Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Automne 2019
Chapitre 1
La plupart des transactions financières usuelles sont régies essentiellement par deux
types d’intérêts : l’intérêt simple et l’intérêt composé.
Intérêt simple : Vous avez un montant de 1$ que vous désirez investir à un taux
d’intérêt simple (annuel) de 10% sur 2 ans. Alors vous accumulerez :
Ainsi le taux d’intérêt simple (10%) s’applique au début de chaque année sur le
montant initial (1$) investi au début de la première année. Les intérêts payés après
deux ans sont de 0.20$. Ce type d’intérêt est habituellement utilisé pour des
investissements (ou des prêts) à court terme (moins qu’un an).
Intérêt composé : Vous avez un montant de 1$ que vous désirez investir à un taux
d’intérêt composé (annuel) de 10% sur 2 ans. Alors vous accumulerez :
Ainsi le taux d’intérêt composé (10%) s’applique au début de chaque année sur le
montant accumulé (1.10$) à la fin de l’année précédente. Les intérêts payés après
deux ans sont de 0.21$. Ce type d’intérêt est habituellement utilisé pour des
investissements (ou des prêts) à long terme (plus qu’un an).
Plus généralement, supposons que C est le montant initial investi, i est le taux d’intérêt
par période et n représente le nombre de périodes d’investissement, alors le montant
accumulé après n périodes est :
1
1.1.2 Taux d’intérêt (de rendement) annuel moyen
Une situation qui pourrait bien se présenter est que le taux d’intérêt (composé) diffère
d’une période (année) à l’autre. Nous pourrions alors être intéressé à évaluer le
« rendement » sur le nombre de périodes ou le « rendement annuel moyen » sur ces
périodes.
𝑖 = √1.0742 − 1 ≈ 3.64%
3
𝑖 = √1.0398 − 1 ≈ 1.31%
Définition : Le taux d’intérêt effectif d’un investissement sur une période donnée
(habituellement une année par défaut sauf si mention contraire) correspond au
pourcentage de variation de la valeur de l’investissement du début à la fin de la
période, sans égard au comportement intermédiaire de l’investissement durant la
période.
Exemple : Si nous reprenons l’exemple donnée en 1.1.2, les taux d’intérêt effectifs
annuels sont respectivement de 2.5%, 4.8% et -3.2%. Le taux d’intérêt effectif sur les
2 premières années est de 7.42%, et sur les 3 années est de 3.98%.
2
Exemple : Deux investissements ont les mêmes taux d’intérêt effectifs pour une année
donnée. Le premier investissement a eu des rendements trimestriels de 2% pour
chaque trimestre. Le deuxième investissement a eu un rendement de 3% pendant les
6 premiers mois et de X% pour les 6 derniers mois. Trouvez X.
(1 + 0.02)4 = (1 + 0.03)(1 + 𝑋)
(1 + 0.02)4
⟹𝑋= −1
(1 + 0.03)
Définition : Deux taux d’intérêt sont dits équivalents sur une même période (une
année), si leur valeur accumulée est la même en fin de période.
i.e. que le taux d’intérêt mensuel de 2%, composé à tous les mois pendant 12 mois,
est équivalent au taux d’intérêt annuel effectif de 26.82%.
Supposons que vous disposez d’un compte bancaire, rapportant un taux d’intérêt
effectif annuel de 2%, pour payer certaines factures courantes. Vous déposez au début
de la première année 500$. Vous en retirez 100$ au début de la troisième année, puis
vous en déposez 250$ au début de la quatrième année. Vous voulez évaluer le solde
(la balance) de votre compte à la fin de la quatrième année. Deux approches peuvent
être adoptées.
0 1 2 3 4
3
0 1 2 3 4
0 1 2 3 4
4
1.2 Fonction d’accumulation, valeur présente, valeur future
Dans presque toutes les transactions financières, nous sommes intéressés par la
valeur temporelle de l’argent, que ce soit au début, à un moment intermédiaire ou à
la fin de la transaction. Pour ce faire nous définissons d’abord deux fonctions :
𝐴(𝑡) = 𝐴(0)𝑎(𝑡)
En théorie, la variable t peut être discrète ou continue, si l’intérêt est « crédité » qu’en
fin de période (comme dans les prêts hypothécaires) ou de manière continue (comme
dans les transactions boursières).
𝐴1 (𝑡 ) = 𝐴(0)(1 + 𝑡𝑖 ),
𝐴2 (𝑡 ) = 𝐴(0)(1 + 𝑖)𝑡
5
Nous constatons que la valeur accumulée par intérêt simple est supérieure à la valeur
accumulée par intérêt composé pour les valeurs de t comprises entre 0 et 1, mais que
cet ordre est inversé pour les valeurs de t plus grandes que 1. Cela justifie en partie le
fait que l’intérêt simple s’applique plus à de courtes périodes (moins d’un an).
Remarques :
1 La fonction A(t) est aussi dite « valeur future » au temps t d’un investissement
A(0), et la quantité A(0) est aussi dite la valeur présente (ou actualisée) au temps
t = 0 d’un montant d’argent dont la valeur au temps t vaut A(t).
𝑣 = (1 + 𝑖)−1
𝐴(0) = 𝐴(𝑡)𝑣 𝑡
Généralement, nous définissons le taux d’intérêt effectif sur la période [t,t + h] comme
étant le montant d’intérêts gagnés sur la période divisé par la valeur de
l’investissement au temps t, ce qu’on notera par :
pour un taux d’intérêt effectif qui décroit dans le temps pour h fixé. Pour la fonction
d’accumulation A2 (t), nous avons :
pour un taux d’intérêt effectif qui est constant dans le temps pour un h fixé. En
particulier, pour h = 1, le taux d’intérêt effectif correspond exactement au taux
d’intérêt composé (annuel) i.
6
1.3 L’équation de valeur
Pour ce faire, une équation mathématique est établie à une date fixe d’évaluation qui
vient « balancer » les valeurs temporelles des entrées et des sorties de fonds. Ainsi,
au moment choisi pour faire l’évaluation, une égalité est établie entre les deux
éléments suivants :
1) La valeur accumulée des sorties de fonds déjà déboursés plus la valeur présente
des sorties de fonds qu’il reste à débourser.
2) La valeur accumulée des entrées de fonds déjà reçus plus la valeur présente des
entrées de fonds qu’il reste à recevoir.
On établit ensuite une égalité entre ces deux composantes, soit (1) = (2) .
À t = 0, nous avons :
À t= 2, nous avons :
7
Remarque : Nous notons que les équations de valeur à t = 1 et à t = 2 ne diffèrent
respectivement de l’équation de valeur à t = 0 que par un facteur (1.03)12 et (1.03)24.
Maintenant supposons que le remboursement se fasse sur trois années, au même
taux d’intérêt composé, mais qu’il soit convenu qu’un premier remboursement de
750 000$ se fasse à la fin de la deuxième année et que le solde dû soit remboursé à la
fin de la troisième année. On aura maintenant :
Remarque : Puisque vous remboursez seulement 750 000$ après 2 ans, cela signifie
qu’il reste à rembourser après 3 ans :
8
1.4 Taux d’intérêt nominal
Exemple : Supposons qu’un investissement de 1 000$ vous rapporte des intérêts qui
sont crédités à chaque mois à un taux nominal de 5%. Alors le taux d’intérêt effectif
annuel sera :
*Nous notons que le taux d’intérêt effectif annuel est toujours supérieur au taux
d’intérêt nominal.
Remarques :
1 Pour un taux d’intérêt effectif annuel i fixé, le taux nominal décroit quand le
nombre de périodes croit et converge (quand m→∞) vers le nombre ln(1+ i). En
effet :
9
Cette limite sera appelée « force constante d’intérêt » et la notation actuarielle
utilisée pour cette quantité est δ (section 1.6).
Ces valeurs montrent que, pour un même taux d’intérêt nominal, l’augmentation du
nombre de périodes n’augmentera pas sensiblement le taux effectif annuel. Cela
rejoint la remarque précédente.
10
1.5 Taux d’escompte effectif et taux d’escompte nominal
Remarques :
1 Nous notons, dans l’exemple précédent, que le taux d’escompte (d ≈ 0.0476) est
inférieur au taux d’intérêt (i = 0.05).
Comme pour le taux d’intérêt, les taux d’escompte les plus généralement utilisés sont
les taux d’escompte simple et composé.
Escompte simple : Vous désirez accumuler un montant de 1 000$ sur deux ans avec
un taux d’escompte simple (annuel) d = 5%. Alors, similairement au taux d’intérêt
simple (où nous ajoutons à chaque année une proportion i du montant initial), nous
retrancherons à chaque année une proportion d de la valeur accumulée après 2 ans,
i.e. :
11
Escompte composé : Vous désirez accumuler un montant de 1 000$ sur deux ans avec
un taux d’escompte composé (annuel) de 5%. Alors l’escompte composé appliqué sur
la valeur accumulée à chaque année correspond au :
Plus généralement, si d est le taux d’escompte par période (par année) et n représente
le nombre de périodes d’investissement, alors le montant à investir au début de ces n
périodes est :
𝐴(𝑡 + ℎ) − (1 − ℎ𝑑)𝐴(𝑡 + ℎ)
𝑑𝑡+ℎ = = ℎ𝑑
𝐴 (𝑡 + ℎ )
Remarques :
12
ce qui, traduit en terme d’intérêt simple, donne bien :
Pour le taux d’escompte effectif composé sur [t,t + h] , puisque dt+h = dh , nous
obtenons
Tout comme pour le taux d’intérêt nominal, nous pouvons définir un taux d’escompte
nominal.
0.05 12
𝑑 = 1 − (1 − ) ≈ 4.89%
12
13
Supposons plutôt que ce même investissement vous rapporte plutôt un taux
d’escompte effectif annuel de 5%. Alors le taux d’escompte nominal correspondant
(composé sur 12 mois) sera :
***Nous notons que le taux d’escompte effectif annuel est toujours inférieur au taux
d’escompte nominal.
En effet,
Notons que cette limite coïncide avec celle obtenue pour i (m) puisque :
−𝑙𝑛(1 − 𝑑) = 𝑙𝑛(1 + 𝑖)
14
1.6 La force d’intérêt
Nous avons vu que le taux d’intérêt (tout comme le taux d’escompte) peut être
appliqué continûment, et qu’il peut même varier dans le temps.
Pour un produit financier donné, nous sommes donc intéressé à déterminer une
fonction qui représentera le taux de croissance « instantané » d’un investissement au
temps t par dollar investi. Cette fonction, appelée taux d’intérêt instantané (en
finance) ou force d’intérêt (en actuariat), sera donnée par l’identité suivante :
𝐴′(𝑡) 𝑎′(𝑡)
𝛿 (𝑡 ) = =
𝐴(𝑡) 𝑎(𝑡)
Remarques :
1) Dans le cas d’un taux d’intérêt simple annuel i appliqué continûment, nous avons :
𝑖𝐴(0) 𝑖
𝐴(𝑡) = (1 + 𝑖𝑡)𝐴(0) ⇒ 𝛿 (𝑡 ) = =
(1 + 𝑖𝑡)𝐴(0) 1 + 𝑖𝑡
Dans le cas d’un taux d’intérêt annuel i composé continûment, nous avons :
(1 + 𝑖)𝑡 ln (1 + 𝑖)𝐴(0)
𝐴(𝑡) = (1 + 𝑖)𝑡 𝐴(0) ⇒ 𝛿 (𝑡 ) = = ln (1 + 𝑖)
(1 + 𝑖)𝑡 𝐴(0)
𝑡
***Rappel : (𝑒 𝛿 ) = 𝑒 𝛿𝑡
2) Généralement, pour une force d’intérêt non constante, nous pouvons décrire la
valeur accumulée d’un investissement sur [t,t + h] en fonction de cette force
d’intérêt. En effet, puisque :
𝐴′(𝑡) 𝑑
𝛿 (𝑡 ) = = 𝑙𝑛[𝐴(𝑡)]
𝐴(𝑡) 𝑑𝑡
15
Alors :
D’où :
3) Généralement, pour une force d’intérêt non constante, nous pouvons aussi
évaluer le montant des intérêts gagnés sur [t,t + h] en fonction de cette force
d’intérêt. En effet, puisque
Alors :
4) Pour 𝛿 = 𝑙𝑛(1 + 𝑖), et pour i > 0 et m >1, nous pouvons facilement démontrer
que :
Exemple : Vous déposez 1 000$ dans un compte qui vous rapporte un taux d’intérêt
de 6% composé annuellement pendant les deux premières années, puis des intérêts
« continus » avec une force d’intérêt 𝛿 (𝑡) = 1/(1 + 2𝑡) dans les années
subséquentes.
16
Force d'intérêt 𝛿 (𝑡) = 1/(1+ 2𝑡)
100%
80%
60%
40%
20%
0%
0 1 2 3 4 5
20%
15%
10%
5%
0%
0 1 2 3 4 5
5 −1 𝑑𝑡
1 000(1.06)2 𝑒 ∫2 (1+2𝑡) =⋯
Si, par contre, la même force d’intérêt est appliquée dans les deux premières années
et que le taux d’intérêt de 6% est ensuite composé annuellement pendant les années
subséquentes, alors la valeur accumulée après 5 ans sera :
80%
60%
40%
20%
0%
0 1 2 3 4 5
17
2 −1𝑑𝑡
1 000𝑒 ∫0 (1+2𝑡) (1.06)3 = ⋯
Autre exemple : avec quelle force d’intérêt puis-je investir 10$ aujourd’hui et avoir
100$ dans 5 ans ?
18
1.7 Inflation et taux d’intérêt réel
1+𝑖 𝑖−𝛽
=1+𝑟 ⟺ 𝑟 =
1+𝛽 1+𝛽
Une interprétation simple serait de dire qu’un bien coûte 1$ aujourd’hui et qu’on
cherche à savoir combien d’unités de ce bien nous pourrons acheter en investissant
1$ aujourd’hui et ce pendant n années à un taux d’intérêt effectif de i. Cependant, le
coût du bien en question évolue et augmente à raison de 𝛽 par année. Ainsi, dans n
années, nous aurons :
1$(1 + 𝑖 )𝑛
𝑁 ∗ 1$(1 + 𝛽 )𝑛
19
1$(1 + 𝑖 )𝑛 1+𝑖 𝑛
𝑁= = ( ) = (1 + 𝑟)𝑛
1$(1 + 𝛽 )𝑛 1+𝛽
Il arrive parfois (comme récemment par exemple) que les taux d’intérêt soient en
dessous de l’inflation. On parlera ainsi de perte de pouvoir d’achat.
Exemple : les actuaires s’intéressent souvent au taux d’intérêt réel dans les régimes
de retraite. On offre deux options à un retraité :
1) Une rente de retraite ou les investissements sont faits avec un taux de rendement
effectif annuel constant de 6%.
2) Une rente de retraite ou les investissements sont indexés à l’inflation en plus d’un
taux d’intérêt réel de 2% au-dessus de l’inflation.
L’actuaire vous indique que selon ses projections, ces deux options devraient être
équivalentes. Quel taux d’inflation implicite est utilisé dans ses projections?
20
1.8 Période ou intérêt inconnu
Avec l’équation de valeur vue en 1.3, il est relativement simple d’isoler un flux
monétaire inconnu, qu’il s’agisse d’une entrée ou d’une sortie de fond dans le présent
ou dans le futur.
Dans certains cas, tous les montants ainsi que le taux d’intérêt seront connus mais pas
le moment associé à un ou plusieurs de ces montants. En général, il est possible
d’isoler le moment pour un seul montant, alors que plusieurs possibilités peuvent
exister si les moments sont incertains pour plusieurs montants.
Dans d’autres cas, les montants et les moments de chaque entrée et sortie de fonds
sont tous connus, mais pas le taux d’intérêt sous-jacent à ces calculs. Dans les cas
simples, le taux d’intérêt se trouve facilement (une entrée et une sortie de fonds, ou
encore une entrée et deux sorties ou deux entrées et une sortie avec des périodes
également espacées entre chaque paiement).
21
Exemple : pour que 1$ investi aujourd’hui s’accumule et vaille 4$ dans exactement
deux ans, quel doit-être le taux d’intérêt annuel effectif?
−⏟ (1 + 𝑖 )−2 + ⏟
5 000 000 ⏟ (1 + 𝑖 )−1 + ⏟
1 000 000 ⏟ 2 000 000 = 0
𝐴 𝑥2 𝐵 𝑥 𝐶
−𝐵 ± √𝐵2 − 4𝐴𝐶 −1 000 000 ± √1 000 0002 − 4 ∗ (−5 000 000) ∗ 2 000 000
=
2𝐴 2 ∗ (−5 000 000)
= 0.74031242 ou − 0.54031242
À noter que parfois, certaines équations mèneront à des taux d’intérêt négatifs (par
exemple, refaire l’exemple précédent avec un remboursement de 2 500 000$ au lieu
de 4 000 000$ à la fin de la deuxième année…). Parfois, on obtiendra une racine
négative (le taux d’intérêt n’existe pas, la courbe ne touche pas à l’axe des x nulle
part…).
Et dans des cas plus complexes, on aura recours à des méthodes par itération, par
essai-erreur… Le solveur d’Excel (ou de tout autre programme informatique) et/ou la
calculatrice financière peuvent grandement aider dans certains cas. Par exemple,
refaire l’exemple précédent avec les mêmes montants, mais avec un remboursement
final de 4 000 000$ à la fin de la troisième année.
22