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Introduction : En 1973, Alain Peyrefitte écrit un livre au titre prémonitoire « Quand la Chine s’éveillera… Le monde
tremblera ». Il met alors en évidence les avantages extraordinaires de l’Empire du Milieu. 50 ans plus tard, la Chine est
une puissance qui a « la capacité à imposer et à ne pas se laisser imposer » (Raymond Aron) et elle n’est pas au Milieu
mais bien au cœur des enjeux économiques et géopolitiques de la planète. Son leader, Xi Jinping rêve de faire de la
Chine la première puissance mondiale dans l’ensemble des domaines pour 2049. Espace, mers et océans sont des
théâtres d’affirmation de la puissance chinoise.
Les débuts de l’appropriation de la Mer de Chine : L’Empire du Milieu n’a jamais été une grande puissance navale. Si
Mao ambitionne dès 1949 de changer les choses, la Marine reste le parent pauvre de l’armée Populaire de Chine, qui
s’est construite pendant la guerre civile et la guerre sino-japonaise. L’aide soviétique permet de mettre en place un
embryon de Marine mais l’incapacité de faire face à la puissance américaine dans le Pacifique et en mer de Chine
conduit la République Populaire à concentrer ses efforts et ses conquêtes sur le continent. Malgré tout, les Chinois
s’emparent des îles Paracel en 1974. Deng Xiaoping, qui dirige la Chine à partir de 1978, décide d’augmenter fortement
le budget de la Marine dans le cadre des « Quatre modernisations », sa grande politique de développement de la
Chine. Le nouveau dirigeant chinois cherche ainsi à protéger les mers proches, face à la présence des États-Unis et
dans le cadre de l’ouverture de la Chine à la mondialisation. La stratégie navale chinoise se limite souvent à la défense
côtière.
L’affirmation de la puissance navale chinoise : En 1986, la stratégie de défense côtière est abandonnée au profit d’une
défense navale au large qui implique le développement d’une marine de haute mer puissante. La Chine développe
rapidement une marine moderne : 100 000 tonnes en 1986, 847 000 tonnes en 2008, date à laquelle la Chine devient
la 3e puissance navale au monde, puis 1 200 000 tonnes en 2016. La Chine est alors la deuxième puissance navale au
monde. Dans les années 80, la marine chinoise prend progressivement possession des îles Spratleys et de leurs
ressources en hydrocarbures. En 1988, la décision chinoise d’installer une station météorologique sur ces îles
engendre un conflit avec le Vietnam qui coûte la vie à 140 soldats vietnamiens. Cette appropriation montre la stratégie
régionale développée par la Chine : assurer la présence chinoise dans l’espace fermé qui va de la Mer Jaune à la mer
de Chine méridionale et la Mer de Chine Orientale. Il s’agit de dissuader tout adversaire potentiel d’intervenir dans un
conflit dans cet espace. La Chine resserre aussi son étau autour de Taïwan, ancienne île chinoise de Formose dans
laquelle se sont réfugiées les troupes nationalistes après la guerre civile et dont la République Populaire de Chine
ambitionne la reconquête.
Une rupture des équilibres géopolitiques : l’affirmation de la puissance spatiale chinoise bouleverse totalement les
équilibres issus de l’après Guerre Froide et illustrés par l’ISS : une hyper puissance américaine, un savoir-faire russe et
des compétences européennes dans le spatial civil. Lancé dans un conflit économique et géopolitique avec la Chine,
le président Trump a relancé la course à la Lune et vers Mars afin de réaffirmer l’hégémonie contestée des États-Unis.
De leur côté, les Européens ont développé Ariane 6, un lanceur de satellites plus économe. À fin de limiter tout risque
d’espionnage, les États-Unis ont interdit toute collaboration scientifique spatiale avec la Chine.
Vers une guerre des étoiles ? En décembre 2019,2019 : Donald Trump crée la sixième branche des forces armées
américaines, the United States Space Force, chargées de la doctrine spatiale, du personnel, du matériel. Là encore, les
États-Unis répondent à la logique d’organisation des forces spatiales chinoises qui sont regroupées avec les forces
cyber dans une branche militaire, la Force de soutien stratégique de l’Armée Populaire de Chine. Pour la Chine, la
conquête spatiale est pensée pour pouvoir infliger des dommages majeurs dans un conflit global. Malgré tout, cette
organisation militaire ne doit pas masquer que la conquête spatiale vise avant tout des retombées économiques pour
la Chine. L’ouverture envisagée de la station spatiale chinoise aux scientifiques du monde entier vise à développer le
soft power chinois.
Une puissance incomplète : la Chine possède de nombreux éléments constitutifs d’une puissance mondiale :
domination de l’économie, puissance politique et militaire, puissance scientifique et technologique permettant le
développement d’un programme spatial majeur. En termes de hard power, la Chine est incontestablement devenue
une grande puissance. Cependant, de nombreuses limites rendent cette puissance incomplète. La politique intensive
d’investissement dans le cadre des nouvelles routes de la soie a provoqué la réaction de nombreux états qui dénoncent
la politique impérialiste de la Chine. D’autre part, la nature même du régime chinois, militaire et dictatorial, est sans
doute le frein majeur au développement du soft power chinois. Enfin, le vieillissement accéléré de la population ainsi
que le ralentissement de l’économie depuis 2010 laissent craindre un recul de la capacité d’investissement de la Chine,
qui ne pourrait alors financer ses projets spatiaux et maritimes.
Conclusion : Débutées dès le début de la République Populaire de Chine, les conquêtes des océans et de l’espace ont
pris un véritable essor après le décollage économique de la Chine des années 80. D’abord puissance spatiale et
maritime régionale, la Chine, depuis 2016, sous l’impulsion de Xi Jinping, envisage ouvertement de devenir la première
puissance mondiale. Pour ce faire, maîtriser les océans et dominer l’espace sont indispensables. Mais en agissant de
la sorte, la Chine se trouve en concurrence directe avec la grande puissance mondiale les États-Unis, ouvrant un cycle
de confrontations géopolitiques, économiques.