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Criminaliste italien
(1895)
L’homme criminel
Criminel né – Fou moral – Épileptique – Criminel fou –
Criminel d’occasion – Criminel par passion.
Tome premier
avec figures dans le texte
Deuxième partie :
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime
à partir de l’article de :
Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2004 pour
Macintosh.
Mise en page sur papier format : LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’)
Afin d’éviter d’alourdir le fichier, nous n’avons pas inséré des fi-
gures dans le texte. Nous avons plutôt créé des hyperliens conduisant
au site internet des Classiques des sciences sociales d’où il est pos-
sible de voir et télécharger les figures en question.
PREMIÈRE PARTIE.
Embryologie du crime.
1. La peine
2. La peine chez les animaux domestiques; les succédanés pénaux
1. Avortement
2. Infanticide
3. Meurtre des vieillards, des femmes et des malades
4. Autres causes d’homicide
5. Cannibalisme
6. Conclusion
1. Vols
2. Autres crimes
V. Principes de la peine
1. Colère
2. Vengeance
3. Jalousie
4. Mensonge
5. Sens moral
6. Affection
7. Cruauté
8. Paresse, oisiveté
9. Argot
10. Vanité
11. L’alcoolisme et le jeu
12. Prédispositions à l’obscénité
13. Imitation
14. La prévoyance
II. Casuisitque
Cas de Zambaco
Cas d’Esquirol
1. Criminels
2. Non criminels
3. Leurs ascendants
4. Étude sur 29 sujets dont l’enfance est connue
Seconde partie.
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime.
1. Histologie
2. Ostéômes
3. Méningites
4. Altérations cérébrales
1. Sacrum
2. Perforation de l’olécrâne
3. Vertèbres en plus
4. Cœur, etc.
5. Foie, rate, etc.
6. Organes génitaux
7. Estomac
8. Agglomérations d’anomalies
1. Collaborateurs
2. Mineurs
3. Adultes - Taille et poids (V. Atlas, pl. Ire)
4. Grande envergure (V. Atlas, pl. II)
5. Pieds et mains
6. Pied préhensile
7. Rides
8. Canitie, etc.
9. Gracilité
10. Thorax à entonnoir
11. Amplitude thoracique
12. Capacité crânienne
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 10
13. Front
14. Circonférence crânienne
15. Demi-circonférence antérieure
16. Diamètre de la mâchoire
17. Diamètres zygomatiques
18. Index céphalique
19. Face
20. Diamètres verticaux
21. Anomalies
22. Exceptions
1. Objections
2. Photographies de 424 criminels (V. Atlas)
Troisième partie.
Biologie et psychologie du criminel-né.
1. Température axillaire
2. Pouls
Urines
Tableau des moyennes individuelles et générales
1. Analgésie
2. Sensibilité générale
3. Algométrie
4. Sensibilité tactile
5. Acuité visuelle
6. Vue
7. Champ visuel (fig. 1, 2 et Atlas)
8. Odorat
9. Goût (fig. 3)
10. Acuité acoustique
11. Acuité su sens musculaire
12. Sensibilité à l’aimant
13. Sensibilité météorique
14. Dynamométrie
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 12
15. Mancinisme
16. Anomalies de la motilité
17. Marche (V. Atlas)
18. Mouvement réflexe
19. Réflexes vaso-moteurs
20. Réaction au nitrite d’amhyle
21. Sphygmographie des délinquants (V. Atlas)
22. Plétismographe (V. Atlas)
23. Conclusions
24. Résumé - Applications
25. Longévité
26. Pitié
27. Disvulnérabilité
28. Poids et taille
29. Mancinisme
1. Fréquence
2. Effet de la prison
3. Imprévoyance et impatience
4. Rapports avec la tendance au crime
5. Antagonisme
6. Suicide indirect
7. Suicide simulé
8. Suicide double
9. Suicide chez les fous criminels
1. Sentiments
2. Instabilité
3. Vanité (V. Atlas)
4. Vanité du délit (V. Atlas)
5. Vengeance
6. Cruauté
7. Le vin et le jeu
8. Jeu
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 13
9. Autres tendances
10. Tabac
11. Lasciveté
12. Comparaison avec les fous
13. Comparaison avec les sauvages
1. Psychométrie
2. Paresse
3. Légèreté d’esprit
4. Raillerie
5. Imprévoyance
6. Spécialistes du crime
7. Empoisonneurs
8. Pédérastes
9. Violateurs
10. Voleurs
11. Escrocs
12. Assassins
13. Paresseux et vagabonds
14. Criminels de génie
15. Criminels de savants
16. Intelligence chez les fous
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 14
CHAPITRE X. De l’argot.
1. Hiéroglyphes (fig. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8)
2. Dessins (V. Atlas)
3. Écriture (V. Atlas, pl. XXII)
4. Comparaison avec les fous
1. Bibliographie
2. Chants des prisonniers
3. Chants des Parias
4. Chants des Sardes et des Corses
5. Sujets dans la littérature des prisons
6. Lebiez, Ruschovich, etc.
7. Anarchistes
8. Critique
9. Comparaison avec les fous
10. Conclusion
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 15
Note
Cette édition numérique a été réalisée grâce au patient et minutieux travail de
Mme Janick Gilbert [interprète en langage des signes au Cégep de Chicouti-
mi], bénévole, qui a entièrement retapé au clavier de son ordinateur portable le
texte de ce livre. La numérisation de ce vieux livre de 1906 était une tâche im-
possible, étant donné son état de détérioration.
Deuxième partie
Anatomie pathologique
et anthropométrie du crime
________
Deuxième partie :
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime
Chapitre premier
Examen de 383 crânes
de criminels 1
I.
Retour à la table des matières
132
1. Capacité crânienne. Par une étude comparées des crânes de 121 cri-
minels italiens, mâles, et des crânes de 328 italiens en état normal (voir la fig. à
pag. suiv.) nous avons trouvé que pour les capacités minimes de 1101 à 1200) les
criminels l’emportent sur les autres; il en est de même pour les capacités de 1251
à 1300; ils sont, d’après nos études, presque en proportion égale pour les capacités
de 1401 à 1450, et un peu supérieurs à partir de 1351 à 1500. Par rapport aux ca-
pacités de 1501 à 1550 ils sont en infériorité; au contraire, ils sont en proportions
égales aux personnes en état normal pour ce qui est des capacité de 1551 à 1600 et
de 1651 à 1700. nous trouvons les criminels en nombre inférieur pour les capaci-
tés supérieurs à 1700, ils font défaut.
Donc excepté pour les chiffres de 1451 à 1500, les petites capacités l’em-
portent et les très-grandes sont rares, bien que les criminels aient une taille plus
élevée que les honnêtes gens, et quoique mes mesures aient été prises avec du
sable, et que de cette façon mes mesures soient supérieures aux autres de 100 c. c.
que si pour les capacités minimes de 1101 à 1200 les voleurs sont en nombre bien
plus grand, c’est pourtant le contraire qui arrive pour les capacités de 1551 à
1700. La capacité de 1451 à 1550 serait la plus commune chez les voleurs (le 17,
6 0 I 0), tandis que chez les assassins on trouverait plus fréquemment une capacité
arrivant de 1351 à 1400, et de 1451 à 1500. À partir de la capacité de 1551 à
1600, la proportion des voleurs serait inférieure à celle des honnêtes gens et même
à celle des assassins, ce qui se vérifie encore mieux à partir de la capacité de
1600.
Quant aux capacité minimes de 1101-1200, les voleurs l’emportent sur les in-
dividus biens conformés dans la proportion de 14 à 1. Pour les capacités un peu
plus grandes et pour les très-grandes, on trouve moins de voleurs que d’assassins.
Même dans la moyenne arithmétique, qui pour les individus en état normal est
de 1474 à 1550, les criminels présenteraient une infériorité; c’est-à-dire une capa-
cité de 1455; et les assassins (1457) présenteraient, à cet égard, une faible supério-
rité sur les voleurs (1449).
Nous n’avons eu que deux cas de criminels par passion, et nous les étudiâmes
à part; nous trouvâmes une capacité de 1355 et une de 1520.
à 1400. Dans les chiffres plus élevées leur tantième, sauf pour quelques ex-
1
(Beiträge zur physichen Antrop. Der Bayern, 1883), chez les assassins Bavarois,
si l’on trouve beaucoup de capacités minimums (25 pour 19 des normaux), ce
3
nombre serait compensé par une certaine supériorité en fait de capacités maxi-
mums 18 à 6; mais, comme on le voit, ces études ne se rapportent qu’à des assas-
sins, et peut-être faut-il tenir compte du crétinisme qui, comme on le sait, est très-
répandu dans cette partie de l’Allemagne, et favorise les macrocéphalies.
Pourtant il faut convenir qu’avec les méthodes sériaires on trouve bien des
fois dans les criminels une supériorité dans les grandes capacités . Cela ressort,
4
1
CapacitéFemm. crim.Femm. normFemm. foll.0I0I01000-10500,911051-
11001,721,821,12,501101-11506,895,454,63,541151-120012,2510,04,63,541201-
125020,6010,99,28,211251-130025,8610,920,713,571301-135012,2520,014,019,631351-
140010,3410,916,117,491401-14505,179,098,015,351451-15003,446,365,710,001501-
15505,456,93,21551-16005,455,71,431601-16501,721,822,31651-
17001,071701-17500,911,1
2 Criminels Allemands de Wwsbach :
aussi, d’une récente étude de Manouvrier, selon lequel il n’y aurait chez le assas-
sins d’autre différence des crânes normaux qu’un certain nombre de capacités
énormes (au dessus de 1900)
Bref : le plus grand nombre des crânes petits, et, peut-être aussi, des trop
grands, serait un des caractères des criminels. La même chose arrive pour les
fous; mais ceux-ci présentent une tendance bien plus marquée à excéder dans les
capacités très-grandes.
En général, lorsque la grande capacité crânienne des criminels n’est pas due à
une hydrocéphalie, elle est justifiée par une intelligence très-développées. Ainsi,
dans les cas que j’ai pu étudier, on doit compter parmi ceux qui dépassent la
moyenne et qui arrivèrent à 1600 c. c. : Artusio, féroce, mais intelligent chef de
brigands piémontais, et un de ses complices tout aussi rusé que lui, Violini; Men-
daro, qui tua sa femme avec l’aide d’une complice et sut, pendant longtemps élu-
der la justice; I……. de Verceil, voleur de grands chemins, doué de beaucoup de
talent; la C…… de Vérone, empoisonneuse, qui était aussi très-rusée; Soldati, qui
à l’âge de 70 ans avait encore toutes ses sutures intactes et avait réussi à se sous -
traire à toutes les recherches de la justice, malgré un grand nombre de meurtres et
de viols.
Parmi les criminels à grande capacité crânienne cités par Heger et Bordier,
nous trouvons Rooxel et Jansens qui dans les assassinats avaient plutôt joué le
rôle d’ordonnateurs que celui d’exécuteurs, et Minder-Krafft 1631, Pascal 1770,
qui avaient introduit dans leurs bandes une sorte d’organisation burocratique.
CapacitéCimetière de l’OuestAssassins1300-140021,8711,421400-150018,7514,281500-
160043,7528,571600-17003,1322,851700-18006,2516,661800-19003,122,771900-
20003,122000-21002,77
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 24
Pour l’Allemagne, si l’on compare les 215 crânes de Weisbach avec les 124
crânes de criminels de Bonn et avec ceux des 83 fous de Zuckerkandl , on voit 2
que les fous surpassent les criminels dans les proportions de 53, et qu’ils pré-
sentent une infériorité dans les dimensions plus grandes. Les criminels surpassent
les individus sains dans les dimensions les plus fortes, à partir de 54; leur nombre
est un peu inférieur entre 52 et 53, il est beaucoup inférieur entre 51 et 52.
1
AssassinsVoleursIndiv. sains461-4701,6―1,6471-480――1,6481-4906,68,611,1491-
50013,311,115,5501-51038,344,417,5511-52015,013,817,5521-53036,011,117,5531-
5403,311,111,1541-5503,3―3,1551-5603,3――561-570―――571-5801,6―3,1581-
590―――591-600―――
2
Sains p. 0I0Criminels p. 0I0Fous p. 0I047,6-48,0――1,248,5-49,01,91,8―49,1-
50,012,61,39,650,1-51,020,08,522,951,1-52,031,122,022,952,1-53,018,222,624,153,1-
54,013,018,28,454,1-55,02,811,59,655,1-56,02,85,51,256,1-57,0―0,6―57,1-57,40,51,8―
3 Français (BORDIER).
6. - Arcs et courbes. - Bordier dans son travail sur les crânes des assassins étu-
die les diverses parties de la courbe antéro-postérieure; en donnant à la totalité de
la courbe la valeur de 100, il trouve :
5718,024,028,542,816,657-5836,024,522,010,711,1158-5918,014,012,0――59-
608,07,08,0―2,6160-616,03,31,8―2,6161-622,01,8―――62-62,5―0,70.9――
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 26
Chez les assassins de Bruxelles on trouve, pour la courbe pariétale, une diffé-
rence contradictoire.
Benedikt, en comparant les crânes de criminels de Bonn avec les crâne de Kö-
nigsberg, aurait trouvé :
Il y donc, de la part des criminels, une certaine supériorité dans les brachicé-
phales et une remarquable infériorité en fait de mésacéphales et de dolichocé-
phales.
Ce fait très-curieux qui se vérifie aussi chez les crétins, et qui nous sera
confirmé par les études sur les vivants, avait été entrevu et mis à profit par les
phrénologues qui selon leur habitude, en exagérèrent la portée et en déduirent que
l’organe de la cruauté résidait dans le lobe temporal.
Toutefois il faut noter que Cipolla et Gasparone, brigands fameux, ont un in-
dex céphalique de 72, et que si la féroce Bouhors, si les assassins Matzket et Fle-
gel avaient un index de 89, 86, 82, par contre Blank était dolichocéphale ainsi que
Lacenaire 76, Hélouin 79, Avril 72, Lemoine 73, Moreau 72 (Orchanski, Bullet.
de la soc. Anthropol.). Et de même pour les dolichocéphales (qu’on trouve pour
une simple coïncidence plus nombreux, 25 sur 42, dans les escrocs et dans les vo-
leurs) on voit qu’ils prédominent là où la dolichocéphalie est physiologique, sauf
l’exagération des index qui vont à 68,70. Aussi les Sardes criminelles nous
donnent une moyenne de 70,9 au lieu de 72,3 que Zannetti trouva pour les hon-
nêtes, ou de 74 que donne Calori. Et nous avons, là le 100 pour 0 I0 des dolicho-
céphales au lieu de 90 p. 0I0 que donne Calori pour les Sardes normaux.
Et pendant que Heger avait trouvé pour les assassins à Bruxelles les diam.
vert. 131, index 71.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 28
9. Index frontal. Je ne trouve pas, non plus, qu’il y ait une différence
bien nette pour l’index frontal; Heger a obtenu une moyenne de 66,7 à 67,8 chez
les criminels et une moyenne de 67,7 chez les personnes honnêtes.
Chez les 60 femmes coupables, je trouve les plus grandes index frontaux :
49 Criminels 60 Individus
honnêtes
De 60 à 65,2 32 0I0 36 0I0
De 66 à 70 44 » 36 »
De 72 à 73 16 » 26 »
De 75 à 78 4» 4»
Ces chiffres prouveraient, tout au plus, que les crânes des criminels ont plus
souvent que les autres des index courts et un peu moins souvent qu’eux d’index
hauts.
çais normaux (13,4 à 12,8). D’après mes recherches cette différence ne serait pas
appréciable, car la moyenne serait de 14, 1 pour les criminels, tout à fait comme
pour les honnêtes gens, 13,1; elle serait de 12,2 pour les fous.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 30
13. Index nasal. Les index les moins élevés sont chez les criminels
deux fois plus rares que chez les individus normaux, tandis que les index les plus
élevés (46-55) sont presque deux fois plus fréquents 1
Quant au diamètre , nous voyons prévaloir chez les criminels les chiffres de
2
100 et 110 en même temps que nous sommes frappés d’une absence des chiffres
inférieurs, de 80-90, que nous trouvons par contre chez les individus bien consti-
tués et plus souvent encore chez les fous. Les diamètres infimes, de 70 à 80, se
trouveraient bien plus souvent chez les fous qui présentent une infériorité pour les
diamètres les plus grands.
Par la méthode sériale, nous trouvons que dans les chiffres inférieurs, de 30-
24, les fous dépassent tous les autres. Les criminels viennent ensuite; pour les
chiffres très-grands, les fous seraient en plus grand nombre; mais pour les
moyennes de 31-39 ceux-ci seraient dépassé par les individus sains et par les cri-
minels . 3
1 Index nasaux.
Individus sains 43Criminels(Piémontais)(Piémontais)Index de 31-352,37,5» 36-406,917,5» 41-
4523,232,5» 46-5044,135,0» 51-5520,97,5» 56-602,3
2 Diamètre mandibulaire
Individus sainsfousCriminelsDistanceDistanceDistance110-120-1110-120-1110-120-0100-110-
14100-110-22100-110-2990-100-1190-100-2490-100-1580-90-380-90-480-90-070-80-070-
80-170-80-1
3
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 32
Orchanski (Bullt. Soc. Anthrop., 1882)dans son étude sur 24 assassins français
confirma le fait du plus grand développement de la mâchoire que nous avons trou-
vé dans les criminels, et l’analogie que, sous ce rapport, ils présentent avec les
sauvages. Voici ses preuves numériques vraiment éloquentes :
En résumé, on trouve chez les criminels un poids plus grand, une largeur plus
considérable et une plus grande hauteur des branches du maxillaire inférieur, ce
que nous pourrions mettre en rapport avec les résultats de Quatrefages sur les
crânes préhistoriques.
15. Index facial Mis en comparaison des individus normaux, les crimi-
nels présentent peu d’index de 50 à 65, tandis qu’ils en présentent beaucoup d’éle-
vés et de très-hauts; mais, comme nous avons déjà vu, cela ne dépend que d’une
augmentation dans la hauteur, la largeur se maintenant presque la même chez les
criminels comme chez les autres . 1
Chez les Belges, entre 61et 64 nous trouvons un plus grand nombre de per-
sonnes honnêtes et un nombre plus grand encore entre 66 et 67. Au contraire, de
72 à 78 le nombre des criminels l’emporte :
1
40 Criminels piémontais38 Individus sains piémontais50-552,5 0I00 0I056-60 »18,4 »51-
6517,5 »36,8 »66-7055,0»29,2 »71-7517,5 »14,0 »76-802,5 » »
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 34
Ce qui fixerait son étendue maximum chez les incendiaires, son étendue mini-
mum dans les prostituées. La moyenne serait chez les femmes de 731 (mini-
mum 580).
Quant à la capacité orbitaire, Bono dans son beau travail Della capacità orbi-
tale e cranica (Archivio di Psichiatria, Torino, 1880) a trouvé sur 50 criminels
une moyenne de 59,2 et sur les criminelles une moyenne de 53,5. Il a trouvé :
Chez les Lombards honnête la cap. orb 56,5 Id. les Pié- 5,65
montais
Id. coupables Id. 61,5 Id. 57,7
Id. vous Id. 56,2 Id. 55,6
Les criminels se rapprochent des crétins qui ont une capacité orbitaire de 58
avec un index de 25,0, pour les hommes, de 24,5 pour les femmes; tout à l’opposé
de ce qui arrive pour les fous (55,6); ces derniers en effet, ne présentent pas de
différence avec les individus sains.
Dans les criminelles on ne trouve ici de notable que la grande capacité des
empoisonneuse et des assassines.
L’index céphale-spinal, mesuré sur 20 criminels, a été trouvé plus grand que
d’ordinaire et arrivait jusqu’à 34,4. Chez 6 autres il était au dessous de la
moyenne, de 17 à 21.
Chez les 60 criminelles la moyenne de l’index est de 17,7. Elle est inférieure
de beaucoup à celle des normaux; l’index minimum se trouve chez les incen-
diaires et les complices en viol; le maximum chez les empoisonneuses et les pros -
tituées.
On voit donc que cet index dans les fous se rapproche plus de celui des
hommes sains que de celui des criminels, lequel est tout à fait inférieur. Il est plus
grand dans les coupables d’incendie, blessure, homicide, vol, et moindre dans les
crimes de viol.
17. L’angle facial n’atteignit que trois fois 80º, 81º dans 40 criminels, et
chaque fois il s’agissait d’assassins ou de chefs de brigands qui présentaient tous
les plus grandes capacités cérébrales.
Chez les 38 autres la mesure de cet angle n’atteignit pas la moyenne ordinaire,
et cela presque sans différence ethnique; ainsi chez deux meurtriers piémontais, il
y avait 69º, chez deux faussaires et voleurs lombards, 70º, et même chez un Sici-
lien 68º, chez un voleur lombard 69º, chez un Romain 72º, et chez des Toscan 74º.
Et il faut observer que les Romains et les Toscans sont en Italie ceux qui pré-
sentent l’angle facial le plus ample.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 36
Les angles plus amples se trouvent dans les empoisonneuses et dans les
condamnées par blessures; les moindres dans les crimes sexuels et dans les meur-
trières.
__________________
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 37
II.
Anomalies crâniennes.
1. Nous trouvons, par contre, une large moisson dans l’étude des anoma-
lies; on peut s’en faire une idée en jetant un coup d’œil sur le tableau suivant où
j’ai tâché de réunir toutes les observations faites par les savants de l’Europe, et où
j’ai réuni dans une seule colonne (des Italiens) les observations d’Amadei et celles
de De Paoli, de Cougnet et de Bono et les miennes.
En considérant les résultats que ces 383 crânes nous donnent, on trouve que
les lésions les plus fréquentes sont : une grande proéminence des arcades sourci-
liaires, , 58,2 0I0; l’anomalie dans le développement des dents de sagesse 44,6 0 I0;
la diminution de la capacité du crâne 32,5 0 I0; la synostose des sutures 28,9 0I0; la
plagiocéphalie 23,1 0I0; les os wormiens 22,0 0I0; la simplicité des sutures 18,4
0I0; la proéminence de la protubérance occipitale 16,6 0 I0; la fossette occipitale
moyenne 16,0 0I0; les sutures symboliques 13,6 0I0; l’aplatissement de l’occipital
13,2 0I0; les ostéophytes du clivus 10,1 0I0; l’os d’Incas ou épactal 10,5 0I0.
Dans des proportions moindres on trouve des trococéphalies 9,0 0 I0; le front
petit étroit 8,6 0I0; les os crâniens minces 8,4 0 I0; la déformations du trou occipi-
tal
7,3 0I0; des traces de lésions traumatiques 6,6 0 I0; des anomalies dans le déve-
loppement des canins 6,2 0I0; la subscaphocéphalie 6,1 0I0; des pertes de sub-
stance résultat d’ostéite 5,6 0I0; le chevauchement des os 5,5 0I0; les ostéomes du
rocher et de l’os occipital 4,8 0I0; l’oxicéphalie 4,5 0I0.
ANOMALIES
177 36 13 53 18 31 12 28
Arcades sourciliaires et sinus frontaux proéminents 66,9 60,0 » » » 13,0 » » 52,2 206
Anomalies dans le développement des dents de sagesse 57,0 » » » » » 8,0 » 44,6 47
Crânes pathologiques 40,1 58,0 » » » » » » 43,7 183
Soudure partielle ou complète des sutures 37,0 » 53,8 3,7 22,2 25,8 8,3 » 28,9 304
Front fuyant 31,7 33,0 » » 5,5 » » » 28,0 228
Grande épaisseur des os, ostéoporose 60,9 39,0 » 39,6 » 9,6 » 42,8 43,4 290
Plagiocéphalie et asymétrie 14,9 37,0 23,0 » 33,0 13,0 12,0 » 23,1 289
Os wormiens 21,0 38,0 7,7 20,5 17,0 32,0 8,3 » 22,0 314
Crânes anormaux 18,8 33,0 » » » » » » 21,3 183
Sutures frontales très-simples 18,7 » » 9,5 » 32,0 » » 18,4 260
Proéminence de la protubérance occipitale 3,8 2,7 » » » » » 46,4 16,6 90
Fosse occipitale moyenne 15,4 » 7,7 » » » 33,0 » 16,0 193
Augmentation de la capacité du crâne 10,3 45,0 » » » 6,4 » » 15,0 232
Renflement du frontal 17,1 8,3 » » » » » » 14,1 106
Sutures festonnées ou symboliques 10,7 25,0 » » » » 8,3 » 13,6 169
Suture médio-frontale 12,0 19,5 7,7 9,5 11,0 16,0 » » 12,7 299
Ostéophytes du clivus 10,3 » » » » » 8,3 » 10,1 118
Os d’Incas, ou épactal 4,5 » 23,0 » » 16,0 8,3 » 10,5 136
Trococéphalie 10,0 » » » » » 16,0 3,5 9,0 110
Front petit, étroit ou aplatit 9,3 » » » 5,5 » » » 8,6 93
Os du crâne très-mince 10,0 » » 7,5 » » » 7,1 8,4 131
Exagération de la rondeur ou de l’obliquité du trou occipital 7,0 » » » » » 8,3 » 7,3 82
Asymétrie ou obliquité de la force 7,6 30,0 » » » 9,6 » » 7,1 236
Traces de lésions traumatiques 7,0 » » 1,8 11,0 » » 10,7 6,6 242
Anomalies dans le développement des dents canines 6,0 » » » » » 8,0 » 6,2 96
Subscaphocéphalie 4,0 5,5 15,3 » » » » » 6,1 98
Pertes de substances, suite d’ostéite » 11,0 » 0,9 » » » » 5,6 99
Chevauchement des os du crâne 4,0 11,0 » » » » » » 5,5 161
Ostéome du rocher et de l’os occipital 4,0 8,0 » » » » » » 4,8 62
Oxycéphalie 6,0 » 7,6 1,8 5,5 » » » 4,5 133
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 39
Mais nous n’avons pas encore cité toutes les anomalies que l’on y peut ren-
contrer. Déjà en jetant un coup d’œil sur le tableau précédent, on peut supposer
que beaucoup d’observateurs ne relevaient pas certaines altérations, non qu’elles
eussent fait défaut, mais parcequ’ils s’arrêtaient plutôt aux caractères extérieurs
du crâne et spécialement de la voûte. Par conséquent, dans le résumé, afin d’évi-
ter les erreurs produites par les omissions involontaires, nous n’avons déduit la
moyenne que dans les cas où l’on pouvait être sûr que l’on avait réellement obser-
vé une certaine anomalie, soit que les résultats fussents positifs, soit qu’ils fussent
négatifs.
Il est impossible, par exemple, que le front fuyant n’ait été remarqué que par
Corre et par moi; comme il est aussi impossible que sur les 35 crânes de Ten-Kate
et de Pawloski, un, au moins, n’eût pas été plagiocéphale.
De même si l’on pense aux rapport qui existent entre un crâne plagiocéphale
et une face asymétrique, il est impossible que Benedikt et Corre qui trouvèrent
tant de crânes plagiocéphles n’aient rencontré aucun cas d’obliquité de la face.
Cela vient, aussi, de ce que chaque anthropologue a une prédilection pour cer-
taines anomalies; et voilà pourquoi, à moins que nous ne tenions compte des
études faites seulement en Italie, nous pouvons avancer qu’il n’y a que les os wor-
miens et les sutures dont on puisse dire qu’ils ont été étudiés uniformément, car il
se dénoncent plus facilement. Aux études faites en Italie on doit recourir forcé-
ment pour une longue série d’anomalies laissées de côté par les savants étrangers.
Quelques unes d’entre elles sont très-importantes : le prognatisme par exemple 69
0I0; l’eurignatisme 36,1 0I0; la mâchoire inférieure volumineuse 19,8 0 I0; et
l’obliquité des orbites 19,2 0I0; viennent, ensuite, la petitesse des orbites 13 0 I0; le
menton rentrant 12,8 0I0; la fosse canine déprimée 11,7 0I0; les excavations lais-
sées des glandes de Pacchioni 11,8 0 I0; l’enfoncement de l’ethmoïde dans les
fosses orbitaires 11 0I0; la suture maire 10,3 0I0; la saillie de l’angle orbitaire de
l’os frontal 9,1 0I0; le double trou sous-orbitaire 8,5 0I0; le développement anor-
mal des os de la face 6,0 0 I0; la synostose de l’atlas 7,9 0 I0; l’apophise temporal
du frontal 3,4 0I0; la nanocéphalie 2,7 0I0; le bec frontal du coronaire 2,0 0I0.
Pour les anomalies dont Legge et moi-même n’avons pas étudié les propor-
tions, j’ai supplée avec une étude sur 44 soldats et 29 femmes en les marquant
avec un *. J’y mets à côté les proportions trouvées chez 170 fous par moi et par
Sommer, et celles trouvées dans les races plus sauvages par Anutchine, Gruber,
etc., en tenant compte ici seulement des chiffres plus élevés . 1
MÂLES FEMMES
Criminelles
Criminels
Normales
Sauvages
Normau
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
Fous
Asymétrie et plagiocéphalie 20,0 42,0 21,0 17,2 ? 24,0
Sclérose crânienne 18,0 31,0 31,0 17,2 100 50,0
Sutures soudées 25,0 37,0 26,0 13,0 8,0 28,8
Sutures métopique 9,0 12,0 5,1 10,0 5,0 9,0
Os wormiens 28,0 59,0 46,0 20,0 » 68,0
Os épactal 0,5 9,0 1,7 6,8 5,4 3,8
Fusion de l’atlas avec l’occipital 0,8 3,0 3,2 0,0 » 2,7
Fossette occipitale moyenne 4,1 16,0 3,2 3,4 26,0 14,0
Trou de Civinini 27,0 15,0 8,1 » » »
Front fuyant 18,0 36,0 6,8 10,0 » «
Apophyse frontale du tempor. 1,5 3,4 6,6 0,0 12,0 2,3
Acardes sourciliaires avec sinus développés 25,0 62,0 29,0 19,0 100? 67,0
Anomalies des dents infér. 6,0 2,0 3,2 0,5 40,0 »
Mâchoires volumineuses 29,0 37,0 25,0 6,5 » »
Id. très-volumineuse 4,5 10,6 » » 100? 67,0
Traces de la sut. intermaxil. 52,0 24,0 3,3 0,0 » 60,0
* Oxicéphalie 2,0 7,5 3,3 » » »
* Trou sous-orbitaire double 6,0 18,0 » » » »
Subscaphocéphale 6,0 6,0 » » » »
Prognatisme 34,0 34,0 32,0 10,0 100? »
Apophyses zygomatiques saillantes 29,0 30,0 7,6 6,9 » »
*Glabelle nasale fortement déprimée 13,0 31,0 » » » »
Platicéphale 15,0 22,0 33,0 0,1 » »
*Asymétrie de la face 6,0 25,0 » » » »
*Chevauchement des dents 6,0 1,0 » » » »
Saillie des os temporaux 27,0 43,0 » » » »
*Becs frontal de la sut. coron. 2,0 9,0 » » » »
*Dépression des glandes de Pacchioni 29,0 50,0 » » » 80,0
Os wormiens du Pterion 16,0 23,0 3,0 » 66,0 18,0
Anomalies du trou occipital 2,5 10,0 11,5 » » 0,5
Féminilité 15,0 6,0 » » » »
Virilité » » 9,2 » » »
Saillie de l’angle orbitaire de l’os frontal 15,0 46,0 7,0 6,9 100? »
1 ANUTCHINE, Ueber eine Anomalien des Mensch. Schädel., 1880. ― ID., De l’os des Incas
(Bull. des Amis des sciences nat. De Moscou, 1881-82).
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 41
1 Pour plus de détails voir la Donna delinquente, 1893, Parte II. LOMBROSO, L’Homme Crimi-
nel Vol.I. 11.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 42
5. Anomalies suivant le crime. Les chiffres sont trop petits pour nous
permettre de conclure avec certitude si les anomalies des crânes sont plus ou
moins fréquentes chez les voleurs que chez les assassins . Il semble toutefois que
1
chez les voleurs soient plus fréquents les submicrocéphalies, les synostoses, les
fronts fuyants, la trococéphalie, l’oxicéphale, la sclérose du crâne, l’empleur exa-
gérée des cavités orbitaires; chez les assassins on trouve nombre de mâchoires vo-
lumineuses, d’os wormiens, de platicéphalies et de sutures medio-frontales . 2
1
VoleursAssassinsInfanti-cidesVoleusesHomicidesEmpoi-sonneusesprostituées281591221447-
Front fuyant p. 0I039,213,311,5»4,7»16,0Sclérose»25,86,611,133,35,0»22,0Fosse occipitale
moyenne»28,413,3»8,075,017,0
2
VoleursAssassinsInfanti-cidesVoleusesHomicidesEmpoi-sonneusesprostituées28159122145Su-
ture soudées p.0I053,520,022,28,04,750,020,0Sinus front. saill. »
60,773,055,516,64,750,016,0Os wormiens »25,064,266,666,674,475,026,0Plagiocépha-
lie »10,733,3»»»»22,0Platicéphalie »6,6»»»»»
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 43
6. Comparaison avec les fous. La dernière table nous montre bien clai-
rement que dans toutes les anomalies les criminels surpassent, et de beaucoup les
fous, hormis dans les dépressions Pacchioniennes, dans les os wormiens et dans la
sclérose crânienne; mais sur celle-ci nous avons des données qui portent la ba-
lance aussi du côté des premiers. J’ai trouvé, en effet, le poids moyen de 600
dans les crânes des normaux, de 701 dans les fous, de 746 dans les criminels; ce
que se voit mieux encore avec la méthode sérielle 1
Mais la suture médio-frontale est plus fréquente chez les délinquants que chez
les fous. Les criminels offrent aussi, un peu plus fréquemment la synostose de
l’atlas, le développement de la mâchoire, l’eurignatisme, le prognatisme, etc. Les
fous se rapprochent aux hommes normaux plus que les criminels quant aux men-
surations des orbites de la mâchoire, de la circonférence crânienne (p, 146 161),
de la face, de la fossette occipitale moyenne, ce qui ne doit point étonner quand
on songe qu’une grande partie des fous ne naissent pas tels, mais le deviennent,
tandis que c’est le contraire pour les criminels.
Cette fossette je l’ai trouvé, avec Marimò , chez 1320 Européens sains, dans
2
1
Poids42 criminels42 fous72 sains400-5000,0 0I00,0 0I019,4 0I0501-60014,2 »11,9 »40,2
»601-70019,0 »26,0 »29,2 »701-80030,9 »35,0 »8,4 »801-90026,0 »23,8 »2,8
»901-10009,5 »2,3 »0,0 »
2 Arch. di psichiatria, 1889.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 44
Les os wormiens du ptérion qui chez les délinquants, les fous et les homme
normaux de l’Europe sont dans le rapport de 23 à 18 à 16, sont en Australie,
d’après Anutchine, dans le rapport de 28 0I0, dans les Finnes de 66, dans la Méla-
nesie de 25, dans la Malaisie de 10, au Pérou de 6 0I0.
Ici une sérieuse critique de Calucci (Jure penale e frenatria, Venezia, 1876)
m’oblige à faire une digression. S’appuyant sur les assertions de quelques anthro-
pologues qui attribuent aux hommes sauvages une grande capacité crânienne,
l’illustre juriste nie l’existence des caractères de véritable infériorité dans les
crânes préhistoriques et chez ceux des sauvages. Cet argument lui semble ruiner
toute ma doctrine. Or, les preuves qui la soutiennent sont peut-être au contraire
trop nombreuses.
Les races humaines primitives, écrit Darwin, présentent des structures qui les
rapprochent plus des animaux que non les modernes (Darwin, Orig. de l’homme,
p. 23). La perforation de l’olécrane fut trouvée par Broca de 4 0I0 dans les cime-
1 LOMBROSO, Le più recenti scoperte ed applicazioni, 1893.
2 LOMBROSO, Le più recenti scoperte ed applicazioni, 1893.
3 LOMBROSO, Le più recenti scoperte ed applicazioni, 1893.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 45
Les crânes des Parias (Rev. anthr., 1871) offrent une capacité de 1337 pour les
hommes, de 1114 pour les femmes, et une orbite plus grande que celle de toutes
les autres races. Ce sont les ancêtres de nos Zingares.
Cette tendance atavique nous explique un autre fait que nous révélèrent Va-
rahlia et Silva dans l’étude de 60 crânes de criminelles : la plus grande analogie
de ces crânes avec les crânes antiques des mêmes régions.
Ainsi toutes les criminelles Sardes se rapprochent davantage des Sardes an-
tiques dans la moyenne des diamètres antéro-postérieur, transversal maximum,
frontal minimum et bi-zigomatique, et dans les courbes du crâne . Nous trouvons
1
Quelques autres données, comme les fosses occipitales moyennes, les deux
faces articulaires du condyle occipital, l’aplatissement du palais, la concavité des
apophyses basilaires, l’emboîtement de l’ethmoïde, le prognatisme exagéré, la
persistance de la suture intermaxillaire et l’énorme capacité orbitaire pourraient
conduire à un préatavisme encore plus éloigné jusque aux rongeurs.
1
Courbe occip.-front.Courbe horizontalecourbe100100Biauricul.Part.ant.Part.post.Part.ant.Part.-
post.Sardes antiques292,5033,5366,4749,2650,74Id. mo-
dernes303,1729,9570,0550,3649,64Id. criminels281,0033,6160,3945,7354,37
D. L.D. T.Front. M.D. Bizy.Femmes Sardes antiques17613292,5116Id. mo-
dernes18014391,5111 Id. criminelles17812792,0120
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 47
La suture frontale chez 22 sur 100 était d’une remarquable simplicité; elle pré-
sentait un vrai zig-zag chez les 7 vieux dont il est parlé plus haut. Chez Lemoine
à 19 ans on voyait déjà la synostose de la sagittale, et à 20 ans chez Arnioni, à 30
ans chez l’assassin Brusaferro et même chez Hoffman coupable de viol à 31 ans,
chez François l’assassin (Ardouin), et Lacenaire à 34 ans (Bordier).
M.Lucy a rencontré cette fossette 10 fois p. 100 dans 300 crânes anciens;
2
dans des sauvages 30 fois p, 100, et dans 26 crânes de criminels déportés, 19,2
0I0.
M. Debierre l’aurait trouvé dans le 13,1 0 I0 dans 23 aliénés, 4,2 0I0 dans 306
criminels, mais il n’a considéré que les fossettes énormes . 1
Chez le nommé Villella, calabrais, voleur d’une très-grande agilité, qui à l’âge
de 70 ans présentait encore les suture ouvertes, cette fosse apparaissait de dimen-
sions vraiment extraordinaires : longue de 34 millimètres, large de 23, profonde
de 11, et s’associait à l’atrophie des fosses occipitales latérales, et à l’absence
complète de l’épine occipitale interne qu’elle remplaçait, et la fusion de l’atlas . 2
Elle était limitée des deux côtés par des saillies osseuses, qui se dirigeaient
d’abord parallèlement, lui donnant ainsi une figure trapézoïde, et finissaient en se
rapprochant du trou occipital par un petit promontoire triangulaire. Ces faits et
ceux qui nous avons vu à pag. 164-165 nous permettent de conclure qu’il s’agis-
3
sait ici d’une vraie hypertrophie du vermis, d’un vrai cervelet moyen; de sorte que
cet organe descendrait de l’échelle élevée des primates au niveau des rongeurs,
des lemuriens, ou bien de l’homme entre le troisième et le quatrième mois de la
vie fœtale; je peux l’assurer d’autant plus que j’au trouvé avec Foà, Calori, Romiti
et Tenchine, sur 107 cadavres, la coïncidence de l’une et de l’autre anomalie
(fosse occipitale et vermis hypertrophique) dans la proportion de 60 p. 0I0.
C’est seulement dans ces derniers jours que M. Amadei a mis de l’ordre dans
cette question en fixant l’indice de l’asymétrie. Cet indice résulte du rapport entre
les deux diamètres obliques dont le plus long serait égal à 100.
Après cela on peut signaler deux faits importants dans l’étude de cette anoma-
lie chez les criminels :
excepté pourtant les femmes criminelles chez qui j’ai trouvé, avec Silva et Vara-
glia, 14 sur 23 asymétries à gauche, 7 à droite.
La sclérose du crâne est un caractère saillant qui dans un cas simulait un vrai
ostéome; chez un voleur illustré par Flechs elle reduisait la capacité crânienne à
1080 c. c. et donnait au visage un aspect de lion; dans un autre crâne donnait un
poids de gr. 1143, presque le double du normal.
Ces altérations ne se rencontrent pas isolées, mais 43 fois sur cent, elles sont
groupées et présentent un nombre d’altérations vraiment singulier sur un seul in-
dividu. C’est ainsi que nous pouvons voir chez Villella, non seulement les synos-
toses et l’atrophie de l’atlas, mais une atrophie des fosses occipitales latérales, une
hypertrophie de la fosse médiane, une obliquité du crâne, de la face et de la fosse
occipitale moyenne. Sur Macchi (Atlas, pl. XXIV, 6) on trouva l’emboîtement de
l’ethmoïde, des synostoses précoces, de la sclérose crânienne, du prognatisme, un
front fuyant, stenocrotaphie et un grand nombre d’os wormiens.
Pour préciser cette fréquence de complication et leur différence dans les sexes
j’ai récemment fait avec M. Roncoroni et Ardù cette table :
Les criminels mâles ont donc la complication de plusieurs anomalies dans une
proportion triple des femmes criminelles — et double des prostituées.
Est-il possible que des individus frappés d’un si grand nombre d’altérations,
aient le même degré d’intelligence et les mêmes sentiments que les hommes à
crâne tout-à-fait normal? Et notez que ces altérations crâniennes ne portent que
sur les plus visible modifications du centre intellectuel, les altérations du volume
et de forme.
_____________________________
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 52
Deuxième partie :
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime
Chapitre 2
Anomalie du cerveau
et des viscères
chez les criminels.
I.
étudié par Ferrier avait, lui aussi, l’hémisphère droit plus petit de 40 gr. Sur 42
voleuses homicides dont les cerveaux furent pesés par Giacomini, 20 avaient le
lobe droit plut pesant, et 18 le lobe gauche; les autres 4 avaient les hémisphères
d’un poids égal.
Ce sont, pourtant, des chiffres peu décisifs, mais l’étude des asymétries les
complètent. Nous les avons trouvés, en effet, prédominant à droite sur 41 0 I0 et à
gauche sur 20 0I0; 38 étaient égaux, tandis que dans les asymétries physiologiques
on trouve toujours des chiffres égaux des deux côtés.
Ce qui est plus certain, c’est que le poids du cervelet de la protubérance annu-
laire et des pédoncules est supérieur chez les criminels. Il résulte, en effet, des
études de Varaglia et Silva que tandis que chez les femmes du peuple le poids en
est de 141, il est chez les criminelles de 155 (Studi su 60 cranii, Torino, 1885), ce
qui peut bien s’accorder avec la grande agilité que nous allons vérifier chez ces
malheureux et avec la présence, aussi fréquente, de la fosse occipitale moyenne.
Chez Guiteau on aurait trouvé la scissure centrale séparée par un petit pont de
celle de Sulvilus ainsi que l’occipital-transvers et l’interpariétal. Dans l’hémi-
sphère droit, la région pariétale était atrophiée, et le lobule para central très-petit;
la circonvolution post-centrale rapetissée de plus d’un quart. L’insula de Reil pré-
sentait 7 sillons à gauche et 5 à droite, 5 tours à gauche et 6 à droite (Mendel, Ne-
vrol. Centralbl., 1882).
Chez l’assassin Prévost, âgé de 43 ans, (Broca), le premier pli du passage oc-
cipito-pariétal était profond de deux côtés, de sorte que la scissure occipitale in-
terne se continuait avec l’externe; le lobe occipital se détachait, comme chez les
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 54
Huschke trouva chez une féroce uxoricide des ostéomes de la grande faux; de
plus la circonvolution pariétale antérieure gauche y était interrompue dans la moi-
tié de son parcours. C’était le seul cerveau dans lequel il eût observé une pareille
anomalie.
Benedikt, a qui l’on doit sans contredit le réveil de cette question en Europe,
dans ses Anotomische Studien am Verbrecher-Gehirnen , Wien, 1879, essaya de
réduire en lois ces observation, et de prouver comment les malfaiteurs se dis-
tinguent par les anastomoses plus fréquentes des scissures, par le type, qu’il ap-
pelle, des fissures confluentes : « Si nous imaginons, dit-il, que toutes les scis-
sures de ces cerveaux soient des rivières, un flottant pourrait, par ces nombreuses
anastomoses, parcourir tous les sillons : sur 38 hémisphères cérébraux de crimi-
nels, les scissures postérieures perpendiculaires s’anastomosent avec les horizon-
tales et avec les interpariétales : 21 fois complètement, 6 incomplètement; sur 38
hémisphères, il trouva 113 communications de la scissure de Sylvius avec les
sillons circonvoisins, , 67 anastomoses des sillons interpariétaux, 19 de la scissure
d’hyppocampe avec la fissure perpendiculaire occipitale, 11 avec la collatérale ».
Il fut fort surpris de voir si fréquemment (27 fois sur 83) des lobes frontaux
ayant 4 circonvolutions.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 55
Sur 16 cerveaux, il trouva 6 fois que le cervelet n’était pas couvert par les hé-
misphères; 3 fois il l’était incomplètement.
Mais toutes ces anomalies perdent beaucoup de leur importance après les
études de Giacomini (Varietà delle criconvoluzioni cerebrali, 1882, pag. 133); car
il en a retrouvé d’analogues chez des individus qui n’étaient pas des malfaiteurs,
et bien souvent dans des proportions plus grandes. Il trouva, en effet, sur 164 cer-
veaux d’hommes honnêtes :
sur 56 criminels :
Ce dernier, cependant, admet, lui aussi, que les plis sont plus fréquents chez
les criminels, au moins dans le lobe droit, ayant constaté chez 28 criminels :
cendante était, au tiers de sa partie supérieure, traversée par une profonde scis-
sure, et par une scissure superficielle dans sa partie inférieure.
Ferrier, dans cette dépression antérieure du lobe frontal voit les résultats d’une
inflammation; mais quant à la déformation de la scissure de Rolando, il la consi-
dère comme une anomalie congénitale très rare, ne l’ayant trouvée que deux fois
sur 800 cerveaux normaux (0,10 0I0).
Lambi (Westphal. Archiv. für Psychiatrie, 1889) a trouvé une complète poren-
céphalie avec destruction des racines de la circonvolution frontale ascendante
chez un jeune escroc.
une patience et une impartialité vraiment unique; les anomalies les plus impor-
tantes qu’il y a trouvé sont les suivantes :
1º Dans 7 cas sur 130 (5,3 p. 100) il y avait une circonvolution frontale surnu-
méraire; c’est une circonvolution qui naît entre l’extrémité antérieure du girus
corpori callosi et le girus fronto-parietalis medianus et qui aboutit dans la circon-
volution frontalis interna.
Dagleur, un voleur libidineux qui avait blessé sa mère, avait un cerveau réduit
à 818 gr., le cervelet à 20 gr., plus petit et plus aplati à gauche qu’à droite, avec
peu de sillons superficiels, qui se développaient dans la direction de la ligne sagit-
tale (Otto, Ein Fall von Verkummerung des Kleinengehirne, Berlin, 1874).
Flesh, chez une voleuse (op. cit.) qui avait une asymétrie crânienne, de la pa-
chiméningite et la frontale ascendante interrompue à gauche, trouva un vrai lobe
moyen cérébelleux conformé, comme dans beaucoup de mammifères. Ce lobe
avait deux sillons qui passaient à travers la scissure moyenne, s’écartaient en
avant, et croisaient dans toute la longueur des hémisphères les circonvolutions ho-
rizontales du lobe moyen (Archivio di Psichiatria, vol. III).
tesse cérébrale; tandis que, dans le second cas, il coïncide, au contraire, avec
l’ampleur de la plupart des circonvolutions et témoigne de l’irrégularité du déve-
loppement du cerveau ».
anomalies qui, cependant, ne sont pas rares, à l’exception des deux dernières.
Flesch aussi, me dit avoir trouvé l’absence de l’artère communicante postérieure
gauche en même temps que l’anomalie fort rare d’une artère d’un corps calleux
gauche atrophié, remplacées dans la partie antérieure par la communicante anté-
rieure.
Dans un autre cas la vertébrale droite était atrophiée et remplacée par une
branche anormale de la carotide gauche.
_________________
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 61
II
Histologie et anatomie pathologique.
Dans le cerveau de ce Freud, dont nous avons parlé plus haut, Willigk décou-
vrit une grande quantité de pigments dans la tunique des capillaires, et surtout
dans celle des vaisseaux artériels de la seconde, troisième et quatrième couche de
la substance grise.
condamné, mais il mit fin lui-même à ses jours; l’adhérence de la dure-mère était
très tenace, il y avait des pigmentations dans les noyaux du nerf vague, du facial
et de la cinquième paire.
Bergmann trouva dans le cerveau d’un assassin des adhérences dans les pro-
longements occipitaux des ventricules, qui indiquaient qu’une inflammation avait
existé précédemment (Virchow, Abhandlungen, 1873).
Flesch trouva chez deux jeunes criminels des foyers de ramollissement dans le
lobe frontal, un amas de pigment dans la dure-mère qui indiquait de vieilles hé-
morragies. Il observa chez une femme de 24 ans nombre de kystes dans les
grands ganglions, résidus probablement d’ancienne embolies; chez un homicide
de 21 ans il trouva une sclérose en plaques dans la couche superficielle de la sub-
stance grise : il s’y ajoutait une loptoméningite.
Et on doit noter que toutes ces lésions avaient fait leurs cours sans être
(comme c’est la règle) accompagnées d’aucune altération des sens ni des mouve-
ments.
Il en fut de même pour Guiteau qui, outre les anomalies déjà décrites, avait
une énorme asymétrie et de vieilles adhérences des méninges. Prunier, qui avait
violé une vieille femme, après l’avoir noyé, et qui cependant n’avait donné aupa-
ravant aucun signe d’affection mentale, présentait une énorme épaisseur du crâne,
l’adhérence de l’arachnoïde et l’épaississement de la pie-mère (Gazette médicale,
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 63
1879). Faella qui, d’après l’examen fait par un aliéniste, paraissait, de son vivant,
tout à fait normal, présentait toutefois, outre une grande asymétrie pariétale, des
adhérences de la dure-mère et de la pie-mère, et un ostéôme épineux long de 45
mill. et large de 30 dans la grande faux, au niveau de al circonvolution frontale
(V, Atlas).
Bref, sur 92 cerveaux de criminels on a constaté :
Opacité et adhérences……………………………………… 10
Inflammations……………………………………………... 2
Petites ossifications en diverses parties……………………. 1
Ostéomes ………………………………………………….. 3
Dans le cerveau:
Ramollissement 3
Points hémorragiques 5
Dégénérescence des artères 4
Tumeurs (1 cancer gélatineux, 1 endothéliome, 1 syphilome).. 3
Adhérence des cornes postérieures 1
Hémorragies des ventricules latéraux 2
Abcès du cervelet et du cerveau 2
Sur 28 cas, il remarqua 3 fois des blessures graves du crâne; un des ces cas
était accompagné d’hémotôme et de leptoméningite chronique.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 64
En somme, les criminels rivalisent avec les fous et quelquefois les dépassent,
même pour les maladies du cerveau, comme nous l’avait déjà fait pressentir la
grande fréquence des scléroses et des ostéoporoses crâniennes.
Et pourtant, nous l’avons vu, ils n’offrent presque jamais, même aux spécia-
listes, les symptômes qui accompagnent ordinairement ces grandes anomalies.
Deuxième partie :
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime
Chapitre 3
Anomalies du squelette,
du cœur, du foie, etc.
C’est une anomalie tout à fait atavistique, que, j’ai trouvée chez 27 normaux
seulement (11 0I0).
J’ai trouvé cette anomalie plus ou moins développée dans le 42 0 I0 des crimi-
nels; dans le 5 0I0, le sacrum était complètement ouvert; dans le 37 0 I0, l’ouver-
ture n’était pas complète.
Dans 5 prostituées, nous avons trouvé cette anomalie dans le 100 0 I0 (Donna
délinquente, vol.I).
Dans ces derniers temps, il a même trouvé, chez un criminel, quatre vertèbres
sacrales de moins, replacées par quatre vertèbres cervicales supplémentaires dor-
sales.
Or, Topinard n’a trouvé l’absence d’une vertèbre qu’une fois sur 350 sque-
lettes d’hommes normaux.
4. Cœur, etc. Flesch nous a révélé un autre fait jusqu’à ce jour inconnu :
les altérations splanchnologiques très fréquentes des criminels, parmi lesquelles
quelques-unes sont congénitales. En effet, sur 50 autopsies :
1 présentait une dilatation des grands vaisseaux avec des traces de lésions mé-
ningitiques;
Il est important de fixer l’attention sur les altérations congénitales des vais-
seaux et sur les affections du cœur; car dans toutes ces affections, les criminels
sembleraient dépasser, ou suivre de bien près, les fous.
1 Archivio di Psich. XI, 1889, p. 12.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 67
En comprenant, en effet, les chiffres établis par Hagen, sur ces lésions chez
les fous et les normaux, avec ceux constatés par Flesch et par Boca chez les crimi-
nels, nous trouvons :
Criminels
Normaux Fous Fleisch Boca
Hypertrophie du cœur 16,0 0I0 10,0 0I0 11 0I0 34,1 0I0
Atrophie du cœur 1,2 » 3,1 » 11 » 7,1 »
Dégénérescence graisseuse 3,6 » 5,2 » 9 » 26,6 »
Insuffisance valvulaire 3,1 » 3,6 » 17 » 23,6 »
Adhérence péricardique 2,1 » 2,6 » 2 » 26,2 »
Affection du cœur, en général 26,0 » 24,5 » 50 » 107,6»
Mendel a constaté les affections cardiaques chez les maniaques dans les pro-
portion de 3,4 à 14 p. 0I0, et de 5,5 chez les déments (Dies Manie, 1881)
D’Astro (Etud. sur l’état mental des cardiaques, Paris, 1881) d’après une
étude de 39 cas, a conclu que les cardiaques, en général, sont d’un caractère diffi-
cile, et enclins aux altérations mentales. La lésion aortique un peu plus dévelop-
pée détermine un affaissement, plus ou moins prononcé, des facultés psychiques,
et un état névropatique qui va jusqu’à l’hystérie. Les lésions mitrales prédis-
posent à la mélancolie et à les accès de violence ; dans la folie cardiaque, prédo-
minent les phénomènes de dépression, le délire mélancolique avec hallucinations,
avec des courtes oscillations, spécialement dans les attaques de l’assystolie ; les
formes impulsives s’y trouvent fréquentes.
n doit bien prévoir qu’il en est ainsi, quand on pense à cette étroite connexité
qui existe entre les actes psychiques et la circulation sanguine, dont les sphygmo-
graphe nous offre des preuves éloquentes. Toutes les données, écrit Rindfkeisch
(Patholog. histolog., 1873, § 712), fournie par l’anatomie pathologique nous in-
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 68
diquent que la base anatomique des affections mentales est essentiellement une
anomalie dans la distribution du sang ou dans ses conséquences.
Savoir :
Il me semble donc (et l’alcoolisme nous l’expliquerait en partie) que les affec-
tion hépatiques prédominent bien davantage dans les criminels, et nous rappelle-
rons que Milani, Agnoletti et Passananate avaient le foie aussi atteint que le cer-
veau.
Dans 100 criminels, j’ai observé 9 fois la lobulation de la rate, 6 fois celle des
rognons ; Penta 1 fois sur 18 criminels, 2 fois le cancer du foie, 1 fois tumeur.
3 en avaient 22 à 23 1 en avait 19
2 » 21 7 en avaient 15 à 18
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 70
Deuxième partie :
Anatomie pathologique et anthropométrie du crime
Chapitre 4
Anthropométrie et physionomie
de 5907 criminels.
I.
1
Mesures de la tête, de la taille et du poids
chez 188 criminels mineurs et 437 jeunes gens normauxCirconférenceTailleCriminelsNormaux-
CriminelsNormauxDe 10 à 13 ans 0,51452,91,311,304De 13 à 16 id.
0,52854,51,411,41De 16 à 18 id. 0,53355,41,521,51A 19 ans….. 0,54,955,91,631,56 (19
à 40 ans)
Poids
CriminelsNormauxDe 10 à 13 ans 27,326,4De 13 à 16 id. 34,734,7De 16 à 18 id.
49,643,1A 19 ans…. 54,946,7
2 RICCARDI, Note antropologiche intorno alcuni corrignedi, etc.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 72
Lombardie………… 1 64 1 66
Calabre……………. 1 62 1 63 1 61
Sicile………………. 1 60 1 62 1 67
Vénétie……………. 1 65 1 69 1 69
Ombrie……………. 1 63 1 66
Emilie……………... 1 64 1 63 1 58
Marches…………… 1 62 1 62 1 62
Sardaigne………….. 1 60 1 50 1 56
Piémont…………… 1 63 1 63 1 69
Naples……………... 1 62 1 62 1 61
Ligurie…………….. 1 64 1 60
Lucques………….. 1 66 1 71
Si la taille moyenne des criminels 1,63 est égale à la moyenne des sol-
dats, dans presque toues les régions de l’Italie, au contraire, la taille des grands
criminels est souvent supérieure à la moyenne.
Wilson, mais d’accord avec les recherches de Biliakow sur 100 homicides,
2
semble être le propre des voleurs de grand chemin et des homicides, qui offrent la
plus petite quantité de tailles basses comparés aux violateurs 3, aux faussaires et
aux voleurs ; mais plus encore elle est en rapport avec l’âge plus mûr dans les cri-
minels que dans les soldats.
1 Thompson, sur 324 Écossais délinquants, a trouvé le poids moyen de 151 livres, de 147 sur
106 Irlandais et de 149 sur 55 Anglais (Psychol. of Crimin., 1870)
2 Sur 100 homicides russes, Biliakow a trouvé :
En groupant, selon la criminalité, les tailles hautes et les tailles basses, nous
trouvons :
Tailles Tailles
très hautes très basses
supérieures inférieures
à 1,70 à 1,47 et 1,57
Sur 786 voleurs de grand chemin et
homicides……………………. 56 38
Id. 271 vols……………………… 24 23
Id. 34 viols……………………… 6 2
Id. 40 faux……………………... 7 8
Id. 27 incendies………………… 9 4
Ces chiffres montrent que les tailles élevées abondent chez les voleurs de
grand chemin et chez les homicides, tout comme chez les voleurs ordinaires, tan-
dis que les tailles petites sont moins fréquentes chez les premiers. Ceci est encore
plus évident, si l’on étudie la taille des faussaires, des violateurs, des incendiaires.
Ces dernière catégories de criminels, trop peu nombreuses d’ailleurs pour nous
occuper, offriraient une somme plus grande de tailles élevées, mais aussi de tailles
petites.
Ainsi s’explique que moyenne en Europe la taille chez les criminels en géné-
ral soit plus basse que chez l’homme normal.
Le poids des criminels dépasse de beaucoup celui des fous : à Pavie, chez 165
fous j’ai trouvé un poids moyen de 59,90, c’est-à-dire inférieur de 10 kilogr. au
poids moyen des criminels lombards.
Si l’on distingue les homicides et les voleurs de grand chemin des autres cri-
minels, voleurs et faussaires, on trouve pour ces derniers des chiffres de beaucoup
inférieurs. Marro trouva dans ces derniers 61,5 kilogr. au lieu de 63,8, poids des
normaux piémontais. Rossi aussi trouva (o. c.) dans 27 voleurs piémontais le
poids de 61,7 kilogr.
Veut-on avoir une idée plus nette de la différence de poids chez les criminels ?
voici des chiffres :
On voit par là que les faussaires, les incendiaires et les homicides fournissent
les proportions les plus élevées des poids maximum ; tandis que les homicides et
les incendiaires donnent aussi la proportion la plus faible de poids minimum. Les
violateurs et les voleurs ont maximum des poids supérieurs.
Marro trouva :
Kg. 63,8 dans les escrocs
» 63,08 » voleurs à la tire
» 62 » brigand
» 61 » violateur
» 59 » voleurs
» 55,5 » Incendiaires (o. c.)
Cette supériorité des grands criminels pour le poids et pour la taille peut se
contrôler sur le cadavre ; ce qui vaut bien mieux, parce que le vêtement peut être
une cause d’erreur. En effet, les chiffres fournis par le poids et par la taille des
400 cadavres d’hommes normaux et des 134 criminels de Bonn, dont fait mention
l’œuvre de Bischoff (Hirn-Gewicht des Menschen, Bonn, 1880), nous montrent
que dans le poids les plus petits hommes honnêtes dépassent les brigands, dans la
proportion de 18,6 à 13,4, (voyez Atlas, pl. Ire), tandis que dans les poids moyens
(40 à 70 kilogrammes), ce sont les brigands qui l’emportent, dans la proportion de
84 à 75.
Toutefois, il faut remarquer que dans le poids maximum les gens honnêtes
surpassent les criminels du double, comme 4 est à 2,2.
(Arch. di psich., vol. IV, fasc II). Ces derniers, comme il est démontré dans
l’Atlas, planche II, ont bien des fois la grande envergure supérieure à la taille.
Rossi, dans 100 criminels, trouva la grande envergure plus grande que la taille
dans 88, égale dans 1, inférieure dans 11 (o. c.)
Selon Marro, elle était plus grande dans les assassins de cm. 5,1 ; voleurs de
grand chemin, 5,3 ; incendiaire, 5,8 ; auteurs de blessures, 6,2. Moindre dans les
violateurs et pickpockets, 4,4. Plus grande dans les normaux 5,0.
Baer, dans 698 criminels, trouva une moyenne de 169,3 pour une taille de
166,1 : 74,75 0I0 des meurtriers avaient la grande envergure plus grande que la
taille ; 18,1 0I0 moindre ; 7,2 égale.
p.100
1. Déviation des membres inférieurs………………. 5
2. Anomalies des pieds……………………………. 7,2
3. Anomalies des mains…………………………… 4,1
(Les mains avec de grands plis interdigitaux) 3
Ces observations sont confirmées par celles du professeur Venturi (voir sa cu-
rieuse brochure Les pieds chez les fous et les criminels, Naples, 1889) et de
Laurent.
Carrara a trouvé chez 600 criminels le pieds plat (qu’on trouve si souvent chez
les nègres) dans le 17 0I0, la syndactilie dans 0,50 0I0.
Rossi, dans 100 criminels, vérifia la grande asymétrie des extrémités, qui de-
vient un de leurs caractères plus étranges ; pour les pieds, il en a trouvé la lon-
gueur plus grande à droite chez 30, à gauche chez 58, égale chez 12. Pour les
bras, 43 fois on trouve une longueur supérieure à droite ; 54 fois à gauche. Ce
que confirme merveilleusement la gaucherie (mancinisme) qu’on avait déjà signa-
lée parla dynamométrie et par l’étude de la marche des criminels . 1
1
Main plus longue.
—
Doigt médium
—
Pied.
—DroiteGaucheDroitGaucheDroitgauchep. 100p. 100p. 100Normaux14,41116,615,538,515,6Cri-
minels52510272735Escrocs4,3121321,721,726,Violateurs714,214,228,435,735,7Bles-
seurs15255,252055,Voleurs034,81330,42626,6Pickpockets0355303525
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 78
7. — Rides. — J’ai étudié, avec le doct. Ottolenghi , les rides chez 200 crimi-
1
nels et 200 normaux (ouvriers et paysans), et je les ai trouvées bien plus fré-
quentes et plus précoces chez les criminels, 2 à 5 fois plus que chez les personnes
normales, avec prédominances de la rides zygomatique (située au milieu de
chaque joue) qu’on pourrait bien appeler la ride du vice, la ride caractéristique des
criminels.
Dans les femmes criminelles (80) aussi, j’ai trouvé les rides plus fréquentes
que chez les femmes normales, quoique avec une moindre différence. — qu’on se
rappelle les rides des sorcières.
épileptiques et chez les crétins. Parmi les premiers seulement, les escrocs s’ap-
prochent un peu des gens normaux . 3
Inversement, chez 280 femmes criminelles, j’ai trouvé plus fréquente la cani-
tie et plus rare la calvitie que chez 200 ouvrières honnêtes.
1
Avant 25 ansEntre 25 et 50 ansNormauxCriminelsNormauxCriminelsp. 100p. 100p. 100p.
100Rides du front7,1346286Ride nasolabiale22346278Ride zygomatique0161833
2 La calvizie, la canizie e le rughe nei mormali, mei criminali, negle epilettici e nei cretini (Ar-
chivio di psichiatria, X, Torino, 1889).
3
Avec canitieAvec calvitiep. 100p. 100400normaux62,51980épileptiques31,512,740cré-
tins11,713,5490criminels25,948 — voleurs24,42,6 — escrocs4713,1 — bles-
seurs23,75,380femmes criminelles459,7200fFemmes honnêtes6013
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 79
Les brigands, les homicides, les incendiaires ont le plus souvent une taille
élancée, une santé robuste, tandis que les voleurs, les violateurs sont pour la plu-
1
part des gens frêles, surtout ces derniers : ce qu’expliquent probablement les plai-
sir solitaires, dont ils portent les traces sur le visage ; avec les faussaires et les in-
cendiaires ils donnent un plus grand nombre de bossus ; ainsi on trouverait un
fondement à l’opinion populaire qui met sur le compte de cette infirmité la luxure
et la malice.
On ne doit pas s’étonner si les homicides sont plus forts et plus grands : il faut
un grand développement de force pour user de la violence et pour attaquer. Au
voleur, au contraire, la force n’est pas nécessaire ; la faiblesse même peut être une
cause adjuvante du crime.
On sait que MM. Ramedier et Serieu ont trouvé ce caractère, qui n’a aucun
rapport avec le rachitisme, 7 fois dans les épileptiques et dans les dégénérés.
Ainsi les homicides lui ont donné un périmètre thoracique non inférieur aux
chiffres constaté chez les personnes adonnées aux travaux plus pénibles . 1
Les voleurs ont une médiocre capacité crânienne ; dans 3 régions sur 9, ils dé-
passent le chiffres de 1500 ; ils sont toujours inférieurs aux autres criminels et
n’offrent le maximum que dans l’Ombrie et les Marches.
Les incendiaires et les violateurs, en très petit nombre d’ailleurs, ont une capa-
cité minime.
Cette étude vient en grande partie à corroborer celle d’E Ferri. Ici la statis-
tique est plus étendus, et la méthode sériale porte su 699 délinquants (divisés en
Les capacités plus grandes se trouvent dans les condamnés par blessure, les
moindres dans les pickpockets et dans les assassins, les minimes dans les idiots ;
les soldats ont le nombre plus petit des submicrocéphales.
En comparant les homicides non récidivistes avec les récidivistes ou les accu-
sés de plusieurs crimes dans les mêmes provinces, Ferri a trouvé une plus petite
capacité crânienne et un moindre diamètre frontal avec un plus grand développe-
ment des mâchoires dans ces derniers.
Rossi chez 51 voleurs trouva la capacité de l1548 (o. c.). — Marro chez 500
celle de 1562, inférieure a celle des normaux de la même région (1573).
13. — Front. — Pour la hauteur du front, d’après E. Ferri, les 4 séries d’indi-
vidus étudiés se résument en deux groupes : l’un supérieur, soldats et délinquants
d’occasion, l’autre inférieur, fous et délinquants incorrigibles. D’après Ferri, le
front serait plus haut chez les meurtriers, les aliénés, bien plus bas chez les idiots.
Et quand on les étudie par région, les homicides restent inférieurs aux soldats dans
toues les provinces examinées.
pickpockets
délinquants
Homicides
Homicides
d’occasion
Assassins
Auteurs
Voleurs
Soldats
idiots
Fous
Nés
chez les criminels, mais bien plus encore chez les délinquants d’occasion, spécia-
lement si on le met en rapport au diamètre transversal maximum de la tête.
Parmi les délinquants plus graves, les assassins sont inférieurs aux homicides
et aux voleurs de grand chemins, tandis que le plus grand diamètre frontal se
trouve chez les meurtriers et les fripons. Chez les idiots, on rencontre le diamètre
frontal le plus faible, malgré leur plus grand diamètre transversal de la tête.
Marro trouva chez les criminels les fronts étroits dans la proportion de 86 0 I0 ;
les fronts bas 41 0I0 : les fronts hauts 58 0 I0 ; chez les normaux de la même ré-
gion, front étroit dans la proportion de 81,9 0I0 ; front bas 15 0I0 ; front haut 84
0I0. donc la démonstration de la plus grande étroitesse du front est certaine.
Diamiètre
Minimum frontalTotalIndice frontalDélinquants
nésIdiotsEmilienssoldatsFousNés
délinquantDélinquant
d’occasionAssassinshomicidesBrigandssoldatsNés
délinquantDélinquant
d’occasion90-922,20,50,255-581,115,093-950,22,69,55,059-
6211,16,21,135,00,96,38,196-984,110,016,213,463-6642,434,335,012,150,035,199-
1017,516,924,623,367-7037,731,215,050,037,545,0101-10425,222,724,631,271-
744,430,129,66,210,8105-10725,220,318,319,775-784,41,17,4108-
11030,616,04,37,079-821,1111-1136,46,80,50,2114-
1167,32,50,5117-1193,5Individus
examinés7112973442534517893201081637
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 83
Il trouva encore :
Les fronts bas étaient donc en plus grand nombre dans les voleurs, dans les
voleurs de grand chemin, dans les violateurs et auteurs de blessures.
Pour montrer quelle différence existe entre ces 893 mesures et celles de
l’homme sain, nous les comparerons aux résultats trouvés par Baroffio sur 14,000
soldats et à ceux que j’ai trouvé avec le doct. Riva sur 262 aliénés de Pavie et de
Pesaro. Nous voyons alors la circonférence crânienne
Nous avons, donc, trois fois plus de têtes volumineuses chez les individus
sains que chez les criminels. Et quant aux fous, d’ils ne nous présentent pas la
circonférence de 59 et 58, ils sont inférieurs de peu à ces derniers quant à celle de
57, et les dépassent dans celle de 56.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 84
Troyski a trouvé lui aussi à Varsovie une proportion plus grande de circonfé-
rences inférieures aux normales, mais une proportion aussi plus grande de circon-
férences supérieures exagérées :
Voici les chiffres comparés des circonférences fournies par les soldats, les cri-
minels et les fous (Ferri) :
Ce qui démontre clairement que les criminels ont une submicrocéphalie deux
fois plus fréquente que les soldats, mais plus faibles que celle des aliénés. Il n’y a
pas là de contradiction avec ce qui nous ont revelé les recherches anatomiques. Il
ne faut pas oublier que la sclérose crânienne est plus fréquente chez les criminels
que chez les fous : ce qui explique comment la capacité extérieure peut paraître
notable alors même qu’elle est diminuée à l’intérieur.
Lauvergne , qui a étudié des parricide, ajoute que sur 9, trois avaient des têtes
1
petites et léporines.
Tout cela est confirmé par l’étude de E. Ferris, qui, encore là établit une dis -
tinction entre les criminels-nés (Pesaro) et les criminels d’occasion (Castelfron-
co) 2
Les plus petites circonférences, selon lui, se rencontrent surtout chez les cri-
minels ; c’est le contraire pour les plus grandes. Mais les criminels d’occasion et
les criminels d’habitude dépassent les criminels-nés dans les circonférences
moyennes et s’en écartent dans les circonférences élevées.
Marro trouva 561 dans les pickpockets, 555 dans les meurtriers, 545 dans les
voleurs.
Corre et Roussel se sont livrés à une étude minutieuse sur 200 condamnés
morts à Brest. Chez les Français la circonférence normale étant de 525 milli-
mètres, et la semi-circonférence antérieure de 271, et la postérieure de 274 milli-
mètres ; les circonférences des criminels seraient plutôt plus élevées, et les parties
antérieures prédomineraient souvent sur les postérieures ; on trouverait chez les
voleurs une proportion qui atteint 48 0I0, pour des circonférences allant de 559 à
540 ; et de 22 0I0 au-dessous de 560. chez les faussaires, ces grandes mesures at-
teindraient 72 0I0 ; chez les homicides, 76 0I0 ; chez les violateurs, 69 0I0.
D’après ces données, les faussaires et les homicides l’emporteraient sur les vo-
leurs et les violateur.
Marro trouva lui aussi son plus grand diamètre dans les criminels ; pendant
que les hommes honnêtes donnent le 26,3 0 I0 de grandes mâchoires, les criminels
en donnent de 52,1 0I0, les meurtriers le 66,6 0I0, les escrocs le 62 0I0.
Selon Marro, les zygomes plus divergents (cent. 14,6) se trouvent chez les
meurtriers (29,5) et chez les violateurs (30,0), tandis que chez les escrocs (27,5) et
les voleurs (18,5) les proportions sont presque égales à celles des hommes nor-
maux.
Dans les tables de Baer (o. c.), sur 968 criminels allemands, on voit la propor-
tion de 86 0I0 de brachicéphales (dont 27 0I0, de 85 à 99,9), 12 0I0 de mésocé-
phales, 1,1 0I0 de doligocéphale.
Marro, étudiant 100 normaux et 600 criminels du même pays (Piémont), trou-
va :
Normaux Criminels
Doligocéphalies 11,7 9,3
Brachicéphalies 72,7 81,3
Trococéphalies 15,5 9,5
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 87
20. — Diamètre verticales. — Ces diamètres on été étudiés par Troyski sur 3
catégories de criminels : 1º Homicides et voleurs de grands chemins ; 2º Récidi-
vistes ; 3 º Criminels entrés en prison pour la première fois.
1º 2º 3º
Diamètre vertical Homicides et brigands Récidivistes Non récidivistes
0I0 0I0 0I0 0I0
Moins de 68,0 2,3 4,7 1,6
De 68,0 à 72 16,3 10,9 26,5
72,1 à 75 34,4 31,8 30,5
75,1 à 79 27,3 32,5 32,6
De 79,1 à 84 2,3 0,0 0,8
Normaux Criminels
100 Mineurs Adultes
Lombroso Lombroso Marro
0I0 0I0 0I0
Sinus frontaux énormes 25 5 8,0 23,0
Front bas, étroit, fuyant 1,0 5 9,0 3,1
Saillies de long des sutures 21 10 12,6 11,9
Microcéphalies — 4 — 0,2
Plagiocéphalies 6,9 5 — 10,9
Trococéphalies (ind. moyen 91,4) 9,5 7 — 15,5
Scaphocéphalies — 5 — 0,1
Oxicéphalies 2,9 3 — 3,6
Hidrocéphalies 1,9 4 — 0,9
Les anomalies plus fréquentes chez les criminels sont donc les plagiocépha-
lies, les trococéphalies, les fronts bas.
Marro et moi nous eûmes sous les yeux les petits criminels sous jugement, les
moins redoutables : mais Penta, en étudiant 400 des plus féroces dans une maison
de force (bagni), trouva ces caractères bien plus nombreux et plus saillants :
0I0 0I0
Plagiocéphalie 32 Oxicéphalie 3
Scaphocéphalies 17 Trococéphalie 3
Microcéphalie 17 Hydrocéphalie 2
Platicéphalie 7 Clinocéphalie 1
Acrocéphalie 6
entre les anomalies céphaliques des normaux et celles des psychopathes et des cri-
minels.
Têtes normales Têtes Têtes
d’après Welker de criminels de psychopath.
Diamètre vertical d’après l’auteur d’après Slemberg
0I0 0I0 0I0 0I0
Moins de 68,0 platicéphalie 0,0 3,0 6,6
De 68,0 à 72 subplaticéphalie 30,0 22,0 18,0
De 72,1 à 75 mésocéphalie 43,3 31,7 21,6
De 75,1 à 79 ipsicéphalie 26,6 31,7 28,0
De 79,1 à 84 oxicéphalie 0,0 10,3 15,6
Au-dessus de 84 0,0 0,7 8,3
Knecht, sur 1214 criminels allemands, a trouvé plutôt s’excès dans les dimen-
sions crâniennes que le défaut : 4 fois seulement la microcéphalie ; 118 fois l’oxi-
céphalie ; 15 fois la scaphocéphalie ; 32 fois le prognatisme ; 56 fois l’anomalie
dans l’implantation des dents ; chez 6 il a noté la division de la luette, et chez 6
des anomalies aux oreilles.
L’asymétrie crânienne par Corre et Roussel (Rev. d’anthrop., 1883.) est le ca-
ractère prédominant des criminels français : sur 121 voleurs, elle a été observée
81 fois, et 22 fois l’asymétrie faciale. La déformation scaphoïde a été notée sur
21 de ces individus. L’aplatissement pariétal postérieur a été observé 61 fois,
dont 40 sur les crânes asymétriques, et 21 sur les crânes réguliers.
Chez 28 violateurs, l’asymétrie a été notée 19 fois, soit 70 0 I0, et 9 fois l’asy-
métrie faciale, dont 5 fois en rapport avec la crânienne.
22. — Exceptions. — Mais une certaine partie des criminels, celle qui peut se
dire l’aristocratie du crime, offre une large capacité cérébrale, de même qu’une
forme régulière du crâne, et souvent ces lignes harmoniques et fines qui sont par-
ticulières aux hommes distingués. Tels étaient par exemple Brochetta, Lacenaire,
Malgutti, Carbone, Pace, Franco, Venetuoli et les frères Jacovone, qui ne pour-
raient se distinguer craniométriquement de leurs concitoyens. Les assassins Le-
biez et Barré avaient le front élevé, les lignes du crâne régulières.
_______________
II.
Physionomie des criminels.
1. — Sur la physionomie des criminels on fait courir des idées pour la plupart
fausses. Les romanciers en font des hommes d’un aspect épouvantable : barbe
jusqu’aux yeux et le regard scintillant et féroce. D’autres observateurs, Casper
par exemple, vont d’un excès à l’autre, et ne trouvent aucune différence entre eux
et l’homme normal. Les uns et les autres se trompent. Assurément, de même
qu’il y a des criminels à capacité crânienne notable, avec d’admirables conforma-
tions du crâne, comme nous venons de le dire, il y en a aussi parmi les chefs de
bande, dont la physionomie est parfaitement régulière. Tel était l’assassin dont
parle Lavater et qui ressemblait à un ange du Guide. Tel était ce prétendu colonel
Pontis de Sainte-Hélène, qui put pendant longtemps tromper l’autorité et la cour
sur les dépouilles de celui qu’il avait probablement tué. Tels étaient Holland, La-
cenaire, Bouchet, Lemaire, Sutler et le chef de brigands Carbone, une des plus
gracieuses figure napolitaines (voir Atlas).
Mais ce sont des exceptions qui nous frappent et nous entraînent par leur
contraste, et qui s’expliquent quand on vérifie que ces criminels ont une grande
intelligence, à laquelle s’ajoute une certaine gentillesse de manières ; bien plus
souvent certains caractères féminins de la physionomie des criminels, comme
l’absence de barbe, l’abondance de la chevelure, la pâleur, nous font trouver leur
visage plus beau et gentil qu’il ne l’est en réalité. (Voir Atlas, planche VI, 6,3).
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 91
Quand, à part ces rares exemples qui forment l’oligarchie du délit, on étudie la
masse entière de ces malheureux, comme je l’ai fait dans les maisons de déten-
tion, on conclut que, sans avoir toujours une physionomie rébarbative et ef-
frayante, ils en ont une toute particulière et presque spéciale à chaque forme de la
criminalité.
Chez les violateurs (quand ils ne sont pas des crétins) presque toujours l’œil
est saillant, la physionomie délicate, les lèvres et les paupières volumineuses. La
plupart sont grêles, blonds, rachitiques, et parfois bossus (Atlas, XI, 100). Les pé-
dérastes se distinguent souvent par une élégance féminine, par les cheveux longs
et bouclés et part des habits qui conservent, même sous l’uniforme des prisons,
une certaine tournure féminine. La délicatesse de la peau, l’aspect enfantin,
l’abondance des cheveux, lisses et séparés à la mode des femmes, traits fréquents
dans ces malheureux, on les observe aussi chez les incendiaires, par exemple chez
cet incendiaire de Pesaro, qu’on avait surnommé la femme, et qui en avait en effet
l’aspect et les mœurs. (Voir Atlas, planche VII, fig 2 ; planche CI, 4, 4 bis et 2).
Les meurtriers, les voleurs avec effraction ont les cheveux crêpus, sont défor-
més dans le crâne, ont des puissantes mâchoires, des zygomes énormes, et des fré-
quents tatouages ; ils sont couverts de cicatrices à la tête et dans le tronc. (Voir
planche V, 5, 4, et VII, 1).
En général, beaucoup de criminels ont les oreilles écartées, les cheveux abon-
dants, la barbe rare, les sinus frontaux et les mâchoires énormes, le menton carré
et saillant, les pommettes larges, les gestes fréquents, en somme un type ressem-
blant au mongol et parfois au nègre. (Voir Atlas, planche VII, 2 et XII, 1 et 2).
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 92
L’usage assez fréquent chez nos brigand de porter des tresses, et celui des bra-
vi de porter le ciuffo comme insigne de leur féroce métier, est dû probablement à
leur splendide chevelure crêpue et rebelle à toute coiffure.
Casper déclare avoir découvert sur tous les assassins un regard froid et glacial,
presque de marbre, souvent des cheveux touffus. Il y avait un notable progna-
tisme chez Helm, absence de barbe chez Winck et Lucke, des pommettes énormes
chez Klausen, une bouche fendue chez les deux assassins M. V. et Pulmann : ce
dernier présentait de fréquentes contractions à la lèvre gauche. (Mörder Physio-
gnomie, 1854).
A. Scheffer nous a peint Judas avec une face prognate, et de longues oreilles à
anse ; tel est aussi ce Judas sculpté de la main d’un maître au pied de la Scala
Santa à Rome.
M. le docteur Edouard Lefort, dans une très belle monographie, le Type crimi-
nel d’après les savants et les artistes (Lyon, Storck, 1892), vient de démontrer
que, dans tous les chefs-d’œuvres artistiques, et particulièrement dans ceux de la
peinture, le type criminel, tel que le constata scientifiquement la nouvelle école, a
été complètement saisi par les grands maîtres, même des siècles les plus arrièrés.
aussi une tête de démon au front fuyant, au nez pointu, aux grandes oreilles en
cornets.
Le Titien, dans son Martyre de Saint Laurent et dans son Christ couronné
d’épines, nous montre les exécuteurs avec tête massive, front bas, extraordinaire
développement transversal de la face, cheveux implanté bas, abondants; barbe mal
plantée.
Raphaël a, dans la Cène, donné à Judas une tête large, des sourcils contractés,
une lèvre supérieure saillante.
Paul Caliare, dit le Véronèse, dans le Crucifiement, et dans son Jésus traînant
sur la croix, nous montre des bourreaux avec figures d’idiots, dysimétrie verti-
cale, cheveux touffus, barbe rare, partie supérieure du visage trop forte pour l’in-
férieure, bouche tirée en arrière, aux lèvres pincées, apophyses zygomatiques
énormes.
Chez les maîtres des écoles flamande, espagnole, française, nous trouvons ré-
pétés les mêmes caractères.
L’archéologie nous dévoile, comme l’a si bien démontré Mayor dans sa Mo-
nographie des Césars, 1886, que Tibère avait les oreilles à anse, l’asymétrie fa-
ciale, et la mâchoire volumineuse. Caligula avait une expression sinistre, cruelle
et défiante, un rictus menaçant au coin de la lèvre supérieure, la pâleur du visage,
les lèvres minces, les regards fixes et terribles, les mâchoires fortes et asymé-
triques; le côté gauche de la fosse zygomatique plus développé.
Balzac nous dépeint le fripon Du Tillet avec des cheveux très noirs, comme
s’il avaient été teints.
CHEVEUX
effraction
Escroque
Vol avec
de grand
Blessure
Incendie
Meurtre
chemin
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
Viol
Vol
rie
Noirs 45,0 42,0 23,0 33,3 57,0 44,7 45,0
Châtains 42,0 46,0 41,7 46,0 42,0 35,5 42,5
Blonds 12,5 12,0 35,0 20,5 — 19,7 10,0
rouges — — — — — — 2,5
CHEVEUX
De bourse
nels p. 0I0
des crimi-
Coupeurs
Moyenne
Normaux
mestique
Vol do-
Oisiveté
simple
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
p. 0I0
Vol
Les cheveux noirs et les châtains sont donc plus fréquents chez les criminels,
tandis que les blonds y sont inférieurs d’un tiers — 13 à 33. — Le maximum des
noirs se trouve dans les incendiaires et dans les voleurs, le minimum dans les vio-
lateurs; le maximum des châtains est donné par les oisifs, par les blesseurs, par,
par les voleurs de grand chemin. Les blonds ne se trouvent, en majorité que dans
le viol et dans l’escroquerie. Les rouges (quoiqu’en disent les proverbes) sont très
peu fréquents.
Cela se confirme par une autre étude chez 860 criminels du Piémont :
Marro, sur 507 criminels, trouva le 10 0I0 avec les cheveux rare, tandis que 44
0I0 les avaient touffus ou crêpus, avec un maximum de 53 chez les vagabonds et
de 47 0I0 chez les assassins, les rebelles et les voleurs de grand chemin, et un mi-
nimum de 31 0I0 chez les escrocs.
Les escrocs avaient presque toujours la barbe touffues; les voleurs et les bles-
seurs la barbe plus rare.
4. — Iris. — Bertillon, sur 4000 criminels, trouve 33,2 0 I0 avec l’iris de cou-
leur marron, 22,4 0I0 de couleur châtain sombre, 32,4 jaune ou rouge, et 12 impig-
mentés ou avec des reflets verdâtres. (Rev. scient., 1885).
Par une étude faite avec Ottolenghi sur 1620 criminels et 900 normaux de la
même région (Piémont), j’ai trouvé :
ce qui démontre une plus grande quantité d’iris bleus chez les criminels, surtout
les escrocs et les violateurs.
J’ai observé aussi dans les criminels une proportion triple (0,3) d’asymétries
chromatiques de l’iris que dans les normaux (0,013).
1 Gionale della R. Accademia di Torino, n. 8, 9, 10, 1889. — Anales des maladies des oreilles,
octobre 1889. — Comptes-rendus du Congrès international d’otologie, p. 144. Paris, 1889.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 97
Les sujets qu’il a observés étaient très nombreux. Outre l’examen attentif de
650 personnes (350 hommes et 300 femmes), il a passé rapidement en revue les
pavillons de 25,000 personnes à Turin (15,000 hommes, 10,000 femmes). Il a
examiné 330 aliénés (180 hommes, 150 femmes), 352 criminels typiques (304
hommes, 48 femmes).
Chez les personnes honnêtes, les oreilles à anse sont donc environ la moitié
plus fréquentes parmi les hommes que parmi les femmes; les oreilles de Wilder-
muth , au contraire, sont plus fréquentes chez celles-ci.
1
En outre, il résulte de ses recherches que la proportion pour 100 des anomalies
du pavillon varie sensiblement — même en faisant abstraction du sexe — selon la
région, la ville, la classe sociale, et même, pour certaines anomalies, selon l’âge.
Il a rencontré un nombre beaucoup plus considérable d’oreilles à anse chez les en-
fants (25 0I0) que chez les adultes (12,5 0I0).
femmes
Normaux Criminels Aliénés Normales Folles
Oreilles à anse 1 à droite 4 à d. 10 à d. — 5 à d.
5 à gauche 15 à g. 38 à g. — 3 à g.
Autres anomalies 21 à droite 38 à d. 38 à d. 2 à d. 29 à d.
de l’oreille 26 à gauche 24 à g. 24 à d. 2 à d. 16 à g.
Ce qui démontre que ces anomalies sont en plus grand nombre à droite chez
les fous et les criminels.
1 Cette anomalie est caractérisée par la saillie plus accentuée de l’anthélix comparativement à
l’hélix.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 98
L’angle auriculo-temporal dépasse 90º dans les conditions normales avec des
chiffres de beaucoup inférieurs à ceux que l’on constate chez les fous et les crimi-
nels.
Elle est dépassée chez les singes, sur lesquels elle est rarement inférieure à
100º.
M. Frigerio serait arrivé à ces résultats, que je n’ai pu contrôler, grâce à l’oto-
mètre, instrument dont il a enrichi les laboratoires des anthropologistes criminels.
Le nez démesurément long se rencontra 2 fois sur 100; ainsi Perello, voleur de
Turin, avait un nez long de 4 centimètres.
Les violateurs ont le plus souvent le nez rectiligne (54,5 0 I0); écrasé (50 0I0)
et dévié (50 0I0), mais de dimensions moyennes.
Chez les normaux, le nez est tantôt crochu (26,87 0I0); tantôt onduleux (25,4
0I0); plutôt long (57,7 0I0); de largeur moyenne (54,8 0I0); a base très souvent
abaissée (42 0I0) et très rarement écartée (6 0I0); surtout protubérant (30 0I0).
Le nez de l’épileptique est souvent onduleux (48,2 0I0) et crochu (32,8 0I0); à
base horizontale (73,3 0I0); très long (74 0I0); plusieurs fois bien large (30 0I0);
souvent dévié (25 0I0), presque toujours protubérant (59,94 0I0).
9. — J’ai trouvé les parties génitales anormales dans 2 0I0 des blesseurs, 2,6
0I0 des escrocs, 5 0I0 des violateurs, 1 0I0 des voleurs. Penta dans 15 0I0 des
grands criminels.
10. — Proportions des anomalies. — En étudiant 400 criminels des plus fa-
rouches, Penta a trouvé ces anomalies dans la proportion de
%
Prognatisme alvéolaire 45
Zygomes grands et saillants 37
Mandibules grandes 29
Sinus frontaux très grands 30
Arcades orbitaires saillantes 21
Menton gros, carré, rentrant 27
Front bas et étroit 19
Front fuyant 22
Oreilles inégales 24
» à anse 35
» pithéciques 5,60
» sessiles 3
» avec les tubercules de Darwin 45
Hémiatrophie faciale 18
Asymétrie faciale 15
Hémiatrophie crânienne 5
Hémiatrophie de tout le corps 7
Appendices lémuriens des mâchoires 1,50
Microphtalmie 3
Otematoma 1,50
Bouche très large 2
Nez camus 6
» trilobé 3
» pithécique 1
Bec de lièvre 1
Mamelles féminines 2,20
» surnuméraires 3
Voile pendant bifide 0,50
Goître 2,50
Anomalies des parties génitales 15,50
Dents anomales 22,50
Strabisme paralytique 5
Inégalité des rimes des paupières 10,5
Nanisme 2,1
Scholiosis 7
Ajoutez avec Marro
Ernies 6,2
Varicocèles 6,1,5
Novus pilaris 1,5
Pâleur du visage 31,0
(avec un maximum chez les meurtriers de 35 0I0)
L’intelligence, écrit-il, du gamin de Paris est vive, son esprit précoce. En gé-
néral petit, il est alerte, prompt à la réplique, intelligent, très adroit et « dé-
brouillard ».
« Si le père, ivrogne, ne remplit pas ses devoir de chef de famille, c’est sou-
vent le fils ou une fillette de onze à douze ans qui est le vrai chef de famille; cinq
ou six ans plus tard, ce gavroche est resté petit, comme éteint; il a l’esprit lent et
sans volonté. Il a subi un temps d’arrêt au moment de la puberté, sa conformation
corporelle est restée comme stationnaire.
« La verge est grêle, les testicules petits, les poils rares, la peau est glabre et la
barbe clairsemée.
« Le squelette ne devient pas celui d’un mâle; le bassin s’élargit, les forme de-
viennent potelées par suite de la graisse qui envahit le tissu sous-cutané et fait
gonfler les seins »
C’est vers seize ou dix-huit ans que ces infantiles prennent de l’embonpoint.
Leurs formes s’arrondissent; ils ont des allures féminines.
Les facteurs qui concourent à cet étiolement sont complexes, tels que le travail
à l’atelier, le séjour dans les logements peu salubres, la débauche précoce, l’alcoo-
lisme prématuré.
Les infantiles n’ont pas les aptitudes génésiques dévolues au sexe masculin
dans la race humaine. Comme ils sont, en quelque sorte, un développement fémi-
nin au point de vue somatique, ils sont vite enrégimentés par les agents de pédé-
rastie.
13. — Atavime. — Et bien des fois toutes ces anomalies rappellent les races
sauvages, même les anthropoïdes.
Or, lorsque, dans les criminels, nous avons ces réunions de plusieurs anoma-
lies surtout atavistiques (quelquefois elles sont pathologiques : par exemple, asy-
métrie, ernies), nous disons qu’ils ont le type criminel.
Or, il n’y a pas de doute que, si l’acception de l’idée d’un type est liée à sa
complète universalité, on ne peut l’accepter. Mais j’avais déjà écrit, dans mes
premiers ouvrages qu’il faut accueillir cette idée avec la même réserve que celle
qu’on met à apprécier les moyennes dans la statistiques. Quand on dit que la vie
moyenne est de trente-deux ans, et quel le mois le plus fatal à la vie est le mois de
décembre, personne n’entend par là que tous, ou presque tous les hommes doivent
mourir à trente-deux ans, ni au mois de décembre.
Et je ne suis pas le seul à faire cette restriction; pour le démontrer, je n’ai qu’à
citer littéralement des définitions qu’en donne, dans son ouvrage , M. Topinard
1
« Le type, dit Gratiolet, est une « l’image abstraite et générale », que nous dé-
duisons de l’observation des parties communes et des différences. « Le type
d’une espèce, ajoute Isidore-G. Saint-Hilaire, ne se montre jamais à nos yeux, il
n’apparaît qu’à notre esprit ». « Les types humains, écrit Broca, n’ont pas une
existence réelle : ce sont des conceptions abstraites, idéales, qui ressortent de la
comparaison des variétés ethniques et se composent de l’ensemble des caractères
communs à un certain nombre d’entre elles ».
« Nous acquiesçons pleinement à ces manières de voir : le type est bien un en-
semble de traits, mais par rapport au groupe qu’il caractérise, c’est aussi l’en-
semble de ses traits les plus accusés et se répétant le plus souvent. D’où une série
de conséquences que l’anthropologiste, dans son laboratoire aussi bien qu’au mi-
lieu des populations de l’Afrique centrale, ne doit jamais perdre de vue.
« Le type, dit Isidore-G. Saint-Hilaire, est une sorte de point fixe et de centre
commun autour duquel les différences présentées sont comme autant de dévia-
tions en sens divers, et d’oscillations presque indéfiniment variées, autour duquel
la nature semble se jouer, comme disaient autrefois les anatomistes, et comme on
dit encore dans les langues germaniques. »
« Le type d’une série de crânes ou d’individus n’est donc pas une réalité pal-
pable, mais le produit d’un travail, un désir, une espérance, une image abstraite et
générale, suivant l’expression de Goethe. Le résultat serait le même, si, au lieu de
procéder mathématiquement, par une série de mensuration, on eût procédé par les
sens et par une suite de tâtonnements, en conservant le souvenir de la physiono-
mie de chaque crâne; rejetant les traits exceptionnels, exaltant ceux qui se répètent
le plus et contrastent davantage avec ceux des autres groupes, et créant dans son
esprit une résultante typique, une quintessence de caractères.
« Le type d’une espèce, d’une race, d’un peuple, d’une série de crânes, autre-
ment dit d’un groupe quelconque, est donc l’ensemble des caractères les mieux
accusée, les plus constants au degré voulu et les plus frappants par rapport à ceux
d’autres groupe.
« Il va sans dire que ces caractères ne pèsent pas de même dans la balance,
qu’il y en aura de légers et de décisifs, et pour me servir du véritable mot, de ca-
ractéristiques. Il va sans dire aussi que parfois aucun, pris isolément, n’aura une
grande signification, et que leur portée résultera de leur nombre. Il y a ainsi des
types bons, mauvais et indifférents, des types certains et des types douteux. Une
question se pose donc : à quel nombre minimum de caractères utile un type peut-il
se réduire? Elle pose et ne se résout pas. C’est au jugement de chacun et à la ri -
gueur qu’exige le cas particulier à en décider. Dans la pratique, deux ou trois
bons caractères physiques réunis sont souvent une bonne fortune, et l’on s’en
contente, lorsqu’ils sont appuyés de considérations et surtout de caractères phy-
siologiques, historiques, etc. »
15. Type admis par les adversaires. Ce type est admis pratiquement par
ceux qui le nient a priori.
Et venons à M. Laurent qui, bien souvent dans son ouvrage, raille les résultats
de l’anthropologie criminelle et nie l’existence du type. C’est lui, en effet, qui
écrit :
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 106
« Il faut en outre tenir grand compte de ceci : c’est que certaines physionomies
qui paraissent absolument caractéristiques ne sont en réalité qu’un pur effet du ha-
sard » (sic) . Or lui-même écrit dans la même page : « On amena un jour à l’in-
firmerie centrale au pauvre diable qui avait subi 12 à 15 condamnations, toutes
pour braconnage. C’était un homme petit, maigre, osseux, ne sachant ni lire ni
écrire, et dont toute la vie avait été remplie par une unique passion : le bracon-
nage. Il avait un front petit, fuyant et dénudé, des lèvres menues et serrées, des
yeux petits, enfoncés, jaunâtres, avec des paupières clignotantes, un nez maigre et
pointu, recourbé sur une bouche édentée; une vraie tête d’oiseau de proie.
« J’ai encore en ce moment sous les yeux l’histoire d’un homme à face de
brute, ivrogne et souteneur de barrière, pour qui les attaques nocturnes sont
« d’agréables parties de campagne ».
M.., âgé de quarante-trois ans, marchand ambulant à Paris, a déjà subi quatre
condamnations, une pour outrage aux agents, une autre pour rixe et deux pour
vols.
Ses oreilles larges et écartées, son nez fortement dévié à droite, donne à sa
physionomie un aspect singulier qu’exagère encore une tache rouge congénitale
de l’iris droit, tranchant su la couleur bleue uniforme du reste de l’organe.
Tel est encore cet ivrogne vagabond condamné plus de 25 fois et dont le nez
est très dévié à droite.
Joly, dans son article Nos jeunes détenus (Archive de l’anthropologie crimi-
nelle, 1890, XXVI), nous fait le portrait moral, on ne peut plus mauvais, de
quelques jeunes criminels célèbres; et il affirme qu’il ne trouve chez eux rien qui
rappelle le type criminel.
Lepage est normalement développé, selon Garnier et Joly, mais ils n’ont garde
de nier qu’il a les lèvres minces et le regard audacieux; et ils ajoutent après :
Dans le livre de M. Macé (Mon Musée criminels, 1891), qui donne beaucoup
de photographies de criminels nous en voyons :
Mais où le type criminel est plus étonnant, c’est dans les photographies et
dans la biographie des jeunes délinquants qui, selon Joly, n’auraient pas la physio-
nomie criminelle.
« Les enfants groupés sur la planche XVI, dit M. Macé lui-même , repré- 2
sentent les types accomplis de jeunes scélérats, originaires de Paris; ils sont sur-
nommés : File-Menton, La Comète, Margoulin, Bec-de-Lampe, Maltourné, Tête-
d’Or, Museau-de-Brochet, La-Savate et Moule-à-Singe. Les trois premiers n’ont
que neuf ans.
« Moule-à-Singe a la peau moire, les traits accentués, les yeux durs, perçants,
l’un à demi fermé, l’autre ouvert, l’oreille attentive; l’ensemble de la physionomie
canaille a l’expression féroce. Il a par jalousie, dit-il, noyé une fillette de treize
ans, assez jolie, déjà formée, et que d’insouciants parents laissaient vagabonder.
Loin de se repentir de l’atrocité de son acte, il répondit à ses juges : « La gosse ne
voulait pas de moi, je l’ai poussé dans l’eau ».
Dans le livre de Havelock-Hellis (The criminal Man, 1890), on voit les cro-
quis de 36 criminels, en grande partie voleurs, tracés de profil par le docteur Vans
Clarke, directeur de la prison de Woking. Ces croquis n’ont pas la valeur des
photographies et, de plus, étant reproduits de profil, il n’est pas aisé d’y bien rele-
ver les anomalies. Néanmoins, dans 25 sur 26, on rencontre très évidente la
réunion de 5 ou 6 anomalies dégénératives (surtout les déformations du crâne (pl.
I, 2, 3,5; pl. II, 1, 5, 6), placéphales (pl. I, 1, 3, 5; pl. II, 2, 5), les sinus frontaux
débordants (pl. I, 1, 2, 3, 5; pl. II, 2, 5, 6), les mandibules énormes avec progna-
tisme (pl. I, 1, 2, 3) ou obliquées (4), les zygomas saillants, les oreilles énormes et
déformées (pl. I, 2, 3, 5; pl. II, 2, 6).
III.
Photographies et types de criminels.
Aussi avant de leur attribuer une importance décisive, serait-il bon de voir en
quelle proportion on les trouve et de rappeler que ce n’est pas l’existence d’un ou
deux de ces caractères, mais bien leur ensemble qui peut révéler les tendances cri-
minelles.
Une autre lacune que nous devons combler dans cette édition, c’est de signaler
combien de fois le type criminel se manifeste dans son entier, en opposition à ce
qu’on voit chez les hommes normaux, et combien de fois il se rencontre non
seulement chez les criminels célèbres, plusieurs fois récidivistes, mais chez les
criminels ordinaires, chez tous ceux qui non seulement sont criminels anthropolo-
giquement, mais le sont juridiquement.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 110
220 sont les criminels mâles étudiés, dont 23 américains, 1 anglais, 2 français
et belge, 18 italiens, 164 allemands, 8 hébreux, 4 russes; 204 sont les femmes
criminelles, dont 16 américaines, 59 allemandes, 129 italiennes.
Hommes Femmes
Voleurs et coupeurs de bourses 108 81
Assassins et meurtriers 50 92
Escrocs, banqueroutier et faussaires 54 6
Attentats aux mœurs et viol 5 7
Bigames 2 1
Incendiaires 0 2
Empoisonneuses 0 8
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 111
Chez les mâles la physionomie conserve le type ethnique dans 20 sur 211, tan-
dis qu’elle le perd chez tous les autres, excepté les 8 juifs, qui conservent tous le
type sémite.
Chez tous ces gens-là la spécialité du crime explique l’absence du type crimi-
nel; ce sont ou des intelligences supérieures, ou des criminels d’occasion. C’est le
cas de Peltzer (Atlas, planche IX, n. 78), et du contrebandier qui tua les gen-
darmes pour sauver sa marchandise.
1 Atlas, planches IX, X et XI. Pour tous les autres on trouvera les détails dans l’Atlas.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 112
Cette absence du type criminel ne s’explique guère pourtant chez les brigands
de la Sicile et chez 9 voleurs récidivistes.
Et dans tous, dans ceux même qui paraissent normaux, on trouve une étrange
ressemblance, une vraie affinité anthropologique. Regardez, par exemple, les nn.
20 et 21, planche XI; 50, 51, 55, 59, 60, planche X. Cela est bien plus évident
dans ceux qui ont le type criminel; c’est à croire bien des fois que c’est le même
personnage. Tel est le cas des n. 13, 31, 9, 22, 3 et 4 de la planche VIII; 21, 22,
14, 23, 9 et 11 de la planche XI. ― On s’explique par là l’absence du type natio-
nal, l’analogie des criminels italiens et allemands; c’est comme dans les crétins où
le type ethnique est effacé par la dégénération morbide.
_______________
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 113
IV.
Objections. - physionomie des gens honnêtes.
Opinions populaires et proverbes
Sur la physionomie criminelle, ses causes
Conclusions générales.
Mais, même dans ceux-ci, on ne trouve pas autant de caractères réunis comme
dans les criminels.
Car c’est là le fait le plus saillant qui nous résulte, à moi et à Ferri aussi, par la
comparaison avec 711 soldats, que jamais chez les gens normaux on ne voit
réunis dans une proportion aussi grande dans la même personne les caractères dé-
génératifs qui forment le type criminel; tout au plus, celui-ci arrive à 2 ou 3 0 I0,
tandis que pour les criminels il va jusqu’à 23 ou 27 0I0.
Criminels de Ferri
Anomalies 346 353 711 200 homm. norm.
physionomiques grands criminels crim. légers soldats lombards
-- 11,9 0I0 8,2 0I0 37,2 0I0 32 0I0
1à2 47,2 » 56,6 » 51,8 » 53 »
3à4 33,2 » 52,6 » 11,8 » 16 »
5à6 6,7 » 2,3 » -- --
7 et plus 0,3 » 0,3 » -- --
Mais une observation est ici nécessaire : s’il y a des points douteux dans
l’étude des criminels, il y en a bien davantage dans celle des gens présumés hon-
nêtes : ces derniers, en effet, ne sont pas tous réellement honnêtes. On en connaît
bien les caractères physiques, mais pas tous les caractères moraux, qui ne se ré-
vèlent qu’après une longue fréquentation. Pour résoudre ce difficile problème,
étudions les caractères de 400 autres individus dont on a pu connaître la vie. Sur
ce nombre, 187 n’avaient aucun des caractères de la physionomie criminelle, et
cependant il y avait parmi eux 9 personnes immorales.
2 en offraient cinq et 1 six. Parmi eux, 1 est honnête, mais c’est un chef révo-
lutionnaire, aux procédés peu délicats et suspects, l’autre est un escroc, le dernier
est un graphomane.
De vraiment honnête avec le type criminel complet je n’ai trouvé qu’un seul
exemple sur 400; mais 213 gens honnêtes avaient, les uns ou les autres, quelqu’un
des caractères criminels. 8 sur 400 avaient 4 ou 6 caractères, mais 3 sur ces 8
n’étaient pas honnêtes.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 115
Des individus que je croyais honnêtes, qui devaient me paraître tels, et qui
avaient plus d’un caractère criminel, après quelques années d’observation me ré-
vélèrent en eux une criminalité latente : elle ne demandait pour se développer que
l’occasion. Par exemple, un homme fort riche, à qui rien ne manquait, qui pouvait
satisfaire tous ses caprices, m’avouait que s’il avait été pauvre, il eût été voleur,
assassin même. Un autre que la faveur avait porté à un poste élevé, avec une vé-
ritable physionomie criminelle, s’abandonnant un jour à un accès de colère :
« Prends garde, je suis capable de tout! on m’appelait Galère de mon jeune âge ».
2.—Proverbes.— Bien des gens nous objectent que cette façon de voir est en
contradiction avec l’opinion publique. Celle-ci assurément n’ est pas un bien bon
guide dans les questions scientifiques. Nous avons, cependant, bien des preuves
que plus d’une de nos conclusions a pénétré dans les consciences populaires.
C’est ainsi qu’on en retrouve des traces dans les proverbes, dans les chants popu-
laires, dans des poésies d’auteurs qui ont réfléchi les idées du peuple. Par
exemple :
Chez les Toscans : « Homme sans barbe et femme barbue, salue-les de loin ».
Tous ces dictons sont résumés dans le vieux proverbe français (Etymologie
des proverbes, par Bellinger, 656) : « Au vis (visage) le vice », et dans l’autre :
« Visage farouche, mœurs cruelles »; — Il ciuffo è nel ceffo, dit de même le pro-
verbe toscan (Giusti, 341). — a vultur vitium, disaient aussi les Latins.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 116
Le proverbe toscan « Méfie toi de qui rit et ne te regarde pas, et des hommes
aux yeux petits et clignotants », de même que ceux qui se méfient des hommes
roux, fixent d’autres traits de la physiologie que l’anthropologie criminelle ne
peut encore accepter.
J’ai connu une dame qui avait vécu, comme on dit, loin du monde. Cepen-
dant, deux fois elle sut découvrir le caractère criminel de certains jeunes gens, que
d’abord personne n’avait soupçonnés.
Mais le plus curieux exemple est celui de l’assassin Francesconi, dont l’Atlas
reproduit la photographie (planche VI, 42) ; il n’y a rien de particulier en lui; la
barbe est abondante, le front haut; à peine lui trouve-t-on un léger degré de pro-
gnatisme et de sinus frontaux. Or, bien des années avant son crime, une jeune
fille de seize ans, qui jamais n’avait quitté le château de ses aïeux, celle qui fut
plus tard la comtesse de Della Rocca, refusa de lui parler : et comme on lui de-
mandait d’où lui venait une telle répulsion, elle répondait : S’il n’est pas un as-
sassin, il le deviendra. Je lui demandé quel signe l’avait conduite à cette prophétie
trop vite vérifiée, elle me répondit : Par les yeux.
Que de fois, dans un procès, ne voit-on pas que des individus honnêtes, étran-
gers au monde du crime, ont échappé à une mort certaine, avertis à temps par le
regard sinistre d’un assassin où ils lisaient ses intentions criminelles! C’est ainsi
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 117
justement que le premier facteur qui devait être la victime de Francesconi, eut le
temps de fuir, épouvanté par son regard.
Enfin des maîtres d’école ont présenté, sur ma prière, à 40 jeunes filles, 20
portraits de voleurs et 20 de grands hommes : quatre-vingts pour cent de ces en-
fants reconnurent les premiers pour de tristes personnages, ou pour des fourbes, et
les seconds pour d’honnêtes gens.
Dans les jeunes filles, nulle connaissance acquise par l’expérience. Que reste-
t-il? Un sens intuitif, dira-t-on; explication vulgaire dont le public se contente,
parce qu’elle ne signifie rien.
L’impression léguée par nos pères et transmise à nos fils, est devenue comme
une connaissance inconsciente, semblable à celle des petits oiseaux nés et élevés
dans nos demeures et qui, effrayés, frappent leur cage de l’aile et du bec, lors-
qu’ils voient passer au-dessus d’eux des oiseaux de proie, que seul leurs ancêtres
ont connus. ― Chaque jour nous enseigne quelle part importante a l’inconscience
dans les actions humaines, et quel rôle y jouent l’atavisme et l’hérédité.
Qui de nous peut penser, lorsqu’il plie les genoux et joint les mains dans la
prière, qu’il fait un mouvement héréditaire légué par ces époques de barbaries où
la guerre était l’état normal? ― Alors, par cette attitude humble et qui facilitait
la ligature des mains, le vaincu essayait d’éloigner le soupçon, d’exciter la pitié
du vainqueur, et de changer en servitude la mort qui lui était réservée.
Il est bien certain que tous les traits physionomiques peuvent se modifier au
gré du criminel, mais jamais le regard qui trahit le fond de l’âme, même dans les
plus hypocrites.
Cesare Lombroso, L’homme criminel. Tome premier, 2e partie (1895) 118
Je trouve le regard des assassins très analogue avec celui des félins au moment
de l’embuscade et de la lutte; et je l’explique par la répétition continuelle des
mauvaises actions; car chez les enfants les plus criminels je n’ai jamais observé le
regard féroce. Les rares exceptions qu’on rencontre chez les adulte proviennent
d’un phénomène très curieux, déjà noté par Vidocq, et que j’appellerai du double
regard. -- Lacenaire, Luciani, Gasparone, par exemple, pour n’en citer que
quelques-uns, avaient deux regards différents, l’un doux e presque féminin, e
l’autre féroce et félin; ce regard ne dépendait pas d’eux, mais il variait suivant
l’état de leur esprit tantôt aimable, tantôt féroce, ce qui leur donnait un double
pouvoir fascinateur, surtout vis-à-vis de la femme; elle est attirée d’abord, par
cette apparence courtoise, enchaînée ensuite, par la terreur et l’énergie, ce qui ex-
plique bien des cas d’incroyable complicité.
7. - Résumé. - Les mesures anthropométriques sur le cadavre, bien que peu fé-
condes, servent cependant à démontrer, d’une façon certaine, l’infériorité des cri-
minels, spécialement des voleurs, dans la capacité (qui est au contraire énorme
dans certains assassins), et dans la circonférence crânienne, dans le développe-
ment de la courbe et du diamètre frontal, dans l’indice céphalique exagéré, dans
l’eurignatisme, dans la capacité orbitaire, dans le développement notable de la
mâchoire, dans l’augmentation du diamètre et de la hauteur de la face. Il y a, chez
les criminels, des indices de la face orbitaires et céphalo-orbitaires moins élevés
que normalement ou que chez les fous et viceversa un indice cépholo-spinal plus
élevé.
assez souvent celles du foie, affections qui comptent pour le quintuple chez les
malades non criminels.
Avec tant d’anomalies, il surprenant qu’on vérifie sur les cadavres une plus
grande supériorité de la taille et pas de différence de poids, peut-être, même, une
différence en plus.
Pour les examens sur les vivants, je résumerai, en peu de mots, ce que j’ai été
obligé à exposer avec force chiffres; et je conclurai que le délinquant à une taille
plus haute, une envergure plus grande, un thorax plus ample, une chevelure plus
sombre et un poids supérieur au normal et à celui des aliénés; qu’il présente, sur-
tout chez les voleurs, chez les récidivistes et chez les mineurs, une série de submi-
crocéphalies plus grande que normalement, mais plus petite que chez l’aliéné; --
que l’indice du crâne, comparé en général à l’indice ethnique, est plus exagéré en
lui; -- que le délinquant offre des asymétries crâniennes et faciales fréquentes, sur-
tout chez les violateurs et chez les voleurs, mais plus rares que chez les fous, car
s’il a sur ces derniers la supériorité des lésions traumatiques à la tête, et des yeux
obliques, il a, moins fréquemment, l’athérome des artères temporales, la situation
anormale des oreilles, la rareté de la barbe, la nistagmus, l’asymétrie faciale et
crânienne, la mydriase, et encore plus rarement la calvitie précoce, et en propor-
tions égales le prognatisme, l’inégalité des pupilles, le nez tordu, le front fuyant;
-- que, plus souvent que les fous et que les hommes sains, il a une face plus
longue, une plus grande développement des apophyses zygomatiques et de la mâ-
choire, l’œil sombre, la chevelure épaisse et noire, surtout chez les voleurs de
grand chemin; -- que les bossus, très rares chez les homicides, sont plus fréquents
chez les violateurs, les faussaires et les incendiaires; -- que ces derniers, et plus
encore les voleurs, ont toujours une taille, un poids et une force musculaire infé-
rieurs à ceux des brigands et des homicides; que les cheveux blonds abondent
chez les violateur, les noirs chez voleurs, chez les meurtriers et les incendiaires.
Une étude sur les photographies des criminels nous a fourni le moyen de faire
contrôler par le lecteur et de fixer la fréquence du type physionomique du crimi-
nel dans la proportion de 25 0I0, avec un maximum de 36 0I0 pour les assassins, et
un minimum de 6 à 8 0I0 pour les banqueroutiers, escrocs et bigames; et à ce pro-
pos je dois noter aussi que les anomalies crâniennes et faciales et spécialement la
capacité moindre, la moindre semi-circonférence antérieure, la plus grande lon-
gueur de la face et le grand développement des zygomes ont été vérifiés en pro-
portions presque égales à celles des gens honnêtes, chez les blessures et chez les
criminels d’occasion.
Une étude sur 800 hommes libres nous a montré qu’on peut bien trouver quel-
quefois, dans les gens libres, les caractères dégénératifs-physionomiques, mais
aussi presque jamais accumulés dans les mêmes personnes et bien des fois justi-
fiés par la criminalité latente ou par la dégénération crétine.
1 Une étude récente sur 53 violateurs m’a donné comme résultat 43 types criminels complets
sur cent ; 3 féminismes, 7 mâchoires volumineuses, 14 asymétries faciales, 5 nez tordus, 6 mi-
crocéphalies.