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Ra e du Vélodrome d’Hiver

Généralités
La rafle du Vélodrome d’Hiver est la plus grande arrestation massive de Juifs réalisée en France pendant la
Seconde Guerre mondiale.
Entre les 16 et 17 juillet 1942, plus de 13 000 personnes, dont près d’un tiers d’enfants, sont arrêtées avant
d’être détenues au Vélodrome d’Hiver, et dans d’autres camps.
Ils sont ensuite envoyés par des trains spéciaux vers le centre d’extermination d’Auschwitz. Moins d’une
centaine d’adultes en sont revenus.

Ces arrestations sont réalisées avec le concours de 9000 policiers et gendarmes français, sur ordre du
gouvernement de Vichy.

Après négociations, de cette rafle sont exclus les Juifs de nationalité française. Elle ne concerne, de fait, que
les étrangers, les apatrides et ceux déchus de la nationalité française par la loi du 22 juillet 1940, ou encore
ceux ayant le statut de réfugié.

L’arrestations de plus de 4000 enfants répond à l’initiative du gouvernement de Vichy, les Allemands
n’avaient demandé que les Juifs de plus de 16 ans.

Il faut attendre 1995 pour que Jacques Chirac reconnaisse la responsabilité du gouvernement français dans
cette rafle.

Éléments de contexte
Les premières rafles en France commencent en 1940 en zone libre et en mai 1941 en zone occupée (rafle du
billet vert, rafle du 11ème arrondissement, rafle des notables…).

Depuis juin 1942, une planification est décidée : l’opération « Vent printanier » ou « Vent de printemps » doit
organiser une rafle pour les trois pays d'Europe occidentale occupés par l'Allemagne (France, Pays-Bas et
Belgique). Ce nom de code est un mythe selon Laurent Joly.

Organisation
l’État français et les nazis négocient sur une base de 40 000 Juifs de la zone occupée, dont 22 000 adultes de
la région parisienne, avec un raient de 40 % de Juifs français et 60 % de Juifs étrangers.

Le 2 juillet 1942, René Bousquet assiste à une réunion de planification dans laquelle il ne formule aucune
objection à l'arrestation des Juifs apatrides, mais exprime son inquiétude devant le fait « gênant » que la
police française soit chargée de l'exécution des plans dans la zone occupée.

Bousquet obtient un compromis selon lequel la police raflerait uniquement les Juifs étrangers en échange
d'un réarmement de la police française — Vichy, et en particulier Pétain, étant opposé à l'arrestation des Juifs
français.

Bénédicte Vergez-Chaignon et Robert Paxton contestent qu’il s’agissait de protéger les Juifs français, selon
eux : « toutes les mesures de Vichy concernant les Juifs visaient autant les citoyens français que les
immigrés ».
Toutefois, selon André Kaspi, « Vichy a sacrifié les Juifs étrangers pour mieux protéger les Juifs français,
mais sans Pétain, les Juifs de France auraient subi le même sort que ceux de Belgique, des Pays-Bas ou de
Pologne. Pendant deux ans, ils ont d'une certaine manière bénéficié de l'existence de l'État français. »
fl
La circulaire du 13 juillet 1942 de la préfecture de police, signée par Émile Hennequin, indique que la rafle
vise les Juifs allemands, autrichiens, polonais, tchécoslovaques, russes (réfugiés et soviétiques, c'est-à-dire
Blancs et Rouges) et apatrides, âgés de 16 à 60 ans pour les hommes et de 16 à 55 pour les femmes, ainsi que
leurs enfants (qui étaient français pour une très grande majorité).

La responsabilité de la rafle d'enfants de moins de 16 ans en revient d'abord aux représentants d'Adolf
Eichmann à Paris pour qui il devient indispensable de déporter des enfants afin d'atteindre l'objectif de
22 000 Juifs apatrides arrêtés à la suite des négociations avec les autorités de Vichy.

Bien que l'on ait tenu la police pour responsable de la rafle d’enfants, l’ordre émane en fait de Pierre Laval,
qui invoque une mesure « humanitaire » visant à ne pas séparer les familles.

En 1967, les auteurs Levy et Tillard ont évoqué, sans indiquer leurs sources, la participation de 300 à
400 militants du Parti populaire français (PPF). De nombreux auteurs ont repris cette information en citant
Lévy et Tillard ou d'autres sources. Cette participation du PPF n'est pas reprise par Laurent Joly, en 2018.

Laurent Joly rectifie quelques erreurs entretenues les cinquante dernières années : le nom de code
« Opération vent printanier », implication de militants collaborationnistes aux arrestations, rumeur de
centaines de suicides, etc.

Mémoire
« Le Vél' d'Hiv' ? L'événement est devenu depuis 1993 le symbole officiel du Vichy antisémite. Mais la
grande rafle de juillet 1942, ainsi que toutes celles qui ont suivi, en zone nord comme en zone sud, furent
moins la conséquence de l'antisémitisme d'État que celle de la collaboration d’État.
Le rôle des Bousquet, Leguay et consorts s'explique non par un fanatisme antijuif, mais par la politique d'un
régime prêt à payer le prix du sang, celui des autres, la défense d'une certaine conception de la
« souveraineté nationale ».
Cette politique n'a pas de lien nécessaire avec les lois antijuives promulguées deux ans plus tôt par Vichy.
C'était même ce que la mémoire nationale était supposée intégrer : la part d'autonomie à l'égard de
l'occupant. Certes, ces lois ont favorisé ultérieurement l'application de la « Solution finale », un crime
prémédité et organisé par les nazis. Statuts, fichiers, lois d'exclusion françaises ont facilité les arrestations
massives de 1942-1943.
Mais le sens de ces lois, promulguées entre juillet 1940 et l'été 1941, n'était pas celui de prémices d'une
extermination, projet qui, à ce moment-là, n'est pas à l'ordre du jour, ni dans la politique de Vichy ni même
dans celle du Reich. Ces lois françaises exprimaient un principe d'exclusion politique et sociale inscrit au
cœur d'une certaine tradition française et qui reste aujourd'hui encore vivante. »

Vichy, un passé qui ne passe pas, Éric Conan et Henry Rousso (1996)

Entretien avec Laurent Joly


Expliquer la rafle du Vélodrome d’Hiver.
Une rafle, cela veut dire que des personnes sont arrêtées en masse.
Ce ne sont pas interpellations individuelles ou ponctuelles. C’est une vaste opération de police parisienne qui
vise 35 000 Juifs étrangers et leurs enfants (qui eux sont français, car nés en Franc pour la majorité d’entre
eux), à Paris les 16 et 17 juillet 1942.
En moins de deux jours, 12 884 sont arrêtés.

Et puis il y a le Vélodrome d’Hiver. Un palais des sports dans le 15e arrondissement. Les familles arrêtes y
sont incarcérées sans connaître leur sort. Les Allemands ne disent pas clairement ce qui attend les
prisonniers.
À Auschwitz, les chambres à gaz sont prêtes, mais pas les crématoires. Les nazis ont donc besoin d’un peu
de temps avant de déporter les enfants, tous destinés à la chambre à gaz, contrairement aux adultes dont
certains rentrent dans le camp pour y périr comme esclaves.
Au final, presque toutes les personnes arrêtées ont été déportées dans les deux mois. Seule une centaine de
ces victimes survivra.
C’est la mise en oeuvre concrète de la politique génocide des nazis en France.

En même temps, il y a quelque chose d’effroyablement banal dans la façon dont les choses se déroulent.
Seuls des agents ordinaires sont impliqués : des gardiens de la paix, des gendarmes, des chauffeurs de bus.

L’opinion est en partie choqué par la séparaient des enfants de leurs familles.

État de l’historiographie et nouveautés apportées par Laurent Joly.


Les mécanismes de la collaboration étaient bien connus, grâce aux travaux d’historiens comme Michaël
Marrus, Robert Paxton et surtout Serge Klarsfeld.
On sait généralement comment ont oeuvré l’État français, les politiques et les services administratifs pour
livrer les milliers de juifs à l’occupant.

En revanche, la recherche avait moins avancé sur le recueil et l’analyse de témoignages et surtout sur la
dimension policière de la grande rafle.

Nouvelles archives, contenant notamment des « paroles » de policiers, des témoignages de victimes, de
concierges, et des copies de rapports d’arrestation. Cela permet de comprendre dans quel esprit opéraient les
policiers et quelle était leur marge de manoeuvre, s’ils disposaient de ressources pour sauver des Juifs ou si
au contraire certains ont fait du zèle…

Ces documents inédits ont permis de reconstituer ce qui s’est passé de façon extraordinairement fine et
concrète. Cela concerne le rôle de voisins ou de concierge par exemple.
Les policiers sont obligés de leur demander d’identifier les familles pour procéder aux arrestations. Or les
concierges peuvent avoir des attitudes très différentes d’un immeuble à l’autre. Certains prétendent que les
personnes sont absentes, d’autres insistent pour que les policiers cherchent mieux, lorsqu’ils pensent que des
familles sont restées cachées dans l’immeuble.
À l’époque, les loyers sont collectés tous les trois mois, le 15, et ce fut le cas la veille de la rafle qui a début
le 16 juillet. Le concierges savent exactement qui est présent et sous quel nom.

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