire pour l’obtention du diplôme d’expert comptable en France - page 32 - 2010
102
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
Le commissaire aux comptes doit prêter une attention particulière aux opérations financières
réalisées dans des conditions particulières et notamment entre des sociétés apparentées du fait
que ce type de transaction peut dissimuler un risque de transfert de bénéfices. En effet, lorsque
une entreprise consent des prêts ou avances sans intérêts ou comportent le paiement d’intérêts
inférieurs à la normale en faveur des autres entités, elle doit obtenir une contrepartie claire et
identifiable sous forme d’avantages économiques futurs tirés de cette opération. Par exemple,
l’achat de marchandise à des conditions très préférentiels, ou bien l’obtention d’une exclusivité
de vente sur un secteur géographique bien déterminé etc…
Le droit comparé français, lorsqu’une entreprise française consent des prêts sans intérêts à ses
filiales situées hors de France, elle est présumée, en vertu de l’article 57 du CGI, avoir réalisé un
transfert de bénéfices et, sauf preuve contraire, l’administration est fondée à réintégrer dans le
bénéfice imposable de l’entreprise française une somme représentant les intérêts que, d’après son
estimation, la dite entreprise aurait du percevoir de ses filiales 76
Toutefois, la même position jurisprudentielle prévoit que lorsque la renonciation aux intérêts
s’intègre dans le cadre d’une gestion commerciale normale en vue de développer ses propres
exportations, l’opération serait qualifiée de normale et ne donnerait pas ainsi à un redressement.
Le questionnaire ci – bas pourrait fournir au commissaire aux comptes un support pour les
diligences à accomplir pour l’audit de cette transaction particulière 77 :
Questions commentaires
Le prêt consenti est-il assorti d’un taux Si nom, il faut s’assurer que la perte d’intérêts est compensée
d’intérêt ? par ailleurs
La société a-t-elle renoncé aux intérêts Si oui, il faut s’assurer que cette renonciation est compensés par
qui lui sont dus ? ailleurs
La société a-t-elle consenti des prêts Si oui, la perte de recettes résultante est-elle compensée par un
sans intérêt ? accroissement des autres postes de recettes ?
La dispense d’intérêt a-t-elle pour Si oui, dans quel proportion cette dispense est–elle compensée
objet de développer les ventes ? par une augmentation de recette ?
La société auditée a-t-elle accordé une Si oui, celle-ci a-t-elle permis à la société auditée un
caution gratuitement à la société liée ? développement significatif de son chiffre d’affaires en regard de
la valeur de la caution
76
CE21décembre1964 n°54142 ET 56200
77
Amar José, mémoire pour l’obtention du diplôme d’expert comptable en France - page 33 - 2010
103
Titre II : Proposition d’une méthodologie d’audit appliquée au prix de transfert
C’est l’une des formes les plus répandues avec un impact significatif sur les états financiers au
niveau de la rubrique des comptes clients utilisée par les entités apparentées pour transférer les
bénéfices au sein du même groupe. Le commissaire aux comptes doit alors y prêter toute
l’attention nécessaire.
Dans la législation fiscale tunisienne, l’abandon de créance est admis dans la limite des petites
créances de 100 DT. Au-delà, l’abandon devient non déductible et donne lieu à un redressement
de l’assiette d’impôt et pourrait être considéré comme un acte anormal de gestion.
Sur le plan juridique le commissaire aux comptes doit être très vigilent car ce type d’opération
peut dissimuler un cas d’abus des biens sociaux.
Pour se prémunir contre ce risque, il doit réunir des éléments probants montrant que les
abandons ne sont pas octroyés à titre gratuit mais plutôt av