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Sujet : La philosophie est la science qui met fin au règne des certitudes. Qu’en pensez-vous ?

La particularité de la réflexion philosophique c’est de rompre avec les idées reçues et de


remettre en question les vérités absurdes. Cela suffit-il pour dire que la philosophie est la
connaissance qui abolit la suprématie des vérités absolues ? Il est question dans ce sujet de
l’incompatibilité entre philosophie et certitude. Autrement dit, ce sujet tente de répondre à la
question : philosophie et certitude sont- elles incompatibles ?

En quel sens la philosophie détruit-elle les certitudes ? Ne peut-on pas rencontrer des
certitudes à l’intérieur de la philosophie même ?

Ce sujet met en évidence la contradiction entre philosophie et certitude. On peut entendre


par philosophie la quête perpétuelle et sans fin de la vérité et non sa possession. Cette philosophie
est considérée comme la science c’est-à-dire la connaissance ou le savoir qui met fin au règne des
certitudes. Mettre fin au règne des certitudes signifie anéantir ou abolir la domination des certitudes.
Les certitudes peuvent être définies comme les convictions ou les vérités absolues définitives et
achevées.

En quel sens peut- on soutenir que la philosophie détruit les certitudes ? A cette question,
commençons par rappeler que l’esprit philosophique est par essence un esprit de contestation, de
contradiction et de remise en cause. Ceci explique pourquoi la philosophie se pose en s’opposant
aux différentes formes de connaissances.

C’est ainsi qu’elle va contester et remettre en question l’explication mythique qui se servait
du surnaturel pour donner une interprétation dogmatique et figée des phénomènes. A la place elle
va proposer une explication fondée en raison.

Exemple : Les premiers philosophes grecs qui cherchaient rationnellement l’élément premier
ou principe de l’univers. Thalès disait à ce propos que « Même si tout est plein de Dieu, même si c’est
Dieu qui a fait le monde, il l’a fait d’une certaine manière. C’est cette manière qu’il faut connaître ».

La philosophie va aussi à l’encontre du dogme religieux qui exige la soumission, l’acceptation


et l’adhésion pour proposer une réflexion critique. C’est tout le sens de la remise en cause des
fondements de la religion par Karl Marx, Feuerbach, Nietzsche etc.

La philosophie tente aussi de détruire le sens commun défini comme la croyance commune,
la manière commune de voir, de penser et de sentir. C’est dans ce sens que Bertrand Russel affirmait
que « Celui qui n’a aucune teinture de philosophie traverse l’existence, prisonnier de préjugés dérivés
du sens commun, des croyances habituelles à son temps ou à son pays et de convictions qui ont
grandi en lui sans la coopération ni le consentement de la raison ». Pour la philosophie de telles
convictions ne peuvent prospérer car même « Les choses les plus familières de la vie quotidienne …..
réponses très incomplètes ».

La philosophie en tant que quête de la vérité, c’est-à-dire recherche perpétuelle du savoir ne peut
aller de pair avec les certitudes qui sont des vérités définitives. L’idée de certitudes et de convictions
est contraire à la définition même de la philosophie dont la valeur réside dans son caractère
incertain. La philosophie est par essence doute et remise en question des évidences, de l’opinion, des
préjugés et de tout ce qui constitue pour l’homme une vérité achevée. Voilà pourquoi pour Platon et
Aristote son origine c’est l’étonnement.
En tant que doute, la philosophie rejette tout ce qui est reconnu et accepté par les hommes, ce qui
fait du philosophe un anticonformiste, c’est-à-dire celui qui conteste le savoir et l’ordre établi.

Mais, s’il est vrai que l’esprit philosophique par son questionnement et ses interrogations
sans fin ne peut prospérer qu’à la condition de détruire les certitudes, cette destruction n’est-elle pas
pour le philosophe une manière de chercher des certitudes ? En remettant en question le savoir
établi, la philosophie ne vise- t-elle pas à fonder d’une manière inébranlable le savoir ?

En effet, s’il y a une contradiction permanente, perpétuelle et sans fin entre philosophes c’est parce
que chacun est convaincu de détenir la vérité et du même coup considère que l’autre est dans
l’erreur. C’est ce qui justifie le reproche que Rousseau fait aux philosophes lorsqu’il se demandait «
Qu’est-ce que la philosophie ?.... Venez à moi, c’est moi seul qui ne trompe point ».

Cette certitude rencontrée à l’intérieur de la philosophie est manifeste chez Hegel et même chez Karl
Marx. En effet Hegel considère qu’un discours philosophique est possible. Et en soutenant cette idée
de la possibilité du discours philosophique, il admet la possibilité de réaliser un jour l’idéal de la
sagesse. Car,

« En posant n’importe quelle question, on arrive tôt ou tard, après une série plus ou moins longue de
réponses- questions, à l’une des questions qui se trouve à l’intérieure du savoir circulaire que possède
le sage. En partant de cette question et en progressant logiquement, on arrive nécessairement au
point de départ. On voit ainsi qu’on a épuisé toutes les questions-réponses possibles. Ou, en d’autres
termes, on a obtenu une réponse totale ».

On peut donc retenir pour terminer que même s’il est vrai que la philosophie en tant que
questionnement, contestation et remise en question semble incompatible avec les certitudes qui
sont des vérités achevées et incontestables, il ne faut pas perdre de vue que tout ce
questionnement, cette contestation et cette remise en question n’est que moyen pour tendre vers
un fondement ou une vérité beaucoup plus solide, plus sûre et plus certaine. C’est dire donc que
philosophie et certitudes ne sont pas aussi opposées qu’on le pense.

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