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5-6 mars 2020 | Fès, Maroc

Conférence Internationale sur l’Attractivité


Régionale pour un Développement Durable et
Inclusif

DOCUMENT DE SOUTIEN A LA DISCUSSION

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Préambule
L'objectif général de la conférence est de discuter et de partager les bonnes pratiques en matière de politiques
d'attractivité régionale et de leur mise en œuvre. La première session se focalise sur les politiques d’attractivité,
en donnant la parole aux représentants nationaux et régionaux pour discuter de leurs stratégies pour attirer les
investisseurs, les talents et les visiteurs, et du rôle des autorités nationales notamment pour soutenir les politiques
d'attractivité dans des territoires très divers. La deuxième session examine le « comment » de l’attractivité
régionale - les différents outils (indicateurs, mécanismes de gouvernance, infrastructures/financement, etc.) pour
mettre en œuvre des stratégies d'attractivité intégrées, cohérentes et coordonnées.

Cette rencontre doit permettre de construire un dialogue autour des bonnes pratiques en matière
d’attractivité régionale entre représentants nationaux et régionaux marocains, représentants des pays et régions
membres de l’OCDE, agences de développement économique, bailleurs, ainsi que tous les acteurs et ‘cibles’ des
stratégies d’attractivité - tels que des entreprises, des chercheurs, des opérateurs, etc.
L’Association des Régions du Maroc (ARM) s’est inscrite dans une démarche active de soutien à la réforme de
la régionalisation avancée et des politiques qui touchent le développement territorial. Elle mobilise ses membres
pour le renforcement des capacités et le partage d’experience. L’ARM a inscrit cette volonté dans un partenariat
avec l’OCDE sur le thème de l’attractivité régionale pour un développement durable et inclusif qui se matérialise
aujoud’hui dans l’organisation de la conférence accueillie à Fès. Cet événement bénéficie de l’appui de la Direction
Générale des Collectivités Locales du Ministère de l’Intérieur du Maroc.*

L’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) est un forum mondial et un pôle


d’échange de connaissances axé sur « des politiques meilleures pour une vie meilleure ». L’OCDE réunit des pays
membres et partenaires, du monde entier, qui travaillent en étroite collaboration à l’échelle nationale, régionale et
locale sur les problématiques internationales clés de notre temps. Le Maroc est l'un des premiers pays, et le seul
au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, à bénéficier d'un Programme pays de l'OCDE, un outil innovant permettant
à certaines économies partenaires de tirer profit de l’expertise et des bonnes pratiques de l’Organisation, de
soutenir leurs institutions et de renforcer les capacités pour des réformes publiques réussies dans un ensemble
varié de domaines de l’action publique.

Le Dialogue Maroc – OCDE sur les politiques de développement territorial s’inscrit dans le contexte de l’adoption,
depuis 2015, de la Réforme de « régionalisation avancée » au Maroc qui œuvre à inscrire une dynamique
territoriale fondée sur un rééquilibrage des compétences et des ressources entre l’État central et les collectivités
territoriales afin de mieux répondre aux attentes des citoyens et aux enjeux économiques, sociaux et
environnementaux. Les Assises nationales de la régionalisation avancée qui se sont tenues les 20 et 21
décembre 2019 ont marqué une étape importante dans la coordination Etat-Régions et abouti à la signature d’un
Cadre d’orientation pour la mise en œuvre de l’exercice des compétences validé tant par les Régions que par les
Ministres concernés par les questions territoriales.

Un premier Dialogue Maroc-OCDE sur le développement territorial, qui a bénéficié de l’implication des parties
prenantes clés, dont l’ARM, a fourni ses conclusions à haut niveau en 2018. Dans le contexte de cette réforme
majeure, différentes compétences ont été allouées aux régions et un rôle important a été octroyé aux Conseils
Régionaux pour l’élaboration et le suivi des programmes de développement régional (PDR), en cohérence
avec les orientations de l’État et en concertation avec les différents acteurs publics et privés du territoire.
Le législateur a ainsi conféré aux Régions du Royaume des compétences propres dans le domaine du
développement régional, de l’aménagement du territoire et de la conception et mise en œuvre des PDR ainsi que
des compétences partagées et transférées. Cet ensemble place les Régions en tant que partenaires majeures
du gouvernement pour l’attractivité régionale durable et inclusive.

* L’ARM est par ailleurs engagée, aux côtés de la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) du Ministère de
l’Intérieur, dans un Dialogue avec l’OCDE sur l’usage des contrats pour le développement régional. Pour information deux
autres engagements lient le Maroc au Comité des Politiques de Développement Régional de l’OCDE : un dialogue sur la mise
en œuvre de la réforme de déconcentration avec les Services du Chef du Gouvernement et le Secretariat Général à la réforme
de l’administration du Ministère de l’Economie et des Finances ; et un double dialogue avec le Ministère de l’Aménagement
du Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville, représentant du Maroc au RDPC, sur la
politique nationale urbaine et sur l’Observatoire des dynamisque territoriale en lien avec les politiques d’attractivité régionale.

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DOCUMENT DE SOUTIEN à LA DISCUSSION


sur L’ATTRACTIVITE REGIONALE POUR un
DEVELOPPEMENT DURABLE et INCLUSIF

Contacts :

Claire Charbit, Cheffe de l’Unité Dialogues Territoriaux et Migration ; Responsable du Dialogue territorial
Maroc-OCDE, Centre pour l’Entreprenariat, les PME, les Régions et les Villes, OCDE –
claire.charbit@oecd.org

Martin Lestra, Analyste des politiques publiques, Centre pour l’Entreprenariat, les PME, les Régions
et les Villes, OCDE – martin.lestra@oecd.org

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Attractivité et développement territorial


Diverses mégatendances, dont la globalisation et les changements climatique, démographique et
technologique, caractérisent l’incertitude de la période actuelle en offrant de nouvelles opportunités tout
en risquant d’accroitre les disparités territoriales. Celles-ci ont récemment, et dans divers pays membres
ou pas de l’OCDE, suscité la manifestation de « géographies du mécontentement », notamment dans
des territoires qui se perçoivent comme « ne comptant pas ».1 L’objectif d’un développement régional
équilibré, durable et inclusif dans un contexte globalisé s’inscrit dès lors au cœur de l’action publique, et
concoure à définir des politiques qui cherchent tout à la fois la réduction des inégalités, l’exploration de
niches de développement économique encore peu visibles à l’international et la préservation de la
résilience environnementale.2 Au Maroc, lors de la Fête du Trône, le 29 juillet 2019, Sa Majesté le Roi
Mohammed VI a ainsi défini les fondements d’un nouveau modèle de développement pour le Maroc qui
permette de « réduire les inégalités sociales et les disparités spatiales ».

Pour faire face à ces nouveaux défis, les Etats peuvent compter sur le rôle croissant des acteurs
infranationaux, au premier rang desquels les Régions, qui disposent des compétences pour soutenir le
développement économique, durable et inclusif de leur territoire. Dans le cadre d’une gouvernance pluri-
niveaux et au moyen d’outils de politiques publiques (indicateurs, financements, collaboration, etc.) en
évolution, les acteurs publics et privés, nationaux et régionaux, métropolitains et ruraux, peuvent agir
pour renforcer l’attractivité inclusive et durable des territoires et y accueillir investisseurs, talents et
visiteurs de manière pérenne. Les politiques d’attractivité doivent permettre aux Régions de tirer profit
de la mondialisation sur la base de leurs atouts spécifiques ; et aux Etats de préserver la cohésion
nationale et d’éviter les "jeux à somme nulle" en coordonnant les diverses stratégies régionales.

L’attractivité est intrinsèquement liée aux territoires. Renforcer l’attractivité régionale constitue ainsi une
stratégie clé pour répondre aux inégalités territoriales dans le contexte de la mondialisation et des
mégatendances qui l’accompagnent. En effet, dans ce contexte inédit, on observe un taux de chômage
à 5.5% en moyenne des pays de l’OCDE, au plus bas depuis vingt ans, et qui impose une concurrence
forte des entreprises et des territoires qui cherchent à attirer les talents. L’impact de la digitalisation en
cours sur ce taux de chômage reste incertain mais ne se manifestera pas de manière homothétique sur
les divers territoires. Les « cartes » de la localisation future sont rebattues et le risque climatique qui
affecte particulièrement certains territoires (notamment sur le littoral) peuvent voir émerger l’attractivité
de nouvelles zones et compromettre la « suprématie » métropolitaine existante. Il y a là une fenêtre
d’opportunité pour rattraper le retard d’attractivité de certains territoires ou développer des stratégies
régionales plus intégrées à l’intérieur des métropoles comme entre les territoires, notamment en
favorisant de nouveaux liens urbain-rural, l’économie circulaire, etc. Concernant les talents, on remarque
d’ailleurs que les préoccupations environnementales et d’inclusion peuvent influer sur leur choix de
localisation, de manière parfois plus incitative que le seul salaire. Certains jeunes, en réinvestissant des
territoires très ruraux d’Europe - et notamment de montagne - non seulement les font revivre, mais y
apportent une vision innovante du développement plus connectée à la mondialisation en poussant à la
connexion numérique, à l’acceptation des migrants, ressource humaine-clé dans des contextes de
dépopulation, et à la préservation des ressources.

À un autre niveau, on peut aussi noter que les périodes de transition engendrent l’incertitude non
seulement sur ce qui sera à terme un « bon choix », mais aussi plus radicalement sur la pertinence des

1 Perspectives régionales de l'OCDE 2019, http://www.oecd.org/fr/regional/oecd-regional-outlook-2019-9789264312838-en.htm); Andres


Rodríguez-Pose (2018), "The revenge of the places that don’t matter (and what to do about it)", Cambridge Journal of Regions, Economy
and Society 11(1)
2 Ces orientations ont été soulignées dans la « Déclaration d’Athènes », lors Réunion ministérielle de l’OCDE sur les politiques de

développement régional « Les mégatendances : forger un avenir meilleur pour les régions,
les villes et les zones rurales », Athènes (19 et 20 mars 2019) - https://www.oecd.org/regional/ministerial/RDPC-Ministerial-Declaration-
FR.pdf. L’ensemble des documents de cette réunion ministérielle sont disponibles ici : https://www.oecd.org/regional/ministerial/

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critères d’évaluation de ce choix. Comme nul ne sait précisément aujourd’hui quels seront les critères
dominants de l’excellence territoriale demain, il est possible de faire preuve d’anticipation en préservant
la « biodiversité régionale » et les atouts, notamment environnementaux et culturels, de lieux qui ne
paraissent pas les plus adaptés aujourd’hui aux choix de localisation de la majorité des investisseurs,
des talents et des visiteurs. Ainsi, la mesure du bien-être régional développée par l'OCDE3 saisit les
facteurs matériels objectifs et certaines données subjectives et immatériels - revenus, emploi, logement,
éducation, santé, environnement, sécurité, engagement civique et gouvernance, accès aux services,
communauté et satisfaction de la vie -– caractérisant la qualité de vie et donc l’attractivité que les gens
apprécient dans leur lieu de vie et de travail et qui contribuent à l'attractivité d'une région.4

L’attractivité regionale durable et inclusive : de la réflexion à l’action

Cette note conceptuelle propose des pistes pour l’analyse de l’attractivité régionale, la clarification des
objectifs des politiques et les necessites de gouvernance pour leur mise en œuvre. La première partie
du document présente un cadre intégré d’analyse des « cibles » de l’attractivité – qui comprend
non seulement les investisseurs, mais aussi les talents et les visiteurs. La seconde partie détaille le cadre
d’action proposé par l’OCDE pour agir en faveur de l’attractivité régionale, en s’appuyant sur
l’identification des avantages spécifiques des régions, les données probantes, et développant des
politiques intégrées visant les « cibles » de l’attractivité. La note souligne que les politiques d’attractivité
intégrées ne peuvent se penser sans des mécanismes de gouvernance pluri-niveaux étendus aux
acteurs non-gouvernementaux, monde économique et société civile. Ce cadre d’action montre aussi que
les politiques d’attractivité doivent parfois réconcilier des objectifs qui semblent contradictoires – la
performance économique, l’inclusion sociale et la résilience environnementale Enfin, la note souligne les
projets et outils développés par le Secrétariat de l’OCDE pour soutenir des politiques d’attractivité
dans des régions des pays-membres et des pays-partenaires de l’OCDE.

3 Il ne s’agit pas d’élaborer un indicateur synthétique qui figerait en une moyenne difficile à comprendre ce qu’offre tel ou tel territoire. Il
convient plutôt de comprendre, derrière les moyennes, la variété des situations régionales et leur potentiel à diversifier l’offre qu’elles
adressent aux cibles de leur politique d’attractivité. La base de données de l’OCDE est disponible au lien suivant :
https://www.oecdregionalwellbeing.org/
4 Yann Algan, Clément Malgouyres et Claudia Senik (2020), « Territoires, bien-être et politiques publiques, Les notes du Conseil d’Analyse

Economique, n° 55, Janvier - http://www.cae-eco.fr/IMG/pdf/cae-note055.pdf

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Cadre méthodologique: une vision intégrée de l’attractivité régionale


pour un développement durable et inclusif

L’attractivité ne se résume pas à séduire les investisseurs. Il s’agit également d’attirer - et de fidéliser-
les talents au sens d’une offre de travail, plus ou moins qualifiée, à même de répondre aux besoins des
entreprises, nationales ou étrangères du marché local et d’innover. L’offre territoriale s’adresse aussi aux
visiteurs - touristes motivés par le patrimoine culturel, environnemental ou l’offre de services spécialisés
notamment en termes de santé et bien-être ; participants à des salons professionnels ; résidants
étrangers dans la région, désormais à la recherche de systèmes locaux durables et inclusifs. La section
suivante examine les ressorts de l’attractivité vis-à-vis des investisseurs, des talents et des visiteurs.

Attirer les facteurs clés du développement territorial

Attirer les investisseurs

La décision d'investir dans un lieu particulier dépend en grande partie d’éléments spécifiques à
l'entreprise. Cependant, les caractéristiques territoriales jouent un rôle important dans les décisions
d'implantation des entreprises étrangères. Par exemple, entre 2007-2014, les régions urbaines de
l’OCDE ont concentré environ 50% des sièges des entreprises. Néanmoins, les régions rurales ont
rassemblé jusqu'à 20% des nouvelles entreprises notamment dans le secteur du tourisme (OCDE,
2018).5

Les facteurs d’attractivité sont nombreux et leur importance relative pour les investisseurs varie en
fonction de la situation géographique et du contexte économique et politique du pays d'accueil et
d'origine, ainsi que du secteur concerné. Par exemple, les investissements dans le secteur manufacturier
sont souvent motivés par les faibles coûts de la main-d'œuvre et du foncier, alors que les industries de
service recherchent une main-d'œuvre qualifiée et/ou la proximité des clients.

On observe aussi une relation positive entre flux des Investissements Directs Étrangers et la bonne
gouvernance, l'application des droits de propriété et le développement humain. La proximité physique ou
culturelle, telle qu'une langue commune ou des liens historiques, entre le pays d'origine et le pays
d'accueil a aussi un effet positif sur l'investissement, tout comme les accords commerciaux régionaux.
Enfin, les incitations fiscales ont un effet limité sur les investissements : l’OCDE a montré que la réaction
des investisseurs à une charge fiscale plus faible - par rapport au manque à gagner - est limitée (OCDE,
2015).6 Les investisseurs s’ils tiennent compte des coûts fiscaux et réglementaires, sont aussi disposés
à accepter une charge fiscale plus élevée si le pays dispose d'un environnement commercial et de
perspectives macroéconomiques favorables, d'un État de droit, d'une main-d'œuvre hautement qualifiée
et d'une stabilité réglementaire.

Ainsi dans leur stratégie de sélection infranationale, les investisseurs tiennent compte des
caractéristiques nationales, mais aussi de facteurs propres aux régions, tels que:

- les infrastructures et les services


- l’accessibilité et proximité géographie (en particulier avec la région d'origine)
- l’adaptation de la main-d'œuvre disponible localement à leurs besoins (en termes de qualification et/ou
de coût)
- les politiques régionales d'investissement

5 OECD (2018), Rural 3.0 – A framework for rural development, Policy Note
6 OECD (2015), Policy Framework for Investment - http://dx.doi.org/10.1787/9789264208667-en. L'OCDE a identifié 12 domaines de
politique générale qui affectent les flux d'investissement. Il s'agit de la politique d'investissement, de la promotion et de la facilitation des
investissements, de la concurrence, des échanges, de la fiscalité, du gouvernement d'entreprise, de la finance, des infrastructures, du
développement des ressources humaines, des politiques visant à promouvoir un comportement responsable des entreprises, de
l'investissement en faveur de la croissance verte et de la gouvernance publique.

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- les effets d’agglomération (présence d’autres investisseurs, de concurrents, de clients et fournisseurs


étrangers)

Ces divers facteurs d’attractivité semblent souligner les effets « auto-renforçant » des concentrations
urbaines (ou périphériques des grandes villes) dans la mesure où ils favorisent la sélection des pôles
urbains et leur périphérie proche. En particulier, les investisseurs étrangers sont sensibles à l’effet
« cluster » et généralement attirés par des territoires où d'autres investisseurs sont déjà présents - la
présence de concurrents, de clients et de fournisseurs établis du même secteur est considérée comme
limitant le risque d’investissement dans la localisation concernée (Dunning, Lundan and Elgar, 2008 ;
Copenhagen Economics, 2006 ; OCDE, 2017 ; Moretti, 2012). 7 Cela corrobore les tendances des
disparités régionales en matière d'IDE : les régions où les niveaux d'investissement sont déjà élevés
attirent davantage d'IDE que les régions moins dotées. Les régions en tête ont également tendance à
présenter d'autres caractéristiques qui attirent l'IDE, notamment une main-d'œuvre plus qualifiée et plus
productive, de meilleures infrastructures et des niveaux plus élevés de dépenses de R&D.

Les autorités régionales ont un rôle à jouer dans ce contexte, même lorsqu’elles ne disposent pas d’une
compétence exclusive en matière de développement économique et d’investissement. Qu’il s’agisse
d’actions de soutien aux infrastructures par des politiques d’investissement appropriées ou de soutien à
la formation, leur action pour faire exister leur territoire aux yeux des investisseurs potentiels est clé. Ces
actions doivent aussi s’appuyer sur des dispositifs de communication et de mise à disposition
d’indicateurs et d’informations publiques, loin des classements subjectifs standards, pour favoriser la
connaissance des qualités du territoire à l’étranger. L'une des raisons des effets d'agglomération, en
particulier dans les pays en développement, est l'absence d'informations publiques facilement
accessibles aux investisseurs (OCDE, 2017)8 Les agences régionales de promotion des investissements
peuvent donc jouer un rôle important dans la communication d'informations sur l'environnement des
entreprises et les possibilités d'investissement. Celles-ci ne concernent pas seulement les
caractéristiques économiques des territoires mais de plus en plus les caractéristiques de bien être qui
concourront non seulement à décider du choix de localisation des employeurs étrangers mais aussi de
la stabilité de ce choix dans le temps. En retour, et pour favoriser le développement inclusif et durable,
les investisseurs doivent être incités à respecter les normes environnementales et sociales.9

Attirer les talents

Une grande partie de ce qui attire les talents est lié au territoire : le marché du travail, l’économie
régionale, l'accès aux services publics, la qualité de vie, ainsi que d’autres facteurs culturels,
démographiques et environnementaux. Des études montrent que c’est dans les zones métropolitaines
que sont créés la majorité des emplois, et que les travailleurs qualifiés se concentrent de plus en plus

7 Copenhagen Economics (2006), Study on FDI and regional development, prepared for the European Commission, Directorate-General
for Regional Policy, http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/studies/pdf/fdi2006.pdf ; Dunning, J., S. Lundan and E. Elgar
(2008), Multinational Enterprises and the Global Economy, Second Edition, Edward Elgar Publishing, Inc.,
https://dipiufabc.files.wordpress.com/2015/06/dunning_multinational-enterprises-and-global-economy.pdf; Moretti, E. (2012), The New
Geography of Jobs, Houghton Mifflin Harcourt Publishing Company, New York, https://www.scribd.com/read/249307844/The-New-
Geography-of-Jobs (accessed on 08 August 2018); OECD (2017), “Issues Note: Making Investment Promotion Work for Sustainable
Development in the Southern Mediterranean: Focus on Incentives and Territorial Development”, Regional seminar on investment promotion:
focus on incentives and territorial development, - http://www.oecd.org/mena/competitiveness/REPORT-Regional-EU-OECD-IPA-
Workshop-Paris-201710.pdf
8 OECD (2017), “Issues Note: Making Investment Promotion Work for Sustainable Development in the Southern Mediterranean: Focus on

Incentives and Territorial Development”, Regional seminar on investment promotion: focus on incentives and territorial development
9 Principes Directeurs de l’OCDE pour les entreprises multinationales : Les Principes directeurs sont des recommandations que les

gouvernements adressent aux entreprises multinationales afin de favoriser une conduite raisonnable des entreprises dans les domaines
des relations professionnelles, des droits de l'homme, de l'environnement, de la fiscalité, de la publication d'informations, de la lutte contre
la corruption, des intérêts des consommateurs, de la science et de la technologie, et de la concurrence. Ces Principes font l’objet d’un
rapport annuel, disponible au lien suivant : https://www.oecd.org/fr/gouvernementdentreprise/mne/

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dans des régions particulières (OCDE, 2018)10 – reflet des effets d'agglomération. En effet, les migrants
étrangers très qualifiés ont tendance à s'installer dans des régions où la population autochtone très
qualifiée est elle aussi importante, principalement dans les zones métropolitaines (OCDE, 2018).11 Par
ailleurs, les lieux où les salaires sont plus élevés et les possibilités d'emploi plus nombreuses attirent
également les travailleurs de tous les niveaux de qualification, conduisant à ce que deux tiers des
migrants dans les pays de l’OCDE se localisent dans des régions métropolitaines. Dans les économies
en développement et émergentes, il semblerait que les travailleurs privilégient les régions où les
entreprises étrangères et le commerce international sont les plus florissants (Moretti, 2012).

Cependant, les grandes villes présentent aussi des difficultés d’intégration compte tenu du prix du
logement poussant les salaires modestes à se situer à la périphérie des cœurs urbains, et contribuant,
si les solutions de transports publics sont insuffisantes, à l’étalement urbain, l’empiètement sur les terres
agricoles, la congestion et la pollution.12 De fait, les salaires plus élevés ne suffisent pas à eux seuls à
attirer et à retenir les talents et les avantages non pécuniers semblent d’ailleurs être relativement plus
importants pour les personnes les plus qualifées (Tuccio, 201913). La qualité de vie et la disponibilité des
commodités sont des facteurs importants dans les décisions de localisation des travailleurs hautement
qualifiés (OCDE, 2016).14 De bons services publics (en termes d’éducation et de santé en particulier),
un climat tempéré, des aménités culturelles et de loisirs, ainsi que la diversité de la population, semblent
tous avoir un effet positif sur l'attraction et la rétention des travailleurs hautement qualifiés, qui peuvent
être prêts à payer plus cher, en termes de coût de la vie, pour ce type d’environnement. De plus, ces
facteurs d’attractivité doivent être différenciés selon les populations ciblées. Une étude sur l'attractivité
régionale dans l'UE a ainsi révélé que les jeunes travailleurs ont tendance à privilégier les lieux dotés
d'infrastructures connectés alors que les travailleurs d'âge moyen sont plus attirés par les régions dotées
culturellement (ESPON, 2013).15

Enfin, de nombreux autres facteurs peuvent influer sur l'attrait d'un lieu plutôt qu’un autre auprès des
talents. Pour les migrants internationaux, la présence de communautés existantes de leur pays d'origine
est un facteur d'attractivité, car les communautés de la diaspora peuvent contribuer à atténuer les
difficultés culturelles, linguistiques et administratives initiales (OCDE, 2018).16 La majorité des migrants
permanents vers les pays de l'OCDE (40 %) accompagnent ou rejoignent des membres de leur famille
ou de leur communauté (OCDE, 2018). 17 La capacité d'une commune à intégrer les familles peut
contribuer à son attrait auprès des nouveaux arrivants et à son succès dans la rétention des talents.
Réciproquement, la capacité des territoires à garder le lien avec leur diaspora à l’étranger peut constituer
un levier important d’internationalisation du fait du soutien des émigrés à leur communauté d’origine,
comme en attestent les dispositifs mis en place au Maroc ou au Mexique.

Ainsi, différents territoires présentent différents atouts à offrir à différents talents. Si les régions
métropolitaines offrent souvent un meilleur accès aux services et aux équipements, les régions rurales
peuvent également réussir à attirer les talents. Certains travailleurs sont prêts à accepter un salaire moins
élevé pour un coût de la vie réduit et la variété et la qualité de l’environnement naturel qui contribuent

10 Cette étude sur la concentration des travailleurs qualifiés couvre la période 2006-16 et 20 pays-membres de l’OCDE : Job Creation and
Local Economic Development 2018 - Preparing for the Future of Work (OCDE, 2018) – voir http://www.oecd.org/fr/publications/job-creation-
and-local-economic-development-26174979.htm
11 OECD (2018), International Migration Outlook 2018 - http://dx.doi.org/10.1787/migr_outlook-2018-en.
12 Ces résultats très positifs économiquement mais plus difficiles des points de vue social et environnemental ont été illustrés dans le cas

de la métropole de Casablanca – voir le Dialogue Maroc-OCDE sur les politiques de développement territorial - Enjeux et Recommandations
pour une action publique coordonnée (OCDE 2018) – accessible au lien suivant : https://www.oecd.org/fr/pays/maroc/dialogue-maroc-ocde-
sur-les-politiques-de-developpement-territorial-9789264302884-fr.htm
13 Tuccio M. (2019) Measuring and Assessing Talent Attractiveness in OECD Countries, OECD Social, Employment and Migration
Working Papers No,229 https://www.oecd.org/migration/mig/Measuring-and-Assessing-Talent-Attractiveness-in-OECD-Countries.pdf
14 OECD (2016), “Regional Well-Being in OECD Countries”, in OECD (ed.), How's Life in Your Region? Country Factsheets,

http://www.oecd.org/cfe/regional-policy/hows-life-country-facts-united-states.pdf
15 ESPON (2013), ATTREG - The Attractiveness of European regions and cities for residents and visitors, Final Report -

https://www.espon.eu/programme/projects/espon-2013/applied-research/attreg-attractiveness-european-regions-and-cities
16 OECD (2018), International Migration Outlook 2018; OECD (2018), Working Together for Local Integration of Migrants and Refugees -

http://dx.doi.org/10.1787/9789264085350-en.
17 Ibid.

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tous également à la qualité de vie. Dans certains territoires dits « périphériques », on peut aussi observer
que des entreprises très productives ont attiré des travailleurs mieux payés, ce qui a par effet boule de
neige rendu le territoire plus attrayant (OCDE, 2016).18

Attirer les visiteurs

En 2019, les arrivées de touristes dans le monde ont augmenté de près de 4 % par rapport à l'année
précédente (plus d’1,5 milliards), confirmant une décennie d’augmentation du tourisme international
(OCDE, 2020).19 Partout dans le monde, de plus en plus de personnes voyagent vers de plus en plus de
destinations. Les études de l’OCDE (2018 ; 2020)20 soulignent certains facteurs qui contribuent à attirer
les touristes, notamment la qualité des sites culturels, naturels ou autres ; la stabilité politique et la
sécurité publique, les infrastructures de transport, l’accessibilité et la connexion haut débit, la disponibilité
des logements et des services, les informations accessibles sur la destination, le traitement efficace des
visas et des douanes.

Si un site touristique peut être attrayant pour diverses raisons, la qualité du site et de l'expérience sont
cruciales pour les visiteurs. La qualité de l'expérience dépend de nombreux facteurs nationaux et
infranationaux qui affectent directement et indirectement le résultat. Par exemple, les infrastructures
nationales et infranationales sont essentielles pour attirer les touristes et leur permettre de visiter les
territoires. Des transports efficaces et bien connectés jouent un rôle important dans le choix de
destination des visiteurs. Les touristes ont tendance à rechercher des destinations accessibles depuis
leur domicile, et d’où ils pourront facilement visiter plusieurs sites (OECD, 2018).21 Cela signifie que les
lieux dotés d'aéroports internationaux avec des vols fréquents et directs vers les lieux d'origine ont
tendance à attirer le plus de visiteurs. De nombreux pays africains sont ainsi limités dans leur stratégie
d’expansion touristique par le coût des vols internationaux entrants, en raison de l'irrégularité, du manque
de concurrence et de l'importance des redevances (Christie et al., 2014).22

Les Régions peuvent jouer un rôle crucial pour attirer les touristes, notamment en matière
d’infrastructures routières et ferroviaires et de leur connexion multimodale afin de faciliter l'accès des
touristes au-delà des grandes villes. L'accessibilité d'un lieu est un élément central de son
développement en tant que site touristique tout comme la disponibilité de solutions d’hébergement.

Au cœur de l’attractivité auprès des visiteurs figurent ainsi de nombreux éléments communs aux
politiques qui concernent aussi les investisseurs et les talents. Tout d’abord parce qu’une industrie
touristique prospère nécessite à la fois des investissements et des talents (de haut niveau de
qualification, ainsi que des personnes moins qualifiées) dans le secteur: elle est donc directement
sensible aux facteurs qui attirent les entreprises et les travailleurs sur un site. Indirectement, pour ce qui
concernent les clients de l’industrie du tourisme, l’accès à des infrastructures et des services publics
fiables, l’importance de la sécurité, la sensibilité à la réputation et à la promotion territoriales sont autant
d’éléments cruciaux et communs aux trois cibles. Ce constat plaide, comme cela sera développé plus
bas, pour des approches intégrées de l’attractivité régionale.

Des économies d’envergure sont ainsi à exploiter dans la conduite d’une politique d’attractivité et la
gouvernance de sa mise en œuvre auprès des cibles différentes. Mieux intégrer les stratégies visant les
différents acteurs (entreprises, talents et visiteurs) est aussi un moyen de limiter la dépendance à une
activité dominante, par exemple touristique, et aux externalités négatives qui peuvent accompagner la
surconsommation touristique d’un lieu. Il s’agit là, en associant inclusion sociale et qualité

18 OECD (2016), OECD Regional Outlook 2016: Productive Regions for Inclusive Societies - http://dx.doi.org/10.1787/9789264260245-en.
19 OECD (2020), OECD Tourism Trends and Policies 2020
20 OECD (2020), OECD Tourism Trends and Policies 2020; OECD (2018), OECD Tourism Trends and Policies 2018,

http://dx.doi.org/10.1787/tour-2018-en.
21 OECD (2018), OECD Tourism Trends and Policies 2018
22 Christie, I. et al. (2014), Tourism in Africa: Harnessing Tourism for Growth and Improved Livelihoods, Africa Development Forum series,

Washington DC, http://dx.doi.org/10.1596/978-1-4648-0190-7.

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environnementale, de préserver à long terme les atouts touristiques eux-mêmes et la possibilité pour la
population locale de continuer à pouvoir habiter le territoire en question.

De nombreux facteurs contribuent donc à rendre des territoires attractifs pour les investisseurs, les
talents et les entreprises. Les leviers d’attractivité sont multiples et permettent bien souvent d’agir
à la fois en faveur d’une ou plusieurs « cibles » de l’attractivité et d’associer d’autres objectifs
que la performance économique à ces politiques. Ainsi, l’analyse des facteurs d’attractivité doit se
doubler d’un cadre d’action intégré permettant aux acteurs nationaux et locaux, publics et privés,
d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques publiques cohérentes et efficaces, fondées sur la
singularité de chaque territoire et nourries de données probantes.

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Cadre d’action pour territorialiser l’approche de l'attractivité et favoriser


le développement durable et inclusif

Cette section présente le cadre d’action proposé par l’OCDE pour définir et mettre en œuvre des
politiques d’attractivité régionale cohérentes et efficaces. En effet, l’attractivité est un sujet complexe,
multidimensionnel et qui requiert l’intervention de nombreux acteurs publics et privés à différentes
échelles. Pour agir sur les leviers de l’attractivité, il convient tout d’abord de les identifier, notamment au
moyen de données probantes. Pour définir les politiques appropriées pour soutenir l’attractivité régionale,
il convient par ailleurs d’élaborer des stratégies communes aux acteurs du territoire, en concertation avec
les acteurs nationaux, et les mettre en œuvre au moyen de dispositifs de gouvernance pluri-niveaux
adaptés qui incluent aussi l’expérience du monde économique et universitaire et de la société civile.
Ainsi, il n’existe pas un modèle unique et optimal de stratégie d’attractivité régionale, mais plutôt de
nombreuses bonnes pratiques que cette conférence permettra de partager : initiatives régionales et
nationales tout comme outils et mécanismes appropriés pour leur mise en œuvre coordonnée.

S’appuyer sur les atouts et les besoins des régions


Pour développer l’attractivité d’une région, il convient de savoir ce qui est localement attractif et vis-à-vis
de qui. Les autorités régionales sont particulièrement bien placées pour élaborer les plans d’action pour
l’attractivité compte tenu de leur connaissance du terrain. Les régions sont en effet un échelon
administratif et spatial approprié pour identifier les atouts et les besoins des territoires. Couvrant des
zones métropolitaines et rurales, littorales et d’hinterland, montagneuses, etc., les régions ont une vision
large de leurs forces et de leurs contraintes, y compris des grandes agglomérations urbaines qui
concentrent souvent l’essentiel des moteurs du développement économique. En 2016, les
gouvernements locaux et régionaux sont responsables de 40% des dépenses publiques et de 57% des
investissements publics dans les pays de l'OCDE (OCDE, 2019). 23 Ils contribuent aux politiques
susceptibles d’affecter l’attractivité telles que l’éducation, la santé, le logement, le développement
économique et la protection sociale. Les régions du fait de leurs compétences propres et partagées
mettent aussi en œuvre les politiques de promotion et d’attraction des investisseurs, des talents et des
visiteurs au niveau régional et local.

Les gouvernements nationaux ne sont pas en reste et des discussions préalables au sein du Comité des
politiques de développement régional (RDPC) de l’OCDE ont permis de partager différents exemples.
Ainsi, en Grèce, l’attractivité régionale est essentielle pour maintenir le flux de visiteurs, lutter contre la
fuite des cerveaux et attirer les investissements directs étrangers, afin de contrebalancer les effets
négatifs de la crise qui a creusé les disparités entre territoires et entre habitants. En Suisse, l’attractivité
régionale est un facteur de renforcement des systèmes régionaux d’innovation et de soutien à la cohésion
et à la compétitivité tant au niveau fédéral que cantonal. Le projet Pilote d'Immigration du Canada
Atlantique et le Programme d’Immigration en Australie sont des exemples de stratégies pluri-niveaux
visant à attirer des talents étrangers afin d'améliorer la productivité et répondre aux besoins en main
d’œuvre qualifiée des entreprises, en particulier dans les régions non urbaines.

Des politiques d’attractivité fondées sur des données probantes


Les pays et autorités infranationales sont à la recherche d’indicateurs pour comprendre pourquoi les
talents, les entreprises et les investisseurs se localisent dans une région spécifique et les bonnes
pratiques de politiques pour renforcer l'attractivité de tel ou tel territoire de manière inclusive et durable.
Par exemple, l’examen par l'OCDE des initiatives statistiques pour mesurer le tourisme à l'échelon
infranational révèle que les données du tourisme ne sont pas toujours disponibles, standardisées et
partagées à l’échelon infranational. Par ailleurs, les indicateurs existants au niveau infranational sont
souvent partiels – les régions et les autorités nationales ont besoin, au-delà des indicateurs de croissance
économique, d’une connaissance plus fine du développement territorial – notamment pour s’assurer qu’il
23OECD (2019), Regional Outlook 2019: Leveraging Megatrends for Cities and Rural Areas - http://www.oecd.org/fr/regional/oecd-regional-
outlook-2019-9789264312838-en.htm. L’ensemble des données pour les pays-membres de l’OCDE sont disponibles au lien suivant :
https://www.oecd.org/regional/regional-policy/Subnational-governments-in-OECD-Countries-Key-Data-2018.pdf

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sera durable et inclusif. Disposer d’un observatoire des dynamiques territoriales permettant de servir de
référence commune à tous les acteurs de l’attractivité territoriale, au niveau national et régional, et
intégrant des informations utiles en ce qui concerne les entreprises, les talents et les visiteurs constitue
ainsi un levier très utile24.

Pour comprendre la position des régions dans la mondialisation et concevoir des stratégies d'attractivité
territoriale efficaces et durables, il est aussi nécessaire de disposer des données sur la place des régions
dans la mondialisation. L’attractivité est souvent mesurée à l’échelle d’un pays, avec des indicateurs qui
tiennent compte, entre autres, de la manière dont les entreprises et les personnes perçoivent, opèrent et
se déplacent au-delà des frontières nationales. Ces cadres d’analyse négligent souvent l’impact
hétérogène que la mondialisation peut avoir dans différentes régions d'un même pays et la variété des
dynamiques d’attractivité à l’œuvre à l’intérieur d’un même pays. 25 De plus, l’attractivité se mesure
souvent grâce aux constats subjectifs effectués par les entreprises en matière de localisation.26 Ces deux
tendances concourent à maintenir une vision de l’attractivité qui néglige le potentiel des dynamiques et
synergies territoriales, ainsi que la variété des leviers disponibles, afin de comprendre le rôle et le
potentiel des divers types de régions dans une économie mondialisée. Afin de répondre à ce besoin,
l’OCDE, appuyée par la France, a développé une nouvelle méthodologie rassemblant un ensemble
d’indicateurs visant à mesurer le niveau « d’internationalisation » des régions de l’OCDE (au sens
infranational) au moyen de quatre piliers: les connexions d’infrastructure, les connexions humaines, les
connexions de connaissance et les connexions d’affaires. Si l’ensemble des indicateurs n’est pas
toujours disponible de manière infra nationale, comparative et sur plusieurs années, ces données
permettent cependant de positionner les régions dans la mondialisation et de les aider ainsi que les
gouvernements nationaux à identifier leurs atouts et leurs marges de progression pour attirer
investisseurs, talents et visiteurs. Par exemple, les indicateurs sur les connexions d’affaires permettent
de souligner le rôle des entreprises multinationales sont le moteur de la mondialisation, ainsi que la
fragmentation internationale de la production qui en découle. En addition aux données nationales sur les
chaînes de valeur mondiales et le commerce à valeur ajoutée dont l’OCDE dispose, cette base de
données permet de collecter des données régionalises sur les importations et les exportations de biens,
la part de l’économie régionale dans les secteurs des biens échangeables et les niveaux d’import/export)
et la position de l’investissement, selon la disponibilité des données. L’ensemble de ces données va
nourrir le travail de l’OCDE auprès de régions et gouvernements nationaux volontaires à ce sujet.27

Le dialogue au cœur de la mise en œuvre concertée des politiques


d’attractivité régionale
Les modes de gouvernance conditionnent la réussite des politiques d’attractivité, multi-acteurs, à la fois
pour les définir et les mettre en œuvre. La politique d’attractivité doit s’appuyer sur la gouvernance pluri-
niveaux de l’action publique. En effet, s’il a été souligné que les régions sont bien placées pour identifier
atouts et besoins et leur permettre d’agir ; les enjeux de l’attractivité doivent être partagés avec tous les
niveaux de gouvernement – autant les autorités nationales que les acteurs infrarégionaux. Pour agir de
façons convergente et cohérente, il faut en effet que la connaissance acquise puisse être mobilisée et
intégrée par les différentes échelles de responsabilité, tout en veillant à préserver les spécificités de
chacun. Par exemple, les Schémas régionaux de développement économique, d'innovation et
d'internationalisation (SRDE-II), souvent associés par les régions françaises au défi de l’attractivité, sont
établis via des mécanismes de consultation poussés qui permettent d’associer de manière « bottom-up »
les différents acteurs territoriaux, ainsi que les représentants de l’échelon national. Ces Schémas
permettent aussi de concevoir de nouveaux dispositifs pour l’attractivité qui associent notamment le

24 Voir notamment le renforcement de l’Observatoire des dynamiques territoriales mis en œuvre par le Ministre de l’Aménagement du
Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville au Maroc - voir
http://www.muat.gov.ma/?q=fr/article/observatoire-national-des-dynamiques-territoriales et l’Observatoire des territoires (France) qui
permet de rassembler et de cartographier en France la variété des réalités territoriales – voir https://www.observatoire-des-
territoires.gouv.fr/observatoire-des-territoires/en/node
25 Par exemple, le Manuel sur les indicateurs économiques de la mondialisation (OCDE, 2010) propose un cadre d’analyse national, sans

prendre en considération la diversité des territoires de chacun des pays.


26 Les quatre étapes d’internationalisation du Modèle d'internationalisation d'Uppsala ont eu une grande influence sur ce champ d’études.
27 « Mesurer l’internationalisation des régions : méthodologie et cas de la France » OCDE, à paraitre en 2020

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secteur privé (« Conseils » territoriaux comprenant des chefs d’entreprises et représentants de la


société civile, etc.).

Une première étape permettant de comprendre et d’améliorer la gouvernance pluri-niveaux de


l’attractivité devrait consister à élaborer les cartographies institutionnelles du « qui fait quoi » et « quelles
sont les relations » entre les parties prenantes. L’articulation des différents acteurs de tourisme ou la
coordination entre des agences nationales de promotion et les stratégies régionales pour attirer les
investisseurs sont encore souvent embryonnaires. Dans le meilleur des cas c’est une des dimensions de
l’attractivité qui est éclairée mais on ne dispose pas de la vision d’ensemble qui permettrait d’identifier
les « nœuds » institutionnels clés pour engager des pratiques multi-cibles plus efficaces. La cartographie
des agences de promotion et d’attraction de l’investissement dans les pays de l’OCDE souligne par
exemple qu’une répartition claire des rôles et responsabilités entre niveaux de gouvernement est
nécessaire pour une mise en œuvre efficace des politiques (OCDE, 2018).28 Disposer de présentations
claires comblerait souvent un déficit de connaissance et permettrait aussi de gagner en efficience en
termes de dépense. La nécessité d’agences nationales travaillant en coordination avec les responsables
territoriaux pour orienter les « prospects » étrangers en évitant une concurrence territoriale trop intense
est un moyen largement utilisé par les pays de l’OCDE pour éviter les « jeux à somme nulle » où le
succès de certaines de leurs régions se ferait au prix d’un renoncement réglementaire ou d’équilibre
territorial.

Les modes de relations entre agence de développement nationale et régionales varient cependant selon
les pays. Un exemple particulier est celui de la Norvège où cette relation est marchande, les régions qui
le souhaitent pouvant acheter la prestation nationale de connexion avec les cibles étrangères et la
promotion du territoire. Au Maroc, le renouvellement des Centres Régionaux d’Investissement et la mise
en place des Commissions Régionales Unifiées pour l’Investissement font état de la volonté de mieux
territorialiser et coordonner la contribution des diverses parties prenantes à l’attractivité régionale.29

La figure plus bas rassemble les éléments d’un cadre d’action pour comprendre et renforcer l’attractivité
régionale en reprenant l’identification i. des « actifs spécifiques » du territoire, ii. les politiques existantes
et iii. les modes de gouvernance qui leurs sont associés.

28 Cette cartographie a été réalisée dans 32 pays-membres de l’OCDE. Le rapport est disponible ici :
http://www.oecd.org/investment/Mapping-of-Investment-Promotion-Agencies-in-OECD-Countries.htm
29 Ces aspects sont au cœur du Dialogue Maroc-OCDE sur l’usage des contrats à travers niveaux de gouvernement, en partenariat avec

la Direction Générale des Collectivités Locales – Ministère de l’Intérieur du Maroc, et l’Association des Régions du Maroc.

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Cadre d’action pour l’attractivité régionale


pour un développement durable et inclusif

Les atouts régionaux Les politiques publiques Gouvernance et mise en


• Identifier les avantages • Les stratégies de promotion oeuvre
comparatifs du territoire pour régionales • Les outils et les politiques
attirer les investisseurs, les • Investissements dans publiques entre niveaux de
talents et les visiteurs l'infrastructure numérique gouvernement pour promouvoir
• Explorer les liens entre chaînes • Incitations pour promouvoir des l'attractivité régionale
de valeur mondiales et régionales politiques d'attractivité durables et (cartographies institutionnelles,
• Déterminer la disponibilité des inclusives agences, contrats, etc.)
infrastructures et des services • Politiques en faveur des réseaux • Les dispositifs pour renforcer les
• Inventorier les indications d'innovation: coopération inter- capacités en matière d'attractivité
géographiques protégées, les firmes, compétences, innovation et inscrire ces politiques dans une
brevets et les initiatives en technologique et soutien aux démarche durable et inclusive
matière de marketing territorial PME

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L’OCDE et l’attractivité régionale pour un développement durable et


inclusif

L'OCDE offre un cadre dans lequel les gouvernements peuvent comparer leurs expériences en matière
de politiques publiques, chercher des réponses à des problèmes communs, identifier les meilleures
pratiques et coordonner les politiques nationales et internationales. En 1999, l'OCDE a créé le Comité
des politiques de développement territorial (TDPC) - aujourd'hui le Comité des politiques de
développement régional (RDPC) - comme un forum d'échange et de débat international sur la
compétitivité régionale et les questions de gouvernance à plusieurs niveaux. Le Centre de l'OCDE pour
l'entreprenariat, les PME, les régions et les villes (CFE) sert le Comité et concentre les activités de
l'OCDE concernant le développement local et régional. Le CFE est aussi engagé auprès des pays
membres pour ce qui concerne l’emploi local, l’économie sociale et solidaire, la culture, l’entreprenariat,
les PME, et le tourisme via les différents comités servis, au-delà du RDPC. Le Centre aide les pays, leurs
régions et leurs villes à concevoir et à mettre en œuvre des politiques qui favorisent la création d'emplois,
le développement durable et inclusif, notamment par un soutien spécifique à l'apprentissage par les pairs
par le biais du partage international d'expériences afin de soutenir le renforcement des capacités. À cette
fin, le CFE s'appuie sur son expertise unique et ses données en matière de développement régional,
rural et urbain et de gouvernance pluri-niveaux.

L’OCDE travaille avec des autorités régionales, en partenariat avec les gouvernements nationaux et les
autorités locales, pour renforcer leur attractivité de manière durable et inclusive. Les données mises à
disposition du public concernent des dimensions majeures de l’attractivité des régions (développement
régional, investissement, tourisme, migration, commerce, entreprises, emploi et gouvernance pluri-
niveaux). Pour accompagner les régions et les autorités nationales, l’OCDE s’appuie notamment sur les
bases de données régionales qui comprennent des indicateurs comparatifs sur le bien-être, la
démographie des entreprises et la migration.30 Ces informations peuvent constituer à la fois un outil
promotionnel et permettre d’identifier les leviers de l'attractivité régionale dans la mondialisation. Elles
peuvent aider les régions à positionner leurs atouts et comprendre leurs faiblesses, à suivre les grandes
tendances et les comparer aux observations sur place. Elles peuvent également sensibiliser à des défis
territoriaux spécifiques. Enfin, elles peuvent guider la hiérarchisation de l’action publique, en reflétant les
priorités des habitants et des entreprises.

Les projets engagés par l’OCDE sur l’attractivité régionale s’attachent à soutenir la coordination entre les
acteurs pour renforcer leur attractivité de manière durable et inclusive et éviter les « jeux à somme nulle »
auxquels peuvent conduire des stratégies régionales non coordonnées et qui peuvent affecter la
cohésion nationale. L’accompagnement de l’OCDE se fonde sur trois piliers :

 Pilier I: Analyse statistique des éléments caractérisant le degré et la nature de


l’internationalisation et de l’attractivité des régions.

 Pilier II: Analyse qualitative des bonnes pratiques en matière d’attractivité régionale, fondée sur
des études de cas et des dialogues entre régions et acteurs du monde économique et de la
société civile, ainsi qu'entre niveaux de gouvernement. En s’appuyant sur le repérage plus fin
de leurs actifs spécifiques, les régions partenaires (couvrant des territoires urbains et ruraux)
peuvent mettre l’accent sur certains d’entre eux, de manière spécifique en fonction des priorités
(par exemple les « régions de montagne » ou « les régions frontières »). Enfin, l’analyse
qualitative permet de réaliser des cartographies institutionnelles des acteurs pour identifier « qui
fait quoi » ainsi que leurs relations (de partage d’information, de financement, de régulation, de
co-construction des stratégies, d’évaluation, etc.) afin de clarifier les enjeux de coordination pour
des politiques d’attractivité plus efficaces.

30 Voir le Panorama des régions et des villes de l'OCDE (2018) - https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-fr

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 Pilier III : Proposition d’outils et de recommandations pour l’action publique en faveur de


l’attractivité régionale, inclusive et durable, adaptable à la diversité des territoires.

Au-delà des travaux récents sur l’approche territoriale pour l’intégration des migrants,31 les principaux
projets actuellement engagés en lien avec l’attractivité régionale durable et inclusive concernent :

- Le développement d’une méthodologie originale pour mesurer l'internationalisation des régions


(en termes de connexions de personnes, d’affaires, de connaissances et d'infrastructures). Elle soutient
le programme de travail du Comité des politiques de développement régional en s’appuyant sur le soutien
de la France et sur le Groupe de travail sur les indicateurs territoriaux, associé au RDPC (octobre 2019).

- Un projet pour Soutenir les stratégies d'internationalisation des régions en termes d'exportations
et d'attractivité et rationaliser leur mise en œuvre en partenariat avec l’Agence Nationale pour la
Cohésion des Territoires (France) et l’Union Européenne (DG REFORM), afin d’identifier en lien avec les
Régions de France les approches et innovations utiles, y compris en termes de gouvernance, pour
renforcer l’impact de l’internationalisation des territoires sur la cohésion et le développement durable et
inclusif.

- Une étude de sur les causes des disparités économiques entre les régions qui souligne la
nécessité d'adopter des politiques adaptées au lieu, compte tenu du mécontentement croissant de la
population face au statu quo économique, social et politique dans de nombreuses régions, ainsi que pour
faire face à l'impact des mégatendances technologiques, démographiques et environnementales.32

- Dans le cadre du Programme pays qui lie le Maroc et l’OCDE, des Dialogues territoriaux avec le
Maroc pour mettre en œuvre la réforme sur la régionalisation avancée par l'usage de contrats entre
les différents niveaux de gouvernement ; et prochainement sur la mise en œuvre de la réforme de
déconcentration et sur le renforcement de l’Observatoire sur les dynamiques territoriales afin de
soutenir les politiques d’attractivité régionale.

Les institutions régionales, nationales et internationales ou autres partenaires intéressés par ce


programme et le développement de projets adaptés à leurs priorités en matière d’attractivité régionale
sont invités à contacter : martin.lestra@oecd.org

31 Avec l’Union européenne et 10 villes européennes pour élaborer la checklist en faveur de l'intégration des migrants au niveau local
(https://www.oecd.org/publications/working-together-for-local-integration-of-migrants-and-refugees-9789264085350-en.htm) ; avec la
Région Occitanie (France) pour renforcer l'échange entre régions pairs en ce qui concerne les politiques en faveur de l'inclusion des
migrants et des réfugiés.
32 Perspectives régionales de l'OCDE 2019, http://www.oecd.org/fr/regional/oecd-regional-outlook-2019-9789264312838-en.htm).

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www.oecd.org
@OECD_local #AttractiveRegions

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