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Savoirs et textes
17 | 2017
L'événement
Événementialité et continuité
Exploration d’une tension interne à la philosophie ortéguienne de
l’histoire
Eventiality and continuity: exploration of a tension inside the orteguian
philosophy of history
Anne Bardet
Éditeur
Savoirs textes langage - UMR 8163
Édition électronique
URL : http://methodos.revues.org/4712
ISSN : 1769-7379
Référence électronique
Événementialité et continuité
Exploration d’une tension interne à la philosophie ortéguienne de
l’histoire
Eventiality and continuity: exploration of a tension inside the orteguian
philosophy of history
Anne Bardet
Methodos, 17 | 2017
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événement pur et universel […] dans lequel chacun, à son tour, n’est rien d’autre qu’un
événement. »7
6 Avant de poursuivre, arrêtons-nous un instant sur cette idée de drame, qui permet
d’apercevoir la dimension radicalement événementielle de la vie humaine dont parle
Ortega. D’abord, le fait qu’il pense le drame par opposition avec la chose est révélateur de
ce que la vie de l’homme n’est constituée de rien d’autre que de ce qu’elle fait d’elle à
chaque instant – selon une certaine trame sur laquelle nous reviendrons plus loin.
Ensuite, le terme de drame ne porte aucune connotation pathétique ni mélodramatique.
Ortega y Gasset mobilise le drame dans son sens littéral – et théâtral : le drama ne désigne
d’abord rien d’autre que cette action qui se déroule, dans un mouvement temporel
caractéristique – là où la chose, si elle est bien soumise au temps, n’est pas habitée de
mouvement, mais est régie, en elle-même, par une staticité fondamentale. Enfin, le drame
n’est pas la tragédie : ce mouvement temporel auquel obéit le drame n’est pas déterminé ;
et si la fin de l’histoire peut éventuellement être anticipée, ou anticipable8, elle n’est pas
préécrite ; point de fatalisme dans le drame. Ainsi, lorsqu’Ortega affirme ne pas croire au
« sentiment tragique de la vie »9, il ne cherche pas seulement à marquer ses distances vis-
à-vis du ton mélodramatique d’Unamuno ; il semble qu’il veuille également récuser l’idée
même d’un déterminisme historique. Dans la tragédie, on n’échappe pas à son destin ;
dans le drame, on le construit.
7 Ortega y Gasset souligne par ailleurs qu’
« il n’y a pas de vie humaine s’il n’y a pas quelqu’un d’ultra déterminé à qui il arrive
de faire10 ceci ou cela. La vie est mienne, ou tienne, ou sienne. La vie est toujours vie
de quelqu’un »11.
8 Autrement dit, il n’est jamais tant question chez lui de la vie humaine en général que de
telle ou telle vie particulière. Le philosophe espagnol cherche à éviter l’écueil
intellectualiste qui consisterait à penser la vie comme une abstraction12. La vie ne peut
être conçue comme une généralité vague. Elle est ce qu’il y a de plus concret. Et au-delà
du fait qu’elle réside dans « ce qu’il y a d’individuel »13, dit-il, « la vie humaine […] est
uniquement ma vie »14. On voit ici à quel point la réalité dans laquelle la philosophie doit
prendre son point de départ, et dont Ortega fait « l’événement radical »15, est concrète,
déterminée, hyperindividualisée.
9 Une nouvelle précision mérite d’être faite à ce stade : si la vie humaine se caractérise par
le fait qu’elle est une succession d’événements, l’événement, à son tour, ne concerne que
la vie humaine. La formule de Claude Romano lorsqu’il présente son livre L’événement et le
monde est à cet égard éclairante pour notre propos ; le philosophe français formule en
effet la thèse principale de l’ouvrage en ces termes :
« Depuis la naissance, événement originaire, l’existence humaine est en suspens au-
dessus de l’abîme du nouveau, livrée à ces points critiques de basculement
susceptibles à tout instant de la transformer de fond en comble. L’humanité de
l’homme est à ce prix – et à ce risque. Les renouvellements induits par l’événement
ne sont pas extérieurs à la « vie de l’esprit », mais sont cette vie elle-même ou
plutôt l’esprit lui-même. L’homme est de tous les animaux le seul auquel il puisse
arriver quelque chose. »16
10 Dans la mesure où le grand objet de la philosophie est la vie humaine et la vie humaine,
une pure succession d’événements, la philosophie, par extension, et parce que sa grande
tâche est de parvenir à dire quelque chose de ce qu’est la vie humaine, n’a pas d’autre
objet que l’événement :
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histoire »24, c’est-à-dire ce « mode d’être propre à une réalité dont la substance est
précisément la variation ; autrement dit, le contraire de toute substance »25. Cette
formule selon laquelle l’homme, loin d’une nature, disposerait d’une histoire, connaît un
usage prolifique sous la plume d’Ortega et mériterait qu’on l’analyse en profondeur. Nous
n’en retiendrons qu’un aspect ici, et qui va dans le sens de ce que nous avons voulu faire
ressortir jusqu’ici : dans la lignée de son rejet d’une philosophie substantialiste, Ortega
renonce à l’idée d’une nature – un terme qu’il considère comme étant trop statique – de
l’homme, et ce terme d’histoire ne dit d’abord rien d’autre que ce mouvement, ce flux non
préréglé d’événements où, petit à petit, il se construit. De la même manière que l’homme
n’a pas d’essence, donc, il n’a pas de nature. Il n’a qu’une vie, laquelle consiste en une
histoire, c’est-à-dire en une succession d’événements. Toute la question sera de savoir si
cette succession est régie par des règles.
17 Mais avant d’aborder ce point, venons-en au second moment de notre réflexion, en
voyant comment cette histoire qui vient remplacer la nature de l’homme forme, chez le
penseur espagnol, une stricte continuité.
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maillon. Il est donc illusoire de prétendre la comprendre sans l’inscrire dans le processus
dont elle provient et qu’elle rend possible à la fois.
28 Si l’histoire correspond bien à une succession d’événements, il n’y a donc aucun sens à les
penser indépendamment les uns des autres :
« une vie humaine n’est jamais un tissu d’événements, de choses qui arrivent ; elle a
toujours une trajectoire, dans une tension dynamique, comme celle qu’a un drame.
Toute vie suppose un argument.»40
29 Le fait qu’Ortega renonce à l’idée d’un sens déterminé et mette en avant la catégorie de
l’indétermination n’implique donc pas que l’on perde de vue la question du sens. Bien
qu’il n’y ait pas déterminisme, rien ne dit que la succession d’événements ne soit pas,
d’une certaine manière, organisée. Cela nous renvoie à la notion de système que nous
mentionnions plus haut. L’idée, au fond, est simple : la philosophie ne peut fonctionner
sans une certaine systématicité. En ce sens, Ortega écrit : « la pensée philosophique est
systématique »41 ; ou encore : « la forme de la vérité est le système »42. Mais le philosophe
espagnol distingue néanmoins les systèmes « ouverts », capables d’articuler raison et
intuition, de ce qu’il appelle les systèmes « fermés », dont le point de départ est « étroit »
et qui s’appuient sur la raison uniquement43.
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baigne pas deux fois dans le même fleuve. Dans les termes d’Ortega, « la vie est toujours
différente de ce qu’elle fut »47. Le philosophe espagnol est explicite :
« Poser des limites à ce que l’homme est capable d’être manque de sens. Dans cette
illimitation fondamentale de ses possibilités, propre à qui n’a pas de nature, il n’y a
qu’une ligne fixe, préétablie et donnée qui puisse nous orienter ; il n’y a qu’une
limite : le passé. Les expériences vécues restreignent le futur de l’homme. Si nous
ne savons pas ce qu’il va être, nous savons du moins ce qu’il ne va pas être. Nous
vivons en vue du passé. »48
34 Cette idée de formes révolues illustre l’idée d’un processus historique négatif : il n’y a
qu’en fonction de ce qui ne peut plus être que les hommes sont en mesure de « fabriquer
du sens ». La seule certitude dont nous puissions disposer, loin de celles qu’énoncent les
oracles dans les tragédies classiques, est que ce qui a été ne sera plus ; que le futur sera
différent du passé. Mais rien ne permet de dire plus précisément de quoi ce futur sera
fait.
35 Dans le contexte actuel d’un regain d’intérêt pour l’événement dans les débats
philosophiques, la position ortéguienne nous semble intéressante dans la mesure où elle
permet de tenir ensemble un caractère foncièrement événementiel de l’histoire et l’idée
de sens, traditionnellement menacée par les philosophies dites de l’événement – le seul
sens possible étant toujours lié à une possible reconstruction, a posteriori. Chez Ortega y
Gasset, le sens, bien qu’il soit strictement négatif – la logique historique ne présupposant
que l’élimination des formes passées –, est maintenu. Il n’apparaît pas uniquement a
posteriori, et son apriorité n’équivaut pas à un déterminisme. Car le sens de l’histoire dont
parle Ortega apparaît toujours comme se faisant ; il est au fond toujours le contemporain
de l’événement.
BIBLIOGRAPHIE
Bardet, Anne (2015), « Éléments pour une approche de la philosophie ortéguienne de la crise »,
Revista de História da arte 12 : Crise, p. 124-133.
— (2016), « La composition futuriste de l’homme, éléments d’une éthique du quehacer chez José
Ortega y Gasset », Revue française d'éthique appliquée 2 : Les figures de l’anticipation, ou comment
prendre soin du futur, p. 63-73.
Dilthey, Wilhelm (1988) L’édification du monde historique dans les sciences de l’esprit, Œuvres III, trad.
Sylvie Mesure, Paris, éditions du Cerf, coll. « Passages »,
Febvre, Lucien (1953), « De 1892 à 1933. Examen de conscience d’une histoire et d’un historien »,
in Combats pour l’histoire, Paris, Armand Colin, p. 3-17.
Juranville, Alain (2007), L’événement, nouveau traité théologico-politique, Paris, PUF, coll.
« Philosophie d’aujourd’hui ».
Lévêque, Jean-Claude (2009), « Notas de trabajo de las carpetas Alrededor de la razón vital »,
Revista de estudios orteguianos, 19.
Ortega y Gasset, José (2004-2010), Obras Completas, tomes I-X, Madrid, Taurus, Fundación.
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— (1970), L’évolution de la théorie déductive, l’idée de principe chez Leibniz, trad. Jean-Paul Borel, Paris,
Gallimard, coll. « Bibliothèque des idées ».
— (2008), L’homme et les gens, trad. François Géal (dir.), Paris, Editions rue d’Ulm.
NOTES
1. Brincadeira (en portugais dans le texte) signifie plaisanterie.
2. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome X, p. 335.
3. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 290.
4. José Ortega y Gasset, cité par Jean-Claude. Lévêque (2009), « Notas de trabajo de las carpetas
Alrededor de la razón vital », Revista de estudios orteguianos, 19, p. 54.
5. Wilhelm Dilthey, L’édification du monde historique dans les sciences de l’esprit, Œuvres III (1988),
trad. S. Mesure, Paris, éditions du Cerf, coll. « Passages », p. 86. C’est d’ailleurs au penseur
allemand que l’on doit, selon Ortega y Gasset, le fait que la philosophie commence à prendre en
compte cette vie humaine : « Vers 1860, Dilthey, le plus grand penseur qu’ait connu la seconde
moitié du XIXe siècle, découvrit une nouvelle réalité : la vie humaine. Il est éminemment comique
qu’une réalité si proche de l’homme, et si importante pour lui, ait tant tardé à être découverte, et
qu’elle fusse découverte un certain jour à une certaine heure, au même titre que le phonographe
ou l’aspirine. Mais enfin, il en fut ainsi, et rien ne peut changer cela » (José Ortega y Gasset
(2004-2010), Obras Completas, tome V, p. 372).
6. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome V, p. 372.
7. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 64.
8. Précisons néanmoins qu’Ortega souligne le caractère non anticipable de l’histoire, dans la
mesure où, dit-il, « l’histoire est toujours invention » (José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras
Completas, tome I, p. 623).
9. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 1143.
10. La dimension du faire est tout à fait centrale chez Ortega. En effet, c’est dans les termes d’un
devoir faire que le philosophe espagnol définit premièrement la vie humaine : « vivre, c’est
toujours, sans arrêt ni repos, créer, faire », écrit-il ainsi (José Ortega y Gasset (1961), La révolte des
masses, trad. Louis Parrot, Paris, Gallimard, coll. « idées », p. 229).
11. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 290.
12. En ce sens, Ortega critique ceux qui, à l’instar de Hegel, se sont détournés du vocabulaire
« juvénile » de la vie : en se focalisant sur le concept « quasi sénile » d’esprit, Hegel passe à côté
de la dimension concrète de la vie humaine ; il ne s’affranchit pas de l’idéalisme abstrait vis-à-vis
duquel il comptait initialement prendre ses distances (José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras
Completas, tome VIII, p. 155),
13. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome I, p. 482.
14. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome V, p. 13.
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15. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 530. Parce qu’elle est
« l’événement radical », la vie humaine est également insécurité radicale pour Ortega. Ainsi,
« rien ne m’est sûr que la chose incertaine » est une formule qu’il se plaît à citer (pour exemple,
voyez : José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 530). Nous reviendrons dans
un moment sur cette dimension toute contingente de la vie humaine.
16. Romano, Claude (2007), « "Présentation" à la traduction espagnole de l’introduction à
L’événement et le monde », [en ligne], disponible à l’adresse URL suivante : https://
www.academia.edu/2059438/
_Présentation_à_la_traduction_espagnole_de_l_introduction_à_L_événement_et_le_monde_
(consulté le 22 juin 2016), p. 1.
17. José Ortega y Gasset (1970), L’évolution de la théorie déductive, l’idée de principe chez Leibniz, trad.
Jean-Paul Borel, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des idées », p. 208.
18. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 521.
19. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 526.
20. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 562.
21. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 641.
22. José Ortega y Gasset (2008), L’homme et les gens, trad. François Géal (dir.), Paris, Editions rue
d’Ulm, p. 151.
23. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 555.
24. José Ortega y Gasset (2016), L’Histoire comme système, p. 71
25. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 779.
26. José Ortega y Gasset (1945), Idées et croyances, trad. Jean Babelon, Paris, Stock, p. 108.
27. José Ortega y Gasset (1961), La révolte des masses, p. 121-122. Nous soulignons.
28. « Je ne crois pas au déterminisme absolu de l’histoire », s’exclame-t-il par exemple (José
Ortega y Gasset (1961), La révolte des masses, p. 121).
29. Pour exemple, voyez : José Ortega y Gasset (1961), La révolte des masses, p. 122.
30. « Historia non facit saltum », écrit ainsi Ortega (José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras
Completas, tome V, p. 311 et tome IX, p. 79).
31. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 74.
32. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 359.
33. Sur cette idée, voyez : Anne Bardet, « La composition futuriste de l’homme, éléments d’une
éthique du quehacer chez José Ortega y Gasset », Revue française d’éthique appliquée 2 : Les figures de
l’anticipation, ou comment prendre soin du futur, p. 63-73.
34. Alain Juranville (2007), L’événement, nouveau traité théologico-politique, Paris, PUF, « Philosophie
d’aujourd’hui », p. 38.
35. Il est à parier qu’Ortega aurait été d’accord avec Lucien Febvre pour qui l’idée même de fait
historique est à relativiser : « le fait en soi, cet atome prétendu de l’histoire » ne correspond pas à
« du donné », mais à du « créé par l’historien », « de l’inventé et du fabriqué » comme il le dit lors
de la leçon d’ouverture au Collège de France le 13 décembre 1933 (reprise dans Lucien Febvre,
« De 1892 à 1933. Examen de conscience d’une histoire et d’un historien », in (1953) Combats pour
l’histoire, Paris, Armand Colin, p. 7).
36. Le terme d’ensemble – Zusammenhang – remarque Ortega, est probablement celui qui apparaît
le plus souvent sous la plume de Dilthey (José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome
VI, p. 247).
37. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome V, p. 372.
38. Sur la critique qu’Ortega adresse aux historiens de profession, voyez : José Ortega y Gasset
(2004-2010), Obras Completas, tome V, p. 230 sq.
39. Sur cette notion de crise, voyez : Anne Bardet, « Éléments pour une approche de la
philosophie ortéguienne de la crise », Revista de história da arte, 12/2015, p. 124-133.
40. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome IX, p. 805.
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41. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VIII, p. 169.
42. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VIII, p. 165.
43. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VIII, p. 169. C’est le système hégélien
de l’histoire que le philosophe espagnol vise en premier lieu ici.
44. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 227.
45. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome VI, p. 590.
46. José Ortega y Gasset (2004-2010), Obras Completas, tome X, p. 81.
47. José Ortega y Gasset (1961), La révolte des Masses, p. 136-137.
48. José Ortega y Gasset (2016), L’Histoire comme système, p. 71.
RÉSUMÉS
José Ortega y Gasset définit l’histoire comme une succession non préréglée d’événements où
vient peu à peu se former l’identité de l’homme. Pourtant, il insiste : là où l’événement semble
faire césure, et alors même qu’aucun sens prédéfini ne vient l’organiser, l’histoire forme une
continuité stricte. Comment, dès lors, concilier la dimension irréductiblement événementielle de
l’histoire avec cette continuité qui, au-delà de son avènement dans le récit, doit apparaître au
sein de l’histoire effective ?
Already in his early writings, Ortega y Gasset wants to highlight how life is made out of a series of
events; with him, man himself appears as a pure event of existing. This idea is so central in his
work that he pretends to build his whole philosophy on occasional concepts: he wants to break
with an entire substantialist tradition that thinks man in terms of nature, and set up concepts
that designate the event. Man has no nature, but history; he’s nothing more than this history,
which appears as a no preset series of events where his identity comes to form and crystallize.
The absence of a predefined sense does not change the fact that history is marked by a strict and
inalienable continuity with the Madrid philosopher: it admits neither skips nor disruptions.
Where event seems to cause a caesura, or at least leads us to a fundamentally indeterminate
territory, Ortega insists: the fact that history is made out of a series of events doesn’t jeopardise
the idea of liaison; it doesn’t require that we stop thinking history according to a causal logic.
Therefore, the question is: how to include the myriad of events which constitute history in a
continuum that makes sense? How to conciliate the event character with the continuity which
must appears, beyond its advent in the telling, upon eventiality of history? In other words, how
to maintain the idea of a sense of history?
INDEX
Mots-clés : Ortega y Gasset, histoire, événement, continuité
Keywords : Ortega y Gasset, history, event, continuity
AUTEUR
ANNE BARDET
Methodos, 17 | 2017