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1.

QUE PENSEZ-VOUS DE L’OPPOSITION ENTRE LES SYSTEMES


PHILOSOPHIQES ?

L’histoire de la pensée montre que la philosophie s’exprime dans la


diversité. Ainsi, il n’y a pas une philosophie mais des philosophies ; ce qui
revient à dire qu’il y a autant de philosophie qu’il y a de philosophes. Cette
diversité des philosophies est liée aux caractères personnels de toute pensée
philosophique. Et comme nous le fait remarquer Hegel : « En ce qui
concerne l'individu, chacun est le fils de son temps ; de même aussi la
philosophie ». En conséquence, chaque philosophie est fille se son époque et
la différence des conditions sociales et culturelles justifient cette pluralité
des systèmes philosophiques qui, le plus souvent s’opposent les unes aux
autres.
C’est pourquoi Kant disait que « la philosophie est un champ de
bataille où les pensées s’affrontent et chaque philosophie se bâtit sur les
ruine d’une autre ». Ainsi, parlant de la philosophie, on la compare à un
vaste champ de bataille ou il n’y a ni vainqueur ni vaincu et où les acteurs ne
sont d’accord que sur leur désaccord. Non seulement ils ne s’entendent pas
mais chacun cherche à montrer qu’il est le seul à avoir raison. Ce que
Rousseau déplore lorsqu’il dit : « A les entendre, on les prendrait comme
une troupe de charlatans criant chacun de son coté sur la place publique :
venez à moi c’est moi seul qui ne me trompe pas ». Cette attitude des
philosophes s’explique par ce que Georges Gusdorf appelle « le vœu secret
de toute philosophie » qui est « de mettre fin à la philosophie ». Chaque
philosophe vente sa conception et prétend apporter des solutions aux
problèmes de l’humanité. A ce titre chaque philosophe cherche à ruiner la
pensée des philosophes qui le précèdent pour ensuite construire sa propre
pensée sur les ruines d’autres conceptions.

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Mais, il faut remarquer avec Hegel que la diversité des conceptions
philosophiques ne constitue pas une menace pour la philosophie. Car
loin d’être un obstacle, elle constitue une grande richesse et présente un
grand intérêt pour le développement même de la réflexion philosophique.

2. Philosopher c'est dire non. Qu’en pensez-vous ?

La réflexion philosophique requiert un type d’attitude psychologique


foncièrement différent de celui que l’on retrouve chez l’homme du sens
commun. Cette attitude intellectuelle est essentiellement caractérisée par le
doute qui se donne comme une activité positive et volontaire de l’esprit qui
consiste à suspendre le jugement en vue de la recherche d’une vérité fondée
en raison. Donc, philosopher c’est dire non, c’est-à-dire avoir cette posture
intellectuelle qui consiste à interroger et à examiner le fondement de toute
pensée et toute action pour juger de leur valeur. A cet effet, Descartes, en tant
que père du rationalisme moderne, nous exhorte à ne rien conclure tant
que les raisons n’ont pas été présentées. Ce qui veut dire que lorsque, par
exemple, on nous dit quelque chose, au lieu d’y croire immédiatement,
utilisons notre raison pour y réfléchir, pour voir ce qui pourrait se cacher
derrière. Donc, à chaque fois qu’une situation se présente à nous, il nous faut
utiliser la raison pour l’analyser, l’examiner de façon critique afin de déceler
les failles, car il se pourrait qu’on veuille nous tromper. Alain ne dit pas autre
chose lorsqu’il écrit : « Penser, c'est dire non. Remarquez que le signe du
oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et
dit non ».

3. DEFINISSEZ LES NOTIONS DE PENSEE RATIONNELLE ET DE


REFLEXION CRITIQUE

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Tout d’abord, une pensée est dite rationnelle lorsqu’elle construite de
façon méthodique par la raison. Puisqu'elle est construite par la raison, il
est nécessaire également qu'elle se conforme aux principes de rigueur et
de cohérence qui caractérisent la raison en tant que faculté humaine.
Ensuite, une pensée sera dite rationnelle lorsqu'elle se soucie de
démontrer ce qu'elle affirme. C'est pourquoi nous disons que c'est une
pensée soucieuse de preuve, de démonstration, d'argumentation mais
également de justification. De surcroît, la pensée puisqu'elle est
rationnelle, elle doit être accessible à toute raison qui fait l'effort de
comprendre, autrement dit elle doit pouvoir s'adresser à n'importe quelle
raison, puisque la raison est un instrument universel nous dit Descartes ("le
bon sens est la chose du monde la mieux partagée") et c'est d'ailleurs, de ce
point de vue qu'elle définit l'être humain. Donc chaque être humain, parce
que précisément, il est doué de raison, devrait être en mesure de comprendre
ce que la pensée rationnelle affirme. Enfin, la pensée est dite rationnelle
en ce qu'elle est tout le contraire de l'opinion, du préjugé et de la
croyance qui pêchent (faillir) par manque de justification fondées en
raison. En d'autres termes, la pensée rationnelle s'oppose radicalement aux
autres modes de connaissance, tels que l'opinion, le préjugé, et la croyance
qui se caractérisent par leur manque de justifications fondées en raison.
Cela dit, on peut prendre en charge la notion de réflexion critique.
La réflexion critique traduit une attitude de l'esprit, une posture
intellectuelle qui consiste à interroger et à examiner le fondement de
toute pensée et de toute action pour juger de leur valeur. En d’autres
termes, on appelle réflexion critique le retour de l'esprit sur lui-même et ses
connaissances antérieures afin de les rendre plus sages. Donc réfléchir de
façon critique c'est aller en profondeur, c'est se départir de la superficialité.

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Par voie de conséquence, la réflexion critique renvoie à la capacité de
penser par soi-même et, partant à l'autonomie intellectuelle. Mais
qu'est-ce que penser par soi-même ? Penser par soi-même consiste à
refuser ce que Kant appelait "les directeurs de conscience. " Cela veut dire
que lorsqu'on pense par soi-même on refuse de se soumettre à toute
autorité quelle qu'elle soit ; ce qui forcément nous confère une
autonomie intellectuelle, une liberté de penser.
Partant, on peut remarquer que la philosophie se caractérise
essentiellement par la rationalité et la critique. Raison pour laquelle on la
définit souvent comme une pensée au second degré.

4. Expliquez cette expression de BACHELARD : « l’opinion


pense mal, elle ne pense pas ».

L’opinion est une vision déformée de la réalité puisque le sujet ne voit


pas le monde tel qu’il est mais tel qu’il voudrait que le monde soit. C’est
pourquoi, elle renseigne davantage sur ce qui se passe dans la tête du sujet
que sur la réalité dont elle prétend parler. Autrement dit, c’est de l’imaginaire
fabriqué avec des fragments de réalité que la mentalité populaire confond
avec le réel. Par conséquent, la philosophie qui a pour critère la rationalité
démonstrative s’insurge contre ce type de connaissance. Elle se constitue en
rupture avec cette manière naïve et spontanée de voir le monde. Au
tâtonnement qui caractérise la mentalité populaire, la philosophie substitue
une démarche analytique, détaillée et précise fondée sur la rigueur dans le
choix des concepts. Une telle démarche, cependant, suppose que l’homme
cesse d’adhérer, de consentir naïvement et spontanément à la vie courante
et aux pseudo-valeurs (fausses valeurs) que cette vie véhicule. Bref,
philosopher consiste à se démarquer de l’illusion, de l’opinion, à sortir du
« on » au profit du « je ». S’il en est ainsi c’est que l’opinion prend l’apparence,

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les fantasmes pour la réalité. L’opinion ne peut pas satisfaire le philosophe
qui est à la recherche de l’essence. Ainsi, nous conviendrons avec
BACHELARD que « la science, dans son besoin d’achèvement comme dans son
principe, s’oppose absolument à l’opinion (…) L’opinion ne pense pas ; elle
traduit des besoins, en connaissances (…) On ne peut rien fonder sur l’opinion :
il faut d’abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter ».

5. La foi implique-t-elle une démission de la raison ?

La croyance en Dieu relève de la foi qui a pour siège le cœur. La foi est
la confiance absolue que l’homme place en Dieu au delà de toute justification
rationnelle ou morale. Par contre, la raison se préoccupe d’accéder à des
connaissances objectives, argumentées et justifiables. Partant de ces
définitions, il semble, qu’il y aurait à priori une différence, voire une
exclusion entre foi et raison. Cependant, la question du rapport entre foi et
raison doit être pensée en termes de fusion, de complémentarité, de
solidarité ; bref d’interdépendance. En réalité, la philosophie et la religion
sont interdépendantes : la raison a besoin de la foi et réciproquement la foi
de la raison. Donc, il ne faut pas les dissocier, il ne faut pas les voir comme
deux approches opposées. Il faut les penser dans la dépendance et la
complémentarité. Car, la raison peut éclairer la foi et la rendre solide. Mais,
pour ce faire, retenons avec Nicolas Malebranche (philosophe français,
1638-1715) qu’il faut : « croire d’abord, ouvrir son cœur à Dieu, ensuite
convoque la raison pour éclairer le dogme ».
Comme le prêchait le docteur de l'Église latine Saint AUGUSTIN (354-
430) : Crois et tu comprendras ; la foi précède, l'intelligence suit. La raison
joue un rôle considérable dans l’approfondissement da la croyance, dans
l’orientation de celle-ci car l’usage de la raison et le questionnement

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philosophique ne sont pas interdits dans la religion. C’est plutôt le contraire
qu’il faut éviter car une telle attitude conduit souvent au fanatisme, c'est-à-
dire à une croyance aveugle qui n’est pas éclairée par l’intelligence, le savoir,
le raisonnement. Dieu Lui-même refuse le fanatisme et demande à l’homme
de le connaître, de réfléchir sur Lui avant de L’adorer. Dans le Coran, Il ne
cesse de dire qu’Il s’adresse aux êtres doués de raison. C’est sans nul doute
ce que le philosophe arabe Ibn Rushd dit Averroès (1126-1198) a compris
lorsqu’il déclare dans son texte intitulé : l’Accord de la religion et de la
philosophie : « que la loi divine invite à une étude rationnelle et
approfondie de l’univers, c’est ce qui apparaît clairement dans plus d’un
verset du Livre de Dieu (le Bénit, le Très haut). Lorsqu’il dit par exemple :
tirez enseignement de cela, Ố vous qui êtes doués d’intelligence ». Ce qui
veut dire que la foi n’exclut pas la connaissance, l’esprit critique dans la
mesure où elle ne se renforce véritablement que grâce à l’éclairage de
l’entendement, du raisonnement philosophique. Alors, on tient ferme que la
vraie religion a besoin de la démonstration philosophique qui est
avantageuse, bénéfique pour tout croyant.
Mais il faut savoir aussi que la philosophie à elle seule est aveugle. Elle
doit être complétée par la foi si non elle conduit à l’athéisme. Or l’athée ce
qu’il ne comprend pas c’est que la raison a des limites que seule la foi peut
compléter. D’ailleurs, un tel comportement où l’homme ne croit qu’à la raison
est un excès de confiance qui est bannie dans la religion. Le philosophe doit
comprendre qu’il y a des domaines où la démonstration ne peut valoir et que
seule la croyance permet de les découvrir. C’est ce qu’a compris Pascal
lorsqu’il disait que « la dernière démarche de la raison est de reconnaître
qu’il ya une infinité de choses qui la surpassent ». En effet, philosopher
c’est donc raisonner en invoquant parfois la foi pour mieux percer la
complexité du monde et découvrir la vérité dans le réel. C’est pour quoi il faut

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toujours voir foi et raison non pas dans une séparation ou chacune évolue en
vase clos, dans une indépendance, une autonomie totale mais plutôt dans une
compatibilité ou chacune aide l’autre pour l’équilibre de l’homme et du
monde.
Kant lui pour être plus explicite en la matière, pense le rapport entre
philosophie et religion en termes de prolongement, de continuité. Pour ce
philosophe allemand, la religion est un prolongement comme naturel de
la philosophie. A cet effet, considère-t-il que lorsque la raison épuise ses
ressources, elle doit céder la place à la foi. Ce qu’il confirme avec force
lorsqu’il écrit que « j’ai du abolir la raison pour laisser la place à la foi ».
Ainsi, philosophie et religion ne doivent pas s’exclure mais plutôt s’aider
mutuellement pour passer de l’inconnu au connu. D’ailleurs, le monde actuel
doit se garder de deux esprits : la raison sans la foi et la foi sans la raison.
Dans la mesure où ces deux attitudes sont négatives, voire dangereuses pour
l’humanité, pour la stabilité du monde moderne. Gottfried Wilhelm Leibniz
(philosophe et mathématicien allemand 1646-1716) est très clair à ce sujet,
car dit-il que « Dieu nous a doté de deux lumières : la raison et la foi. Mais,
il nous interdit de privilégier l’une au détriment de l’autre ». Et, Pascal n’a
pas dit autre chose lorsqu’il écrit : « Deux excès sont à éviter : exclure la
raison et n’admettre que la raison ». Ainsi, il invite l’homme à associer
l’interrogation philosophique à la religion. Car, comme dirait le Professeur
Souleymane Bachir DIAGNE : la foi sans la raison conduit au fanatisme, la
raison sans la foi à l’athéisme.

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