MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023

80E ANNÉE – NO 24566

3,40 € – FRANCE MÉTROPOLITAINE
WWW.LEMONDE.FR –
FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY
DIRECTEUR : JÉRÔME FENOGLIO

SCIENCE & MÉDECINE – SUPPLÉMENT LES PÉPITES DE L’ACTUALITÉ SCIENTIFIQUE ET MÉDICALE DE 2023

Israël-Hamas : une guerre toujours plus meurtrière

▶ De retour de Gaza, lundi,
le premier ministre israé-
▶ Le bilan ne cesse de
s’alourdir. Plus de 20 000
▶ Les capacités du Hamas
ont été érodées, mais l’orga-
▶ Après les campagnes
aérienne et terrestre, 1 ÉDITORIAL
lien, Benyamin Nétanya- Palestiniens sont morts. nisation n’a pas été déman- une troisième phase L’OFFENSIVE SANS FIN
hou, a prévenu : « Nous Ce week-end, 166 Gazaouis telée. L’armée israélienne se profile, qui vise à
intensifierons les combats ont été tués, ainsi que se prépare pour la bataille établir une zone tampon DE NÉTANYAHOU
dans les jours à venir » 14 soldats israéliens du centre de l’enclave PAGE 2 PAGE 2 4

Voitures électriques La réforme

2023
du bonus écologique inquiète
la france a décidé de rogner sur tion du bonus au profit des auto-
le bonus écologique des voitures mobiles fabriquées en Europe de-
électriques. En 2024, le montant vrait affecter trois modèles parmi
de celui-ci passera de 5 000 à les plus vendus : la Spring, la Tesla
en
2023 4 000 euros. En outre, moitié
moins de véhicules seront sub-
Model 3, la MG4. Ces mesures
devraient exacerber la concur-

année
ventionnés. Plus précisément, rence et bénéficier aux nouveaux
ceux qui viennent d’Asie, à l’em- Renault R5 et Scénic, Citroën ë-C4
preinte carbone élevée, seront les et Peugeot e-3008.
plus pénalisés. Cette réorienta- PAGE 1 2

Souveraineté Féminicides

de l’IA
L’avenir incertain La face cachée
des mines de des suicides
JEANNE MACAIGNE

L’année de l’intelligence artificielle

forcés
Depuis le lancement de l’agent conversationnel ChatGPT, à la fin de l’année 2022,

métaux françaises
les innovations liées à l’IA croissent dans tous les domaines : médecine, chimie, physique,
mathématique… Un succès fulgurant qui engendre aussi interrogations et critiques

Q
uelle année pour l’intelligence
artificielle ! Ce concept né dans
les années 1950 n’a jamais été
aussi présent, y compris chez
les profanes, depuis la mise en
ligne de l’agent conversa-
tionnel de l’entreprise OpenAI, ChatGPT, le
30 novembre 2022. En un an, les innovations,
liées ou non aux modèles génératifs dont
ChatGPT est la figure de proue, défraient la
chronique économique (avec la compétition
féroce entre entreprises installées et start-up),
politique (avec la négociation au niveau euro-
péen d’une régulation pour les technologies
à des questions médicales étaient jugées
meilleures, par des humains, que celles de
vrais médecins.
En juillet, une équipe de l’université de
Washington appliquait les principes de la
génération d’images utilisées par les célèbres
outils Midjourney ou Stable Diffusion pour
obtenir de nouvelles structures de protéines
ayant possiblement des intérêts biologiques.
Cet été encore, deux travaux des universités
Stanford et de Californie à San Francisco don-
naient la parole à des patients handicapés
grâce à des implants cérébraux et à une tra-
duction de leurs signaux en voix. Et, en octo-
contenus protégés par le droit d’auteur, pour
gagner au jeu de stratégie Diplomatie, pour
piloter des drones ou faire sortir une bille
d’un labyrinthe… Selon le rapport annuel
« State of AI », les publications scientifiques
croissent dans tous les domaines, médecine,
chimie mais également économie, physique
ou mathématiques. Le slogan « L’IA pour la
science » se répand partout.
Biais, erreurs, « hallucinations »…
Ces succès s’accompagnent aussi de criti-
ques. Les résultats de ces IA ne sont pas tou-
jours reproductibles. Des défauts persistent,
s’effondrer sur elles-mêmes. Sans compter
que bien des réponses générées par les agents
conversationnels restent inexpliquées.
Des scientifiques sont allés plus loin, signant
plusieurs tribunes. Geoffrey Hinton, l’un des
pionniers du renouveau des méthodes d’ap-
prentissage par réseaux de neurones, a démis-
sionné de Google et évoque des « risques pour
l’humanité ». Yoshua Bengio, autre pionnier,
appelle à gérer ces risques au plus vite.
La communauté scientifique constate éga-
lement à quel point le domaine lui échappe.
La recherche se fait de plus en plus dans les
entreprises privées, de moins en moins

L’exécutif prévoit l’extrac- Cette infraction,

d’intelligence artificielle), judiciaire (avec des
procès liés au respect du droit d’auteur) ou
même sociétale (pour ou contre l’utilisation
de ChatGPT à l’école ?)…
Dans les laboratoires de recherche aussi, les
cerveaux ont chauffé. Dans le domaine de la
santé, notre dossier de mai dressait un inven-
taire non exhaustif d’initiatives destinées à
prédire, à partir d’une photo, si un foie peut
être greffé. Ou à identifier des malformations
cardiaques précoces sur un fœtus. En mai,
Google et sa filiale DeepMind annonçaient
bre, une équipe de Meta semblait lire dans les
pensées, en reproduisant des images vues par
des cobayes grâce, notamment, à des IRM.
En novembre, DeepMind frappait deux fois
dans la revue Nature, grâce à un simulateur
de la météo à dix jours, plus rapide que les
supercalculateurs actuels, et avec un logiciel
de « petit chimiste » qui a prévu des centaines
de milliers de nouveaux alliages potentielle-
ment intéressants.
L’année 2023 a vu aussi des avancées pour
imaginer les systèmes de réglages de l’optique
comme, dans les modèles de type génératif,
la présence de biais, d’erreurs, d’inventions
de résultats (« hallucinations », dans le jar-
gon) ou la fragilité face à des « attaques » (des
consignes bien choisies peuvent conduire à
faire déraper les IA). Les tests qui évaluent les
performances sont contestés, car suscepti-
bles d’exagérer les capacités cognitives de ces
logiciels. L’opacité règne souvent, sur les
programmes eux-mêmes, mais aussi sur la
manière de les mettre au point. En se nour-
rissant de textes produits par les machines,
ouvertes sur leurs travaux : 40 % des exposés
dans les conférences sont issus de laboratoi-
res privés, le double de ce qu’ils représen-
taient en 2012, selon une étude du MIT et de
l’université Virginia Tech. Le monde acadé-
mique s’interroge donc sur son rôle à l’avenir,
contraint de s’aligner sur l’agenda des entre-
prises par des collaborations, ou d’explorer
des sujets risqués, mal soutenus.
Sans craindre de se tromper, on peut pré-
dire que 2024 restera bouillonnante en intel-
▶ Depuis le lancement de ChatGPT, les tion de métaux stratégi- inscrite dans la loi du
ques comme le lithium, 30 juillet 2020, est en forte
ligence artificielle. p

innovations liées à l’intelligence artificielle (IA)

que les réponses de leur logiciel MedPaLM-2 adaptative des télescopes, pour détecter des les futures IA risqueraient également de david larousserie

La semaine prochaine, retrouvez deux pages « Science & médecine » dans votre quotidien du mardi daté mercredi

Cahier du « Monde » No 24566 daté Mercredi 27 décembre 2023 - Ne peut être vendu séparément

croissent dans tous les domaines. le tungstène, le nickel, hausse, mais peu visible
le cuivre ou le cobalt, et difficile à prouver.
Non sans interrogations et critiques présents dans le sous-sol En 2022, 759 femmes
▶ Reportage dans la « Cerebral Valley » de français. Des projets sont se sont suicidées ou ont
San Francisco, qui voit fleurir les start-up de l’IA déjà lancés ou à l’étude, tenté de le faire en raison
S U P P LÉ M E NT SciENcE & médEciNE, P. 1 7 E T tribuNES P. 2 3 mais leur acceptabilité du harcèlement de leur
sociale reste faible conjoint ou ex-conjoint
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Taïwan Inde Paris 2024 Entretien

Avant les élections Les chrétiens La France en retard Etat des lieux
du 13 janvier, Pékin persécutés sur la préparation
utilise l’arme par les extrémistes mentale des recherches
des « fake news » hindous des athlètes sur Jésus
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Spécialiste des origines

du christianisme, Pierluigi
VU PAR LANDSCHULZ (ALLEMAGNE) CARTOONING FOR PEACE Piovanelli estime que la
vie de Jésus n’a pas encore The Savoy London
dévoilé tous ses mystères
aux chercheurs
PAGE 2 2

Cinéma
« Vermines »,
un film d’horreur
si tendre
Pour son premier long-
métrage, Sébastien Vanicek
propose l’histoire
d’un immeuble infesté
d’araignées venimeuses.
Critique et entretien L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.
PAGE S 1 9 E T 2 0
Algérie 220 DA, Allemagne 4,50 €, Andorre 3,90 €, Autriche 4,20 €, Belgique 3,70 €, Espagne 3,90 €, Grèce 3,90 €, Guadeloupe-Martinique 3,70 €,
Hongrie 1 790 HUF, Italie 3,90 €, Luxembourg 3,80 €, Maroc 28 DH, Pays-Bas 4,30 €, Portugal cont. 3,90 €, La Réunion 3,70 €, Sénégal 2 500 F CFA, Suisse 4,80 CHF, Tunisie 5,50 DT, Afrique CFA autres 2 600 F CFA
2|
INTERNATIONAL
C O N F L I T I S R A É L O - PA L E S T I N I E N
A Gaza, Nétanyahou promet
une guerre « longue »
jérusalem - correspondance
L
a guerre promet d’être
« longue » et « inten-
se ». En rentrant de la
bande de Gaza lundi
25 décembre, Benya-
min Nétanyahou a
voulu rassurer les élus de son
parti, le Likoud, inquiets de voir le
rythme des combats ralentir sans
que l’objectif maximaliste du gou-
vernement israélien – détruire le
Hamas – ait été atteint. Le premier
ministre leur a affirmé : « Nous in-
tensifierons les combats dans les
jours à venir et cela sera une longue
guerre qui n’est pas près de finir. » Il
entend ainsi garder le leadership
de la droite radicale, qui préfère
l’anéantissement du mouvement
islamiste à la libération des otages.
Ces prises de parole font suite
aux pires journées de la guerre
commencée le 7 octobre après
l’attaque du Hamas en Israël. Côté
palestinien, 70 personnes ont été
tuées par une frappe aérienne di-
manche dans le camp de Maghazi,
au centre de la bande, selon le mi-
nistère de la santé local, qui esti-
mait dans la soirée que 166 victi-
mes avaient été dénombrées en
vingt-quatre heures. C’est autant
que lors de toute l’opération israé-
lienne « Pilier de défense », en
novembre 2012, qui avait duré six
jours. Au total, le bilan du minis-
tère de la santé local fait état de
près de 20 500 Palestiniens morts
en deux mois et demi d’offensive.
Côté israélien, 14 soldats ont été
tués au cours de ce week-end. Cinq
d’entre eux dans leur véhicule,
attaqué au lance-roquettes par un
combattant du Hamas dans le sud
de l’enclave. Quatre autres à cause
d’engins explosifs – le lieu de
l’attaque n’a pas été précisé par
l’armée. Mais samedi, des mem-
bres des Brigades Ezzedine Al-Qas-
sam, la branche armée du mouve-
ment islamiste, ont montré sur
Après deux mois d’opérations terrestres, l’armée
n’a pas atteint ses objectifs et annonce une nouvelle
phase. Les pertes civiles sont toujours plus élevées
leur chaîne Telegram la réutilisa-
tion de roquettes israéliennes non
explosées pour cibler cinq chars
israéliens dans le camp de réfugiés
de Jabaliya, dans le nord de la
bande, tout contre la ville de Gaza.
En tout, 156 militaires ont perdu la
vie depuis le début de l’invasion
terrestre, qui a commencé le 27 oc-
tobre. Ces derniers jours, l’an-
nonce de la découverte des corps
de cinq otages morts en captivité a
ajouté à ce sombre bilan, et la
mort de trois autres tués par l’ar-
mée a valu à Benyamin Nétanya-
hou de se faire huer, lundi, à la
Knesset, par les familles de ceux
qui sont encore entre les mains de
l’organisation islamiste.
Ainsi se déroule cette guerre
asymétrique, menée dans un en-
vironnement incertain, où les ter-
ritoires conquis ne sont jamais
vraiment tenus, où le Hamas con-
tinue à tendre des embuscades
sans chercher l’affrontement di-
rect, pour casser la motivation des
« JE NE VOIS PAS
COMMENT ON PEUT
DÉMOLIR LES RÉSEAUX
DE TUNNELS À DISTANCE,
ALORS QU’ON
N’Y ARRIVE MÊME PAS
QUAND ON EST DESSUS »
RONAN BERGMAN
journaliste israélien
soldats mobilisés depuis de lon-
gues semaines et semer le doute
sur la pertinence de l’opération
dans une partie de l’opinion publi-
que. L’organisation utilise un ré-
seau de tunnels dont le nombre et
les dimensions ne cessent de sur-
prendre Tsahal et de compliquer
l’avancée des troupes.
QUATRE DIVISIONS DÉPLOYÉES
Après deux mois de présence sur
le terrain, l’armée israélienne affi-
che trois objectifs : assurer sa
prise sur le Nord ; progresser dans
le Sud ; éliminer les chefs enne-
mis. Quant au Hamas, il poursuit
plusieurs buts : survivre, avoir Is-
raël à l’usure et garder un mini-
mum de réserves de militants
pour reconstituer ses forces. La
première veut aller vite. Le se-
cond veut gagner du temps.
Quatre divisions ont été dé-
ployées dans l’enclave, soit quel-
que 15 000 hommes : la 36e divi-
sion, une unité interarmes com-
posée de brigades blindées,
d’infanterie et de génie ; la 98e di-
vision au profil de troupes de
choc avec ses groupes de parachu-
tistes ; la 99e division, qui a parti-
cipé à la reprise du kibboutz de
Beeri à la suite de l’attaque du Ha-
mas du 7 octobre ; et la 162e divi-
sion, présente actuellement dans
le camp de réfugiés de Jabaliya et
dans la ville de Gaza.
L’armée a assuré vendredi s’ap-
procher du « contrôle opération-
nel » de l’ensemble du nord de la
bande. La ville de Gaza est ainsi
complètement encerclée. « Con-
trôle opérationnel signifie un stade
où nous sommes sortis de la phase
de conquête pour mener d’autres
activités, mais ça ne veut pas dire
qu’il n’y a pas de terroristes. Dans
une situation où il y a une ville sous
terre, il est difficile de déclarer un
contrôle total », explique un res-
ponsable militaire israélien qui re-
quiert l’anonymat. C’est le cas no-
tamment de Jabaliya et Chadjaya,
deux quartiers populaires, aux
rues étroites et à l’habitat dense,
bastions du Hamas qui ont été
conquis. Le combat a pris plus de
temps que prévu, malgré des frap-
pes aériennes massives et particu-
lièrement meurtrières.
Il semble que l’armée tente d’éli-
miner les chefs de zone avant d’y
faire entrer ses troupes, comme le
31 octobre lorsque Ibrahim Al-
Biari, commandant du bataillon
al-Khalifa al-Rashidun, responsa-
ble de la défense du camp de Jaba-
liya, a été frappé dans un bombar-
dement qui a causé la mort de
60 personnes. L’efficacité de la
stratégie, au vu des pertes civiles
et des capacités de résilience des
milices palestiniennes, com-
mence à être interrogée, y com-
pris en Israël.
Les commandants des Brigades
Ezzedine Al-Qassam, régulière-
ment cibles d’assassinats, prépa-
rent leurs subordonnés à prendre
leur relais au cas où un chef serait
tué : « Le Hamas conserve très pro-
bablement un large éventail de
commandants militaires expéri-
mentés, dont la plupart seront
prêts à reconstruire l’organisation
et à former de nouveaux dirigeants
tactiques », explique le groupe de
Le premier ministre
israélien, Benyamin
Nétanyahou,
lors d’un briefing
de sécurité,
dans le nord de
la bande de Gaza,
le 25 décembre.
AVI OHAYON/AP
réflexion américain Institute for
the Study of War, dans une présen-
tation de l’ordre de bataille du
groupe armé.
Mais les militaires israéliens, à
mesure que leur contrôle s’étend
sur la bande, descendent métho-
diquement dans les organigram-
mes du Hamas et éliminent un
par un cadres et subalternes. Sur
les trente bataillons recensés par
l’institut, trois seraient hors de
combat, au moins huit seraient
dégradés, et douze sous forte
pression de l’armée israélienne,
ce qui en laisse sept encore opéra-
tionnels. Leur neutralisation
n’empêche pas les militants de
continuer à mener des actions de
guérilla avec lance-roquettes et
mines artisanales. « C’est très com-
pliqué, d’autant plus que beau-
coup d’assaillants sont en civil »,
affirme le responsable militaire.
Cela rend difficile la distinction
entre combattants et non-com-
battants et permet aux autorités
israéliennes d’affirmer avoir tué
« 8 000 combattants », sans qu’il
soit possible de vérifier ce bilan de
manière indépendante. Dans la
ville de Gaza, les combats conti-
nuent dans les quartiers de Daraj
et Tuffah, ainsi que celui de
Cheikh Radwan, où l’opposition
reste forte et coordonnée.
L’armée se prépare désormais
pour la bataille du centre de l’en-
clave, zone encore relativement
épargnée par les combats. L’armée
y a parachuté des tracts intimant
aux habitants de Deir Al-Balah, le
camp de Nuseirat nord et ouest et
celui de Maghazi – bombardé ce
week-end – d’évacuer la zone.
Alors que l’armée avait ordonné
aux habitants du nord de l’en-
clave de se déplacer vers le sud, les
combats les plus durs se dérou-
lent à Khan Younès, au sud, où la
98e division mène la charge. Les
militants résistent dans ce bas-
tion du Hamas qui comptait
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MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
400 000 habitants avant la
guerre. L’armée israélienne a an-
noncé dimanche vouloir y « in-
tensifier » les combats.
L’un des buts est d’éliminer les
plus hauts responsables du Ha-
mas, suspectés de s’y cacher – dont
Yahya Sinouar, le leader de l’orga-
nisation islamiste à Gaza et l’un
des cerveaux de l’attaque du 7 oc-
tobre. « S’il est éliminé, ça peut
changer le cours des choses. Ce sera
un dommage symbolique et straté-
gique pour le Hamas, et la guerre
devrait être plus facile et plus
courte, avec une organisation plus
flexible », dit Michael Milstein, di-
recteur du forum des études pales-
tiniennes au centre Moshe Dayan.
A ce jour, seuls deux responsa-
bles du cercle restreint autour de
M. Sinouar ont été tués : Ayman
Nawfal, commandant de la région
centre de Gaza, et Ahmed Ghan-
dour, chef de la région Nord. Les
cinq autres, Mohammed Deif,
chef des brigades Qassam,
Marwan Issa, son lieutenant, Mo-
hammed, le frère de Yahya Si-
nouar, Raed Saad, chef des opéra-
tions spéciales, et Tawfiq Abou
Naim, cadre militaire de premier
plan, sont toujours vivants.
DES DOUTES ÉMIS
Qu’ils soient retrouvés ou non,
l’invasion terrestre n’est pas ter-
minée. Son ultime étape, selon
M. Milstein, serait de contrôler la
frontière avec l’Egypte, dit « le cor-
ridor de Philadelphie », long de
14 kilomètres : « Cela risque d’être
difficile. Pas en termes militaires,
mais à cause de la présence de très
nombreux civils. Et il faudra faire
attention aux soldats égyptiens,
juste de l’autre côté. »
Après la campagne aérienne,
puis la campagne terrestre, une
troisième phase se profile, dont
les cinq aspects ont été détaillés
par les médias israéliens : mettre
un terme aux grandes ma-
nœuvres, réduire le nombre de
soldats déployés, libérer les réser-
vistes, passer à des « raids ciblés »
et enfin établir une zone tampon –
aux dépens du territoire gazaoui,
déjà l’un des plus denses au
monde. Et ainsi, faire baisser gra-
duellement l’intensité du conflit.
« La fin de la guerre est peut-être
plus proche qu’on ne le pense. Tsa-
hal, qui tend à respecter le plan-
ning, avait prévu que la seconde
phase durerait soixante-cinq jours
après le début de l’invasion terres-
tre. On s’en rapproche. Quant aux
buts de guerre, les militaires n’ont
pas dit “détruire le Hamas”, mais le
démanteler. Personnellement, je
doute qu’on puisse le faire dans la
troisième phase. Cela n’a pas de
sens, explique Ronen Bergman,
journaliste israélien spécialiste de
la défense pour le New York Times
et auteur de Lève-toi et tue le pre-
mier (Grasset, 2020). Je ne vois pas
comment on peut démolir les ré-
seaux de tunnels à distance, alors
qu’on n’y arrive même pas quand
on est dessus. »
Il fait partie des grands éditoria-
listes du pays, avec Nahum Barnea
et Ben Caspit, qui commencent à
faire entendre leurs doutes sur la
possibilité de vaincre le Hamas.
Herzi Halevi, le chef d’état-major,
a rappelé, lors du dernier cabinet
de sécurité, le 19 décembre, qu’il
avait fallu dix ans aux Américains
pour trouver et tuer Oussama Ben
Laden. Personne n’a semblé lui
dire qu’Al-Qaida existe toujours. p
samuel forey
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 international | 3

Des ONG arabes habitants de la région voient, dans

la guerre à Gaza, la preuve qu’il y a
une exception en matière de res-
« POUR L’EUROPE,
LE SILENCE
des droits humains, la voix
bouillonnant d’émotion. En octo-
bre, elle avait cosigné avec neuf

sanctionnées par leurs

pect du droit international, estime
Mohamed Lotfy, directeur de la
Commission égyptienne pour les
droits et les libertés. Il va être plus
bailleurs occidentaux
facile pour nos gouvernements de
nous discréditer quand nous par-
lons des droits humains. » « Nous
avons toujours été conscients que
les bailleurs pouvaient instrumen-
Des défenseurs des droits humains au Proche-Orient taliser les droits humains, au nom
de leurs propres intérêts politiques.
dénoncent une censure après la perte de financements Mais ce qui se passe est sans précé-
dent », considère Azza Soliman.
« Choqués, beaucoup se deman-
dent : “Avons-nous été vraiment
dans un partenariat avec les
beyrouth, jérusalem - novembre, l’Union européenne a dénonciation des bombardements bailleurs, ou dans une relation de
correspondance généralisé à tous les nouveaux à Gaza vaut accusation de soutien fournisseurs pour des clients ?” »,
contrats signés avec des acteurs au Hamas ou d’antisémitisme. » rapporte Wadih Al-Asmar.
OU LA DÉNONCIATION
DES BOMBARDEMENTS
VAUT ACCUSATION
DE SOUTIEN AU HAMAS »
WADIH AL-ASMAR,
président du réseau
EuroMed Droits
site Mada Masr. En Jordanie, la ju-
riste Hadeel Abdel Aziz a renvoyé
le prix qu’elle avait reçu en mars
des autorités américaines lors
d’une cérémonie à la Maison
Blanche, l’International Women
autres lauréats du prix franco-al-
lemand des droits humains, origi-
naires d’Egypte, des territoires
palestiniens, du Liban et du
Koweït, une lettre aux ambassa-
deurs de Berlin et de Paris dans
leurs pays respectifs. « Nous ne
pouvons que penser que vous con-
sidérez [les] êtres humains de Gaza
comme des êtres humains infé-
rieurs. Et peut-être cette perception
s’étend-elle à toutes les popula-
tions arabes », y écrivaient-ils.
Selon plusieurs militants des
droits humains, les discussions
s’intensifient au niveau régional
pour élaborer d’autres modèles
de fonctionnement. Mais, à la
suite du durcissement européen,

L’
avocate égyptienne
Azza Soliman a pu
compter, depuis une
dizaine d’années, sur
l’appui de l’Allemagne : un soutien
financier aux activités du Centre
pour l’assistance légale aux fem-
mes égyptiennes (Cewla) qu’elle a
fondé, un soutien politique lors-
qu’elle a été victime de la répres-
sion au Caire, comme d’autres fi-
gures de la société civile. Mais
cette relation de confiance s’est
brisée dans le fracas de la guerre à
Gaza. En novembre, Azza Soliman
a appris que l’Allemagne retirait
ses fonds destinés à un projet
de prise en charge de femmes vic-
times de trafic humain, après
qu’elle a signé, avec plus de
200 organisations arabes, un
texte dénonçant « le génocide
contre la population palestinienne
de la bande de Gaza » et appelant
à des sanctions contre Israël,
« Etat occupant et d’apartheid ».
La sanction a suscité un tollé
dans la société civile égyptienne,
qui dénonce une censure. « Les
autorités allemandes veulent-elles
nous discipliner ? Nous apprendre
ce que l’on a le droit de dire ? C’est
scandaleux ! », tempête l’avocate.
Contacté par Le Monde, le minis-
tère des affaires étrangères alle-
mand indique avoir tranché en
raison des « déclarations publi-
ques de l’organisation Cewla et de
sa fondatrice, incompatibles » avec
la ligne de Berlin, dont « l’appel au
boycott économique d’Israël ».
Cette décision s’inscrit dans un
cadre plus large. Depuis l’attaque
du Hamas le 7 octobre, qui a fait
palestiniens une clause « anti-in- S’il admet qu’il y a « pu y avoir des of Courage Award. ils sont nombreux à prédire un
citation » à la haine et à la vio- dérapages » dans la communica- « Des êtres humains inférieurs » « Ma vocation est de défendre travail plus difficile, face à des
lence, qui ne concernait jusque-là tion de « quelques ONG » depuis le Déjà, certaines voix se rebellent. la justice pour les plus vulnérables. régimes autoritaires qui vont
qu’une fraction des projets finan- 7 octobre, il dénonce « un élan de En Egypte, la plus grande ONG de A Gaza, des parents récupèrent le s’empresser de faire valoir que
cés par Bruxelles. Les bénéficiai- la part des bailleurs pour margina- défense des droits humains, l’Ini- corps de leurs enfants morts en « les leçons » de l’Occident en
res de ces programmes pointent liser la question palestinienne ». tiative égyptienne pour les droits morceaux, des familles ont faim matière de droits humains sont
une formule trop vague, suscepti- Pour les militants, c’est aussi la personnels, a cessé toute coopé- et soif. Les Etats-Unis bloquent parties en fumée dans la guerre
ble d’être utilisée pour les obliger valeur des partenariats et le statut ration avec l’ambassade alle- toute tentative pour un cessez-le- menée à Gaza. p
à mettre en sourdine leur travail d’universalité des droits humains mande, en raison de la position feu ! Je refuse d’être associée à leur clothilde mraffko
de dénonciation de l’occupation qui sont remis en cause. « Les de l’Allemagne sur Gaza, selon le position », explique la militante et laure stephan
israélienne. La Suède, pour sa
part, compte exiger de ses parte-
naires palestiniens qu’ils con-
damnent le Hamas. La Suisse a
annoncé la fin de sa collaboration
avec trois ONG palestiniennes,
estimant leurs déclarations après
le 7 octobre non conformes à son
code de conduite. « Je suis sûr qu’il
n’y a rien de juridique, mais qu’il
s’agit plutôt de motivations politi-
ques », a réagi au micro de la Radio
télévision suisse, depuis Gaza,
l’avocat Raji Sourani, directeur Cuvée Rosé, choisie par les meilleurs.
du Centre palestinien pour les
droits de l’homme, l’une des ONG
sanctionnées par Berne.
Injustice centrale
Joint par Le Monde, le départe-
ment fédéral des affaires étrangè-
res suisse n’a pointé aucune prise
de position en particulier. Les
ONG mises à l’index sont accu-
sées d’avoir « relativisé » l’attaque
du Hamas, selon une source di-
plomatique. Toutes trois avaient
fait l’objet d’un audit suisse à l’été
2023, qui n’avait pas relevé d’irré-
gularité, selon une source associa-
tive. Huit autres ONG, palesti-
niennes et israéliennes, ont été
scrutées après les attaques du Ha-
mas, avant d’être jugées confor-

1 140 morts en Israël, tandis que
240 personnes étaient prises en
otage, l’Allemagne passe au crible
les projets financés « dans la ré-
gion ». « Ce réexamen inclut une
réévaluation des positions politi-
ques et des déclarations de nos
partenaires, au regard des atta-
ques terroristes du Hamas et en-
vers l’Etat d’Israël », précise le mi-
nistère dans sa réponse écrite.
En clair : les défenseurs arabes
des droits humains risquent de
perdre leurs financements s’ils ne
se conforment pas à la ligne poli-
tique de ce bailleur sur le conflit
israélo-palestinien. Or le soutien
inconditionnel offert à l’Etat hé-
breu par Washington et une ma-
jorité de dirigeants européens
suscite l’indignation dans le
monde arabe. Cet appui est jugé
encore plus intolérable au vu de
l’hécatombe causée par l’offen-
sive israélienne à Gaza parmi les
civils : 20 000 morts, dont deux
tiers de femmes et d’enfants, se-
lon les autorités de santé locales.
D’autres gouvernements euro-
péens veulent réviser leurs parte-
nariats avec des organisations de
la société civile du Proche-Orient.
Et les ONG palestiniennes subis-
sent la pression la plus forte. Fin
L’ALLEMAGNE A RETIRÉ
SES FONDS D’UN PROJET
DE PRISE EN CHARGE
DE FEMMES ÉGYPTIENNES
VICTIMES DU
TRAFIC HUMAIN
Le Gstaad Palace
mes, dont Physicians for Human
Rights Israel, une organisation de
soutien médical, qui mène des
projets à Gaza. « Nous ne savons
pas encore si notre financement
sera renouvelé en 2024 », nuance
Lee Caspi, un responsable de
l’ONG, qui estime « probable que
la pression politique en Suisse en-
traîne un retard dans le finance-
ment ou le stoppe complètement ».
Fin novembre, Amnesty Inter-
national et une centaine d’organi-
sations ont dénoncé, dans ces
pressions, une entrave à la liberté
d’expression et d’opinion. Ces
injonctions sont lues au Proche-
Orient comme le reflet de la droiti-
sation des politiques en Europe.
L’approche de Berlin est jugée
biaisée du fait de son sentiment
de culpabilité vis-à-vis de la Shoah.
Le raidissement des bailleurs de
fonds creuse le fossé entre les
deux rives de la Méditerranée sur
la perception du conflit israélo-pa-
lestinien : chez les militants ara-
bes des droits humains, la dépos-
session que les Palestiniens ont
subie lors de la création de l’Etat
d’Israël en 1948 est considérée
comme une injustice centrale.
Les conditions imposées aux
ONG risquent de fragiliser les so-
ciétés civiles, qui dépendent gran-
dement des fonds occidentaux.
Mais, en se taisant face au carnage
MAISON FAMILIALE INDÉPENDANTE
à Gaza, elles perdraient leur crédi-
bilité sur le terrain. « Les activistes
sont pris en étau, déplore Wadih
Al-Asmar, président du réseau
EuroMed Droits. Dans le monde
arabe, ils se voient reprocher l’inac-
tion des Occidentaux, comme L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.
s’ils travaillaient pour leur compte.
En Europe, leurs prises de position
sont scrutées : le silence ou la
4 | international 0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023

En Inde, les chrétiens toujours plus persécutés

Prenant le prétexte de lois anticonversion, des nationalistes mènent une chasse effrénée aux évangéliques

REPORTAGE Pour le dirigeant

fatehpur (uttar pradesh, inde) -
envoyée spéciale
de l’Etat de
l’Uttar Pradesh,

V
ijay Masih est gêné
d’accueillir ses hôtes le christianisme
dans si peu de confort.
Il a emprunté la mai-
et l’islam
sonnette de sa sœur, la sienne est constituent
en chantier. Sa femme, Preeti, pré-
pare un chaï (thé au lait) pour ré-
deux religions
chauffer l’atmosphère glacée de étrangères
cette fin décembre. Le pasteur
évangélique a rejoint, au prin-
temps, avec sa famille, un village qu’une « enquête préliminaire » al-
informel aux portes de Lucknow, lait les viser, en vertu de la « loi an-
la capitale de l’Uttar Pradesh, dans ticonversion » adoptée par l’Uttar
le nord de l’Inde. Il n’y a ni électri- Pradesh en 2021. Relâchés au bout
cité, ni sanitaires, ni asphalte. Il de deux jours, la moitié ont été je-
dort sur un matelas de fortune, à tés en prison six mois plus tard.
l’extérieur, à même la terre battue. Entre-temps, un responsable du
Mais au moins se sent-il en sécu- VHP avait déposé des plaintes
rité dans cette communauté com- contre des chrétiens, les accusant
posée uniquement de chrétiens, d’avoir pratiqué des conversions
plus de 300 personnes. de masse après avoir fait miroiter
Vijay Masih fut, pendant douze quantité d’avantages aux hin-
ans, au service de l’Eglise évangéli- dous : admission dans des écoles,
que indienne, à 100 kilomètres de soins médicaux, aide finan-
là, à Fatehpur, un gros bourg rural. cière, etc. Vijay Masih a passé sept
Il avait un salaire, une maison, ses mois et demi dans une cellule in-
deux enfants étaient scolarisés salubre, avec des délinquants de
dans une école privée. Mais un droit commun. Pour sa libération
événement a brusquement inter- sous caution, il a dû débourser
rompu le fil de cette vie tran- l’équivalent de 8 000 euros, une
quille : le 14 avril 2022, veille du somme considérable réunie grâce Le pasteur Vijay Masih et sa femme devant leur maison, près de Lucknow, dans l’Uttar Pradesh (Inde), le 19 décembre. « LE MONDE »
Vendredi saint, alors qu’il prépa- à l’aide de l’Eglise et de sa commu-
rait, avec soixante-dix croyants, nauté. Il est désormais journalier
les célébrations de Pâques dans dans la construction. partout des drapeaux couleur sa- de démontrer l’illégalité de cette de la communauté chrétienne in- dignité. L’hindouisme assigne à la
l’église du bourg, des chants hosti- A moins d’un kilomètre de fran [du BJP, le parti nationaliste loi. La Constitution indienne dienne, avec l’encouragement et le naissance aux dalits le statut d’im-
les se sont fait entendre. l’église de Fatehpur, l’hôpital chré- du premier ministre, Narendra garantit en effet aux citoyens le soutien de l’Etat », tranche le pré- pur et les relègue aux pires tâches.
tien de Broadwell à l’allure fanto- Modi] », explique une représen- droit de choisir leur religion. L’avo- sident de l’UCF, Michael Williams. La démarche de conversion de
Un hôpital chrétien visé matique, a été pris dans la même tante de l’établissement qui s’ef- cat, qui a requis l’anonymat, sou- John Dayal, 75 ans, est un acti- ces derniers est lourde de consé-
Environ 150 militants nationalis- tourmente. Fondé par des mis- force de relancer l’activité. ligne que les militants nationalis- viste qui s’est battu toute sa vie quences : en devenant chrétiens,
tes de la Vishwa Hindu Parishad sionnaires canadiens il y a un siè- A 120 kilomètres, à Allahabad, tes n’ont pas qualité pour agir. Se- pour défendre le droit des chré- ils perdent le droit au système de
(Conseil mondial hindou – VHP) cle, l’établissement a été encerclé l’université Shuats, en lien avec lon la loi, seule la « personne lésée, tiens. « De ma vie, je n’ai jamais vu réservation, qui attribue aux « cas-
et de membres du Bajrang Dal, pendant des semaines par des na- l’Eglise évangélique de Fatehpur, a ses parents, son frère, sa sœur ou autant de sectarisme. La haine en- tes répertoriées » des quotas d’em-
une organisation radicale de la tionalistes qui ont harcelé pa- également été soupçonnée de for- toute autre personne liée par le couragée par l’Etat permet au com- plois et de places dans l’éducation,
jeunesse hindoue, ont entouré tients et soignants. Ces derniers cer les conversions avec de l’ar- sang, le mariage ou l’adoption peut mun des mortels de devenir des jus- l’administration, les assemblées.
l’édifice, en hurlant « Jai Shri ont été accusés par le Bajrang Dal gent reçu de l’étranger. Le vice- déposer plainte ». ticiers. » Pour le vieil homme, la si- Cette discrimination positive
Ram » (« gloire au dieu Ram »), d’avoir soudoyé les patients en chancelier et le directeur ont été Depuis l’arrivée au pouvoir tuation est d’autant plus para- n’est accordée qu’aux dalits hin-
leur cri d’allégeance. En un ins- leur promettant des soins gra- inculpés, ainsi que six autres diri- en 2014 de Modi, chantre d’un Etat doxale que les hindous sont dous, et aux bouddhistes et sikhs.
tant, les agresseurs ont cadenassé tuits s’ils devenaient chrétiens. La geants, pour conspiration crimi- hindou en rupture avec l’Inde laï- largement majoritaires : ils repré- De nombreux néochrétiens pré-
toutes les issues. La police est moitié des 145 membres de nelle. Toutes les plaintes contre que voulue par les pères fonda- sentent 79,8 % de la population, fèrent se cacher, d’autant que la loi
alors arrivée, alertée par les mem- l’équipe, qui fréquentait l’église, a l’Eglise, l’université, et hôpital ont teurs, la situation des trente mil- les chrétiens à peine plus de 2 %. anticonversion de l’Uttar Pradesh
bres de ces milices qui préten- démissionné et quitté la ville. « La été déposées par le Bajrang Dal. lions de chrétiens – catholiques, oblige à demander une autorisa-
daient qu’une conversion de communauté hindoue locale nous Le mode opératoire déployé protestants, évangélistes, pente- Echapper à l’enfer des castes tion à la justice quand on souhaite
masse était en cours. est devenue très hostile. Des mem- dans ces trois affaires est devenu côtistes – s’est constamment dé- L’acharnement des nationalistes changer de religion. Le magistrat
Emmenés au poste de police, les bres du personnel ont été battus, presque routinier dans l’Uttar gradée. L’association United s’explique en partie par le fait que doit afficher publiquement les
participants se sont vu signifier, les nationalistes ont planté un peu Pradesh, sous l’influence du chef Christian Forum for Human Ri- les conversions ébranlent le sys- nom, adresse et téléphone du re-
de gouvernement, Yogi Aditya- ghts (UCF), basée à Delhi a suivi tème des castes, indissociable de quérant. Autant dire qu’il livre en
nath, un moine fondamentaliste l’évolution du nombre d’actes de l’hindouisme, bâti sur la domina- pâture aux nationalistes le candi-
hindou, qui revendique haut et violence : de 147 incidents en 2014, tion brahmanique. Le pasteur Vi- dat à la conversion.
fort sa xénophobie. Il est en croi- l’association en a comptabilisé jay Masih appartient à une famille A Fatehpur, l’église évangélique
sade, comme les nationalistes 328 en 2019, 599 en 2022 et 687 en- de très basse caste hindoue, con- a définitivement fermé ses portes.
COMMUNIQUÉ hindous, contre les musulmans tre janvier et novembre 2023. Soit vertie au christianisme. Comme Les chrétiens ont déserté. Dans la
et les chrétiens soupçonnés de deux agressions par jour commi- lui, de nombreux dalits (oppri- rue qui mène à l’édifice rouge
01.49.04.01.82 - annonces@osp.fr convertir les hindous. ses contre les chrétiens, attaques més), appelés autrefois « intou- vermillon, des haut-parleurs
d’églises, de nonnes, de pasteurs chables », ont délaissé la religion crachent désormais en continu
AVIS DE CONSULTATION DU PUBLIC Théories conspirationnistes et de croyants, ostracisme social, hindoue pour rejoindre le chris- des prêches hindous. Le pasteur
sur la demande d’autorisation de mise en service
du réacteur EPR de Flamanville (INB 167) L’homme a relayé toute une série meurtres… L’essentiel de ces actes tianisme, le bouddhisme, l’islam Vijay Masih sait qu’il n’y retour-
La création du réacteur EPR de Flamanville (installation de théories conspirationnistes s’est produit dans le nord de l’Inde, ou le sikhisme afin d’échapper à nera jamais. p
nucléaire de base 167 - Flamanville 3) a été autorisée par le comme celle du « love djihad », se- et surtout dans l’Uttar Pradesh, l’enfer des castes et retrouver de la sophie landrin
décret n° 2007-534 du 10 avril 2007. lon laquelle les hommes musul- qui figure en première position du
En application de l’article R. 593-30 du code de l’environnement, EDF a adressé mans séduiraient les hindoues palmarès avec 287 incidents.
à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sa demande d’autorisation de mise en ser- dans le seul but de les convertir ; « Dans presque tous les incidents
vice du réacteur le 4 juin 2021.
et plus récemment, celle du « ga- signalés, note l’UCF, on retrouve
Conformément à l’article R. 593-30 du code de l’environnement, cette demande
est accompagnée du rapport de sûreté de l’installation, des règles générales d’ex-
ploitation que l’exploitant prévoit de mettre en oeuvre, du plan de démantèle-
ming djihad » : des jeux en ligne
qui seraient des pièges pour atti-
des groupes d’autodéfense com-
posés d’extrémistes religieux qui PUBLICATIONS JUDICIAIRES
ment, du plan d’urgence interne, de l’étude d’impact, de l’étude de maîtrise des rer des écoliers. Pour Yogi Aditya- font irruption dans les rassemble-
risques et des éléments permettant d’apprécier la conformité de l’installation aux nath, le christianisme et l’islam ments de prière, assimilés à des 01.49.04.01.82 - annonces@osp.fr
prescriptions prises par l’ASN.
constituent deux religions étran- conversions religieuses forcées. » Par decision du 28 novembre 2023, la chambre 2-12 de la Cour d’appel de Paris
Ce dossier a fait l’objet d’avis des collectivités territoriales concernées et d’un avis gères, nées hors de l’Inde. Il puise Les chiffres collectés minorent
de l’Autorité environnementale, auquel EDF a répondu. s’est prononcée publiquement sur appel d’un jugement rendu par la chambre
dans la lointaine histoire colo- sans doute la réalité, bien des inci- 13-1 du Tribunal judiciaire de Paris le 26 fevrier 2020.
Il a également fait l’objet d’une consultation du public du 5 juin au 15 septembre
2023. Les avis des collectivités territoriales et de l’Autorité environnementale niale où Portugais, Français et dents passent sous les radars et le
Sur l’action publique, la Cour d’appel de Paris :
n’avaient alors pas été mis à la disposition du public. L’ASN organise donc une bien sûr, Britanniques, ache- bilan ne prend pas en compte
nouvelle consultation avec ces éléments. Une synthèse des observations et pro- tèrent les pauvres par le biais de l’Etat de Manipur, en proie à un Conirme le jugement rendu le 26 fevrier 2020 en ce qu’il a relaxé BNP PARIBAS
positions du public recueillies lors de la première consultation sera jointe à cette cadeaux, d’argent, ou de pres- conflit interethnique et religieux PERSONAL FINANCE des faits de pratique commerciale trompeuse par per-
nouvelle consultation. sonne morale pour les faits commis avant le 24 juillet 2008.
sions politiques. entre hindous et chrétiens d’une
La nouvelle consultation du public sur la demande d’autorisation de mise en Rejette la demande formée par BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE tendant
service du réacteur EPR de Flamanville, avec mise à disposition de l’ensemble du Le Bajrang Dal, avec la complicité rare violence. Selon l’organisa-
dossier de demande, aura lieu du 15 janvier 2024 au 15 février 2024 sur le site de la police, essaime dans tout tion Open doors, l’Inde figure au à voir constater l’extinction de l’action publique quant aux faits antérieurs à mars
Internet de l’ASN. Toute information pertinente complémentaire, notamment en l’Uttar Pradesh, Etat le plus peuplé 11e rang des pays les plus dange- 2009 relativement a la presentation prétendument trompeuse du taux de change
ce qui concerne la procédure administrative mise en oeuvre, peut être sollicitée d’Inde, avec 230 millions d’habi- reux pour les chrétiens. « Nous as- franc suisse/euro comme stable.
auprès de l’Autorité de sûreté nucléaire, autorité compétente pour prendre la dé-
cision, par voie électronique à l’adresse info@asn.fr, ou dans ses locaux, 15 rue tants. Mais les nationalistes opè- sistons à une véritable persécution Conirme le jugement rendu le 26 fevrier 2020 en ce qu’il a declare BNP PARI-
Louis-Lejeune - CS 70013 - 92541 Montrouge Cedex - sur prise de rendez-vous rent dans toute l’Inde du Nord, où BAS PERSONAL FINANCE coupable des faits de pratique commerciale trom-
au 01 46 16 42 74. le BJP et les réseaux nationalistes peuse par personne morale étant precisé que les faits ont été commis a compter
Le dossier sera consultable à l’adresse Internet suivante : https://www.asn.fr/l-asn- sont fortement implantés. Onze du 24 juillet 2008 jusqu’en 2009 et de recel par personne morale du produit d’un
reglemente/consultations-du-public. Le dossier sur support papier peut être consul- des vingt-huit Etats indiens sont
« Nous assistons délit étant precisé que les faits ont été commis courant 2008 et jusqu’au 23 juillet
té sur demande et sur rendez-vous préalable auprès de la préfecture de la Manche 2008.
(au 02 33 75 47 39), qui coordonne la mise à disposition dans ses locaux, dans les désormais armés de législations à une véritable
sous-préfectures, dans l’espace France Services de la commune des Pieux et en mairie anticonversion. Entre janvier et Conirme le jugement rendu le 26 fevrier 2020 sur la peine d’amende.
de Flamanville. juillet, en seulement six mois,
persécution de
Conirme le jugement rendu le 26 fevrier 2020 sur le principe de la peine com-
Les observations et propositions du public peuvent être formulées sur le site soixante-trois affaires de conver- la communauté plémentaire de publication de la decision
Internet de l’ASN pendant la durée de la consultation. sions forcées ont été recensées
L’ASN prendra en compte les observations et propositions du public recueillies contre les chrétiens, et trente-cinq
chrétienne, Le réforme en ses modalités et
au cours des deux consultations dans le cadre de l’instruction en cours de la pasteurs ont été emprisonnés. avec le soutien Ordonne à l’encontre de BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la publication,
demande d’autorisation de mise en service de l’installation. par voie de presse écrite, aux frais de BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
« Cette loi est redoutable car elle a
La décision susceptible d’être adoptée postérieurement à cette consultation est
inversé la charge de la preuve, c’est
de l’Etat » dans un délai d’un mois a compter de la date de la présente decision, du dis-
une décision d’autorisation de mise en service, prise par l’ASN. Cette décision positif penal de celle-ci par insertion dons les quotidiens Le Figaro, Le Monde,
fera elle-même l’objet d’une consultation du public sur le site Internet de l’ASN. aux victimes de démontrer leur in- MICHAEL WILLIAMS
Libération et Les Echos sans que le cout de celles-ci n’excede le maximum de
Le présent avis est également publié sur le site Internet de l’ASN : www.asn.fr. nocence », accuse un avocat qui a président de United Christian l’amende encourue.
saisi la Cour suprême pour tenter Forum for Human Rights
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 international | 5

L’avocat de la « Ils me disent

de ne pas donner

famille de Mahsa d’entretien aux

médias. Mais
je vais continuer,

Amini menacé même si cela

doit me tuer »
SALEH NIKBAKHT

de prison en Iran avocat de la famille Amini

menacent l’avocat de représailles.

Saleh Nikbakht a appris qu’il allait être La persévérance de la famille de
Mahsa Amini et de Saleh Nik-
convoqué par les autorités, après avoir bakht a permis aux Iraniens et à
l’opinion publique mondiale de
reçu en France le prix Sakharov, au mettre un visage sur les atteintes
aux droits humains dans le pays.
nom de la jeune femme morte en 2022 L’avocat a lui-même été incar-
céré à plusieurs reprises, aussi
bien sous le règne de Moham-
mad Reza Pahlavi, le dernier chah
d’Iran, renversé par la révolution

E
n Iran, j’ai la liberté d’ex-
pression, mais pas celle
d’après l’expression. »
L’avocat renommé Saleh
Nikbakht ne manque jamais
d’humour et d’anecdotes pour
adoucir ses propos, pourtant
lourds, sur l’Iran et sur le piètre
état des droits humains dans son
pays. Depuis plus d’un an,
l’homme, âgé de 71 ans, est l’avo-
cat de la famille de Mahsa « Jina »
Amini, dont la mort, le 16 sep-
tembre 2022, en garde à vue pour
une tenue jugée « pas assez isla-
mique », a embrasé tout le pays.
La vague de contestation à la
suite du décès de l’Iranienne
d’origine kurde de 22 ans a été la
plus longue et la plus intense de
l’histoire de la République isla-
mique d’Iran. La répression qui
s’est abattue sur toute la société
et a fait au moins 525 victimes ci-
viles n’a pas eu raison de la
volonté de réclamer justice de la
famille de Mahsa Amini et de
son avocat.
Début décembre, les parents de
Mahsa Amini ont été empêchés
par les services de sécurité ira-
niens de quitter l’Iran pour la
France, où ils devaient recevoir le
prix Sakharov pour la liberté de
l’esprit décerné par le Parlement
européen à leur fille et au mouve-
ment Femme, vie, liberté. Seul
leur avocat a été autorisé à quitter
le pays. Au Parlement européen,
le 12 décembre, Saleh Nikbakht a
lu, en kurde, le message de la
mère de Mahsa Amini, Mojgan
Eftekhari. « La douleur de Jina est
éternelle pour moi, et elle est éter-
nelle pour les gens du monde en-
tier. Je crois fermement que son
nom, à côté de celui de Jeanne
d’Arc, restera un symbole de li-
berté », a-t-elle écrit.
A son retour en Iran, le 22 dé-
cembre, Me Nikbakht a été lon-
guement interrogé à l’aéroport
international Imam-Khomeyni,
à Téhéran. Son téléphone, son or-
dinateur, son passeport et le prix
Sakharov lui ont été confisqués.
Les agents lui ont annoncé qu’il
devrait prochainement se pré-
senter à la prison d’Evin, dans le
nord de Téhéran, pour purger
une peine d’un an de détention.
Le juriste a été condamné pour
avoir accordé des entretiens à des
médias, en Iran et à l’étranger,
afin de dénoncer le traitement de
la mort de Mahsa Amini par le
pouvoir judiciaire.
Chevronné
« Ils [les dirigeants de la Républi-
que islamique] sont très sensibles
à mon sujet. Ils me disent de ne pas
donner d’entretien aux médias,
explique Me Nikbakht, rencontré
à Paris avant son départ pour
l’Iran. Mais je vais continuer,
même si cela doit me tuer. »
Comme les Amini, Saleh Nik-
bakht est originaire de la ville de
Saqqez, située dans le Kurdistan
iranien, dans l’ouest du pays.
« L’oncle de Mahsa a été mon pro-
Le juriste a été
condamné
à un an de
détention pour
avoir dénoncé
le traitement de
la mort de Mahsa
Amini par le
pouvoir judiciaire
Saleh Nikbakht, au palais de justice de Paris, le 19 décembre. ED ALCOCK/MYOP POUR «LE MONDE»
fesseur d’arabe au lycée », expli-
que-t-il. Lorsque la jeune fille
meurt après son arrestation par
la police, l’avocat publie sur sa
chaîne Telegram (messagerie
cryptée) un entretien du père de
la jeune femme, qui rejette la ver-
sion officielle des autorités. De-
puis la mort de cette dernière, les
dirigeants iraniens n’ont cessé de
répéter qu’elle n’avait pas été
maltraitée par la police, mais
qu’elle était morte en raison de
ses antécédents médicaux.
L’avocat est alors contacté par
la famille de la victime, qui lui de-
mande de la représenter. Me Nik-
bakht accepte sans hésiter. « J’ai à
mon actif la défense des journalis-
tes, des militants politiques, des
écrivains, des syndicalistes et des
gens appartenant aux minorités
ethniques. J’ai déjà sauvé de la
peine de mort trente et une per-
sonnes », explique celui qui, de-
puis quarante ans, en juriste che-
vronné, s’appuie sur la loi
pour confronter les autorités ira-
niennes.
Fin septembre 2022, lors de la
première réunion avec les autori-
tés judiciaires, l’avocat demande
que douze médecins indépen-
dants puissent participer à tous
les rendez-vous pour étudier les
causes de la mort de la jeune
femme. Quelques jours plus tard,
Saleh Nikbakht et la famille de
Mahsa sont convoqués par les
autorités, qui confirment la ver-
sion des responsables politiques.
Me Nikbakht demande alors l’ac-
cès aux vidéos des caméras de
surveillance, dans lesquelles ap-
paraît Mahsa Amini, de son arres-
tation à son transfert à l’hôpital. Il
réclame également qu’une ren-
contre soit organisée avec le con-
ducteur du van de police et
trois autres agents présents lors
de l’arrestation de Mahsa. « Ils ne
nous ont rien donné, se désole
l’avocat. On leur a aussi demandé
de nous communiquer les noms
de six jeunes femmes qui ont été
arrêtées avec Mahsa. Certaines
avaient appelé ses parents en pré-
cisant qu’elle avait été tabassée
lors de son arrestation. »
Menaces de représailles
Alors qu’aucune des demandes
de la famille et de l’avocat n’a été
entendue, la radio iranienne an-
nonce, début octobre 2022, que la
mort de Mahsa Amini a bien été
causée par ses antécédents médi-
caux. Dans les médias, Saleh Nik-
bakht dénonce ces conclusions
dont il a été tenu à l’écart. Dès le
lendemain, les médias affiliés au
régime et les autorités de Téhéran
de 1979, que sous la République
islamique, pour ses activités
journalistiques et politiques.
Malgré les risques, il n’a jamais
voulu quitter l’Iran. « Beaucoup
de mes amis m’invitaient à le faire.
Mais je veux rester en Iran. Même
si je ne peux rien faire pour les
gens, au moins, je ne leur dis pas,
de loin, ce qu’ils doivent faire ou ne
pas faire. »
Saleh Nikbakht reste critique
envers les politiques occidenta-
les par rapport l’Iran. Les sanc-
tions économiques, dit-il, appau-
vrissent les Iraniens ordinaires,
sans atteindre les gens proches
du régime qui « vivent tranquille-
ment au Canada, en Europe et aux
Etats-Unis ». Dans ses négocia-
tions avec l’Iran, sur le pro-
gramme nucléaire en particulier,
« l’Occident doit demander à la
République islamique que les re-
vendications du peuple en ma-
tière de libertés politiques et dé-
mocratiques soient entendues ».
Malgré la répression contre les
dissidents, les représailles contre
les femmes ne portant pas le voile
et une situation économique de
plus en plus difficile, Me Nikbakht
reste optimiste. « Après la mort de
Mahsa, l’Iran a beaucoup changé,
affirme-t-il. Les Iraniens de tout le
pays se sont joints au mouvement
Femme, vie, liberté. Ils se sont levés,
pas uniquement contre le port
obligatoire du voile, mais aussi
pour réclamer les libertés politi-
ques et individuelles. » Selon lui,
même les familles conservatrices
ont été touchées. « Que va faire la
République islamique avec les
gens qui ne pensent plus comme
elle ? », s’interroge-t-il, confiant
dans un avenir « démocratique »
pour son pays. p
ghazal golshiri

Présidentielle russe : le Kremlin écarte la candidate la plus critique

En 2018 déjà, Moscou avait refusé d’enregistrer l’opposant Alexeï Navalny, aujourd’hui détenu dans une colonie pénitentiaire de l’Arctique

moscou - correspondant n’a laissé d’autre trace qu’une dé- l’inauguration d’un sous-ma- enthousiasme et une curiosité date écartée : « Vous êtes une jeune veaux », sera chargé de donner
claration tonitruante du dirigeant rin]… La santé du commandant en inattendus dans une frange de femme, votre avenir est encore de- des gages à une frange de l’opi-

L e 16 décembre, quelques
jours après avoir annoncé
sa candidature à l’élection
présidentielle du 17 mars 2024,
Vladimir Poutine recevait les
du Parti communiste, théorique-
ment le premier parti d’opposi-
tion. S’adressant à M. Poutine,
Guennadi Ziouganov a lancé : « Je
suis désolé de vous le dire, mais
chef, dans un contexte de guerre,
c’est la santé de la nation ! »
Cet épisode, aussi anecdotique
soit-il, donne le ton de la campa-
gne présidentielle à venir, et de
l’opinion, sans être mentionnée
une seule fois dans les médias offi-
ciels. Trois cent mille personnes se
sont, par exemple, abonnées à sa
chaîne Telegram et des centaines
vant vous… » Soit – à un détail près
– les mêmes mots qu’elle avait pro-
noncés en refusant d’enregistrer
Alexeï Navalny à la présidentielle
de 2018. Entre-temps, l’opposant a
nion libérale économiquement
mais loyale au Kremlin. Le vice-
président de la Douma se permet
ainsi certaines critiques, ou pro-
positions en faveur des entrepre-
chefs des groupes parlementaires j’aimerais faire fouetter la per- l’intensité de la compétition à en avaient fait la queue, le 17 décem- survécu à un empoisonnement et neurs, mais sans remettre en
représentés à la Douma, pour dis- sonne qui vous a laissé sortir sans attendre. Le Parti communiste a bre à Moscou, pour intégrer son a été envoyé en prison. Introuva- cause aucune orientation straté-
cuter de l’organisation du scrutin. couvre-chef par – 15 degrés [quel- finalement désigné comme can- groupe de soutien. Certains ont ble depuis trois semaines, M. Na- gique du pouvoir. Le vieux parti li-
La rencontre, purement formelle, ques heures plus tôt lors de didat l’un de ses apparatchiks, été interrogés par la police. valny est d’ailleurs réapparu, lundi béral Iabloko a, de son côté, re-
Nikolaï Kharitonov, qui soutenait Choisissant ses mots avec pru- 25 décembre, dans une colonie pé- noncé à présenter un postulant.
déjà Vladimir Poutine en 1999 et dence, pour éviter de tomber sous nitentiaire « à régime spécial » de D’autres candidatures, tolérées
La Russie contrôlerait la ville dont la principale caractéristique le coup des lois de censure mili- la ville de Kharp, dans l’Arctique. pour animer les débats, ne sont
semble être son âge, 75 ans, qui taire adoptées en mars 2022, elle pas à exclure, mais ce casting sur
de Marïnka, non loin de Donetsk dépasse celui du président sor- laissait clairement entendre son Casting sur mesure mesure garantit une campagne
Les forces russes ont pris le contrôle de la ville de Marïnka, tant, 71 ans. Dans un entretien opposition à « l’opération mili- La campagne pour le scrutin du parfaitement sous contrôle,
qui comptait 10 000 habitants avant la guerre et est aujourd’hui récent, M. Kharitonov a refusé de taire spéciale » en Ukraine, et ap- 17 mars 2024 ne devrait pas pré- censée prouver l’unité du peuple
entièrement détruite, a annoncé le ministre de la défense russe, dire s’il était « meilleur » que pelait à la libération des « prison- senter d’autres rebondissements. derrière son chef. Il ne convient
Sergueï Choïgou, lors d’une rencontre avec Vladimir Poutine Vladimir Poutine. niers politiques ». La commission Le Parti libéral-démocrate de Rus- toutefois pas entièrement au
retransmise à la télévision lundi 25 décembre. Cette localité pro- Dans ce climat, le refus par la électorale a invoqué des « erreurs sie présente son chef, le député Kremlin, écrivait lundi le site
che de Donetsk était le théâtre de combats intenses depuis des commission électorale centrale dans des documents » soumis Leonid Sloutski, accusé en 2018 Meduza qui, quoique travaillant
mois. Sa prise constituerait le premier succès de Moscou depuis d’enregistrer la candidate Ekate- pour l’enregistrement de sa candi- d’agressions sexuelles par plu- en exil, conserve des sources au
celle de Bakhmout en mai et permettrait à l’armée russe d’« éten- rina Dountsova ne constitue en dature (un prétexte utilisé à d’in- sieurs journalistes, sans la moin- sommet du pouvoir. Les stratèges
dre la zone opérationnelle », selon M. Poutine. Lundi, Kiev a dé- rien une surprise. Cette journa- nombrables reprises ces dernières dre conséquence. M. Sloutski a du président ne désiraient en ef-
menti avoir quitté Marïnka, mais le nom de la ville n’apparaissait liste de 40 ans exerçant dans la années), pour refuser cette candi- prévenu que son but n’était « pas fet voir aucun candidat âgé de
pas dans le dernier bulletin de l’état-major, mardi. Les forces ville de Rjev (région de Tver, à dature, samedi 23 décembre. de prendre des voix au président ». moins de 50 ans – or Vladislav Da-
ukrainiennes ont indiqué avoir détruit dans la nuit le navire russe l’ouest de Moscou), inconnue du La présidente de la commission, Vladislav Davankov, représen- vankov en a 39. p
Novotcherkassk, amarré dans le port de Feodossia, en Crimée. grand public, a réussi à susciter un Ella Pamfilova, a lancé à la candi- tant du parti des « Gens nou- benoît vitkine
6 | international
La lutte de Taïwan contre la désinformation chinoise
A l’approche de la présidentielle du 13 janvier 2024, Pékin multiplie les « fake news » sur l’île souveraine
REPORTAGE
taïpei - envoyé spécial
A
en croire les réseaux
sociaux, il se passe des
événements incroya-
bles à Taïwan : les Etats-
Unis auraient demandé à la prési-
dente Tsai de mettre au point des
armes biochimiques ; le président
américain, Joe Biden, aurait un
plan secret pour détruire l’île afin
qu’elle ne tombe pas aux mains
des communistes chinois ; Taipei
s’apprêterait à envoyer 4 000 mis-
siles à Israël pour détruire le Ha-
mas. Quant à la bête noire de Pé-
kin, le vice-président William Lai,
qui fait actuellement la course en
tête pour l’élection présidentielle
du 13 janvier 2024, il n’aurait pas
moins de trois maîtresses. Cette
fois, c’est TikTok qui le dit.
Ainsi va la campagne électorale
à Taïwan, cette île de 23,5 millions
d’habitants dont Pékin ne recon-
naît pas la souveraineté. Pas un
jour ne se passe sans une nou-
velle rumeur hostile au Parti
démocratique progressiste (DPP),
le parti au pouvoir depuis 2016,
partisan de la souveraineté de
l’île. Des rumeurs qui, lorsqu’elles
n’émanent pas de Pékin, sont am-
plifiées par les médias et les ré-
seaux sociaux chinois.
« Bien sûr que Pékin cherche à in-
terférer dans l’élection. Ce n’est pas
nouveau. Nous avons l’habitude »,
commente, fataliste, Mark Ho,
député DPP spécialiste des ques-
tions de défense. « La guerre de
l’information dans le détroit a déjà
commencé », estime Syu Guan-Ze,
un responsable de l’organisation
Economic Democracy Union qui
entend lutter contre la dépen-
dance économique de Taïwan à la
Chine. Pour 76 % des personnes
interrogées, les « fake news » peu-
vent influencer la politique taïwa-
naise, selon une étude réalisée
par l’institut de sociologie de
l’Academia Sinica fin novembre.
Rassemblement de hackeurs
Mais le David taïwanais a les
moyens de se défendre contre le
Goliath chinois. Au fil des années,
le gouvernement et la société ci-
vile ont mis en place un véritable
écosystème pour se prémunir
contre la désinformation. « Les
premiers hackeurs ont commencé
à se mobiliser en 2012. A l’époque,
ils exigeaient plus de transparence
de la part du gouvernement.
L’heure était à l’optimisme. La
technologie allait rendre le monde
A Belgrade, les manifestations contre le président Vucic se poursuivent
Une partie de la jeunesse appelle à « bloquer le pays », une semaine après la réélection contestée du dirigeant nationaliste, soutenu par Moscou
Q uelques centaines de ma-
nifestants ont de nou-
veau bloqué plusieurs ar-
tères de la capitale serbe,
lundi 25 décembre, avant de se
réunir devant des commissariats
pour réclamer la libération des
protestataires arrêtés la veille lors
d’affrontements devant la mairie
de Belgrade. « Le temps des mar-
ches est terminé, c’est l’heure de
l’action. » En première ligne de la
foule rassemblée devant l’hôtel de
ville dimanche, le vétéran du Parti
démocrate et membre de la coali-
tion pro-européenne Serbie con-
tre la violence (SPN), Srdjan Mili-
vojevic, ne cachait pas sa colère.
Depuis la proclamation de vic-
toire controversée du parti de
droite nationaliste pro-russe
d’Aleksandar Vucic (SNS) lors des
élections législatives anticipées
du 17 décembre, des manifesta-
tions ont eu lieu tous les soirs de-
vant la commission électorale.
L’opposition demande l’annula-
tion d’un scrutin qu’elle considère
Au fil des années,
le gouvernement
et la société civile
ont mis en place
un véritable
écosystème pour
se prémunir
contre les
manipulations
meilleur. Depuis l’élection de 2016,
nous comprenons que cette trans-
parence aide aussi la Chine. Mal-
gré tout, nous pensons que c’est
une bonne chose », explique Shi-
hao Yu, fondateur du centre de re-
cherche IORG, une des têtes
pensantes de la « communauté ci-
vique de hackeurs » de Taïwan.
Rapidement, la Chine est deve-
nue le thème central de ces geeks.
Et pas seulement à Taïwan. « De-
puis 2019 et la répression du mou-
vement démocratique à Hon-
gkong, la Chine est une préoccupa-
tion majeure des hackeurs asiati-
ques », analyse Chihao Yu.
En 2019, des pirates informati-
ques taïwanais, hongkongais,
sud-coréens et japonais se sont
retrouvés au Japon. Une pre-
mière. Le 23 décembre, IORG a or-
ganisé un rassemblement de hac-
keurs sur la « résilience digitale ».
Au programme : la détection et la
réparation la plus rapide possible
de câbles Internet sous-marins
qui auraient été endommagés.
Matsu, une petite île taïwanaise
située à proximité immédiate
des côtes chinoises a été victime
d’un tel incident – que beaucoup
attribuent à Pékin – au prin-
temps. De même, IORG travaille
sur des programmes destinés à
maintenir le fonctionnement
d’Internet à Taïwan même si un
jour les Chinois isolaient le terri-
toire du reste du monde.
Deux personnes symbolisent
la mobilisation du secteur de la
tech taïwanaise en faveur de la
démocratie et, par voie de consé-
quence, contre la Chine. Audrey
Tang, une hackeuse charismati-
que devenue ministre des affai-
res numériques en 2022, et Puma
Shen, cofondateur, à la fois de la
Kuma Academy, une organisa-
tion qui forme les Taïwanais à se
défendre physiquement en cas
d’attaque chinoise, et de Double-
think Lab, une organisation spé-
« complètement truqué », ainsi que
le départ du président Vucic.
D’abord pacifiques, les rassem-
blements se sont tendus diman-
che soir : une centaine d’étudiants
ont brisé les vitres du conseil mu-
nicipal afin de s’y introduire,
avant que la police ne les re-
pousse. Trop peu pour inquiéter le
président Vucic : « Il ne s’agit pas
d’une révolution, ils n’y parvien-
dront pas », a-t-il réagi dans la soi-
rée. Trente-huit personnes, dont
une majorité d’étudiants, ont été
arrêtées, tandis que deux policiers
ont été « grièvement blessés », se-
lon les autorités serbes. Lundi, le
ministre de la défense Milos Vuce-
vic a qualifié les jeunes manifes-
tants de « purs voyous sans aucune
opinion politique », qui « feraient
mieux de se préparer pour les exa-
mens de janvier ».
Quelques mois après la fusillade,
en mai, dans une école de Bel-
grade, qui avait secoué le pays, les
partis d’opposition serbes, réunis
sous la bannière du SPN, comp-
Audrey Tang, ministre des affaires numérique de Taïwan, à Taipei, le 14 septembre 2022. ANN WANG/REUTERS
cialisée dans la lutte contre les
interférences chinoises. « Avant
de nous attaquer, la Chine veut
nous faire un lavage de cerveau. Il
faut donc que les Taïwanais ap-
prennent à se protéger et connais-
sent les méthodes employées par
Pékin », a expliqué Puma Shen,
désormais candidat DPP aux
élections législatives, lors d’une
récente émission télévisée.
En 2022, Doublethink Lab a pu-
blié son premier « China Index »,
un classement qui tente de mesu-
rer l’influence de la Chine pays
par pays dans différents domai-
nes. Le Pakistan arrive en tête,
Taïwan en onzième position.
Un classement contestable car il
agrège des données disparates
mais qui a le mérite de sensibili-
ser les opinions. Doublethink Lab
est d’ailleurs à la tête d’un tout
nouveau réseau de treize organis-
mes de recherche établis dans
onze pays de l’Indo-Pacifique tra-
vaillant sur les initiatives de socié-
tés civiles de la région pour lutter
contre les interférences chinoises.
Ce projet bénéficie du soutien fi-
nancier de l’Union européenne.
taient sur les élections pour abat-
tre « la broyeuse SNS » au pouvoir
depuis 2012. Ces ambitions ont été
balayées. Le 17 décembre, Vucic a
annoncé la victoire de son parti
avec 46,7 % des voix ; contre
23,58 % pour le SPN.
« Achats de voix »
Mais, selon un rapport présenté
par des observateurs internatio-
naux, comprenant des représen-
tants de l’Organisation pour la sé-
curité et la coopération en Europe,
« des achats de voix » et « des bour-
rages d’urnes » ont été constatés
dans de nombreux bureaux de vo-
tes. Le 29 novembre, une journa-
liste du Centre pour le journalisme
d’investigation de Serbie avait déjà
révélé l’existence de centres d’ap-
pels destinés à inciter les citoyens
serbes à voter pour les candidats
du SNS. Serbie contre la violence a
également dénoncé le fait que
« plus de 40 000 personnes »
auraient voté dans la capitale sans
en être résidents. Des bus imma-
Mais au fil des années la propa-
gande chinoise se fait plus sub-
tile. « Depuis la crise du Covid et
le ralentissement économique, la
propagande de Pékin, qui affirme
que tout va bien en Chine, ne fonc-
tionne plus. Désormais, Pékin ex-
ploite et amplifie des rumeurs nées
à Taïwan. Elle cherche à polariser
la société et à accroître les divi-
sions politiques », observe Tim
Niven, un des responsables de
Doublethink Lab.
Faiblesse des médias publics
« La Chine a les moyens de porter à
10 millions de vues une vidéo ini-
tialement regardée par deux mil-
lions de personnes », avance Puma
Shan. Selon lui, sur TikTok, utilisé
par plus du quart des Taïwanais,
les cinquante hashtags concer-
nant le DPP sont quasiment tous
négatifs, ce qui n’est pas le cas des
deux partis concurrents et moins
hostiles à Pékin.
« En fait, ce n’est pas le DPP qui
gêne Pékin. C’est la démocratie.
Au printemps 1989, les communis-
tes s’en prenaient aux étudiants
qui manifestaient à Pékin,
triculés en Bosnie-Herzégovine, et
soupçonnés de transporter des ci-
toyens de la Republika Srpska, l’en-
tité serbe en Bosnie, ont été aper-
çus près de bureaux de vote de Bel-
grade le jour du scrutin.
Pour l’opposition, ce nouveau
coup de force de Vucic est celui de
trop : la cheffe de file du SPN, Mari-
nika Tepic, a commencé une grève
de la faim le 18 décembre. Instal-
lée dans le Parlement de Belgrade,
elle a été rejointe par six autres dé-
putés issus de la coalition. « Si rien
ne change, les blocages s’étendront
à tout le pays à partir de mer-
credi », a averti l’un des membres
du collectif Borba (« la lutte »),
Ivan Bjelic, dont les militants
avaient bloqué les principaux
ponts de Belgrade, lundi. « Vucic,
c’est Poutine, a-t-il poursuivi, et
nous devons l’arrêter. »
Le 17 décembre, le Kremlin s’était
« félicité » de la victoire de Vucic,
qui refuse d’appliquer les sanc-
tions européennes contre la Rus-
sie et dénonce la main de « l’Occi-
aujourd’hui ils s’en prennent à
Taïwan. C’est la même logique qui
prévaut. Mais il y a un retour de
flamme et la société taïwanaise est
très mobilisée », explique Wuer
Kaixi, un des leaders des étu-
diants de la place Tiananmen,
réfugié à Taïwan, rencontré dans
les locaux de la société AI Labs,
une entreprise de 200 personnes
créée en 2017. Cette société utilise
l’intelligence artificielle pour des
recherches en médecine mais
aussi pour repérer les trolls et leur
provenance. Si AI Labs ne prouve
pas que les attaques viennent de
Pékin, ses travaux confirment
une coïncidence troublante entre
les thèmes relayés et la propa-
gande chinoise. « Nous ne som-
mes pas la première société dans le
monde à rechercher l’origine des
trolls mais nous sommes parmi les
premiers à utiliser l’intelligence ar-
tificielle pour le faire », expliquent
les dirigeants d’AI Labs.
La société utilise sa puissance
de feu pour aider des ONG, telles
que Taïwan FactCheck, une asso-
ciation créée dès 2016 par des
journalistes et qui emploie une
L’opposition
demande
l’annulation d’un
scrutin qu’elle
considère
« complètement
truqué »
dent » derrière les manifestations.
Reçu lundi par le président serbe,
l’ambassadeur russe à Belgrade a
assuré que « toutes les tentatives de
déstabiliser le pouvoir de Vucic sont
liées à sa volonté de ne pas rejoin-
dre les sanctions antirusses ». « Il
est évident que l’Occident dans son
ensemble cherche à déstabiliser la
situation dans le pays », a déclaré la
porte-parole de la diplomatie
russe, Maria Zakharova.
Lundi, le porte-parole du
Kremlin Dmitri Peskov a aussi dé-
noncé les « tentatives de forces tier-
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
douzaine de personnes, payées
notamment par Google, Meta,
Yahoo et Line (une plate-forme
sud-coréenne très populaire à
Taïwan) pour faire la chasse aux
rumeurs sur le Net. « Nous som-
mes la première organisation à
nous être lancés dans le fact-chec-
king en chinois. Aujourd’hui, il y
en a une dizaine », explique Eve
Chiu, sa directrice. Selon elle, le
dynamisme de la société civile est
l’un des atouts de Taïwan pour
lutter contre les « fake news »,
mais les médias publics restent
d’une grande faiblesse. « Il faut
essayer de rétablir la confiance
dans les grands médias, notam-
ment publics. Sinon les gens ne
croient plus à rien et tombent
dans le conspirationnisme. »
Au nom de la liberté d’expres-
sion, le gouvernement a finale-
ment renoncé en 2022 à faire vo-
ter une loi contraignant les plates-
formes à contrôler davantage les
contenus qu’elles diffusaient.
Une décision qui rend le rôle de la
société civile taïwanaise encore
plus déterminant. p
frédéric lemaître
ces, y compris depuis l’étranger, de
provoquer des troubles à Bel-
grade », précisant que la Russie
« n’a pas l’intention de s’ingérer
dans les affaires internes de qui
que ce soit, surtout pas de son al-
liée, la Serbie ». Moscou s’est tou-
jours montré vigilant vis-à-vis des
« révolutions de couleur » suscepti-
bles de renverser ses alliés, comme
ce fut le cas lors de la révolution
des roses en Géorgie en 2003, ou
de la révolution orange ukrai-
nienne de 2004.
Candidate à l’Union européenne
(UE) après des négociations d’ad-
hésion commencées il y a dix ans,
la Serbie oscille toujours entre son
ancrage à l’est et son rapproche-
ment avec les pays européens.
Alors que l’Allemagne a jugé lundi
que les irrégularités constatées
lors des scrutins étaient « inaccep-
tables pour un candidat à l’UE », les
recours pour fraude massive ont
pour l’heure tous été rejetés par les
commissions électorales serbes. p
paul battez
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
Au Mexique, le mezcal, vecteur de déforestation
La production de l’alcool d’agave a été multipliée par dix en huit ans et les monocultures sont en plein essor
REPORTAGE
palpan de baranda (morelos,
mexique) - envoyée spéciale
S
ur les flancs des collines,
dans des champs ro-
cailleux, bien alignés et
sans herbes folles, ils sont
légion dans la campagne mexi-
caine : les agaves, ces plantes suc-
culentes majestueuses, originai-
res de Méso-Amérique, dont le
fruit contient un nectar qui,
fermenté et distillé, devient de la
tequila ou du mezcal, les deux
alcools forts emblématiques du
pays. Jusque dans les années
1990, il fallait grimper dans les
bois ou arpenter les déserts pour
les apercevoir. L’agave était syl-
vestre et poussait librement au
milieu des arbres et des cactus.
Les paysans en avaient toujours
dans leurs champs, entre le maïs
et les haricots, pour distiller dans
des alambics rudimentaires le
mezcal, qui s’offrait plus qu’il ne
se vendait. Seule la région de Te-
quila, dans l’Etat du Jalisco, dispo-
sait déjà de monocultures inten-
sives d’agaves pour produire la
tequila, tant appréciée sur le
marché américain.
Mais, depuis que le mezcal est
tout autant recherché, le paysage
des campagnes mexicaines est
bouleversé. En 2022, le pays a en
effet produit 14,5 millions de li-
tres, exportés dans 81 pays, contre
1,4 million en 2014. Le nombre de
producteurs est ainsi passé de
3 000 il y a dix ans à plus de 25 000
aujourd’hui. « Cette réussite com-
merciale a aveuglé les producteurs
sur les dégâts écologiques de l’acti-
vité. Et la création d’une appella-
tion d’origine contrôlée n’a rien
changé : la surface comme l’exten-
sion territoriale n’ont fait qu’aug-
menter », explique José Blancas
Vazquez, ethnobiologiste à l’uni-
versité de Cuernavaca (Morelos).
En 1994, le Mexique crée cette
appellation pour réguler la vente :
à l’origine, celle-ci est limitée à
cinq Etats, dont celui d’Oaxaca,
toujours responsable de plus de
90 % de la production. Pour appo-
ser le mot « mezcal » sur leurs
bouteilles, les Etats mexicains doi-
vent simplement démontrer que
la production est une tradition lo-
cale. « Ce n’est pas difficile, le mez-
cal est produit dans toutes les cam-
pagnes et depuis toujours », ajoute
le professeur en ethnobiologie.
En quelques années, onze Etats
obtiennent la dénomination,
Pneumopathies : la résistance aux antibiotiques sous surveillance
En France, les souches bactériennes répondent bien aux médicaments, alors que l’antibiorésistance complique le traitement dans certains pays
S eulement 3 %. A ce stade,
une infime minorité des
pneumopathies dues à la
bactérie Mycoplasma pneumoniae
en France présente une résistance
aux macrolides, les antibiotiques
utilisés contre elle en première
intention, d’après le laboratoire
de bactériologie du CHU de Bor-
deaux, chargé de surveiller le phé-
nomène. Mais c’est un risque que
Santé publique France (SPF) sur-
veille « de très près », selon Isabelle
Parent, responsable de l’unité In-
fections respiratoires et vaccina-
tion au sein de l’agence sanitaire,
car si la résistance augmentait, il
serait plus difficile de soigner les
patients. Selon deux bulletins pu-
bliés par SPF mercredi 20 décem-
bre, les pneumopathies infantiles
restent cet hiver à un niveau « très
supérieur » à celui des années pas-
sées, même si l’épidémie semble
refluer. Du 11 au 17 décembre, par
rapport à la semaine précédente,
les urgences hospitalières et les as-
sociations SOS Médecins ont en-
registré une baisse de l’activité liée
Le nombre de
producteurs de
mezcal est passé
de 3 000 il y a
dix ans à plus
de 25 000
avant que le Conseil mexicain de
réglementation de la qualité du
mezcal (Comarca) ne plaide la dé-
gradation de la qualité devant la
justice et ne mette un frein à cette
expansion. Sauf que l’absence de
dénomination n’empêche pas les
plantations d’agave de proliférer.
C’est le cas dans l’Etat du Morelos,
au sud de la ville de Mexico, qui n’a
toujours pas de dénomination,
mais de plus en plus d’agaves.
A Palpan de Baranda, une bour-
gade de deux mille habitants, à la
frontière avec l’Etat du Guerrero,
Jesus Sotelo fait visiter ses terres
à bord de son pick-up. Le chemin
est bien tracé dans ces 40 hectares
où s’alignent les rangées d’agaves
bleus. A droite, celles âgées de
5 ans, à gauche les plus récentes,
plantées en 2022. Tout au bout
des terres, on aperçoit les premiè-
res pousses qui reçoivent déjà
leur dose de pesticide.
« Il y a près de 3 600 plantes par
hectare. Quand elles atteignent
40 kilos, en général au bout de
sept ans, on les déterre », dit ce
cultivateur à la peau tannée, qui a
abandonné, dans les années
2000, les cultures de sorgho et de
maïs pour se consacrer unique-
ment aux agaves. « C’est beaucoup
plus rentable, et c’est ainsi qu’on
est passé de quinze à deux cents
producteurs d’agaves ces dernières
années à Palpan de Baranda. »
L’agronome qui le conseille re-
connaît qu’il faut user de produits
chimiques pour contrer la perte
de fertilité des sols et la proliféra-
tion de parasites et de ravageurs.
« On tente d’abord un contrôle bio-
logique en utilisant des bactéries
et des champignons. Mais, dans
les monocultures, on est obligé
d’appliquer un herbicide comme
le glyphosate et un insecticide
comme le chlorpyrifos ou le mala-
thion », estime Martin Toledo.
Jesus Sotelo ne transforme pas
encore ses agaves en mezcal ;
toute sa production est vendue et
apportée dans d’autres Etats qui
détiennent la dénomination.
Mais, à Palpan de Baranda, une
à ces infections pulmonaires pour
les enfants de 2 à 14 ans : respecti-
vement de − 8 % et − 5 %. Mais l’ac-
tivité médicale pour ce motif reste
environ deux fois plus importante
que lors des saisons passées.
Options thérapeutiques limitées
Selon Mme Parent, Mycoplasma
pneumoniae « joue probablement
un rôle assez important » dans
l’épidémie. D’après le réseau Re-
nal, qui fédère les laboratoires de
biologie des hôpitaux, le taux de
détection de la bactérie dans les
échantillons est resté inférieur à
1 % jusqu’à la fin juillet, avant
d’augmenter jusqu’à 7,5 % fin no-
vembre. Une « immense majorité »
des infections à Mycoplasma
pneumoniae disparaissent sans
traitement. Dans le cas contraire,
on utilise des macrolides, notam-
ment l’azithromycine. Toutefois,
par mutation génétique, Myco-
plasma pneumoniae est capable
de développer une résistance à ces
médicaments. Or, en dehors des
macrolides, les options thérapeu-
Sosima Olivera, d’un collectif producteur de mezcal, dans un champ d’agaves, à Villa Sola de Vega, le 26 juillet 2022. PEDRO PARDO/AFP
distillerie est en projet avec des in-
vestisseurs américains dès qu’ils
pourront eux aussi apposer le mot
« mezcal » sur leurs bouteilles.
Au loin, les collines sont encore
recouvertes de forêt, mais il est
courant d’apercevoir des trous
dans la canopée, à la suite d’abat-
tages pour planter ces lignes
d’agaves. « Il n’existe aucune don-
née récente sur cette déforestation,
mais elle est bien réelle. Surtout, les
marques de mezcal arrivent à con-
vaincre les paysans de leur louer
leurs parcelles de forêt pour les
transformer en monoculture
d’agave. Sur ces terrains bien sou-
vent pentus, l’érosion est immé-
diate », explique Ignacio Torres
Garcia, biologiste à l’université de
Morelia (Michoacan de Ocampo),
spécialiste des agaves.
Espèces menacées
L’autre conséquence du boom du
mezcal concerne le vol des agaves
sylvestres, un peu partout dans le
pays. Selon une étude régionale
de l’Institut technologique agri-
cole d’Oaxaca, cette pratique quo-
tidienne, en particulier sur les es-
tiques sont limitées. A la diffé-
rence d’autres bactéries, les myco-
plasmes ne présentent pas de pa-
roi et sont donc insensibles aux
médicaments de la famille des bê-
ta-lactamines, comme l’amoxicil-
line. « Tout un pan de l’antibiothé-
rapie est naturellement inaccessi-
ble », souligne Jean-Christophe
Giard, professeur de bactériologie
à l’université de Caen. Des molé-
cules plus puissantes (tétracycli-
nes et fluoroquinolones) permet-
tent de combattre les souches ré-
sistantes aux macrolides, mais el-
les ne sont pas sans risque d’effets
indésirables : une coloration de
l’émail dentaire chez les enfants,
des tendinopathies ou des aléas
cardiovasculaires. « Elles ne sont
pas préconisées pour de jeunes pa-
tients, rappelle M. Giard, et impli-
quent une surveillance accrue. »
D’autres pays peuvent en témoi-
gner, comme la Chine, confrontée
fin novembre à une sévère épi-
démie de pneumopathies, où le
taux de résistance de Mycoplasma
pneumoniae aux macrolides
pèces tobala et papalomé, très re-
cherchées pour le mezcal, a pro-
voqué leur quasi-disparition. De-
puis 2019, huit espèces d’agave
sylvestre d’Oaxaca ont été clas-
sées sur la liste rouge des espèces
menacées de l’Union internatio-
nale pour la conservation de la
nature. « Le déclin des populations
sylvestres a un effet domino sur la
biodiversité. De nombreux pollini-
sateurs, comme les papillons, les
colibris, les abeilles ou les chauves-
souris, dépendent de la floraison
des agaves. Ils migrent en fonction
de cette floraison sur de vastes ter-
ritoires ; aujourd’hui, ils doivent
dévier de leurs itinéraires naturels.
Ces espèces sont aussi nécessaires
aux agaves, c’est donc une relation
symbiotique qui est affectée »,
ajoute M. Torres Garcia.
Le vol des agaves sylvestres n’a
jamais fait partie des us et coutu-
mes du mezcal, mais il est doréna-
vant habituel de voir la vente des
fruits comme des graines. Dans
des villages à plusieurs heures de
piste de Palpan de Baranda, les fu-
mées trahissent la présence
d’alambics. Assis devant un four
atteint 80 %, selon les estimations
concordantes de deux revues de la
littérature scientifique, publiées
en 2022. Leurs auteurs rappellent
qu’un suremploi d’antibiotiques
favorise l’acquisition de résis-
tance parmi les agents pathogè-
nes qu’ils sont censés combattre.
C’est la « pression de sélection » :
sous la contrainte, les individus
les plus fragiles d’une espèce dis-
paraissent tandis que ceux qui
supportent l’adversité prolifèrent.
Une menace sanitaire pour l’OMS
Cécile Bébéar, directrice du labo-
ratoire de bactériologie du CHU
de Bordeaux, prend l’exemple du
Japon, longtemps confronté à des
taux de résistance élevés : dans les
années 2000 et 2010, « on y admi-
nistrait les macrolides à des doses
subinhibitrices [c’est-à-dire à des
concentrations non létales pour
les agents pathogènes], non pas
pour tuer les bactéries mais pour
stimuler le système immunitaire
des receveurs contre différents mi-
crobes. Cures courtes et faibles do-
planète | 7
« Si tu plantes
uniquement
des agaves,
tu n’as plus rien
à manger ni
aucune plante
pour te soigner »
RUFINO VARGAS
cultivateur
en pierre sous terre, Rufino Var-
gas, 72 ans, a appris la technique
avec sa grand-mère.
Ses agaves poussent sans en-
grais, entre les arbres fruitiers, les
champs de maïs et une multitude
de plantes. Le mezcal lui apporte
certes un complément de revenu,
mais il n’imagine pas se passer du
reste : « Si tu plantes uniquement
des agaves, tu n’as plus rien à man-
ger ni aucune plante pour te soi-
gner. Sans parler des achats de
produits chimiques », dit ce pay-
san. Ce système agroforestier est
mis en avant pour les services
sages ont conduit à sélectionner
des bactéries résistantes. »
L’Organisation mondiale de la
santé (OMS) voit dans l’antibioré-
sistance l’une des pires menaces
sanitaires contre l’humanité, qui
a tué directement 1,27 million de
personnes en 2019 et « met en
danger de nombreuses avancées
de la médecine moderne ». L’OMS
combat le suremploi et les mésu-
sages. En France, selon un rapport
de l’Agence nationale de sécurité
du médicament et des produits
de santé (ANSM) paru en juillet, la
consommation de macrolides en
médecine de ville a été divisée par
deux entre 2000 et 2019. En re-
vanche, l’année 2020 a enregistré
un net rebond de la consomma-
tion d’azithromycine, surtout au
moment du premier confine-
ment. L’ANSM associe cette recru-
descence à l’hypothèse non dé-
montrée que la molécule pourrait
aider à lutter contre le Covid-19.
L’agence recommande de ne pas
l’utiliser dans cette indication,
soulignant que l’azithromycine
écologiques qu’il assure tout en
maintenant une tradition, ga-
rante d’un mezcal de qualité.
« En diversifiant les plantes, on a
moins de parasites, une bonne in-
filtration de l’eau et un couvert vé-
gétal qui protège le sol. Ce système
est bénéfique à la biodiversité, et à
la sécurité alimentaire », précise
M. Blancas Vazquez.
Certaines marques de mezcal
commencent à changer de prati-
ques, telle Amaras, qui produit
désormais 50 % de ses agaves en
agroforesterie à Oaxaca. « Il est
temps de promouvoir un autre
modèle, car la déforestation et
l’érosion sont très préoccupantes »,
reconnaît le directeur de l’innova-
tion, Ramiro Angelina-Baños.
Le Comarca prépare un cahier
des charges pour un label vert.
Une nouvelle conscience semble
émerger de ce marché florissant,
qui n’avait pris jusqu’à présent
aucune précaution pour l’envi-
ronnement. Reste que les agaves
sylvestres et avec eux de très
nombreuses espèces sont beau-
coup plus difficiles à protéger. p
anne vigna
« fait partie des antibiotiques criti-
ques particulièrement généra-
teurs de résistance bactérienne ».
Pour 2023, l’ANSM s’attend à
une hausse de la consommation
de macrolides provoquée par les
infections à Mycoplasma pneu-
moniae. En novembre, l’usage
d’azithromycine a augmenté de
17 % par rapport à novembre 2022.
Pour ne rien simplifier, « il n’est
pas évident, pour un médecin, de
savoir si la pneumonie de son pa-
tient est d’origine virale, liée à un
pneumocoque – auquel cas il peut
s’en tenir à l’amoxicilline – ou à My-
coplasma pneumoniae », cons-
tate Alban Dhanani, directeur mé-
dical adjoint de l’ANSM chargé des
antibiotiques. Il souligne qu’un
antibiotique rendu inopérant à
cause d’une surconsommation
retrouve de l’efficacité s’il est
moins utilisé. « Le phénomène de
l’antibiorésistance n’est pas irréver-
sible, mais il reste inquiétant car il
y a peu d’innovation en antibio-
thérapie », déplore le spécialiste. p
julien lemaignen
8|
FRANCE
Une unité d’extraction géothermique directe du lithium, à Rittershoffen (Bas-Rhin), le 5 décembre. FREDERICK FLORIN/AFP
Les mines, enjeu de souveraineté
national face aux réticences locales
E L’exécutif prévoit l’extraction de métaux critiques
n France, on n’a pas de pé-
trole, mais on a du li-
thium », résumait Emma-
nuel Macron le 26 octo-
bre 2022 sur France 2. Une réin-
terprétation du célèbre slogan
inventé lors du premier choc
pétrolier, cette fois pour annoncer
la réouverture de mines sur le sol
français, dont l’exploitation doit
permettre d’extraire les maté-
riaux entrant dans la fabrication
de batteries, elles-mêmes néces-
saires à la création d’une filière de
voitures électriques en France.
« C’est une stratégie de souverai-
neté, parce qu’on va produire des
batteries », ajoutait le chef de l’Etat.
Depuis que le Covid-19 a révélé
l’étendue de la dépendance du
pays à l’égard de l’étranger dans
plusieurs filières industrielles
critiques, la notion de souverai-
neté s’est imposée dans le débat
public, et s’entend désormais
comme la capacité à produire sur
le sol français. Elle structure les
plans d’investissement successifs
depuis la crise sanitaire, notam-
ment de France 2030, annoncé en
octobre 2021 et doté de 54 mil-
liards d’euros pour accélérer la
création de filières stratégiques
sur le sol français – batteries,
semi-conducteurs, médicaments,
mini-réacteurs nucléaires…
Peu mise en avant à l’époque, la
question des ressources miniè-
res, au cœur de la transition
écologique voulue par le gouver-
nement, qui s’appuie sur un vaste
mouvement d’électrification de
l’économie, est revenue au pre-
mier plan il y a quelques semai-
nes, à l’occasion d’un déplace-
ment du chef de l’Etat à Toulouse.
En relançant l’exploitation des
ressources minières telles que le
lithium, le nickel, le cobalt sur le
sol français, l’exécutif entend ré-
duire sa très grande dépendance
en matière d’approvisionnement
en métaux critiques, pour les-
quels la demande va exploser
dans les années à venir.
« C’est la clé de notre souverai-
neté dans un monde où la géopoli-
tique ne va pas se simplifier », a
présents dans le sous-sol français, qui va être
cartographié en 2024. Des projets sont déjà lancés
ou à l’étude, mais l’acceptabilité sociale reste faible
répété Emmanuel Macron le 11 dé- pourtant pas nouvelle. Il y a près
cembre. Une offensive confortée de dix ans, Arnaud Montebourg,
par l’agenda de l’Union euro- alors ministre du redressement
péenne, qui cherche elle aussi à productif, avait déjà eu l’ambition
sécuriser un accès durable en ma- de sécuriser l’approvisionnement
tières premières critiques pour la de la France dans le domaine des
transition écologique. métaux et des terres rares, pour
Dès 2024, la France va donc soutenir la compétitivité de l’in-
« cartographier partout sur notre dustrie française. Il s’agissait alors
sol nos capacités à avoir des res- de « réengager la France dans la
sources minérales » pour « accroî- bataille mondiale qui est
tre notre indépendance », a dé- aujourd’hui menée par les Etats,
taillé Emmanuel Macron. Le tout pour accéder aux ressources natu-
devant être financé par un fonds relles », avait-il expliqué à l’occa-
auquel les investisseurs privés sion d’un déplacement près d’une
sont invités à contribuer. « C’est carrière de gypse à Montmorency
un outil de résilience, ce serait trop (Val-d’Oise) en février 2014.
bête de ne pas regarder si on sait M. Montebourg avait alors an-
exploiter ces ressources dans des noncé la création d’une société
conditions environnementales minière publique, la Compagnie
acceptables, annonce le cabinet nationale des mines de France,
d’Agnès Pannier-Runacher, la mi- dotée de 200 millions à 400 mil-
nistre de la transition énergéti- lions d’euros. Celle-ci devait s’ap-
que. C’est dans cet esprit que nous puyer sur le savoir-faire du BRGM
avons engagé la refonte du code et des moyens financiers de
minier. » Et que le Bureau de re- l’Agence des participations de
cherches géologiques et minières l’Etat, ses coactionnaires, et nouer
(BRGM) a été chargé de dresser un des alliances internationales. Une
inventaire des ressources exis- refonte du code minier avait éga-
tantes – le dernier datant « des an- lement été lancée comme pré-
nées 1970 ou 1980 », précise-t-on. lude à la réforme, et un inventaire
La question de la réouverture de actualisé des ressources du sous-
mines sur le sol français n’est sol français avait été demandé au
BRGM. Emmanuel Macron, qui le
remplaça à Bercy en août 2014, ne
poursuivit pas cette politique.
« Plutôt que « On a perdu dix ans, c’est dom-
mage, regrette Arnaud Monte-
d’aller “miner” au bourg aujourd’hui. Cela ne m’em-
bout du monde, pêche pas d’approuver la politique
actuelle de souveraineté du
faisons-le chez gouvernement. Mais je pense né-
nous de façon cessaire que l’Etat soit opérateur,
via une entreprise publique, et non
responsable » seulement un fonds. Quand des
ROLAND LESCURE start-up obtiennent des permis
ministre délégué chargé miniers, elles se font presque
de l’industrie toujours retoquer devant le Con-
seil d’Etat car il y a des nuisances
pour les riverains, qui demandent
des contreparties économiques et
financières. Seul l’Etat peut ga-
rantir cela. »
C’est sur le lithium que les possi-
bilités semblent les plus promet-
teuses, puisque une quarantaine
de gisements potentiels a été iden-
tifiée en France. Des projets de mi-
nes sont lancés ou à l’étude dans
l’Allier, le Finistère, ou en Alsace,
faisant aussitôt l’objet de mouve-
ments d’opposition locaux.
Campagne d’exploration
Le gouvernement avance que cer-
tains de ces projets sont « exem-
plaire[s] sur le plan environne-
mental et climatique », a assuré le
ministre de l’économie, Bruno
Le Maire, à propos de celui de l’Al-
lier. Mais malgré l’appétit des
consommateurs pour des objets
fonctionnant avec des batteries,
l’acceptabilité sociale de l’extrac-
tion minière sur le sol français
demeure faible. « Plutôt que d’al-
ler “miner” au bout du monde,
faisons-le chez nous de façon res-
ponsable », insiste le ministre
délégué chargé de l’industrie,
Roland Lescure.
L’exécutif espère à terme exploi-
ter d’autres ressources, c’est l’en-
jeu de la campagne d’exploration
qu’il a lancée. Outre le lithium, des
gisements de tungstène sont
connus et identifiés, et, dans une
moindre mesure, de cuivre, indi-
que le ministère de la transition
énergétique. Des projets se multi-
plient aussi dans l’hydrogène
blanc (présent naturellement
dans le sol, et non issu d’une trans-
formation). Le gouvernement a
placé cette molécule au cœur de sa
stratégie de décarbonation, mais
reste réservé à ce stade sur la quan-
tité présente dans le sol français.
Un premier permis d’exploration
a été accordé début décembre
dans les Pyrénées-Atlantiques et
d’autres sont en attente.
« Globalement, il y a peu de res-
sources minières en France, tem-
père l’économiste Philippe Chal-
min, spécialiste des matières pre-
mières. Il ne faut pas trop se faire
d’illusions. Par ailleurs, en France,
une mine égale une zone à défen-
dre [ZAD]… Nos meilleurs étu-
diants sont issus du puissant corps
des Mines, mais nous n’avons plus
de mines ! » Surtout, la souverai-
neté se joue au moins autant au
niveau de l’extraction que de la
transformation et du raffinage,
qui sont les stades les plus pol-
luants. « Pendant longtemps, la
France était leader mondial des
terres rares parce qu’elle avait une
usine Rhône-Poulenc à La Rochelle
qui traitait des minerais importés
d’Australie, poursuit Philippe
Chalmin. Aujourd’hui, c’est la
Chine qui domine l’économie du li-
thium car elle concentre les capaci-
tés de transformation. »
Autre source de fragilité : le cui-
vre, stratégique, car il permet de
conduire l’électricité nécessaire à
l’alimentation des batteries. « On
ne sait pas à quoi fonctionneront
les batteries dans vingt ans, mais
on sait avec certitude qu’il faudra
du cuivre pour les alimenter en
électricité, juge l’économiste. Or, il
y a peu de grands projets miniers
dans le monde. C’est une vraie
source d’inquiétude, alors que les
autres métaux sont plus ou moins
substituables. »
En revanche, un tabou de-
meure : celui des pétrole et gaz de
schiste, dont l’exploration est in-
terdite en France depuis que la
fracturation hydraulique a été
bannie en 2011 en raison de ris-
ques pour l’environnement jugés
trop élevés, et que, depuis la loi
Hulot de 2017, la recherche et l’ex-
ploitation des hydrocarbures y
sont interdites. Mais pas les im-
portations : depuis la guerre en
Ukraine, la France achète massi-
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
« En France,
une mine égale
une zone
à défendre »
PHILIPPE CHALMIN
économiste
vement du gaz américain (com-
posé à 80 % de gaz de schiste). Elle
n’est pas revenue sur cet interdit,
à la différence d’autres pays
comme le Royaume-Uni ou la Po-
logne. Et le débat, très vif il y a une
dizaine d’années, demeure clos.
« Je souhaite que l’on revienne
sur l’interdiction faite à la recher-
che sur le gaz de schiste, avait tenté
Nicolas Sarkozy dans Le Journal
du dimanche le 23 octobre 2022,
après avoir lui-même changé
d’avis à plusieurs reprises. Il fau-
dra le faire dès que l’on maîtrisera
une technique de fragmentation
qui préserve les nappes phréati-
ques. Mais si on ne recherche pas
les technologies qui nous permet-
tront d’exploiter la richesse de
notre sous-sol tout en protégeant
nos nappes phréatiques, on ne ris-
que pas de les trouver. »
Nouvelle méthode de forage
Une piste aussitôt refermée par
l’exécutif, la France s’étant enga-
gée à sortir complètement des
énergies fossiles d’ici à 2050.
« C’est une très mauvaise idée, a
immédiatement répondu Agnès
Pannier-Runacher. Nous savons
que l’exploitation du gaz de schiste
contribue à renforcer le réchauffe-
ment climatique. » Les importa-
tions sont issues de « gisements
qui existent, pas des gisements
additionnels », a-t-elle justifié,
plaidant pour ne pas « refaire ce
qui a créé les dégâts que nous ob-
servons aujourd’hui ».
En Gironde, la levée de boucliers
contre un projet de forage de huit
nouveaux puits de pétrole montre
la quasi-impossibilité d’un por-
tage politique sur le sujet. Même le
Rassemblement national (RN),
pourtant climato-relativiste, ne se
hasarde pas sur le terrain des éner-
gies fossiles. « Je préfère que le dé-
bat public se concentre sur l’accep-
tabilité sociale de l’exploitation des
mines que sur le gaz de schiste », re-
connaît Roland Lescure.
Les entreprises, qui se plaignent
de devoir payer une énergie
« deux à trois fois plus chère en
France qu’aux Etats-Unis », selon
l’organisation France Industrie,
ont elles aussi renoncé à mener ce
combat. « Sécuriser les approvi-
sionnements énergétiques, c’est
absolument critique, analyse
l’économiste François Geerolf, de
l’Observatoire français des con-
jonctures économiques. La ques-
tion est de savoir si la souveraineté
c’est d’exploiter chez soi, ou de sé-
curiser les approvisionnements. »
Un rapport commandé par Ar-
naud Montebourg à son arrivée à
Bercy en 2012, et rapidement en-
terré, avançait pourtant que la
France avait des réserves de gaz et
pétrole non conventionnels lui
permettant de produire jusqu’à
130 % de sa consommation an-
nuelle en gaz, et jusqu’à 13 % de sa
consommation de pétrole. Il pré-
conisait d’expérimenter une
nouvelle méthode de forage par
fracturation à base d’heptafluoro-
propane, présentée comme moins
dangereuse pour les nappes
phréatiques, mais plus coûteuse.
Une expérimentation était recom-
mandée, qui n’a pas été lancée.
« Au plan géologique, c’est cer-
tain qu’il y a des hydrocarbures
exploitables par la fracturation
hydraulique sur le sol français,
mais on ne sait pas le faire dans des
conditions environnementales ac-
ceptables, et encore moins dans
des territoires peuplés et urbanisés,
explique le cabinet d’Agnès Pan-
nier-Runacher. La solution, c’est de
fabriquer l’électricité décarbonée
la plus compétitive possible. » p
elsa conesa
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
Le difficile décryptage
des autoévaluations sur
le harcèlement scolaire
Les questionnaires anonymes ont permis de
libérer la parole des élèves. Des professeurs
soulignent les limites de ce nouvel outil
C’ est le nouvel outil in-
troduit en 2023 pour
détecter et lutter contre
le harcèlement à l’école : un ques-
tionnaire d’autoévaluation ano-
nyme, construit avec des profes-
sionnels de la santé mentale des
jeunes et destiné aux élèves
du CE2 à la terminale. Comme
l’avait souhaité le ministre de
l’éducation nationale, Gabriel At-
tal, cette grille de questions devait
être distribuée en novembre à
quelque 7,5 millions d’enfants et
d’adolescents pour vérifier s’ils
étaient « susceptibles d’être victi-
mes de harcèlement scolaire ».
Les réponses remontées par
un échantillon d’établissements
permettront au ministère de
l’éducation de disposer de don-
nées actualisées à partir desquel-
les quantifier le nombre d’élèves
victimes de ce fléau, dont l’am-
pleur reste mal mesurée. De sour-
ces syndicales, les services statis-
tiques du ministère n’ont pas ter-
miné de les analyser.
Au-delà de la visée statistique, la
distribution de ces questionnai-
res, qui devait s’insérer dans un
temps d’échange de deux heures
sur le harcèlement, était égale-
ment destinée à « libérer la parole »
des élèves. La grille de questions
les invitait à évaluer s’ils s’esti-
maient concernés « très souvent »,
« souvent », « parfois » ou « jamais »
par des situations spécifiques,
comme le fait de manger seul,
d’être l’objet de moqueries, d’avoir
peur d’aller en classe, d’être impli-
qué dans des violences, d’être ob-
jet ou témoin de messages insul-
tants sur les réseaux sociaux…
Certaines questions, adaptées à
l’âge de chaque élève, portaient
également sur d’éventuelles vio-
lences à caractère sexuel.
Ecueil de l’anonymat
« Les enfants ont en effet beaucoup
parlé », constate Johanna Cornou,
référente directrice d’école pour le
SE-UNSA. Dans son école, les
deux heures consacrées au sujet
se sont parfois muées en une jour-
née d’atelier pour les élèves. « Le
fait que les questionnaires portent
sur des situations très précises et
concrètes a aussi permis à certains,
surtout chez les plus grands, de se
rendre compte qu’ils avaient eux-
mêmes des comportements qui
pouvaient s’apparenter à du harcè-
lement », a-t-elle aussi observé.
La collecte de ces réponses par
centaines, si elle a pris un temps
conséquent aux équipes, a per-
mis, selon les professionnels, de
cerner des « ambiances de classe ».
« On a pu repérer des problèmes
dans des groupes, en reparler avec
les classes concernées, inviter les
élèves à venir en parler à un
adulte », rapporte Yvon Manac’h,
proviseur à Fonsorbes (Haute-Ga-
ronne) et secrétaire académique
du SNPDEN-UNSA, syndicat majo-
ritaire des chefs d’établissement.
Dans les établissements scolai-
res, le bilan de cette première ex-
périence est cependant mitigé.
Selon les syndicats, la communi-
cation tardive du ministère sur
l’organisation de cette initiative la
J UST I C E
Une mère et ses quatre
enfants retrouvés morts
en Seine-et-Marne
Une mère et ses quatre
enfants, âgés de 9 mois
à 10 ans, ont été retrouvés
morts à leur domicile de
Meaux, en Seine-et-Marne,
lundi 25 décembre au soir, a
annoncé, mardi, le procu-
reur de la République de
semaine après les vacances de la
Toussaint a mis les équipes en dif-
ficulté. « La question du harcèle-
ment est délicate à traiter, et les
questionnaires étaient peu adap-
tés aux élèves les plus jeunes,
ça n’était pas évident à préparer »,
déplore Sophie Grenon, directrice
d’école et responsable du SNUipp-
FSU dans l’Indre. Tous les établis-
sements n’ont pas distribué l’en-
quête à leurs élèves en novembre.
Faute de guide d’analyse des
questionnaires, ceux qui l’ont fait
se sont par ailleurs sentis dému-
nis au moment de lire les répon-
ses et d’essayer d’établir quelle
physionomie des résultats devait
les alerter. Ils se sont surtout
heurtées à l’écueil de taille du fait
de l’anonymat. « Un enfant qui ré-
pond “très souvent” à la question
“Est-ce qu’un ou plusieurs élèves
ont essayé de toucher des parties
de ton corps ou de t’embrasser
sans que tu dises oui ?”, c’est alar-
mant, mais on est coincé car on ne
sait pas de qui il s’agit », déplore,
sous couvert d’anonymat, une
directrice d’école.
« On a vu ressortir des cas très
graves mais sans pouvoir identifier
les élèves concernés. On s’est re-
trouvé à tenter de reconnaître les
écritures pour essayer de deviner
qui était l’élève en souffrance ! »,
abonde Alex Berasategui, princi-
pal de collège dans les Yvelines.
Celui qui est aussi secrétaire dé-
partemental du SNPDEN déplore
plus largement que les établisse-
ments n’aient pas les moyens de
faire face, parfois, à un afflux de si-
gnalements. C’est le cas par exem-
ple au collège Jacques-Cartier d’Is-
sou (Yvelines), dans lequel Gabriel
Attal s’est rendu le 11 décembre
après que les enseignants ont
exercé leur droit de retrait à la
suite d’un incident dans un cours
de français et plusieurs semaines
de tensions. Dans une lettre adres-
sée à la direction académique ex-
posant les raisons de son mal-être,
l’équipe du collège alertait entre
autres sur une « explosion des
suspicions de harcèlements sous
ses différentes formes » après l’en-
quête nationale du mois de no-
vembre ; situations qu’elle ne par-
venait pas « à traiter correctement
faute de moyens humains ».
Le ministère de l’éducation n’a
pas prévu d’étoffer les équipes de
vie scolaire des établissements.
Le plan interministériel présenté
fin septembre repose surtout sur
l’extension du programme de
lutte contre le harcèlement à
l’école, qui prévoit la constitution
d’équipes volontaires dans cha-
que établissement, et la forma-
tion « d’ici à la fin du quinquen-
nat » de toute la communauté
éducative sur le sujet. Un amen-
dement a aussi été ajouté au bud-
get 2024 prévoyant 30 millions
d’euros pour financer des « briga-
des antiharcèlement » dans les
académies. Celles-ci pourraient
intervenir en appui des équipes
pédagogiques pour gérer les si-
gnalements, sur le modèle des
équipes dites « valeurs de la Répu-
blique » pour la laïcité. p
éléa pommiers
Meaux, Jean-Baptiste Bladier.
Selon une source proche
du dossier, la mère, âgée
de 35 ans, et ses enfants ont
été tués à l’arme blanche.
Recherché par la police,
le père, 33 ans, a été arrêté
mardi matin, à Sevran (Sei-
ne-Saint-Denis). Une en-
quête a été ouverte pour
« homicides volontaires avec
préméditation ». – (AFP.)
Les syndics frileux sur le sujet
de la rénovation énergétique
Si la prise de conscience progresse, de nombreux professionnels
soulignent la multitude de difficultés auxquelles ils sont confrontés
L
es copropriétaires de ce
petit immeuble ancien,
dans le quartier du Ma-
rais, à Paris, ont quitté
le 27 septembre leur assemblée
générale (AG) annuelle sans bien
comprendre ce qu’ils avaient
voté, ni pourquoi. En fin de réu-
nion, le syndic a abordé avec pru-
dence le chapitre de la rénova-
tion thermique et des obliga-
tions prévues par la loi Climat et
résilience de 2021.
Le procès-verbal témoigne
qu’un diagnostic de perfor-
mance énergétique (DPE) collec-
tif a été inscrit à l’ordre du jour.
« Mais le syndic nous a dit :
“Je vous recommande de voter
contre”, témoigne Alexandre
(le prénom a été changé), l’un des
propriétaires, membre du con-
seil syndical. Il nous a expliqué
qu’il ne fallait pas s’embêter avec
ça, pour nous éviter d’engager des
frais alors que le sujet reste très
flou. Et que nous en reparlerions
lors des prochaines AG. » Les pro-
priétaires ont voté contre, mi-
soulagés d’avoir échappé à une
dépense, mi-déconcertés de ne
pas emboîter le pas de la rénova-
tion et de la lutte contre le ré-
chauffement climatique.
Le syndic, à la fois représentant
légal et chargé de la gestion de la
copropriété, est pourtant censé
jouer un rôle central dans le
grand chantier de la rénovation
énergétique du parc de loge-
ments. « Nous sommes au cœur
du processus, pour informer, ex-
pliquer les lois, conseiller, orien-
ter, assure Danielle Dubrac, qui
préside l’Union des syndicats de
l’immobilier. Et c’est formidable
d’être des ambassadeurs de la
décarbonation, c’est plus intéres-
sant que de gérer des pannes
d’ascenseurs. »
Nombre d’autres copropriétai-
res ont pourtant constaté l’in-
verse à l’échelle de leur immeu-
ble. Anne-Sophie Harnisch, pro-
priétaire dans la capitale et archi-
tecte, a le sentiment d’avoir été
bien seule, avec le conseil syndi-
cal, à porter le projet de rénova-
tion de son bâtiment. « En 2018,
c’est moi qui suis allée chercher la
subvention pour réaliser l’audit
énergétique, puis j’ai consulté des
maîtres d’œuvre, et, avec des voi-
sins, nous nous sommes occupés
des visites de l’architecte et des ex-
perts de l’audit. Le syndic n’a pas
été réfractaire, dit-elle, mais il n’a
pas joué son rôle de conseil ; il a
été mou, tandis que nous avons
dû être hyperdynamiques. »
Une attitude de « suivisme »
Dans une étude parue en octobre
sur « Les mutations contempo-
raines des syndics de copro-
priété », l’Institut Paris Région
confirme que, si les acteurs na-
tionaux comme Nexity ou Fon-
cia « se montrent globalement
très investis auprès des pouvoirs
publics sur le sujet de la rénova-
tion énergétique », la réalité est
tout autre sur le terrain. « L’atti-
tude majoritaire des syndics, ob-
servait le rapport, serait plutôt
celle du suivisme. »
Consciente des progrès à réali-
ser, la Mairie de Paris a d’ailleurs
reçu les représentants de la pro-
fession à l’Hôtel de ville le 28 no-
vembre, pour signer une charte
d’engagements mutuels afin de
massifier la rénovation des co-
propriétés parisiennes. « Nous
sommes prescripteurs, donc, sans
nous, il ne se passera rien, con-
firme Sylvain Delesalle, directeur
général du cabinet My Syndic,
implanté en Ile-de-France. En AG,
on peut freiner si nous ne voulons
pas qu’un projet passe, ou, au
contraire, on peut le pousser.
Mais là, ce n’est pas qu’on ne veut
pas, c’est qu’on ne peut pas. » La
charge de travail supplémentaire
constitue la première difficulté.
« Si je passe 100 % de nos immeu-
bles en audit énergétique, et
l’année suivante en phase tra-
vaux, nos équipes vont exploser,
je n’aurai pas assez de
main-d’œuvre, explique Sylvain
Delesalle. Il faudrait donc embau-
cher, mais je ne me vois pas de-
mander à nos clients d’augmen-
ter les honoraires de 50 %, et par
ailleurs il y a une vraie pénurie de
gestionnaires, beaucoup sortent
de la profession et il est de plus en
plus dur de recruter. »
Alors que le DPE collectif devra
être réalisé au 1er janvier 2024
pour les plus grandes coproprié-
tés, et au plus tard au 1er jan-
vier 2026 pour les plus petites, le
président de la Fédération natio-
nale de l’immobilier (Fnaim), Loïc
Cantin, juge le calendrier de la ré-
novation « intenable ».
« Pas suffisament formés »
Lionel Réchain dirige un syndic
indépendant de taille moyenne.
Son cabinet parisien rassemble
une dizaine de collaborateurs et
un portefeuille de cent dix im-
meubles. Lui aussi reconnaît vo-
lontiers qu’« assez peu de ges-
tionnaires poussent et se bat-
tent » en faveur de la rénovation
énergétique, mais fait valoir, à
leur décharge, qu’« ils ne sont pas
aujourd’hui suffisamment for-
més, alors que les connaissances
à emmagasiner sont énormes ».
Il vient donc d’embaucher une
gestionnaire entièrement assi-
gnée à ce chantier. « Lorsqu’on
explique aux copropriétaires
que les travaux d’amélioration
énergétique vont coûter de
- CESSATIONS DE GARANTIE
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
ACCORD GESTION SAS
2 Boulevard d’Arcole
31000 TOULOUSE RCS: 387 546 427
depuis le 01/01/2007 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS ACCORD GESTION.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
L’AGENCE DE LA CESSOIE SASU
8 Place de la Cessoie
59130 LAMBERSART RCS: 901 274 498
depuis le 10/08/2021 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SASU L’AGENCE DE LA CESSOIE.
« Nous sommes
prescripteurs,
sans nous,
il ne se passera
rien »
SYLVAIN DELESALLE
directeur général du cabinet
My Syndic, implanté
en Ile-de-France
300 000 euros pour un petit
immeuble à plus d’un million
d’euros au-delà de cinquante ap-
partements, il faut mettre en face
un gestionnaire qui maîtrise le
sujet, pas quelqu’un d’un peu
dépassé », poursuit-il.
Avec une facture moyenne par
copropriétaire de 17 700 euros
(hors taxes) – et qui dépasse sou-
vent 30 000 euros en région pa-
risienne – le « mur de l’argent »
est d’ailleurs l’autre frein majeur
des syndics. Les prêts collectifs
pour ce type de travaux, pour
financer le reste à charge après la
subvention publique, ne sont
pas adaptés. « Les gestionnaires
sont souvent découragés par le
reste à charge, car ils peuvent
se casser les dents et ne pas trou-
ver de banque », témoigne Da-
nielle Dubrac.
« Les syndics sont aussi vus
comme les apporteurs de mau-
vaise nouvelle, comme ceux qui
incitent à la dépense, on constate
souvent une défiance à leur égard,
observe Frédéric Delhommeau,
directeur habitat et rénovation à
l’Agence parisienne du climat,
qui a créé la plate-forme Coach-
Copro pour aider les coproprié-
tés à se lancer. Ils sont certes ré-
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
REGIE GASC BATTISTELLA
IMMOBILIER SARL Place de la Chaite
38460 CRÉMIEU RCS: 377 650 171
depuis le 01/01/2006 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES
ET FONDS DE COMMERCE, depuis le
01/01/2006 pour ses activités de : GESTION
IMMOBILIERE, depuis le 01/01/2017 pour
ses activités de : SYNDIC DE COPROPRIETE
cessera de porter effet trois jours francs après
publication du présent avis. Les créances
éventuelles se rapportant à ces opérations
devront être produites dans les trois mois de
cette insertion à l’adresse de l’Établissement
garant sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets
- 92913 Paris La Défense Cedex. Il est précisé
qu’il s’agit de créances éventuelles et que le
présent avis ne préjuge en rien du paiement ou
du non-paiement des sommes dues et ne peut
en aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SARL REGIE GASC
BATTISTELLA IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont
le siège social est à 37, Boulevard du Régent,
1000 BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir
que, la garantie financière dont bénéficiait la :
SOCIÉTÉ DE PROMOTION ET
D’ACTIVITÉS IMMOBILIERES
«SOPRATIM» SARL 20 Rue de Molsheim
67000 STRASBOURG RCS: 384 874 301
depuis le 01/01/2022 pour ses activités de
: GESTION IMMOBILIERE, depuis le
01/01/2022 pour ses activités de : SYNDIC
DE COPROPRIETE cessera de porter effet
trois jours francs après publication du présent
avis. Les créances éventuelles se rapportant
à ces opérations devront être produites dans
les trois mois de cette insertion à l’adresse
de l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de créances
éventuelles et que le présent avis ne préjuge
en rien du paiement ou du non-paiement
des sommes dues et ne peut en aucune façon
mettre en cause la solvabilité ou l’honorabi-
lité de la SARL SOCIÉTÉ DE PROMOTION
ET D’ACTIVITÉS IMMOBILIERES
«SOPRATIM ».
france | 9
munérés, par le biais d’une quote-
part sur les travaux, mais plu-
sieurs années après le lancement
du projet, car ce sont des chantiers
très longs. » « Et comme le contrat
du syndic est de trois ans, le risque
existe qu’un autre syndic touche
in fine la commission », relève
Danielle Dubrac.
Pourtant, une prise de cons-
cience est à l’œuvre. L’explosion
des prix de l’énergie et l’obliga-
tion qui incombe aux propriétai-
res bailleurs de rénover les pas-
soires thermiques pour conti-
nuer à les mettre en location
ont créé une dynamique.
« Aujourd’hui, pas une AG ne se
tient sans parler de rénovation »,
se félicite Sébastien Catté-Wa-
gner, responsable du service ha-
bitat durable à l’Agence nationale
de l’habitat. Cet établissement
public a plus que doublé le nom-
bre des subventions MaPrime-
Rénov’ Copropriétés distribuées
entre 2021 et 2022 : le nombre de
logements ayant bénéficié d’une
rénovation des parties commu-
nes de leur immeuble (isolation
de façade, de toiture, installation
de ventilation…) est ainsi passé
en un an de 10 000 à plus de
22 000.
L’objectif est de franchir la
barre des 40 000 en 2023. Cette
portion reste toutefois encore
bien maigre, eu égard au 1 mil-
lion de logements en copro-
priété classés passoires thermi-
ques avec une étiquette « F »
ou « G » – sans même compter
les « E ». « Les syndics sont en
retard et se rendent compte de la
nécessité d’avancer, résume Lio-
nel Réchain. Mais c’est une mon-
tagne qui est devant nous. » p
véronique chocron
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
L’AGENCE D’ASCQ SAS
151 rue Gaston Baratte
59650 VILLENEUVE D’ASCQ
RCS: 890 284 573
depuis le 16/11/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la SAS L’AGENCE D’ASCQ.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
L’AGENCE PARIS-LILLE SAS
36 Rue Royale
59800 LILLE RCS: 904 646 890
depuis le 16/11/2021 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS L’AGENCE PARIS-LILLE.
10 | france
Les suicides forcés, la face
cachée des féminicides
En 2022, 759 femmes se sont suicidées ou ont tenté de le faire
en raison du harcèlement de leur conjoint ou ex-conjoint. Une
infraction en forte hausse, mais peu visible et difficile à prouver
ENQUÊTE
L
e 1er janvier 2021 au
matin, les derniers
fêtards arpentent la
ville de Toulon, s’al-
longent sur la plage
de la Mitre pour épon-
ger une soirée trop arrosée, se ser-
rent dans les bras pour fêter la
nouvelle année. Ils ne voient pas,
à quelques mètres d’eux, le corps
d’Odile. Quelques heures plus tôt,
Odile Nasri, 50 ans, a décidé de
mettre fin à ses jours. A l’aube,
elle descend sur cette plage, tout
près de son domicile, pour une
dernière balade. Elle sera retrou-
vée inanimée à 9 heures par un
promeneur. Elle est prise en
charge à l’hôpital en « urgence vi-
tale », son cœur lâche vers midi.
« Son mari était à l’hôpital, mais
il ne nous a prévenus qu’une heure
après son décès. Il ne nous avait
pas non plus informés du fait qu’il
n’avait plus de nouvelles d’elle de-
puis près de vingt-quatre heures »,
raconte Fadila Nasri, la sœur
d’Odile, qui s’effondre. « Tout me
semble encore surréaliste tant
cette fin tragique est aux antipo-
des de la personne pleine de vie,
pétillante, souriante et très indé-
pendante, que tout le monde a
connue, poursuit l’enseignante
de 55 ans. Avec ma sœur, on a tout
- CESSATIONS DE GARANTIE
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
LIAB SAS
1 Rue du General Leclerc
59480 LA BASSÉE
RCS: 880 666 359
depuis le 25/02/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SAS LIAB.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
EUROCONSTRUCTION SAS
32 Chemin Vert
78680 ÉPÔNE RCS: 352 235 998
depuis le 01/01/2004 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis.Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS EUROCONSTRUCTION.
partagé, les fêtes, les sorties, les
études. Et puis, elle l’a rencontré,
son ex-mari. C’est lui qui va l’enfer-
mer dans un huis clos machiavéli-
que, toxique et qui va l’isoler de
tout le monde. »
Le rapport de police indique
qu’Odile Nasri est morte d’« in-
toxication médicamenteuse » et
d’« hypothermie ». Avec ses trois
frères, Messaoud, Karim et Fran-
cis, Fadila décide de porter
plainte en juin 2021. Trois mois
plus tard, la toute première infor-
mation judiciaire en France pour
« suicide forcé » est ouverte. « La
route est longue, mesure Fadila
Nasri, mais j’irai jusqu’au bout,
je vais me battre pour elle. »
« VIDE JURIDIQUE »
La France est le premier pays en
Europe et le deuxième dans le
monde à reconnaître et condam-
ner le suicide forcé. Le harcèle-
ment par conjoint ou ex-conjoint
ayant conduit la victime à se sui-
cider ou à tenter de se suicider est
une infraction inscrite dans la loi
du 30 juillet 2020, issue du Gre-
nelle des violences conjugales de
2019. Il est désormais puni de
dix ans d’emprisonnement et de
150 000 euros d’amende.
Ce nouvel article 222-33-2-1 du
Code pénal vise à incriminer
l’une des faces cachées des fémi-
nicides. « Les suicides forcés cor-
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
PRÉBAY IMMOBILIER SARL
96 Rue Michel-Ange
75016 PARIS RCS: 481 223 436
depuis le 01/04/2005 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL PRÉBAY IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont
le siège social est à 37, Boulevard du Régent,
1000 BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir
que, la garantie financière dont bénéficiait la :
SARL THEOTIS SARL
2 Rue Louis Revon
74000 ANNECY RCS: 439 936 642
depuis le 01/01/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES
ET FONDS DE COMMERCE depuis le
09/09/2019 pour ses activités de : GESTION
IMMOBILIERE cessera de porter effet trois
jours francs après publication du présent avis.
Les créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les trois
mois de cette insertion à l’adresse de l’Établis-
sement garant sis Tour CBX - 1 Passerelle des
Reflets - 92913 Paris La Défense Cedex. Il est
précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du paie-
ment ou du non-paiement des sommes dues et
ne peut en aucune façon mettre en cause la sol-
vabilité ou l’honorabilité de la SARL SARL
THEOTIS.
respondent à des situations où un
partenaire, une femme dans la
majorité des cas, victime de vio-
lences physiques et/ou psychologi-
ques ne voit pas d’autre issue pour
s’en sortir que de mettre fin à ses
jours », détaille Yael Mellul, avo-
cate spécialiste des violences con-
jugales et qui a fait du « suicide
forcé » son cheval de bataille de-
puis quinze ans. Pour elle, cette
loi vient combler « un vide juridi-
que » et permet la reconnaissance
de ce « fléau sociétal ».
En parallèle, un nouveau chiffre
est venu jeter une lumière crue
sur les violences conjugales. Fin
2022, les suicides à la suite du har-
cèlement d’un conjoint ou ex-
conjoint ont été recensés dans la
lettre de l’Observatoire national
des violences faites aux femmes.
En 2021, 684 personnes dans
cette situation se sont suicidées
ou ont essayé de le faire,
759 en 2022 d’après les chiffres
du ministère de l’intérieur, qui
indique qu’il s’agit quasi exclusi-
vement de femmes. Des chiffres
bien supérieurs aux 118 féminici-
des dénombrés en 2022.
« Quand on dit qu’une femme
meurt tous les trois jours en
France, c’est donc faux, assène
Ernestine Ronai, responsable de
l’Observatoire départemental
des violences envers les femmes
de Seine-Saint-Denis. Ce sont
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
PATRIMOINE EST IMMOBILIER SAS
5-7 Rue de Monttessuy
75007 PARIS RCS: 450 648 712
depuis le 01/01/2004 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS PATRIMOINE EST IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
N.C.I. NELLY CHAPOUX IMMOBILIER
SARL 99 Boulevard de la Reine
78000 VERSAILLES RCS: 439 700 246
depuis le 01/01/2004 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune fa-
çon mettre en cause la solvabilité ou l’honora-
bilité de la SARL N.C.I. NELLY CHAPOUX
IMMOBILIER.
trois femmes par jour qu’on tue,
qu’on a voulu tuer, qui se suicident
ou qui ont voulu se suicider. Si on
ajoute les suicides forcés aux “fé-
minicides”, la photographie du
taux de mortalité lié aux violences
conjugales n’est plus du tout la
même. Un constat que la société et
les pouvoirs publics ne sont pas
prêts à accepter. » D’après les chif-
fres obtenus par Le Monde auprès
du ministère de la justice, depuis
l’entrée en vigueur de la loi
en 2020, 20 procédures ont été
transmises au parquet, dont
deux poursuites correctionnelles
en 2020, 190 procédures et
10 poursuites correctionnelles
en 2021, 233 procédures et
25 poursuites correctionnelles
en 2022. Depuis 2020, il y a eu
une dizaine de condamnations.
L’avocat qui suit l’affaire d’Odile
Nasri, Me Victor Zagury, explique
que l’enquête « avance bien » et
rappelle que l’ouverture d’une in-
formation judiciaire pour « sui-
cide forcé » est déjà « une vic-
toire ». Me Zagury affirme avoir
déposé une plainte sous cette
qualification juridique pour
d’autres victimes. L’avocat de l’ex-
mari d’Odile Nasri, Bertrand Pie,
affirme que son client « nie tout ».
Ce dernier a été auditionné une
fois en janvier 2023. Il n’est pas, à
l’heure actuelle, mis en examen.
« Ma sœur a cru qu’elle n’avait
pas le choix », raconte Fadila
Nasri, dont la voix se brise. L’en-
seignante commence à dérouler
le fil de l’histoire. Odile, ses frères
et sa sœur perdent leurs parents
d’une longue maladie. La jeune
femme a 23 ans lorsque sa mère
meurt, 27 ans lorsque son père
décède. Elle en gardera des « cica-
trices ». « Elle avait ce besoin d’af-
fection, cette peur d’être seule »,
rapporte Fadila Nasri.
« TOI TU CHERCHES LA MERDE »
Début 2010, Odile, qui approche
des 40 ans, travaille en tant
qu’agente administrative et dé-
cide de s’inscrire sur un site de
rencontre. Elle y fait la connais-
sance d’Harold (le prénom a été
modifié), son futur mari. Il est
grand, peau blanche, cheveux châ-
tain clair, « un physique de séduc-
teur », décrit Fadila. Odile tombe
immédiatement sous le charme.
Lui, en recherche d’emploi, n’a pas
de revenu stable ni de domicile et
s’installe chez elle. C’est la pre-
mière rupture avec ses proches.
« A partir de là, je n’ai plus beau-
coup vu ma sœur, mais je me disais
que c’était normal, que c’était le
tourbillon des débuts. J’avais sur-
tout peur qu’elle ait un gros chagrin
d’amour », se souvient Fadila.
Cette dernière reçoit un coup
de fil à l’été 2010 : « Elle était en
pleurs, et m’a dit qu’il l’avait insul-
tée, elle, sa famille, sa foi, et qu’elle
était à la rue. » Odile raccroche et
« DEUX JOURS
AVANT SA MORT,
ELLE CONTINUAIT À LE
DÉFENDRE, ELLE NE SE
RENDAIT PAS COMPTE QUE
C’ÉTAIT SON BOURREAU »
FADILA NASRI
sœur d’Odile
retourne auprès d’Harold qui
prend Fadila Nasri en grippe.
« Toi tu cherches la merde », lui
dit-il au détour d’une conversa-
tion – l’enquête révélera d’autres
épisodes de violences. Fadila
Nasri, qui sent sa sœur s’éloigner,
tente d’en parler à ses frères qui
lui rétorquent : « Elle a 40 ans,
qu’est-ce qu’on peut faire ? »
Odile et Harold se marient
en 2011 et les échanges avec sa fa-
mille se raréfient. Elle déménage
de Montpellier, s’installe à Tou-
lon en 2018 et se coupe de ses ra-
res amis. « L’enquête a révélé qu’à
partir de cette période l’état men-
tal et physique de ma sœur se dé-
grade de façon très alarmante.
Après deux prises en charge aux
urgences, il est mentionné dans
son dossier : “Un amaigrissement
important et des idées noires, la
patiente a des propos qui son-
naient comme des appels aux se-
cours” », avance la quinquagé-
naire. Un rapport d’expertise psy-
chiatrique mentionne des « ten-
sions conjugales importantes »
évoquées par Odile.
A l’été 2020, Odile reprend timi-
dement contact avec Fadila
Nasri. Puis les SMS se font plus
nombreux et plus normaux.
Fadila se dit que sa sœur sort en-
fin d’un « long tunnel ». L’espoir
est de courte durée. Le 30 décem-
bre 2020, Odile rejoint Fadila
Nasri et sa famille à Montpellier.
« Elle est arrivée cernée, elle gar-
dait la tête baissée, c’était un zom-
bie. Elle nous a parlé de ses
angoisses. Odile était encore en
vie mais elle était déjà morte à
l’intérieur, raconte l’enseignante.
Deux jours avant sa mort, elle
continuait à le défendre, elle ne se
rendait pas compte que c’était son
bourreau. Comme ils étaient tous
les deux très croyants, je pensais
qu’il l’avait embrigadée dans une
secte, je ne pensais pas qu’une
telle emprise psychologique pou-
vait exister au sein d’un couple. Ce
n’est qu’après sa mort que j’ai fait
tous les liens. »
« Mon client aimait passionné-
ment son épouse, affirme Me Ber-
trand Pie. Odile était fragile psy-
chologiquement depuis le début
de l’âge adulte, Harold ne l’a ja-
mais isolée. Il y avait des hauts
et des bas, comme dans tous les
couples », insiste-t-il en évoquant
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
un rapport d’expertise qui atteste
de phases « dépressives ».
L’ex-mari d’Odile reconnaît des
relations distendues avec sa bel-
le-famille et un cercle d’amis
plus que restreint, mais assure
que tous deux vivaient de « leur
foi » et que le couple « allait
bien ». Me Bertrand Pie indique
que son client se réserve le droit
de porter plainte pour dénoncia-
tion calomnieuse. Pourtant, en
octobre, l’audition d’une ex-
compagne avec qui Harold a
vécu plusieurs années au cours
de la décennie 2000 met en évi-
dence une autre réalité : elle y
évoque un homme « possessif »
qui a pris le contrôle de sa vie.
Après le décès de sa sœur, Fadila
Nasri commence à mener sa
« propre enquête ». « Quand j’ai dé-
couvert ce qu’était le “suicide
forcé”, je me suis effondrée car j’ai
compris que c’était exactement ce
que ma sœur avait vécu. » Déni-
grement quotidien, contrôle de sa
vie, de ses finances, isolement so-
cial et familial… Autant de pres-
sions qui ont entraîné une dégra-
dation très importante de son état
de santé, jusqu’au passage à l’acte.
COLLECTER LES PREUVES
« Ce sont des mécanismes que l’on
retrouve pour la plupart des victi-
mes, expose l’ancienne avocate
Yael Mellul qui a accompagné Fa-
dila Nasri, par le biais de son asso-
ciation Femmes & Libres, dans
ses démarches pour collecter les
preuves avant le dépôt de plainte.
« Il s’agit pour les suicides forcés de
procéder par faisceau d’indices
concordants et d’établir, à re-
bours, une autopsie psychologi-
que : écrits de la victime, témoi-
gnages de proches, certificats mé-
dicaux, exploration du télé-
phone… », détaille-t-elle.
Le suicide forcé reste une infrac-
tion difficile à prouver, rappelle
Ombeline Mahuzier, présidente
du tribunal de Colmar. « Il faut
rentrer dans l’intimité du couple et
réussir à comprendre des faits dé-
cryptés seulement par la victime
comme des menaces. Tout ce qui
relève du comportement non ver-
bal : une serviette repliée un peu
vite lors d’un dîner, un tapotement
sec sur un verre… Or la victime
n’est plus là pour en parler », indi-
que l’ancienne procureure.
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
DEPUIS L’ENTRÉE
EN VIGUEUR DE LA LOI,
EN 2020, RECONNAISSANT
LE SUICIDE FORCÉ
EN FRANCE, IL Y A EU
UNE DIZAINE DE
CONDAMNATIONS
Faire du suicide forcé une in-
fraction était une demande du
groupe de travail sur les violences
psychologiques, copiloté par Yael
Mellul, réunit lors du Grenelle
des violences conjugales en 2019.
Le groupe réclamait une peine
plus lourde (vingt ans de prison),
ce qui en faisait une infraction
criminelle. « Or, en cas de suicide,
l’intention homicidaire aurait été
impossible à prouver, précise Bé-
rangère Couillard, rapporteuse
du texte de loi et actuelle minis-
tre de l’égalité entre les femmes
et les hommes. Désormais, dans
le cadre du harcèlement moral ag-
gravé par le suicide ou la tentative
de suicide intégré dans la loi de
2020, il n’est pas nécessaire de
prouver que l’auteur ait eu l’inten-
tion de pousser la victime à mettre
fin à ses jours. »
Les passages à l’acte intervien-
nent souvent dans des contextes
de séparation, la garde des en-
fants devenant un moyen de
pression. Patricia (le prénom a été
modifié), 47 ans, s’est pendue à
son domicile le 22 juin. « Elle s’est
suicidée le jour où elle n’avait pas
son fils. Son fils, c’était tout pour
elle », murmure, Sandrine, sa
sœur (qui n’a pas souhaité don-
ner son nom car la plainte n’a pas
encore été déposée). « 82 % des
victimes de violences conjugales
sont des mères », avance Andreea
Gruev-Vintila, chercheuse en psy-
chologie sociale à l’université de
Nanterre, qui recommande de
renverser le paradigme et ne plus
se dire : « Pourquoi elle ne part
pas », mais « Qu’est-ce qu’il lui a
fait pour qu’elle reste ? ».
Lorsque Patricia et son ancien
mari se séparent en octobre 2022,
après douze années de vie com-
mune, ce dernier commence un
chantage à la garde d’enfant. Ils
passent devant le juge aux affai-
res familiales en 2023 qui se dit fa-
vorable à une garde partagée, le
magistrat fixe une nouvelle
audience fin juin. Aucune men-
tion ne sera faite de la plainte
pour violences conjugales dépo-
sée quelques mois plus tôt par Pa-
tricia. Plainte qu’elle finira par re-
tirer pour « apaiser la situation »,
raconte Rita, sa mère.
« Ma sœur a eu l’impression que
personne ne la croyait, elle n’a pas
été écoutée par le juge, par l’expert,
par personne », dénonce San-
drine, qui retrace l’histoire d’un
couple au parcours en dents de
scie. Patricia et son ancien con-
joint se rencontrent alors qu’elle
fait ses études aux Beaux-Arts. Ils
se séparent une première fois car
elle le trouve « trop possessif ». Ils
se retrouvent et entament une re-
lation à distance, elle à Paris, lui à
Evreux. Patricia travaille en tant
que photographe, mais son con-
trat se termine, alors elle part
s’installer en Normandie en 2012.
Elle emménage chez lui, dans une
maison à la campagne, et se re-
trouve isolée dans un endroit où
elle n’a aucun repère : pas de fa-
mille, pas d’amis, ni même de voi-
ture. Lui prend soin d’elle, elle
se sent « comme une princesse »,
raconte Sandrine.
« CYCLE DE L’EMPRISE »
« Il en imposait, se souvient San-
drine, il s’exprimait bien, était tou-
jours habillé en costard. Il roulait
dans des grosses voitures, c’était
un charmeur. » Pendant plusieurs
années, la vie se déroule sans ac-
crocs, jusqu’en 2016, l’année où
Patricia tombe enceinte. Son
conjoint se met à la surveiller, à
fouiller son téléphone… En paral-
lèle commencent les salves conti-
nuent de reproches. Tout ce
qu’elle fait n’est jamais assez bien,
selon son conjoint. « Sur ta tombe
sera marqué : “Toujours déce-
vante mais jamais surprenante” »,
lui dit son ex lors d’un repas de fa-
mille. Patricia commence à culpa-
biliser tandis que lui boit trop.
« Dans les cas de violences con-
jugales, on retrouve le cycle de
l’emprise, avance Théodora Bar-
reau-Potier, porte-parole de l’as-
sociation Nous toutes. Une phase
de lune de miel, puis une phase de
tensions où l’agresseur aura des
BORIS SÉMÉNIAKO
comportements avec des micro-
agressions quotidiennes. Vient en-
suite la phase d’explosion avec dif-
férents niveaux de violences physi-
ques, verbales et psychologiques,
et enfin la phase d’inversion de la
culpabilité. » L’une des manières
de rompre ce cercle pour les victi-
mes est alors de se suicider.
- CESSATIONS DE GARANTIE
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LE COLIBRI SARL
Route de Gardel Saint Jacques
97118 SAINT FRANCOIS
RCS: 823 503 917
depuis le 01/04/2019 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du
non-paiement des sommes dues et ne peut
en aucune façon mettre en cause la sol-
vabilité ou l’honorabilité de la SARL LE
COLIBRI.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
KLM SAS
86 Rue aux Arènes
57000 METZ
RCS: 879 404 259
depuis le 01/09/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
depuis le 01/09/2020 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SAS KLM.
A l’automne 2021, alors que
l’ancien mari de Patricia est ivre
et se montre violent, elle appelle
les gendarmes. Ce n’est pas la
première fois, elle a déjà déposé
des mains courantes – sans que
sa famille soit alertée. Dans la
foulée, elle contacte l’Association
d’aide aux victimes, d’accès aux
droits et de mesures sociojudi-
ciaires d’Evreux. Un psycholo-
gue lui conseille de tout noter
dans un « Mémo de vie ». Ce nou-
veau dispositif mis en place
en 2020 et géré par l’association
France Victimes permet de con-
signer et de sauvegarder, chro-
nologiquement et en toute dis-
crétion, des données sécurisées
pour les victimes de violences :
photos, documents, enregistre-
ments audio…
« JE SUIS DÉJÀ À MOITIÉ MORTE »
« Une fois la justice saisie pour sui-
cide forcé, le mémo de vie peut être
utilisé pour objectiver les violences
et caractériser le harcèlement quo-
tidien dont la femme a été vic-
time », précise Laetitia Dhervilly,
haute fonctionnaire à l’égalité
femmes-hommes. Au 28 septem-
bre 2023, 5 000 comptes avaient
été créés et plus de 49 300 fichiers
sauvegardés sur la plate-forme.
Un chiffre faible comparé au nom-
bre de femmes âgées de 18 à 75 ans
qui, au cours d’une année, sont
victimes de violences physiques
et/ou sexuelles commises par leur
conjoint ou ex-conjoint, estimé
en 2023 à 244 300 femmes, selon
le ministère de l’intérieur. Un chif-
fre toutefois largement sous-dé-
claré. D’après l’enquête « Genre et
sécurité », conduite par le service
statistique ministériel de la sécu-
rité intérieure et parue en novem-
bre 2022, en 2021 une femme sur
six âgées de 18 à 74 ans déclare
avoir été victime de violences phy-
siques par un partenaire au moins
une fois depuis l’âge de 15 ans.
La sœur et la mère de Patricia,
qui n’avaient pas connaissance
de ce mémo de vie, découvrent
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
MONDATTA SAS
426 Avenue Saint-Basile
06250 MOUGINS
RCS: 791 317 142
depuis le 01/01/2018 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SAS MONDATTA.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
ALYMAIL SARL
89 Boulevard du Président Carnot
47000 AGEN
RCS: 887 671 832
depuis le 09/09/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
depuis le 01/10/2021 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
depuis le 01/10/2021 pour ses activités de :
SYNDIC DE COPROPRIETE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SARL ALYMAIL.
« MA SŒUR A EU
L’IMPRESSION QUE
PERSONNE NE LA CROYAIT,
ELLE N’A PAS ÉTÉ ÉCOUTÉE
PAR LE JUGE, PAR
L’EXPERT, PAR PERSONNE »
SANDRINE
sœur de Patricia
des violences insoupçonnées. « Il
la tirait par les cheveux, l’attrapait
par le cou… », confie Rita. Elles
retrouveront aussi dans une note
sur son téléphone, un poème :
« A travers tes yeux rageurs je
t’aimerai toujours
Le feu de tes yeux qui foudroient
mon amour
Tes lèvres pincées, tes dents
serrées, la rage de tes cris,
Tu dis que je suis folle, je suis folle
de rester
Tu dis je suis le monstre de ta vie,
tes mots sont des couteaux et je
t’en veux je te hais mais quand je
me retrouve seule je t’aime de nou-
veau.
Le rouge de tes verres tue nos
moments
Ta main sur mon cou jette mon
corps
Je suis déjà à moitié morte. »
Dans tous les cas évoqués, ce
sont des femmes qui cherchent
de l’aide mais n’en trouvent pas.
Souvent, aussi, des femmes qui
ont déjà effectué des signale-
ments ou des tentatives de sui-
cide. C’est le cas de Maëva Fros-
sard, connue sous le nom de
« Mava Chou » (nom donné à sa
chaîne YouTube), qui s’est suici-
dée le 22 décembre 2021. Elle
avait tenté deux fois de mettre
fin à ses jours la même année et
avait porté plainte à cinq reprises
contre son ex-mari pour harcèle-
ment et diffamation.
Selon la dernière étude natio-
nale sur les morts violentes au
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LIVING HOSSEGOR SAS
192 Avenue des Dauphins
40150 HOSSEGOR
RCS: 843 937 285
depuis le 01/02/2019 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
depuis le 01/02/2019 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex.
Il est précisé qu’il s’agit de créances éven-
tuelles et que le présent avis ne préjuge en
rien du paiement ou du non-paiement des
sommes dues et ne peut en aucune façon
mettre en cause la solvabilité ou l’honora-
bilité de la SAS LIVING HOSSEGOR.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
ACE ATTITUDE SARL
21 Boulevard Robert Thiboust
Bâtiment C - 2e étage
Bureau C21
77700 SERRIS
RCS: 519 162 010
depuis le 01/04/2021 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
depuis le 01/04/2021 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
depuis le 01/04/2021 pour ses activités de :
SYNDIC DE COPROPRIETE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis.
Les créances éventuelles se rapportant à
ces opérations devront être produites dans
les trois mois de cette insertion à l’adresse
de l’Établissement garant sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex.
Il est précisé qu’il s’agit de créances éven-
tuelles et que le présent avis ne préjuge en
rien du paiement ou du non-paiement des
sommes dues et ne peut en aucune façon
mettre en cause la solvabilité ou l’honora-
bilité de la SARL ACE ATTITUDE.
france | 11
sein du couple, menée par le mi-
nistère de l’intérieur, en 2022,
sur 118 femmes tuées par leur
conjoint, 31 % avaient subi des
violences antérieures et 65 %
avaient signalé ces violences aux
forces de sécurité. Parmi elles,
79 % avaient déjà déposé une
plainte.
CONTRÔLE COERCITIF
« Pour les suicides forcés, les pro-
portions doivent être les mêmes »,
estime Ernestine Ronai de l’Ob-
servatoire départemental des
violences envers les femmes de
Seine-Saint-Denis, qui rappelle
que les « violences révélées ne
sont jamais les premières violen-
ces subies ». Elle plaide pour l’ap-
plication du « principe de précau-
tion ». « Dès qu’une victime vient
témoigner, il faut la protéger
et éloigner son conjoint ou ex-
conjoint violent. En France, il y
a 3 500 ordonnances de protec-
tion accordées par an, il en fau-
drait dix fois plus, souligne la
spécialiste. La responsabilité
de la société tout entière est
énorme et les pouvoirs publics
ferment les yeux. »
Afin justement de mieux ap-
préhender les violences psycho-
logiques, Isabelle Rome, an-
cienne ministre déléguée char-
gée de l’égalité entre les femmes
et les hommes, souhaiterait ins-
crire « légalement » la notion de
contrôle coercitif – une série de
comportements répétitifs, exer-
cés par un conjoint violent sur
sa victime et qui viennent atten-
ter à ses droits fondamentaux.
« Le suicide forcé est l’un des
résultats ultimes du contrôle
coercitif, avance Isabelle Rome.
Celui-ci produit une telle désinté-
gration du sentiment de soi
des victimes, un tel isolement,
un tel désespoir, une telle capti-
vité que le suicide semble préféra-
ble. Les agresseurs apparaissent
alors comme les auteurs d’un
“crime parfait”. » p
minh dréan
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
MASTER CONSEIL IMMO SARL
58 Avenue de Wagram
75017 PARIS
RCS: 349 797 225
depuis le 01/01/2005 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du
non-paiement des sommes dues et ne peut
en aucune façon mettre en cause la solvabi-
lité ou l’honorabilité de la SARL MASTER
CONSEIL IMMO.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
VESTER SARL
48 rue Sarrette
75014 PARIS
RCS: 488 507 930
depuis le 04/05/2007 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE
depuis le 01/07/2013 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE
cessera de porter effet trois jours francs
après publication du présent avis. Les
créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les
trois mois de cette insertion à l’adresse de
l’Établissement garant sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SARL VESTER.
 ÉCONOMIE & ENTREPRISE
12 | 0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023

Automobile : la réforme du bonus inquiète

Les restrictions touchant l’aide à l’achat des voitures électriques devraient fortement affecter les ventes

L
es modifications appor-
tées en 2024 au bonus
écologique introduisent
une nouvelle donne pour
les ventes de voitures électriques.
Sans le bénéfice de cette aide, les
véhicules venus d’Asie dont l’em-
preinte carbone est jugée trop éle-
vée en raison de leurs conditions
de production et de transport se-
ront les plus pénalisés. Plus large-
ment, la réforme de ce dispositif
d’aide dont le montant passera de
5 000 euros à 4 000 euros en 2024
devrait ralentir les ventes de véhi-
cules électriques.
La réorientation du bonus
en 2024 au profit des modèles fa-
briqués en Europe est une mau-
vaise nouvelle pour trois des plus
grosses ventes qui représentent
ensemble 23,5 % des immatricu-
lations. La Spring, le modèle élec-
trique le moins cher du marché
(25 000 unités en 2023), va voir
son tarif passer de 15 800 à
20 800 euros. La Tesla Model 3,
autre modèle phare, sera facturée
non plus 37 990, mais
42 990 euros, alors que le prix de
la MG4, le fer de lance de la mar-
que chinoise MG, remonte à
29 990 euros. Sa diffusion de-
vrait, selon le constructeur, recu-
ler de 30 % l’an prochain.
MG (groupe SAIC), qui a vendu
31 000 voitures en France au
cours des onze derniers mois, n’a
pas l’intention de casser ses tarifs.
Hors bonus, la MG4 demeure
plus de 6 000 euros moins chère
que la Megane E-Tech de Renault
dont le prix pourrait néanmoins
baisser pour s’inscrire en dessous Chaîne de montage de l’usine Tesla, à Grünheide, au sud-est de Berlin, en mars 2022. PATRICK PLEUL/DPA PICTURE-ALLIANCE VIA AFP
de celui du nouveau Scénic élec-
trique. Le constructeur chinois
compte compenser le manque à continuer de bénéficier de la France (Renault Mégane E-Tech depuis plusieurs mois du niveau vont exacerber la concurrence » et
gagner grâce aux ventes de la prime gouvernementale.
Revu à la baisse, et bientôt R5, Peugeot e-308) ou décevant de leur carnet de com- soutenir les ventes. L’arrivée de
nouvelle ZS et de la prochaine Les marques qui seront privées le montant ailleurs en Europe (Fiat 500 et mandes. Selon le gouvernement, nouveaux modèles électriques
MG3, un hybride concurrent de de bonus ont, ces derniers mois, 600, Peugeot e-208, en attendant l’enveloppe globale consacrée à (Renault R5 et Scénic, Citroën
la Renault Clio. anticipé ce changement en lan-
de l’aide passera la Citroën ë-C3). cette prime passera en 2024 de ë-C4, Peugeot e-3008) pourrait
çant des opérations promotion- de 5 000 euros 1,3 à 1,5 milliard d’euros. En dépit créer un effet d’offre.
Opérations promotionnelles nelles afin de sensibiliser leurs Leasing social du maintien du super-bonus de Si la France rogne sur le bonus
Modèle le plus prisé par les parti- clients à l’intérêt de passer com-
à 4 000 euros Une appellation d’origine contrô- 7 000 euros attribué aux ménages écologique, l’Allemagne vient
culiers, la Spring compte sur son mande avant la fin de l’année en 2024 lée qui leur permet de passer dont le revenu s’inscrit en des- brutalement de le supprimer
restylage prévu au printemps 2023. Un effet d’aubaine qui a en sous les fourches caudines du sous du sixième décile, il n’est pas dans le cadre de son programme
2024 pour limiter les dégâts, alors partie dopé les immatriculations nouveau bonus, de même que la acquis que le nombre de bénéfi- de restrictions budgétaires. Les
que la version électrique de la de véhicules électriques. En no- Kona du coréen Hyundai fabri- ciaires augmentera. D’ailleurs, marques du groupe Stellantis
Sandero n’est pas attendue avant vembre, celles-ci ont représenté bonus devrait devenir minori- quée en République tchèque. le lancement de la formule du ainsi que le coréen Kia ont prévu
2027-2028. Pour sa part, Tesla ne 20 % du marché total. taire et ne pas dépasser 41 %, « Cette réforme constitue un appel leasing social, qui ne devrait pas de compenser à leurs frais la dis-
laisse pas apparaître de signes Une étude réalisée par AAA Data contre 80 % en 2023. d’air et nous ferons le maximum concerner plus de 20 000 véhicu- parition de cette prime, mais le
avant-coureurs d’une guerre des considère que, si l’on avait « Le classement des construc- pour en tirer profit », souligne- les en 2024, n’aura qu’un impact geste commercial ne court que
prix pour maintenir le niveau des appliqué en 2023 les règles d’éligi- teurs de voitures électriques de- t-on chez Citroën dont la future limité en raison du manque de jusqu’au 31 décembre. A compter
ventes de la Model 3 qui vient bilité du bonus 2024, plus de vrait considérablement se modi- ë-C3 doit être commercialisée voitures bon marché disponibles. de janvier 2024, il faudra faire
d’être restylée. La marque améri- 100 000 immatriculations (sur un fier », prévient AAA Data qui en- au printemps 2024 au prix de « Tout va dépendre du niveau son deuil du bonus dont la dispa-
caine mise surtout sur le Model Y, total de 260 000, soit 38 %) se- visage une décrue de Dacia, Tesla 23 300 euros avant bonus. d’agressivité des politiques com- rition, estiment certains experts,
un SUV qui caracole en tête des raient exclues du bénéfice de cette et MG au profit des marques En amputant son montant de merciales qui seront mises en pourrait faire baisser de 40 % les
ventes mondiales de voitures subvention qui s’applique aux traditionnelles telles que Fiat, 1 000 euros, la réforme du bonus place », estime Marie-Laure Nivot, ventes outre-Rhin. La voiture
électriques et profite de la locali- modèles dont le prix de vente est Peugeot, Citroën ou Renault. Cel- va faire grimper le prix moyen des analyste auprès de AAA Data, électrique a peut-être mangé son
sation de sa production en Alle- intérieur à 47 000 euros. En 2024, les-ci disposent d’une gamme modèles bénéficiaires à un mo- convaincue que « les nouvelles pain blanc. p
magne, à côté de Berlin, pour la part des achats bénéficiant du élargie de véhicules produits en ment où les marques s’inquiètent conditions d’attribution du bonus jean-michel normand

Amsterdam et Edimbourg veulent limiter les échanges de maisons

Sur le modèle de ce qui a été fait pour Airbnb, ces deux villes veulent faire payer les utilisateurs de plates-formes comme HomeExchange

C’ est un microcosme qui

se développe à la marge
de l’hébergement tou-
ristique, mais qui connaît un es-
sor fulgurant. En un an, le nom-
bre d’inscrits sur HomeExchange,
l’un des sites leaders de l’échange
de maisons, a bondi de 50 %. Au
total, 150 000 personnes, dont un
tiers de Français, ont enregistré
leur maison ou leur appartement
sur cette plate-forme, qui se ré-
munère en demandant à ses
membres une cotisation an-
nuelle de 160 euros.
Le système s’est développé jus-
que-là sans entraves. Mais aux
Pays-Bas et en Ecosse, les pou-
voirs publics s’inquiètent de le
voir se déployer hors de tout
contrôle, craignant d’avoir affaire
à un futur Airbnb. A la différence
de la plate-forme américaine,
HomeExchange n’implique ce-
pendant pas d’échange d’argent :
l’accueil de personnes chez soi
permet de percevoir des points
(des « guest points »). Une mon-
naie virtuelle utilisable pour se
rendre ensuite dans une maison
ou un appartement.
Mais la municipalité d’Amster-
dam estime que cette forme de
transaction place le système dans
la case des locations touristiques.
La plate-forme HomeExchange
recense 2 000 logements dispo-
nibles dans la métropole hollan-
daise, ce qui en fait un acteur ma-
jeur de l’offre d’hébergement.
« Sauf que les logements sont loin
d’être libres tout le temps ! Ils sont
prêtés deux ou trois semaines par
an », rétorque Emmanuel Ar-
naud, le directeur de HomeEx-
change. Au total, en 2023,
3 900 groupes ou familles sont
venus à Amsterdam par Ho-
meExchange, soit 71 000 « nui-
tées touristiques » (nombre total
de nuits par personne).
A partir du 1er mars 2024, la ville
va appliquer des restrictions simi-
laires à celles qui concernent Air-
bnb. Les utilisateurs de HomeEx-
change et d’autres sites d’échan-
ges devront enregistrer leur loge-
ment sur le site de la municipalité,
payer un permis annuel
(43 euros), limiter le prêt de leur
logement à trente jours par an, et
signaler à la ville dès lors qu’ils re-
cevront des personnes chez eux.
Contrôles et sanctions prévus
La ville interdit aussi d’utiliser ce
système avec une résidence se-
condaire, et restreint à quatre
maximum le nombre de person-
nes accueillies par logement (sauf
les familles avec plus de deux en-
fants). Des contrôles, avec sanc-
tions associées, sont prévus à par-
tir de 2025. « Amsterdam mène
depuis de nombreuses années une
politique visant à lutter contre les
locations touristiques, car cela a
des conséquences négatives sur la
qualité de vie dans certains quar-
tiers de la ville », explique Rory van
den Bergh, porte-parole de la ville
d’Amsterdam, qui a déployé diver-
ses actions pour limiter l’impact
du tourisme de masse. En 2023,
elle a lancé une campagne sur les
réseaux sociaux (« Stay away »)
pour décourager la venue de visi-
teurs nuisibles à la tranquillité
des résidents, à savoir les groupes
« d’hommes de 18 à 35 ans », Bri-
tanniques en particulier.
Edimbourg, qui a vu son nom-
bre de touristes grimper en flèche
depuis dix ans, a mis en place des
règles similaires à celles de la mé-
tropole hollandaise. Celles-ci sont
entrées en vigueur depuis le 1er oc-
tobre, et encore plus strictes. Un
exemple : les personnes qui prê-
tent leur logement doivent payer
une licence annuelle, fonction du
nombre de couchages annoncé.
Le montant n’a rien d’anecdoti-
que : pour cinq personnes, il peut
atteindre 600 livres (690 euros).
Une partie de ces règles sont ap-
plicables dans toute l’Ecosse.
« Tout cela créé un vent de pani-
que chez nos utilisateurs en Ecosse
et aux Pays-Bas », reconnaît Em-
manuel Arnaud, qui a dû rem-
bourser à certains membres leur
cotisation. Ces nouvelles régle-
mentations, si elles venaient à se
déployer ailleurs, constituent un
vrai risque pour cette entreprise
parisienne de 160 salariés, qui de-
vrait dégager en 2023 un chiffre
d’affaires de 23 millions d’euros.
Mais aussi pour les autres acteurs
de ce marché comme HomeLink,
SwitchHome ou Intervac.
Selon le directeur de HomeEx-
change, l’échange de maisons ne
devrait pas être traité de la même
façon que les locations à court
terme de type Airbnb. « Nous
n’avons pas le même impact. Nous
ne retirons pas du marché immobi-
lier des hébergements pour les rési-
dents, nous n’avons pas d’effet sur
la hausse des prix, et nous amenons
des touristes dans des quartiers
qui ne sont pas les plus fréquentés.
Ces règles témoignent d’une mé-
connaissance de notre système »,
plaide-t-il, ajoutant que leurs utili-
sateurs sont avant tout des fa-
milles. « L’échange de maisons est
l’une des manières les moins chères
de voyager. Dans un contexte
d’inflation, ce serait dommage de
restreindre cette liberté. » p
jessica gourdon
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 économie & entreprise | 13

Quand les PME

fustigent
les excès de
paperasserie
Un panel d’entrepreneurs ont été
reçus à Bercy pour témoigner
de leur quotidien administratif

V
ous êtes ici dans votre
maison, ce ministère
est le vôtre, celui de
ceux qui prennent des
risques, qui créent des emplois,
qui font grandir notre pays. » L’in-
troduction de la ministre des pe-
tites et moyennes entreprises,
Olivia Grégoire, a de quoi mettre
à l’aise le parterre d’entrepre-
neurs franciliens, cent cinquante
hommes et femmes de généra-
tions différentes, réunis au mi-
nistère de l’économie en ce 18 dé-
cembre pour les « rencontres de la
simplification ». Cette grande
consultation de visu et en ligne
lancée en novembre avec le mi-
nistre de l’économie et des finan-
ces doit permettre d’identifier ce
qui pourrait leur simplifier la vie,
dans leurs démarches quotidien-
nes ou l’application de la régle-
mentation.
Dix ans après le « choc de simpli-
fication » déjà promis par Fran-
çois Hollande en 2013. Et quatre
ans après la loi Pacte et son « gui-
chet unique », plate-forme en li-
gne censée regrouper l’ensemble
des formalités administratives
pour les entreprises mais dont les
premiers pas se sont révélés si
« chaotiques », selon la Cour des
comptes, que les anciennes procé-
dures, via Infogreffe ou sur papier,
ont dû être ressuscitées. Donnant
à quelques-uns des participants
l’occasion d’ironiser poliment sur
les risques collatéraux de la sim-
plification, sans s’y attarder.
Cette fois « ça part du terrain, du
très concret, c’est une nouvelle mé-
thode », affirme-t-on dans l’en-
tourage de la ministre. « Plus vous
entrez dans le détail, tel numéro
de Cerfa [formulaire administra-
tif] ou telle norme B12 alinéa 4 qui
vous complique la vie, plus on sera
efficient », encourage Olivia Gré-
goire aux côtés des députés Re-
naissance Louis Margueritte et
Alexis Izard.
« Le temps qu’on passe pour une
embauche… »,commence le prési-
« Les aides
à l’export,
c’est tellement
compliqué
que je ne les
demande même
plus, je préfère
dent de l’Union des entreprises
de proximité (U2P) d’Ile-de-
France (artisans, commerçants,
professions libérales), Antony
Hadjipanayotou. « C’est une jour-
née, une journée et demi à prendre
sur notre travail pour faire les dé-
clarations à toutes les caisses.
Quand on n’a que quatre salariés,
c’est trop lourd. » Les contraintes
réglementaires et administrati-
ves pèsent particulièrement sur
les PME, qui ne sont pas aussi
bien « équipées » en ressources
humaines que les grands grou-
pes, souligne le président du Me-
def francilien, Daniel Weizmann.
« 80 % de mon activité se fait à
l’international, mais les aides à
l’export c’est tellement compliqué
que je ne les demande même plus,
je préfère payer les taxes », témoi-
gne ainsi un brocanteur des Pu-
ces. « Devant les démarches pour
obtenir le label RGE [reconnu ga-
rant de l’environnement], beau-
coup de professionnels du bâti-
ment laissent tomber », renchérit
Antony Hadjipanayotou.
Normes qui « évoluent trop vite »
Le crédit impôt recherche ? « Le
calcul déclenche un contrôle fiscal
les trois quarts du temps », cons-
tate un participant. Le crédit de
TVA, « une abomination !, déplore
un autre. Un expert-comptable s’y
colle, mais c’est pas gratuit ! » Les
aides à la rénovation énergéti-
que ? « Ça aussi on s’y perd ! » « On
vient de lancer la version bêta
d’une plate-forme pour aider les
petites boîtes à s’y retrouver dans
plus de 300 aides à la transition
écologique », signale la ministre
des PME. Les prises de parole fus-
tigent aussi la « surtransposi-
tion » des directives européennes
– le fait d’y ajouter des exigences.
Ou les normes qui « évoluent trop
vite ». « La réglementation bâti-
mentaire pour les crèches a
changé en 2021, est entrée en ap-
plication en 2022 et sera remise en
cause l’année prochaine ! Amener
de la stabilité aiderait beaucoup »,
plaide Gilbert Mellinger, prési-
dent d’un réseau de microcrè-
ches privées en Essonne.
Et comment vont faire les PME
pour appliquer la nouvelle
norme de cybersécurité NIS-2 ? Et
la nouvelle obligation pour les
grandes entreprises de publier
un bilan carbone ? Ne risquent-
elles pas de l’imposer à leurs pe-
tits sous-traitants ? « Nous vou-
lons mettre en place un test PME
Les ministres Bruno Le Maire (économie) et Olivia Grégoire (PME), au ministère de l’économie, à Paris, le 1er juillet. STEFANO RELLANDINI/AFP
ristes des grandes entreprises,
mais aussi par un artisan de la
Haute-Saône », les rassure Olivia
Grégoire.
« Pour savoir si une norme est lisi-
ble, il y a un truc simple, propose
Gilbert Mellinger. S’il y a besoin
d’un expert extérieur pour la com-
prendre, c’est que c’est trop compli-
qué ! » Les rires de la salle mon-
trent combien la préoccupation
est partagée. Signe d’une com-
plexité croissante, plusieurs des
participants ont fait du conseil
aux entreprises sur ces sujets leur
cœur de métier. « On manque
d’infos. C’est quand on prend une
amende qu’on découvre qu’on a fait
une bêtise. Pour rigoler entre nous,
on dit que c’est le coût de la forma-
tion ! », plaisante un entrepreneur.
« Il y a un problème culturel
dans l’administration, les
agents n’ont aucune connais-
sance de ce qu’est une PME,
avance un autre chef d’entre-
prise, lui-même ancien haut
fonctionnaire. Pourquoi au lieu
de faire leurs stages chez Renault,
TotalEnergies, ou dans une am-
bassade, on n’obligerait pas les
stagiaires de l’ENA à faire un stage
dans une PME ? Des 140 de ma
promo j’ai été le seul à le faire ! »
Une question ne fait clairement
pas consensus : faut-il plus ou
moins de dématérialisation ?
« Plus », dit le représentant du
Medef. « Moins, dit celui de l’U2P,
on veut des interlocuteurs, des
guichets. » « Les artisans alimen-
taires se sentent acculés face à
toutes les démarches à faire via le
digital », insiste la présidente du
syndicat des boucheries de Paris.
« C’est presque angoissant »
L’intervention de la jeune diri-
geante d’une entreprise de papier
d’hygiène recyclé révèle soudain
l’ampleur d’une fracture généra-
tionnelle et culturelle : « Quand
on vient de la “start-up nation”,
c’est presque angoissant de voir
que l’Etat cherche à faire un outil
qui existe déjà », s’étonne-t-elle en
ChatGPT !, explique la jeune payeurs, Rubypayeur fait du na- lui des artisans de l’U2P », répond
femme. J’entends dire qu’il faut me-shaming, c’est très efficace ! en souriant Olivia Grégoire, rap-
un jour et demi pour déclarer une Peut-être qu’il faudrait juste don- pelant que 25 % des entrepre-
embauche ? Avec PayFit [logiciel ner accès à des outils comme ça ! » neurs en France ont plus de
de paie en ligne] ça me prend une « Ce serait intéressant de con- soixante ans. « Pourquoi ne pas
heure ! Et, pour les mauvais fronter votre point de vue avec ce- mettre en place une revue perma-
nente de la simplification, en fai-
sant un bilan chaque année et en
se fixant de nouveaux objectifs ?
Guichet unique : la Cour des comptes Cela évitera d’avoir l’impression
de refaire cet exercice tous les
regrette un lancement « chaotique » cinq ans ! », propose enfin Amir
En 2019, la loi Pacte décidait de fondre les sept réseaux de centres Reza-Tofighi, président de la
de formalités des entreprises en un seul guichet en ligne où dépo- commission innovation de la
ser pièces et informations à transmettre directement aux organis- Confédération des petites et
mes destinataires (impôts, Sécu, etc.). Sa mise en œuvre moyennes entreprises.
en janvier 2023, censée simplifier les démarches, s’est révélée « Je comprends, pour vous la sim-
« chaotique » décrit la Cour des comptes dans une « enquête plification fait figure d’arlésienne.
flash », publiée le 20 décembre : site saturé, bugs techniques, Mais c’est un exercice où on de-
formalités indisponibles… En cause, une « échéance initiale irréa- mande 100 pour avoir 10, donc de-
liste », faute d’une étude d’impact suffisante. La réactivation pro- mandons 1 000 pour avoir 100 »,
visoire des anciennes procédures (Infogreffe, voie papier) sera conclut le député Louis Margue-
prolongée au-delà du 31 décembre, et le système vraiment opé- ritte. Un projet de loi est promis
rationnel au 1er janvier 2025. « Une échéance qui aurait pu être avant l’été. p
raisonnablement fixée au départ », regrette la Cour des comptes. aline leclerc
- CESSATIONS DE GARANTIE
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
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TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET ET FONDS DE COMMERCE, depuis le
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por- FONDS DE COMMERCE cessera de por- 03/10/2013 pour ses activités de : GESTION
ter effet trois jours francs après publication IMMOBILIERE cessera de porter effet trois
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se du présent avis. Les créances éventuelles jours francs après publication du présent avis.
rapportant à ces opérations devront être pro- se rapportant à ces opérations devront être Les créances éventuelles se rapportant à ces
duites dans les trois mois de cette insertion à produites dans les trois mois de cette inser- opérations devront être produites dans les trois
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour tion à l’adresse de l’Établissement garant mois de cette insertion à l’adresse de l’Établis-
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La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit 92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré- Reflets - 92913 Paris La Défense Cedex. Il est
de créances éventuelles et que le présent avis cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
ne préjuge en rien du paiement ou du non- que le présent avis ne préjuge en rien du que le présent avis ne préjuge en rien du paie-
paiement des sommes dues et ne peut en paiement ou du non-paiement des sommes ment ou du non-paiement des sommes dues
aucune façon mettre en cause la solvabilité ou dues et ne peut en aucune façon mettre en et ne peut en aucune façon mettre en cause
l’honorabilité de la SASU LABRY-LE GUEN cause la solvabilité ou l’honorabilité de la la solvabilité ou l’honorabilité de la SARL
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payer les taxes »,
témoigne
un brocanteur
CON J ON CT U R E
Le taux au Japon
de chômage est stable
en novembre
Le taux de chômage au Japon
est resté stable en novembre
à 2,5 % de la population active,
selon des données publiées
mardi 26 décembre par le mi-
nistère des affaires intérieures.
Un marché du travail plus « res-
serré » offrirait un soutien aux
négociations salariales annuel-
les entre syndicats et patronat
au printemps 2024. Rengo, le-
principal syndicat de travail-
avant chaque nouvelle norme
pour évaluer son coût financier et
horaire et voir si elle est compré-
hensible, pas seulement par les ju-
leurs du pays, a annoncé de-
mander à cette occasion des
augmentations de salaires de
l’ordre de 5 %. − (AFP.)
AU TOMOBI LE
Le chinois BYD annonce
la construction d’une
usine de voitures
électriques en Hongrie
Le constructeur chinois BYD,
premier fabricant mondial sur
le créneau de l’électrique et qui
entend s’étendre sur le marché
européen, a annoncé vendredi
22 décembre son intention de
allusion à la plate-forme rassem-
blant les aides à la transition éco-
logique évoquée par la ministre.
« Il m’a suffi de poser la question à
construire une usine de d’as-
semblage d’électriques en
Hongrie. Un pays en passe de
devenir un producteur majeur
de batteries électriques. − (AFP.)
R ECT I F I C AT I F
Patrick Drahi possède 90 %
d’Altice, et non pas 78 %
comme écrit dans l’infogra-
phie sur le paysage médiatique
français, qui accompagnait
l’article « En 2023, de grandes
manœuvres dans les médias »,
parue dans notre édition datée
des 24, 25 et 26 décembre.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
A.N.L. IMMOBILIER SARL
19 Avenue Pierre Curie 78210 SAINT
CYR L’ECOLE RCS: 484 013 305
depuis le 04/01/2006 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL A.N.L. IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
ESTEL SARL
37 Boulevard Charles de Gaulle
95110 SANNOIS RCS: 429 884 695
depuis le 01/01/2004 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL ESTEL.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
D’CLIC IMMOBILIER EURL
7 PLACE SAINT MICHEL
29520 CHÂTEAUNEUF DU FAOU
RCS: 513 520 031
depuis le 10/07/2009 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la EURL D’CLIC IMMOBILIER.
14 | économie & entreprise
Arabie saoudite : un
plan pharaonique
pour le logement
Pilier de la transformation économique
du royaume, la stratégie facilitant l’accès
massif à la propriété séduit les Saoudiens
riyad - envoyée spéciale
A
l’ombre des grues de
chantier, le quartier
d’Al-Narjis prend peu à
peu forme, grignotant
le désert qui s’étend, à perte de
vue, le long de l’aéroport interna-
tional du Roi-Khaled. Dans tout le
nord de Riyad, les nouveaux lotis-
sements poussent sur des kilomè-
tres. Des maisons cubiques et
quelques immeubles bas, dans les
tons sable ou gris, s’alignent
autour d’une mosquée, à quelques
minutes en voiture d’une artère
commerçante. L’une des parcelles
du quartier Al-Narjis accueillera,
dans un an, la maison d’Ali.
A 38 ans, cet informaticien, em-
ployé dans une compagnie publi-
que, devient propriétaire pour la
première fois. Marié depuis qua-
torze ans, et père de trois enfants,
il vit encore chez son père.
Comme de nombreux ménages, il
avait renoncé à acheter en raison
des délais d’attente de plus de
quinze ans pour les prêts à taux
subventionnés de l’Etat. En 2022,
en quelques clics sur la plate-
forme en ligne de l’agence gou-
INSCRIPTION GRATUITE
SAMS.GROUPELEMONDE.FR
vernementale Sakani, Ali a déposé
son dossier de candidature et, une
fois celui-ci validé, il a été orienté
vers des banques et vers des
promoteurs.
« Les procédures sont simplifiées
et les taux d’emprunt sont avanta-
geux si tu achètes par le biais de
l’Etat. Si tu veux bâtir à ta façon, il
faut une tonne d’autorisations, et
les banques pratiquent des taux
d’intérêt élevés », explique-t-il.
Avec un apport modeste, Ali a
acheté sur plan une villa de
250 mètres carrés pour 1,4 million
de riyals (340 000 euros). Pendant
quinze ans, il remboursera
8 500 riyals par mois, soit le tiers
de ses revenus et de ceux de son
épouse, secrétaire à temps partiel.
Comme Ali, plus de 1,2 million de
Saoudiens ont eu recours à Sakani
pour acheter leur logement. Les
ventes de biens neufs et les prêts
immobiliers ont explosé avec la
mise en place, en 2017, d’une
stratégie gouvernementale pour
faciliter l’accès des nouvelles géné-
rations à la propriété. Offrir des
emplois et des logements aux
19 millions de Saoudiens, dont les
deux tiers ont moins de 35 ans, est
présentent
SPÉCIALISATIONS
APRÈS UN
BAC +3/+4
27 JANVIER 2024
Paris Montreuil Expo
Grues à
la périphérie
de Riyad,
le 2 novembre.
FAYEZ NURELDINE/AFP
au cœur du plan de transforma-
tion sociétale et de sortie du
tout-pétrole Vision 2030 du prince
héritier Mohammed Ben Salman,
dit « MBS ». L’objectif fixé de 70 %
de propriétaires à l’horizon de
2030 est déjà presque atteint : 62 %
de Saoudiens le sont aujourd’hui
contre 47 % en 2016.
Loin des mégaprojets « vitrines »
qui, comme la ville futuriste
Neom, jouent la démesure pour
changer l’image rétrograde et ri-
goriste du royaume, encore régu-
lièrement épinglé pour ses graves
atteintes aux droits de l’homme
(« MBS » lui-même est accusé par
la CIA d’avoir ordonné l’assassinat
du journaliste Jamal Khashoggi
en 2018), ou des projets ambitieux
aux résultats encore timides,
comme l’initiative pour le climat
Saudi Green Initiative, le plan mis
en place concernant le loge-
ment est salué, par les experts
comme par les Saoudiens, comme
une réussite de Vision 2030. Il est
venu corriger des décennies de
laisser-faire sur le marché de la
construction et une pénurie de
logements. Celle-ci s’est creusée
depuis les années 1980, du fait des
contraintes budgétaires des an-
nées de pétrole à bas prix et des
crises économiques consécutives
aux guerres dans la région.
L’urbanisation rapide de la so-
ciété – qui a atteint plus de 84 % –
et le taux de croissance démogra-
phique élevé – 1,48 % en 2022 – ont
aggravé le problème. L’enjeu pour
« MBS » est aussi de s’assurer la
paix sociale en offrant aux jeunes
générations la garantie d’un loge-
ment, alors que ce dernier s’éver-
tue, avec Vision 2030, à en finir
avec l’Etat-providence. Le prince,
âgé de 38 ans, veut mettre fin aux
largesses dont ont bénéficié les
générations précédentes. Depuis
le boom pétrolier de 1973, l’Etat
rentier redistribuait ses richesses
par l’emploi public – plus de 53,1 %
de Saoudiens en 2022 –, les sub-
ventions à l’énergie, l’éducation et
la santé gratuites, des prestations
sociales et des aides au logement.
Evolution des modes de vie
Le nombre d’employés de la fonc-
tion publique va être réduit de
moitié avec la privatisation de
seize secteurs-clés, dont la santé et
l’éducation. La TVA, introduite
en 2018, a été triplée à 15 % en 2020.
Les subventions à l’énergie ont été
réduites de plus de moitié et doi-
vent être entièrement levées d’ici
à 2030. Le royaume reste néan-
moins dispendieux, avec près de
253 milliards de dollars (229 mil-
liards d’euros) de subventions
énergétiques en 2022, soit près de
7 000 dollars par habitant, selon le
Fonds monétaire international.
L’institution financière appelle le
royaume à en finir avec l’énergie à
bas prix, fournie par la manne
pétrolière, qui encourage, entre
autres, l’usage excessif de la voi-
ture ou des climatiseurs.
Le plan « logement » a aussi ses
travers environnementaux, en-
traînant une croissance exponen-
tielle des grandes villes et une bé-
tonisation du pays. Déjà tenta-
culaire, Riyad devrait ainsi passer
de 8 à 17 millions d’habitants
en 2030, avec seulement quelques
lignes de bus et une ligne de métro
pas encore en service, comme
transports publics. Mais, pour ré-
pondre à la demande croissante
de logements, le royaume doit en
bâtir 1,2 million, selon le cabinet
d’expertise PwC Middle East.
Plus de 500 000 unités sont déjà
en projet dans tout le pays. Le sec-
teur, qui devrait générer 8,8 % du
PIB à l’horizon 2030 – contre 7 %
aujourd’hui – et des milliers d’em-
plois, est vu comme une voie de di-
versification de l’économie.
Si une majorité
de Saoudiens
préfèrent acheter
une maison,
l’appartement
séduit de plus
en plus les jeunes
L’économie de l’immobilier a été
entièrement restructurée, sous la
houlette du ministère du loge-
ment. Des entités publiques ont
été créées, travaillant en partena-
riat avec les promoteurs et les
banques privées, pour réguler le
marché, adapter la politique du
bâti à la demande et fournir des
solutions de financement aux
acheteurs. Des aides sont offertes
aux primo-accédants, comme des
prêts à taux d’intérêt très bas, ainsi
que des aides spéciales pour les
faibles revenus.
Sans ce coup de pouce, de nom-
breux Saoudiens n’auraient pas
sauté le pas. « Tout devient plus
cher à Riyad, l’électricité, l’essence,
les sorties… Il y a tous ces expatriés
qui s’installent, payés des dizaines
de milliers de dollars par mois.
Nous, on perd en pouvoir d’achat »,
déplore Ali. Plusieurs soirs par
semaine, il est chauffeur Uber
pour gagner, les bons jours,
200 riyals (50 euros) en plus. Au
volant des VTC, de plus en plus de
fonctionnaires tentent de mettre
un peu d’argent de côté.
L’engouement pour le plan « lo-
gement » s’est un peu tari depuis la
hausse du coût de l’emprunt im-
mobilier, en 2022, et la flambée
des prix du bâti. L’Etat n’offre plus
de prêts à taux zéro et la banque
centrale a relevé les taux hypothé-
caires. Au premier semestre 2023,
les transactions immobilières ont
enregistré une baisse de 32 %, avec
une tendance similaire pour les
prêts hypothécaires, selon le cabi-
net d’expertise britannique Kni-
ght Frank. « Le marché saoudien
devient cyclique. Il se stabilisera
quand les étrangers et les expatriés
auront accès à la propriété »,
comme l’a promis la couronne,
analyse Mohamad Rabi Itani, ex-
pert chez Knight Frank.
A Riyad, où les prix de l’immobi-
lier ont augmenté de 50 % en
moyenne depuis 2020, de poten-
tiels acheteurs retardent leur ac-
quisition. D’autres s’adaptent à la
nouvelle donne. « Traditionnelle-
ment, un ménage saoudien voulait
vivre dans une villa de 400 mètres
carrés. En 2000, ça coûtait 1 mil-
lion, aujourd’hui quatre à cinq fois
ce prix. La taille des logements se ré-
duit. Le standard devient plutôt la
villa de 220 mètres carrés et l’appar-
tement », note M. Itani. Cette trans-
formation de l’habitat reflète aussi
une évolution des modes de vie
chez les jeunes générations, qui
ont voyagé et étudié à l’étranger.
Même si une majorité de Saou-
diens préfèrent acheter une mai-
son, par aversion pour la promis-
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
cuité, l’appartement séduit de plus
en plus les jeunes ménages. Les
prêts hypothécaires pour un ap-
partement représentent désor-
mais 30 % des prêts souscrits, se-
lon Knight Frank. Employé au
Fonds saoudien pour le déve-
loppement, Ahmed n’avait pas le
choix quand il a acheté, il y a trois
ans, l’appartement de 170 m2 où il
vit avec sa famille, dans le quartier
Al-Ezdihar, dans le nord-ouest de
Riyad. Alors âgé de 32 ans, il ne
gagnait que 10 000 riyals
(2 400 euros) par mois.
Grâce à un prêt à taux zéro, il s’est
endetté sur vingt-cinq ans pour
acheter cet appartement à
630 000 riyals. « Ç’a été un bon
calcul. Mon salaire a doublé, et les
remboursements ne représentent
plus qu’un dixième de mes revenus.
L’appartement vaut 1 million au-
jourd’hui. Et on a moins de dépen-
ses d’énergie que dans une grande
villa », dit le fonctionnaire. Pour lui
qui a étudié au Royaume-Uni, le
fait de vivre en appartement
n’était pas rédhibitoire.
« Communautés intégrées »
L’ambition du royaume de cons-
truire la ville de demain n’est pas
absente du plan relatif au loge-
ment. A l’est de l’aéroport de
Riyad, la communauté Sedra sort
peu à peu de terre sur plus de 20 ki-
lomètres carrés. Ce quartier, « con-
necté, proche de la nature » et éloi-
gné des standards de la métropole,
où tout se fait en voiture, ac-
cueillera trente mille unités de lo-
gement à l’horizon 2030, alimen-
tées par énergies renouvelables. La
conception en a été confiée au
groupe Roshn, une société créée
en 2020 par le Fonds public d’in-
vestissement saoudien, la cour-
roie économique du royaume.
« On ne construit pas seulement
des maisons, mais des commu-
nautés intégrées où tout – école,
gymnase, commerces, mosquée… –
est accessible à pied, à vélo ou en
voiture électrique. Cette qualité de
vie était avant un luxe réservé aux
expatriés, c’est désormais une né-
cessité pour tous. Et la culture
change : les Saoudiens veulent
communiquer avec leurs voisins »,
dit Jehan Al-Hdawi, responsable
communication chez Roshn. Six
mille unités ont été vendues sur
plan, à des prix présentés comme
abordables. Deux cents familles
sont déjà installées.
Le groupe a lancé d’autres méga-
projets à Riyad et à Djedda avec
l’objectif de fournir, d’ici à 2030,
400 000 unités de logement pour
2,2 millions d’habitants dans tout
le pays. « L’objectif de Roshn est
d’accélérer le cycle de développe-
ment immobilier, avec des produits
abordables et de qualité », expli-
que M. Itani. Cette image de mar-
que, l’empire immobilier du PIF la
travaille en sponsorisant des évé-
nements sportifs, comme la Saudi
Pro League et le tournoi de golf
LIV, qui visent à fidéliser les mem-
bres d’une future communauté
estampillée « Vision 2030 ». p
hélène sallon
 - CESSATIONS DE GARANTIE
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678
DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Cœur Défense –
Tour A – 110, Esplanade du Général de Gaulle
– 92931 La Défense Cedex (RCS Nanterre
842 689 556), succursale de QBE Europe SA/
NV société de droit belge, son siège social est
situé 37, boulevard du Régent, 1000 Bruxelles
- Belgique, les garanties financières dont béné-
ficiait la :
INOVEFA
A l’Attention La SAS FINANCIERE
DU MONTPARNASSE, représenté par
Monsieur Benjamin BISSON, 85 Avenue
Pierre Grenier 92100 BOULOGNE
BILLANCOURT SIREN : 752476549
depuis le 01 janvier 2021 pour son activité de :
Transactions sur Immeubles et Fonds de com-
merce Sans Perception de Fonds ont cessées au
31 Décembre 2023. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette insertion
à l’adresse de l’Etablissement garant sis Cœur
Défense – Tour A – 110, Esplanade du Général
de Gaulle – 92931 La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le
présent avis ne préjuge en rien du paiement ou
du non-paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité ou
l’honorabilité de la Société INOVEFA.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LIBERTY GESTION SAS
11 bis Rue de l’Hôtel de Ville
92400 COURBEVOIE
RCS: 887 506 038
depuis le 07/08/2020 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS LIBERTY GESTION.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
VALANTE SARL
7 Rue d’Assas
75006 PARIS RCS: 803 215 821
depuis le 29/07/2014 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis.Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL VALANTE.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LOG’IMMO 77 SARL
79 Avenue du Général de Gaulle
77330 OZOIR-LA-FERRIÈRE
RCS: 538 489 014
depuis le 23/02/2017 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIEREcessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL LOG’IMMO 77.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET
1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
PASFUS SARLU 16Avenue du Littoral
44380 PORNICHET RCS: 504 512 237
depuis le 21/08/2008 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES
ET FONDS DE COMMERCE, depuis le
21/08/2008 pour ses activités de : GESTION
IMMOBILIERE, depuis le 01/04/2017 pour
ses activités de : SYNDIC DE COPROPRIETE
cessera de porter effet trois jours francs après
publication du présent avis. Les créances éven-
tuelles se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne pré-
juge en rien du paiement ou du non-paiement des
sommes dues et ne peut en aucune façon mettre
en cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARLU PASFUS. GALIAN ASSURANCES
– 89, rue la Boétie – 75008 PARIS, accepte
de reprendre, avec tous ses effets les garanties
de QBE EUROPE SA/NV et notamment de
la dégager de toute obligation résultant de ses
engagements au titre de ses garanties.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678
DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis, Tour CBX, 1
Passerelle des Reflets, 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS Nanterre 842 689 556), succursale
de QBE Europe SA/NV société de droit belge,
son siège social : Bastion Tower - 10 place du
Champ de Mars 5 - 1050 Bruxelles _ Belgique,
les garanties financières dont bénéficiait la :
NORMANDIE GESTION
A l’Attention Madame Marie-Laure
ALEXANDRE, 7-9 Avenue Jean de la
Varende, RESIDENCE LE FORUM
27300 BERNAY SIREN : 894561034
depuis le 15 mars 2021 pour son activité de :
Gestion Immobilière, Syndic et Transactions
sur Immeubles et Fonds de commerce
Sans Perception de Fonds ont cessées au 31
Décembre 2023. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Etablissement garant sis, Tour
CBX, 1 Passerelle des Reflets, 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou
l’honorabilité de la Société NORMANDIE
GESTION, (SIREN : 894561034).
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
J&JAVANZINIASSOCIES SAS
2 bis rue du Marché
77860 SAINT GERMAIN SUR MORIN
RCS: 822 335 899
depuis le 01/01/2022 pour ses activités de
: GESTION IMMOBILIERE depuis le
01/01/2022 pour ses activités de : SYNDIC DE
COPROPRIETE cessera de porter effet trois
jours francs après publication du présent avis.
Les créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les trois
mois de cette insertion à l’adresse de l’Établis-
sement garant sis Tour CBX - 1 Passerelle des
Reflets - 92913 Paris La Défense Cedex. Il est
précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du paie-
ment ou du non-paiement des sommes dues
et ne peut en aucune façon mettre en cause la
solvabilité ou l’honorabilité de la SAS J&J
AVANZINI ASSOCIES.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LES 4 OLIVIERS EURL
156 Cours de la République
84120 PERTUIS
RCS: 452 562 408
depuis le 01/01/2019 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
EURL LES 4 OLIVIERS.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
JMJ SAS
303 rue Gambetta
59000 LILLE RCS: 533 143 632
depuis le 01/01/2016 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS JMJ.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET
1972 -ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont
le siège social est à 37, Boulevard du Régent,
1000 BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir
que, la garantie financière dont bénéficiait la :
FINORDEV SAS 16 Rue de Logelbach
75017 PARIS RCS: 380 034 892
depuis le 01/01/2007 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES
ET FONDS DE COMMERCE, depuis le
01/01/2007 pour ses activités de : GESTION
IMMOBILIERE cessera de porter effet trois
jours francs après publication du présent avis.
Les créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les trois
mois de cette insertion à l’adresse de l’Établis-
sement garant sis Tour CBX - 1 Passerelle des
Reflets - 92913 Paris La Défense Cedex. Il est
précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que
le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou
du non-paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité ou
l’honorabilité de la SAS FINORDEV. SO.CA.F.-
SOCIÉTÉ DE CAUTION MUTUELLE
DES PROFESSIONS IMMOBILIÈRES ET
FINANCIÈRES – 26 avenue de Suffren – 75015
PARIS, accepte de reprendre, avec tous ses effets
les garanties de QBE EUROPE SA/NV et no-
tamment de la dégager de toute obligation résul-
tant de ses engagements au titre de ses garanties.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678
DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis, Tour CBX, 1
Passerelle des Reflets, 92913 Paris La Défense
Cedex ( RCS Nanterre 842 689 556), succursale
de QBE Europe SA/NV société de droit belge,
son siège social : Bastion Tower - 10 place du
Champ de Mars 5 - 1050 Bruxelles _ Belgique,
les garanties financières dont bénéficiait la :
DIRECTGESTION
A l’Attention Monsieur Bernard BENSAID,
105 Bis Rue de Tolbiac
75013 PARIS SIREN : 481173235
depuis le 01 janvier 2022 pour son activité
de : Gestion Immobilière, Transactions sur
Immeubles et Fonds de commerce Sans
Perception de Fonds et Syndic ont cessées au
31 Décembre 2023. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette insertion
à l’adresse de l’Etablissement garant sis, Tour
CBX, 1 Passerelle des Reflets, 92913 Paris La
Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’honora-
bilité de la Société DIRECTGESTION (SIREN
: 809608391).
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
EUREKA IMMOBILIER SAS
13 b Chemin du Levant 01210 FERNEY-
VOLTAIRE RCS: 889 994 273
depuis le 20/11/2020 pour ses activités de
: GESTION IMMOBILIERE depuis le
20/11/2020, pour ses activités de : SYNDIC
DE COPROPRIETE depuis le 20/11/2020,
pour ses activités de : TRANSACTIONS SUR
IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE
cessera de porter effet trois jours francs après
publication du présent avis. Les créances éven-
tuelles se rapportant à ces opérations devront
être produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant sis
Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913
Paris La Défense Cedex. Il est précisé qu’il
s’agit de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la SAS EUREKA IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
SPW SARL
11 avenue du Général de Gaulle
95310 SAINT OUEN L’AUMONE
RCS: 798 630 828
depuis le 01/01/2014 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SARL SPW.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LG IMMOBILIER SARL
4 les Rochelles 35190 SAINT-
DOMINEUC RCS: 535 294 169
depuis le 01/01/2012 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL LG IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
LION LAMBERSART SAS
87 Avenue Henri Delecaux 59130
LAMBERSART RCS: 845 344 191
depuis le 01/02/2019 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant sis
Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913
Paris La Défense Cedex. Il est précisé qu’il
s’agit de créances éventuelles et que le pré-
sent avis ne préjuge en rien du paiement ou
du non-paiement des sommes dues et ne
peut en aucune façon mettre en cause la sol-
vabilité ou l’honorabilité de la SAS LION
LAMBERSART.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678
DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis, Tour CBX,
1 Passerelle des Reflets, 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS Nanterre 842 689
556), succursale de QBE Europe SA/NV
société de droit belge, son siège social :
Bastion Tower - 10 place du Champ de Mars
5 - 1050 Bruxelles _ Belgique, les garanties
financières dont bénéficiait la :
MILLON SAINT-LAMBERT GESTION
A l’Attention Monsieur Stéphane
DUPUIS, 200 Rue Raymond Losserand
75014 PARIS SIREN : 440431062
depuis le 01 janvier 2011 pour son activité
de : Gestion Immobilière ont cessées au 31
Décembre 2023. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Etablissement garant sis, Tour
CBX, 1 Passerelle des Reflets, 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du
non-paiement des sommes dues et ne peut
en aucune façon mettre en cause la solvabi-
lité ou l’honorabilité de la Société MILLON
SAINT-LAMBERT GESTION (SIREN :
440431062).
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
AGENCE MADRIGAL SARL
89 boulevard Franklin Roosevelt
38500VOIRON RCS: 339 473 175
depuis le 01/01/2013 pour ses activités de
: GESTION IMMOBILIERE, depuis le
01/01/2016 pour ses activités de : SYNDIC
DE COPROPRIETE, depuis le 01/01/2013
pour ses activités de : TRANSACTIONS SUR
IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE
cessera de porter effet trois jours francs après
publication du présent avis. Les créances éven-
tuelles se rapportant à ces opérations devront
être produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant sis
Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913
Paris La Défense Cedex. Il est précisé qu’il
s’agit de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la SARL AGENCE MADRIGAL.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
AGENCE IMMOBILIERE DU
CHATEAU SASU 117 Avenue
Victor Hugo 92100 BOULOGNE-
BILLANCOURT RCS: 480 253 103
depuis le 23/07/2013 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent
avis ne préjuge en rien du paiement ou du
non-paiement des sommes dues et ne peut
en aucune façon mettre en cause la solvabi-
lité ou l’honorabilité de la SASU AGENCE
IMMOBILIERE DU CHATEAU.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
LE LION IMMOBILIER SAS
34 place du Lion d’Or
59000 LILLE RCS: 412 896 029
depuis le 01/01/2016 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS LE LION IMMOBILIER.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX - 1
Passerelle des Reflets - 92913 Paris La Défense
Cedex (RCS NANTERRE 842 689 556),
succursale de QBE EUROPE SA/NV, dont le
siège social est à 37, Boulevard du Régent, 1000
BRUXELLES - BELGIQUE, fait savoir que, la
garantie financière dont bénéficiait la :
BERSOT GESTION LOCATION - B.G.L.
SARL 9 rue Proudhon
25000 BESANCON RCS: 485 290 795
depuis le 01/01/2006 pour ses activités de
: GESTION IMMOBILIERE, depuis le
01/10/2018 pour ses activités de : SYNDIC DE
COPROPRIETE cessera de porter effet trois
jours francs après publication du présent avis.
Les créances éventuelles se rapportant à ces
opérations devront être produites dans les trois
mois de cette insertion à l’adresse de l’Établis-
sement garant sis Tour CBX - 1 Passerelle des
Reflets - 92913 Paris La Défense Cedex. Il est
précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du paie-
ment ou du non-paiement des sommes dues et
ne peut en aucune façon mettre en cause la sol-
vabilité ou l’honorabilité de la SARL BERSOT
GESTION LOCATION - B.G.L.. GALIAN
ASSURANCES – 89, rue la Boétie – 75008
PARIS, accepte de reprendre, avec tous ses
effets les garanties de QBE EUROPE SA/NV
et notamment de la dégager de toute obligation
résultant de ses engagements au titre de ses
garanties.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678
DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE FRANCE, sis Tour CBX –
1 Passerelle des Reflets – 92400
COURBEVOIE ( RCS Paris 414 108 708),
succursale de QBE Insurance (Europe)
Limited, Plantation Place dont le siège
social est à 30 Fenchurch Street, London
EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait :
ICI
8 bis, Rue de l’Astrobale
Résidence Port Richelieu 1
34300 LE CAP D’AGDE
SIREN : 511 939 332
depuis le 1er Novembre 2018 pour son acti-
vité de : GESTION IMMOBILIERE ces-
sera au 31 Décembre 2023. Les créances
éventuelles se rapportant à ces opérations
devront être produites dans les trois mois
de cette insertion à l’adresse de l’Etablis-
sement garant sis Tour CBX – 1 Passerelle
des Reflets – 92400 COURBEVOIE.
Il est précisé qu’il s’agit de créances éven-
tuelles et que le présent avis ne préjuge en
rien du paiement ou du non-paiement des
sommes dues et ne peut en aucune façon
mettre en cause la solvabilité ou l’honora-
bilité de la SARL ICI.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
CYPIMMO SASU
11 Avenue du Général de Gaulle
95310 SAINT-OUEN-L’AUMÔNE
RCS: 827 866 492
depuis le 01/04/2017 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit
de créances éventuelles et que le présent avis
ne préjuge en rien du paiement ou du non-
paiement des sommes dues et ne peut en
aucune façon mettre en cause la solvabilité
ou l’honorabilité de la SASU CYPIMMO.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
AGENCE JLW SAS
36 rue Royale
59000 LILLE RCS: 443 168 786
depuis le 01/01/2016 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS AGENCE JLW.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
EUROP IMMO LOISIRS SARL
2 Rue Raffanel Résidence la Palme d’Or
lot n° 251 34300 LE CAP D’AGDE
RCS: 379 427 305
depuis le 01/01/2010 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SARL EUROP IMMO LOISIRS.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
2CLI SAS
186 rue Sadi Carnot
59320 HAUBOURDIN RCS: 824 819 577
depuis le 01/01/2017 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS 2CLI.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
LIBERTY REALTY SASU
11 bis Rue de l’Hôtel de Ville
92400 COURBEVOIE
RCS: 884 103 029
depuis le 03/08/2020 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles se
rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la SASU LIBERTY REALTY.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
- BELGIQUE, fait savoir que, la garantie
financière dont bénéficiait la :
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180 Avenue du Prado
13008 MARSEILLE
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depuis le 15/10/2020 pour ses activités de :
GESTION IMMOBILIERE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
du présent avis. Les créances éventuelles
se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SASU PGI.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
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financière dont bénéficiait la :
JUMA SAS
1 place Philippe Lebon
59000 LILLE RCS: 753 999 838
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TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
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tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS JUMA.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842 689
556), succursale de QBE EUROPE SA/NV,
dont le siège social est à 37, Boulevard du
Régent, 1000 BRUXELLES - BELGIQUE,
fait savoir que, la garantie financière dont
bénéficiait la :
LE LION BRIGODE SAS
330 Avenue de la Brigode
59650 VILLENEUVE D’ASCQ
RCS: 825 355 985
depuis le 01/01/2017 pour ses activités de :
TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET
FONDS DE COMMERCE cessera de por-
ter effet trois jours francs après publication
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rapportant à ces opérations devront être pro-
duites dans les trois mois de cette insertion à
l’adresse de l’Établissement garant sis Tour
CBX - 1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris
La Défense Cedex. Il est précisé qu’il s’agit de
créances éventuelles et que le présent avis ne
préjuge en rien du paiement ou du non-paie-
ment des sommes dues et ne peut en aucune
façon mettre en cause la solvabilité ou l’hono-
rabilité de la SAS LE LION BRIGODE.
LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET
D’APPLICATION N° 72-678 DU 20
JUILLET 1972 - ARTICLES 44
QBE EUROPE SA/NV, sis Tour CBX -
1 Passerelle des Reflets - 92913 Paris La
Défense Cedex (RCS NANTERRE 842
689 556), succursale de QBE EUROPE
SA/NV, dont le siège social est à 37,
Boulevard du Régent, 1000 BRUXELLES
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financière dont bénéficiait la :
LITT SAS
3 Rue de Fournes 59134 BEAUCAMPS-
LIGNY RCS: 833 505 506
depuis le 01/01/2018 pour ses activités de :
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FONDS DE COMMERCE cessera de por-
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se rapportant à ces opérations devront être
produites dans les trois mois de cette inser-
tion à l’adresse de l’Établissement garant
sis Tour CBX - 1 Passerelle des Reflets -
92913 Paris La Défense Cedex. Il est pré-
cisé qu’il s’agit de créances éventuelles et
que le présent avis ne préjuge en rien du
paiement ou du non-paiement des sommes
dues et ne peut en aucune façon mettre en
cause la solvabilité ou l’honorabilité de la
SAS LITT.
16 |
La France
en retard sur
la préparation
mentale
des athlètes
DANS LA TÊTE DES SPORTIFS 1 |4
L’accompagnement en vue
d’optimiser la performance
est encore peu structuré
A
notre époque, le prépa-
rateur mental n’avait
absolument pas sa
place aux Jeux, on avait
l’habitude d’avoir avec nous un
cuisinier : on préférait bien manger
plutôt qu’améliorer notre capacité
mentale. » Dans la bouche de Jean-
François Lamour, la formule se
veut, certes, un brin caricaturale,
mais elle en dit long sur le chemin
parcouru depuis la fin de la car-
rière du double champion olym-
pique de sabre (1984 et 1988), por-
te-drapeau de la délégation fran-
çaise en 1992 à Barcelone.
A l’été 2024, trois psychologues
devraient accompagner officielle-
ment la délégation tricolore à l’oc-
casion des Jeux olympiques (JO),
du 26 juillet au 11 août, et paralym-
piques, du 28 août au 8 septembre.
Quant aux préparateurs mentaux
des athlètes de l’équipe de France,
ils auront tous, ou presque, pris
leurs quartiers dans la capitale. Im-
pensable pour un sportif de haut
niveau de se passer d’un outil au
service de la performance, a for-
tiori quand on vise le Graal, une
médaille aux JO.
L’importance de la préparation
mentale est aujourd’hui reconnue
par la grande majorité des fédéra-
tions sportives, et intégrée dans
les programmes d’entraînement,
qu’elle relève d’une approche indi-
viduelle ou collective. Chez les
Anglo-Saxons, la question ne fait
plus débat depuis longtemps.
En France, il n’est pas si lointain
le temps où les entraîneurs, les fé-
dérations ou les athlètes eux-mê-
mes observaient avec méfiance,
voire défiance, ces nouveaux ac-
teurs venus s’immiscer dans le
projet sportif. En 2010, le Cercle
des nageurs de Marseille a été le
premier club national de natation
à intégrer un préparateur mental.
« Les entraîneurs ne sont pas formés à la psychologie du sport »
Pour le chercheur Jean Fournier, la recherche scientifique est indispensable à l’amélioration de la formation des encadrants sportifs
ENTRETIEN
J ean Fournier est psycholo-
gue, maître de conférences de
l’université Paris-Nanterre et
ancien président de la Société
française de psychologie du sport
(2017-2023). Il a travaillé pendant
vingt ans dans le domaine de la
préparation mentale avec diffé-
rents athlètes et entraîneurs
olympiques et avec la Fédération
française de golf. Il vient de pu-
blier Psychologie du sport et de
l’activité physique (Elsevier Mas-
son, 208 pages, 35 euros).
Le titre de préparateur mental
est-il reconnu au niveau
national ?
La Société française de psycho-
logie du sport accrédite des pré-
parateurs mentaux et des psycho-
logues, mais le titre n’est pas en-
core reconnu au niveau national.
A chaque fois qu’on avance en
« Au début, on se faisait critiquer
par les autres clubs, se souvient le
nageur Camille Lacourt, quintuple
champion du monde, retraité de-
puis 2017, pour eux, si on faisait ap-
pel à lui, c’est qu’on était faibles ».
Depuis, les anciens persifleurs
ont pris la vague, et la Fédération
française de natation a attribué un
référent « mental » à chacune de
ses disciplines (plongeon, water-
polo, natation artistique, natation
course, eau libre). La Fédération fi-
gure parmi les bons élèves, aux cô-
tés du rugby, de l’athlétisme, de
l’aviron, et de la voile.
De loin la plus avancée, la Fédéra-
tion française de rugby (FFR) est
aujourd’hui prise pour modèle par
le sport français. Les premiers ca-
dres techniques ont commencé à
travailler sur la dimension psycho-
logique dès 1999. Près de vingt-
cinq ans plus tard, « toutes les équi-
pes de France comportent au
moins un membre de leur encadre-
ment formé aux fondements de la
psychologie du sport », atteste Mic-
kaël Campo, responsable de la pré-
paration mentale à la FFR, qui a
créé un diplôme de sensibilisation
destiné aux entraîneurs en 2019.
Le projet fédéral est structuré dès
les premiers échelons : les acadé-
« Les pays anglo-
saxons sont
beaucoup plus
avancés, ils ont
fait appel à des
spécialistes plus
tôt que nous »
THIERRY DUMAINE
chef adjoint du pôle
performance de l’Insep
parvenant à faire comprendre
cette nécessité au ministère, gé-
néralement le ministre change.
Cela fait des années qu’on es-
saie d’expliquer que les psycho-
logues doivent être respectés, car
ils sont garants de la santé men-
tale, mais ils n’ont pas forcément
les connaissances dans le sport.
Et inversement, que tous ceux
qui travaillent en préparation
mentale n’ont pas nécessaire-
ment les connaissances en psy-
chopathologie pour détecter les
troubles. Leur priorité, c’est la
performance et certains oublient
de s’occuper de la santé mentale
des athlètes.
Je ne dis pas qu’un métier est
mieux que l’autre. D’ailleurs, gé-
néralement, quand ça se passe
bien, les deux travaillent ensem-
ble : il y a un préparateur mental
et un psychologue, au même titre
qu’un kinésithérapeute et un pré-
parateur physique.
Fabien Galthié et l’équipe de France de rugby, au Murrayfield Stadium, à Edimbourg (Ecosse), le 5 août. DAVID GIBSON/FOTOSPORT/SHUTTERST
mies Pôles Espoirs mettent en
œuvre des programmes de déve-
loppement des habiletés mentales
sur trois ans. « C’est planifié, quan-
tifié, mesuré. Et on s’attaque main-
tenant aux écoles de rugby, pour
développer l’épanouissement des
gamins », insiste Mickaël Campo,
également président de la Société
française de psychologie du sport
(SFPS), qui regroupe des praticiens,
enseignants et chercheurs en psy-
chologie. Selon lui, « toutes les fé-
dérations ne sont pas au même ni-
veau d’avancement, mais tout le
monde a compris l’importance de
la dimension mentale dans la for-
mation des jeunes, dans la perfor-
mance et la prévention ». Un peu
tard pour en voir les bénéfices dès
Paris 2024 ? Certains ne sont pas
loin de le penser, le regard tourné
de l’autre côté de la Manche.
Lors de la préparation des Jeux
de Londres, « les Anglais ont fait ve-
nir des scientifiques, notamment
d’Amérique du Nord, huit à dix ans
avant, relève Jean Fournier, cher-
cheur en psychologie de la perfor-
mance depuis plus de trente ans,
ils ont anticipé leurs résultats, les
ont concrétisés et, surtout, ils les
ont maintenus aux Jeux d’après ».
Sur la lancée de 2012 – ils avaient
fini à la troisième place au tableau
des médailles –, les Britanniques
sont montés sur la deuxième mar-
che du podium à Rio de Janeiro,
en 2016.
Acteur de poids au service de la
haute performance, l’English Ins-
titute of Sport (UK Sports Insti-
tute) a été lancé dès 2002, avec des
Qu’en est-il à l’étranger ?
Au Canada, par exemple, il y a
des conseillers en performance
mentale, qui ont une habilitation
différente du titre de psychologue,
et le titre de psychologue du sport
ne peut pas être utilisé si l’on n’est
pas psychologue. Aux Etats-Unis,
cela dépend de chaque Etat. Il y a
une réglementation aussi en Aus-
tralie, en Angleterre, en Allema-
gne… La France est extrêmement
en retard parce qu’il n’y a pas de
volonté d’éduquer les entraîneurs.
C’est-à-dire ?
Aujourd’hui, en France, quel que
soit le type de formation pour de-
venir entraîneur, la psychologie
du sport est pratiquement inexis-
tante et le contenu des formations
n’est pas à jour. Pourquoi ? Parce
que les articles disponibles sur le
sujet sont rédigés en anglais, et
donc peu lus, les formateurs lisent
avant tout ceux de vulgarisation
champs d’expertise en psycholo-
gie, en physiothérapie ou encore
en biomécanique. Emilie Thienot
y a travaillé de 2014 à 2017, chargée
de la préparation psychologique
de l’équipe britannique de voile
olympique et paralympique. En
matière de préparation mentale, la
docteure en psychologie voit dans
l’exemple anglais un « modèle très
différent ». Pour preuve, tous les
psychologues – un spécialiste par
collectif – sont salariés par la
même institution sportive, UK
Sports, là où, en France, les fédéra-
tions font plutôt appel à des con-
sultants prestataires.
Paradoxe
Les deux systèmes ont leurs avan-
tages et leurs inconvénients, fait
valoir celle qui conseille
aujourd’hui l’Agence nationale du
sport (ANS), l’organe chargé du
haut niveau en France, mis sur
pied en 2019. Yann Cucherat re-
connaît que le recours à l’accom-
pagnement mental est moins an-
cré dans la culture française que
dans les pays anglo-saxons. « Mais
ça entre de plus en plus dans les
mœurs, nuance le manager de la
préparation des Jeux à l’ANS. On a
encore un peu de mal, car c’est aussi
un aveu de faiblesse », explique-t-il.
On pose le même diagnostic à
Paris, du côté du bois de Vincen-
nes, à l’Institut national du sport,
de l’expertise et de la performance
(Insep). « Les pays anglo-saxons
sont clairement beaucoup plus
avancés [en matière d’accompa-
gnement mental], ils ont fait appel
en français, ce qui donne lieu à des
raccourcis. Il faudrait que les for-
mations dispensées soient ados-
sées à la recherche : si on com-
prend d’où viennent les contenus
que l’on apprend, ou que l’on doit
enseigner, on sait si c’est valide ou
pas sur la base de publications
scientifiques. On sortirait ainsi de
l’empirisme et du Moyen Age. La
France n’a pas choisi de s’appuyer
sur la science pour faire des résul-
tats. Dans plein de pays, si l’on veut
gagner, il faut trouver cet avantage
marginal (« marginal gain ») et
pour ça, on va aller chercher dans
tous les domaines possibles, qu’il
« En France,
les sportifs
se méfient
des scientifiques,
et inversement »
Le cadrage
institutionnel
autour du métier
de préparateur
mental est
absent en France
à des spécialistes plus tôt que
nous », admet Thierry Dumaine,
chef adjoint du pôle performance
de cette pépinière du sport fran-
çais. Sa collègue Anaëlle Malherbe
abonde. « Aux Etats-Unis, dès l’uni-
versité, tu vas avoir un référent
pour une équipe », compare la psy-
chologue clinicienne et prépara-
trice mentale.
Ce n’est ni un problème de « vi-
vier » ni un souci d’expertise : la
France a depuis longtemps une as-
sise de chercheurs en psychologie
du sport et dispose d’une société
savante, la SFPS, dont la création
remonte à 1967. « Je suis convain-
cue qu’en France le travail de fond
est fait, et bien fait, maintenant il
faudrait qu’il soit un peu plus visi-
ble et le valoriser », estime Roberta
Antonini-Philippe, maîtresse d’en-
seignement en psychologie du
sport à l’Institut des sciences du
sport de l’université de Lausanne.
La chercheuse souligne, en
creux, une « anomalie » qui con-
fine au paradoxe : l’absence de ca-
drage institutionnel dans l’Hexa-
gone autour du métier de prépara-
teur mental. Sur ce point, la France
accuse un retard sur les pays
s’agisse du perfectionnement du
matériel ou de la formation en gé-
néral des entraîneurs, qui inclut
les aspects psychologiques.
N’y a-t-il pas aussi un frein
d’ordre culturel ?
La France n’est pas un peuple de
sportifs. On a du mal à faire faire
du sport à l’école, ça va plutôt être
de l’activité physique (EPS). Il n’y a
pas de cours de judo à l’école. C’est
le cas dans plein de pays à l’étran-
ger. L’Angleterre, l’Allemagne,
l’Australie, le Canada, la Belgique,
les Pays-Bas sont bien plus avan-
cés que nous. En France, les spor-
tifs se méfient des scientifiques et
inversement alors qu’on ne de-
vrait pas, il devrait y avoir un lien.
Les objectifs de médailles sont
pourtant très ambitieux…
Ces volontés affichées de rem-
porter beaucoup de médailles ne
sont pas récentes. En 2017, Laura
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
anglo-saxons, Canada, Etats-Unis,
Angleterre et Australie en tête,
mais aussi sur certains de ses voi-
sins européens, dont l’Allemagne
et la Suisse.
Jean-François Lamour concède
que, lorsqu’il était ministre des
sports (2002-2007), réglementer
sur cette question « n’était pas [sa]
priorité ». « On avait un gros sujet :
le dopage », explique-t-il. « On est
dans une période charnière », as-
sure Mickaël Campo, pour qui la
préparation mentale est désor-
mais victime de son accessibilité.
Depuis avril, la SFPS pilote un
groupe de travail réunissant un
consortium national de prépara-
teurs mentaux.
Un des volets porte sur les exi-
gences en matière de déontologie,
un autre sur les compétences at-
tendues. L’enjeu est de parvenir à
la reconnaissance institutionnelle
d’un titre, « et que plus personne ne
puisse s’autoproclamer sur Internet
“préparateur mental” en leurrant
des athlètes et des staffs », résume
le président de la SFPS. « J’espère
que ça aboutira en 2024, ajoute-t-il,
ce serait beau que ça puisse être un
héritage des Jeux. »
Au moment où la France sera ob-
servée à la loupe par les grandes
nations du sport, ne pas s’aligner
sur elles passerait pour un aveu de
faiblesse. p
nicolas lepeltier
et élisabeth pineau
Prochain article
Un « business » sans régulation
qui profite aux « margoulins »
Flessel, alors ministre des sports,
disait : « Mon ambition est de dou-
bler le nombre de médailles
en 2024 [aux Jeux de Rio en 2016, la
France était arrivée en 7e position
avec quarante-deux médailles,
dont dix en or]. » Le président de la
République, Emmanuel Macron,
lui, ambitionne que le pays se
hisse au 5e rang au tableau des mé-
dailles. On peut imaginer évaluer
l’importance d’un objectif par le
budget qu’on y consacre. Pour pré-
parer les Jeux de 2024, le gouver-
nement a mis 20 millions d’euros
dans les programmes de recher-
che, dont… 10 % sur la psychologie
du sport. Pendant les Jeux, on ne
fera que poser ces questions aux
athlètes : « comment vous vous
êtes sentis ? », « il y avait du
stress ? », etc. Après, ce sera fini, et
le peu d’argent qui était alloué à la
psychologie du sport va retourner
à l’activité physique. p
propos recueillis par é. pi.
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 horizons | 17

san francisco - correspondante

C’
est une maison bleue,
dans Lily Street, à San
Francisco (Californie),
adossée à une rangée de
banians. L’allée se ter-
mine par une fresque mu-
rale – des fleurs de couleurs psychédéliques,
de l’artiste italien Pepe Gaka. Dans le pat-
chwork urbain qu’est la « cité aux quarante-
deux collines », Hayes Valley fait figure d’oa-
sis de tranquillité. Boutiques branchées, gale-
ries, studios de poterie. Cafés où l’on déguste
des donuts « artisanaux » ou des pâtisseries
« botaniques ». Le quartier se trouve à deux
pas de Haight-Ashbury, la capitale du flower
power des années 1970. Le calme est trom-
peur. Derrière ces maisons victoriennes se ca-
che un monde en ébullition. Si le phénomène
de l’intelligence artificielle (IA) est en train de
transformer le monde des technologies,
Hayes Valley en est l’épicentre, avec ses mai-
sons communautaires, les hacker houses, où
les créateurs partagent leur espace de vie et
de travail. En moins d’un an, le quartier a pris
le surnom de « Cerebral Valley ». Une réfé-
rence « aux esprits brillants qui sont venus s’y
installer », explique Juliet Kelso, 32 ans, l’une
des occupantes de la maison bleue.
Les techies d’aujourd’hui sont bien éloignés
des programmeurs de la génération précé- ISABEL ESPANOL
dente, celle de l’expansion des plates-formes.
Ceux-là habitaient dans des lofts avec vue sur

San Francisco voit

l’East Bay. Ils travaillaient à « inventer des
applications pour commander à manger »,
comme dit Gloria Felicia, 28 ans, avec un soup-
çon de condescendance. Les créateurs de l’IA
sont persuadés de participer à « la plus grande
révolution de l’histoire de l’humanité ». A

fleurir les start-up de l’IA

La Boulangerie, le café français devenu le ren-
dez-vous des hackeurs et des utopies, au cœur
de Hayes Valley, ils sont attablés, casque anti-
bruit sur les oreilles, sous une publicité vin-
tage pour Orangina. « Les gens de l’IA trouvent
leur inspiration dans les vieilles maisons, ad-
mire Juliet Kelso. Le passé rencontre le futur. »
L’intelligence artificielle est la nouvelle
ruée vers l’or. Les investisseurs déversent
leur argent sur les start-up, comme il y a dix
ans sur les réseaux sociaux : 21,4 milliards de
dollars (23,6 millions d’euros) entre janvier et
octobre, selon le site spécialisé PitchBook,
contre 5,1 milliards de dollars en 2022. A
écouter les anciens de la Silicon Valley, la fiè-
vre actuelle est comparable aux débuts de
l’Internet, à la fin des années 1990, à l’inven-
tion des smartphones, qui ont révolutionné
la manière d’utiliser les ordinateurs après
2007. Ou à celle de la machine à vapeur,
comme l’a suggéré Reid Hoffman, le cofon-
dateur de LinkedIn, le 15 novembre, lors du
deuxième sommet de l’IA organisé par le
groupe Cerebral Valley AI au SFJazz Center de
Hayes Valley. En 2012, l’influent investisseur
Marc Andreessen annonçait l’ère de l’expan-
sion du numérique : « Le logiciel va dévorer le
monde. » En juin, l’oracle a livré son nouveau
mantra : « L’intelligence artificielle va sauver
le monde », a-t-il écrit sur son blog.
PLUS BESOIN DE CODEURS
Il y a encore quelques mois, la ville était dite
en perdition, prise dans une spirale de déclin.
Elle croit avoir trouvé son salut. « San Fran-
cisco est la capitale mondiale de l’IA », a pro-
clamé la maire, London Breed. Comme l’avait
fait son prédécesseur, Ed Lee, en 2011, pour
inciter Twitter à s’installer dans le centre-
ville, l’élue a proposé des réductions d’impôt
pour les entreprises technologiques qui si-
gneraient un bail de plus de trois ans. Selon le
bureau municipal du développement écono-
mique, vingt-deux des principales start-up
de l’IA ont maintenant leur siège dans la baie
de San Francisco, et onze dans la ville même.
Dans l’univers des technologies, la roue
tourne vite. Alors que les géants de la Silicon
Valley continuent à dégraisser, les start-up
de l’IA recrutent. Après la bulle « dot.com »,
l’heure est à l’effervescence « dot.ai ». Pas une
start-up qui n’ait accroché le suffixe « ai » au
nom de son invention : Pilot.ai, Snorkel.ai,
Playground.ai, Letter.ai, Sanctuary.ai, Spine.ai,
Revery.ai sont quelques-uns des noms figu-
rant sur les offres d’emploi publiées sur le site
de Cerebral Valley. Les disruptions sémanti-
ques d’il y a vingt ans (Yahoo, Google) sont
passées de mode. Les start-up de l’IA puisent
dans les concepts. Inflection AI, Stability AI,
Contextual AI, Compose AI, Atypical AI…
Les habitants de Hayes Valley ont l’impres-
sion de vivre un moment « très spécial, pres-
que magique ». Comme Nolan Bryant, qui,
à 26 ans, a laissé tomber son job dans le mar-
keting, dans l’Etat de Washington : « C’est
un tournant dans l’histoire de l’humanité. »
Nolan s’est inscrit à un « boot camp » en ma-
chine learning, une formation accélérée au
Une nouvelle génération de « techies », persuadée de participer à un
« changement de civilisation », s’est installée dans le quartier de Hayes Valley,
épicentre d’un monde de l’intelligence artificielle en ébullition
California Institute of Technology (Caltech).
Mais coder – l’apanage des seigneurs de la
tech d’il y a dix ans – a perdu en importance.
« Programmer, c’était bâtir des trucs cool,
avec des équipes. A l’époque, c’était révolu-
tionnaire, dit le jeune homme. Maintenant,
ça revient surtout à faire de la maintenance
pour entretenir le truc cool. »
Dans l’IA, tout bouge « extrêmement vite, re-
late Gloria Felicia. Certains ingénieurs se de-
mandent à quoi ils servent : les projets sur les-
quels ils travaillaient il y a six mois sont main-
tenant automatisés ». Selon lui, les large lan-
guage models (LLM), ou grands modèles de
langage, capables de générer du texte, vont
devenir si performants que « le concept entier
de programmation d’ordinateurs va, à terme,
être remplacé ». Il suffira (peut-être) de parler à
son agent intelligent. Plus besoin de codeurs.
Les « perturbateurs » d’hier, prosélytes de la
disruption, seront les perturbés de demain…
Les habitants de Cerebral Valley sont plus
accueillants que leurs prédécesseurs de Goo-
gle, d’Apple et de Facebook, muselés par les
accords de confidentialité. « Entrez ! », invite
Juliet Kelso, qui guettait une livraison devant
la maison de Lily Street, avec Gucci, son shih
tzu. Le couloir est jonché de paquets Amazon.
La maison accueille des dizaines de person-
nes pour des dîners autour de l’IA. Dans la
cuisine, une immense table pour le cowor-
king et un écran où une autre colocataire,
Angie Grace Ng, la fondatrice de Mimes.ai,
projette ses animations en 3D.
OasisCollective – le nom de la maison – a
ouvert en avril. Elles sont neuf résidentes,
chercheuses, ingénieures, créatrices, répar-
ties en trois appartements. Loyer : 1 500 dol-
lars par chambre. Juliet Kelso est arrivée de la
Côte est il y a deux ans. Consultante en res-
pect de la vie privée pour une société sous
contrat avec Meta, elle a rencontré Gloria Fe-
licia sur Facebook Marketplace. Les deux en-
trepreneuses ont décidé de créer une maison
pour les femmes de l’IA. « Historiquement,
dans tous les booms de la tech, les hommes
accaparent les opportunités, affirme Juliet
Kelso. Il y a des femmes, mais elles sont incor-
porées dans une sphère dominée par les hom-
mes. » Selon elle, l’IA offre une solution de
remplacement au monopole des « tech bros »
(« frères de la tech »).
Gloria Felicia a, de son côté, reporté son
admission en doctorat à Stanford : « Un mo-
ment comme maintenant ne va pas se présen-
ter deux fois. » « Glo » en est déjà à sa
deuxième création d’entreprise de l’année.
Au printemps, elle a cofondé Menubites.ai,
une start-up qui propose aux petits restau-
rants des photos embellies par l’AI pour leur
permettre d’afficher les plats sur leur site
Internet sans passer par des photographes
professionnels. La start-up a été vendue à la
plate-forme Snappr. Depuis l’été, elle prépare
le lancement d’une autre start-up dans le do-
maine de la géolocalisation pour le marché
de l’immobilier, Atlaspro.ai. « Pour la pre-
mière fois, nous sommes confrontés au fait
que les ordinateurs, sous une forme ou une
autre, deviennent plus intelligents que la plu-
part des humains, affirme-t-elle. Cela peut
« PROGRAMMER, faire peur. » Arrivée d’Indonésie à l’âge de
17 ans, Gloria a une pensée pour les migrants
C’ÉTAIT BÂTIR et tous ceux dont l’anglais n’est pas la pre-
mière langue. « Les grands modèles de lan-
DES TRUCS COOL. gage s’expriment déjà mieux qu’eux. »
MAINTENANT, ÉMULATION
ÇA REVIENT San Francisco revit, revibre, grâce à l’IA.
Le site Cerebralvalley.ai publie un calendrier
SURTOUT À FAIRE des hackatons, des « demo days » (démons-
trations de nouveaux produits), des « Llamas
DE LA MAINTENANCE Lounge » (une référence à Llama, le modèle
POUR ENTRETENIR de langage de Meta, la maison mère de Face-
book). Soit 832 événements pour les onze
LE TRUC COOL » premiers mois de 2023, un total sans précé-
dent depuis dix ans.
NOLAN BRYANT
Ce premier samedi de décembre se tient
en formation accélérée
Hacktopia, un rassemblement de program-
au California Institute
meurs au quartier général de la fondation de
of Technology
la plate-forme de cryptomonnaie Celo, en
face du siège d’OpenAI. L’invitation est enlu-
minée d’une illustration psychédélique que
ne renieraient pas les musiciens de Grateful
Dead, dont on voit encore la maison près de
Hayes Valley. Une trentaine de jeunes sont là,
attirés par les croissants, les sweat-shirts gra-
tuits, l’émulation au contact d’autres déve-
loppeurs, et un crédit pour accéder aux espa-
ces de stockage des géants du numérique.
Parmi eux, deux filles arrivées tout droit du
Kazakhstan, Aknur Abdikarim et Amina Tus-
hakova, 18 ans, étudiantes à la Minerva Uni-
versity, à San Francisco, un établissement ex-
périmental d’enseignement en ligne, financé
par des entrepreneurs de la tech. Selali Ado-
bor, qui a un emploi à Zoox, la filiale véhicu-
les autonomes d’Amazon, et s’amuse le week-
end à concevoir des agents conversationnels
qui répondent aux enquêtes de marketing
comme des vrais consommateurs (Notions-
mith.ai). Et James Murdza, qui fait la promo-
tion de Bookbites.ai, son invention, une IA
qui synthétise les livres en audio pour ceux
qui n’ont pas le temps de lire.
Le hackaton est organisé par deux start-up
qui espèrent recruter des talents : Helicone.ai
et PostHog, jeunes pousses du secteur de
l’« observabilité », un domaine qui consiste à
surveiller les IA pour éviter les « hallucina-
tions », des erreurs grossières commises par
les agents supposés intelligents.
Ancien d’Apple, Justin Torre, 26 ans, le fon-
dateur de Helicone.ai (du nom d’une fleur
surnommée « oiseau du paradis »), s’avoue
« un peu nerveux » au sujet de Q* (« Q Star »), le
projet sur lequel travaillerait OpenAI : une
intelligence artificielle générale, capable d’ef-
fectuer n’importe quelle tâche, le Graal dont
la Silicon Valley semble incessamment atten-
dre – et redouter – l’avènement. « Je n’ai pas
peur d’une puissance maléfique, dit le jeune
ingénieur. Ce qui me fait peur, c’est que
OpenAI n’ait pas l’air très organisé. S’ils ont
abouti à quelque chose qui est potentiellement
dangereux, ils doivent mettre en place des gar-
de-fous pour éviter que Q Star sorte des rails. »
Mais la plupart des jeunes ont plutôt
confiance dans l’avenir radieux et harmo-
nieux promis aux humains. « Les citoyens
auront leur propre IA, qui travaillera et ga-
gnera de l’argent pour eux. Ils ne seront plus
des consommateurs, mais des producteurs »,
prédit Matt, un participant de Hacktopia.
« Dans vingt ans, les gens feront peut-être des
choses plus intéressantes que de répondre au
téléphone toute la journée dans les centres
d’appels », assure Juliet Kelso. Pour Gloria Fe-
licia, les néo-hippies de la vallée de l’IA sont
« en quête de quelque chose de supérieur ».
Une quête « presque ésotérique, liée à la crise
existentielle de l’humanité », dit-elle. « Nous
sommes face à quelque chose qui est plus
grand que nous. » Et « c’est juste le début »,
prédit Justin Torre. p
corine lesnes
18 | carnet
Frank Cassenti
Réalisateur
A Tours, en 2005. FRANÇOIS GUILLOT/AFP
R
éalisateur, acteur, in-
venteur du festival Jazz
à Porquerolles, Frank
Cassenti est mort à
La Ciotat (Bouches-du-Rhône),
vendredi 22 décembre, entouré
des siens, des suites d’un cancer
fulgurant. Né le 6 août 1945 à Ra-
bat (Maroc), dans un milieu,
comme on dit, modeste, il avait
78 ans. C’est à Alger, en 1962, qu’il
devient contrebassiste.
A 17 ans, étudiant à Lille, il fré-
quente la mouvance anarcho-
communiste. Il codirige le ciné-
club de l’Union nationale des
étudiants de France avec Michèle-
Annie Mercier. Ensemble, ils réali-
sent, en 1968, leur premier court-
métrage, Flash Parc, indirecte-
ment produit par Jean-Luc Go-
dard et sélectionné à la Quinzaine
des réalisateurs au Festival de
Cannes. A cette époque, avec
Chris Marker et quelques camara-
des, il élabore un projet simple :
le cinéma comme outil de lutte et
d’expérimentation.
En 1973, Frank Cassenti réalise
son premier long-métrage, tou-
jours avec Michèle-Annie Mercier,
Salut, voleurs ! (avec Jacques Hige-
lin, Jean-Luc Bideau, Claude Melki
et Laszlo Szabo). L’Agression (1973),
court-métrage de fiction inspiré
du meurtre d’un travailleur im-
migré, est interdit par la censure.
Interdiction levée après une cam-
pagne de presse. Le film devient
un manifeste pour les réseaux as-
sociatifs qui luttent contre le ra-
cisme et les violences fascistes.
Avec le producteur Pascal
Aubier (Les Films de la Com-
mune), Frank Cassenti réalise L’Af-
fiche rouge (avec des comédiens
et des rescapés du groupe Manou-
chian), tourné à La Cartoucherie
de Vincennes, Prix Jean Vigo,
en 1976. Expédié par Antenne 2
à Cuba en 1978 avec Régis Debray,
Cassenti propose un reportage
vite déprogrammé par les « esthè-
tes » à la direction de la chaîne,
Jean-Pierre Elkabbach, Louis Bé-
riot et Patrick Poivre d’Arvor. La
protestation du cinéaste est pu-
bliée par Le Monde.
Prix Jean Vigo en 1976
En 1978, il signe un film épique,
La Chanson de Roland, avec Alain
Cuny, Pierre Clémenti et Laszlo
Szabo. Cassenti rencontre Pierre
Goldman, dont il veut adapter
l’autobiographie, Souvenirs obs-
curs d’un juif polonais né en France
(Seuil, 1975). Après l’assassinat de
Goldman par un commando d’ex-
trême droite, en 1979, Cassenti
réalise Aïnama, salsa pour Gold-
man, avec ses amis musiciens an-
tillais et sud-américains.
En 1981, Cassenti réalise Deuil en
vingt-quatre heures, série pour
6 AOÛT 1945 Naissance
à Rabat (Maroc)
1976 « L’Affiche rouge »
1984 « Archie Shepp.
Je suis jazz… c’est ma vie »
2002 Création du festival
Jazz à Porquerolles
(Hyères, dans le Var)
22 DÉCEMBRE 2023 Mort
à La Ciotat (Bouches-du-
Rhône)
Antenne 2 avec Richard Bohrin-
ger, adaptation du roman de Vla-
dimir Pozner qui évoque la débâ-
cle de 1940. Prix de la critique,
succès public. Avec Lettre à Michel
Petrucciani (1983) et Archie Shepp.
Je suis jazz… c’est ma vie (1984),
celle de Cassenti devient aussi le
jazz. Retour en Afrique (1993),
filmé au Sénégal et sur l’île de
Gorée, d’où partaient les esclaves,
précède la comédie musicale
Black Ballad (1990), avec les chan-
teuses Dee Dee Bridgewater ou
La Velle. Arte produit ses nom-
breux documentaires sur les figu-
res-clés du jazz, de Dizzy Gillespie
à Nina Simone, en passant par
Miles Davis et Abbey Lincoln.
Au théâtre, il met en scène Ma-
demoiselle Else, d’Arthur Schnitz-
ler, en 1990, et Novecento, d’après
Alessandro Baricco (avec Jean-
François Balmer), en 2001. Il
tourne Le Testament d’un poète
juif assassiné, d’après le roman
d’Elie Wiesel (1987, Michel Jonasz
et Philippe Léotard à l’affiche).
Avec Samuel Thiebaut, il fonde
la société de production Oléo
Films, en 2004. Pluie de docu-
mentaires sur les chants zoulou,
la musique gnawa avec Gnawa
Music. Corps et âme (2010) et La
Nuit de la possession (tourné à Es-
saouira, en 2012), toute son œuvre
toujours tournée vers « la rencon-
tre de l’autre » et la mémoire de
ses origines (le Maroc).
Œuvre immense, généreuse, qui
se condense dans le « festival des
musiciens » Jazz à Porquerolles (à
Hyères, dans le Var), qu’il crée,
en 2002, avec Aldo Romano et Ar-
chie Shepp. Programmation in-
sensée, dessinateur maison (Jacek
Wozniak), festival aussi déter-
miné que festif, tout à son image.
Cassenti y promenait sa sil-
houette élégante, sa classe de bas-
siste infatigablement actif, cet air
de ne jamais s’en faire, et ce léger
sourire de vraie modestie.
La chaîne TV5 Monde annonce la
rediffusion de L’Affiche rouge en
février 2024, lors du transfert au
Panthéon de Missak Manouchian.
Frank Cassenti était content que
son film existe encore. Tout n’est
pas perdu. C’est si drôle, un révolu-
tionnaire rassurant. p
francis marmande
Le Carnet
Vous pouvez nous faire parvenir
vos textes soit par e-mail :
carnet@mpublicite.fr
(en précisant impérativement
votre numéro de téléphone et
votre éventuel numéro d’abonné
ou de membre de la SDL)
soit sur le site :
https://carnet.lemonde.fr
L’équipe du Carnet reviendra vers
vous dans les meilleurs délais
pour vous confirmer la parution.
carnet@mpublicite.fr
https://carnet.lemonde.fr
AU CARNET DU «MONDE»
Décès
Sidi Bel Abbes (Algérie).
Franconville (Val-d’Oise).
Mme Christine Adida, née Mast,
son épouse,
Karine et Serge,
ses enfants
et leurs conjoints, David et Mathilde,
Esther, Elsa et Pauline,
ses petits-enfants,
Mme Micheline Hery, née Adida,
sa sœur,
ont la douleur de faire part du décès
de
Jean-Michel ADIDA,
né le 4 juin 1942,
survenu le 21 décembre 2023,
à Rueil-Malmaison,
à l’âge de quatre-vingt-un ans,
Les obsèques auront lieu le mercredi
27 décembre, à 15 heures, au nouveau
cimetière de Franconville.
Ni leurs ni couronnes.
Paris.
Marie-France Fabre-Baudry,
son épouse,
Frédéric Baudry,
son ils
et son épouse, Lisa,
Jamie, Ewan et Lewis,
ses petit-ils,
leur grand-mère, Nadia Gragnano,
Les familles Montanari, Marteau
et Esteve,
ont la douleur de faire part du décès
de
Henri-Georges BAUDRY,
ingénieur général
de l’Aviation civile,
ancien directeur
de la navigation aérienne,
chevalier de la Légion d’honneur,
survenu dans sa quatre-vingt-unième
année, le 17 décembre 2023, à la suite
d’une longue maladie.
Les obsèques auront lieu le jeudi
4 janvier 2024, à 10 h 30, au
crématorium du cimetière du Père-
Lachaise, Paris 20e
Ni leurs ni couronnes. Possibilité
de dons au Secours Populaire.
mfrancefabreb@gmail.com
Thomas et Marie,
son ils et sa ille,
Manon, Marine et Chloé,
ses petites-illes,
Elisabeth, Nicolas et Vincent,
sa sœur et ses frères,
Ses neveux et nièces,
ont la grande tristesse de faire part
du décès de
Dominique BINET,
artiste plasticienne et auteure,
survenu le 11 décembre 2023,
à l’âge de soixante-dix-neuf ans.
nicolas.binet.db@gmail.com
Caen (Calvados).
Emmanuel, Anne, Jean et Cécile
Brunet
ses enfants,
et leurs conjoints,
ont la tristesse d’annoncer le décès
de
Pierre BRUNET,
professeur émérite
de géographie rurale
à l’université de Caen,
survenu le 19 décembre 2023,
à l’âge de cent ans.
La cérémonie religieuse sera
célébrée ce 27 décembre, à 14 heures,
en l’église Saint-Jean, à Caen.
e.brunet49@orange.fr
Couze-et-Saint-Front (Dordogne).
Joinville-le-Pont (Val-de-Marne).
Mmes Caroline Carvalho Moutinho,
Cécile Carlo et Marie Goube,
ses enfants
et leurs conjoints, Carlos, Christophe
et Denis,
Victor, Clara, Jules, Lise, Capucine,
Gaspard et Quentin,
ses petits-enfants,
ont la douleur de faire part du décès
de
M. Bernard CLOSSE,
survenu le 22 décembre 2023,
à Joinville-le-Pont,
à l’âge de soixante-quinze ans.
La cérémonie d’adieu aura lieu le
27 décembre, à 13 h 30, au crématorium
de Champigny-sur-Marne.
Ni leurs ni couronnes. Merci de
les remplacer par un don au proit de
l’association France Alzheimer.
Lyon 5e.
Christian Collombel,
son époux,
Philippe Collombel,
ses enfants, Octave, Daphné, Elvire,
et sa compagne, Emmanuelle Barré,
Françoise Collombel
et ses enfants, Enguerrand, Maxence
et Léonard,
Christine Collombel
et ses enfants, Arthur et Sacha,
Paul Gotteland
et sa ille, Lucy,
Gérard et Claude Collombel,
ont la tristesse de faire part du décès
de
Marie Josèphe COLLOMBEL,
née LAUTISSIER,
ancien interne en Pharmacie
des Hôpitaux de Lyon,
pharmacien biologiste,
survenu à Lyon, le 20 décembre 2023,
dans sa quatre-vingt-onzième année.
La cérémonie religieuse aura lieu
en l’église Saint-Irénée, Lyon 5 e, ce
mercredi 27 décembre, à 9 h 30,
suivie de l’inhumation au cimetière
de Couzon-au-Mont-d’Or.
Cet avis tient lieu de faire-part et
de remerciements.
34, rue de Trion,
69005 Lyon.
Marie FIATTE
(Nancy 1928 - 2023).
La cérémonie religieuse sera célébrée
le jeudi 28 décembre, à 10 heures, en
l’église Saint-Léon, à Nancy.
De la part de
Etienne Fiatte et Isabelle Séguéla,
Elisabeth et Thierry Poyeton, Jean-
Nicolas Fiatte et Sylvie Dugourd,
Dominique et Stéphanie Fiatte,
Anne-Françoise Fiatte et Benoit
Gaume,
ses enfants et leurs conjoints,
Camille, Antoine, Thibaut, Louis,
Ségolène, Lola, Iris, Frédéric, Marie-
Liesse, Béatrice, Joséphine, Maximilien,
Grégoire, Clémence, Héloïse et Raphaël,
ses petits-enfants,
Charlotte, Laetitia, et Elias,
ses arrière-petits-enfants
Et de toute la famille.
Pompes funèbres Guidon,
54000 Nancy.
Tél. : 03 83 30 07 93.
Mme Dominique Hazard,
née Odile Bouteloup,
son épouse,
Mlle Christine Hazard,
sa ille,
Mme Patrice Hazard, Mlle Marie-
Claire Hazard, Mme Jean-Paul Hazard,
M. Jérôme Hazard,
ses frère, sœur et belles-sœurs,
Ses nombreux neveux et nièces,
ont la tristesse de faire part du décès
de
M. Dominique HAZARD,
docteur ès sciences économiques,
ancien président de chambre
au tribunal de commerce de Paris,
survenu le 20 décembre 2023, dans
sa quatre-vingt-quatorzième année.
La cérémonie religieuse aura lieu
ce mercredi 27 décembre, à 10 h 30,
en l’église Saint-Pierre de Neuilly-
sur-Seine.
L’inhumation aura lieu le vendredi
29 décembre, à 11 heures, dans le
caveau familial de Lacoste (Hérault).
Audierne, Mahalon (Finistère).
Nous avons la tristesse de faire
part du décès de
M. Michel IATCA,
amoureux de la Bretagne et des arts,
homme de presse,
survenu à l’âge de quatre-vingt-
quinze ans.
L’inhumation a eu lieu au
cimetière de Mahalon le mardi
26 décembre 2023.
De la part de
Anne, Natacha, Tristan,
ses enfants
Et toute la famille.
Cet avis tient lieu de faire-part et
de remerciements.
Castrec marbrerie pompes funèbres.
29100 Douarnenez.
Tél. : 02 98 92 05 85.
Bernard Lagneau,
son époux,
Fanny et Flora,
ses illes,
Louisa, Pauline, Victor et Hélène,
ses petits-enfants
Et toute sa famille,
ont la tristesse de faire part du décès
de
Danielle LAGNEAU,
survenu le 20 décembre 2023,
à l’âge de quatre-vingt-six ans.
L’inhumation aura lieu le mercredi
27 décembre, à 15 h 30, au cimetière
de Luc-en-Diois (Drôme).
Dolorès Lancha (†),
Charles et Andrée Lancha
et leur ille, Catherine,
Hélène et Albert Roustan (†),
leurs enfants, Ollivier et Christine,
Frédéric et Myriam, Jérôme et Aurélie,
leurs petits-enfants
et leur arrière-petite-ille,
Sa famille,
Ses collègues
Et amis
en France et en péninsule ibérique,
ont la tristesse de faire part du décès
de
Jeannine LANCHA,
ancienne élève de l’ENS
(Sèvres 1963),
ancien membre
de la section scientiique
de la Casa de Velázquez,
maître de conférences honoraire
à l’Université,
survenu le 15 décembre 2023,
à l’âge de quatre-vingt-un ans.
Un recueillement aura lieu ce
mercredi 27 décembre, à 14 h 30, en
la chambre mortuaire de l’hôpital
Tenon, 3, rue Belgrand, Paris 20e,
suivi d’une cérémonie au crématorium
du cimetière du Père-Lachaise, 71, rue
des Rondeaux, Paris 20e, dans l’intimité
familiale.
La dispersion des cendres se
déroulera le jeudi 11 janvier 2024, à
14 h 30, au jardin du souvenir du
cimetière du Père-Lachaise.
Ni fleurs ni couronnes, dons
bienvenus en faveur de l’association
SOS Villages d’enfants.
Jean-Marc et Brigitte,
Marianne et Philippe,
Matthieu et Caroline,
ses enfants, ses belles-illes et son
gendre,
Marine, Solène, Amandine, Inès,
Romane, Louise,
ses petites-illes,
Jean-Pierre, Françoise, Bernadette,
Christian et Marie-Chantal, Geneviève,
ses beaux-frères et belles-sœur,
Ses neveux et nièces,
ont le chagrin de faire part du décès
de
Mme Claude LAUGIER,
survenu à Vannes,
le 23 décembre 2023.
Elle est partie rejoindre, à l’âge de
quatre-vingt-un ans, son époux,
Yves POURÉ,
décédé le 18 décembre dernier.
En paix, ils reposeront côte à côte, à
Arzon, commune qu’ils aimaient tant.
Les obsèques auront lieu le jeudi
28 décembre, à 11 heures, en l’église
de Brillac, à Sarzeau, suivies de
l’inhumation au cimetière du Clos
Fardel, à Arzon.
Condoléances sur
www.pf-de-rhuys.com
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
Les membres du conseil
d’administration des Arts décoratifs
Et l’ensemble des équipes,
ont la tristesse de faire part du décès
de
M. Claude MISEREY,
président de l’Union française
des arts du costume,
survenu le 19 décembre 2023, à Paris,
à l’âge de quatre-vingt-treize ans.
Les obsèques se dérouleront dans
l’intimité familiale.
Claude Miserey a œuvré sans
relâche et avec un total dévouement
pour la préservation et la valorisation
de collections mode et textile
exceptionnelles qui sont régulièrement
présentées dans les expositions du
musée des arts décoratifs.
Fréderic, Nicolas et Joseph
Trolonge,
ses ils,
Rémi et Victor,
ses petits-enfants,
ont la tristesse de faire part du décès
de
M. Jean-Paul TROLONGE,
survenu le 18 décembre 2023.
La cérémonie funéraire aura lieu au
crématorium de Mérignac (Gironde),
le 3 janvier 2024, à 11 heures.
Remerciements
Ses ils,
Ses petites-illes,
ont été très touchés des marques
de sympathie qui leur ont été
témoignées lors des obsèques de
Maryse DOLE
(1945 - 23 novembre 2023)
et remercient toutes celles et ceux
qui ont exprimé leur soutien, en
présence, à distance par des mots,
leurs, pensées ou intentions.
Anniversaire de décès
Il y a un an, le 26 décembre 2022,
Marie-Thérèse SINDZINGRE,
née GASPARD,
était rappelée à Dieu.
La tristesse demeure immense.
Merci à celles et ceux qui l’ont
connue et aimée d’avoir une pensée
pour elle.
Mémoire
Jean MAGNOL
(1926-2020),
CNAM,
métallurgie.
Un cœur généreux.
Concert
L’Association A4
organise un concert caritatif,
pour recueillir des fonds
ain de permettre la détection
précoce chez les bébés
présentant des troubles du spectre
de l’autisme, dès la crèche.
Inscrivez-vous vite !
Le 12 janvier 2024, à 20 h 30,
salle Cortot, 78, rue Cardinet, Paris 17e,
avec Clémence Guerrand,
pianiste internationale.
Pour réserver sa place (42 €)
https://a4-autisme.fr
06 60 19 68 52.
Société éditrice du « Monde » SA
Président du directoire, directeur de la publication
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publication, membre du directoire Jérôme Fenoglio
Directrice de la rédaction Caroline Monnot
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Emilie Conte
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Conseil de surveillance Aline Sylla-Walbaum,
présidente, Gilles Paris, vice-président
 | 19
CULTURE
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023

pppp CHEF-D'ŒUVRE pppv À NE PAS MANQUER ppvv À VOIR pvvv POURQUOI PAS vvvv ON PEUT ÉVITER

Lisa Nyarko, dans « Vermines », de Sébastien Vanicek. TANDEM FILMS

« Je me suis heurté à goût pour le genre fantastique

ou pour l’horreur ?
« Il y a un

beaucoup de portes fermées »

Pas tellement. Je ne suis pas très parallèle entre
influencé par le cinéma d’hor-
reur. J’aime travailler l’image et le
les conditions de
son. La notion de cinéma de genre vie des araignées
est biaisée. Je pourrais filmer un
couple en train de s’engueuler
et la façon
dans une salle de bains et on dira dont est traitée
Jeune réalisateur et banlieusard, Sébastien Vanicek revient que c’est du cinéma de genre
parce que je vais le faire d’une cer-
la “vermine”
sur la genèse de « Vermines », son premier long-métrage taine manière. Je n’ai jamais fait
de courts-métrages d’horreur, par
de banlieue »
exemple, et je considère Vermines
comme un survival [film construit Y a-t-il a une dimension
autour de personnages qui cher- politique dans votre film ?
ENTRETIEN de faciès qui m’a accompagné.
Comme si, en raison de mes origi-
« Je voulais dans l’alimentaire ou profiter
d’une année d’intermittence of-
chent à échapper à une situation
dangereuse] plutôt que comme
Il y a un parallèle entre les condi-
tions de vie des araignées et des

R
encontre avec le réalisa-
teur et scénariste Sébas-
tien Vanicek, qui, après
plusieurs courts-métra-
ges, sort en salle son premier
long, l’histoire d’un immeuble in-
festé d’araignées venimeuses.
D’où est venue l’idée
de « Vermines » ?
Je voulais faire un film fun, un
pur divertissement. Un roller
coaster où les gens en auraient
pour leur argent. Mais je voulais
aussi faire un film qui parle de
moi. De la frustration d’un jeune
banlieusard qui veut faire du ci-
néma, qui s’est heurté à beaucoup
de portes fermées, que ce soit
pour des financements publics ou
privés. Parler d’une sorte de délit
Un divertissement à émanation sociale et politique
nes, on ne pouvait pas me confier
un tel projet. Et encore, j’ai de la
chance, je suis blanc et hétéro, j’ai
des potes pour qui c’est beaucoup
plus dur que ça. Je voulais faire un
film qui parle de ça sans sombrer
dans le misérabilisme.
Quelle a été votre formation ?
J’ai fait des courts-métrages en
pagaille. Très tôt, j’ai découvert
qu’on pouvait faire des choses
avec un caméscope, un peu de
son, un peu d’image, pour procu-
rer des sensations et des émo-
tions aux gens. Je suis autodi-
dacte. On m’a conseillé de faire
une fac de cinéma. Je me suis ins-
crit et j’en suis parti très vite. On
m’a conseillé ensuite de faire une
école de cinéma. J’ai dû emprun-
parler d’une
sorte de délit
de faciès qui
m’a accompagné.
Et encore, j’ai de
la chance, je suis
blanc et hétéro »
ter de l’argent et, là encore, je me
suis ennuyé et je n’ai rien appris.
J’ai continué de faire des courts-
métrages avec une bande de po-
tes tout en travaillant dans un su-
permarché. Les films ont été de
plus en plus importants. A la sor-
tie du confinement, j’avais le
choix entre retourner bosser
ferte par l’Etat pour revenir à mes
courts-métrages.
Comment le projet s’est-il
monté ?
J’ai eu la chance de rencontrer à
la fois le producteur Harry Tordj-
man, qui avait repéré un de mes
courts dans un festival, et la plate-
forme Netflix. Le premier a com-
pris ce que je voulais faire artisti-
quement. Il est allé voir Netflix en
pensant que cela pourrait faire un
bon film de plate-forme. Après
avoir lu la première version du
scénario, ils ont dit qu’ils aime-
raient que Vermines sorte en salle.
Cela a été de l’ordre du miracle.
Vos premiers courts-métrages
témoignaient-ils déjà d’un
un film d’horreur. J’ai voulu faire
rire, émouvoir, frissonner.
Quelles ont été vos influences ?
Je manque d’éducation en ma-
tière de cinéma. Je préfère faire
des films qu’en voir. Je manque
de curiosité. Je me sens mieux
sur un plateau que dans une
salle. J’ai certes voulu sortir du
côté nanar des films avec des
araignées, mais cela a été surtout
une question d’instinct. Il fallait
expliquer l’évolution des arai-
gnées tout en se préoccupant
surtout de personnages qui de-
vaient tout faire pour s’en sortir.
J’avais bien aimé la tension qu’il y
avait dans le film de Jeremy Saul-
nier, Green Room, avec ce groupe
de rockeurs enfermés.
insectes, enfermés dans des aqua-
riums, et la manière dont est
traitée la « vermine » de banlieue.
« Il faut ouvrir les boîtes », dit un
des personnages. C’est la seule fa-
çon de s’en sortir. Enfermer les
gens engendre des problèmes liés
à la survie, à l’agression, à l’exis-
tence de prédateurs et de proies, à
l’absence de dialogue, à l’impossi-
bilité d’une communication en-
tre la police et la jeunesse.
Comment avez-vous utilisé les
effets spéciaux numériques ?
Je n’avais ni l’envie ni les moyens
de faire un film 100 % numérique.
La moitié des plans sont faits avec
de vraies araignées. Il y en avait un
peu plus de deux cents sur le pla-
teau ! Pour les plans impossibles à
réaliser avec les vraies, on les a
scannées en 3D et reproduit et dé-
multiplié les mouvements pour
obtenir quelque chose de réaliste.

VERMINES
ppvv
Reptiles, amphibiens et arachnides…
Dans sa chambre, Kaleb, 30 ans, héberge
toutes sortes de petits animaux exoti-
ques, dans une dizaine de vivariums
chauffés à la lumière artificielle. Un soir,
de retour de l’épicerie Ali Express, où il
pense avoir fait une bonne affaire, il rap-
porte dans un Tupperware une araignée,
si belle qu’il la surnomme « Rihanna ».
Sous les sunlights des tropiques de
Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), il la
transvase délicatement dans une boîte à
chaussures, où il lui fait un petit nid
douillet pour la nuit. Mais, le lendemain,
la diva s’est échappée, a fait une victime
et s’est mise à procréer. Alors que des
spécimens venimeux ont envahi l’im-
meuble, Kaleb (Théo Christine, formida-
ble en coupable innocent) et sa bande
vont devoir se battre pour survivre.
On pense à Tarantula (1955), de Jack Ar-
nold, à Arachnophobie (1990), de Frank
Marshall, à Starship Troopers (1997), de
Paul Verhoeven, à la différence près que
Sébastien Vanicek, qui signe ici son pre-
mier long-métrage, ne recourt pas aux
mygales velues ni aux veuves noires glo-
buleuses. Dans Vermines, les araignées
sont si petites qu’elles se glissent par tous
les trous et font penser aux légères créa-
tures à pattes allongées qui grimpent sur
les murs de nos maisons. Voilà la marque
d’un cinéaste, dont la sûreté du trait ne
cède pas à une surenchère d’effets spé-
ciaux mais joue sur quelque chose de
plus invisible, au service d’un divertisse-
ment à émanation sociale et politique.
Agonie d’une cité
Avec la modestie d’une série B et la préci-
sion d’un maître d’œuvre, Sébastien Va-
nicek soigne les entrées et les sorties de
champ de ses arthropodes, nous plonge
la tête dedans, joue sur un montage
agressif, brusque sa palette chromatique
et marie tout cela à une partition de vio-
lons désaccordés pour raconter le mou-
vement grouillant, rampant, insaisissa-
ble, de la vermine. Offrant le plaisir du ré-
cit à suspense et du sursaut d’effroi, il
tient le cap esthétique de la décomposi-
tion, terrain sur lequel les bestioles sont
toujours plus fertiles.
Sous l’assaut arachnéen, nous assis-
tons bel et bien à l’agonie d’une cité où
les habitants ont été enfermés, condam-
nés à vivre sans électricité, dans le noir,
ce qui a pour effet d’énerver les arai-
gnées. Du corps biologique au corps po-
litique, le film raconte la peur de voir la
« vermine » contaminer la société en-
tière, le fantasme de la propreté urbaine,
avec cette idée d’un monde sans parasite
qui conduit à des politiques dangereu-
ses. Ce n’est pas sans rappeler les propos,
tenus en juin 2005, par Nicolas Sarkozy,
alors ministre de l’intérieur, annonçant
vouloir « nettoyer au Kärcher » la cité des
4 000, à La Courneuve (Seine-Saint-De-
nis), après l’assassinat d’un garçon de
11 ans. Toutefois, le film est assez fin
pour ne pas asséner de discours antiflics,
au profit de questions plus fécondes.
Tenue de bout en bout, l’allégorie se lit
dans l’effacement progressif de la cité,
dont on discerne de moins en moins les
espaces, rendus à des salles vides, quel-
ques marches, un parking, des lumiè-
res… L’impression de traverser un nuage
de brouillard est compensée par la préci-
sion de la direction d’acteurs, qui évo-
luent dans un décor de science-fiction :
un des deux immeubles cylindriques
des Arènes de Picasso, à Noisy-le-Grand.
Ces « camemberts » de l’architecte russo-
espagnol Manuel Nuñez Yanowsky,
inaugurés en 1985 et où le cinéaste a
grandi, font ici office de toiles d’araignée
géantes, qui confèrent à la cité sa part
fantasmatique.
Il faut ajouter qu’on a rarement vu un
film d’horreur qui carbure autant à la
tendresse… même vis-à-vis des bestioles
et de tout ce qu’on appelle, avec dégoût
et méconnaissance, la vermine. C’est là
tout le sel du film. p
maroussia dubreuil
Film français de Sébastien Vanicek.
Avec Théo Christine, Lisa Nyarko,
Jérôme Niel, Finnegan Oldfield (1 h 45).
Comment s’est déroulé le
tournage avec des araignées ?
Ce sont des Heteropoda maxima
qui viennent d’Amérique du Sud.
Je voulais dénoncer le trafic d’ani-
maux exotiques, et tout devait
donc se passer dans les règles, en
termes de voyage et de conditions
de vie. On a été aidés par Karim
Daoues, le président et fondateur
de La Ferme tropicale, qui est un
endroit où l’on trouve toutes sor-
tes d’espèces et qui récupère les
animaux exotiques victimes de
trafic. Le tournage s’est bien
passé. Les acteurs qui devaient in-
teragir avec elles, comme Finne-
gan Oldfield, n’ont rencontré
aucun problème. Ce sont surtout
les deux actrices, Sofia Lesaffre et
Lisa Nyarko, qui étaient terrifiées.
Je leur ai demandé de se servir de
cette peur. Petit à petit, tout le
monde s’est habitué. p
propos recueillis par
jean-françois rauger
20 | culture
L’âge d’or des frères Farrelly
Aussi burlesque qu’irrévérencieux, « Mary à tout prix », qui révéla au
grand public Cameron Diaz et Ben Stiller, n’a rien perdu de sa drôlerie
REPRISE
Q
ui se souvient encore
des frères Peter et
Bobby Farrelly ? Plus
de gens, sans doute,
que cette question
semble le suggérer. Ils se seront
toutefois consumés si vite :
une petite poignée de
chefs-d’œuvre, avant une lente et
cruelle descente aux enfers, et
possiblement l’indifférence à leur
sort d’une nouvelle génération
biberonnée à un humour super-
héroïque en béton.
Ces films – nommons Dumb
& Dumber (1994), Mary à tout prix
(1998), Fous d’Irène (2000), Osmo-
sis Jones (2001) et Deux en un
(2003) – ont néanmoins suffi à
inscrire leur génie au firmament
de la comédie régressive améri-
caine, dans une grande chaîne qui
conjoint les burlesques, les Marx
Brothers, Jerry Lewis et, in fine,
l’école prolifique emmenée, au
début des années 2000, par le
producteur, scénariste et réalisa-
teur Judd Apatow.
Mary à tout prix, qui ressort
aujourd’hui en salle, est une paro-
die de comédie romantique qui
révéla au grand public ses deux
acteurs principaux, Cameron
Diaz et Ben Stiller. Elle dans le rôle
de Mary, grande fille saine et dési-
rable, qu’une brochette de mâles
cauteleux se disputent. Lui dans
celui de Ted, garçon timide et gaf-
Destin croisé d’un chien et d’une créature de fer
Le film d’animation de Pablo Berger séduit par son charme désuet et ses lignes simples
MON ALI ROBOT
ppvv
P ablo Berger aime le goût
du risque. Et, par consé-
quent, ne se refuse rien.
Après deux comédies (Torremoli-
nos 73, en 2003 ; Abracadabra,
en 2018) et une Blanche-Neige en
version muette, noir et blanc, ser-
vie sur les terres brûlantes de l’An-
dalousie préfranquiste (Blanca-
nieves, 2012), voilà le cinéaste es-
pagnol de retour au cinéma avec,
cette fois, un film d’animation.
Genre auquel, à 60 ans, il s’essaye
pour la première fois en adaptant
la bande dessinée américaine Ro-
bot Dreams, de Sara Varon (Paper-
back, 2007, non traduit).
L’incursion sur ce terrain inex-
ploré lui réussit, l’essai est trans-
formé. Sitôt achevé, Mon ami Ro-
feur tombé éperdument amou-
reux d’elle. Un prologue d’antho-
logie, situé une quinzaine d’an-
nées avant l’époque contempo-
raine du film, ouvre la narration.
Il donne une mesure idéale de
son incorrection politique et de
son joyeux funambulisme, qui
associe les violons du roman-
tisme à la trivialité la plus crasse.
Complot phallocratique
On est en 1985, au lycée. Ted vient
de gagner les faveurs de Mary, en
défendant le frère handicapé
mental de la jeune fille contre la
brutalité de son fiancé du mo-
ment, un joueur de football dont
le cerveau est aux abonnés ab-
sents. Par reconnaissance, elle
choisit Ted comme partenaire du
bal de fin d’année. Il vient la cher-
cher chez elle, se fait agresser par
le beau-père noir de Mary, un sadi-
que de bas étage, puis par le frère
de Mary, qui pète un câble pour
une raison vague. Réfugié aux
toilettes, il se coince sérieuse-
ment l’engin dans une braguette
trop nerveusement remontée, ses
contorsions donnant l’impres-
sion à la mère de sa potentielle
fiancée qu’il s’y masturbe. La sé-
quence se termine sur l’ambu-
lance des urgences qui le sous-
trait, sans doute sans retour, à
l’amour de sa vie.
Sauf qu’une quinzaine d’années
plus tard, Ted, toujours inconsola-
ble et célibataire, engage un dé-
bot en effet séduit. En mai, il foule
en « séance spéciale » le tapis
rouge du Festival de Cannes et re-
çoit en juin à celui d’Annecy, le
Grand Prix Contrechamps.
Fidèle au roman graphique
Charme désuet, lignes simples,
couleurs passées, dessin 2D, Mon
ami Robot apparaît néanmoins
d’emblée comme le film le plus
sage, le moins iconoclaste que Pa-
blo Berger nous ait donné à ce
jour, fidèle sur ce point à l’esprit et
au style du roman graphique de
Sara Varon. C’est dans ce cadre,
sans esbroufe, sans paroles mais
avec pas mal de malice, que l’his-
toire nous sera contée. Celle de
Dog, petit chien anthropomor-
phe s’ennuyant ferme entre les
quatre murs de son très propret
studio new-yorkais qui, un beau
Malgré
son outrance,
le film est le titre
le plus « sage » de
la haute période
des frangins
tective (Matt Dillon, en beauf de la
plus belle eau), sur les conseils
d’un ami atteint d’urticaire aigu
pour de bonnes raisons (Chris El-
liott), afin de la localiser à Miami,
où elle partage son temps entre sa
voisine (Lin Shaye), une alcooli-
que chasseuse d’hommes carbo-
nisée comme une vieille saucisse
par les UV, et son meilleur ami
(Lee Evans), un architecte hémi-
plégique qui surjoue le courage
de sa condition et qui la surpro-
tège pour des raisons bien tor-
dues. On n’en dira pas plus, his-
toire de ne pas divulgâcher l’ab-
ject complot phallocratique qui se
trame derrière ce récit, et le grand
rire décomplexé qui en accueille
les abracadabrants ressorts.
Si Mary à tout prix fut le plus
grand succès commercial des Frè-
res Farrelly, c’est peut-être parce
que, malgré son outrance, il est
le titre le plus « sage » de la haute
période des frangins. Il faut dire
qu’on part de très, très loin. Mary à
tout prix, rappelons-le, est coincé
jour, décide de se construire un
robot afin de vaincre sa solitude.
Désormais inséparables, la bête
à poils et la créature en ferraille
s’autorisent toutes les folies. A
commencer, l’été venu, par une
escapade à la plage, où pourtant
l’eau salée est loin d’être recom-
mandée pour l’ami Robot. Lequel,
après un bain enthousiaste, se re-
trouve paralysé sur le sable,
rouillé jusqu’au dernier boulon.
Ne pouvant le transporter sans
aide, Dog promet de revenir le len-
demain. Las, une somme d’événe-
ments contribuera à séparer long-
temps les deux compagnons, qui
suivront, chacun, leur chemin.
Fait de rêves et de cauchemars
pour l’un, d’épisodes plus ou
moins heureux pour l’autre.
Menés en parallèle, se croisant
parfois, les deux récits se dé-
Ted (Ben
Stiller)
et Mary
(Cameron
Diaz). LES ACACIAS
entre Dumb & Dumber et Fous
d’Irène, deux films littéralement
démentiels, dont Jim Carrey, alors
en pleine ascension, est la vedette.
Interprétant, dans le premier, un
débile courant le pays après une
belle blonde qui a oublié une mal-
lette pleine de billets à l’aéroport.
Campant dans le second un mo-
tard de la police à double person-
nalité – un dépressif post-largage
amoureux et un psychopathe pré-
nommé Hank –, censé protéger
une témoin essentielle, dont il
tombe amoureux.
Les hommes – fatras d’éclopés
érotomanes, d’Hercule bas du
front et de tordus foireux – cou-
rent donc beaucoup après les
femmes chez les Farrelly, et ja-
mais pour leur plus grande gloire.
Cette résipiscence virile avant
l’heure les autorise à se débrider
sans états d’âme sur le terrain de
la concupiscence et de la crudité
sexuelle comme sur celui de la
sacro-sainte diversité, traitée avec
la plus irrespectueuse et donc la
plus aimable des décontractions.
On se demande si la moitié du
quart de ce qu’ils ont tenté à cette
époque qui n’est pourtant pas
si lointaine ne les exposerait pas
au lynchage aujourd’hui. p
jacques mandelbaum
Film américain de Peter
et Bobby Farrelly. Avec Cameron
Diaz, Ben Stiller, Matt Dillon,
Lee Evans, (1998, 2 heures).
ploient avec tranquillité, donnant
parfois le sentiment qu’une cer-
taine routine s’installe. En réalité,
Mon ami Robot agit sur une route
semée d’embûches, de rendez-
vous manqués, de tendres rebon-
dissements et de déceptions sur
laquelle Pablo Berger n’a pas omis
de poser son empreinte à travers
de multiples références, littéraires,
musicales, cinématographiques.
Mon ami Robot traîne ainsi dans
son sillage Yoyo (1965), de Pierre
Etaix, Le Magicien d’Oz (1939), de
Victor Fleming et King Vidor, Shi-
ning (1980), de Stanley Kubrick.
Une parade qui réenchante le des-
sin un brin suranné du film et, au
passage, ranime l’amitié. p
véronique cauhapé
Film d’animation espagnol et
français de Pablo Berger (1 h 42).
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
L’adolescence
dans le cubisme
narratif de Kore-eda
Le réalisateur nippon poursuit sa
chronique de la société japonaise
de récits qui se contredisent et
L’INNOCENCE s’enrichissent avant d’offrir une
ppvv image plus pérenne de la réalité
R évélé en France voici
trente ans avec ce qui de-
meure ses deux plus
beaux films, les fantomaux
Maborosi (1995) et After Life
que nous dévoile le film.
Ce cubisme narratif fait ainsi ap-
paraître par emboîtements suc-
cessifs – et à partir de la suspicion
de violence frappant un des ensei-
(1998), le Japonais Hirokazu Kore- gnants de Minato – le point de vue
eda amorce par la suite un double de la mère, celui de l’enseignant et
mouvement qui infléchit son celui du jeune garçon. Le premier
œuvre vers le réalisme mélodra- stigmatise la langue de bois du
matique en même temps qu’elle corps enseignant et la violence
devient un objet d’élection can- que recouvre, pour la mère, la
noise qui lui vaut, à compter des fausse contrition de l’institution.
années 2000, une place de choix Le deuxième infléchit cette im-
dans la compétition locale, dont il pression en révélant un ordon-
remporte la Palme d’or en 2018 nancement des événements tel
avec Une affaire de famille. qu’il en renouvelle la significa-
Chroniques intimistes de la fa- tion. Le troisième, enfin, fait écla-
mille nippone, prédilection pour
les personnages d’enfants et
d’adolescents esseulés, critique la-
tente de la rigidité de la société ja-
ter à travers l’évocation d’une
amitié élective entre Minoto et
l’un de ses camarades, une vérité
longtemps attendue.
ponaise constituent des figures Une autre grande référence ku-
qui indiquent le nord de son rosawaienne marque ce pan du
œuvre, déroulée sous le sceau récit, celle de Dodes’kaden (1970),
d’une délicatesse et d’une distan- dans lequel un jeune adolescent
ciation qui confinent parfois à une déficient mental d’un quartier
mièvrerie parfaitement concertée. déshérité fait semblant quoti-
diennement de conduire un
Consolation ludique vieux tramway à l’abandon. C’est
Après deux voyages à l’étranger dans un wagon semblable, ma-
(La Vérité (2019) en France, Les trice rouillée transformant l’in-
Bonnes Etoiles (2022) en Corée du fortune en consolation ludique,
Sud), le retour de Kore-eda au pays que se réfugient les deux enfants
natal s’effectue sous de sembla- de ce film. L’amitié y est d’ailleurs
bles auspices. Son jeune héros, Mi- très proche de l’amour, figure
nato, est un adolescent un peu transgressive, pour le coup nou-
étrange, orphelin de père, traversé velle chez Kore-eda, encore que
de sombres pensées, qui donne du discrètement esquissée ici. La
souci à sa mère, laquelle n’arrange plus belle scène est à cet égard
rien au tableau en sacrifiant sa vie l’aveu que fait Minato à la direc-
à son bien-être. trice de l’école, aussi professeure
C’est donc d’emblée à ce double de musique, laquelle se saisit d’un
fardeau de l’enfant qu’on est tenté cor et, lui tendant un trombone,
de rapporter ces maux. On n’aura lui intime ceci : « Tout ce que tu ne
pas tort, à ceci près que le réalisa- peux pas dire, souffle-le. » p
teur brode autour de cette ligne j. ma.
centrale une mise en scène qui en
opacifie le motif, et qui fait se suc- Film japonais de Hirokazu
céder, comme dans Rashomon Kore-eda. Avec Kurokawa Soya,
(Akira Kurosawa, 1950), une suite Hiiragi Hinata (2 h 04).
pvvv POURQUOI PAS
E
5 hectares
Film français d’Emilie Deleuze (1 h 33).
N
Franck, brillant chercheur parisien et urbain depuis toujours,
I
décide de tout plaquer pour devenir agriculteur. Il embarque
A
Léo, sa compagne, dans la grande aventure néorurale. Le couple
fait l’acquisition d’un terrain de 5 hectares, au grand dam du
M
voisinage paysan. Il y avait dans le nouveau film d’Emilie De-
leuze les ferments d’une superbe comédie sociale post-Covid,
E
un peu à l’italienne, acerbe et délirante : privilège bourgeois de
S
se sentir partout chez soi, de s’installer où on veut et de s’im-
proviser paysan, au mépris des populations locales. C’est la pre-
mière piste réjouissante du film, qui s’effiloche peu à peu,
A
comme si la réalisatrice finissait par prendre (un peu trop) en
L
sympathie son héros, oubliant la lutte de classes initiale. Reste
un casting impeccable et élégant : Lambert Wilson, Marina
Hands et Laurent Poitrenaux y sont justes, au sein d’une parti-
E
tion qui aurait gagné à être plus méchante. p muriel joudet
D
Dream Scenario
Film américain de Kristoffer Borgli (1 h 41).
S
Le cinéma n’intéresserait plus Nicolas Cage, et l’acteur bientôt
soixantenaire compterait proposer ses services au petit écran.
M
En attendant, il s’illustre dans ce projet taillé pour ses allures de
L
gros matou égaré, deuxième film du norvégien Kristoffer Bor-
gli, qui s’érige autour d’une idée qu’on prend – brièvement –
I
plaisir à regarder : Paul Matthews, professeur d’université,
F
mène une vie paisible. Dans cette âme sans qualité se laisse de-
viner un cruel manque de reconnaissance. Telle une interven-
tion divine, la célébrité fond sur lui sous une drôle de forme
S
quand une foule de personnes se prennent à rêver de Paul
E
Matthews que tout le monde reconnaît dans la rue. Le film dé-
roule d’abord un séduisant dispositif, qui chasse sur les terres
R
du scénariste et réalisateur Charlie Kaufman (Dans la peau de
T
John Malkovich). Mais, rapidement, l’onirisme intello devient le
véhicule de petites observations acerbes sur tout ce qui ne
U
tourne pas rond dans nos sociétés occidentales, et le bolide scé-
A
naristique accouche d’une poignée de banalités misanthropes
et de quelques trouvailles formelles éculées. p m. jo.
S
À L’AFFICHE ÉGALEMENT
E
Kina et Yuk. Renards de la banquise
Film français, canadien et italien de Guillaume
L
Maidatchevsky (1 h 20).
Les Segpa au ski
Film français d’Ali Bougheraba (1 h 42).
Une affaire d’honneur
Film français de Vincent Perez (1 h 40).
22 |
IDÉES
Pierluigi Piovanelli
« A travers les légendes
sur Jésus, nous pouvons
discerner des éléments
sur son existence »
L’historien dresse
un état des lieux
des recherches
contemporaines sur la
question et dévoile ses
propres conclusions
ENTRETIEN
Q
ue peut-on encore apprendre
sur Jésus, ce juif de Galilée ayant
vécu il y a deux mille ans, de-
venu l’un des personnages les
plus célèbres de la planète ? Les
sources sur sa vie adulte, princi-
palement les Evangiles, ont déjà
abondamment été commentées, et nous
ne disposons d’aucun texte sur sa jeu-
nesse. Pourtant, selon Pierluigi Piovanelli,
titulaire de la chaire Origines du christia-
nisme à l’Ecole pratique des hautes études
(Paris) et auteur du Jésus des historiens. En-
tre vérité et légende (PUF, 408 pages,
24 euros), Jésus n’a pas encore dévoilé
tous ses mystères aux chercheurs.
Existe-t-il aujourd’hui un consensus
sur l’existence historique de Jésus ?
Tous les historiens sérieux s’accordent
sur l’existence d’un Jésus de Nazareth, du
nom de cette bourgade de Galilée où il
aurait grandi. Il y a d’abord l’ampleur des
témoignages : les Evangiles et les écrits
des premiers chrétiens, d’une part, mais
aussi un certain nombre de sources d’ho-
rizons différents, à l’instar de l’historien
juif Flavius Josèphe (37-100), des auteurs
latins Tacite (58-120) et Suétone (70-140),
ou même du philosophe polythéiste
syriaque Mara bar Sérapion (50- ?), qui
ont fait référence à Jésus – en tant qu’être
humain – dans leurs écrits, sans remettre
en cause son existence.
Il y a ensuite le fait qu’il soit né en Galilée
– une province totalement insignifiante –
et mort sur la croix – une mort honteuse –,
des éléments qui nous paraissent trop dé-
calés avec l’image attendue d’un « mes-
sie » pour avoir été inventés.
Nous n’avons pas de preuve matérielle,
et Jésus est au centre de nombreux récits
légendaires, écrits des années, voire des
siècles, après sa mort. Mais, à travers les
légendes, nous arrivons tout de même à
discerner en filigrane quelques éléments
sur sa véritable existence. Les historiens,
surtout ceux qui travaillent sur des pério-
des lointaines, fonctionnent par hypo-
thèses : ils cherchent les plus « économi-
ques », pèsent le pour et le contre, retien-
nent le probable et rejettent l’improbable.
Tout un réseau d’indices fait qu’il est plus
difficile de considérer que Jésus n’a pas
existé que l’inverse.
Dans votre ouvrage, vous distinguez
trois grandes « quêtes » dans l’histoire
de la recherche sur le Jésus historique.
Que recoupent-elles ?
On considère l’Allemand Hermann Sa-
muel Reimarus (1694-1768) comme le
pionnier de la première phase, même s’il
n’a pas osé publier ses écrits sur Jésus de
son vivant ; ils le seront à titre posthume,
en 1778. Il s’agit de quelques chapitres in-
tégrés à un ouvrage de défense d’une foi
rationaliste, où il essaie de démontrer
que Jésus était un personnage messiani-
que juif, avec un projet politique de res-
tauration d’Israël et d’opposition aux Ro-
mains. Ses disciples, déçus par sa mort,
auraient continué son combat et inventé
la résurrection.
Ces propos, assez révolutionnaires pour
l’époque, ont lancé la première phase de
recherche critique sur les Evangiles. Il
s’agissait alors d’une quête d’affirmation
de la raison face aux doctrines miraculeu-
ses et aux dogmes de l’Eglise, qui a con-
cerné aussi bien l’Allemagne que les phi-
losophes des Lumières en France ou les
auteurs déistes anglais.
A la fin du XIXe siècle, cette quête aboutit
toutefois à une vision romantique de Jé-
sus, décrit comme un champion de l’éthi-
que. Adaptée aux valeurs modernes mais
dénuée de consistance historique, cette
vision va faire l’objet de vives critiques, et
jusqu’à la fin de la seconde guerre mon-
diale les études sur Jésus tombent provi-
soirement en désuétude ; du moins dans
les facultés de théologie allemandes, à la
pointe de ces critiques.
Débute alors la deuxième quête…
Les recherches sont relancées dans les
années 1950, dans le sillage des travaux
des élèves du théologien allemand Rudolf
Bultmann (1884-1976). La question qui oc-
cupe les chercheurs est désormais : com-
ment identifier ce qui est authentique, ce
qui correspond au Jésus véritable, et non à
l’image que l’on a voulu donner de lui ? On
va alors partir à la recherche de tous les
traits attribués à Jésus qui le distingue-
raient des autres courants de pensée et du
judaïsme antique. On cherche ce qui, dans
les Evangiles, rend Jésus unique et, par
conséquent, pense-t-on, authentique.
Cette vision a connu un réel écho et con-
tinue d’avoir ses partisans. Elle aboutit
pourtant à un Jésus présenté comme com-
plètement déconnecté du contexte de la
Palestine antique et, en même temps, très
consensuel, prônant l’égalité entre tous et
le souci des plus pauvres, dont on ne com-
prend pas bien pourquoi il aurait tant dé-
rangé les autorités de l’époque.
Qu’en est-il de la troisième phase,
dans laquelle vous vous inscrivez ?
Les recherches consécutives à la décou-
verte de textes comme les manuscrits de
la mer Morte (1948) et ceux de la biblio-
thèque de Nag Hammadi (1947), qui se
sont lentement mises en place dans la se-
conde moitié du XXe siècle, vont révolu-
tionner les études sur le Jésus historique.
Ces textes accroissent en effet considéra-
blement notre connaissance du contexte
intellectuel, spirituel et culturel de la Pa-
lestine de l’époque, et nous permettent
de dresser des ponts entre le judaïsme
antique et Jésus.
Depuis environ le milieu des années
1980, on se demande enfin comment Jé-
sus a pu interagir avec son milieu et com-
ment celui-ci a pu l’influencer. Pour le
dire plus simplement, on affirme et on
assume, enfin, que Jésus était juif. Cela ne
met pas un terme à tous les débats.
Certains ont pensé que Jésus était un
pharisien [groupe juif apparu au IIe siècle
avant notre ère, et qui constitue l’un des
principaux courant du judaïsme antique].
D’autres ont soutenu qu’il était proche
des esséniens [communautés ascétiques
fondées dans le désert vers le IIe siècle
avant notre ère]. Quoi qu’il en soit, petit à
petit, on a commencé à s’interroger da-
vantage sur ce que Jésus avait en com-
mun avec ses contemporains.
Vous vous intéressez pour votre
part à la mystique juive de la Merkava.
Si ce courant nous est surtout connu
par des textes des Ve et VIe siècles,
vous affirmez qu’il était déjà répandu
du temps de Jésus, et que ce dernier
en était potentiellement très impré-
gné. Sur quoi vous basez-vous ?
Dans les Evangiles (canoniques aussi
bien qu’apocryphes), Jésus apparaît
comme quelqu’un qui a réussi à établir un
contact très rapproché avec le divin. Or
qu’est-ce qu’un mystique, sinon quel-
qu’un ayant une expérience intime de la
divinité ? Examinons des passages des
Evangiles, tels ceux de l’expérience vision-
naire décrite à l’occasion du baptême de
Jésus (une voix céleste s’adresse directe-
ment à Jésus et envoie son « esprit » sur
lui), l’expérience hallucinatoire de la tenta-
tion, au terme de quarante jours de jeûne
COMMENT, DANS au désert, l’apothéose de Jésus au sommet
UNE SOCIÉTÉ AUSSI d’une haute montagne galiléenne (Mc 9,
2-8), l’agonie à Gethsémani ou la prière sur
CONSERVATRICE la montagne (Mc 6), à l’issue de laquelle il
aperçoit ses disciples à des centaines de
QUE CELLE mètres plus bas… Tous ces épisodes res-
semblent à des visions mystiques.
DE LA PALESTINE Or, à l’époque de Jésus, le courant mysti-
DU IER SIÈCLE, que du judaïsme est celui de la Merkava.
C’est un terme technique, issu de l’hé-
QUELQU’UN breu, qui désigne « le trône (de la divi-
nité) » et fait référence à sa contempla-
A PU ÊTRE À CE tion. Dans le schéma classique, un fidèle
POINT ADULÉ ? est « ravi au ciel » lors d’une expérience
mystique, il franchit plusieurs étapes
(souvent sept) avant d’arriver dans la
salle du trône, où il rencontre la divinité
et en ressort transformé, avec des infor-
mations inestimables.
On en retrouve des traces dès la Bible
hébraïque, lorsque les prophètes Isaïe
(Is. 6) et Ezéchiel (Ezéch. 1 et 10) ont une
vision du « trône divin ». Plus tard, dans
le Livre d’Hénoch, texte juif apocryphe re-
trouvé dans les manuscrits de la mer
Morte et remontant probablement au
IIIe siècle avant notre ère, se développe
l’idée du fidèle « kidnappé » et qui arrive,
de façon mystérieuse, dans le palais de la
divinité situé « au ciel », où il bénéficie
d’une audience en tête-à-tête.
Toute cette littérature démontre qu’il y
avait une offre mystique fournie à l’épo-
que de Jésus. A titre purement hypothéti-
que, nous pourrions donc imaginer que
Jésus ait été initié aux techniques extati-
ques de la Merkava avant le commence-
ment de ses activités publiques, soit en
Galilée, par des praticiens locaux, soit au
cours de son apprentissage auprès de Jean
le Baptiste, voire par des maîtres essé-
niens. Ce qui est, en revanche, à peu près
certain est le fait que Jésus a été l’un des
premiers grands mystiques du judaïsme.
Les expériences vécues par Jésus dans
les Evangiles restent pourtant assez
éloignées de celles qui sont décrites
dans les textes de la Merkava…
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
YANN LEGENDRE
On peut trouver un récit assez proche
dans un écrit dit « apocryphe » tardif,
l’Evangile du Sauveur, un texte copte du
IVe ou du Ve siècle. Nous pouvons y lire
que Jésus, parvenu avec les apôtres sur
une montagne, entame en leur compa-
gnie une ascension céleste qui les con-
duira jusqu’au « trône du Père ». Dans
l’Evangile de Marie, un autre texte apocry-
phe, Marie de Magdala – présentée
comme la disciple préférée de Jésus, à qui
il aurait transmis ses secrets les plus pro-
fonds – vit une ascension et se confronte
à « sept puissances », dans un récit proche
de ceux de la Merkava.
Dans les Evangiles canoniques, les élé-
ments sont plus ambigus. Jésus a des vi-
sions, vit des formes de transe, des expé-
riences qui peuvent rappeler celles de la
Merkava. Je formule donc l’hypothèse
que les récits ont pu être retravaillés et
certains éléments occultés par les pre-
miers chrétiens, qui ne voulaient surtout
pas y faire référence. Car, dans la Mer-
kava, un fidèle – que cela soit Jésus ou
n’importe quel être humain – peut appro-
cher la divinité, avant de redescendre
pour partager son savoir avec d’autres
disciples, qui pourront éventuellement
revivre le même type d’expérience. Ce
n’est pas du tout le même message que
celui qui est porté par le récit que l’on fera
plus tard sur Jésus, d’un dieu venu s’in-
carner pour quelque temps dans un hu-
main, avant de repartir au ciel.
Vous vous intéressez aussi aux débats
sociologiques sur la définition d’un
« leader charismatique ». En quoi cela
aide-t-il à comprendre Jésus ?
Si l’on prend l’ensemble de la littérature
ancienne, ce qui se dégage est que Jésus
impressionne tout le monde. Il suscite un
enthousiasme tel que certains disciples
n’ont pas hésité à tout abandonner, y
compris leur famille, pour le suivre, mais
aussi une hostilité tenace chez certains ad-
versaires. Aujourd’hui, le leader charisma-
tique est présenté en sciences sociales
comme quelqu’un qui catalyse les forces
d’un groupe et qui est porté par ce groupe.
Cette grille de lecture m’a amené à me
poser la question de savoir comment,
dans une société aussi conservatrice que
celle de la Palestine du Ier siècle, quel-
qu’un a pu être à ce point adulé et déve-
lopper une aussi grande confiance en son
message, se montrant capable de tenir
tête aux autorités – religieuses comme
politiques – et de s’adresser aux gens en
prétendant les connaître intimement, in-
térieurement. C’est cette question qui
m’a conduit à m’intéresser à la mystique
et aux visions de la Merkava, lesquelles
ont pu lui donner une telle confiance. p
propos recueillis par
gaétan supertino
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 idées | 23

Hugues Bersini ChatGPT

comprend beaucoup plus
que nous ne le prétendons
Le chercheur alerte sur l’incompréhensible fossé qui se creuse

N
oam Chomsky, vénérable pion-
nier de l’intelligence artificielle
(IA) et plus précisément de la
linguistique computationnelle,
s’efforce, à longueur de vidéos YouTube
récentes, de dénoncer une forme de dé-
mission scientifique devant les perfor-
mances extraordinaires qu’il reconnaît
du logiciel ChatGPT. Si Geoffrey Hinton,
Prix Turing 2019, a signé le moratoire
plaidant une décélération, sinon un ar-
rêt brutal des développements en IA,
c’est que, lui aussi, de tout temps évan-
géliste des réseaux de neurones à l’ori-
gine de ChatGPT, se trouve abasourdi
devant la capacité de ce même logiciel à
réaliser des tâches d’une très grande
exigence intellectuelle, nonobstant un
apprentissage qui, a priori, ne le prédes-
tine en rien à cela.
Pour M. Hinton, il ne fait aucun doute
que ChatGPT comprend beaucoup plus
que nous ne le prétendons dans les
médias. Pourtant, pendant sa phase
d’entraînement, ce logiciel était censé
apprendre simplement à prédire le pro-
chain mot d’une phrase, et pour l’essen-
tiel à partir d’une quantité gigantesque
de textes qu’on lui présente. En tant
qu’humains, nous n’avons pas appris la
logique, l’arithmétique ni le codage in-
formatique en complétant des textes
donnés en exemples, alors pourquoi
et comment lui y parvient ? Le mystère
est à son comble.
entre la manière dont cette technologie est mise en œuvre
et les performances ou les usages dont elle est capable
mantiques. Et ce grâce aux progrès réali- arithmétiques contenues dans les textes
sés par la puissance de calcul en pétaoc- dont on l’a abreuvé ? Comment fait-il
tets, qui équivaut à un milliard de livres pour générer les bons codes informati-
et de données stockées. ques, contenant les bonnes variables et
On ne peut que s’étonner de ce retour instructions, adaptés à tout problème
en force des voies neuronales d’origine nouveau exprimé en langage courant,
de l’IA, incarnation indispensable que qu’on lui demande de résoudre ?
revendiquait déjà toute une génération Générer du texte syntaxiquement cor-
de chercheurs dans les années 1950. Il rect et riche de sens exige de notre part
s’agit de la revanche du biologique sur le un certain type d’abstraction cognitive.
cognitif, mais aussi d’un incroyable pas Résoudre des opérations arithmétiques
de côté de toute la tradition rationnelle, ou des problèmes mathématiques d’une
symbolique et surtout intelligible, qui certaine complexité demande un autre
semblait, par introspection et imitation, type d’abstraction cognitive. Produire
la voie royale de l’intelligence logicielle. des logiciels syntaxiquement corrects et
Comment fait ChatGPT, par exemple, s’exécutant correctement demande en-
pour induire les règles générales de core un troisième type d’abstraction co-
l’arithmétique, au départ de la simple gnitive. D’ailleurs, les programmes infor-
présentation des multiples opérations matiques dévolus spécifiquement à ces
tâches s’avéraient jusqu’à aujourd’hui de
nature très différente. Comment procède
ChatGPT pour, dans ses milliards de con-
nexions synaptiques, maîtriser toutes ces
abstractions cognitives, passer de l’une à
l’autre sans difficulté aucune, et cela dans
IL DEVIENT toutes les langues ? Interrogeons-le.
Il semble nous mener en bateau : « En
INAPPROPRIÉ tant qu’intelligence artificielle, je n’ai pas
partager les détails spécifiques de la façon
dont je fonctionne ou des algorithmes
que j’utilise pour résoudre des problèmes
mathématiques. En tant qu’intelligence
artificielle, ma capacité à résoudre des
problèmes mathématiques est basée sur
des modèles de texte que j’ai appris lors de
ma formation. » Tu ne nous aides vrai-
ment pas, ChatGPT !
Car c’est bien ce fossé épistémologique
béant qui s’est creusé, entre la manière
dont cette technologie est mise en
œuvre et les performances et les usages
dont elle est capable, qui s’avère le plus
déroutant. Jamais, dans l’histoire des
sciences et des technologies, ce type de
fossé ne fut d’une telle ampleur.
Un raisonnement incompréhensible
Les scientifiques comprenaient la na-
ture et le fonctionnement de l’électri-
cité, ainsi que la nature, la structure et le
pouvoir de certaines des molécules, au
départ de leur exploitation et de la mul-
titude des usages qu’on en fit par la
suite. Même la mystérieuse mécanique
quantique ne surprend pas le scientifi-
que quand elle est à l’œuvre dans les
conversationnel dans certains calculs
décimaux d’une grande précision.
Il devient inapproprié, même inconve-
nant, de s’obstiner à dire, comme on le lit
trop souvent, que ChatGPT est incapable
de raisonnement. Reconnaissons-le, il
comprend et raisonne mais, malheureu-
sement, d’où la naissance du malaise,
d’une manière qui nous est, à nous, de-
venue parfaitement incompréhensible.
Comment un prédicteur statistique du
mot qui suit dans une phrase peut-il se
retrouver à résoudre des problèmes logi-
ques, mathématiques et informatiques
d’une telle complexité ?
De surcroît, vexation ultime, il suffit
de lui soumettre les problèmes dans un
langage familier, sans nul besoin de les
présenter et de les formater de façon
qu’ils soient compris et traités par un
logiciel adapté.
Quelque chose de magique se produit
dans ces milliards de paramètres, ces
centaines de couches neuronales, qui
s’adaptent d’eux-mêmes pour composer
ces gigantesques modèles de langage. La
démarche scientifique exige de com-
prendre cette incroyable prouesse. Mais
qui sera le magicien apte à nous révéler
les tours quand, en outre, des entreprises
à l’appellation trompeuse comme
OpenAI ont décidé de se murer et de
s’opacifier chaque jour davantage ? p

Triple abstraction cognitive

Au grand dam de toute une génération
de chercheurs en IA, nous assistons de-
puis une bonne vingtaine d’années à
l’extraordinaire revanche de l’IA neuro-
nale, inconsciente et apprenante, sur sa
version consciente, codée par des hu-
mains, sous forme de règles syntaxi-
ques, logiques et autres ontologies sé-
DE S’OBSTINER À DIRE, d’algorithmes dédiés spécifiquement pour
le raisonnement mathématique ou les
COMME ON LE LIT opérations arithmétiques. Ma capacité à
résoudre des problèmes mathématiques
SOUVENT, provient de ma formation sur une grande
variété de données textuelles, y compris
QUE CHATGPT des textes qui contiennent des problèmes
EST INCAPABLE mathématiques et leurs solutions. » Et si
on insiste pour qu’il nous dévoile ses se-
DE RAISONNEMENT crets : « Je suis désolé, mais je ne peux pas
semi-conducteurs ou les lasers.
Concernant le cas de ChatGPT, la situa-
tion est tout autre. Tout utilisateur
conviendra que ce logiciel fait montre
d’une capacité impressionnante à résou-
dre des problèmes de logique ou de
mathématique : arithmétique, géomé-
trie, trigonométrie… les internautes
s’écharpent quant au nombre de déci-
males correctes obtenu par l’agent
Hugues Bersini est directeur du
Laboratoire d’intelligence artificielle
de l’Université libre de Bruxelles
et membre de l’Académie royale
de Belgique. Cette tribune a été
publiée, le 19 décembre, par le quoti-
dien belge francophone « Le Soir »

L’intelligence artificielle risque de devenir

un luxe hors de portée pour les moins bien lotis
Des modèles non lucratifs d’IA à des fins d’éducation pour tous doivent être soutenus par les gouvernements et les acteurs économiques
des pays les plus riches, plaident le responsable associatif Jérémy Lachal et les chercheurs Pierre-Carl Langlais et Anastasia Stasenko

N
ous avons tous été inter-
pellés par les dernières per-
formances de l’intelligence
artificielle (IA) générative,
en particulier les grands modèles
de langage (large language models
ou LLM) tels que ChatGPT, capa-
bles de générer des réponses à des
questions formulées en langage
courant. Ils émerveillent et in-
quiètent, mais nous pouvons être
certains d’une chose : ils font déjà
partie intégrante de notre quoti-
dien et joueront un rôle central
dans les prochaines années.
L’émergence de ces programmes
dans le domaine de l’éducation est
une arme à double tranchant : s’ils
ont le potentiel de faire progresser
considérablement l’apprentis-
sage, ils risquent également de
creuser les inégalités mondiales
déjà largement accrues par la ré-
volution numérique. Dans les
pays développés et au sein de
leurs communautés aisées, l’inté-
gration des LLM dans le système
éducatif esquisse un avenir où
l’apprentissage personnalisé, ap-
puyé par des ressources éducati-
ves sur mesure et des assistants
d’apprentissage interactifs, de-
vient la norme. Même s’ils présen-
tent un défi d’appropriation et de
formation, ces outils offrent la
perspective d’améliorer significa-
tivement les résultats éducatifs et
de garantir un accès ouvert et mo-
dulable aux connaissances.
Pour les habitants des régions
pauvres, où l’infrastructure néces-
saire pour prendre en charge des
technologies aussi avancées est
absente et où une connectivité fia-
ble reste hors de portée, la pro-
messe des LLM ressemble davan-
tage à un mirage lointain. Des
outils comme ChatGPT restent
inaccessibles dans de nombreuses
parties du globe, et, lorsqu’ils sont
disponibles, leur utilisation peut
être entravée par un manque de
bande passante ou, plus crucial
encore, par une adaptation insuf-
fisante aux particularités linguis-
tiques et culturelles locales.
Inégalités linguistiques
Les LLM, principalement entraî-
nés sur des langues largement
diffusées sur le Web, tendent à
perpétuer les inégalités linguisti-
ques existantes : la génération de
textes en langues mondiales ma-
jeures telles que l’hindi ou le swa-
hili souffre d’une qualité médio-
cre et d’un débit considérable-
ment plus lent. Cette technologie
risque de devenir un luxe hors de
portée pour les moins bien lotis,
les écartant encore davantage des
frontières de l’économie du sa-
voir mondiale et creusant un
nouveau fossé numérique.
Pourtant, les grands modèles de
langues pourraient incarner,
vingt ans après la démocratisa-
tion du Web, une nouvelle révolu-
tion du libre accès. Imaginez le po-
tentiel d’un agent conversation-
SI CETTE
PROBLÉMATIQUE
EST ABORDÉE
AVEC PRIORITÉ,
ELLE POURRAIT
TRANSFORMER
L’ÉDUCATION
MONDIALE
nel (ou chatbot), discrètement
chargé dans le téléphone d’une
fille afghane privée d’école, qui
pourrait lui permettre de conti-
nuer à apprendre, de manière per-
sonnalisée et dans sa langue. Pen-
sez à des enseignants, au Sénégal
ou au Kenya, qui pourraient géné-
rer en quelques clics des bibliothè-
ques de ressources pédagogiques
et d’exercices pour leurs élèves.
Ressources aujourd’hui tellement
rares dans la majorité des écoles.
Face à ces enjeux, nous plaidons
pour adapter de manière systé-
matique les modèles aux contex-
tes locaux, en particulier pour re-
fléter et promouvoir la diversité
linguistique et culturelle ; cons-
truire des modèles en science
« ouverte » – c’est-à-dire dont le
code source, les poids [instru-
ments de pondération du modèle]
et les corpus d’entraînement sont
en libre accès et réutilisables par
d’autres – capables de fonction-
ner dans des environnements
technologiques frugaux, en parti-
culier sans connexion Internet
pour servir la moitié de la popula-
tion mondiale qui n’est pas ou
peu connectée ; créer des plans
massifs de formation des citoyens
– en particulier les plus vulnéra-
bles – aux opportunités et aux dé-
fis induits par l’irruption de l’IA
dans nos vies et les accompagner
pour maîtriser et s’approprier
pleinement ces technologies.
Emancipation
Nous sommes convaincus que la
société civile et en particulier les
ONG internationales qui défen-
dent des modèles non lucratifs
doivent jouer un rôle actif dans la
révolution numérique à l’œuvre.
Néanmoins, leurs efforts ne sau-
ront aboutir qu’à condition d’être
soutenus par les instances gou-
vernementales, notamment euro-
péennes, et les acteurs économi-
ques disposant aujourd’hui de
très grandes infrastructures de
calcul permettant le développe-
ment et l’alignement de tels mo-
dèles. Ces ressources informati-
ques rares, convoitées par l’en-
semble du marché émergent de
l’IA, doivent également être mises
à disposition de projets à visée
non lucrative. C’est une décision
qui aura des conséquences majeu-
res sur l’accès à l’éducation au ni-
veau mondial. Relever ces défis ne
se limite pas à une simple innova-
tion technologique : il s’agit avant
tout d’une question d’équité, d’ac-
cès et d’émancipation.
Si cette problématique est abor-
dée avec la priorité qu’elle mérite,
elle pourrait catalyser une trans-
formation profonde de l’éduca-
tion mondiale, façonnant un ave-
nir où les promesses de l’IA béné-
ficieraient à tous, sans que le
potentiel d’aucun enfant soit li-
mité par ses origines géographi-
ques ou économiques. p
Jérémy Lachal est
directeur général de l’ONG
Bibliothèques sans frontières ;
Pierre-Carl Langlais est
chercheur en sciences de
l’information et de la commu-
nication et en humanités
numériques, associé au média-
lab Sciences Po et directeur
de R&D à l’institut Opsci ;
Anastasia Stasenko est
maîtresse de conférences
associée à l’université Sorbon-
ne-Nouvelle et directrice
de recherches à Opsci
24 | 0123
FRANCE |
par fr ançoise fr e s s o z
L’imparfait retour
du clivage gauche-droite
L APRÈS LE VOTE
a crise qui vient de se pro-
duire autour du projet de
loi sur l’immigration mar-
que le retour spectacu-
laire du clivage gauche-droite. En
coalisant leurs voix pour rendre
impossible la discussion du texte
de loi à l’Assemblée nationale le
11 décembre, les oppositions sont
parvenues à donner un coup de
boutoir à l’espace central qui espé-
rait trouver des majorités varia-
bles article par article.
Une fois le forfait accompli, ces
mêmes oppositions ont souligné
la perte de boussole de l’exécutif
qui, mû par la volonté d’arracher
coûte que coûte un accord en
commission mixte paritaire
(CMP), a concédé au-delà de ses
marqueurs à la droite : restriction
de l’accès aux prestations sociales
à des étrangers en situation régu-
lière, fin de l’acquisition de la na-
tionalité de plein droit pour les en-
fants nés d’étrangers, exclusion
des sans-papiers de l’héberge-
ment d’urgence, promesse d’une
réforme de l’aide médicale d’Etat…
Ces ajouts ont dénaturé le texte
qui avait été au départ conçu
comme un équilibre entre fer-
meté et ouverture. La gauche et
l’extrême droite ont alors une
nouvelle fois convergé pour souli-
gner que l’exécutif acclimatait le
concept de « préférence natio-
nale » qui constitue l’ossature du
projet lepéniste.
L’onde de choc provoquée par la
volte-face du Rassemblement na-
tional (RN) qui, après avoir clai-
ronné qu’il ne voterait jamais un
texte comportant un volet régula-
risation, s’est rallié au texte de la
CMP a ébranlé le camp présiden-
tiel : le ministre de la santé, Auré-
lien Rousseau, a démissionné ; un
quart des députés de la majorité
ont refusé de voter le texte. Em-
manuel Macron a dû lancer une
contre-offensive, dans « C à vous »,
mercredi 20 décembre, sur France
5, en contestant toute « rupture
ontologique » dans la conduite de
la politique migratoire tout en se
défaussant sur le Conseil constitu-
tionnel pour faire le ménage dans
le texte. Jamais le chef de l’Etat
n’était apparu autant en décalage
avec ce qu’il avait incarné lors de
sa campagne de 2017 : le camp de
l’ouverture, de l’optimisme et du
progressisme face aux partisans
du repli nationaliste.
La Nupes ressoudée
Dans la foulée de cet événement,
des mouvements significatifs se
sont produits au sein des opposi-
tions. Les enquêtes d’opinion
donnent le point au RN (65 % des
Français estiment que le vote de
cette loi est plutôt un succès pour
Marine Le Pen et 71 % jugent que
le texte correspond aux idées du
parti d’extrême droite, selon un
sondage Elabe publié le 20 dé-
cembre), tandis que le président
de la région Auvergne-Rhône-Al-
pes s’est débusqué.
Dans un entretien au Figaro le
22 décembre, Laurent Wauquiez a
revendiqué avoir été à la
manœuvre ces derniers jours
dans l’ombre du président du
parti Les Républicains (LR), Eric
Ciotti, pour tuer le « en même
temps ». Puis il a insisté sur l’ali-
gnement des idées de LR sur cel-
les du RN en matière de politique
migratoire avant de disputer à
Marine Le Pen la crédibilité de
porter en 2027 les couleurs d’une
« nouvelle droite » coalisée contre
le « parti du déni » qu’incarnerait
LE JEU S’EST DURCI
SOUS LA PRESSION
CONTINUE
DES EXTRÊMES
0123
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
CHRONIQUE LA GUERRE
SANS FIN
DE BENYAMIN fait, tant que les Etats-Unis se satisferont du permanent, qu’il s’efforce d’installer en
NÉTANYAHOU
fait qu’un peu d’aide parvienne aux Palesti-
niens de Gaza, plongés dans un dénuement
extrême, susceptibles à chaque instant
jouant sur la soif de revanche de son opi-
nion publique, pourrait lui offrir une plan-
che de salut. La poursuite des opérations
d’être fauchés par les bombes fournies à
l’Etat hébreu. Tel est le message adressé par
la dernière résolution des Nations unies, af-
renvoie à plus tard l’heure des comptes et le
travail d’une éventuelle commission d’en-
quête visant à établir les responsabilités
fadie par la diplomatie américaine. dans la chaîne de commandement israé-
Le premier ministre israélien avait fixé lienne. La prolongation des combats per-
deux objectifs à ses troupes après les mas- met également de garder le silence sur le
sacres perpétrés le 7 octobre par les mili- sort auquel Gaza sera livrée une fois que les
DE LA LOI SUR ciens du Hamas contre des civils israéliens : bombardements israéliens auront pris fin.
l’éradication du mouvement islamiste et la Benyamin Nétanyahou n’est capable de
L’IMMIGRATION, libération des personnes capturées lors de dire que ce dont il ne veut pas, à commen-
TROIS BLOCS cette opération terroriste. Après deux mois cer par le retour sur place du Fatah, qui con-
RESTENT TOUJOURS
EN PRÉSENCE
P ersonne ne discute plus l’ampleur
du bilan humain du carnage en
cours à Gaza. Mais personne, parmi
les responsables internationaux qui pré-
tendent vouloir apporter des réponses au
de bombardements sans précédent, les mi-
litaires israéliens se gardent bien de décré-
ter le Hamas détruit. Quant au sort des ota-
ges, pris au piège de leurs ravisseurs et des
frappes de leur propre armée, il nourrit
trôle l’Autorité palestinienne.
Il s’agit pourtant d’une question cruciale.
Relever un territoire pauvre et surpeuplé,
où les conditions de vie étaient déjà criti-
ques avant les destructions massives enre-
conflit israélo-palestinien, ne s’en émeut plus que jamais l’inquiétude. gistrées depuis près de trois mois, sera en
la gauche. Pour LR, la réaffirma- pour autant. Le silence qui a suivi la frappe Au soir du 7 octobre, le sort politique de effet un préalable pour une éventuelle re-
tion du clivage a été l’occasion de particulièrement meurtrière contre un Benyamin Nétanyahou semblait scellé. Il lance d’un processus diplomatique. Les
pousser d’un cran le projet de fu- camp de réfugiés, le 24 décembre, l’atteste. était en effet comptable du fiasco du dispo- massacres d’Israéliens du 7 octobre et les
sion des droites. Cette coupable apathie, quand il ne s’agit sitif sécuritaire israélien comme de la straté- bombardements indiscriminés tuant des
A gauche, la crise a eu pour effet pas d’un soutien aveugle aux destructions gie visant à ménager le Hamas pour mieux Palestiniens par milliers ont tragiquement
de ressouder la Nouvelle Union en cours, fait les affaires du premier minis- affaiblir l’Autorité palestinienne et enterrer souligné son urgente nécessité. On ne peut
populaire écologique et sociale, tre israélien, Benyamin Nétanyahou, qui a ainsi la perspective de la création d’un Etat pas plaider à Washington et à Paris pour la
qui avait été pourtant déclarée annoncé le 25 décembre une intensifica- palestinien. Le patron de la droite nationa- solution des deux Etats en acceptant la
morte par son fondateur, Jean-Luc tion des combats livrés par l’armée israé- liste israélienne n’a cessé de la combattre au guerre sans fin que Benyamin Nétanyahou
Mélenchon, après la contestation lienne dans l’étroite bande de terre. « Ça cours des trois dernières décennies. fixe à son pays comme seul et unique hori-
interne et externe menée contre sera une longue guerre qui n’est pas près de Le premier ministre israélien semble zon. Il est temps de mettre fin à cette disso-
lui. Tous les partis membres de la finir », a-t-il promis. Elle peut continuer, de aujourd’hui considérer que l’état de guerre nance acceptée par pusillanimité. p
coalition ont fait bloc pour refuser
le débat sur l’immigration et ont
convergé vers l’analyse dévelop-
pée à l’été par le leader des « insou-
mis » lorsque, après les es émeutes
urbaines, il avait fustigé « la jonc-
tion de la droite [de Macron à LR]
avec l’extrême droite » à partir d’un
« discours dominant aligné sur l’ex-
trême droite ». Le but de M. Mélen-
chon était de présenter La France
insoumise comme le seul rem-
part contre Marine Le Pen, alors
que son parti avait été symboli-
quement exclu de l’arc républi-
cain par la première ministre, Eli-
sabeth Borne.
Il est symptomatique de consta-
ter que même les plus farouches
adversaires à gauche de M. Mélen-
chon ont eu ces derniers jours ten-
dance à s’aligner sur son discours.
Dans un entretien au Monde (du
22 décembre), l’ex-président de la
République François Hollande a
accusé Emmanuel Macron et son
gouvernement d’« avoir pris les
idées » du RN. Dans une tribune
publiée par Libération le 22 dé-
cembre, l’ex-premier ministre Ber-
nard Cazeneuve a estimé que,
« dans le tumulte de tractations
fleurant bon la IVe République, un
autre visage de l’actuel pouvoir est
apparu : non pas celui hiératique
de Jupiter, mais celui double et me-
naçant de Janus, en même temps
de droite et d’extrême droite ».
Le déclenchement de cette artil-
lerie n’a produit qu’à moitié l’effet
escompté : le camp présidentiel a
vacillé, mais il ne s’est pas cassé.
Plusieurs ministres, de sensibilité
de gauche, avaient menacé de dé-
missionner. Ils ne l’ont pas fait, ju-
geant plus utile de peser de l’inté-
rieur que de risquer de perdre
toute utilité à l’extérieur.
En six ans, le fossé s’est creusé
entre les macronistes revendi-
quant de « partir du réel » pour trai-
ter les problèmes et l’ancienne
gauche de gouvernement qui a
préféré se réfugier dans une pos-
ture d’opposition radicale plutôt
que de se frotter à des sujets com-
pliqués. L’immigration en fait par-
tie : débattre de sa régulation
heurte ses convictions, alors que la
demande d’un tour de vis est si-
gnificative dans l’électorat qu’elle a
perdu au profit du RN. Selon l’en-
quête Ipsos-Sopra Steria « Fractu-
res françaises » parue en octobre,
66 % des Français jugent qu’« il y a
trop d’étrangers en France ». La pro-
portion monte à 67 % chez les em-
ployés et 70 % chez les ouvriers.
Finalement, les trois blocs nés
des élections législatives de
2022 restent toujours en pré-
sence. Mais le jeu s’est durci sous
la pression continue des extrê-
mes. L’espace central n’est pas dé-
truit, mais il ne peut désormais
compter que sur lui-même. La
quête d’alliés est devenue dange-
reuse à droite, tant LR s’est extré-
misé. Elle reste inopérante à gau-
che, tant l’emprise de Jean-Luc
Mélenchon reste forte. p
 en
2023

JEANNE MACAIGNE

L’année de l’intelligence artificielle

Depuis le lancement de l’agent conversationnel ChatGPT, à la fin de l’année 2022,
les innovations liées à l’IA croissent dans tous les domaines : médecine, chimie, physique,
mathématique… Un succès fulgurant qui engendre aussi interrogations et critiques

Q
uelle année pour l’intelligence
artificielle ! Ce concept né dans
les années 1950 n’a jamais été
aussi présent, y compris chez
les profanes, depuis la mise en
ligne de l’agent conversa-
tionnel de l’entreprise OpenAI, ChatGPT, le
30 novembre 2022. En un an, les innovations,
liées ou non aux modèles génératifs dont
ChatGPT est la figure de proue, défraient la
chronique économique (avec la compétition
féroce entre entreprises installées et start-up),
politique (avec la négociation au niveau euro-
péen d’une régulation pour les technologies
d’intelligence artificielle), judiciaire (avec des
procès liés au respect du droit d’auteur) ou
même sociétale (pour ou contre l’utilisation
de ChatGPT à l’école ?)…
Dans les laboratoires de recherche aussi, les
cerveaux ont chauffé. Dans le domaine de la
santé, notre dossier de mai dressait un inven-
taire non exhaustif d’initiatives destinées à
prédire, à partir d’une photo, si un foie peut
être greffé. Ou à identifier des malformations
cardiaques précoces sur un fœtus. En mai,
Google et sa filiale DeepMind annonçaient
que les réponses de leur logiciel MedPaLM-2
à des questions médicales étaient jugées
meilleures, par des humains, que celles de
vrais médecins.
En juillet, une équipe de l’université de
Washington appliquait les principes de la
génération d’images utilisées par les célèbres
outils Midjourney ou Stable Diffusion pour
obtenir de nouvelles structures de protéines
ayant possiblement des intérêts biologiques.
Cet été encore, deux travaux des universités
Stanford et de Californie à San Francisco don-
naient la parole à des patients handicapés
grâce à des implants cérébraux et à une tra-
duction de leurs signaux en voix. Et, en octo-
bre, une équipe de Meta semblait lire dans les
pensées, en reproduisant des images vues par
des cobayes grâce, notamment, à des IRM.
En novembre, DeepMind frappait deux fois
dans la revue Nature, grâce à un simulateur
de la météo à dix jours, plus rapide que les
supercalculateurs actuels, et avec un logiciel
de « petit chimiste » qui a prévu des centaines
de milliers de nouveaux alliages potentielle-
ment intéressants.
L’année 2023 a vu aussi des avancées pour
imaginer les systèmes de réglages de l’optique
adaptative des télescopes, pour détecter des
contenus protégés par le droit d’auteur, pour
gagner au jeu de stratégie Diplomatie, pour
piloter des drones ou faire sortir une bille
d’un labyrinthe… Selon le rapport annuel
« State of AI », les publications scientifiques
croissent dans tous les domaines, médecine,
chimie mais également économie, physique
ou mathématiques. Le slogan « L’IA pour la
science » se répand partout.
Biais, erreurs, « hallucinations »…
Ces succès s’accompagnent aussi de criti-
ques. Les résultats de ces IA ne sont pas tou-
jours reproductibles. Des défauts persistent,
comme, dans les modèles de type génératif,
la présence de biais, d’erreurs, d’inventions
de résultats (« hallucinations », dans le jar-
gon) ou la fragilité face à des « attaques » (des
consignes bien choisies peuvent conduire à
faire déraper les IA). Les tests qui évaluent les
performances sont contestés, car suscepti-
bles d’exagérer les capacités cognitives de ces
logiciels. L’opacité règne souvent, sur les
programmes eux-mêmes, mais aussi sur la
manière de les mettre au point. En se nour-
rissant de textes produits par les machines,
les futures IA risqueraient également de
s’effondrer sur elles-mêmes. Sans compter
que bien des réponses générées par les agents
conversationnels restent inexpliquées.
Des scientifiques sont allés plus loin, signant
plusieurs tribunes. Geoffrey Hinton, l’un des
pionniers du renouveau des méthodes d’ap-
prentissage par réseaux de neurones, a démis-
sionné de Google et évoque des « risques pour
l’humanité ». Yoshua Bengio, autre pionnier,
appelle à gérer ces risques au plus vite.
La communauté scientifique constate éga-
lement à quel point le domaine lui échappe.
La recherche se fait de plus en plus dans les
entreprises privées, de moins en moins
ouvertes sur leurs travaux : 40 % des exposés
dans les conférences sont issus de laboratoi-
res privés, le double de ce qu’ils représen-
taient en 2012, selon une étude du MIT et de
l’université Virginia Tech. Le monde acadé-
mique s’interroge donc sur son rôle à l’avenir,
contraint de s’aligner sur l’agenda des entre-
prises par des collaborations, ou d’explorer
des sujets risqués, mal soutenus.
Sans craindre de se tromper, on peut pré-
dire que 2024 restera bouillonnante en intel-
ligence artificielle. p
david larousserie

La semaine prochaine, retrouvez deux pages « Science & médecine » dans votre quotidien du mardi daté mercredi

Cahier du « Monde » No 24566 daté Mercredi 27 décembre 2023 - Ne peut être vendu séparément
 RÉTROSPECTIVE
2| ·
LE MONDE SCIENCE & MÉDECINE
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023

LE SATELLITE EUCLID
LIVRE SES PREMIERS
CLICHÉS DU COSMOS

Parti le 1er juillet de Cap Canaveral

(Floride), le satellite Euclid de l’Agence
spatiale européenne a livré ses
premières photographies en couleurs,
le 7 novembre. On a pu ainsi voir de
larges paysages cosmiques, tels que
l’amas de galaxies de Persée ou la
nébuleuse de la Tête de cheval, avec
un piqué inégalé. Obtenir cette qualité
d’image était un point crucial pour
Euclid, qui a pour mission d’établir la
plus grande carte en trois dimensions
du cosmos afin d’étudier la répartition
de la matière noire et l’influence de
l’énergie sombre qui accélère l’expan-
sion de l’Univers. A elles deux, ces
entités mystérieuses constituent 95 %
PAR DEUX FOIS, LE STARSHIP, LA MÉGAFUSÉE DE SPACEX, du contenu du cosmos. Les opérations
scientifiques doivent commencer
DÉCOLLE ET EXPLOSE en janvier 2024 et la publication du
premier catalogue de données n’est
Deux vols d’essai, deux explosions. Conçu par SpaceX, le Starship, la plus puissante pas attendue avant la fin de 2025.
fusée de l’histoire, a connu des débuts pour le moins turbulents. Ce lanceur géant (J.-C. CUILLANDRE/CEA PARIS-SACLAY/G. ANSELMI/
de 120 mètres de haut a quitté le sol pour la première fois le 20 avril, mais il est EUCLID CONSORTIUM/ESA/NASA)
parti en toupie après moins de quatre minutes de vol, avant d’être désintégré.
Plusieurs problèmes ont marqué cet essai, comme une panne de six des trente-trois
moteurs du premier étage ou la destruction d’une partie du pas de tir. Après avoir
revu sa copie, la société d’Elon Musk a procédé à un second essai, le 18 novembre.
Cette fois, les moteurs ont tous fonctionné, les deux étages se sont bien séparés,
mais ils ont ensuite explosé. Le lanceur n’a donc toujours pas réalisé un véritable
vol orbital, ce qui pénalise le programme de retour sur la Lune de la NASA, qui
prévoit d’utiliser une version habitable du Starship pour déposer ses astronautes
sur notre satellite. (JOE SKIPPER/REUTERS)

L’INDE SE POSE SUR LA LUNE

Le 23 août, l’Inde est entrée dans l’histoire de l’exploration spatiale en devenant

le quatrième pays (après l’Union soviétique, les Etats-Unis et la Chine) à poser
en douceur un engin sur la Lune. Le module d’atterrissage de la mission
Chandrayaan-3 a ainsi effacé l’échec de Chandrayaan-2, qui s’était écrasé sur
notre satellite en 2019. L’atterrisseur Vikram s’est posé dans la région du pôle
Sud lunaire, une première, avant de libérer un petit rover. Même si les deux
engins n’ont fonctionné que quelques jours et si les objectifs scientifiques
de la mission étaient modestes, la réussite de Chandrayaan-3, dont le coût
n’a pas dépassé les 75 millions de dollars (environ 68 millions d’euros), est
un symbole éclatant du boom spatial que connaît l’Inde. Le pays a d’ailleurs
l’ambition d’envoyer rapidement une première mission habitée dans l’espace.

OSIRIS-REX
RAPPORTE SUR TERRE
DES ÉCHANTILLONS
D’ASTÉROÏDE

Si elles n’avaient pas leur

part d’imprévu, les missions
d’exploration spatiale ne
susciteraient pas la même
fascination. Trois mois après
avoir récupéré dans le désert
de l’Utah, aux Etats-Unis, la
capsule contenant des échantillons de l’astéroïde Bénou, la NASA n’est toujours
pas parvenue à l’ouvrir. Un comble, après la prouesse qu’a été la mission Osiris-
REx ! Au terme d’un voyage de sept ans et de plus de 6 milliards de kilomètres,
elle a prélevé plus de 250 grammes de matériaux sur un petit astéroïde géocroi-
seur, afin que les scientifiques puissent examiner ces éléments qui datent de la
formation du Système solaire. Au Centre spatial Lyndon-B.-Johnson, à Houston
(Texas), l’équipe chargée des matériaux venus d’ailleurs en est à tenter de fabri-
quer, dans une boîte à gants spécialisée, des outils capables de déverrouiller
ce trésor. La NASA prévoit d’y parvenir au premier trimestre 2024. Quelques
grammes de poussière récupérés sur le couvercle ont déjà pu être examinés,
qui ont révélé la présence d’eau et de carbone sur Bénou. (NASA/KEEGAN BARBER)

AUX ÉTATS-UNIS, CONFIRMATION DE L’ANCIENNETÉ DE TRACES

LA PLUS ANCIENNE DE PAS HUMAINS VIEILLES DE 23 000 ANS
STRUCTURE EN BOIS La découverte a été révélée en 2021, mais sa datation a été confirmée en octobre, dans la revue
A 476 000 ANS Science : il y a 23 000 ans, les rives d’un lac de ce qui est aujourd’hui le Nouveau-Mexique
ont été arpentées par un groupe de chasseurs-cueilleurs, dont les traces de pas dans la vase
C’est une trouvaille extraordinaire se sont fossilisées. Leur ancienneté faisait débat, car elles tordaient le cou à la thèse d’une
qu’a révélée, en septembre, une arrivée plus tardive de l’homme en Amérique, vers – 13 500 ans, avec la civilisation dite
équipe internationale d’archéo- « de Clovis ». Matthew Bennett (université de Bournemouth, Royaume-Uni) et ses collègues
logues travaillant sur le site ont fait appel à trois types de datation, dont les résultats convergent. Le début de l’année
des chutes de la rivière Kalambo, avait déjà été marqué par la description de quatorze pointes de projectiles en pierre taillée,
dans le nord de la Zambie : vieilles de 16 000 ans, trouvées dans l’Idaho. Les traces de pas du désert de White Sands
la plus ancienne structure en bois semblent saper définitivement l’hypothèse « Clovis First ». (USGS, NPS, BOURNEMOUTH UNIVERSITY)
jamais mise au jour, vieille de
476 000 ans, ce qui la fait remonter
à une époque où les humains
modernes n’étaient pas encore
apparus. Cette structure cruci-
forme se présente sous la forme
de deux rondins encastrés l’un
dans l’autre par le biais d’une
entaille en forme de U, créée
à l’aide d’outils. Les chercheurs
avancent l’hypothèse qu’il
UNE NÉCROPOLE ANTIQUE EN PLEIN CŒUR DE PARIS s’agissait d’un morceau d’une
plate-forme ou d’une passerelle,
En avril, à Paris, à l’occasion de fouilles préalables au creusement d’une nouvelle sortie deux structures utiles dans un
pour la gare Port-Royal du RER B, l’Institut national de recherches archéologiques environnement propice aux crues.
préventives a mis au jour un morceau d’une nécropole antique. Une cinquantaine La découverte interroge à la fois
de tombes datant du IIe siècle ont ainsi été dégagées. De nombreux récipients en sur les compétences techniques
céramique (plats, cruches, gobelets…) accompagnaient les squelettes, et des analyses de nos ancêtres et sur le fait qu’ils
menées en laboratoire devraient permettre de spécifier leur contenu. De la même n’aient pas été aussi nomades
manière, une étude anthropologique tentera de déterminer l’âge, le sexe et l’état qu’on le pensait.
sanitaire des défunts. Datant d’une période où l’Empire romain était à son apogée,
la nécropole en question, située au sud de la Lutèce antique, était déjà connue
des archéologues, mais ceux-ci n’avaient pas eu l’occasion de la revoir depuis
l’aménagement de Paris effectué par Haussmann, au XIXe siècle. (THOMAS SAMSON/AFP)

À L’ORIGINE
DE NOS NEURONES,
LES PLACOZOAIRES
Il mesure de 1 à 3 millimètres, vit accroché
sur les rochers ou à la surface des algues,
n’a pas vraiment de forme définie, si
ce n’est sa platitude. Avec son air d’amibe,
le placozoaire n’a pas grand-chose pour
lui : pas de système nerveux, ni digestif,
ni même respiratoire. Mais, dans un article
paru le 19 septembre dans la revue Cell,
une équipe de scientifiques espagnols
et allemands a annoncé que la minuscule
crêpe, ou plutôt son ancêtre, dont notre
embranchement s’est séparé il y a environ
800 millions d’années, nous aurait fourni
les composants de nos futurs neurones.
En étudiant l’expression de leurs gènes,
ils ont mis en évidence l’existence
de cellules dites « peptidergiques » qui
possèdent tous les éléments du complexe
présynaptique. Les neurones n’étaient
pas encore là… mais ils étaient déjà
en germe. (SEBASTIAN R. NAJLE)
LA COOPÉRATION
SOUTERRAINE DES ARBRES
REMISE EN QUESTION
Plusieurs ouvrages ont célébré,
ces dernières années, la capacité
des arbres à collaborer entre eux,
par l’intermédiaire d’un réseau sou-
terrain associant symbiotiquement
leurs racines à des champignons fila-
mentaires. L’existence de ces réseaux
de mycorhizes, qui permettent
aux champignons de bénéficier
des sucres produits par les arbres
en échange de l’eau et des minéraux
qu’ils contribuent à puiser dans le
sol, ne fait pas débat. Mais leur rôle
dans des stratégies d’entraide pou-
vant associer des arbres, y compris
d’espèces différentes, est questionné
dans une étude publiée en février
dans Nature Ecology & Evolution. En
épluchant la littérature scientifique,
Melanie Jones (université de Colom-
bie-Britannique) et ses collègues
ont estimé que ces résultats étaient
« insuffisamment étayés ». La biolo-
giste canadienne Suzanne Simard,
pour qui « les arbres parlent entre
eux », assure maintenir ses résultats.
NAISSANCE D’UN SINGE
CHIMÉRIQUE DANS
UN LABORATOIRE CHINOIS
Prélevez des cellules souches d’un
embryon de macaque, modifiez-les
génétiquement pour leur faire exprimer
une protéine fluorescente verte issue
d’une méduse, introduisez-les dans un
autre embryon cultivé in vitro, implantez
l’ensemble dans une mère porteuse de
la même espèce : avec un peu de chance,
vous obtiendrez un petit macaque
chimérique, présentant une concentration
élevée de cellules provenant d’un autre
individu que l’embryon dont il est issu.
C’est ce que sont parvenus à réaliser
Zhen Liu (Institut de neuroscience
de l’Académie des sciences chinoise,
Shanghaï) et ses collègues. Même si leur
chimère n’a survécu qu’une dizaine
de jours, la recette, décrite dans Cell, le
9 novembre, ouvre la voie à la production,
comme c’est déjà le cas depuis plus
de trente ans chez la souris, de lignées
de primates non humains génétiquement
modifiés pour servir de modèles d’étude
de maladies humaines. (CELL/CAO ET AL.)
RÉTROSPECTIVE
· LE MONDE SCIENCE & MÉDECINE
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023 |3
VITILIGO : UN PREMIER
TRAITEMENT EN FRANCE
POUR 2024 ?
Les personnes atteintes de vitiligo,
cette maladie auto-immune chroni-
que qui entraîne une dépigmenta-
tion progressive de l’épiderme et du
système pileux, et se caractérise
par des taches blanches sur le visage,
les mains et toute autre partie
du corps, bénéficieront peut-être
d’un traitement spécifique en 2024.
En avril 2023, la Commission euro-
péenne a donné son autorisation
à la mise sur le marché en Europe
d’une crème, l’Opzelura (ruxolitinib),
développée par le laboratoire Incyte.
La Haute Autorité de santé doit
d’abord évaluer le service médical
rendu. Deux études cliniques ont
montré que 31 % des patients qui
l’avaient testée avaient obtenu plus
de 75 % d’amélioration de l’atteinte
du visage à six mois et 30 %, une
amélioration de plus de 90 % à un
an. Cette maladie, liée à la perte des
mélanocytes qui synthétisent nor-
malement la mélanine, touche entre
0,5 % et 2 % de la population mon-
diale. En France, entre 600 000 et
1 million de personnes en souffrent.
(WESTEND61/GETTY IMAGES)
UN PREMIER MÉDICAMENT CONÇU
À L’AIDE DES CISEAUX CRISPR
Le premier médicament conçu à partir
du système d’édition du génome Crispr arrive
sur le marché mondial, pour traiter des formes
graves de drépanocytose. Cette anémie
d’origine génétique est la maladie monogénique
la plus répandue dans le monde, avec de
300 000 à 400 000 nouveaux cas chaque année.
Développé par les laboratoires Vertex Pharma-
L’OMS ANNONCE LA LEVÉE DE L’ÉTAT D’URGENCE MONDIALE LIÉ AU COVID-19 ceuticals et Crispr Therapeutics, le Casgevy
a déjà reçu l’approbation des autorités sanitaires
Vendredi 5 mai, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) décrétait la levée du niveau maximal d’alerte britanniques et américaines. Le 15 décembre,
mondiale face au SARS-CoV-2. L’annonce intervenait trois ans, treize semaines et quatre jours après il a été approuvé par l’Agence européenne
la déclaration, le 30 janvier 2020, de l’état d’urgence internationale face à ce virus surgi de Chine, se diffusant du médicament dans le traitement de
à une vitesse prodigieuse et semant le chaos. En trois ans et demi, il aura tué plus de 20 millions de la drépanocytose et de la bêta-thalassémie,
personnes à travers le monde, sans compter les victimes indirectes causées par la saturation des systèmes une autre anémie génétique. Pour l’heure,
de santé. « Les pays doivent rester vigilants, a insisté l’OMS le 5 mai. Avec la poursuite d’une circulation intense les données cliniques sont prometteuses,
du virus, de nouveaux variants pourraient émerger. » La population mondiale a acquis une immunité collective laissant espérer une guérison. Mais peu de
grâce aux vaccins et aux infections passées, mais les personnes âgées, fragiles, immunodéprimées restent patients ont été traités, et le recul est inférieur
menacées. Et les taux de rappels vaccinaux sont très insuffisants. (PATRICK GHERDOUSSI/DIVERGENCE POUR « LE MONDE ») à deux ans. (INGRAM/PHOTONONSTOP)
LE CHROMOSOME MÂLE HUMAIN
ENFIN SÉQUENCÉ
Le 23 août, le chromosome Y humain révélait, enfin,
l’intégralité de sa séquence d’ADN dans la revue Nature.
Il était le dernier de nos 23 paires de chromosomes
à n’avoir pas été entièrement déchiffré. Un paradoxe
vivant, vu qu’il est l’un des plus petits. A cela, une
explication : au fil de son évolution, il a été peu à peu
envahi par une myriade de séquences d’ADN ultra-
répétées. Reconstituer le puzzle de leur enchaînement
GREFFE INÉDITE D’UN ŒIL COMPLET restait un défi, jusqu’à l’arrivée d’une nouvelle méthode
de lecture de l’ADN. Résultat : il contient 106 gènes
Pour la première fois au monde, la greffe d’un œil complet a été réalisée chez un homme, en même temps codants. Mais deux hommes en bonne santé peuvent
qu’une transplantation partielle de la face. Aaron James, 46 ans, défiguré après un accident du travail, a été avoir deux Y très différents : quand l’un portera 40 copies
opéré par une équipe américaine, le 27 mai. Avec un recul de plus de cinq mois, l’intervention est considérée d’un gène, l’autre pourra n’en avoir que 19, par
comme un succès chirurgical et esthétique, même si, pour l’instant, le patient ne voit pas de l’œil greffé. exemple. Logique, car le Y a évolué – et décliné – très
Le projet a mobilisé 140 personnes, tous métiers confondus, et a fait appel à des technologies de pointe, rapidement : il a perdu 90 % de ses gènes depuis sa
dont des modélisations en 3D. Jusqu’ici, les transplantations de l’œil n’étaient que partielles, et concernaient naissance, il y a 170 millions d’années. Il ne peut s’auto-
principalement la cornée. Quant aux greffes faciales, dont la première date de 2005, elles restent rares : réparer en se recombinant avec un homologue, et son
une publication de 2021 en recensait 48. (JOE CAROTTA/NYU LANGONE HEALTH) avenir reste incertain. (VCHAL/ISTOCKPHOTO/GETTY IMAGES)
 RÉTROSPECTIVE
4| ·
LE MONDE SCIENCE & MÉDECINE
MERCREDI 27 DÉCEMBRE 2023
FUSION : PREMIÈRE
RÉACTION PRODUISANT
PLUS D’ÉNERGIE
QU’ELLE N’EN DEMANDE
En dix mois, l’installation géante du
laboratoire National Ignition Facility,
en Californie, aura franchi quatre fois
un seuil symbolique en matière
d’énergie de fusion. L’explosion d’une
cible millimétrique a dégagé plus
d’énergie qu’il n’en a été apporté.
Les noyaux fusionnent car ils sont
comprimés par des rayons X, induits
par 192 faisceaux laser qui frappent
une enceinte cylindrique enfermant
la cible (photo ci-dessus). La première
fois que le seuil dit « d’ignition » a été
franchi était le 5 décembre 2022 et la
dernière, le 30 octobre 2023. Le record
de gain a été atteint le 30 juillet,
avec presque 1,89 fois plus d’énergie
rayonnée que d’énergie apportée
(par les rayons X). Il y a cependant loin
de ces performances à une machine
produisant de l’électricité par ce
moyen jugé plus sûr et plus propre
que les centrales nucléaires actuelles
(par fission de noyaux). Un tir par jour
ne suffira pas à alimenter un réseau
en continu, et le « vrai » rendement
est encore catastrophique : les lasers
apportent en réalité plus de cent fois
plus d’énergie qu’il ne s’en dégage
par fusion. (JASON LAUREA/LLNL/AFP)
LE PAVAGE AVEC UNE TUILE
Quatre mathématiciens, américains
et britanniques, ont réussi un bel
exploit géométrique. Ils ont inventé,
en mars, une forme à treize côtés qui
peut recouvrir une surface sans qu’un
motif se répète. Avant eux, seuls des
pavages dits « apériodiques » à deux
tuiles, comme ceux de Roger Penrose,
existaient. Leur « carreau » en forme
de chapeau est devenu si célèbre que
le Musée national des mathématiques
de New York et l’association United
Kingdom Mathematics Trust ont lancé
un concours, en décembre, qui a
célébré la créativité des amateurs,
avec un premier prix ex aequo pour
des raviolis moulés selon ce motif
et des carreaux en trois dimensions.
D’autres lauréats ont fabriqué un
cerf-volant, des tissus et, bien sûr, des
mosaïques. En mai, le même quatuor
avait affiné son idée en proposant
une forme à quatorze côtés qui recou-
vre apériodiquement une surface,
mais en interdisant le retournement
de la forme. (UNIVERSITY OF WATERLOO)
LES PERSONNALITÉS
D E L ’A N N É E
b
LA SUPRACONDUCTIVITÉ
REND FOU
Pendant quelques semaines,
le monde a cru avoir mis la main
sur un Graal : des matériaux supra-
conducteurs, perdant toute résis-
tance électrique, à température
ambiante. En mars, l’université
de Rochester a ainsi publié dans
Nature la recette d’un composé à
base de lutétium et d’azote, supra-
conducteur à 20 degrés Celsius
(mais à une pression élevée de
10 000 bars). En juillet, une équipe
DES IMPURETÉS DANS LE NOYAU coréenne mettait en ligne la recette
INTERNE DE LA TERRE d’un autre alliage supraconduc-
teur, à base de plomb et de cuivre,
mais cette fois à pression et tempé-
Au cœur de la Terre se cache une graine. Sous la croûte,
rature ordinaires. Les deux nouvel-
sous le manteau rocheux, sous le noyau externe de métal
les ont fait long feu. Adieu, trans-
en fusion, ce noyau solide métallique de 1 200 kilomètres
de rayon occupe 1,7 % du volume de notre planète.
port électrique sans perte ou sus-
tentation magnétique des trains.
Mais on n’en connaît pratiquement rien – ni son âge, ni sa
La première recette a vu l’article
composition, ni ses propriétés physiques. Grâce à l’analyse
qui la décrivait rétracté en novem-
d’ondes sismiques, une équipe américano-française
bre par la revue, pour des soup-
y a décelé des irrégularités, sans doute des gouttes de fer
çons sur la qualité des données. La
liquide piégées dans le solide. Et leur répartition, en
seconde a mobilisé une quinzaine
profondeur dans le noyau interne, nous renseigne sur son
de groupes pour tenter de repro-
apparition. Elle serait survenue brutalement lors du refroi-
duire le résultat, avant de conclure
dissement du noyau, au départ exclusivement liquide.
à l’absence de supraconductivité.
Depuis, la fameuse graine ne cesse de s’étendre, sûrement
mais lentement : environ 1 millimètre par an, selon les
chercheurs. (KATERYNA KON/SCIENCE PHOTO LIBRARY/GETTY IMAGES)
L’ANTIMATIÈRE NE TOMBE PAS VERS LE HAUT
Après des années d’effort, des physiciens ont réussi à réaliser une expérience étonnante consistant à savoir
si l’antimatière tombe vers le bas ou vers le haut, voire pas du tout. L’antimatière ressemble en tout point
à la matière, sauf que les charges électriques de ses composants (électrons et protons) sont inversées.
Elle a disparu de l’Univers, juste après sa formation, pour des raisons inconnues qui titillent les chercheurs.
On peut seulement la fabriquer pour de courts instants. Rien dans la théorie ne permet de savoir si la
gravitation s’applique de la même façon sur la matière et sur l’antimatière. D’où ce test réalisé au CERN
avec des antihydrogènes dont la chute libre a été patiemment observée. La réponse a été publiée le
27 septembre dans Nature : l’antimatière choit comme la matière, vers le bas. Les expériences continuent
pour vérifier si l’intensité de la force est bien la même ou si de mystérieux effets la modifient. (CERN)
ANNE L’HUILLIER
ET PIERRE AGOSTINI
LES DEUX NOBEL
Deux Français pour le Nobel de
physique, voilà qui n’était plus
arrivé depuis cent vingt ans ! La
Franco-Suédoise Anne L’Huillier est
aussi la cinquième femme seulement à
recevoir la récompense (et la deuxième
en France), qu’elle partage avec un troi-
sième, Ferenc Krausz. Le trio a indépen-
damment fabriqué des pulses lumineux
ultrabrefs, dits « attosecondes » (un
milliardième de milliardième de se-
conde). Ces durées permettent de « voir »
les phénomènes ultrarapides liés aux
électrons dans les gaz, les liquides ou
les solides, pour mieux les étudier.
L’équipe de Pierre Agostini a été la
première, en 2001, à mesurer ces
durées très brèves, juste avant
celle de Ferenc Krausz. Il s’était
appuyé pour cela sur les travaux
d’Anne L’Huillier, qui elle-même
avait prolongé des travaux encore
plus anciens de… Pierre Agostini.
(JONATHAN NACKSTRAND/AFP)
SVETLANA MOJSOV
BIOCHIMISTE
Elle est longtemps restée dans l’ombre et
n’a pas eu l’honneur de partager le prix
Gairdner obtenu par un trio de chercheurs
en 2021 pour leurs recherches sur le
GLP-1. Pourtant, Svetlana Mojsov, biochi-
miste à l’université Rockefeller de New
York, a joué un rôle essentiel dans
l’identification et la caractérisation
de cette hormone qui a une
influence sur l’appétit, sur la régu-
lation de l’insuline et sur le méta-
bolisme du glucose. « Tout ce que
j’essaie de faire, c’est de rétablir la
vérité scientifique », a-t-elle indiqué
au magazine Nature dans son clas-
sement des dix personnalités 2023 qui
ont contribué à faire avancer la science.
Car ce sont bien ses travaux sur le
GLP-1 dans les années 1980 qui ont ouvert
la voie à deux médicaments stars, l’Ozem-
pic et le Wegovy, prescrits à l’origine pour
traiter le diabète de type 2, mais qui ont
aussi un effet amaigrissant notable.
(CHRIS TAGGART/ROCKEFELLER UNIVERSITY)
MARINA KVASKOFF
ÉPIDÉMIOLOGISTE
Depuis 2009, cette épidémiologiste du
Centre de recherche en épidémiologie et
santé des populations, à Villejuif (Val-
de-Marne), consacre ses travaux à l’endo-
métriose, une maladie hormonodépen-
dante inflammatoire chronique, qui
commence lors des premières règles
et s’estompe à la ménopause.
En 2019, Marina Kvaskoff lance
le volet endométriose de la co-
horte de recherche participative
ComPaRe, qui rassemble quelque
10 000 participantes. Trois ans
plus tard, elle porte le programme
Epi-Endo, qui va croiser les données
sur l’endométriose de six cohortes
françaises (plus de 200 000 femmes et
jeunes filles) avec des données environne-
mentales et génétiques pour identifier des
facteurs de risque. Ses travaux lui ont per-
mis d’obtenir le prix Sciences et société-
Opecst (Office parlementaire d’évaluation
des choix scientifiques et technologiques)
2023 de l’Inserm. (FRANÇOIS GUENET/INSERM)
MICHEL SADELAIN
IMMUNOLOGISTE
L’immunologiste français, actuel direc-
teur du centre de recherche en ingénierie
cellulaire du Memorial Sloan Kettering
Cancer Center (New York), a reçu en
septembre le Breakthrough Prize en
sciences de la vie. Ce prix presti-
gieux, que le chercheur né
en 1960 partage avec l’Américain
Carl June, récompense des
travaux pionniers sur les théra-
pies par cellules CAR-T. Cette
approche consiste à reprogram-
mer les lymphocytes T d’un pa-
tient pour qu’ils reconnaissent et
éliminent des cellules cancéreuses, et
les cellules modifiées lui sont ensuite
réinjectées. C’est en 2013 que Michel
Sadelain et son équipe ont publié les
premiers résultats cliniques de ce traite-
ment, chez des malades atteints de
leucémie aiguë lymphoblastique réfrac-
taire. D’autres tumeurs sont désormais
concernées. (KARSTEN MORAN/SLOAN KETTERING
CANCER CENTER/AFP)