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Vous vous souvenez de

cette époque ? Aujourd’hui,


nous tournons notre objectif
vers des temps révolus. Nous
nous intéressons à un leader
et un pionnier de l’ère
prénumérique… Aujourd’hui,
sur Vous vous souvenez de
l’époque ?...
Tamworth Petrochemical
Company n’était pas une
entreprise banale et encore
moins une entreprise
pétrochimique ordinaire. Ils
étaient un monument de
stabilité, des champions de la
technologie et des symboles
d’efficacité.
Mais quelque part en
cours de route, quelque chose
a mal tourné. Quelque chose
clochait. On pourrait dire
qu’un voile les a enveloppés.

Société
Pétrochimique
Tamworth
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Société
Pétrochimique
Tamworth
Contexte
Aujourd’hui, alors que la plupart des photos sont prises sur support numérique, il peut être difficile
d’imaginer travailler avec les méthodes photochimiques du film photographique. Prenons donc un peu
de recul par rapport aux avancées technologiques contemporaines et remémorons-nous certains
processus photochimiques.
Dans les années 50, la photographie était synonyme de patience et de méthode. Les photos
étaient capturées sur du « film », une pellicule de plastique recouverte de substances chimiques. Le
secret du film résidait d’un seul côté, superposant plusieurs couches de produits chimiques
transparents et sensibles à la lumière. Cette mystérieuse couche s’appelait « émulsion » et était
véritablement un secret volatile. La lumière était à la fois son ingrédient principal et son pire agent
corrupteur. Trop abondante et la photo était gâchée. Insuffisante et la photo était indéchiffrable.
Cette couche d’émulsion avait besoin de lumière pour l’exposition, mais dans la bonne quantité.
Au moment de la prise de vue, c’était l’obturateur de l’appareil photo qui minutait avec précision le
passage de la lumière à l’intérieur de la chambre noire du film. Même des fragments de lumière
invisibles pouvaient détruire l’intégralité de la photographie développée, provoquant des dégâts
irréparables sous forme de taches, de stries et de nuisances simplement appelées « voile ». La nécessité
de protéger le film a poussé les fabricants, comme Tamworth, à produire des emballages que la lumière
ne pouvait pas pénétrer.

COUCHE D’ÉMULSION

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Film en rouleau
Le film en rouleau, peut-être le film le plus répandu de
son époque, était le meilleur ami du photographe amateur. Il
était constitué d'une seule pellicule longue et continue,
renfermée dans une enveloppe imperméable à la lumière. Le
film en rouleau fonctionnait comme indiqué, traversant
l'appareil photo vue par vue et à l'abri de la lumière. Chaque
vue était exposée à l’aide de l'obturateur de l'appareil photo,
avant de poursuivre son chemin dans une obscurité
bienveillante. À la fin du rouleau, le film était rembobiné dans
son conteneur, où il était alors prêt pour le développement

Film en feuille
La technique permettant d'utiliser le film en feuille,
principalement employé par les photographes professionnels,
était hautement spécialisée. Pour préserver son intégrité, le
film en feuille était uniquement manipulé dans l'obscurité
totale. Le photographe devait séparer la feuille d'un
intercalaire, qui empêchait les feuilles de se coller les unes
aux autres. À partir de là, le film était directement inséré dans
des supports étanches à la lumière, qui étaient ensuite intro-
duits dans l'appareil photo. Une fois le support introduit à l'arrière de l'appareil photo, le photographe
retirait un couvercle à l'avant du film, pour qu'il puisse être exposé à la lumière lors de l'activation de
l'obturateur. Ce procédé permettait de capturer l'image sur le film, avant de réintroduire le couvercle. En
sécurité dans son support opaque, le film en feuille pouvait alors être transporté pour le développement.

Film-pack
Enfin, le film unique de son époque, le film-pack,
proposait aux consommateurs un emballage résistant et
caractéristique, combinant un faible prix et une portabilité
remarquable. La coque du film-pack protégeait le film de la
lumière. Une large languette à tirer permettait d'ôter une
mince feuille de papier protecteur, vue par vue, afin de
préparer le film pour l'exposition. Une fois toutes les vues du
film utilisées, le conteneur complet pouvait être retiré de
l'appareil photo et confié pour son développement. 3
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Le cas que vous allez maintenant examiner se déroule chez Tamworth, qui était à l’époque un
important fabricant de films. Un type de film en particulier, le Hi-Grade 202, était la bête noire de
Tamworth ; son voilage persistant finirait par causer davantage que sa part de mauvais clichés.

Vous voyez la différence ? Pas besoin d’avoir un œil aiguisé.

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Tamworth Petrochemical
Company n’était pas une
entreprise banale et encore
moins une entreprise
pétrochimique ordinaire. En
particulier, un type de
pellicules souffre d’un défaut
de voilage. Les réclamations
augmentent et Tamworth a
besoin de connaître la cause.

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Le Problème

La société Pétrochimique Tamworth est propriétaire de Hi-Grade Photo Products depuis sept mois.
Hi-Grade fabrique plusieurs types de pellicules. Hi-Grade 202 est une émulsion hypersensible de qualité
supérieure. Ce produit est commercialisé au niveau national sous forme de rouleau pour les amateurs et
sous forme de feuilles et cassettes pour les professionnels.
Les rouleaux de pellicules sont similaires à ceux que l’on trouve généralement dans le commerce
grand public. Les pellicules en feuilles sont manipulées dans l’obscurité totale, le photographe retirant
les négatifs de leurs papiers intercalaires et les insérant dans un porte-négatifs imperméable à la lumière
qui est lui-même placé dans l’appareil photographique. La cassette de pellicules est un élément intégré
prêt à être installé dans l’appareil. Le photographe tire tout simplement sur une languette de papier
pour retirer le négatif et en remettre un autre en place.
La procédure d’utilisation et de développement des pellicules n’a pas changé depuis sa création. Les
pellicules Hi-Grade 202 sont fabriquées en petits lots à l’usine américaine de Denver (Colorado). Après
l’emballage, les pellicules sont expédiées aux distributeurs de toutes les régions du pays pour leur mise à
l’étalage et leur vente. Pellicule remarquablement stable dont la vie d’étagère est de 18 mois, la pellicule
« Hi-Grade 202 » jouit d’une excellente réputation dans l’industrie.
Depuis 48 heures, les services Ventes, Fabrication et Recherche travaillent ensemble à résoudre ce
problème grave et soudain concernant les pellicules « Hi-Grade 202 ». Les clients et les distributeurs se
plaignent de plus en plus des livraisons de pellicules voilées. La situation est critique et demande une
*
action immédiate. Sinon, la seule solution sera de retirer les pellicules « Hi-Grade 202 » du marché.
Ces dix derniers jours, des clients se sont plaints à leurs distributeurs régionaux que les pellicules en
feuilles qu’ils reçoivent sont voilées. Certains distributeurs ont accumulé les plaintes pendant plusieurs
jours avant de les signaler. Les plaintes, qui se font de plus en plus nombreuses tous les jours, viennent
de toutes les régions du pays. Parmi nos 7000 distributeurs, on compte aujourd’hui 682 mécontents.
Bien que le service Ventes remplace chaque boîte de pellicules voilées par deux nouvelles boîtes, cela ne
satisfait personne. Par exemple, deux studios de publicité ont menacé de ne plus utiliser nos produits du
fait que nos pellicules, dont ils se servent pour photographier des évènements uniques, étaient voilées
et ont ruiné des photos.
Le service Ventes est fort préoccupé par les problèmes de fabrication qui ont entraîné des retards
de livraison. Par exemple, un grave incendie dans le Département Emulsion des pellicules « Hi-Grade
202 » a abouti au licenciement de plusieurs employés accusés de négligence et à la formation de
nouveaux mixeurs d'émulsion ; à des problèmes de livraison du papier intercalaire pendant plus d'un
mois après l'acquisition ; et à des délais de livraison des nouveaux conteneurs pour le stockage en vrac
des ingrédients bruts.
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Bien que les difficultés avec le papier intercalaire se soient dissipées avec la sélection d'un nouveau
fournisseur, tous les nouveaux conteneurs de produits en vrac n'ont pas encore été livrés et les anciens
conteneurs sont donc encore utilisés.
Les ventes de pellicules en feuilles et en cassettes ont rapidement chuté et plusieurs professionnels
ont commencé à utiliser des marques concurrentes. Jusqu'à présent, tout ce qui a permis de conserver la
plupart des distributeurs a été le remplacement des pellicules et la bonne réputation du Hi-Grade.
Le service Ventes a constaté que toutes les pellicules « Hi-Grade 202 » sont expédiées, distribuées,
stockées et vendues aux distributeurs de la même façon. II a également détecté que les plaintes
proviennent de petites entreprises dont le roulement de stock est lent, mais il s'attend à recevoir sous
peu des plaintes provenant des grands distributeurs. La date de péremption d'aucune des pellicules
n'était passée et le voilage s'est révélé au moment du développement plutôt qu'après.
Le service Ventes demande l'arrêt de la production pendant quelques jours jusqu'à ce que le service
Fabrication vérifie ses opérations en profondeur (c'est-à-dire les conséquences de l'incendie, l'efficacité
de la formation des mixeurs de l'émulsion, la contamination éventuelle par les nouveaux conteneurs de
stockage). On estime les coûts à 30 000 dollars environ.

*
Le service Fabrication estime que le nouvel emballage avec fermeture à glissière est la cause du
problème. Du fait que de nombreux clients s'étaient plaints que l'emballage n'était pas attrayant et qu'il
était difficile à ouvrir, le service Ventes s'est empressé de créer, il y a cinq semaines, un autre emballage
avec une fermeture à glissière plus facile à utiliser. Cela ne nous a pas donné le temps de procéder à un
test rigoureux. Le problème a commencé à ce moment-là. Le service Fabrication recommande de revenir
à l'ancien emballage qui a été utilisé pendant trois ans sans difficulté. Cela nous donnera le temps de
vérifier de plus près l'emballage avec une fermeture à glissière. Le service Fabrication recommande de
suspendre immédiatement l'utilisation de l'emballage avec une fermeture à glissière pour d'autres
pellicules « Hi-Grade 202 ». Cette proposition exige un budget de 20 000 dollars seulement. Elle pourrait
cependant créer une autre source d'insatisfaction inconnue au niveau du client à ce stade critique. Le
service Recherche a mené des tests sur les échantillons renvoyés. Leurs résultats sont présentés en
annexe.

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A: Monsieur B. Wheeler
De : J. B. Strom, Directeur de la recherche
Réf. : Résumé des résultats des tests de laboratoire des pellicules voilées
et Recommandations
Nous avons examiné les échantillons de pellicules voilées fournis par le service Ventes et avons
essayé de reproduire le voilage exactement comme il apparaît sur les renvois.
Nous avons analysé 50 boîtes de pellicules renvoyées et avons détecté deux aspects qui leur
sont communs : tous les négatifs contenus dans une boîte sont voilés et le voilage est uniforme
sur toute la surface de chaque négatif.
Nous avons ensuite pris dans l'entrepôt de l'usine 36 échantillons de bonnes pellicules en
feuilles et les avons soumis avec soin à une variété de tests. Notre seul moyen de reproduire
exactement l'effet unique de voilage était d'exposer toutes les pellicules en feuilles à une
même source de radiations (telle qu'une machine à rayons X).
Considérant que ce type de pellicule est extrêmement sensible et donc plus susceptible à la
contamination, et qu'il a été clairement démontré que les radiations produisent exactement les
mêmes caractéristiques que les pellicules voilées renvoyées, nous estimons qu'une source de
radioactivité est à l'origine du problème.
Nous savons que des retombées radioactives ont contaminé divers produits dans le passé.
L'incidence de Strontium 90 étant très élevée, il est tout à fait possible que le voilage soit
*
attribuable à une retombée radioactive. Il est aussi certainement possible que l'utilisation de
machines à rayons X, ou toute autre source de radiation à proximité, ait causé le voilage.
Nous proposons qu'un budget d'urgence de 45 000 dollars soit consacré à une étude immédiate
pour :
• situer les sources de radioactivité dans l'usine, dans nos entrepôts, sur le terrain et dans
toute la filière de distribution ;
• effectuer une analyse afin de déterminer s'il existe une corrélation entre l'incidence de
retombées radioactives dans une région spécifique et le nombre de détaillants et leurs
clients qui se plaignent de cette situation dans cette région.
Il est probable que nous trouverons la source de contamination radioactive avant l'épuisement
du budget. Tout problème de cette envergure, et qui est susceptible de s'étendre rapidement,
nécessite et justifie une action profonde et exhaustive de cette nature.

STOP 8

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