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COURS DE MUSICOLOGIE
SEMESTRE 1
Par
Dr. ATTOUNGBRE Félix
Enseignant à l’INSAAC
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CONSIDERATIONS GENERALES
Cette affirmation montre réellement que la musique est à l’homme ce que les
couleurs et les formes sont à la peinture. L’évolution des sciences et des techniques
ainsi que l’élargissement du champ de connaissances dans les spécialités les plus
diverses ont entrainé l’élaboration de plusieurs théories issues des modifications
notables de l’environnement dans lequel l’homme est amené à se métamorphoser.
Ces théories développées pour le compte de la musique ont vu évoluer, au gré du
temps et des courants esthétiques, les fondements de la création artistique.
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Si cette affirmation est indiscutable, il est vrai que les nombreuses
manifestations de la musique dans les différentes contrées et les espaces du monde,
doivent constituer le corpus du travail qui attend les étudiants. De ce point de vue, la
musique africaine constituera l’essentiel du corpus à étudier. L’espace africain est
traversé par plusieurs formes d’expression musicale (folklorique et traditionnelle,
religieuse, profane, moderne, etc.) acquises depuis les périodes précoloniales,
coloniales, postcoloniales ou contemporaines. Chaque expression musicale, selon
l’espace, revêt une triple dimension thématique, socio esthétique et organologique
spécifique. Découvrons-les à présent.
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CHAPITRE I: LES FONDEMENTS HISTORIQUES ET
CULTURELS DE LA MUSIQUE DANS LES
SOCIETES AFRICAINES
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I.1.2 : La dimension subjective de la musique
Faut-il donc conclure que les oreilles sont différentes ici et là, puisque les
mêmes musiques sont ressenties différemment ? Ces musiques ayant été perçues à
travers des circuits différents ont acquis des valeurs différentes. C’est pourquoi
Françoise ESCALE affirme que « Chaque culture construit et organise son
matériau musical, lequel devient naturel par acculturation, au point que ce qui
est étranger à son système, le sujet social ne le perçoit pas, ou bien s’il le
perçoit, le refuse »1.
Notons avec Emile DURKHEIM que toute éducation consiste dans un effort
continu à imposer à l’enfant des manières de voir, de penser, de sentir, d’agir
auxquelles il faut se plier. Apprises et partagées par les membres de la société, les
normes et les valeurs culturelles contribuent à former une communauté particulière
qu’il est possible et même aisé de reconnaitre voire de distinguer les autres
communautés.
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I.2 : AUX RACINES DES MUSIQUES TRADITIONNELLES
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Hier et aujourd’hui, on voit encore « une Afrique "authentique", une Afrique
profondément émotive, ancré dans les tréfonds de ses rites et mythes millénaires,
assujettie à une symbolique ancestrale qui revendique urbi et orbi sa légitime
intangibilité. Ici, est une Afrique qui, par la chanson et la danse, dit encore son moi
avec une ferveur qui lui vient d’un lointain passé. Bruits, contre chant, rythmes de
tambour fête, épopées, soliloque magique du devin ou du guérisseur, prédilection et
augure chuchotés de l’orale, incantations sacrées…, y partage un même espace de
résonnance acquis des ancêtres par héritage ».
Bien plus, les traditions, ici, tirent encore leur vitalité d’une oralité qui à
l’épreuve du temps a su garantir son souffle primordial. Et c’est à bon droit que
chants, danses, tambour ainsi que les autres arts du spectacle primitif sont toujours
intimement associés à chaque rituel et à toute réjouissance. Ils scandent les cycles
des saisons. Ils célèbrent les ancêtres et les forces de la nature, en somme, la vie,
dans une euphorie toujours partagée et renouvelée. D’autant qu’en Afrique
traditionnelle, le chant crée un spectacle et incarne le souffle vital, alors même la
danse elle, toujours présente et créative, assure l’organisation gestuelle dans un
climat plus spectaculaire. Ce, au moment où les percussions, plus bavards que
jamais, pulsent la vie dans les circonstances diverses de chaque rituel par un jeu qui
est à la fois rythmé et récité.
La plupart des instruments sont à base de bois auquel on rajoute soit du cuir,
soit des calebasses, des cordes avec souvent quelques rares métaux. Les tambours,
les xylophones, les sanzas, les flûtes et les instruments à cordes (kora et autres
vièles et luth), sans oublier la voix et tout le corps humain, sont des instruments
qu’on retrouve dans toutes les régions d’Afrique. Le tout donne une musique du
village ou la campagne solidement ancrée dans le terroir, ouverte et accessible à
tous les membres de la communauté. La force de cette musique tient d’abord du fait
qu’elle n’est pas dissociée de la vie quotidienne des hommes et de leur
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environnement. C’est une musique fonctionnelle, généreuse, musique d’expression
et de partage.
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certains aspects, la musique africaine ressemble à une conversation, dans laquelle
se rependent les différentes voix et les parties instrumentales.
On peut encore noter que la quasi-totalité des pièces musicales issues de la tradition
africaine sub-saharienne se caractérisent par une structure cyclique qui engendre de
nombreuses variations improvisées, qui constituent l’un des grands principes
fondamentaux de toutes les musiques africaines.
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des activités commerciales, diplomatiques, militaires et religieuses par exemple, et
par la suite des mouvements de populations des membres de certaines sociétés tels
que les Malinké et les Akan, se rendirent dans les contrées relativement reculées de
leurs pays d’origine), il en résulte des interactions culturelles singulièrement dans le
domaine musical. On note par exemple la présence de type d’instrument identique
ou la diffusion d’idiomes musicaux sur les étendues territoriales relativement vastes.
L’Afrique du nord est habitée par des sociétés dont les cultures sont très
proches du monde arabe, du proche orient, alors que la portion australe est peuplée
de populations sédentaires émigrées d’Europe. Les traditions musicales pratiquées
par ces sociétés sont non-africaines. Leurs idiomes4 sont si distincts de ceux du
reste de l’Afrique qu’on a tenté de les exclure de la culture musicale indigène. Mais
aujourd’hui, ces idiomes constituent une partie de patrimoine musical africain.
a) Héritage de l’Islam
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juridiction politique islamique (C’est le cas du Nigeria). Des notables de tels Etats
adoptèrent les tributs des sultanats et par conséquent des instruments de musique
arabes qui devinrent plus tard des signes caractéristiques de leur musique de cour.
b) Héritage de l’Europe
L’église par exemple adopta des attitudes hostiles envers les instruments de
musique africains, et la musique africaine prétextant qu’ils sont sources de forces
maléfiques, sataniques, démoniaques. En certains endroits, la conversion au
christianisme impliquait non seulement la renonciation à la pratique musicale mais
aussi à son audition. Ainsi, la participation active aux événements musicaux de la
communauté traditionnelle était-elle réprimandée. Au contraire, les missionnaires
s’employèrent à apprendre aux fidèles des cantiques et des hymnes européens.
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Quant à l’administration coloniale, il faut souligner que les commandants et les
gouverneurs offraient de façon périodique et à la faveur des fêtes légales (8 Mai, 14
Juillet, 11 Novembre) des réceptions comprenant des concerts ou des spectacles de
musiques européennes aux officiers de l’armée française, aux grands commerçants
et aux planteurs européens. Ces réceptions étaient animées par des orchestres, des
fanfares de la police, de la gendarmerie ou de l’armée au sein desquelles se
trouvaient des Noirs et des Africains formés pour ces activités. Avant les
indépendances et après, ce sont ces ensembles qui entretenaient les convives des
administrateurs coloniaux et la clientèle des clubs, des bars et des boites de nuit
fréquentés par les Européens. La transplantation de la musique dans des conditions
que nous venons d’exposer :
En tout état de cause, l’Afrique moderne est en quête d’une identité culturelle.
Aussi, ses églises ont-elles commencé à explorer les ressources de cette musique et
à envisager la possibilité de son utilisation de plus en plus intensive dans les offices
religieux. Il en est de même pour la musique populaire et les musiques d’art qui sont
en train de s’adapter au contexte nouveau des valeurs musicales des sociétés en
mutation.
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I.3 : LES FONCTIONS SOCIALES DE LA MUSIQUE DANS LES SOCIETES
AFRICAINES
En fait, la musique en Afrique, n’a d’existence que pour servir à autre chose
qu’à elle-même, à des fins particulièrement définies. C’est pourquoi elle est toujours
englobée dans une activité plus vaste, surtout une activité dont elle ne constitue
qu’une partie ; qu’il s’agisse de la célébration de culte, d’un travail exécuté, d’une
cérémonie solennelle, d’une danse de divertissement, d’un divertissement au claire
de lune ou plus simplement encore, de la mère qui calme son enfant en chantant.
Par musique institutionnalisée, il faut entendre celles qui entrent dans une
activité institutionnelle et qui en font obligatoirement partie, sous peine de rendre
impossible l’accomplissement de cette activité, ou de lui faire perdre son efficacité.
Ce sont entre autres les manifestations socioreligieuses, qu’elles soient saisonnières
ou dues à des circonstances particulières. Ces circonstances englobent des thèmes
convergents ci- après.
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- Chansons sur la naissance
- Les berceuses
- Chanson de rondes enfantines
- Chansons de clair de lune
- Chansons de mariage
- Chansons de complaintes
- Chansons de célibat
- Chansons de divertissement
- Chansons sur le divorce
- Chansons funèbres
- Chansons épiques
- Chansons d’initiation
- Chansons d’éducation morale
- Chansons de travail
- Chansons proverbes
- Chansons rituelles
- Chansons pour introniser ou magnifier un roi, un chef ou une autorité politique
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L’équipement de musique, dont le matériau était fourni par la nature ne pouvait pas
constituer le fondement d’une discrimination sociale qui, si elle avait droit de citer,
répondrait aux besoins et aux prescrits de l’organisation de la communauté acceptés
et intériorisés par tous. La création dans la tradition africaine procédait bien de la
compréhension, mais le caractère communautaire et spontané de l’art africain
s’adapte tout de même à certaines règles déjà prescrites par la société.
CONCLUSION
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CHAPITRE II : LE MUSICIEN DANS LA SOCIETE
TRADITIONNELLE AFRICAINE
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Francis Bebey est cité par Adjitin ASSOUKPOU, INSAAC, 2017
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II.1.1 : Mode informel
Plus tard, l’enfant, en âge de se tenir debout ou de marcher, prend part lui-même
aux danses. Ensuite, il développe son sens musical en mettant à contribution ses
yeux, ses oreilles et sa mémoire. Lequel sens musical se transforme en expérience
musicale qu’il acquiert avec des compagnons de jeu, en imitant les adultes.
Adolescent, le jeune homme ou la jeune fille qui s’est déjà fait repérer, grâce à ces
potentialités musicales, par un ou des adultes, devient l’un des remplaçants
potentiels de musiciens avec qui ils ont en commun la pratique d’un instrument
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spécifique. Dès lors, ce remplaçant potentiel est susceptible de bénéficier d’un
complément de formation non formelle.
Une autre pratique en vigueur dans les sociétés africaines est d’enseigner la
formule rythmique par un système mnémotechnique6, généralement des phrases ou
des syllabes sans signification qui traduisent le rythme.
6
La mnémotechnique est un système dans lequel la mémoire est sollicitée dans ses aspects visuels,
auditifs, auditifs, tactiles, etc. Par conséquent, il faut toutes les facultés pour à la fois écouter,
observer, assimiler, s’imprégner, mémoriser dans le but de reproduire la même chose. C’est à dire
imiter le model. La mémorisation est ainsi l’un des points forts de l’Africain.
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une fierté pour le village de savoir que sa danse est appréciée ailleurs. Dans le cas
de renforcement de capacité, un musicien peut être envoyé auprès d’un illustre
maitre deb vaste réputation ou de grande notoriété dans toute la région.
- par un génie (par exemple un Bidi-Kobéi des Bété, un Kakatika des baoulé, un
Mandébélé des Sénoufo ou un Assanmangbin des Allandjan) ;
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II.2 : LE STATUT DU MUSICIEN
En Afrique, en l’absence de l’écrit, tous les échanges passent par le son. Il est
donc logique que la musique et ceux qui la produisent y aient un rôle
particulièrement important. Dans chaque culture africaine, le statut du musicien est
donc déterminé par l’échelle des valeurs de l’ensemble de la société par les attitudes
à l’égard de la musique. En effet, coexistent deux courants musicaux
complémentaires, soumis à des impératifs stricts concernant les personnes qui
peuvent, doivent ou se voient interdire de pratiquer l’un ou l’autre répertoire vocal ou
instrumental.
- musicien professionnel : Cela signifie que le musicien n’a aucune autre activité que
la musique pour laquelle il reçoit une rémunération qui est son seul moyen
d’existence. De tels musiciens sont bien itinérants7, comme ceux qui proposent de
chanter des épopées qui peuvent chanter plusieurs nuits. Le professionnalisme à
7
Un musicien itinérant est celui qui se déplace dans l’exercice de ses fonctions.
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part entière atteint son niveau maximal dans les sociétés qui fonctionnent avec un
système de castes8. Pour l’essentiel, nous pouvons étudier quelques castes
spécialisés dans la musique.
Les griots
En Afrique, l’exemple le plus notaire concernant les musiciens castés est celui
des griots situé dans la société Manding en Afrique de l’ouest. Les griots musiciens
appelés encore Djéli font partie d’un système social très élaboré dans lequel ils
jouent un rôle important de médiateurs. Les griots sont des musiciens professionnels,
détenteurs d’une compétence technique qu’ils se transmettent de génération en
génération et qui concerne aussi bien la facture des instruments et leur technique de
jeu que les techniques vocales.
Certaines familles de griots sont célèbres dans une région englobant plusieurs
Etats (Mali, Guinée, Sénégal…) et sont même connues de manière internationale
grâce à des enregistrements commercialisés. C’est le cas notamment de la famille
Kouyaté.
Les forgerons musiciens qu’on trouve à au Niger, au Soudan, etc., ont un statut
moins complexe, mais cependant comparable à des castes qui ont l’apanage des
instruments spécifiques tels que les tambours en bandoulière. Il y a aussi des
joueurs de clarinette qui sont rémunérés pour service rendu.
Dans le sahel, il en va de même pour des femmes chargées de chanter lors des
rituels de mariage au lendemain de la nuit de noces dans la maison conjugale.
8 Une caste est un groupe social qui se distingue par des privilèges et le rejet de toute personne
n’appartenant pas à son milieu. Héréditaire et endogame, la caste est composée d’individus
partageant un même statut hiérarchique, exerçant généralement une activité professionnelle
commune.
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LE MUSICIEN SELON L’AGE ET LE SEXE
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CONCLUSION
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RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE
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