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Activité physique
chez l’enfant et l’adolescent
en surpoids ou obèse
Modalités de prescription
INTRODUCTION La prescription en AP s’inscrit dans
la durée afin de pérenniser des com-
L’augmentation importante de la prévalence de l’obésité de l’enfant portements actifs. Elle peut avoir
en fait un problème majeur de santé publique. Les obésités com- pour objectifs le reconditionnement
munes sont consécutives à des apports énergétiques dépassant les physique, l’amélioration de l’image
dépenses, quels que soient les mécanismes en cause. La diminution de soi, la resocialisation… Pour cela,
progressive des temps consacrés à la pratique d’activité physique (AP), il est nécessaire de connaître les ca-
ractéristiques, les déterminants, les
dans les sociétés industrialisées, joue très certainement un rôle majeur
contraintes et les bénéfices attendus
dans le développement de l’obésité pédiatrique. Chez les enfants et
de l’AP ainsi que les différentes pos-
les adolescents en surpoids ou obèses, ce manque chronique d’AP sibilités de pratique. Il est également
entraîne une altération progressive de leur condition physique et une nécessaire de bien connaître les para-
image corporelle négative. Plus vulnérables face aux moqueries de mètres d’évaluation clinique à prendre
leurs camarades, les activités physiques et sportives (APS) deviennent en compte afin de réaliser une pres-
synonymes de souffrances physiques et morales. Ils développent alors cription d’AP la plus adaptée aux spé-
cificités de chaque enfant pour une
des attitudes d’évitement, voire de rejet des pratiques sportives. Les
orientation en toute sécurité.
jeux vidéo, l’ordinateur ou encore la télévision occupent, de ce fait,
une place de plus en plus importante chez ces jeunes.
Dr Hélène Thibault*, Sylvain Quinart**, Sophie Renaud***, DÉFINITION,
David Communal****, Dr Jean-Baptiste Mouton***** BÉNÉFICES,
CONTRAINTES ET
DÉTERMINANTS DE
RECOMMANDATIONS Autorité de Santé (HAS) (1) a actua- L’ACTIVITÉ PHYSIQUE
DE LA HAUTE AUTORITÉ lisé fin 2011 ses recommandations CHEZ L’ENFANT ET
DE LA SANTÉ de bonne pratique sur « Surpoids L’ADOLESCENT OBÈSE
Dans le cadre du Programme Natio- et obésité de l’enfant et de l’adoles-
nal Nutrition Santé (PNNS), la Haute cent ». Fondée sur les principes de DÉFINITION
l’éducation thérapeutique du pa- L’activité physique se définit comme
* Pédiatre CHU de Bordeaux - RéPPOP Aquitaine
tient, la prise en charge doit aider « tout mouvement corporel produit
** Enseignant APA, RéPPOP-Franche Comté - CHU l’enfant/adolescent et sa famille à par les muscles squelettiques qui en-
Besançon faire des choix raisonnés qui visent à traîne une augmentation substantielle
*** Enseignante APA, RéPPOP-Aquitaine Bordeaux
lutter progressivement contre le dé- de la dépense d’énergie au-dessus de la
**** Directeur et Enseignant en Activité Physique
Adaptée de l’Association Prof’APA (Bordeaux) - Maître séquilibre entre apports (alimenta- dépense énergétique de repos » (2).
de conférences associé (MAST) à l’UFR STAPS - UPS tion) et dépenses énergétiques (ac- Elle se caractérise par sa nature
Toulouse III
tivité physique) (1). En prenant en (type), son intensité, sa durée, sa
***** Pédiatre, praticien hospitalier, service des
maladies cardiovasculaires congénitales, Hôpital compte les aspects physiologiques, fréquence et son contexte de pra-
Haut-Lévèque psychologiques et sociaux. tique et comprend :
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UÊ les activités scolaires et de la vie organes et fonctions de façon très Importance des facteurs
courante ; différente selon leur type, leur in- psychologiques
UÊ les activités de loisir (structurées tensité et leur durée. Chez le jeune Les déterminants psychologiques
ou non) avec : obèse, la surcharge pondérale peut conditionnent la pratique d’AP. En
- l’exercice physique : activité mus- entraîner des sollicitations énergé- effet, une bonne estime de soi favo-
culaire planifiée, répétée et contrô- tiques plus importantes et motrices rise l’engagement dans une AP, en
lée permettant d’améliorer sa différentes de celle du jeune non particulier par le biais de la motiva-
condition physique ; obèse même sédentaire. tion (2).
- le sport, AP codifiée et organisée Certains enfants en surpoids peu-
avec ou sans compétition. Des contraintes au niveau de vent exprimer un mal-être lié à
l’appareil locomoteur une mauvaise image de leur corps
INTÉRÊT Lors de la pratique d’AP, les engendrant des réticences à la pra-
L’intérêt de l’AP dans la prévention contraintes imposées à l’appareil tique de l’AP. De plus, les enfants
et le traitement de l’obésité infan- locomoteur et les risques trauma- obèses bénéficient parfois de moins
tile n’est plus à démontrer (3). L’AP tiques induits sont plus élevés chez de soutien parental (encourage-
a des effets significatifs sur la condi- l’enfant obèse du fait de l’encom- ment ou pratique personnelle).
tion physique et la composition brement et du poids des membres L’obésité peut également conduire
corporelle (4). Par ailleurs, l’aug- alors même que la force musculaire à un isolement secondaire et à une
mentation de l’AP chez l’enfant ou peut être proche de celle des séden- stigmatisation par les camarades qui
l’adolescent obèse induit des béné- taires. peut pousser l’enfant à éviter ses pairs
fices sur les facteurs de risque méta- ou du moins à éviter de partager avec
boliques et cardiovasculaires, et les Des sollicitations cardio- eux certaines AP. Durant ces périodes
facteurs psychologiques (l’estime vasculaires plus importantes de solitude, l’ennui et la culpabilité
de soi, image corporelle) indépen- Pour un niveau d’exercice iden- mènent au grignotage et à la séden-
damment de la baisse de l’indice de tique, les sollicitations cardiovas- tarité, ce qui participe à l’entretien ou
masse corporelle (IMC) (5). culaires et respiratoires sont plus au développement de l’obésité.
importantes chez l’enfant et l’ado-
Des sollicitations énergétiques lescent obèse, avec des fréquences
différentes cardiaques et des débits ventila- RECOMMANDATIONS
Les AP sollicitent les systèmes, toires plus élevés. GÉNÉRALES EN TERMES
D’ACTIVITÉ PHYSIQUE
ENCADRÉ 1 - RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES De nombreuses recommandations
AUX ENFANTS ET ADOLESCENTS (1). existent dans le domaine de l’acti-
vité physique. Certaines ont seule-
Chez l’enfant à partir de 6 ans et les adolescents : ment pour objectif de contribuer
s Il est recommandé de parvenir à cumuler plus de 60 minutes au maintien de l’état de santé. Ce-
d’activité physique quotidienne modérée à intense, sous forme de : pendant, des recommandations
- jeux : activité récréative notamment à l’extérieur (ballon, vélo, plus spécifiques, visant à améliorer
rollers, frisbee...) ; l’état de santé pour les enfants et
- loisirs : danser, aller à la piscine, à la patinoire, au bowling, etc. ; adolescents (www.mangerbouger.
- sports : scolaire, association sportive, maison de quartier, etc. ; fr) et en particulier chez les jeunes
- déplacements : promener le chien, aller à l’école à vélo, privilégier en surpoids, précisent qu’il est
les escaliers, etc. ; nécessaire de cumuler au moins
- activités de la vie quotidienne : passer l’aspirateur, faire les courses, 60 minutes d’activité physique par
tondre la pelouse, etc. jour (1). Ces activités doivent être
s Il est recommandé de limiter au maximum les comportements principalement endurantes, in-
sédentaires, notamment les temps d’écran à visée récréative clure systématiquement des pra-
(télévision, console de jeux, ordinateur, téléphone portable). tiques plus vigoureuses, et favoriser
Extraits des recommandations de bonnes pratiques « Surpoids et obésité de l’enfant le renforcement musculaire et os-
et de l’adolescent - Actualisation des recommandations 2003 » - Septembre 2011 (www.has.fr). seux 2 à 3 fois par semaine (Enca-
drés 1 et 2).
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cardio-vasculaire et respiratoire ; les habitudes de vie ayant contribué l’exercice planifié, dans le contexte
- l’évaluation de la tolérance ostéo- au développement et au maintien familial, scolaire ou communau-
articulaire (appareil locomoteur). de l’obésité (arrêt de la pratique, taire » (8).
sédentarité, temps passé devant les
DIAGNOSTIC ÉDUCATIF AUTOUR écrans, etc.). Notion de plaisir et implication de
DE L’ACTIVITÉ PHYSIQUE ET DE LA En effet, la réussite de la prise en la famille
SÉDENTARITÉ charge de l’enfant et de l’adolescent Permettre à l’enfant d’éprouver du
obèse repose sur la modification plaisir à pratiquer une AP en toute
Objectifs des comportements (sédentarité et sécurité est indispensable pour ob-
Il est nécessaire de réaliser un dia- AP) et dans l’individualisation des tenir des effets bénéfiques à long
gnostic éducatif ou un entretien de APS, ceci afin de pérenniser une terme. L’implication de la famille
compréhension (Tab. 2) explorant pratique physique régulière. L’OMS est essentielle pour accompagner
différentes dimensions autour de précise que pour mieux apprécier cette reprise d’activité. L’objectif est
l’activité physique et de la sédenta- toutes les dimensions de l’activité d’inscrire le jeune et sa famille dans
rité. Cet entretien permet d’évaluer physique chez l’enfant, il est indis- une démarche de projet, en prenant
la demande et les besoins exprimés pensable de considérer que « l’ac- en compte les freins qui existent au-
ou non de l’enfant ou de l’adoles- tivité physique englobe notamment tour des APS. La prise en charge sera
cent et de sa famille. Il a pour but le jeu, les sports, les déplacements, donc graduée en fonction des diffi-
d’identifier les leviers sur lesquels il les tâches quotidiennes, les activités cultés à investir le champ de l’activi-
est possible d’agir afin de modifier récréatives, l’éducation physique ou té physique (niveau d’obésité, limite
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de soins de suite et de réadaptation).
ELABORATION D’OBJECTIFS EN
TERMES D’AP DANS UNE DÉMARCHE
D’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE
La prescription d’activité physique,
comme l’ensemble de la prise en
charge des enfants et adolescents en
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