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Les chrétiens et l’éthique

DUDC
Diplôme universitaire
Découverte du christianisme

Cours de
Frédéric TRAUTMANN

Janvier 2022
Frédéric TRAUTMANN

Tous droits réservés – Frédéric TRAUTMANN


Janvier 2022
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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

Avant-propos

Le cours intitulé « les chrétiens et l’éthique » est donné dans le cadre du diplôme
universitaire de découverte du christianisme (DUDC). Il constitue une
introduction générale à la théologie morale et à l’éthique théologique
spécifiquement pour les étudiants inscrits au DUDC.
Le choix a été fait, afin de ne pas surcharger la présentation et la lecture du cours,
de limiter au maximum les notes de bas de page. Les références bibliographiques
sont indiquées à la fin du cours et sont données à titre indicatif. Dans le cadre de
ce diplôme, il ne s’agit pas de lire l’ensemble des ouvrages mais de permettre aux
étudiants qui le souhaitent d’approfondir leur réflexion.
Les étudiants auront en revanche tout à gagner à lire les extraits bibliques cités
en parallèle du cours.

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Frédéric TRAUTMANN

Introduction

Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et
dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique. Vois ! Je mets
aujourd’hui devant toi ou bien la vie et le bonheur, ou bien la
mort et le malheur. Ce que je te commande aujourd’hui, c’est
d’aimer le Seigneur ton Dieu, de marcher dans ses chemins, de
garder ses commandements, ses décrets et ses ordonnances.
Alors, tu vivras et te multiplieras ; le Seigneur ton Dieu te
bénira dans le pays dont tu vas prendre possession.

(Dt 30, 14-16)

Le vitrail de L’arbre de vie de Marc Chagall est une belle illustration des couleurs
et des splendeurs du paradis tel qu’on peut se l’imaginer. Le mot paradis à peine
prononcé et nous voilà de retour au temps de la Genèse, avec Adam et Ève au
jardin d’Éden. Le premier sens du mot paradis se réfère au jardin où l’homme et
la femme vivent en harmonie avec toute la création, en présence de Dieu. « Le
Seigneur Dieu planta un jardin en Éden, à l’orient, et y plaça l’homme qu’il avait
modelé » (Gn 2, 8).
En tant qu’image de la vie éternelle, le paradis évoque donc ce lieu préparé pour
nous par Dieu, et dans lequel il nous comble de ses bienfaits : « Le Seigneur Dieu
fit pousser du sol toutes sortes d’arbres à l’aspect désirable et aux fruits
savoureux ; il y avait aussi l’arbre de vie au milieu du jardin, et l’arbre de la
connaissance du bien et du mal » (Gn 2, 9).
Au seuil de ce cours sur les chrétiens et l’éthique, l’image de l’arbre de vie souhaite
placer notre réflexion dans la perspective de la finalité de la vie humaine qui est
une recherche du bien, du beau et du vrai. Toute réflexion éthique, toute
démarche morale ne devraient pas oublier qu’elles sont une aide pour vivre
pleinement notre humanité, pour nous humaniser et choisir non la mort, mais la
vie, non le malheur mais le bonheur. Elles sont un vrai chemin d’humanisation
de notre être et de notre vie.

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Marc CHAGALL, Carton préparatoire au vitrail de l’Arbre de Vie (1976).

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A. Morale et éthique

La première étape de toute étude de la morale chrétienne consiste à comprendre


ce que signifient les termes morale et éthique. La plupart des gens utilisent ces
termes de manière interchangeable, mais ils signifient des choses différentes.

1. Le sens du terme « morale »


Le terme morale vient du latin mos, moris et est relatif aux mœurs librement
choisies d’un peuple ; d’après les usages, les traditions et les institutions des
ancêtres : « Ils prirent le corps de Jésus, et ils l’enveloppèrent d’un linceul, en
employant les aromates selon la manière juive d’ensevelir les morts » traduction
française du latin « sicut mos Iudaeis » (Jn 19, 40).

2. Le sens du terme « éthique »


Le terme éthique, vient du grec ethos, et signifie le lieu coutumier, coutume,
caractère, manière d’être habituelle.

3. Éthique et morale dans le langage ordinaire


À l’origine ces deux mots désignent exactement la même chose à savoir la
réflexion sur les comportements humains et dans le langage ordinaire « éthique »
et « morale » ont un sens voisin. Ce qui les distingue, c’est l’univers de pensée qui
est associé à chaque mot. Ainsi la « morale » est proche de l’expression « faire la
morale » c’est-à-dire donner des leçons ou encore faire la leçon à quelqu’un ; il est
associé essentiellement dans l’imaginaire collectif à l’idée de loi. D’une certaine
manière, la morale est proche d’un rappel à l’ordre, d’un rappel au respect de la
loi (morale).
Le mot « éthique » n'a pas la charge d’ancienneté et de lourdeur normative que
la morale. L’éthique est certes connotée de rigueur, de nouveauté mais aussi de
distance par rapport à l’attitude moralisante. De manière plus spécifique,
l’éthique peut également être définie comme un ensemble des règles de conduite
ou code de conduite régissant les actions d’un groupe particulier de personnes.

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Dans ce cas, l’éthique est souvent associée au monde professionnel et technique


où l’on trouve désormais de nombreux et vastes champs de réflexion éthique : par
exemple dans le domaine des soins de santé, nous parlons d’éthique des soins de
santé ou d’éthique médicale ou encore de bioéthique ; si nous parlons d’un code
de conduite pour les personnes travaillant dans le monde des affaires, nous
parlons d’éthique des affaires et ainsi de suite (éthique animale, éthique
sportive…) et des conseils dédiés à ces domaines (Comité consultatif national
d’éthique – CCNE…).
La morale et l’éthique concernent les actes humains et l’orientation de la vie
humaine qui peuvent s’exprimer autour des questions suivantes : « Que dois-je
faire ? Que dois-je faire pour bien faire ? Que dois-je, que puis-je faire pour être
heureux ? Que pouvons-nous faire pour être heureux ensemble ? »

4. Éthique et morale dans la réflexion théologique


La morale fait référence aux normes ou standards qu’un individu ou un groupe
adopte concernant le bien et le mal, ce qui constitue un comportement correct et
incorrect. Elle concerne les principes moraux de base qui sont considérés comme
bénéfiques pour la société.
L’éthique est l’enquête sur le sujet de la moralité, ou l’étude de la façon dont nous
devons agir de manière moralement bonne. L’éthique est la discipline qui
examine de manière critique les normes ou les standards moraux d’une société
particulière, puis applique ces normes ou standards (en supposant qu’ils soient
raisonnables) à la vie. Le but de l’éthique est de développer un ensemble de
normes morales sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour nous aider à
répondre aux nombreuses questions morales auxquelles nous sommes
confrontés.
Si la morale fait référence aux normes ou aux standards d’un groupe particulier
de personnes, elle n’est pas statique. Des cultures différentes ont des normes
différentes en matière de comportement acceptable, tout comme des traditions
religieuses, des classes sociales ou des groupes d’âge différents. Il n’est pas
surprenant que la morale de la génération qui a vécu la seconde guerre mondiale
soit très différente de celle de la « génération X ».

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Il est important de noter que les individus appartiennent régulièrement à plus


d’un groupe et qu’ils sont donc influencés par plus d’un ensemble de normes
morales.

Par exemple, le jeune Gontran, âgé de 18 ans, est poussé par


ses amis à essayer des drogues illégales. Son éducation
familiale lui interdit de désobéir à la loi et de se faire du mal ;
son milieu culturel estudiantin lui enseigne qu’il peut prendre
la drogue qu’il veut tant qu’il ne se fait pas de mal à lui-même
ou à quelqu’un d’autre ; la justice de son pays soutient que la
consommation de drogues est illégale, mais les peines
infligées aux primo-délinquants sont relativement légères ;
son Église enseigne que la consommation de drogue est
immorale en ce qu’elle est nuisible à son corps, un corps qui
lui a été donné et confié par Dieu. Compte tenu de cette
diversité, à partir de quelle « morale » Gontran prendra-t-il sa
décision d’essayer ou non des drogues illégales ? Laquelle
choisira-t-il lorsque les divers groupes auxquels il appartient
ont des normes différentes concernant le bien et le mal, le
comportement moral et immoral ?

L’éthique est la discipline qui applique des principes moraux à des décisions
spécifiques que nous devons prendre. Lorsque nous sommes confrontés à une
décision éthique importante, nous pouvons nous inspirer des principes moraux
généralement acceptés par notre Église, notre famille, notre pays, notre culture…
pour nous aider à décider comment agir. Ces principes nous informent sur ce que
l’on attend de nous et nous offrent des lignes directrices pour agir. L’éthique
répond à la question « Que dois-je faire ? » en identifiant les principes moraux
essentiels en jeu, puis en nous aidant à les appliquer à la décision spécifique que
nous devons prendre.
En théorie, la réflexion éthique est une entreprise assez simple, mais dans la
pratique, elle ne l’est pas toujours. Il arrive que les principes moraux
généralement acceptés ne s’appliquent pas clairement à la situation en question,

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

ou que des principes moraux concurrents soient en jeu. L’exemple donné avec
Gontran l'illustre bien. Pour prendre sa décision d’essayer ou non des drogues
illégales, il s’appuie d’abord sur les normes morales de ses différents groupes
d’appartenance. Ensuite, il se demande « Comment les différents principes
moraux s’appliquent-ils, ou ne s’appliquent-ils pas, à la décision spécifique que je
dois prendre ? » Ici, Gontran doit évaluer de manière critique les différents
principes qui lui sont présentés et les utiliser pour l’aider à prendre une décision
sur la façon dont il va agir. Cependant l’éthique n’est pas une science exacte et ne
donne pas toujours des réponses noires ou blanches. L’éthique implique souvent
des zones grises et des personnes bien intentionnées peuvent être en désaccord
sur ce qui constitue une réponse éthique appropriée à un dilemme moral
particulier.

5. De quelques points importants


Au terme de cette introduction, nous souhaitons mentionner brièvement quatre
points importants qu’il faut garder à l’esprit dans toute réflexion sur la morale et
l’éthique.

a) La responsabilité personnelle
Le premier concerne la responsabilité personnelle. Très souvent aujourd’hui,
nous entendons des gens dire : « Ce n’est pas ma faute si c’est arrivé ! » ou « Oui,
monsieur l’agent, j’ai percuté cet arbre avec ma voiture, mais ce n’était pas ma
faute. Le barman aurait dû arrêter de me servir des boissons ». Ces excuses
peuvent sembler banales, mais nous en entendons des variantes tous les jours. La
responsabilité personnelle signifie que ce n’était pas la faute du barman ou de qui
que ce soit d’autre si j’ai fait quelque chose de mal. La responsabilité personnelle
signifie que je suis en fin de compte responsable de mes actions. Tant que
j’accomplis l’acte en toute connaissance et liberté (un acte de volonté), c’est moi
qui en suis responsable.

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b) La volonté humaine
Le deuxième point est que la morale se situe dans la volonté humaine. La morale
implique des choix, les choix que nous faisons chaque jour pour faire le bien ou
le mal. Les êtres humains ont le libre arbitre. Nous avons la capacité de choisir
librement ce que nous faisons et ne faisons pas. Nous ne sommes pas obligés
d’agir de manière spécifique ; en fait, si nous n’avions pas de libre arbitre, nous ne
pourrions jamais être tenus moralement responsables de nos actes. Ainsi, la
moralité est inextricablement liée à notre capacité à faire des choix libres.

c) Les conséquences des actes moraux


Troisièmement, nos actions ou décisions morales ont des conséquences.
Lorsque nous accomplissons une action, nous déclenchons une chaîne
d’événements qui ne se seraient pas produits si nous n’avions pas choisi d’agir.
Par exemple, si je décide de boire une bouteille de whisky au cours d’une fête,
quelles sont les conséquences possibles ? Il y aura très probablement le mal de
tête du lendemain matin mais d’autres conséquences peuvent exister si j’ai pris
le volant pour rentrer chez moi et que j’ai causé un accident mortel sur le trajet.
Il y a aussi le risque d’un alcoolisme ou des risques pour la santé à plus long terme
liés à un excès de consommation d’alcool. Le fait est que des choses se produisent
à la suite des décisions morales que nous prenons. Les conséquences de nos
actions peuvent être profondes ou infimes, elles peuvent être prévues ou non. En
général, plus l’action est grave, plus les conséquences sont graves.

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d) La dimension communautaire des décisions morales


Enfin, la morale a une dimension communautaire. Cela signifie qu’en plus de
nous affecter personnellement, nos décisions morales ont souvent des effets
profonds sur les autres et sur nos relations avec les autres. Les terroristes en règle
générale en sont un exemple extrême. Par exemple, pour les pirates de l’air eux-
mêmes, les conséquences personnelles de leurs actes ont pris fin brusquement le
11 septembre 2001, lorsque leurs avions ont percuté les tours jumelles du World
Trade Center, le Pentagone et un champ de Pennsylvanie occidentale.
Cependant, des millions de personnes dans le monde continuent de subir les
conséquences des décisions des pirates de l’air. Si plus de trois mille personnes
sont mortes ce jour-là, les familles de ceux qui ont été tués doivent vivre encore
aujourd’hui avec la perte d’êtres chers, les gouvernements de l’Afghanistan et de
l’Irak ont été renversés, et la guerre contre le terrorisme se poursuit dans diverses
régions du monde. Nos décisions morales ont des conséquences qui affectent non
seulement notre vie, mais aussi celle de nombreuses autres personnes.
Jusqu’à présent, nous avons parlé de la moralité en général. Cependant, étant
donné qu’il s’agit d’un texte d’éthique chrétienne, la question à laquelle nous
devons maintenant répondre est la suivante : quelle différence, le cas échéant, la
foi fait-elle dans le choix d’une vie morale ? Nous commencerons à répondre à
cette question en faisant la distinction entre la philosophie morale et la théologie
morale.

B. Philosophie morale et théologie morale

La philosophie morale est définie comme un effort systématique visant à


comprendre les concepts moraux et à justifier les principes et théories moraux.
Elle analyse des concepts tels que « bien », « mal », « permissible », « devoir »,
« bon » et « mauvais », chacun dans son contexte moral. La philosophie morale
cherche à savoir quelles sont les valeurs et les vertus essentielles pour le bien
général de la société, et cherche à établir des principes de comportement correct
qui servent de guides moraux aux individus et aux groupes. Du point de vue

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philosophique, le fondement de la moralité est la raison humaine. La raison


humaine désigne notre capacité à acquérir des connaissances intellectuelles, à
envisager ou à évaluer de manière critique des décisions, à prévoir les
conséquences possibles de nos actions et à formuler des jugements et des
conclusions particulières. La plupart des gens possèdent la capacité de raisonner
et sont donc capables de s'engager dans une réflexion morale et de discerner
différents niveaux de vérité morale.
Dans son sens le plus strict, la philosophie morale ne fait pas référence à Dieu. La
raison en est assez simple : la philosophie morale s’intéresse principalement à ce
que notre capacité de raisonnement nous dit être bien et mal.
La théologie morale est quelque peu différente. La théologie se compose de la
racine grecque « theo », qui fait référence à Dieu, et « logos », qui signifie « parler
de » ou « étudier » un sujet particulier. La « théologie », par conséquent, signifie
« parler de », « étudier » Dieu et ce que Dieu a révélé à l’humanité. La théologie
morale est une discipline de la théologie et se réfère à l’étude de ce que Dieu
révèle à l’humanité sur la façon de vivre une vie morale. C’est dans l’articulation
entre la foi et la raison que la théologie morale chrétienne se déploie : la raison
est un élément essentiel et incontournable de la réflexion théologique.
Cependant, la principale source de connaissance morale pour le christianisme
dans son ensemble est le donné révélé. La révélation divine désigne la vérité que
les chrétiens croient que Dieu a révélée aux êtres humains et qu’il veut qu’ils
connaissent. Dans la perspective catholique, la révélation divine est contenue
dans l’Écriture Sainte.
En ce qui concerne la théologie morale, la révélation divine fait spécifiquement
référence à ce que Dieu enseigne sur le comportement humain éthique. Par la foi,
on reconnaît la révélation de Dieu dans l’Écriture, on y croit et on cherche à agir
en accord avec cette révélation dans sa vie. Nous voyons ici la relation entre la foi
et la raison : la théologie morale catholique soutient que la foi informe toujours
la raison. Nous utilisons notre capacité de raisonnement pour prendre des
décisions morales, mais notre raison est toujours informée par la vérité que Dieu
a révélée. L’expression souvent utilisée par l’Église, « la raison informée par la
foi », résume parfaitement cette relation, qui se retrouve déjà chez Anselme de
Canterbury (1033/1034-1109) : « la foi cherche l’intelligence ». Le pape Jean-Paul II

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a résumé cette relation en décrivant la théologie morale comme « une science qui
accepte et examine la Révélation divine tout en répondant aux exigences de la
raison humaine » (lettre encyclique Fides et Ratio).
La théologie morale est en elle-même une expression générique qui ne fait pas
référence à une tradition ou une forme d’expression religieuse spécifique. Le
chrétien est celui qui confesse que Jésus-Christ est le Verbe de Dieu qui s’est fait
homme, a vécu parmi nous, nous a enseignés, nous a rachetés par sa souffrance
et sa mort, est ressuscité et reviendra finalement pour juger les humains. Dans la
perspective chrétienne, la théologie morale se réfère donc à la manière dont la foi
en Jésus-Christ influence la façon dont on vit1

C. La nature de la théologie morale

La division des sujets théologiques en diverses matières et disciplines est le


résultat de la tendance moderne à la spécialisation. Dans le passé, la tendance
était à la synthèse. Thomas d’Aquin (1225-1274) qualifiait l’ensemble de
l’entreprise théologique de sacra doctrina (doctrine sacrée).
L’émergence de la théologie morale en tant que discipline distincte est
principalement due au concile de Trente (1545-1563) insistant sur la confession
détaillée des péchés lors de la célébration du sacrement de pénitence. Cela a
entraîné la nécessité d’avoir des confesseurs compétents. C’est pourquoi la
théologie morale était à l’origine destinée à la préparation de confesseurs
capables et formés.

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Cependant, tous les gens ne sont pas chrétiens. Il y a des juifs, des musulmans, des hindous, des
bouddhistes, et la liste est encore longue. Pour les juifs, la théologie morale découle de l’étude des
Écritures hébraïques et du Talmud, grâce auxquels on apprend à vivre comme Dieu l’a voulu. Pour
les musulmans, la théologie morale fait référence à la manière dont la foi en Allah, telle qu’elle est
exprimée par la révélation dans le Coran, influence la manière de vivre. Ainsi, l’étude de la
théologie morale ne se limite pas aux chrétiens ; des personnes d’autres traditions religieuses
l’étudient également dans leur propre contexte. Néanmoins, la théologie morale chrétienne – et
en particulier catholique – est l'objet principal de ce cours.

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

La théologie morale était traditionnellement enseignée en deux catégories


principales :
- La théologie morale générale ;
- La théologie morale spéciale.
La première catégorie traitait des principes « généraux » de la morale, à savoir
l’acte humain, la loi morale, la liberté humaine, la conscience, le péché et la vertu.
La seconde catégorie traitait des principes pertinents pour l’évaluation morale de
circonstances spécifiques – d’où le nom de « spéciale ».
La théologie morale contemporaine est cependant enseignée différemment à
partir de deux catégories principales :
- La théologie morale fondamentale ;
- La théologie morale spéciale.
La théologie morale fondamentale comprend deux sous-parties principales :
- La partie proprement fondamentale, constituée de son fondement
biblique et de son fondement historique ;
- Et la partie systématique, constituée du traitement des principes moraux
généraux centrés sur la considération de la personne humaine et de sa
quête de plénitude.
La théologie morale spéciale contemporaine se concentre sur les relations
auxquelles la personne humaine est soumise. Elle comporte donc trois grandes
divisions :
- L’éthique religieuse, qui traite de la relation de l’être humain avec Dieu ;
- L’éthique personnelle, qui aborde la dynamique de la relation de la
personne humaine avec elle-même ;
- L’éthique sociale, qui traite de la relation de la personne humaine avec les
autres êtres humains et avec l’ensemble de la création.

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Chapitre 1
L’éthique dans l’Ancien Testament

Introduction
Il serait erroné de lire le texte biblique avec nos propres pensées, préjugés ou
jugements et « forcer » le texte dans le sens qui serait le nôtre a priori. Il nous faut
entrer dans le monde de l’Ancien Testament et d’essayer de comprendre les
expériences et les situations vécues par le peuple d’Israël pour essayer d’en tirer
des grands principes à appliquer au contexte actuel. Notre tâche consiste à
comprendre comment Israël percevait et vivait sa relation avec Dieu et comment
cette relation se reflétait à son tour dans ses idéaux éthiques et pratiques en tant
qu’individu et en tant que communauté dans son ensemble (qu’est-ce que cela
signifie de vivre en tant que peuple de Dieu ?).
Par conséquent, pour traiter des questions morales, nous ne disposons pas
toujours de situations exactes dans la Bible. D’où la nécessité d’une étude
exégétique sérieuse des Écritures dans leur propre contexte canonique et
historique, dont les conclusions peuvent être appliquées aux problèmes
contemporains comme l’expression de notre engagement envers la révélation de
de Dieu.

A. L’enseignement éthique du Pentateuque

1. L’identité de Dieu
L’éthique est très liée à l’identité, au caractère, à la volonté et à l’action de Dieu.
L’éthique de l'Ancien Testament est donc théologique. L’identité signifie la
reconnaissance d’un individu sur la base d’une relation. C’est la relation « Je-Tu »
dans laquelle « Je » se perçoit à la lumière de « Tu » et inversement. Lorsqu’il
s’agit de la relation Dieu-homme, l’homme perçoit qui il doit être à la lumière de
sa relation avec Dieu. C’est de cette relation unique qu’Israël tire le sens de son
existence. Le mot « Dieu » est un terme générique et il faut distinguer entre

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

« Dieu » et « le Seigneur » : Dieu étant davantage l’entité éternelle, le Seigneur


étant celui avec lequel une relation est établie.
Le mot hébreu pour « Yahvé » est « ‫ » יהוה‬qui est traduit par « Seigneur » dans la
Bible. Il est intéressant de noter que ce mot est dérivé du verbe qui indique une
action. En d’autres termes, il s’agit de l’acte révélateur de Yahvé qui a prouvé qu’il
était vraiment Dieu.
L’identité et le caractère de Dieu sont très importants pour l’enseignement
éthique de l’Ancien Testament. Le Dieu de la Bible n’est pas n'importe quel dieu
mentionné dans la Bible. Il est connu par ce qu’il fait qui qualifie la notion « d’être
Dieu ». La phrase récurrente « Israël s’est tourné vers d’autres dieux » a été
considérée non seulement comme un manquement religieux mais aussi comme
un manquement à l’éthique. En effet, l’idolâtrie a un effet sociologique,
économique et religieux dégradant pour le peuple d’Israël. Nous pouvons donc
dire que la compréhension éthique de l’Ancien Testament dépend de l'identité
de Dieu, le Saint d'Israël.

2. L’acte de Dieu
Dieu est l’auteur de la vie. Le Dieu d’Israël est connu par ses actes. Il agit le
premier et nous appelle à répondre. C’est l’enseignement éthique fondamental
de l’Ancien Testament. C’est Dieu qui est descendu à la recherche d’un homme.
C’est l’acte de grâce de Dieu qui a racheté l’homme de sa situation difficile. Ainsi,
l’éthique est de l’ordre d’une réponse et d’une gratitude pour le peuple d’Israël
dans le cadre de sa relation avec Dieu. L’éthique n’est donc pas quelque chose qui
doit être suivie aveuglément. C’est une réponse de gratitude à l’acte de grâce de
Dieu.
Il est intéressant de voir que Dieu a donné sa loi (le Décalogue – les Dix
commandements) lorsqu’il a rencontré Moïse dans le buisson ardent, après les
avoir délivrés de la main des Égyptiens. Le peuple d’Israël n'a pas eu à suivre des
règles pour être délivré. La libération de l’esclavage en Égypte est un acte de grâce.
Mais la rédemption d’Israël n’est pas une fin en soi. Elle doit être accompagnée
d’un service. Servir Dieu est une obligation éthique. Par conséquent, la loi est une
question de réponse et un moyen d’être dans la communion de la communauté
de Dieu. Les Israélites devaient respecter la loi afin de maintenir leur relation avec

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le Seigneur. Ce qu’il faut comprendre ici, c’est que la loi elle-même commence
par ce que Dieu a fait dans le passé, appelant le peuple d’Israël à l’obéissance à la
loi afin de maintenir sa relation avec Yahvé et son identité en tant que peuple de
Dieu.

3. La parole de Dieu
La réponse éthique ne concerne pas seulement qui est Dieu et ce qu’il a fait dans
l’histoire, mais aussi ce qu’il a dit. Dieu s’implique dans l’histoire humaine non
seulement par ses actes mais aussi par ses paroles. Cet aspect « actes et paroles »
est clairement exprimé dans le livre du Deutéronome (Dt 4, 32-34) :

Interroge donc les temps anciens qui t’ont précédé, depuis le


jour où Dieu créa l’homme sur la terre : d’un bout du monde à
l’autre, est-il arrivé quelque chose d’aussi grand, a-t-on jamais
connu rien de pareil ? Est-il un peuple qui ait entendu comme
toi la voix de Dieu parlant du milieu du feu, et qui soit resté en
vie ? Est-il un dieu qui ait entrepris de se choisir une nation,
de venir la prendre au milieu d’une autre, à travers des
épreuves, des signes, des prodiges et des combats, à main forte
et à bras étendu, et par des exploits terrifiants – comme tu as
vu le Seigneur ton Dieu le faire pour toi en Égypte ?

Ce texte parle de l’expérience unique qu’a vécue le peuple d’Israël. Non


seulement ils ont été conduits par Dieu hors d’Égypte, mais ils ont entendu Sa
voix, ce qui n’a jamais été entendu par leurs contemporains. La parole de Dieu est
instructive, transformatrice et révélatrice.
Elle est instructive dans le sens où elle guide l’homme sur les bons chemins. C’est
la raison pour laquelle la loi qui a été donnée à Moïse est un guide de conduite
pour l’ensemble de la communauté. C’est cette Loi qui a été prononcée par Dieu
que le peuple d'Israël est invité à servir.
Elle est transformatrice dans le sens où cette Loi parlée pénètre dans tous les
aspects de la vie d’un homme - depuis la sortie de son lit, jusqu’à ses affaires

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

publiques et privées. Si le peuple d’Israël maintient son allégeance à cette « loi


parlée » par Dieu, il sera en mesure de conserver son identité unique de peuple
de Dieu. L’expérience d’être guidé par Dieu à travers sa parole rend Israël unique
parmi les nations. La parole même de Dieu est pour eux un guide de vie (Ps 147,
19-20).
La parole de Dieu exprimée dans la Loi est révélatrice de joie en ce qu’elle conduit
sur le chemin de la vie. La Loi révèle la pensée de Dieu, et celui qui obéit et suit la
Loi révélée obtiendra la sagesse et la vie, ainsi qu’une étroite communion avec
Dieu (Ps 19, 7). Cette Loi révélée ne transmet pas seulement la connaissance de
Dieu mais aussi la sagesse pour se conduire avec ses avertissements et ses
récompenses (Ps 19, 11). Selon les mots de David, elle est « une lampe pour mes
pieds et une lumière sur mon chemin » (Ps 119, 105). David utilise une forte
métaphore éthique. En d’autres termes, même la réponse éthique est guidée par
la parole de Dieu. Tout est fait par l’homme dans le cadre de la parole révélée de
Dieu.

4. Sainteté de Dieu
Nous voyons Dieu insister à plusieurs reprises sur sa sainteté afin d’appeler le
peuple d’Israël à être saint : « Soyez saints car je suis saint » (Lv 11, 44). La sainteté
n’est pas un attribut de Dieu mais elle est dans la nature même de Dieu. Il s’est
révélé au peuple d’Israël comme un Dieu saint. La sainteté de Dieu est
relationnelle, ce qui exige du peuple d’Israël qu’il soit saint afin de poursuivre sa
relation avec le Seigneur. Ainsi, être saint n’est pas seulement un exercice rituel
mais c’est est un exercice quotidien. Cette sainteté doit être démontrée par
l’obéissance d’Israël. Tel est le message général du livre du Lévitique. Par
conséquent, il faut être rituellement, moralement et éthiquement propre afin de
maintenir la relation avec Dieu. En cas d’échec, la sanctification pourra être
rétablie par les sacrifices et les offrandes.
Vivre en tant que peuple de Dieu en reflétant l’identité de Dieu, en se souvenant
de son acte de grâce salvateur et par la parole de la Loi donne un sens et un but à
la vie. Vivre en tant que peuple de Dieu n’est pas une fin en soi. Le peuple est
appelé à être un peuple de témoins en vivant comme le peuple de Dieu. La
dimension éthique de l’Ancien Testament donne à Israël un élan missionnaire.

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Cet élan missionnaire ne consiste pas à sortir au-dehors, mais à témoigner de


l’identité de Dieu, de ses actes, de sa parole, de sa sainteté et de sa présence dans
la vie de peuple de Dieu. Cela les rend très uniques parmi les nations. En d’autres
termes, le peuple de Dieu est un canal de bénédiction pour les nations suivant les
paroles du prophète Jérémie (Jr 31, 33-34) :

Mais voici quelle sera l’Alliance que je conclurai avec la


maison d’Israël quand ces jours-là seront passés – oracle du
Seigneur. Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je
l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon
peuple. Ils n’auront plus à instruire chacun son compagnon, ni
chacun son frère en disant : « Apprends à connaître le
Seigneur ! » Car tous me connaîtront, des plus petits jusqu’aux
plus grands – oracle du Seigneur. Je pardonnerai leurs fautes,
je ne me rappellerai plus leurs péchés.

B. Le Décalogue

L’enseignement moral le plus important et le plus connu des Écritures hébraïques


est constitué par les dix commandements. Dans le livre de l’Exode, Dieu délivre
le peuple israélite de l’esclavage en Égypte et conclut une alliance avec lui, lui
promettant qu’il sera sa possession spéciale tant qu’il lui restera fidèle (Ex 19, 3-
8). Dieu leur donne les dix commandements (Ex 20, 1-17) :

Alors Dieu prononça toutes les paroles que voici : « Je suis le


Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la
maison d’esclavage. Tu n’auras pas d’autres dieux en face de
moi. Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-
haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par-

20
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

dessous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux,


pour leur rendre un culte. Car moi, le Seigneur ton Dieu, je suis
un Dieu jaloux : chez ceux qui me haïssent, je punis la faute
des pères sur les fils, jusqu’à la troisième et la quatrième
génération ; mais ceux qui m’aiment et observent mes
commandements, je leur montre ma fidélité jusqu’à la
millième génération. Tu n’invoqueras pas en vain le nom du
Seigneur ton Dieu, car le Seigneur ne laissera pas impuni celui
qui invoque en vain son nom. Souviens-toi du jour du sabbat
pour le sanctifier. Pendant six jours tu travailleras et tu feras
tout ton ouvrage ; mais le septième jour est le jour du repos,
sabbat en l’honneur du Seigneur ton Dieu : tu ne feras aucun
ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta
servante, ni tes bêtes, ni l’immigré qui est dans ta ville. Car en
six jours le Seigneur a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu’ils
contiennent, mais il s’est reposé le septième jour. C’est
pourquoi le Seigneur a béni le jour du sabbat et l’a sanctifié.
Honore ton père et ta mère, afin d’avoir longue vie sur la terre
que te donne le Seigneur ton Dieu. Tu ne commettras pas de
meurtre. Tu ne commettras pas d’adultère. Tu ne commettras
pas de vol. Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton
prochain. Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain ; tu
ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur,
ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne : rien de ce qui lui
appartient. »

Du texte biblique qui vient d’être cité, la tradition résume ainsi les
commandements :
1. Je suis le Seigneur ton Dieu. Tu n’auras pas d’autre des dieux à part moi.
2. Tu ne prendras pas le nom du Seigneur, ton Dieu, en vain.
3. Garde saint le jour du sabbat.
4. Honore ton père et ta mère.
5. Tu ne tueras pas.
6. Tu ne commettras pas d’adultère.

21
Frédéric TRAUTMANN

7. Tu ne voleras pas.
8. Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain.
9. Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain.
10. Tu ne convoiteras pas les biens de ton prochain.
Les trois premiers commandements rappellent aux Israélites – et aux chrétiens –
que Dieu est Dieu. À l'époque où les commandements ont été donnés, les
Israélites vivaient parmi des peuples qui adoraient des idoles païennes et il fallait
leur rappeler d’offrir une foi et une obéissance inébranlables à Dieu. C’est
toujours le message chrétien aujourd'hui, à savoir que, contrairement à
l’insistance commune sur l’importance de la richesse, du pouvoir, de la beauté ou
des possessions matérielles, Dieu doit toujours rester le centre d'intérêt principal
de nos vies.
Les autres commandements concernent les relations des Israélites entre eux. Ces
commandements, ainsi que le code de l’alliance exposé dans l’Exode, reflètent la
grande préoccupation de Dieu pour le bien-être général du peuple israélite. Ces
commandements traitent de la manière dont le peuple doit vivre ensemble en
tant que membres de la communauté de l’alliance. Ils accordent une grande
valeur à la vie humaine et sont applicables à tous les membres de la société, quelle
que soit leur position dans celle-ci. Ces commandements, donnés au peuple
israélite il y a plus de trois mille ans, sont tout aussi pertinents pour le monde
d’aujourd'hui. Il suffit d’allumer la télévision pour voir des meurtres, des violences
sexuelles, des vols, des mensonges, des convoitises et des conflits familiaux. Le
cœur de l’homme est le même aujourd’hui que dans le passé.
Les dix commandements en eux-mêmes ne répondent pas à tous les dilemmes
moraux auxquels on peut être confronté ; cependant, ils fournissent un point de
départ pour la réflexion morale et une base pour vivre une vie morale. Ce n’est
pas une coïncidence si le Catéchisme de l’Église catholique (Troisième partie : « La
vie dans le Christ »), utilise les dix commandements comme point de départ de
sa longue présentation de la morale.
Le livre du Deutéronome donne également une version du décalogue en
détaillant les devoirs moraux du peuple israélite envers Dieu et envers les autres.
Après avoir rappelé l’Alliance et réitéré les dix commandements (Dt 5, 1-21), le
Deutéronome procède à de longues discussions sur des questions morales

22
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

spécifiques. Par exemple, il met en garde contre le fait de céder à l’attrait de la


richesse (Dt 8, 17-20). Il explique comment les gens doivent payer la dîme de leurs
biens en signe de reconnaissance envers Dieu et pardonner les dettes monétaires
des autres (Dt 14, 22-29 et Dt 15, 1-11). Il exige également que l’on ne fraude pas et
que l’on n'exige pas de gages onéreux, mais que l’on traite tout le monde
équitablement dans les affaires (Dt 24, 10-15 et Dt 25, 13-16).
Bien que les enseignements de base de l’Exode et du Deutéronome soient
similaires, le ton du Deutéronome est quelque peu différent dans la mesure où il
se concentre beaucoup plus sur l’amour. Le peuple israélite est appelé à agir
moralement non pas simplement par obéissance à Dieu, mais comme une
réponse positive à l’amour de Dieu pour lui. Ce thème est illustré dans le Dt 6, 4-
5 : « Écoute, Israël ! Le Seigneur est notre Dieu, le Seigneur seul ! Tu aimeras donc
le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force » (nous
soulignons).
La compréhension du Deutéronome est que Dieu ne donne pas de lois morales
simplement pour le plaisir de donner des lois morales. Dieu donne ces lois parce
que, en tant que Dieu du peuple, il sait ce qui est dans son meilleur intérêt. En
d’autres termes, c’est pour leur bien individuel et collectif que les gens respectent
les règles de conduite que Dieu a préconisées. Ainsi, pour le Deutéronome, suivre
les règles morales n’est pas une forme de légalisme, c’est la réponse appropriée
du peuple à l’amour que Dieu lui offre continuellement.

C. L’enseignement éthique des prophètes

Les prophètes ont joué un rôle très important dans la formation éthique du
peuple d’Israël. Tout d’abord, ils sont des indicateurs de l’alliance. Ils rappellent
constamment au peuple d’Israël la relation d'alliance avec Yahvé. Le concept
d’alliance est très important dans la vie quotidienne et le culte. Deuxièmement,
ils rappellent constamment la sainteté de Dieu. La sainteté de Dieu est un
concept très dynamique. Dieu est saint par nature et il ne peut coexister avec le
péché. Par conséquent, les lois et les règlements les aident à s’approcher de Dieu

23
Frédéric TRAUTMANN

avec beaucoup de prudence. Troisièmement, les prophètes se sont élevés contre


l’injustice économique, l’oppression des impuissants et des pauvres. C’est parce
qu’ils croyaient fermement que Dieu est un Dieu d’amour et qu’il a une attitude
préférentielle envers les marginaux.

1. Les enseignements éthiques des prophètes du VIIIe siècle (av. J.-Ch.)


Les prophètes du VIIIe siècle ont élevé les idéaux éthiques des Israélites à un
niveau supérieur. Ils ont présenté une éthique sociale qui implique la demande
de justice et de droiture de Dieu plutôt que les rituels et les sacrifices hypocrites
du temple.

• Amos
Le thème éthique clef d’Amos est la justice. Il appelle le peuple d’Israël à pratiquer
la justice face à l’accroissement constant de la richesse et à l’oppression des
pauvres. Il apporte les paroles de jugement de l’Éternel : « ce que Dieu veut, c’est
la pratique de la justice » (Am 5, 4-15). Dieu méprise les fêtes et les chants des
injustes et des méchants qui l’adorent. Amos place le jugement dans un contexte
universel : le jugement ne concerne pas seulement le peuple d’Israël mais toutes
les nations qui pratiquent l’injustice (Am 1, 3-15).

• Osée
Le thème éthique clef d'Osée est la désobéissance aux exigences de l’alliance. Il
expose l’infidélité d’Israël en l’expliquant à travers sa propre vie, puisqu’il épouse
une femme infidèle. Pour Osée, Dieu est un mari fidèle qui n’abandonne jamais
son peuple. Il restera fidèle à son alliance avec Israël. Dans cette optique, Osée
condamne la religion et les pratiques hypocrites d’Israël. Il supplie également
Israël de revenir à Dieu qui est son premier amour (Os 12, 6).

• Isaïe 1-39 (proto-Isaïe)


L’accent fondamental du Proto-Isaïe est mis sur la souveraineté de Dieu sur toutes
les nations et, à travers cet accent, il tire des thèmes éthiques telles que la droiture

24
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

et la justice comme expression de la sainteté de Dieu. Il présente également une


espérance eschatologique de paix parmi les nations (Is 2, 4). Parallèlement à cette
espérance eschatologique, il envisage un pouvoir messianique qui établit la
justice et la droiture. Il condamne également le péché fondamental de l’orgueil,
le prince de tous les péchés. C’est une attitude visant à détrôner Dieu et à
s’introniser à sa place. Tous les autres péchés sont des symptômes de cette
maladie fondamentale.

• Michée
La phrase clef de Michée est « ce que le Seigneur réclame de toi » (Mi 6, 8). Sur la
base de cet accent, il condamne l’hypocrisie spirituelle et religieuse et appelle en
même temps le peuple à respecter le droit, aimer la fidélité, et s’appliquer à
marcher avec ton Dieu » (Mi 6, 8). Cette exigence n’est rien d’autre qu’une
obéissance sans partage à la Loi et une pratique de la justice avec un engagement
et un amour envers Dieu.

2. Les prophètes ultérieurs


• Jérémie
Jérémie est bien connu pour son combat émotionnel profond et aussi pour sa
solidarité avec son peuple. Le thème clef est le jugement immédiat. Selon lui, le
mal n’est pas seulement l’action superficielle des êtres humains mais il se trouve
dans l’être intérieur de l’homme, c’est-à-dire dans son cœur. Par conséquent, la
circoncision du cœur est plus essentielle que la circoncision rituelle de la chair. Il
donne un conseil très pratique aux exilés pour qu’ils s’installent, même s’ils vivent
comme des exilés dans un pays étranger. Il rappelle au peuple que c’est à cause
de la désobéissance à l’alliance qu’il a été puni. Cependant, il affirme aussi la
nouvelle alliance que Dieu lui-même a initiée et qui sera la base d’une nouvelle
transformation éthique (Jr 31, 31-34) :

Voici venir des jours – oracle du Seigneur –, où je conclurai


avec la maison d’Israël et avec la maison de Juda une alliance
nouvelle. Ce ne sera pas comme l’Alliance que j’ai conclue

25
Frédéric TRAUTMANN

avec leurs pères, le jour où je les ai pris par la main pour les
faire sortir du pays d’Égypte : mon alliance, c’est eux qui l’ont
rompue, alors que moi, j’étais leur maître – oracle du Seigneur.
Mais voici quelle sera l’Alliance que je conclurai avec la
maison d’Israël quand ces jours-là seront passés – oracle du
Seigneur. Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je
l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon
peuple. Ils n’auront plus à instruire chacun son compagnon, ni
chacun son frère en disant : « Apprends à connaître le
Seigneur ! » Car tous me connaîtront, des plus petits jusqu’aux
plus grands – oracle du Seigneur. Je pardonnerai leurs fautes,
je ne me rappellerai plus leurs péchés.

• Ézéchiel
L’enseignement d’Ézéchiel est très similaire à celui de Jérémie. Il parle aussi de
cœur nouveau qui appelle une réponse radicale à l’alliance de Dieu (Ez 11, 19-20) :

Je leur donnerai un cœur loyal, je mettrai en eux un esprit nouveau :


j’enlèverai de leur chair le cœur de pierre, et je leur donnerai un
cœur de chair, afin qu’ils suivent mes décrets, qu’ils gardent mes
coutumes et qu’ils les observent. Alors ils seront mon peuple, et moi
je serai leur Dieu.

L’enseignement selon lequel les méchants vivent s’ils s'amendent, par opposition
aux péchés du juste qui ne lui garantiront pas le salut, est un jalon de l’éthique
biblique. Pour Ézéchiel, la religion et la moralité vont de pair. Il souligne que la
moralité est le fruit direct d’une communion directe et étroite avec Dieu. Selon
Ézéchiel, la vie idéale consiste à obéir à l’alliance de Dieu.

Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon


mes lois, que vous gardiez mes préceptes et leur soyez fidèles
(Ez 36, 26-27).

26
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

Chapitre 2
L’éthique dans le Nouveau Testament

Jésus n’a pas accompli la loi de Moïse en donnant un autre ensemble de lois
éthiques, mais en soulignant que la morale chrétienne ne consiste pas seulement
à obéir aux lois de manière extérieure, mais qu’elle se doit d’être le reflet de la
relation avec Dieu. C’est à partir de ce que Jésus a appris du Père qu’il enseigne
aux disciples et à la foule et son enseignement de nature universelle invite à une
conversion intérieure profonde pour faire correspondre les actes extérieurs avec
les intentions du cœur humain et restaurer la distorsion de la relation (issue du
péché) entre l’homme et Dieu.

A. L’amour de Dieu et du prochain

Jésus défend les enseignements moraux des Écritures hébraïques. Il rappelle aux
foules qu’il n’est pas venu pour abolir la loi de Moïse, mais l’accomplir (Mt 5, 17-
18). En réaffirmant l’obligation, selon les Écritures, d’aimer Dieu et de s’engager
complètement envers lui, Jésus souligne à nouveau l’importance de l’adhésion à
l’alliance et d’une vie conforme à ce qu’elle implique.

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton


âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier
commandement. Et le second lui est semblable : Tu aimeras
ton prochain comme toi-même (Mt 22, 37-39).

La deuxième partie de l’enseignement de Jésus, « Tu aimeras ton prochain


comme toi-même », trouve également ses racines dans les Écritures hébraïques.
Ces mêmes mots se trouvent dans le code de la sainteté du livre du Lévitique
(Lv 19, 18), où le peuple israélite est instruit sur la manière de vivre en relation les
uns avec les autres. Jésus utilise cette exhortation du Lévitique pour expliquer le

27
Frédéric TRAUTMANN

grand commandement ; dans le reste de l’Évangile, il donne des exemples de la


manière dont on peut l’incarner dans sa vie. Par exemple, lorsque les gens lui
demandent qui est exactement le prochain qu’ils doivent aimer, Jésus leur
enseigne la parabole du bon Samaritain (Lc 10, 29-37). Dans le Sermon sur la
Montagne, il enseigne à ses disciples « d’aimer vos ennemis et de prier pour ceux
qui vous persécutent » (Mt 5, 44 ; voir aussi Lc 6, 26-36). Lors de la dernière Cène,
il démontre son amour en priant longuement pour ses disciples (Jn 14, 15-21 et
Jn 17, 1-26) et en leur lavant les pieds (Jn 13, 1-17). La question est de savoir ce que
Jésus veut dire quand il dit que nous devons nous aimer les uns les autres. Dans
le sens chrétien, l’amour signifie vouloir constamment le bien de l’autre. Si nous
aimons vraiment notre prochain, nous voulons son bien en toute circonstance
– tout comme nous voulons notre bien à nous – et nous faisons tout ce que nous
pouvons pour l’aider à l'atteindre. Cette conception de l’amour est si importante
pour le message global de Jésus que saint Paul la réitère :

Vous ne devez rien à personne, si ce n’est de vous aimer les uns


les autres ; car celui qui aime son prochain a accompli la loi
[de Moïse]. Les commandements […] se résument à cette
phrase : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
L’amour ne fait pas de mal au prochain ; c’est pourquoi
l’amour est l’accomplissement de la loi (Rm 13, 8-10).

En lien avec ce thème de l’amour de Dieu et du prochain, il faut souligner la


compassion de Jésus pour les pauvres et les impuissants. Tout au long des
Évangiles, nous voyons Jésus s’occuper de ceux que la communauté rejette. Il
concentre son attention sur les lépreux, les collecteurs d’impôts, les personnes
possédées par des démons et même les prostituées, tout cela au mépris des
autorités religieuses. Jésus enseigne ici que le Royaume de Dieu est ouvert à tous,
et que nous avons le devoir moral d’aimer tous nos frères et sœurs en faisant ce
que nous pouvons pour les aider dans leur besoin. L’exemple le plus frappant de
cet enseignement se trouve peut-être en Matthieu (Mt 25, 31-46). Dans ce récit du
jugement dernier, Jésus informe les brebis qu’elles entreront dans le royaume des
cieux parce qu’elles ont nourri Jésus quand il avait faim, lui ont donné à boire

28
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

quand il avait soif, l’ont vêtu quand il était nu, l’ont accueilli quand il était un
étranger, l’ont soigné quand il était malade et lui ont rendu visite quand il était
en prison. Lorsque ces personnes lui demandent quand elles ont fait ces choses,
Jésus répond : « Tout ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères,
c'est à moi que vous l’avez fait ». À l’inverse, les boucs sont envoyés au châtiment
éternel parce qu’ils n'ont pas nourri, offert à boire, habillé, accueilli, soigné ou
visité Jésus au moment où il en avait besoin. Lorsque ces personnes lui
demandent pourquoi elles n’ont pas fait ces choses, Jésus répond : « Ce que vous
n’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait ».

B. Le Sermon sur la Montagne

Le Sermon sur la Montagne peut être comparé au décalogue de l’Ancienne


Alliance. Le Sermon sur la montagne rassemble les enseignements de Jésus sous
la forme d’un guide de conduite : sans être marqué par une forme impérative (ce
ne sont pas des commandements au sens stricts), le texte contient une véritable
exigence pour le sujet éthique agissant à la suite du Christ, autrement dit pour le
chrétien. En d’autres termes, le Sermon sur la Montagne a résumé et intériorisé
la loi et les prophètes :
• À travers le Sermon sur la Montagne, Jésus fait prendre conscience de la
réalité et de la présence actuelle du Royaume de Dieu : celui-ci est réalisé
ici et maintenant et anticipe un point culminant final. Par conséquent,
les exigences contenues dans le Sermon sur la Montagne sont applicables
indépendamment du temps et de l’espace et demeurent une charte de vie
chrétienne.
• La seconde dimension de l’enseignement éthique de Jésus est l’amour de
Dieu. Le Sermon sur la Montagne fait prendre conscience de l’amour de
Dieu pour chaque créature humaine. Il est un Dieu juste qui exige la
bonté, l’amour, la miséricorde, le pardon. Celui qui viole l’un de ces
principes viole la loi de Dieu.

29
Frédéric TRAUTMANN

Lorsque Jésus enseigne : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux
est à eux » Mt 5, 3), contrairement à la croyance populaire, cette béatitude ne fait
pas l’éloge de ceux qui ont peu de foi. Jésus parle ici de ceux qui reconnaissent
leur totale dépendance à l’égard de Dieu, ceux qui réalisent que tout ce qu’ils ont
vient de Dieu. Ces personnes sont reconnaissantes à Dieu pour ce qu’elles ont
reçu et sont prêtes à partager leurs dons avec ceux qui sont dans le besoin.
D’autres béatitudes sont également importantes pour mener une vie morale
chrétienne. Les disciples du Christ sont « bénis » lorsqu’ils sont doux (humbles),
lorsqu’ils ont faim et soif de justice, lorsqu’ils font preuve de miséricorde envers
les autres, lorsqu’ils ont le cœur pur et lorsqu’ils agissent en artisans de paix dans
le monde. Comme les dix commandements, les béatitudes n’offrent pas de
suggestions pratiques et concrètes sur la manière d’agir dans des situations
spécifiques, mais elles représentent des vertus que tous les chrétiens sont appelés
à imiter dans leur vie.

Voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses


disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant la bouche, il les
enseignait. Il disait : « Heureux les pauvres de cœur, car le
royaume des Cieux est à eux. Heureux ceux qui pleurent, car
ils seront consolés. Heureux les doux, car ils recevront la terre
en héritage. Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car
ils seront rassasiés. Heureux les miséricordieux, car ils
obtiendront miséricorde. Heureux les cœurs purs, car ils
verront Dieu. Heureux les artisans de paix, car ils seront
appelés fils de Dieu. Heureux ceux qui sont persécutés pour la
justice, car le royaume des Cieux est à eux. Heureux êtes-vous
si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit
faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense
est grande dans les cieux ! C’est ainsi qu’on a persécuté les
prophètes qui vous ont précédés (Mt 5, 1-12).

30
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

Bien que dans cette section, nous nous soyons concentrés sur les enseignements
moraux positifs de Jésus, nous serions négligents si nous ne mentionnions pas
que ses enseignements moraux décrient également ceux qui font le mal. Il déclare
qu’il vaudrait mieux pour quelqu’un qu’on lui mette une meule au cou que de
conduire un autre au péché (Mc 9, 42 et Lc 17, 1-2). Il fustige les pharisiens pour
leur hypocrisie (Mt 23, 1-36, Mc 7, 1-15, Lc 11, 37-12, 1 et Jn 9, 1-41) ainsi que ses
propres disciples pour leur désir d’être les plus grands (Mc 10, 35-45 et Lc 9, 46-
48). Il s’élève contre ceux qui font preuve d’un grand orgueil (Lc 14, 7-11) et ceux
qui recherchent une richesse toujours plus grande (Lc 6, 24-26 et Lc 12, 13-15).
Enfin, il manifeste sa colère contre ceux qui transforment le Temple, la maison
de son Père, en un marché de la fraude et de la cupidité (Mt 21, 12-17, Mc 11, 15-17,
Lc 19, 45-48 et Jn 2, 13-17).

C. L’enseignement éthique de Paul de Tarse

La lettre de Paul aux Romains est la plus significative pour la réflexion éthique de
l’Église chrétienne. Bien qu’elle ait été écrite en 59 après J.-C., son message est
toujours d’actualité aujourd'hui. Sa pertinence peut être retracée par l’influence
qu’elle a exercée sur les pères de l’Église comme par exemple Augustin
d’Hippone. La lettre aux Romains nous présente la pensée la plus mûre de Paul
dans sa forme la plus complète.

1. Tout d’abord, le message de la lettre aux Romains coïncide avec celui


d’Amos, car il dresse un réquisitoire moral contre la culture païenne.

2. Deuxièmement, cette lettre se termine par une série d’impératifs et de


conseils moraux et sa partie centrale concerne la signification de Jésus-
Christ.

3. Troisièmement, la lettre de Romains nous fournit les enseignements les


plus importants sur la vie morale de l’homme et la conduite chrétienne.
D’après Paul, ce n’est pas la connaissance du bien et du mal qui fait la

31
Frédéric TRAUTMANN

différence, mais la rébellion délibérée de faire le bien en sachant ce qui


est mal. De cette manière, l’homme se révolte contre lui-même. L’homme
est donc soumis au péché et en est devenu l’esclave. L’enseignement de
Paul et celui de Jésus coïncident en ce sens que l’homme n’est pas
moralement sain en raison du péché d’Adam : il a besoin d’être racheté
avant d’agir.

4. Quatrièmement, l’analyse chrétienne de la situation humaine nous


présente que l’homme est un citoyen libre dans le royaume de Dieu mais
que la chute dans le péché a déformé et frustré la destinée de l’homme et
sa conduite morale qui est contraire à la loi morale de Dieu. C’est sur cette
toile de fond que Paul développe sa pensée et nous présente une
théologie pratique de la justice de Dieu.

5. Cinquièmement, Paul ne s’est jamais conformé à l’idée de la dualité de la


vie du monde en tant que domaine du bien et du mal. Dieu est l’auteur et
le maître de tout. Il est souverain. Dieu est la réalité ultime. Il s’est fait
connaître à nous en la personne, la vie et la mort du Christ. Les
convictions éthiques de Paul sont fortement enracinées dans la pensée
que la réalisation éthique survient lorsqu’on prend conscience de la vie,
de la mort et des enseignements du Christ. Le Christ a réconcilié l’homme
avec Dieu et aussi avec les autres.

6. Sixièmement, la plus grande contribution de Paul se situe au niveau de sa


réflexion sur la loi morale impérative. Il parle davantage de
l’intériorisation de la loi que de la pratique de la loi. La loi morale
impérative présuppose que l’homme peut toujours agir contrairement à
la loi à l’intérieur de son cœur. La conduite morale et la pratique doivent
aller de pair.

Que dire alors ? La Loi est-elle péché ? Pas du tout ! Mais je


n’aurais pas connu le péché s’il n’y avait pas eu la Loi ; en effet,
j’aurais ignoré la convoitise si la Loi n’avait pas dit : Tu ne
convoiteras pas.

32
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

Se servant de ce commandement, le péché a saisi l’occasion :


il a produit en moi toutes sortes de convoitises. Sans la Loi, en
effet, le péché est chose morte, et moi, jadis, sans la Loi, je
vivais ; mais quand le commandement est venu, le péché est
devenu vivant, et pour moi ce fut la mort. Il se trouve donc
que, pour moi, ce commandement qui devait mener à la vie a
mené à la mort. En effet, le péché a saisi l’occasion ; en se
servant du commandement, il m’a séduit et, par lui, il m’a tué.
Ainsi, la Loi est sainte ; le commandement est saint, juste et
bon. Est-ce donc quelque chose de bon qui, pour moi, a été la
mort ? Pas du tout : c’est le péché ! Pour qu’on voie bien qu’il
est le péché, il s’est servi de quelque chose de bon pour causer
ma mort ; ainsi, par le commandement, c’est le péché lui-
même qui est devenu démesurément pécheur.

Nous savons bien que la Loi est une réalité spirituelle : mais
moi, je suis un homme charnel, vendu au péché. En effet, ma
façon d’agir, je ne la comprends pas, car ce que je voudrais,
cela, je ne le réalise pas ; mais ce que je déteste, c’est cela que
je fais. Or, si je ne veux pas le mal que je fais, je suis d’accord
avec la Loi : je reconnais qu’elle est bonne. Mais en fait, ce n’est
plus moi qui agis, c’est le péché, lui qui habite en moi.

Je sais que le bien n’habite pas en moi, c’est-à-dire dans l’être


de chair que je suis. En effet, ce qui est à ma portée, c’est de
vouloir le bien, mais pas de l’accomplir. Je ne fais pas le bien
que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas.
Si je fais le mal que je ne voudrais pas, alors ce n’est plus moi
qui agis ainsi, mais c’est le péché, lui qui habite en moi. Moi
qui voudrais faire le bien, je constate donc, en moi, cette loi :
ce qui est à ma portée, c’est le mal.

Au plus profond de moi-même, je prends plaisir à la loi de


Dieu. Mais, dans les membres de mon corps, je découvre une

33
Frédéric TRAUTMANN

autre loi, qui combat contre la loi que suit ma raison et me


rend prisonnier de la loi du péché présente dans mon corps.
Malheureux homme que je suis ! Qui donc me délivrera de ce
corps qui m’entraîne à la mort ? Mais grâce soit rendue à Dieu
par Jésus Christ notre Seigneur ! (Rm 7, 7-25).

7. Enfin, l’éthique de Paul se préoccupe également de la solidarité sociale


du chrétien et du rapport avec le prochain. Son explication anatomique
du corps du Christ dans la première lettre aux Corinthiens (1 Co 12, 12-31),
où chaque membre, avec sa conscience respective, remplit ses fonctions
respectives en relation directe avec la tête qui est le Christ, est quelque
chose de tout à fait unique. Cette interaction et cet entrelacement de la
relation de l’homme avec le soi, Dieu et l’individu est une contribution
significative de la réflexion éthique de Paul où chacun a une place et une
fonction éminente et irremplaçable.

Prenons une comparaison : le corps ne fait qu’un, il a pourtant


plusieurs membres ; et tous les membres, malgré leur nombre,
ne forment qu’un seul corps. Il en est ainsi pour le Christ. C’est
dans un unique Esprit, en effet, que nous tous, Juifs ou païens,
esclaves ou hommes libres, nous avons été baptisés pour
former un seul corps. Tous, nous avons été désaltérés par un
unique Esprit.

Le corps humain se compose non pas d’un seul, mais de


plusieurs membres. Le pied aurait beau dire : « Je ne suis pas
la main, donc je ne fais pas partie du corps », il fait cependant
partie du corps. L’oreille aurait beau dire : « Je ne suis pas l’œil,
donc je ne fais pas partie du corps », elle fait cependant partie
du corps. Si, dans le corps, il n’y avait que les yeux, comment
pourrait-on entendre ? S’il n’y avait que les oreilles, comment
pourrait-on sentir les odeurs ? Mais, dans le corps, Dieu a

34
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

disposé les différents membres comme il l’a voulu. S’il n’y avait
en tout qu’un seul membre, comment cela ferait-il un corps ?

En fait, il y a plusieurs membres, et un seul corps. L’œil ne peut


pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi » ; la tête ne peut
pas dire aux pieds : « Je n’ai pas besoin de vous ». Bien plus, les
parties du corps qui paraissent les plus délicates sont
indispensables (1 Co 12, 12-22).

35
Frédéric TRAUTMANN

Chapitre 3
De quelques notions importantes en théologie morale

Ce cours a longuement abordé le donné biblique de l’Ancien et du Nouveau


Testament, en ce qu’il est fondamental et à la base de toute réflexion éthique
chrétienne. Il y a cependant d’autres éléments que nous allons aborder dans ce
chapitre : la loi naturelle, les vertus, le bien et le libre arbitre, la conscience et le
discernement.

A. La loi naturelle

La loi naturelle est définie comme la participation de la personne rationnelle à la


loi éternelle. Qu’est-ce que cela signifie exactement ? La loi éternelle est la loi de
Dieu. C’est la loi par laquelle la création est ordonnée et par laquelle toutes choses
sont dirigées vers leur fin ultime. En tant que telle, la loi éternelle est comprise
comme la première loi et la source de toutes les autres lois. Or, les humains ne
peuvent pas connaître directement la loi éternelle pour la simple raison que les
humains ne sont pas Dieu. Cependant, nous pouvons connaître une certaine
mesure de bien à travers la capacité de raisonnement de l’homme. C’est la loi
naturelle, accessible à l’être humain par sa raison. La loi naturelle est la
participation de l’homme à la loi éternelle de Dieu par la raison, ou la loi écrite
par Dieu sur le cœur de l’homme (cf. Rm 2, 14-15). Le but de la loi naturelle est de
permettre aux gens de reconnaître le bien qu’ils doivent faire dans leur vie, ainsi
que le mal qu’ils doivent éviter. Il est important de noter que la loi naturelle est
accessible à tous les humains. Parce que Dieu révèle cette loi à travers la capacité
humaine de raisonnement, il n’est pas nécessaire d’avoir une foi religieuse pour
la comprendre.
Lorsqu’on parle de loi naturelle, il est important de préciser qu’elle ne concerne
que les êtres humains : les humains sont les seules créatures qui possèdent la
capacité de raisonner, les seules créatures qui sont rationnelles, dans l’ordre
humain de la rationalité. Les créatures non-humaines participent à la loi

36
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

naturelle, mais seulement dans la mesure où elles suivent les lois de leur propre
nature. En termes simples, les chiens font ce qu’ils font parce qu’ils sont des
chiens ; les plantes font ce qu’elles font parce qu’elles sont des plantes. Ils ne
peuvent pas réfléchir à ce que cela signifie d’être un chien ou une plante, ni suivre
consciemment des normes qui ont à voir avec le fait d’être un chien ou une
plante. Elles sont guidées soit par l’instinct, soit par les processus naturels qui font
partie de la raison de leur nature.
Les êtres humains sont différents. En tant que créatures rationnelles, nous
sommes capables de réfléchir à ce que signifie être humain, ainsi qu’aux actions
qui renforcent ou diminuent notre humanité. Cette capacité à réfléchir, et à
réfléchir de manière critique, a des implications importantes pour mener une vie
morale.
La théorie classique du droit naturel spécifie quatre biens fondamentaux qui sont
(ou devraient être) évidents pour les créatures rationnelles humaines :
• Le premier est la vie elle-même. Notre capacité de raisonnement nous
informe que la vie est un bien – sans elle, nous ne pourrions parler
d’aucun autre bien – et que nous devons toujours la protéger et la
promouvoir. Les actions qui menacent la vie, comme l’abus d'alcool et de
drogues…, sont contraires à ce bien et constituent donc des maux à éviter.
• Un deuxième bien est la procréation et l’éducation des enfants. La raison
nous informe que le fait de donner naissance à une nouvelle vie et de la
nourrir dans le contexte de la famille est bénéfique non seulement pour
les enfants eux-mêmes, mais aussi pour la société dans son ensemble.
Abuser ou négliger ceux qui nous sont confiés est contraire à ce bien et
constitue un mal à éviter.
• Le troisième bien est la vie en société, qui implique le respect de la dignité
des autres et la recherche de l’équité dans les relations avec eux. S’engager
dans des activités sociales injustes, illégales ou corrosives est contraire à
ce bien et, là encore, c’est un mal à éviter.
• Le quatrième bien est la vérité. La raison nous informe que nous devons
être ouverts à la vérité sous toutes ses formes et que nous devons la
rechercher avec honnêteté et intégrité. S’efforcer d’amasser du pouvoir
ou des richesses au détriment de la vérité est contraire à ce bien et
constitue également un mal que l’on doit éviter.

37
Frédéric TRAUTMANN

Grâce à la raison, il s’agit de maintenir ces biens fondamentaux indépendamment


du temps, du lieu ou de la culture. Lorsque les gens les recherchent, ils agissent
en accord avec la loi naturelle ; lorsqu’ils les négligent ou agissent à leur encontre,
ils diminuent ce que signifie être humain. Historiquement, l’Église catholique
s’est appuyée sur la loi naturelle comme base de nombreux enseignements
éthiques, et il est important de le garder à l’esprit, même si la compréhension de
la loi naturelle demande d’être réinterprétée par la réflexion théologique
contemporaine.

B. Les Vertus

1. Éthique de l’action & éthique de l’être


Les discussions éthiques se concentrent souvent sur les actions : « Que dois-je
faire dans cette situation particulière ? » Se concentrer sur les actions – une
éthique de l’action – est un aspect important de la réflexion morale, mais ce n’est
que la moitié de l’équation. L’autre moitié, et peut-être la plus importante,
concerne le caractère – une éthique de l’être – qui se concentre sur le type de
personne que l’on est.
Par exemple, tout le monde peut dire que Mère Térésa était une bonne personne.
Nous le disons parce que nous savons tout le bien qu’elle a fait aux pauvres de
Calcutta et du monde entier. Adolf Hitler, en revanche, n’était pas une aussi
bonne personne. Nous le disons parce que nous savons qu’il est responsable de la
mort de millions de personnes. La question que l’on doit se poser est la suivante :
« quel genre de personne est-ce que je veux être ? » Les décisions morales que
l’on prend jouent un rôle important dans la réponse à ces questions et, comme
nous le verrons dans un instant, il existe une relation essentielle entre les choix
que l’on fait et le type de personne que l’on est et que l’on devient.
Alors comment fait-on pour faire de bons choix moraux qui, à leur tour, font de
nous des personnes de bonne moralité ? La réponse se trouve dans les vertus. Une
vertu est une disposition de la volonté par laquelle un individu choisit
volontairement, librement et systématiquement d’agir d’une manière

38
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

moralement bonne. Les vertus sont des modèles permanents de comportement


moral qui se développent (on ne naît pas avec) grâce à nos choix libres et
intentionnels. Par exemple, on développe la vertu d’honnêteté en choisissant
librement de toujours dire la vérité. On développe la vertu de justice en rendant
constamment aux autres ce qui leur est dû. En faisant volontairement et
constamment de bons choix moraux, on développe les vertus qui nous aident à
devenir une personne de bonne moralité.
C'est précisément ici que nous reconnaissons l’importance des vertus pour la vie
morale. Les vertus sont importantes car il existe une relation essentielle entre les
choix que l’on fait (éthique de l’action) et le type de personne que l’on est ou que
l’on cherche à devenir (éthique de l’être). Pour être une personne de bonne
moralité, il faut faire constamment de bons choix moraux et, d’une manière
générale, pour faire constamment de bons choix moraux, il faut être une
personne de bonne moralité. C’est ce que l’on appelle un cercle vertueux.
Malheureusement, l’inverse est également vrai. Une personne qui n’est pas de
bonne moralité ne peut pas faire constamment de bons choix moraux et, de
manière générale, on ne peut pas faire constamment de bons choix moraux si on
n’est pas une personne de bonne moralité. L’inverse du cercle vertueux est appelé
le cercle vicieux.
Une fois encore, l’exemple de Mère Térésa illustre bien ce point. Mère Térésa a
développé une bonne moralité grâce aux nombreux bons choix qu’elle a faits tout
au long de sa vie. Par conséquent, lorsqu’elle était confrontée à une décision
éthique importante – et elle en eût beaucoup – elle possédait le type de caractère
qui lui permettait de prendre plus facilement la bonne décision morale. Chaque
décision morale correcte, à son tour, l’a aidée à développer davantage son
caractère moral. Mais l’exemple de Mère Térésa n’est pas unique ; on peut penser
à n’importe quelle personne dans la vie qui a un bon caractère moral : les vertus
servent de base à des réponses cohérentes aux nombreuses décisions morales
auxquelles les gens sont confrontés dans leur vie, et en viennent à définir qui ils
sont en tant que personnes.

2. Les vertus morales humaines & les vertus cardinales

39
Frédéric TRAUTMANN

Quelles sont donc les vertus et comment les appliquer à la prise de décision
morale ? Les vertus peuvent être comprises à la fois sur le plan philosophique et
théologique. Les vertus morales (ou humaines) sont celles que l’on peut connaître
philosophiquement par la raison ; elles peuvent donc être développées et
pratiquées par tous les individus, indépendamment de toute référence religieuse.
La prudence, la justice, la force et la tempérance sont les vertus dites cardinales,
celles autour desquelles toutes les autres s’articulent (cardinal signifie pivot, gond,
la charnière d’une porte). Ainsi, toute vertu morale que l’on cultive relève de l’une
de ces quatre grandes vertus.
• La prudence est la vertu qui dispose à discerner le bien, à choisir les
moyens corrects pour atteindre ce bien, puis à agir en accord avec ce
discernement. Cette vertu est souvent définie comme la sagesse pratique
ou la bonne raison en action.
• La justice est la vertu qui dispose à rendre à chaque personne ce qui lui
est dû. Cette vertu aide à agir constamment de manière à nourrir de justes
relations avec les autres, par exemple en respectant les droits des autres
et en établissant la paix et l’harmonie dans les relations avec eux.
• La force (ou la vertu de courage) est donc la vertu qui permet de bien
affronter les difficultés. Cette vertu assure la cohérence dans la poursuite
du bien et permet de surmonter les obstacles à une vie morale.
• Enfin, la tempérance est la vertu de la maîtrise de soi. Elle est la vertu qui
incline à jouir des plaisirs de manière raisonnable et modérée, et assure
un équilibre dans l’usage des biens créés.

3. Les vertus théologales


La vie morale dans une perspective chrétienne suppose de vivre non seulement
des vertus morales humaines, mais aussi des vertus théologales. Les vertus
théologales se rapportent directement à Dieu, elles sont insufflées par Dieu dans
l’âme des croyants et sont révélées par la foi.
• La première vertu théologale (dans l’ordre chronologique mais non en
importance) est la foi. La foi est la vertu par laquelle on croit en Dieu et
on croit tout ce que Dieu a révélé. C’est la vertu par laquelle le chrétien
manifeste sa foi, en témoigne et la partage avec les autres. Au niveau de

40
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

la vie morale, la foi est importante en ce qu’elle permet de croire ce que


Dieu a révélé sur le comportement correct ou éthique. La foi est la vertu
par laquelle on comprend la vérité de la révélation chrétienne et la
manière de vivre avec confiance en accord avec elle tout au long de sa vie.
• La deuxième vertu théologale est l’espérance. L’espérance est la vertu par
laquelle on désire vivre en pleine communion avec Dieu au ciel, et on
place toute sa confiance dans les promesses du Christ. C’est la vertu qui
nous pousse à aspirer à l’union avec Dieu, car Dieu est notre véritable
destin et la source de notre épanouissement ultime. En ce qui concerne
la vie morale, elle inspire et purifie les activités de l’homme et les oriente
vers le royaume de Dieu. Elle protège également du découragement ou
du désenchantement dans les moments difficiles et soutient l’homme
lorsqu’il se sent abandonné. L’espérance peut aussi être comprise comme
la croyance que nos bonnes œuvres peuvent influencer positivement
l’ordre temporel et que nous pouvons rendre le monde meilleur. Il se peut
que l’on ne reconnaisse pas toujours le bénéfice immédiat de ces œuvres,
mais dans l’espérance, on peut être certain que ces œuvres font partie du
plan global de Dieu et qu’elles porteront leurs fruits au moment voulu par
Dieu.
• La troisième vertu théologale est la charité. La charité est la vertu par
laquelle on aime Dieu par-dessus tout et on aime son prochain comme
soi-même. C’est la vertu qui anime et inspire les autres vertus, les lie
ensemble en parfaite harmonie et elle est la source et le but de la pratique
chrétienne. La vertu d’amour est cruciale pour mener une vie morale
chrétienne car elle nous appelle à agir différemment du monde. Ceux qui
aiment vraiment Dieu et leur prochain reconnaissent que tous les
hommes sont créés à l’image de Dieu et cherchent à défendre le bien
commun de la société dans son ensemble.
Globalement, le christianisme soutient que les vertus théologales constituent le
fondement de la moralité. On ne peut être chrétien ou vivre comme Dieu le
souhaite sans les connaître et les pratiquer. Elles sont essentielles aux efforts
continus de chacun pour faire le bien et éviter le mal.

41
Frédéric TRAUTMANN

C. Le bien et le libre arbitre

Le but premier de tout système moral, qu’il soit philosophique ou théologique,


est de discerner le bien. Pour les chrétiens, le bien est Dieu lui-même, compris
comme le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Tout ce qui, dans l’ordre créé, est
considéré comme bon ne l’est que par rapport à Dieu, ou en tant que reflet ou
médiation de la bonté de Dieu lui-même. Autrement dit, la bonté n’est pas un
attribut ou une caractéristique de Dieu, Dieu est bonté. Dieu est bon en lui-même
et toute bonté dans la création a son origine et son accomplissement ultime en
Dieu. En termes pratiques, cela signifie que le bien que l’on fait dans sa vie est un
reflet de la bonté qu’est Dieu.
Dans la perspective chrétienne, Dieu offre à chaque personne le don
inconditionnel de sa bonté (on peut aussi appeler cela amour ou grâce). L’une des
grandes vérités – et l’un des grands défis – du christianisme est que, que l’on soit
chrétien ou non, Dieu aime chaque être humain de manière égale et
inconditionnelle. Ainsi, Dieu offre continuellement ses dons de bonté, d’amour
et de grâce à tous les hommes, quelles que soient leurs croyances ou leurs actions
dans la vie. Cependant, Dieu offre également à l’humanité le don du libre arbitre.
Dieu ne force pas les gens à accepter cette bonté ; ils peuvent l’accepter ou la
rejeter. Lorsque quelqu’un accepte cette bonté et agit en conséquence, elle se
reflète dans ses actions aux yeux de tous.
Prenons à nouveau l’exemple de Mère Térésa. Elle a consacré sa vie à apporter un
confort matériel et spirituel aux indigents de Calcutta et était connue dans le
monde entier pour sa charité. Cependant, le christianisme enseigne que Mère
Térésa n’était pas bonne en soi. Le travail qu’elle a accompli avec les pauvres, ainsi
que l’effet que ce travail a eu sur les autres, était en réalité un reflet de la bonté
que Dieu lui avait offerte. Elle a fait l’expérience de la bonté de Dieu, s’est engagée
à la mettre en pratique et, par ses nombreux actes de charité, a fourni un modèle
de vie chrétienne authentique à des millions de personnes dans le monde.
Cependant, il y a toujours l’autre côté de l’histoire. Ce n’est pas parce que Dieu
offre le don de sa propre bonté que les gens agiront toujours de manière
moralement bonne. C’est la question du libre arbitre. On a toujours la possibilité
de rejeter la bonté de Dieu et d’agir de manière contraire à ses intentions.

42
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

Prenons, une fois de plus, l’exemple d’Adolf Hitler. Le christianisme enseigne que
Dieu a offert, même à Hitler, le don de sa propre bonté. Dieu ne voulait rien de
plus de lui que son acceptation de Dieu. Cependant, Hitler a utilisé son libre
arbitre pour rejeter Dieu et la bonté de Dieu. Il a reconnu et défini un autre bien
dans sa vie et a choisi de le poursuivre à sa place. Ce rejet de Dieu et de sa bonté
est ce que le christianisme appelle le mal. Le mal, au sens théologique du terme,
est l’absence de bien. C'est le rejet de ce que Dieu a révélé être bon ; c'est le rejet
de Dieu lui-même.
Mère Térésa et Adolf Hitler sont des exemples extrêmes d’acceptation ou de rejet
de la bonté de Dieu, mais le christianisme reconnaît que tout le monde accepte
et rejette la bonté de Dieu dans sa vie. La plupart d’entre nous peuvent penser à
des exemples de bonté qu’ils ont faits : se porter volontaire pour un projet de
service communautaire, réconforter un voisin dans le besoin, aider une vieille
dame à traverser la rue. Cependant, tout comme Mère Térésa, le christianisme
affirme que le bien que nous faisons dans ces situations ne vient pas totalement
de nous seulement mais aussi de Dieu. Dieu travaille à travers nous pour atteindre
une bonne fin. Nous choisissons simplement de participer avec Dieu et, ce faisant,
nous reflétons la bonté de Dieu par notre action.
Inversement, nous pouvons aussi penser à des moments où nous avons fait le mal
dans notre vie : ignorer les personnes dans le besoin, tromper les autres pour
notre propre gain, abuser de l'alcool, des drogues… Le christianisme enseigne que
lorsque nous commettons des actes mauvais ou des péchés, nous rejetons la
bonté de Dieu. Dans la perspective chrétienne, le mal que nous commettons nous
rappelle continuellement notre propre rejet de Dieu et de la bonté de Dieu dans
nos vies.
Nous pouvons ainsi parler de l’importance de la bonté de Dieu pour une vie
morale. La croyance en Dieu comme étant bon et comme étant la source de toute
bonté offre au chrétien une raison d’être moral. C’est-à-dire que l’on doit être
moral parce que la bonté de Dieu nous établit coresponsable de la bonté du
monde à partir de la question : « Qu’est-ce que Dieu me permet et me demande
d’être et de faire ? »
Si Dieu me donne les dons, les talents ou les capacités nécessaires pour devenir
un type spécifique de personne, alors j’ai le devoir moral de devenir cette

43
Frédéric TRAUTMANN

personne (éthique de l’être). Si Dieu me donne les dons, les talents ou les
capacités de faire une chose spécifique, alors je suis moralement tenu de faire
cette chose (éthique du faire). Ainsi nos responsabilités morales ne sont pas
seulement envers nous-mêmes, envers d’autres personnes ou envers les
exigences de la rationalité humaine ; elles sont, tout autant et en premier lieu, des
responsabilités envers Dieu. Les actions sont jugées morales non pas simplement
parce qu’elles apportent du bien à nous-mêmes et aux autres, mais parce qu’elles
répondent correctement à ce que Dieu souhaite pour nous, à savoir vivre dans le
bien, le beau et le vrai. De même, les actions sont jugées immorales non pas
simplement parce qu'elles causent du tort à nous-mêmes et aux autres, mais
parce qu'elles ne répondent pas correctement au but que Dieu nous offre.

Mais c’est toujours librement que l’homme se tourne vers le


bien. Cette liberté, nos contemporains l’estiment grandement
et ils la poursuivent avec ardeur. Et ils ont raison. Souvent
cependant ils la chérissent d’une manière qui n’est pas droite,
comme la licence de faire n’importe quoi, pourvu que cela
plaise, même le mal. Mais la vraie liberté est en l’homme un
signe privilégié de l’image divine. Car Dieu a voulu le laisser à
son propre conseil pour qu’il puisse de lui-même chercher son
Créateur et, en adhérant librement à lui, s’achever ainsi dans
une bienheureuse plénitude. La dignité de l’homme exige
donc de lui qu’il agisse selon un choix conscient et libre, mû et
déterminé par une conviction personnelle et non sous le seul
effet de poussées instinctives ou d’une contrainte extérieure.
L’homme parvient à cette dignité lorsque, se délivrant de
toute servitude des passions, par le choix libre du bien, il
marche vers sa destinée et prend soin de s’en procurer
réellement les moyens par son ingéniosité. Ce n’est toutefois
que par le secours de la grâce divine que la liberté humaine,
blessée par le péché, peut s’ordonner à Dieu d’une manière
effective et intégrale. Et chacun devra rendre compte de sa
propre vie devant le tribunal de Dieu, selon le bien ou le mal
accompli.

44
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

CONCILE VATICAN II, Constitution pastorale Gaudium et spes,


La grandeur de la liberté, n°17.

D. La conscience et le discernement

« La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul


avec Dieu et où sa voix se fait entendre » (Catéchisme de l’Église catholique, §1776,
Gaudium et spes n°16). En amont de la conscience, il y a le reflet de la loi divine
inscrite dans le cœur de la personne. Cette loi intérieure à la personne porte le
nom de syndérèse ; plus simplement, c’est la « voix de Dieu » en nous. Cette
« voix » inscrite dans l’intelligence me presse amoureusement à faire le bien et à
éviter le mal, afin de me permettre d’atteindre le bonheur et la béatitude
éternelle.
La conscience est comme l’interface entre cette « voix de Dieu » et les situations
concrètes de la vie. Elle est un acte de raison qui conduit à un jugement sur la
valeur morale d’une action particulière passée, présente ou future.
Pour poser ce jugement pratique, la conscience va bien sûr écouter cette « voix
de Dieu ». Mais elle va aussi puiser dans l’expérience personnelle concrète. Elle
tiendra compte encore des avis qu’elle a entendus ou lus ; enfin, elle s’inspirera
de modèles ou d’exemples de vie. On le comprend alors : ces différents éléments
peuvent éclairer la conscience, mais aussi l’induire en erreur.
La dignité de l’être humain consiste à obéir à sa conscience. Autrement dit, la
conscience nous oblige toujours. Elle est la norme ultime de l’agir moral. S’il faut
donc toujours suivre sa conscience, cela ne signifie pas pour autant que le
jugement de ma conscience soit infaillible. Paul écrivait : « Ma conscience ne me
reproche rien, mais ce n’est pas pour cela que je suis juste » (1 Co 4, 4). Il y a
plusieurs raisons à cela.
D’abord, la conscience peut être dans l’ignorance ou dans l’erreur quant au
caractère bon ou mauvais d’un acte. L’erreur peut être sans faute de la part de la

45
Frédéric TRAUTMANN

personne. Cette personne est alors « sincère », bien que son jugement ne soit pas
vrai. Mais l’erreur peut aussi être fautive. C’est le cas lorsqu’une personne est
négligente dans la quête de la vérité, qu’elle renonce à s’instruire sur ce qui lui
permettrait de mener une vie belle et juste, qu’elle refuse d’écouter un conseil…
La conscience est alors « corrompue » (Tite 1, 15) autrement dit « anesthésiée »
par des erreurs coupables et des péchés répétés au point qu’elle ne distingue plus
le bien du mal et finit par trouver le mal normal ou pas si grave. Elle en arrive
même à le justifier. Des slogans comme : « Il n’y a pas de mal à se faire du bien » ;
« Si tu le sens fais-le ; si tu ne le sens pas, ne le fais pas ! » ; « À chacun sa vérité »,
sont d’un grand secours dans ce processus de justification et contribuent à
endormir la conscience. Le mimétisme : « Tout le monde fait comme cela ! » y
aide aussi !
C’est pourquoi le premier devoir de la conscience est de se former. Dans ce sens,
lorsque l’Église enseigne la morale, elle se met justement au service de la
conscience. Il appartient alors d’intérioriser son enseignement afin de vivre dans
la vérité qui rend libre et dans l’amour qui emporte par la grâce. La clé essentielle :
l’humilité d’avoir un cœur d’écoute qui se laisse enseigner. Les chrétiens
comptent sur la Parole de Dieu et la Tradition de l’Église et son enseignement
pour aider dans la tâche de former leur conscience. La Bible n’est pas un livre de
morale, et pourtant, la Parole de Dieu fonde l’agir en ce qu’elle est un lieu de
formation de la conscience : un lieu de formation et de discernement repris par
le Magistère de l’Église appuyé sur la Tradition pour offrir des éclairages pour
actuels sur de nombreuses questions, que ce soit dans le domaine du travail, de
la justice, de l’immigration, de l’écologie, de la vie de famille, de la sexualité, de
l’origine et de la fin de la vie…

Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence


d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il
est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer
et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun
résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela ».
Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa
dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera. La conscience

46
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est


seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre. C’est d’une
manière admirable que se découvre à la conscience cette loi
qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain. Par
fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes,
doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant
de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée
que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les
personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et
tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité.
Toutefois, il arrive souvent que la conscience s’égare, par suite
d’une ignorance invincible, sans perdre pour autant sa dignité.
Ce que l’on ne peut dire lorsque l’homme se soucie peu de
rechercher le vrai et le bien et lorsque l’habitude du péché
rend peu à peu sa conscience presque aveugle.

CONCILE VATICAN II, Constitution pastorale Gaudium et spes,


Dignité de la conscience morale, n°16.

47
Frédéric TRAUTMANN

Conclusion

Dieu n’exige pas l’impossible !

Dieu dote chacun de nous de dons, de talents et de capacités spécifiques et nous


demande ensuite de les utiliser pour refléter sa bonté dans le monde. Cependant,
nous ne sommes pas moralement tenus de faire des choses pour lesquelles nous
n’avons pas été habilités ou pour lesquelles nous n’avons pas de capacités. Par
exemple, si vous n’avez pas reçu les dons, les talents ou les capacités nécessaires
pour devenir un travailleur social, alors Dieu n’exige pas que vous le deveniez. Il
s’agit de discerner puis de choisir librement ce que l’homme est capable de faire.
Dans cette perspective, la vie morale chrétienne peut être correctement comprise
comme une réponse à l’offre d’amour de Dieu. Par la foi, le chrétien reconnaît
l’offre d’amour de Dieu par Jésus-Christ et le Saint-Esprit comme une invitation
ouverte à vivre une vie bonne, à vivre une vie de Dieu. La réponse libre du
chrétien à cette invitation est la vie morale. Le but de la théologie morale
chrétienne est donc de démontrer comment la croyance en Jésus-Christ fait une
différence dans la façon de vivre. Elle cherche à démontrer les implications de la
foi chrétienne tant pour les actions que l’on doit accomplir que pour le type de
personne que l’on s’efforce de devenir.
Vivre une vie morale pose donc de profonds défis au croyant chrétien qui ne se
résument pas simplement dans une obéissance aveugle aux commandements
divins ou aux règles de l’Église. L’éthique invite à un engagement profond de la
part du croyant pour discerner ce que Dieu l’appelle à être et à faire.
La réflexion éthique n’est pas facile qui implique un grand effort personnel.
Lorsqu’on est confronté à une décision éthique importante, on doit s’examiner
de manière critique et essayer de discerner comment Dieu nous appelle à utiliser
les dons, les talents et les capacités qui nous ont été donnés. Comme si cela n’était
pas assez difficile, il faut aussi reconnaître que tout au long de leur vie, les gens
mûrissent et se développent en tant que personnes humaines. Ce que l’on pouvait
penser être une réponse morale à un dilemme spécifique à l’âge de 18 ans peut
sembler très différent à l’âge de 40 ans (et inversement). Nous devons également

48
DUDC – Les chrétiens et l’éthique

nous rappeler que tous les êtres humains sont différents. Chaque personne a été
gratifiée par Dieu de dons, de talents et de capacités différents, de sorte que les
réponses valables à des dilemmes moraux similaires peuvent varier d’une
personne à l’autre.
La morale chrétienne n’est donc pas aussi simple que beaucoup le pensent. Elle
implique un engagement profond de la part des individus à comprendre non
seulement l’appel de Dieu dans leur vie, mais aussi eux-mêmes en tant que
personnes humaines. La morale implique véritablement une réponse vécue à
l’invitation d’amour de Dieu.

49
Frédéric TRAUTMANN

Sélection bibliographique
en guise de complément au cours sur les chrétiens et l’éthique

A. Dictionnaires

BRUGUES Jean-Louis, Dictionnaire de morale catholique, Chambray-les-Tours,


CLD, 1991.
CANTO-SPERBER Monique, Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, Paris,
PUF, 1996.
LACOSTE Jean-Yves (dir.), Dictionnaire critique de théologie, Paris, PUF, 1998.

B. Ouvrages de base

AUBERT Jean-Marie, Abrégé de morale catholique, Paris, Desclée, 1987.


COLLECTIF, Initiation à la pratique de la théologie, t. IV, Paris, Cerf, 1984.
GUILBERT Pierre, La morale revisitée. Vers la vie heureuse, Paris, Nouvelles Cité,
2007.
IDE Pascal, Les 7 péchés capitaux ou ce mal qui nous tient tête, Paris, Mame-
Edifa, 2002.
PINCKAERS Servais-Théodore, La morale catholique, Paris, Cerf, 1991.
PINCKAERS Servais-Théodore, Les sources de la morale chrétienne, Sa méthode,
son contenu, son histoire, SThE 14, Fribourg/Paris, Éditions
universitaires/Cerf, 19933.
THEVENOT Xavier, Morale fondamentale, Notes de cours, Paris, DDB/Don
Bosco, 2007.
THOMASSET Alain, Interpréter et Agir. Jalons pour une éthique chrétienne, Paris,
Cerf, 2011.
TRAUTMANN Frédéric, La notion de charité au concile Vatican II, Perpignan,
Artège, 2012.

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

C. Magistère

BENOIT XVI, Dieu est amour, Jean-Pierre RICARD (préf.), Documents d’Église,
Paris, Bayard/Cerf/Fleurus-Mame, 2006.
BENOIT XVI, L’amour dans la vérité, Jean-Charles DESCUBES (préf.), Documents
d’Église, Paris, Bayard/Cerf/Fleurus-Mame, 2009.
CONCILE VATICAN II
À proprement parler, aucun des textes du concile ne traite de la morale comme telle.
Certains possèdent cependant une teneur élevée en morale, au point que leur lecture
est devenue indispensable. Citons, notamment, la constitution Gaudium et spes, les
déclarations Dignitatis humanae et Nostra aetate. Ces textes peuvent être consultés en
intégralité sur le site du Saint-Siège :
https://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/index_fr.htm
[page consultée le 15 janvier 2022]
Catéchisme de l’Église catholique, Paris, Mame/Plon, 1997.
FRANÇOIS, Evangelii Gaudium, exhortation apostolique sur l’annonce de
l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui, 24 novembre 2013.
FRANÇOIS, Laudato Si’, lettre encyclique sur la sauvegarde de la maison
commune, 24 mai 2015.
FRANÇOIS, Les Béatitudes : carte d’identité du chrétien, Paris, Éditions
Emmanuel, 2020.
JEAN-PAUL II, Veritatis Splendor, Paris, Mame/Plon, 1993.
JEAN-PAUL II, Evangelium Vitae, Saint-Maurice, Saint-Augustin, 1995.

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Frédéric TRAUTMANN

Table des matières

INTRODUCTION .............................................................................................................. 4
A. MORALE ET ETHIQUE ...................................................................................................6
1. Le sens du terme « morale » ............................................................................... 6
2. Le sens du terme « éthique »............................................................................... 6
3. Éthique et morale dans le langage ordinaire ................................................. 6
4. Éthique et morale dans la réflexion théologique ........................................... 7
5. De quelques points importants .......................................................................... 9
a) La responsabilité personnelle .....................................................................9
b) La volonté humaine ..................................................................................... 10
c) Les conséquences des actes moraux ....................................................... 10
d) La dimension communautaire des décisions morales ....................... 12
B. PHILOSOPHIE MORALE ET THEOLOGIE MORALE ....................................................... 12
C. LA NATURE DE LA THEOLOGIE MORALE .................................................................... 14

CHAPITRE 1 L’ETHIQUE DANS L’ANCIEN TESTAMENT .................................... 16


A. L’ENSEIGNEMENT ETHIQUE DU PENTATEUQUE ........................................................ 16
1. L’identité de Dieu ................................................................................................ 16
2. L’acte de Dieu .......................................................................................................17
3. La parole de Dieu ................................................................................................ 18
4. Sainteté de Dieu .................................................................................................. 19
B. LE DECALOGUE.......................................................................................................... 20
C. L’ENSEIGNEMENT ETHIQUE DES PROPHETES............................................................. 23
1. Les enseignements éthiques des prophètes du VIIIe siècle (av. J.-Ch.) ..... 24
2. Les prophètes ultérieurs .................................................................................... 25

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DUDC – Les chrétiens et l’éthique

CHAPITRE 2 L’ETHIQUE DANS LE NOUVEAU TESTAMENT ............................. 27


A. L’AMOUR DE DIEU ET DU PROCHAIN .........................................................................27
B. LE SERMON SUR LA MONTAGNE ............................................................................... 29
C. L’ENSEIGNEMENT ETHIQUE DE PAUL DE TARSE ....................................................... 31

CHAPITRE 3 DE QUELQUES NOTIONS IMPORTANTES EN THEOLOGIE


MORALE ......................................................................................................................... 36
A. LA LOI NATURELLE..................................................................................................... 36
B. LES VERTUS .................................................................................................................38
1. Éthique de l’action & éthique de l’être ........................................................... 38
2. Les vertus morales humaines & les vertus cardinales ................................ 39
3. Les vertus théologales ....................................................................................... 40
C. LE BIEN ET LE LIBRE ARBITRE .................................................................................... 42
D. LA CONSCIENCE ET LE DISCERNEMENT......................................................................45

CONCLUSION ................................................................................................................ 48

SELECTION BIBLIOGRAPHIQUE ............................................................................. 50


A. DICTIONNAIRES ......................................................................................................... 50
B. OUVRAGES DE BASE ................................................................................................... 50
C. MAGISTERE ................................................................................................................. 51

TABLE DES MATIERES ................................................................................................ 52

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