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CONVENTION
RELATIVE AUX DROITS
DES PERSONNES
HANDICAPÉES
Guide de formation N° 19
Guide de formation
ISSN 1020-4636
Convention relative aux droits
des personnes handicapées
Guide de formation
Série sur la formation professionnelle n° 19
*
**
Les cotes des documents de l’Organisation des Nations Unies se composent de lettres
majuscules et de chiffres. La simple mention d’une cote dans un texte signifie qu’il s’agit d’un
document de l’Organisation.
HR/P/PT/19
ISBN-13: 978-92-1-254179-2
eISBN-13: 978-92-1-056496-0
La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif
ont été adoptés le 13 décembre 2006 et sont entrés en vigueur le 3 mai 2008. Leur adop-
tion a été l’aboutissement d’une vigoureuse revendication des personnes handicapées qui, à
travers le monde, demandaient que leurs droits de l’homme soient respectés, protégés et mis
en œuvre dans des conditions d’égalité avec les autres.
Il est important de noter que la Convention et son Protocole facultatif remettent en cause
la manière dont le handicap était perçu jusque là – c’est-à-dire comme un problème médical,
un motif d’apitoiement ou l’objet d’actions caritatives – et instituent une nouvelle approche,
fondée sur les droits de l’homme, qui vise à permettre aux sujets de ces droits de décider du
cours de leur existence.
Navanethem Pillay
Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme
TABLE DES MATIÈRES
par exemple, non seulement aux personnes partie intégrante du cours de formation à
handicapées physiques, mais aussi à celles tous les stades, y compris la planification,
qui sont malvoyantes ou malentendantes. la conception, le déroulement et le suivi.
Elle peut aider les animateurs à répondre à
Évaluation3 quelques questions importantes au sujet de
leurs activités, comme celles-ci par exemple:
L’évaluation offre à l’équipe pédago- pourquoi proposons-nous cette formation?
gique des renseignements sur l’impact de Son contenu répond-il aux besoins des
apprenants? Qu’est-ce que ces derniers ont
la formation au regard des objectifs qu’elle
appris? Quelles initiatives prendront-ils du
s’était assignés. L’évaluation devrait faire
fait de la formation acquise? Appliqueront-
3
Pour des renseignements pratiques détaillés concer- ils ce qu’ils ont appris dans le cadre de leur
nant l’évaluation des activités de formation aux droits travail? Comment leur travail contribuera-t-il
de l’homme, voir Évaluer les activités de formation aux
droits de l’homme: Manuel destiné aux éducateurs dans à faire évoluer la collectivité/la société dans
le domaine des droits de l’homme. son ensemble?
MODULE 1 – QU’EST-CE QUE LE HANDICAP?
Le handicap est souvent perçu comme • Les facteurs physiques: le genre, l’ap-
une situation inhérente à la personne – un partenance ethnique, la déficience (phy-
état de santé qui contraint une personne à sique, visuelle, auditive, intellectuelle,
être dans un fauteuil roulant ou à prendre mentale), la taille et le poids, etc.;
des médicaments, par exemple. Or, comme
le montre le présent module, le handi- • Les facteurs socioéconomiques: la for-
cap, dans la conception moderne, s’ana- tune, la classe, l’insertion dans la société,
lyse comme la conjonction de l’état d’une le niveau d’instruction, etc.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
8 GUIDE DE FORMATION
Les personnes handicapées sont déresponsa- Leur relation avec la personne handicapée
bilisées; elles ne peuvent pas gérer leur exis- repose sur le dialogue. Le médecin est placé
tence et ne participent pas, ou guère, à la non pas sur un piédestal, mais aux côtés de
vie de la société. Ce sont généralement le la personne handicapée. L’égalité commence
secteur et les professionnels de la santé et les à l’hôpital, et non à l’extérieur de ses murs. La
associations caritatives qui représentent leurs liberté, la dignité, la confiance, l’évaluation
intérêts, car ils sont réputés savoir ce qui est et l’auto-évaluation sont autant de caractéris-
conforme à l’intérêt supérieur des patients. tiques de l’approche sociale.
les respecter. Elle tient les obstacles sociétaux la Convention relative aux droits des
pour discriminatoires et offre aux personnes personnes handicapées, et qui doivent élimi-
handicapées des possibilités de se plaindre ner et prévenir les actes discriminatoires. Elle
lorsqu’elles s’y heurtent. Prenons par exemple établit que toutes les politiques et toutes les
le droit de vote. Une personne aveugle a le lois devraient être conçues avec la partici-
droit de voter, comme n’importe lequel de pation des personnes handicapées, le handi-
ses concitoyens. Mais s’il n’y a pas de docu- cap étant systématiquement pris en compte
ments présentés sous une forme accessible dans tous les aspects de l’action politique.
(en braille par exemple) et si elle ne peut pas Elle n’appelle pas la conception de poli-
se faire accompagner dans l’isoloir par une tiques «spéciales» en faveur des personnes
personne de confiance qui l’aide à indiquer handicapées, quelles que soient les adapta-
le candidat ou la candidate de son choix, tions nécessaires pour respecter le principe
elle ne peut pas voter. L’approche fondée sur de la pleine participation.
les droits de l’homme reconnaît le caractère
discriminatoire du manque de documents En vertu de cette approche, dans laquelle
adéquats et de l’impossibilité d’obtenir de la société délègue les politiques relatives au
l’aide au moment du vote, et exige de l’État handicap, le principal responsable est l’État
qu’il élimine ces obstacles discriminatoires. – toutes administrations et tous ministères
S’il ne le fait pas, la personne devrait être en confondus. Certaines dispositions concernent
mesure de porter plainte. le secteur privé, et un rôle spécifique est
dévolu à la société civile, en particulier aux
Cette approche n’a pas pour moteur la personnes handicapées et aux organisations
compassion, mais la dignité et la liberté. Elle qui les représentent. Les personnes handica-
explore les moyens de respecter la diversité pées ont des droits et disposent d’instruments
humaine, de la soutenir et de la célébrer en qui leur permettent d’en réclamer le respect.
instaurant les conditions nécessaires à une Elles ont les outils nécessaires pour prendre
authentique participation d’un large éven- leur destin en mains et participer pleinement,
tail de personnes, y compris les personnes dans des conditions d’égalité avec autrui. La
handicapées. Au lieu de représenter ces loi impose de les associer étroitement à l’éla-
dernières comme les objets passifs d’actes boration des politiques.
de charité, elle se propose de les aider à
s’aider elles-mêmes de manière à pouvoir Quelle est l’approche dominante
participer au fonctionnement de la société, aujourd’hui?
à l’éducation, à la vie professionnelle, cultu-
relle et politique, et défendre leurs droits en L’approche caritative est la plus ancienne
ayant recours à la justice. des quatre, suivie de l’approche médicale.
L’approche sociale et l’approche fondée
L’approche fondée sur les droits de sur les droits de l’homme sont plus récentes.
l’homme est un accord en vertu duquel Cependant, toutes ces approches coexistent
les personnes handicapées, les États et le encore aujourd’hui. Malgré l’adoption de la
système international des droits de l’homme Convention, les deux premières sont encore
s’engagent à mettre en pratique certains très largement répandues, y compris au sein
aspects essentiels de l’approche sociale. de la communauté des défenseurs des droits
Elle s’impose à tous les États qui ont ratifié de l’homme.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
12 GUIDE DE FORMATION
diversité de la classe offre une occasion inéga- elle est autonome. Il en va de même des
lée de débattre des droits de l’homme et des personnes handicapées. L’autonomie n’ex-
opinions des uns et des autres. clut pas l’accompagnement. Les personnes
handicapées ont le droit de recevoir un
Le placement en institution illustre lui
soutien si elles le sollicitent. L’autonomie sert
aussi la manière dont les personnes handica-
de cadre à la jouissance de plusieurs droits
pées ont pu être perçues comme «spéciales»
de l’homme: le droit à un logement conve-
en vertu de l’approche médicale et/ou de
nable, le droit de participer à la gestion des
l’approche caritative. Les personnes handica-
pées – et en particulier celles ayant un handi- affaires publiques et politiques, le droit au
cap psychosocial ou intellectuel – ont souvent respect de la vie privée, le droit de circuler
été placées de force dans des établissements librement, le droit de vote, etc.
psychiatriques, à l’écart de la collectivité et
sans pouvoir choisir leur traitement médical. L’idée que les personnes handicapées
sont dangereuses
En vertu de l’approche fondée sur les
droits de l’homme, les personnes handica- Dans la plupart des sociétés, les
pées ont droit à la liberté au même titre que personnes ayant un handicap mental ou
n’importe qui, et le handicap ne peut justi- intellectuel ont été, au fil des siècles, maltrai-
fier la privation de liberté. Le placement ou tées et privées de soins. Elles ont dû subir des
l’hospitalisation forcés en raison du handi- atrocités telles que l’expérimentation patron-
cap sont interdits. Nul ne doit être placé née par les pouvoirs publics de substances
dans une institution contre son gré – sauf si hallucinogènes administrées à leur insu,
les mêmes motifs entraîneraient le placement des traitements par la contrainte, des élec-
des membres de la collectivité qui ne sont trochocs et des chocs insuliniques; elles ont
pas handicapés (cas, par exemple, de la même été la cible d’une tentative de géno-
personne emprisonnée parce que condam- cide pendant la Seconde Guerre mondiale.
née par un juge à la suite d’une infraction).
Les mythes et la stigmatisation associés
Les personnes handicapées ont le même
aux maladies mentales perdurent encore,
droit que les autres de vivre au sein de la
entraînant souvent la discrimination et l’ex-
collectivité et de choisir leur domicile ainsi que
clusion. Les stéréotypes qui ont cours au sujet
la ou les personnes avec qui elles vivent. Être
de personnes ayant un handicap mental ou
autonome ne signifie pas nécessairement vivre
intellectuel les dépeignent comme dénuées
seul. Quantité de personnes vivent constam-
ment au contact les unes des autres, voire sous d’intelligence, «bizarres», incapables de
le même toit. Les nombreuses personnes qui travailler, incurables, imprévisibles et dange-
cohabitent avec des membres de leur famille, reuses.
des amis ou des collègues sont habituellement
La présentation faite par la presse des
considérées comme autonomes.
violences commises par des «délinquants
Lorsqu’une personne peut prendre elle- malades mentaux» impressionne en général
même ses décisions – y compris quant au fortement les lecteurs; elle les conforte dans
lieu de son domicile et à la ou aux personnes la conviction que les personnes ayant un
avec qui elle veut vivre – et les faire respecter, handicap psychologique sont dangereuses.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
14 GUIDE DE FORMATION
Outre qu’elles entretiennent le sentiment que la violence est un phénomène social et non
d’un danger et d’un manque de sécurité ainsi un problème mental ou psychologique. C’est
qu’un vague malaise dans la société ou la également admettre que la maladie mentale
collectivité, ces généralisations influent sur est provoquée par des facteurs environnemen-
l’image que les personnes présentant d’un taux et sociaux, et non pas simplement géné-
handicap mental ou intellectuel ont d’elles tiques et/ou organiques.
mêmes. La mésestime de soi exacerbe la stig-
matisation et les mythes. D’après des organi- L’idée que les personnes handicapées
sations telles que le World Network of Users ont des qualités hors normes
and Survivors of Psychiatry, «une des pertes
les plus importantes que nous puissions éprou- Les médias dépeignent souvent les
ver est celle du sentiment que nous avons de personnes handicapées comme ayant à
notre identité au sein de la collectivité. Un trai- certains égards des qualités hors normes.
tement imposé crée une coupure dans notre Tout en essayant ostensiblement de donner
existence, et nous revenons ensuite dans un d’elles une image positive (ce dont on ne
milieu qui nous perçoit comme dangereux, peut que se féliciter), ils risquent – à l’ins-
vulnérables, instables et "malades".»4. tar de ce qui a pu se passer avec d’autres
mythes – d’en faire des personnages unidi-
Sous l’effet de la discrimination, les mensionnels. Ainsi, ces personnes sont
personnes ayant un handicap mental ou intel- courageuses, volontaires, capables de
lectuel ont été systématiquement déresponsa- parvenir à surmonter une grande difficulté
bilisées et appauvries. Du fait de la stigma- – leur handicap. Analysée de plus près, cette
tisation dont la maladie mentale est l’objet, image potentiellement positive signifie aussi
nombre de personnes handicapées sont sans que les personnes handicapées mènent dans
abri et au chômage, manquent d’instruction leur majorité une vie difficile et misérable
et sont socialement isolées, mal soignées, ou (la plupart d’entre elles devant compter sur
enfermées et fortement droguées. la bienfaisance). Le handicap devient une
difficulté (presque) insurmontable. Le héros
La plupart des personnes présentant un est dépeint comme étant la personne qui a
handicap mental ou intellectuel ne sont pas réussi à surmonter le triste sort du plus grand
violentes; elles n’ont pas plus de propension nombre.
que les autres à commettre des violences ou
des délits. Les personnes qui ont un handi- Ce dont il faut se souvenir, c’est que la
cap psychologique sont aussi intelligentes personne handicapée est, comme n’importe
que les autres, et capables, comme tout un qui d’autre, un être humain avec ses forces
chacun, de fonctionner dans un large spectre et ses faiblesses. Il importe que les personnes
de milieux ambiants. handicapées soient montrées sous un jour
favorable, en particulier par les médias, et la
Dire que les personnes atteintes d’un Convention est explicite à ce sujet (art. 8, sensi-
handicap mental ne sont pas plus violentes que bilisation). Cela suppose de mettre en relief la
celles qui en sont indemnes, c’est reconnaître vie de personnes handicapées qui se sont distin-
guées dans la politique, le sport, la littérature
4
Implementation Manual for the United Nations Conven-
tion on the Rights of Persons with Disabilities (Février ou quelque autre domaine. Il n’est cependant
2008), p. 32. pas indispensable que le seul titre de gloire
MODULE 1 – QU’EST-CE QUE LE HANDICAP? 15
de la personne considérée ait été de surmon- Tout d’abord, l’enfant handicapé, ses préoc-
ter son handicap. Mieux vaut qu’elle ait réussi cupations, ses combats, ses centres d’intérêt
à franchir toute la série d’obstacles que doit et ses rêves ont tendance à passer à l’arrière-
surmonter quiconque veut réussir – à atteindre plan et à devenir secondaires. Ensuite, cet
un excellent niveau d’études, à se distinguer enfant paraît unidimensionnel et semble être
par rapport à ses collègues, à répondre aux la cause du désarroi de ses parents. Enfin, il
attentes de la collectivité ou de la famille, etc. ne semble guère avoir de perspectives d’ave-
nir. D’où l’émergence de stéréotypes et de
L’idée que les personnes handicapées mythes négatifs.
sont un fardeau
Cela peut avoir des effets défavorables
Autre mythe, diamétralement opposé à sur les personnes handicapées; ainsi:
celui de l’héroïsme: celui qui voudrait que
• Elles peuvent croire qu’elles sont effecti-
les personnes handicapées soient un fardeau
vement un fardeau;
– pour la société, leur famille, leurs amis.
C’est l’envers du mythe de la personne hors • Elles peuvent en venir à renoncer à l’au-
norme; il est intrinsèquement lié, une fois de tonomie;
plus, à l’approche caritative du handicap.
• Les parents et les enseignants peuvent par-
Cette image est encore véhiculée notamment tir du principe qu’elles ne seront pas auto-
pas les médias. Combien de fois avons-nous nomes et accepter de porter le fardeau;
vu un documentaire télévisé apparemment
bien intentionné nous montrer la vie des • La conjonction des convictions des per-
parents d’un enfant handicapé, les combats sonnes handicapées et de celles des
qu’ils mènent, les difficultés auxquelles ils parents, des enseignants et autres res-
ponsables peut alors renforcer l’idée
sont confrontés en raison du comportement
préconçue que les personnes handica-
de leur enfant, la manière dont leur vie a
pées sont un fardeau.
changé, et ainsi de suite. L’insistance sur la
lutte des parents ne vise généralement pas à Ce sont là autant d’éléments qui, pris
diffuser une image négative des personnes ensemble, peuvent empêcher le changement
handicapées, mais l’effet immédiat est triple. social.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
16 GUIDE DE FORMATION
PRINCIPE ANALYSE
Respect de la La dignité intrinsèque s’entend de la dignité de chaque personne.
dignité intrinsèque Lorsque la dignité des personnes handicapées est respectée, on
et de l’autonomie attache de la valeur à leur expérience et à leurs opinions, que ces
individuelle, personnes peuvent formuler sans craindre qu’on leur fasse du tort
y compris la physiquement, psychologiquement ou affectivement.
liberté de faire ses
Jouir de l’autonomie individuelle, c’est être responsable de sa vie et
propres choix, et de
avoir la liberté de faire ses propres choix. Le respect de l’autonomie
l’indépendance des
individuelle signifie que les personnes handicapées ont, dans des
personnes
conditions d’égalité avec les autres, des possibilités raisonnables
de choisir leur propre voie, qu’elles sont le moins possible exposées
à l’ingérence dans leur vie privée et qu’elles peuvent prendre leurs
propres décisions, avec le soutien nécessaire le cas échéant.
PRINCIPE ANALYSE
Respect de la Le respect de la différence, c’est l’acceptation d’autrui dans un
différence et esprit de compréhension mutuelle. Malgré quelques différences
acceptation visibles et apparentes, les êtres humains ont tous les mêmes droits
des personnes et la même dignité. Dans le cas du handicap, le respect de la
handicapées comme différence conduit à accepter les personnes handicapées pour ce
faisant partie de la qu’elles sont, au lieu d’avoir pitié d’elles ou de voir en elles un
diversité humaine et problème à résoudre.
de l’humanité
Égalité des chances L’égalité des chances est étroitement liée à la non-discrimination. Elle
est réalisée lorsque la société et l’environnement sont ouverts à tous, y
compris les personnes handicapées. Elle ne signifie pas toujours que
des chances absolument identiques sont offertes à tous, car traiter tout
le monde de la même manière pourrait créer des inégalités. Elle tient
donc compte des différences entre les personnes et consiste à faire en
sorte que, malgré ces différences, chacun ait les mêmes chances de
jouir de ses droits.
Accessibilité Pour faire de l’accessibilité (et de l’égalité) une réalité, il faut lever les
obstacles qui s’opposent à la jouissance effective, par les personnes
handicapées, de leurs droits de l’homme. L’accessibilité permet
aux personnes handicapées d’être autonomes et de participer
pleinement à tous les aspects de l’existence. Elle est importante dans
tous les domaines, mais plus particulièrement en ce qui concerne
l’environnement physique – bâtiments, voirie, logement, transports,
information et communications, et autres équipements et services
ouverts ou fournis au public.
Égalité entre Le principe de l’égalité entre hommes et femmes signifie que les
les hommes mêmes droits devraient être expressément reconnus aux femmes et
et les femmes aux hommes sur la base de l’égalité, et que des mesures adéquates
devraient être prises pour garantir aux femmes la possibilité
d’exercer leurs droits. Même si ce principe recoupe celui de la non-
discrimination, l’égalité des hommes et des femmes est expressément
réaffirmée dans les instruments conventionnels parce qu’il subsiste
encore nombre de préjugés qui en empêchent la pleine réalisation.
qu’elles ont un handicap. Cela ne fait que termes, telle l’expression «personnes handi-
souligner la différence. Les personnes handi- capées»; il est alors important de respecter
capées ont leurs forces et leurs faiblesses, leur choix. Mais la définition d’une termino-
exactement comme toutes les autres. logie acceptable comporte toujours le risque
d’une dérive vers le «politiquement correct»,
Terminologie qui peut nuire à la liberté et à la fluidité des
propos. Il ne faut cependant jamais oublier
La terminologie employée pour parler
que certains termes peuvent renforcer les
des personnes handicapées ou pour commu-
niquer avec elles n’est pas moins importante. stéréotypes et offenser les personnes handi-
Certains mots, certaines expressions peuvent capées. Si nous n’employons pas les mots
être blessants, déstabilisants et/ou super- qui conviennent, comment pouvons-nous
ficiels. Les personnes ne se définissent pas espérer faire évoluer les mentalités?
en fonction de leur handicap. Une termino-
• Réfléchissez toujours avant de parler.
logie adéquate favorise le respect et traduit
une meilleure appréciation du handicap. • Si vous avez une incertitude, interrogez
Communiquer convenablement avec toutes votre interlocuteur.
les catégories d’interlocuteurs est important.
Savoir le faire est essentiel pour les partici- • Si une personne préfère un terme à un
pants qui sont quotidiennement au contact autre, utilisez-le.
de personnes handicapées, interviennent
• Il n’y a pas à craindre de dire «Je vois
auprès des autorités pour défendre et réaffir-
ce que vous voulez dire» à un aveugle.
mer leurs droits, conduisent des entretiens ou
L’expression est parfaitement claire. Elle
rédigent des rapports.
n’a rien d’offensant car chacun com-
Les personnes handicapées et les organi- prend bien qu’il ne s’agit pas de vision
sations qui les représentent ont choisi certains au sens étroit du terme.
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE
DE LA CONVENTION
qui devraient remplacer ou clarifier les non seulement des États, mais aussi de
normes antérieures. Ainsi, le droit des toutes les parties prenantes. La partici-
personnes handicapées à un enseigne- pation de personnes handicapées aux
ment gratuit et obligatoire supposait le activités et aux grandes rencontres inter-
droit à une éducation inclusive, qu’elles nationales qui ont précédé l’adoption de
devaient pouvoir exercer aux côtés des la Convention – la première réunion inter-
autres membres de la société; or, cela nationale pour l’examen de la mise en
ne ressortait pas clairement des instru- œuvre du Programme d’action mondial
ments existants. Il était donc essentiel de concernant les personnes handicapées,
réexaminer certaines des conceptions par exemple – a contribué de manière
qui avaient cours jusque là et d’adopter décisive à ouvrir la voie au changement
une convention contraignante qui pour- de paradigme.
rait élucider les concepts et les normes
relatifs aux droits de l’homme et énoncer A. Qu’est-ce que
clairement les obligations juridiques des la Convention?
États. Les auteurs de l’étude soulignaient
aussi que les personnes handicapées et La Convention relative aux droits
les organisations qui les représentaient des personnes handicapées est un instru-
ne tiraient pas parti des normes et méca- ment des droits de l’homme, c’est-à-dire un
nismes existants – de la possibilité de accord international conclu par des États qui
saisir les organes conventionnels par consacre des droits de l’homme et les obliga-
exemple – pour défendre leurs droits et tions correspondantes des États.
en faire progresser le respect. Cela met-
tait en évidence la nécessité d’un instru- • La Convention reconnaît les droits des
ment de droits de l’homme qui porterait personnes handicapées – ce sont les
spécifiquement sur le handicap; mêmes que ceux de tous les autres
êtres humains – mais réaffirme qu’elles
• La Convention a été l’aboutissement doivent elles aussi jouir de ces droits.
d’une vigoureuse stratégie de plaidoyer C’est important, car les personnes
mise en place par les organisations de handicapées s’en voient fréquemment
personnes handicapées, la société civile dénier la jouissance; souvent aussi, elles
et les États. La société civile, et en par- ne savent tout simplement pas qu’elles
ticulier les organisations de personnes
ont des droits. La Convention souligne
handicapées, les organisations interna-
qu’elles devraient jouir de ces droits sans
tionales et les milieux scientifiques qui
discrimination et sur la base de l’égalité
soutenaient les revendications des per-
avec les autres personnes.
sonnes handicapées, ont été le fer de
lance des efforts de plaidoyer et de per- • La Convention impose aux États un cer-
suasion. Leur action a déterminé l’esprit tain nombre d’obligations destinées à
dans lequel la Convention a été conçue: promouvoir et à protéger les droits des
ils ont d’emblée fait savoir clairement que personnes handicapées. Si ces per-
le travail d’élaboration devait prendre en sonnes ont les mêmes droits que celles
compte tous les aspects de la question, qui n’ont pas de handicap, les États
ce qui a permis d’assurer la participation doivent parfois prendre des mesures
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
24 GUIDE DE FORMATION
qu’il ne suffit pas d’affirmer les droits, et handicapées doivent aller de pair avec
qu’il est tout aussi important de définir la prise en considération systématique
les différentes dispositions que les États de leurs droits dans les projets et pro-
(et d’autres acteurs) devraient prendre grammes de développement et autres
pour en assurer le respect. À cet égard, intervention;
la Convention est très détaillée: elle
indique de manière assez approfondie ✓ Assure le suivi national et international du
en quoi consistent les obligations de res- respect des droits. Si les dispositions de
pecter, protéger et assurer la jouissance la Convention n’ont pas force exécutoire,
des droits des personnes handicapées; le fait qu’elle institue des mécanismes
nationaux et internationaux à l’appui de
✓ Reconnaît que le handicap est une la mise en œuvre et du suivi constitue un
construction sociale et que la société soutien à l’exercice des droits et à l’appli-
devrait éliminer les barrières qui cation de la Convention.
empêchent les personnes handicapées
de participer pleinement à la société;
D. «Handicap» et «personnes
✓ Encourage un développement qui prend handicapées»
en compte les personnes handicapées
La Convention ne donne pas une défi-
et qui leur est accessible. La Conven-
nition immuable du handicap. Son préam-
tion est souvent analysée comme étant
bule affirme que le handicap est une notion
un instrument des droits de l’homme et
qui évolue. Le texte adopte pourtant une
un outil du développement. Elle s’inscrit
approche sociale du handicap, puisqu’il
à cet égard dans un courant du droit
précise que ce dernier résulte de l’interaction
international des droits de l’homme qui
entre les personnes présentant des handicaps
admet que les États doivent prendre
et les barrières extérieures qui font obstacle
des mesures positives pour garantir
à leur pleine participation à la société.
l’exercice des droits et qui souligne la
contribution que la communauté interna- Dans cet esprit, la Convention dans
tionale doit apporter en aidant les États son ensemble repose sur l’idée que l’envi-
à donner effet à ces droits. De fait, le ronnement extérieur et les perceptions que
développement est essentiel pour que la sa construction révèle jouent un rôle central
Convention puisse être mise en œuvre dans la création de cette situation qu’il est
convenablement. Ainsi, nombre de ses convenu d’appeler «le handicap». Nous
dispositions requièrent des améliorations sommes loin de l’approche médicale, qui
de l’accès aux biens et aux services qui se fonde au contraire sur l’idée d’un «corps
dépendent en partie de l’adoption de brisé», le handicap étant le résultat mani-
stratégies et de politiques de développe- feste d’une déficience physique, mentale ou
ment efficaces. Point important, le déve- sensorielle de la personne.
loppement devrait prendre en compte
les personnes handicapées et leur être Dès lors, la notion de handicap ne peut
accessible (art. 32). Cela suppose une pas être rigide; elle dépend au contraire
double démarche: les programmes du milieu ambiant et varie d’une société à
spécifiquement destinés aux personnes l’autre. Si la Convention reconnaît que cette
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
26 GUIDE DE FORMATION
notion évolue, elle souscrit à l’évidence à pour elle, les personnes deviennent
l’idée qu’il s’agit d’une construction sociale, handicapées lorsqu’elles se heurtent
puisqu’ elle affirme que «le handicap résulte à un environnement inhospitalier ou
de l’interaction entre des personnes présen- inaccessible. Les personnes handica-
tant des handicaps et les barrières compor- pées n’ont pas besoins d’être «traitées»
tementales et environnementales qui font avant d’accéder à leur environnement
obstacle à leur pleine et effective participa- (la société); c’est au contraire l’environ-
tion à la société sur la base de l’égalité avec nement qui doit s’ouvrir uniformément à
les autres». tous ses membres. Il le fait en éliminant
les barrières comportementales et envi-
Conformément à ce principe, la Conven-
ronnementales de telle sorte que chacun
tion ne donne pas une définition figée des
puisse participer activement et jouir de
personnes handicapées, se contentant d’indi-
la totalité de ses droits;
quer qu’il s’agit «des personnes qui présentent
des incapacités physiques, mentales, intel- c) La Convention s’étend à tous les han-
lectuelles ou sensorielles durables dont l’in- dicaps. Le champ d’application de la
teraction avec diverses barrières peut faire
Convention ne se limite pas à telles ou
obstacle à leur pleine et effective participa-
telles personnes; quiconque présente un
tion à la société sur la base de l’égalité avec
handicap physique, mental, intellectuel
les autres» (article premier, objet).
ou sensoriel durable est le bénéficiaire
Voici quelques éléments importants à de cet instrument. La définition donnée à
prendre en considération6: l’article premier pourrait être étendue à
toutes les personnes handicapées – par
a) Le handicap est une notion qui, loin d’être exemple aux personnes ayant un handi-
immuable, évolue. La Convention recon- cap de courte durée ou aux personnes
naît que le «handicap» est une notion qui considérées comme faisant partie de ces
évolue sous l’effet de barrières compor- groupes;
tementales et environnementales. Cette
notion n’est donc pas rigide et peut être d) Ce sont les barrières qu’il faut cataloguer,
adaptée aux conditions qui règnent dans et non les êtres humains. Cataloguer une
une société déterminée (l’accent sera personne peut être le premier pas sur la
placé sur le type d’obstacles comporte- voie de son exclusion et de la violation
mentaux et environnementaux présents de sa dignité intrinsèque. La Convention
dans cette société et sur les manières de n’exclut pas l’emploi de définitions dans
les surmonter); la législation nationale, qui peuvent
d’ailleurs se révéler particulièrement
b) Le handicap est envisagé non pas
utiles dans des secteurs comme l’emploi
comme un problème médical mais
ou la sécurité sociale. Ce qui compte,
comme le résultat de l’interaction entre
c’est que les définitions qui sous-tendent
une incapacité et l’environnement. La
les politiques et les lois soient conformes
Convention ne s’intéresse pas au han-
à l’approche sociale du handicap, en
dicap en tant que problème médical;
vertu de laquelle les enjeux sont évalués
6
Voir également plus haut, le module 1. en fonction des obstacles existants et
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE DE LA CONVENTION 27
très différentes aux divers stades de son exis- Autres personnes handicapées
tence. Il est très important de s’assurer que
les droits des enfants handicapés sont pris en D’autres personnes handicapées peuvent
compte dans les lois, politiques, programmes elles aussi être exposées à des formes
multiples de discrimination; c’est le cas par
et autres interventions de telle sorte qu’aucun
exemple des personnes autochtones et des
enfant n’est laissé sur le bord de la route.
personnes âgées handicapées.
L’article 7 de la Convention relative
aux droits des personnes handicapées E. Une approche du
impose aux États de prendre toutes les handicap fondée sur
mesures nécessaires pour garantir aux les droits de l’homme
enfants handicapés la pleine jouissance
de tous les droits de l’homme et de toutes Ce qui caractérise la Convention, c’est
les libertés fondamentales, sur la base de l’abandon d’une vision du handicap centrée
l’égalité avec les autres enfants. Il exige que sur la bienfaisance ou sur la médecine au
«l’intérêt supérieur de l’enfant» – expression bénéfice d’une approche sociale privilé-
qu’il emprunte à la Convention relative aux giant les droits de l’homme. Qui a compris
droits de l’enfant – soit une considération cela est en mesure de comprendre toute la
primordiale de toutes les actions concernant Convention et son propos. Pour une expli-
les enfants handicapés. cation détaillée de l’approche caritative, de
l’approche médicale, de l’approche sociale
Dans son observation générale n° 9 et de l’approche fondées sur les droits de
(2006) relative aux droits des enfants l’homme, voir le module 1.
handicapés, le Comité des droits de l’en-
fant donne des directives détaillées sur les F. La structure et le contenu
droits des enfants handicapés au titre de la de la Convention
Convention relative aux droits de l’enfant.
Adoptés à l’époque où les dispositions La Convention contient 50 articles, qui
de la Convention relative aux droits des peuvent se classer somme suit8:
personnes handicapées étaient en cours de
8
Veillez à ce que les participants à la formation aient le
négociation, ces principes sont à rappro- texte de la Convention sous les yeux et à ce qu’ils le par-
cher de l’article 7. courent tandis que vous commentez cette image.
Art. 4 Obligations Outre qu’elle reconnaît les droits des personnes handicapées,
générales la Convention assigne les responsabilités, et indique ce que
les responsables doivent faire, et quand (immédiatement ou
progressivement, par exemple).
Toutes les obligations sont importantes. Elles sont analysées en
plus grand détail plus loin. Voici deux exemples:
Les États parties doivent prendre progressivement des mesures
pour assurer le plein exercice des droits économiques, sociaux et
culturels dans toute la mesure des ressources dont ils disposent. Cette
disposition équivaut à admettre que le niveau de développement
d’un pays peut influer sur le rythme auquel il met en œuvre certains
articles de la Convention. Elle est une manifestation de réalisme.
À noter que le Protocole facultatif se rapportant à la Convention
a prévu un recours contre le non-respect des droits économiques,
sociaux et culturels avant même l’adoption, le 10 décembre
2008, du Protocole facultatif se rapportant au Pacte relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels.
Il existe également une obligation de consulter étroitement les
personnes handicapées et de les faire activement participer à
l’élaboration et à la mise en œuvre des lois et des politiques
adoptées aux fins de l’application de la Convention relative
aux droits des personnes handicapées, ainsi qu’aux autres
décisions qui les concernent. Cette disposition concrétise le
principe général de participation et d’intégration énoncé à
l’article 3, et le renforce en imposant à l’État de le respecter.
Questions à débattre: Comment le respect de cette obligation
peut-il être mesuré? Quand y a-t-il eu une consultation effective?
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
30 GUIDE DE FORMATION
MESURE EXPLICATION
Ces mesures sont centrées sur les initia- privé, et l’on s’intéresse grandement, depuis
tives que les États doivent prendre pour quelques années, à la question de la respon-
créer un environnement favorable à l’exer- sabilité des entreprises au regard de ces
cice de droits spécifiques des personnes droits. Cependant, la Convention va certai-
handicapées. nement plus loin que les autres instruments
dans l’énumération de domaines précis qui
I. Obligations se prêtent aux interventions du secteur privé.
Ce secteur ou les entreprises ou organismes
Les obligations se situent à deux niveaux: privés sont mentionnés dans les articles rela-
l’article 4 consacre des obligations générales tifs: aux obligations générales (art. 4.1 e)),
et chacun des articles qui suivent énonce des à l’accessibilité (art. 9.2 b)), à la mobilité
obligations liées à des droits particuliers. personnelle (art. 20 d)), à la liberté d’expres-
sion (art. 21 c)), à la santé (art. 25 d)), et au
La première question qui se pose est celle travail (art. 27.1 h)).
de savoir qui doit tenir les engagements pris.
Comme tous les autres instruments des droits Outre les entreprises, d’autres acteurs
de l’homme, la Convention impose ses obli- non étatiques ont l’obligation de respecter
gations aux États. Toutefois, plusieurs articles les droits des personnes handicapées. L’ar-
font également ressortir le rôle des entre- ticle 25, par exemple, cite les professionnels
prises privées dans la réalisation des droits de la santé. Plusieurs articles évoquent les
des personnes handicapées. S’il appartient services d’accompagnement et les services
aux États de veiller à ce que les entreprises sociaux (l’article 12 à propos du soutien
privées respectent la Convention (autrement nécessaire à l’exercice de la capacité juri-
dit, si les obligations ne pèsent pas directe- dique et l’article 19 au sujet de l’autonomie
ment sur celles-ci), il importe de reconnaître de vie, par exemple). L’article 24 mentionne
le rôle du secteur privé et de souligner la notamment l’emploi d’enseignants quali-
nécessité de l’associer par des partenariats à fiés afin de promouvoir l’insertion scolaire.
la promotion des droits des personnes handi- Donc, même si la responsabilité juridique du
capées. D’autres instruments des droits de respect de la Convention appartient à l’État,
l’homme mentionnent également le secteur nombre d’autres acteurs ont un rôle à jouer.
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE DE LA CONVENTION 35
Quelles sont, dans ces conditions, les personnes handicapées puissent jouir de
obligations des États? Elles sont récapitulées leurs droits dans des conditions d’éga-
ci-dessous, et analysées plus en détail dans lité avec les autres, il faut que ces ser-
les modules qui suivent: vices soient accessibles. Il conviendra
tantôt de mettre en place des services
• Réexaminer les lois et politiques exis-
adaptés au handicap, tantôt de rendre
tantes – pour s’assurer qu’elles res-
accessibles les services qui s’adressent à
pectent la Convention et ne fixent pas
l’ensemble de la population (éducation
des règles et des normes incompatibles
par exemple);
avec ses dispositions – et en adopter de
nouvelles pour que le cadre juridique et • Sensibiliser – les barrières auxquelles
politique contribue à la mise en œuvre se heurtent les personnes handicapées
de la Convention. Il pourra s’agir de lois tiennent bien souvent aux mentalités.
anti-discrimination et d’une législation Pour que celles-ci évoluent, il faut sensi-
générale sur le handicap (le cas échéant biliser l’opinion aux droits ainsi qu’aux
– il n’y a pas d’obligation à cet égard) capacités de ces personnes;
mais aussi de textes relatifs à la tutelle,
à l’éducation, à la santé mentale, etc. • Former – pour donner effet à bon nombre
Il s’agira aussi de textes d’application de droits des personnes handicapées, et
et de règlements. Quant aux politiques, notamment à ceux qui ont trait à l’accès
ce pourront être des stratégies natio- aux services, il importe de familiariser
nales de développement, des stratégies des personnels tels que les enseignants
nationales relatives au handicap ou à et les professionnels de la santé avec les
l’intégration sociale, ou encore des stra- dispositions de la Convention. Ainsi, les
tégies de services ministériels visant à enseignants doivent avoir les connais-
améliorer les droits des personnes han- sances nécessaires pour pouvoir soutenir
dicapées; l’éducation inclusive, et, si l’on veut que
les personnes handicapées accèdent
• Financer – il ne suffit pas d’adopter des
aux services de santé dans des condi-
lois. Si certaines interdictions de la dis-
tions d’égalité avec les autres, il faut
crimination n’ont pas d’incidences finan-
cières, d’autres ont un coût (c’est le cas, que les professionnels de la santé com-
par exemple, de l’aménagement des prennent en quoi consiste le passage à
espaces publics pour les rendre acces- l’approche sociale/fondée sur les droits
sibles aux personnes handicapées). Les de l’homme;
lois et politiques qui ne sont pas assor- • Recueillir des données – pour pouvoir
ties de moyens financiers ont peu de élaborer de bonnes lois et de bonnes
chances d’être pleinement appliquées; politiques d’application de la Conven-
• Rendre les biens et services acces- tion, il faut de bonnes données. Les États
sibles – nombre de dispositions de la devraient donc mener des recherches
Convention exigent l’accès à des biens et recueillir des données qui permettent
et des services tels que des technolo- de mieux comprendre la situation des
gies d’aide, des soins de santé et des personnes handicapées et les obstacles
programmes éducatifs. Pour que les auxquels elles se heurtent;
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
36 GUIDE DE FORMATION
• Renforcer les capacités – dès lors que le Chacune des obligations générales dont
handicap est envisagé sous l’angle des il a déjà été question peut se classer dans
droits de l’homme, il devient essentiel, une de ces trois catégories. Par exemple:
pour la pleine application de la Conven-
• Respecter: s’abstenir de tout acte incom-
tion, de renforcer tant les capacités des
patible avec la Convention;
États de s’acquitter de leurs obligations
que celles des personnes handicapées • Protéger: prendre des mesures pour éli-
de faire valoir leurs droits. miner la discrimination dans le secteur
privé;
Il y a différentes manières de présenter
les obligations des États qui découlent des • Donner effet: adopter des lois com-
instruments des droits de l’homme. Le système patibles avec la Convention; prendre
des mesures pour assurer la réalisation
international repose sur deux grandes caté-
progressive des droits économiques,
gories d’obligations, dites négatives et posi-
sociaux et culturels.
tives:
de l’homme ou bureau d’un médiateur, la situation qui règne dans le pays. Le méca-
par exemple. Ce dispositif devrait être nisme de coordination peut, par exemple,
conforme aux Principes de Paris, qui compter des représentants de la société
définissent les normes d’indépendance civile: c’est déjà le cas de bon nombre de
et les fonctions des institutions de cette conseils nationaux du handicap.
nature, telles qu’elles ont été arrêtées
par l’Assemblé générale. Il est très important que le dispositif
national de mise en œuvre et de suivi de
Du point de vue de la promotion de la l’application de la Convention soit conforme
Convention, les points de contact et les méca- aux Principes de Paris, car il constitue alors
nismes de coordination peuvent grandement un instrument indépendant de soutien et de
contribuer à changer la donne. Les questions vérification de l’application. Nombreuses
relatives au handicap relèvent traditionnelle- sont les fonctions que peuvent exercer les
ment d’un ministère qui est souvent celui de institutions de défense des droits de l’homme
la santé ou celui des affaires sociales. Par indépendantes; elles peuvent:
voie de conséquence, certaines questions
échappent parfois à la sphère d’influence • Vérifier comment les pouvoirs publics
du ministère dont elles relèvent pour l’essen- s’acquittent des engagements pris au
tiel, ce qui crée des cloisonnements et des titre de la Convention;
divisions. Si, par exemple, l’éducation des • Adresser aux autorités nationales des
enfants handicapés est du ressort du minis- recommandations quant aux mesures
tère des affaires sociales et non du ministère à prendre pour améliorer la mise en
de l’éducation, ces enfants sont en-dehors œuvre;
du système général d’enseignement. Parce
qu’ils sont de nature transversale, les droits • Étudier et promouvoir l’harmonisation
des personnes handicapées touchent à de des lois nationales relatives au handi-
nombreux domaines différents, et notam- cap;
ment à la justice, à l’éducation, au travail, • Formuler des avis sur les propositions
aux affaires extérieures, au logement, aux et les projets de loi relatifs au handi-
finances, au sport et à la culture. Les points cap pour en assurer la conformité à la
de contact et les mécanismes de coordina- Convention;
tion permettent de faire en sorte:
• Favoriser la ratification d’instruments
• Qu’il existe un organe gouvernemental, relatifs au handicap – par exemple,
ou plusieurs, responsables des droits encourager les autorités à ratifier le
des personnes handicapées (points de Protocole facultatif se rapportant à la
contact); Convention si elles ne l’ont pas déjà fait;
• Que les différents ministères et services • Mieux faire connaître les droits des per-
(et d’autres organes) coordonnent leurs sonnes handicapées et la lutte contre la
activités (mécanisme de coordination). discrimination liée au handicap;
• Formuler des programmes d’éducation les États parties pour renforcer l’applica-
aux droits de l’homme; tion de la Convention. Le Comité peut
également recevoir des communications
• Contribuer à l’établissement des rapports
au titre du Protocole facultatif et effectuer
au Comité des droits des personnes han-
des enquêtes sur d’éventuelles violations
dicapées;
graves et systématiques de la Conven-
• Coopérer à l’échelon régional ou inter- tion;
national avec d’autres institutions natio-
• La Conférence des États parties, qui se
nales de défense des droits de l’homme.
réunit au moins une fois tous les deux
Il existe encore d’autres moyens d’ap- ans pour étudier toute question liée à la
plication et de suivi de la Convention que mise en œuvre de la Convention.
ceux qu’elle mentionne; on peut citer à titre
d’exemple les tribunaux et les organes de Ces mécanismes seront analysés plus
défense des consommateurs. Les tribunaux avant dans d’autres modules de formation.
assurent la protection judiciaire des droits Il pourrait cependant être utile d’étudier le
des personnes handicapées, leur permet- processus d’établissement des rapports et de
tant d’obtenir des décisions exécutoires voir comment ce processus ainsi que l’exa-
lorsqu’une violation est avérée. Cela peut men des rapports par le Comité peuvent
être particulièrement utile lorsqu’un particu- contribuer à la mise en œuvre. Il faudra peut-
lier, un groupe ou une organisation de la être adapter le débat en fonction des carac-
société civile décident d’engager une action téristiques des participants: si, par exemple,
pour qu’elle fasse jurisprudence. La décision ce sont principalement des représentants de
judiciaire peut alors avoir des répercussions l’administration, l’échange de vues pourrait
considérables, et entraîner une modifica- être centré sur la manière dont l’établisse-
tion de la législation ou un changement des ment du rapport peut les aider à faire respec-
mentalités. Néanmoins, la justice peut être ter la Convention. L’élaboration du rapport
lente et les recours coûteux, de sorte que peut être l’occasion pour les représentants de
les personnes tentées de s’engager dans un l’État de:
procès doivent déterminer si l’affaire mérite
l’investissement en temps et en argent qu’elle • S’interroger sur les lois et politiques
nécessite. nationales afin d’en vérifier à la fois la
conformité à la Convention et l’impact
Au niveau international, la Convention sur les personnes handicapées;
institue deux mécanismes:
• Détecter des lacunes dans le dispositif
• Le Comité des droits des personnes han- juridique et politique;
dicapées, organe conventionnel indé-
• S’assurer que des points de contact et
pendant qui compte 18 membres et dont
des mécanismes de coordination ont été
la fonction essentielle est d’examiner les
désignés au sein de l’administration et
rapports des États parties sur les mesures
qu’ils fonctionnent convenablement;
qu’ils ont prises, en même temps que des
rapports parallèles de la société civile, et • Déceler les déficits de financement au
d’instaurer un dialogue constructif avec sein des ministères et des programmes
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE DE LA CONVENTION 39
qui seraient de nature à retarder la mise la prise des décisions qui les concernent. Il
en œuvre; peut donc être utile de développer ce prin-
cipe si le temps disponible le permet.
• Établir à la faveur du processus de
rédaction des partenariats avec d’autres Les notions de participation et d’inté-
acteurs tels que les organisations de per- gration entières et effectives supposent que
sonnes handicapées; chacun puisse prendre pleinement part aux
• Et… sphères publique et privée de la vie de la
société et aux décisions qui influent sur son
Si les participants appartiennent princi- existence.
palement à la société civile, ils pourraient
débattre de la manière dont celle-ci peut: Participation. Pour être effective, la parti-
i) influer sur le rapport de l’État; ii) rédiger à cipation doit aller au-delà de la simple consul-
l’intention du Comité un rapport parallèle qui tation préalable à un choix ou une décision
offre un panorama plus ample de la situation déjà arrêtés. La participation effective doit
des personnes handicapées et de la jouis- être aussi active que possible, de manière
sance de leurs droits que le tableau brossé que les personnes handicapées soient asso-
dans le rapport national. ciées au processus de décision et aux initia-
tives correspondantes. Elle comporte égale-
Si les participants appartiennent au ment un élément de reddition des comptes.
système des Nations Unies, ils pourraient se Les responsables devraient prendre en consi-
demander comment les équipes de pays des dération les propositions et les idées émises
Nations Unies peuvent informer le Comité. par les personnes handicapées, soit en modi-
Ils ne savent peut-être pas que des rensei- fiant leur action, leur initiative ou leur déci-
gnements peuvent être communiqués confi- sion, soit, si ce n’est pas possible, en expli-
dentiellement au Comité. Le débat pourrait quant pourquoi ils ne peuvent pas le faire.
porter principalement sur le point de savoir
comment les recommandations du Comité Intégration. Il ne s’agit pas simplement de
peuvent renforcer la programmation des placer physiquement les personnes handica-
Nations Unies et nourrir la programma- pées avec les autres, dans les mêmes espaces
tion future, y compris les analyses et les (les classes, par exemple). Ce qu’il faut, c’est
programmes de pays. que la société dans son ensemble évolue et
s’adapte de sorte que ces personnes puissent
K. Participation et participer dans des conditions d’égalité avec
intégration des les autres. Dans la classe, par exemple, il
faudra peut-être modifier le plan des cours
personnes handicapées
pour l’adapter aux besoins des élèves qui
et des organisations sont sourds, ou changer des activités de
représentatives manière qu’elles développent les aptitudes
de chaque élève, handicapé ou non.
La participation et l’intégration effec-
tives des personnes handicapées n’est qu’un Grâce à la participation et à l’intégration:
des principes généraux de la Convention.
Il est cependant particulièrement important • Les besoins et les préoccupations des per-
compte tenu de l’invisibilité traditionnelle de sonnes handicapées sont mieux compris
bon nombre de personnes handicapées dans et les solutions peuvent être plus efficaces;
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
40 GUIDE DE FORMATION
• Les personnes handicapées peuvent sou- la Convention et ont participé à ses réunions.
lever les questions qui les préoccupent L’Assemblée générale s’est toujours montrée
et demander des comptes aux respon- favorable à une participation active des
sables; organisations de personnes handicapées
aux travaux du Comité spécial.
• Elles deviennent plus visibles; elles
peuvent tirer profit de l’expérience des Une large coalition d’organisations de
autres et évoluer à leur contact, et réci- personnes handicapées et d’organisations
proquement. non gouvernementales a constitué l’Interna-
La participation et l’intégration ne sont tional Disability Caucus (IDC), porte-parole
pas des événements ponctuels; ce sont des des organisations de personnes handica-
processus qui durent tout au long de la vie. pées de toutes les régions du monde. Un
de ses membres a affirmé que son propos
De plus, les personnes handicapées était d’«ouvrir la voie à des changements qui
devraient avoir l’occasion de prendre des mettront fin aux discriminations et assureront
décisions qui ne sont pas nécessairement l’exercice de nos libertés et de nos droits».
liées au handicap ni à leur propre situa-
tion. L’accessibilité est parfois réalisée à La participation des organisations de
l’occasion d’activités qui concernent spéci- personnes handicapées et d’autres organi-
fiquement les personnes handicapées (une sations non gouvernementales à la rédac-
réunion sur leurs droits, par exemple). Ces tion du texte de la Convention a atteint un
personnes ont cependant, comme toutes niveau probablement sans précédent dans
les autres, de nombreux centres d’intérêt. les négociations relatives aux instruments des
Ainsi, une personne handicapée souhaitera droits de l’homme des Nations Unies. À la
peut-être participer à des réunions qui n’ont dernière session du Comité spécial, quelque
aucun rapport avec le handicap, et l’accessi- 800 membres d’organisations de personnes
bilité devrait donc s’étendre à ces activités-là handicapées étaient inscrits. Au-delà des
aussi. Le principe de participation et d’inté- négociations, ces organisations ont été acti-
gration doit donc être entendu dans un sens vement associées à la «vie» de la Conven-
très large. tion – de la cérémonie de signature, tenue
le 30 mars 2007, aux débats annuels du
Une société civile très motivée, formée Conseil des droits de l’homme sur la Conven-
de personnes handicapées et de représen- tion, en passant par les travaux du Comité
tants de leurs organisations, d’organisations des droits des personnes handicapées et de
non gouvernementales généralistes et d’ins- la Conférence des États parties.
titutions nationales de défense des droits de
l’homme, a joué d’emblée un rôle moteur Quel a donc été le rôle des organisa-
dans la rédaction de la Convention. tions de personnes handicapées? L’Interna-
tional Disability Caucus (IDC) a été constam-
Conformément à la pratique des ment un acteur majeur et a exprimé à la
débats relatifs aux droits de l’homme, table des négociations les préoccupations
des organisations non gouvernementales, des organisations nationales, régionales et
dont des organisations représentatives des internationales de la société civile. Les orga-
personnes handicapées, ont été accréditées nisations de personnes handicapées ont
auprès du Comité spécial chargé de rédiger pris une part essentielle à la rédaction du
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE DE LA CONVENTION 41
projet du groupe de travail qui a servi de Pour reprendre les mots prononcés par
base au texte final, fruit de la collaboration le représentant d’une institution nationale de
de 27 gouvernements, de 12 organisations défense des droits de l’homme avant l’adop-
non gouvernementales et organisations de tion de la Convention: «La participation
personnes handicapées, et d’une institution active de la société civile a tout particulière-
nationale de défense des droits de l’homme. ment contribué à donner à la Convention une
orientation claire et une grande pertinence;
Le texte final de la Convention a été
elle a également permis d’en mener rapide-
l’aboutissement de négociations véritable-
ment la rédaction à bon terme (…) C’est à
ment inclusives. Nombre des vues expri-
cette ouverture et à ce souci d’inclusion que
mées et des suggestions faites par la société
le texte de la Convention, malgré sa relative
civile, notamment par les organisations de
longueur, doit son puissant magnétisme.».
personnes handicapées et surtout par l’in-
termédiaire de l’IDC, ont été incorporées Le rôle clé de la société civile n’a pas
au texte. Des propositions de fond formu- pris fin avec l’adoption de la Convention; il
lées par l’IDC, concernant par exemple la se poursuit à travers sa mise en œuvre. Les
nécessité de veiller à consulter les personnes
personnes handicapées prennent une part
handicapées lors de l’élaboration des poli-
déterminante à sa promotion et aux activités
tiques et de la prise des décisions, font partie
d’information qui s’y rapportent. Le nouveau
intégrante de la Convention.
paradigme sur lequel elle se fonde s’ins-
C’est principalement aussi à l’IDC et pire du souci de comprendre et de partager
aux institutions nationales de défense des les points de vue des personnes handica-
droits de l’homme qu’est due la présence de pées. Celles-ci contribuent aussi de manière
la disposition relative à l’application et au décisive à l’examen et à la proposition de
suivi au niveau national qui exige des États mesures nationales.
parties la création d’un mécanisme national
indépendant de promotion, de protection et L. Que peuvent faire
de suivi de l’application de la Convention. les différents acteurs
pour promouvoir la
Rien pour nous sans nous!
Convention?
Le mot d’ordre «Rien pour nous sans
Les acteurs étatiques
nous» se fonde sur le principe de la parti-
cipation et s’inscrit dans l’action menée par ✓ Ratifier la Convention;
les organisations de personnes handicapées
à travers le monde pour obtenir la pleine ✓ Une fois que la Convention est ratifiée,
participation et l’égalisation des chances le faire savoir;
pour, par et avec les personnes handica-
✓ Traduire la Convention dans les langues
pées. L’idée fondamentale est que celles-ci
locales et la mettre à disposition sous
doivent toujours être directement associées des formes accessibles;
à la planification des stratégies et des poli-
tiques qui auront des répercussions directes ✓ S’assurer qu’un point de contact a été
sur leur existence. désigné au sein de l’administration;
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
42 GUIDE DE FORMATION
✓ Envisager la mise en place d’un disposi- pour rappeler aux États leurs responsa-
tif de coordination; bilités vis-à-vis des personnes handica-
pées, en soulignant que les pouvoirs
✓ Désigner un mécanisme indépendant de
publics sont les principaux responsables
mise en œuvre et de suivi de l’applica-
de la satisfaction des droits de ces per-
tion;
sonnes, même si d’autres acteurs (sec-
✓ Examiner et réformer les lois et poli- teur privé, communauté internationale,
tiques, et prendre de premières mesures organisations non gouvernementales,
pour commencer à donner effet à la etc.) jouent eux aussi un rôle important;
Convention (pour de plus amples préci-
sions, voir le module 4); ✓ S’appuyer sur la Convention pour obte-
nir la mise en place des mécanismes
✓ Et… nationaux de promotion et de suivi pré-
vus par l’article 33, afin que l’applica-
Les organisations de personnes
handicapées tion ait davantage de chances d’être
fructueuse et durable;
Les personnes handicapées et les organi-
sations qui les représentent peuvent promou- ✓ Coopérer avec les autorités pour les
voir la Convention de nombreuses manières; encourager à adresser leur rapport au
elles peuvent par exemple: Comité en temps voulu et participer à la
rédaction de ce rapport;
✓ Évaluer les lois et politiques nationales
ainsi que les activités des pouvoirs ✓ Fournir au Comité des rapports paral-
publics et autres acteurs à la lumière du lèles pour qu’il ait une vision aussi com-
texte de la Convention afin d’en assurer plète que possible de la situation des
la conformité à celui-ci et d’obtenir la personnes handicapées dans le pays,
mise en œuvre progressive des disposi- ainsi que des domaines où des recom-
tions de la Convention; mandations claires sont le plus néces-
✓ Prendre la Convention pour repère afin saires et où elles seront probablement le
d’évaluer la jouissance effective des plus efficaces;
droits des personnes handicapées et
✓ Et…
d’informer à ce sujet;
Les organisations de la société civile
✓ Utiliser la Convention comme un ins-
(autres que les organisations de personnes
trument de plaidoyer – assurer, par
exemple, la couverture médiatique de handicapées)
la signature et de la ratification de la
Les organisations de la société civile
Convention ainsi que des rapports au
comme celles qui défendent les droits de
Comité pour appeler l’attention sur la
l’homme ou qui œuvrent en faveur du déve-
situation des personnes handicapées;
loppement ont un rôle important à jouer dans
✓ Utiliser la Convention comme norme la promotion et le suivi de l’application de la
objective et internationalement reconnue Convention. Elles peuvent:
MODULE 2 – PRÉSENTATION SUCCINCTE DE LA CONVENTION 43
✓ Envisager de faire systématiquement une Les équipes de pays des Nations Unies
place aux droits des personnes handica-
Les équipes de pays des Nations Unies
pées dans leurs propres programmes;
peuvent elles aussi contribuer à la promotion
✓ Se demander si elles ne devraient pas de la Convention; dans cette perspective,
créer un programme spécifiquement elles peuvent:
consacré aux droits des personnes han- ✓ Intégrer l’application de la Convention
dicapées; aux programmes de pays;
✓ Renforcer la capacité des organisations ✓ Mettre en place un programme spécifi-
de personnes handicapées; quement destiné à aider l’État à ratifier
et appliquer la Convention;
✓ Faire figurer des informations sur les
droits de personnes handicapées dans ✓ Renforcer les capacités des organisa-
leurs rapports alternatifs aux organes tions de personnes handicapées;
conventionnels des Nations Unies;
✓ Donner des informations au Comité au
✓ Et… moment où elles font rapport;
des affaires sociales et de la santé, dont institution nationale de défense des droits de
relèvent généralement les questions liées au l’homme, elle devrait pouvoir s’exprimer; elle
handicap, mais aussi des ministères tels que peut également contribuer aux travaux de
ceux de l’éducation, de la justice, de l’inté- recherche sur les droits des personnes handi-
rieur ou des finances, qui auront à participer capées et à l’analyse des lois et politiques.
à la mise en œuvre de la Convention.
Le processus de ratification devrait être
Dans le débat relatif à la ratification, les inclusif et représentatif de la société dans son
personnes handicapées devraient avoir voix au ensemble, groupes minoritaires et opposition
chapitre à la fois directement et par l’intermé- politique compris; il ne devrait pas porter
diaire de leurs organisations. Les consultations la marque d’un programme politique. Cela
devraient prendre en considération la diversité tient notamment à ce principe du droit inter-
des handicaps. Les personnes handicapées national qui veut que les autorités succes-
ne forment pas un groupe monolithique: leurs sives d’un pays soient également liées par
handicaps sont variés (psychosociaux, intellec- tout instrument international déjà ratifié. Le
tuels, physiques, sensoriels) et elles sont elles- danger est que le pouvoir en place soit tenté
mêmes diverses (hommes, femmes, enfants, d’exclure certains acteurs, comme l’oppo-
personnes autochtones, personnes âgées, etc.). sition politique, pour pouvoir prendre ses
Les consultations devraient tenir compte de décisions plus librement. À terme, cepen-
cette variété dans toute la mesure du possible. dant, cela pourrait nuire à l’application de
la Convention, qui ne se poursuivrait pas en
L’opportunité de soutenir, y compris finan- cas de changement de gouvernement.
cièrement, la participation des organisations
de personnes handicapées aux consulta- Le processus de ratification de l’Australie
tions devrait être mûrement pesée. Parmi les offre un bon exemple des différentes étapes à
États qui s’engagent dans le processus de parcourir. L’Australie a signé la Convention en
ratification, certains – pays en développe- mars 2007 et l’a ratifiée en juillet 2008. L’exer-
ment ou pays qui traversent une crise, par cice national a comporté un examen appro-
exemple – peuvent avoir du mal à élargir fondi de toute la législation du Commonwealth,
les consultations faute de moyens financiers des États et des Territoires destiné à détermi-
suffisants. Force est alors de tirer le meilleur ner si le pays pouvait se conformer à tous les
parti possible de ressources limitées. Mais
articles de la Convention. Le Ministère de la
la consultation doit avoir lieu, non seulement
famille, du logement, des services de proxi-
pour assurer la participation et l’intégration
mité et des affaires autochtones et le Minis-
des personnes handicapées, mais aussi parce
tère de la justice, en consultation avec les
que celles-ci peuvent avoir des propositions à
faire quant à l’utilisation la plus efficace de organisations nationales de personnes handi-
ressources modiques en vue de l’application capées ainsi qu’avec les conseils consulta-
progressive de la Convention. tifs et les services juridiques spécialisés dans
le domaine du handicap, ont présenté au
D’autres acteurs de la société civile, Gouvernement un rapport sur l’impact de la
comme les organisations non gouverne- ratification. Les auteurs du rapport y ont dressé
mentales qui se préoccupent des droits de la liste des avantages et des inconvénients de
l’homme ou du développement, devraient la ratification de la Convention et de son Proto-
également être consultés. S’il existe une cole facultatif, analysé la compatibilité des lois
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
48 GUIDE DE FORMATION
✓ Notamment les décideurs par des réu- ✓ Adresser des lettres de remerciement
nions, des courriels, des lettres, des aux fonctionnaires et autres partenaires;
appels téléphoniques et des visites, en
soulignant que le handicap est une ques- ✓ Évaluer le succès des stratégies et des
tion de droits de l’homme; messages.
• Fixe des normes internationales concernant les droits et les libertés des personnes handicapées;
• Clarifie l’application aux personnes handicapées de ces principes des droits de l’homme que sont l’intégration,
la non-discrimination, l’accessibilité et la participation;
• Offre aux pouvoirs publics un modèle sûr dont ils peuvent s’inspirer pour l’élaboration des lois et politiques
nationales;
• Institue des mécanismes efficaces de suivi de la réalisation des droits des personnes handicapées;
• Prescrit des mécanismes nationaux de mise en œuvre et de suivi de la Convention.
La Convention marque un changement de modèle dans la manière de penser le handicap et de percevoir les
personnes handicapées. Ces personnes cessent d’être les «objets» du dévouement de personnes charitables, de
traitements médicaux et de la protection sociale pour devenir les «sujets» de droits, capables de prendre des décisions
et de jouer un rôle actif dans la société.
La Convention est le premier instrument majeur des droits de l’homme de ce siècle; elle est une conquête historique
pour les 650 millions de personnes handicapées qui vivent dans le monde. Elle offre certainement [au] [à la] [NOM
DU PAYS] une importante occasion de s’acquitter de ses obligations vis-à-vis de ses citoyens. Nous serons heureux
de travailler avec vous sur ces questions, et sommes prêts à vous apporter le soutien dont vous pourriez avoir besoin.
Je vous prie d’agréer, [Monsieur] [Madame], l’assurance de ma considération distinguée.
le droit à des voies de recours. C’est à lui, y compris les mesures prises pour traiter
estime-t-il, qu’il appartient de déterminer si un handicap mental lorsqu’un tel traite-
une réserve est compatible avec l’objet et le ment est nécessaire, en dernier recours
but de l’instrument, en partie parce que cette et sous réserve de garanties». La France
décision n’est pas du ressort des États parties et les Pays-Bas ont fait savoir qu’à leur
s’agissant d’instruments relatifs aux droits de sens le «consentement» s’entend: 1) du
l’homme, et en partie parce que le Comité ne consentement donné par une personne
peut manquer de faire cette évaluation dans capable de consentir; 2) dans le cas
l’exercice de ses fonctions. des personnes incapables de consentir,
de l’autorisation donnée par leur repré-
Les parties prenantes qui cherchent à
sentant ou par l’autorité ou l’organisme
soutenir les organes conventionnels, à enri-
prévus par la loi.
chir l’examen périodique universel et/ou à
coopérer avec les autorités nationales qui • Malte, Monaco et la Pologne ont émis
engagent ou terminent la procédure de ratifi- des réserves et des déclarations indi-
cation devraient plaider en faveur d’une rati- quant que la Convention ne serait pas
fication sans réserve. interprétée comme conférant un droit à
l’avortement.
Point important, les réserves existantes
peuvent être modifiées. Le changement peut • La République arabe syrienne a affirmé
consister en un retrait partiel, en la création «comprendre» que le fait d’être signa-
de nouvelles exclusions ou en la modifica- taire de la Convention «n’entraîne en
tion des effets juridiques de certaines disposi- aucune manière une reconnaissance
tions (ce qui équivaut à la formulation d’une d’Israël ni une entrée en relations avec
nouvelle réserve). Un État ou une organisa- Israël, sous quelque forme ou selon
tion d’intégration régionale peuvent à tout quelque modalité que ce soit, à propos
moment retirer une réserve qu’ils ont formu- de la Convention».
lée à la Convention ou au Protocole facultatif.
• L’Azerbaïdjan a déclaré «qu’il sera
Le retrait doit être fait par écrit et être signé
par le chef de l’État, le chef du gouverne- impossible de garantir la conformité avec
ment ou le ministre des affaires étrangères, les dispositions de la Convention dans
ou par une personne pleinement habilitée à ses territoires occupés par la République
cet effet par l’une de ces autorités. Comme d’Arménie jusqu’ à ce que ces territoires
les réserves, les déclarations peuvent être soient libérés de cette occupation».
modifiées ou retirées. • La France et plusieurs autres États ont
élevé des objections à la déclaration par
Des États parties ont formulé un certain
laquelle la République islamique d’Iran
nombre de réserves et de déclarations dont
avait indiqué qu’elle ne se sentait pas
quelques-unes ont suscité des objections
liée par les dispositions de la Conven-
d’autres États parties.
tion jugées incompatibles avec les lois
• Au sujet de la notion de «consentement» iraniennes. D’après la France, le Répu-
et de ses incidences, l’Australie a déclaré blique islamique d’Iran a «formulé une
entendre «que la Convention autorise réserve de portée générale et indéter-
l’assistance ou le traitement obligatoire, minée. En effet, cette réserve présente
MODULE 3 – LA RATIFICATION 53
Dans les pays dualistes, les ordres juri- de l’ordre juridique interne automatiquement
diques international et national sont considé- ou par voie d’incorporation expresse», et a
rés comme distincts. Les instruments internatio- invité les États parties à agir en conséquence.
naux des droits de l’homme auxquels ces États
sont parties ne sont pas applicables en tant Le Comité des droits économiques,
que tels dans l’ordre national, et des textes sociaux et culturels a exprimé des vues
doivent être adoptés pour transcrire l’instru- analogues dans son observation générale
ment dans le droit national. Si certains États n° 9 (1998) relative à l’application du Pacte
parties ont apporté des modifications à la au niveau national: «les normes internatio-
législation existante pour se mettre en confor- nales contraignantes relatives aux droits de
mité avec la Convention, il semble que les l’homme devraient s’appliquer directement et
mesures prises jusqu’à présent ne permettent immédiatement dans le cadre du système juri-
pas de donner directement effet à la Conven- dique interne» et «même si le Pacte n’oblige
tion dans le système juridique interne. pas formellement les États à incorporer ses
dispositions dans la législation interne, une
Si un pays dualiste ne transpose pas un telle démarche est souhaitable».
instrument international dans le droit national,
par exemple par négligence ou parce que la Dans les pays où il faut que la loi renvoie
ratification ou l’adhésion obéissent à des moti- aux dispositions d’un instrument ou les repro-
vations purement politiques, l’application de duise, les magistrats ont parfois trouvé des
cet instrument est incertaine. Si l’État ne trans- moyens ingénieux d’exploiter les normes inter-
crit pas la Convention dans son ordre juridique nationales. On peut citer le cas de l’Afrique
après l’avoir ratifiée, les personnes qui ont le du Sud, qui n’est pas partie au Pacte inter-
plus besoin de la protection qu’elle apporte national des droits économiques, sociaux et
culturels, mais dont la Cour constitutionnelle
n’en bénéficieront pas nécessairement. Parmi
s’est appuyée sur les observations générales
les pays dualistes figurent l’Afrique du Sud,
du Comité des droits économiques, sociaux et
l’Australie, le Canada, l’Inde, le Kenya, le
culturels pour interpréter la portée de ces droits
Malawi, le Royaume-Uni et la Zambie.
au regard de la Constitution sud-africaine.
Les organes conventionnels ont souvent
recommandé que les États transcrivent les E. La place de la Convention
instruments des droits de l’homme dans le dans le système juridique
droit national pour qu’ils produisent tous leurs des États
effets. C’est ainsi que, dans son observation
générale n° 31 (2004) relative à la nature de Dans les États où la Convention est direc-
l’obligation juridique générale imposée aux tement applicable, il lui a été assigné différents
États parties au Pacte, le Comité des droits de niveaux dans la hiérarchie des lois. Le Costa
l’homme, tout en relevant que le Pacte interna- Rica, par exemple, place les conventions au
tional relatif aux droits civils et politiques ne même niveau que la Constitution. En Argen-
faisait pas expressément obligation aux États tine, le parlement a été saisi d’un projet de
parties d’incorporer ses dispositions, a cepen- loi tendant à situer la Convention au niveau
dant exprimé l’avis «que les droits garantis de la Constitution, à l’instar des autres instru-
par le Pacte sont susceptibles d’être mieux ments des droits de l’homme. Dans plusieurs
protégés dans les États où le Pacte fait partie pays, comme la Croatie, le Mali, le Mexique
MODULE 3 – LA RATIFICATION 55
cas contraire, veiller à ce que le point ✓ De dresser la liste des initiatives en cours
de contact soit suffisamment haut placé et de déterminer les ministères qui en
pour pouvoir agir et à ce qu’il soit relié sont responsables;
par un dispositif de coordination effi-
cace à d’autres ministères compétents, ✓ De veiller à ce qu’un budget soit alloué à
de manière que l’action en faveur de la son activité dans le plan de travail pour
Convention soit interministérielle; l’année suivante;
Les tribunaux: Les États parties sont La Convention dispose aussi que la
également tenus de promouvoir une connais- société civile, et en particulier les personnes
sance adéquate de la Convention parmi le handicapées et les organisations qui les
personnel qui contribue au fonctionnement de représentent, devraient participer pleine-
la justice, conformément à l’article 13. Celui- ment à tous les aspects du suivi, de même
ci se lit ainsi: «Afin d’aider à assurer l’ac- qu’elles devraient être associées à l’élabora-
cès effectif des personnes handicapées à la tion et à la mise en œuvre des politiques,
justice, les États Parties favorisent une forma- des programmes et des lois adoptés aux fins
tion appropriée des personnels concourant de l’application de la Convention, conformé-
à l’administration de la justice, y compris les ment à l’article 4.
personnels de police et les personnels péni-
Ces dispositions soulèvent deux ques-
tentiaires.». Il s’agit notamment de former les
tions au moins:
juges et les avocats aux droits des personnes
handicapées et aux obligations internatio- a) La société civile, et en particulier les
nales contractées par les États parties à la personnes handicapées et les organisa-
Convention, afin que les litiges soient traités tions qui les représentent devraient être
conformément au droit international. De plus, associées au processus de suivi engagé
les tribunaux devraient être physiquement par le mécanisme indépendant prévu à
accessibles aux personnes handicapées; il l’article 33 (et, idéalement, à l’activité
en va de même de l’information relative à la des points de contact et du dispositif de
procédure (documents en braille, sites web coordination);
accessibles avec un lecteur d’écran, interpré-
tation dans la langue des signes au tribunal, b) La société civile a elle-même un rôle à
etc.). jouer dans le suivi de la Convention,
indépendamment des autres méca-
Les parlements: Les parlements ont un nismes de l’article 33.
rôle déterminant à jouer dans l’application
de la Convention, en adoptant des lois mais B. Lois, politiques et budgets
aussi en demandant au pouvoir exécutif de
rendre des comptes sur les politiques et les
La réforme législative
stratégies adoptées ainsi que sur les services
fournis. Les parlements prennent également
Reformer les lois: une obligation
une part importante au processus budgé-
taire. Si la Convention ne les cite pas, les L’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 4
renforcer en assurant leur accessibilité et en de la Convention impose aux États parties
sensibilisant les parlementaires aux droits de «prendre toutes mesures appropriées,
des personnes handicapées et à l’impor- y compris des mesures législatives, pour modi-
tance de celles-ci en tant qu’électeurs peut fier, abroger ou abolir les lois, règlements,
influer grandement sur la mise en œuvre de coutumes et pratiques qui sont source de discri-
la Convention. mination envers les personnes handicapées».
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
62 GUIDE DE FORMATION
De plus, les États s’engagent à adopter s’assurer que le «handicap» est entendu
des mesures appropriées d’ordre législatif et comme le résultat de l’interaction entre
administratif, et (art. 4, par. 1 c)) à prendre l’«incapacité» d’une personne et un
en compte la protection et la promotion des environnement défavorable;
droits de l’homme des personnes handica-
pées dans toutes les politiques. ✓ De définir la «discrimination» confor-
mément à la Convention. L’article 2
D’où l’importance, pour la mise en œuvre de celle-ci donne de «la discrimination
de la Convention, d’un examen approfondi fondée sur le handicap» une définition
des lois et politiques nationales en vue: élargie, qui englobe toute distinction,
exclusion ou restriction ayant pour objet
• De modifier ou d’abolir les lois discrimi-
ou pour effet de compromettre ou de
natoires;
réduire à néant les droits des personnes
• D’adopter de nouvelles mesures législa- handicapées. Il s’agit là d’une acception
tives pour assurer l’application future. très large des termes, laquelle exige au
moins l’interdiction de la discrimination
L’examen des lois et politiques (exis-
liée au handicap dans tous les domaines,
tantes) est une obligation qui s’impose à tous
mais aussi l’adoption de mesures juri-
les États. Même lorsque la Convention est
diques qui empêchent la discrimination
directement applicable, il faut s’assurer que
tout court ainsi que de dispositions desti-
tout le droit national, y compris la réglemen-
nées à promouvoir l’égalité entre les per-
tation régionale et le droit coutumier, est mis
sonnes handicapées et les autres;
en conformité avec elle.
✓ D’examiner non seulement la législation
Quelques moyens d’assurer qui touche spécifiquement ou exclusive-
la conformité à la Convention ment aux droits des personnes handi-
capées, mais aussi toutes les lois per-
L’article 4 et d’autres dispositions de la
tinentes. C’est important, car nombre
Convention citent quelques-uns des éléments
de domaines du droit et de la politique
à avoir à l’esprit lors de l’examen et de la
peuvent influer sur la jouissance des
réforme des lois; il convient:
droits des personnes handicapées, y
✓ D’incorporer aux lois internes des ren- compris lorsque ni ces personnes ni le
vois explicites à la Convention, afin qu’il handicap ne sont cités. Il convient de se
y ait des liens clairs entre les normes pencher sur les textes suivants:
internationales et nationales, et que les
❍ La constitution;
différentes normes de la Convention
viennent à faire partie intégrante du ❍ Les lois et règlements relatifs à la
droit national; non-discrimination;
✓ De veiller à ce que la conception du ❍ Les lois et règlements relatifs au han-
«handicap» soit conforme à l’interpréta- dicap en général;
tion donnée par la Convention et, par
conséquent, à l’approche sociale/fon- ❍ La réglementation en matière de
dée sur les droits de l’homme – donc de tutelle;
MODULE 4 – LES MESURES D’APPLICATION 63
Même dans les États où la Convention Des recours plus accessibles pourraient venir
n’est pas directement applicable, la ratifi- remplacer des procédures à l’issue incer-
cation ou l’adhésion encouragent la magis- taine.
trature à interpréter la législation nationale
conformément à ses dispositions. En la Enfin, des formes traditionnelles de
transposant dans le droit national, les États justice pourraient être préférables, en parti-
dualistes permettent à leurs tribunaux de culier dans des régions rurales défavori-
l’appliquer dans les décisions qu’ils rendent. sées. Nombreux sont les pays où les tribu-
naux sont rares en dehors de la capitale et
Mais d’autres voies de recours doivent des principaux centres urbains. La situation
aussi être envisagées. Tout d’abord, elles est alors particulièrement critique pour les
peuvent parfois être mieux adaptées. Ainsi, personnes handicapées qui vivent dans des
il vaudra peut-être mieux faire traiter les diffi- régions reculées. Si la pauvreté ou l’extrême
cultés liées à la prestation de services par pauvreté y règnent, il peut devenir impos-
des tribunaux spécialisés dans le droit de la sible de se déplacer librement et de se
consommation ou par des organes de recours rendre dans une zone urbaine pour obtenir
administratifs – commissions nationales des les services d’un conseil ou une autre forme
droits de l’homme, médiateurs, commissions d’aide. Néanmoins, les systèmes tradition-
de l’égalité, commissaires aux droits des nels ne sont pas toujours la panacée pour
personnes handicapées, etc. Ce sont des les personnes handicapées en raison des
instances moins intimidantes, auxquelles il préjugés et de la stigmatisation dont elles
est parfois beaucoup plus facile d’accéder, sont l’objet. Les décisions risquent alors de
y compris sans avocat, et dont les interven- répondre à des conceptions traditionnelles
tions peuvent se révéler moins coûteuses. De qui isolent les personnes handicapées ou qui
même, la médiation et l’arbitrage peuvent leur accordent un traitement inégal. Aussi
être préférables dans certains cas, car ils faudrait-il associer les autorités tradition-
sont moins conflictuels et proposent des solu- nelles, y compris les anciens et les membres
tions (réparations) acceptables pour toutes
influents de la collectivité, aux programmes
les parties. L’inspection du travail et l’ins-
de sensibilisation et y inclure des éléments
pection scolaire peuvent être des moyens
relatifs à la non-discrimination et à la partici-
d’engager la responsabilité des employeurs
pation aux recours locaux.
et des personnels de l’éducation, et d’offrir
ainsi des solutions (réparations) plus rapides,
Les acteurs
moins coûteuses et, en définitive, plus effi-
caces que les recours judiciaires. Voici une liste non exhaustive des acteurs
qui devraient participer à l’examen et à la
Ensuite, d’autres recours pourraient être
réforme des lois:
plus rapides et plus sûrs. Dans certains pays,
l’appareil judiciaire fonctionne mal ou ne ✓ Les commissions parlementaires – com-
dispose pas de ressources suffisantes pour mission des droits de l’homme, par
offrir véritablement des recours utiles. En exemple;
pareil cas, les citoyens peuvent n’avoir guère
confiance dans les tribunaux et renoncer à ✓ Le ministère de la justice ou le bureau du
porter plainte pour atteinte à leurs droits. procureur général;
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
66 GUIDE DE FORMATION
✓ Faire figurer un compte rendu de l’exa- Les politiques ne sont pas des interven-
men des lois et des modifications appor- tions ponctuelles; elles comportent plusieurs
tées à la législation dans le rapport ini- phases, à savoir:
tial au Comité des droits des personnes
• Le diagnostic: Il faut un diagnostic pour
handicapées.
dresser la liste des points forts, des fai-
blesses, des possibilités à exploiter et des
Les politiques écueils à éviter. Ainsi, il convient d’analy-
ser la stratégie nationale de développe-
Les lois transposent les engagements
ment pour déterminer si les programmes
internationaux dans le droit national et
de développement tiennent compte des
entraînent souvent de véritables améliora-
droits des personnes handicapées, si le
tions de la situation des droits de l’homme développement leur est accessible, si
sur le terrain. les auteurs des programmes de déve-
loppement créent par inadvertance des
Souvent, cependant, les politiques
barrières supplémentaires (du fait, par
permettent d’accélérer la mise en œuvre.
exemple, de la construction d’écoles
Si les lois énoncent des droits et des obliga-
inaccessibles), etc.;
tions, les politiques peuvent fixer les étapes
à franchir pour atteindre les objectifs aux • La formulation: Le diagnostic posé, il
échéances prévues et respecter ainsi les enga- devient possible de formuler la politique.
gements pris. Les politiques sont particulière- Il convient de choisir des indicateurs et
ment utiles pour la réalisation progressive des des objectifs intermédiaires réalistes.
droits économiques, sociaux et culturels. Mais La formulation devrait être conçue de
elles le sont aussi pour l’exercice des droits sorte qu’il y ait autant de liens que pos-
civils et politiques (l’amélioration de l’admi- sible avec des dispositions précises de
nistration de la justice, par exemple). Parmi la Convention. La politique de l’éduca-
les nombreuses politiques en rapport avec tion devrait renvoyer à l’article 24 de
manière à reconnaître expressément le
l’application de la Convention, on peut citer:
droit à l’éducation inclusive et à com-
✓ La stratégie nationale de développement porter tant des activités de formation des
(ou de réduction de la pauvreté); maîtres en matière d’inclusion que des
services éducatifs spécifiques à l’inten-
✓ Les stratégies de développement sec- tion des personnes handicapées – sou-
torielles (santé, éducation, protection tien dans la salle de classe, documen-
sociale, populations vulnérables, etc.); tation en braille et enseignement de la
langue des signes, par exemple. Les per-
✓ La stratégie nationale et le plan d’action
relatifs aux droits de l’homme; sonnes handicapées et les organisations
qui les représentent devraient participer
✓ La stratégie et le plan d’action relatifs activement à toutes les étapes de la for-
aux droits des personnes handicapées; mulation des politiques;
10
Organisation mondiale de la Santé et Banque mondiale, Rapport mondiale sur le handicap (Genève, 2012).
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
70 GUIDE DE FORMATION
• Des objectifs intermédiaires assortis d’un − Quel est le degré de cohérence entre
échéancier devraient être fixés pour l’élaboration des politiques et le pro-
orienter la mise en œuvre progressive; cessus budgétaire?
• Des indicateurs de la réalisation de ces − Dans quelle mesure les budgets sont-
objectifs intermédiaires devraient être ils cohérents avec les objectifs prio-
définis; ritaires, les normes et les buts de la
• Des fonds devraient être affectés de telle Convention, y compris du point de
sorte que les mesures nécessaires à la vue de leur impact souhaité et de leur
impact réel (qui sont eux-mêmes fonc-
réalisation de ces objectifs puissent être
tion de la réalisation progressive des
prises;
droits et du volume maximum de res-
• Le plan d’action devrait faire l’objet d’un sources disponibles)?
suivi à l’aide des indicateurs sélection-
nés pour déterminer si l’application est − Dans quelle mesure les budgets sont-
en bonne voie. ils cohérents à la fois avec les dispo-
sitions de la Convention et avec les
Compte tenu des difficultés que les États priorités fixées à l’échelon national?
les plus pauvres éprouvent à appliquer la
Convention (en raison des ressources néces- − Dans quelle mesure la budgétisation
saires), le paragraphe 2 de l’article 4 et l’ar- est-elle inclusive et transparente, et
ticle 32 soulignent l’aide que peut apporter appelle-t-elle une justification de l’uti-
la coopération internationale. L’alinéa d) de lisation des fonds?
l’article 32.1 prescrit aux États de prendre
− Dans quelle mesure la budgétisation
des mesures appropriées et efficaces de
tient-elle compte des rôles des titu-
coopération internationale, et notamment
laires de droits, de la société civile
d’apporter, s’il y a lieu, une assistance tech- et de l’État ainsi que de la relation
nique et une aide économique. dynamique entre eux?
[…] Il faut un financement suffisant et durable des services publics pour s’assurer qu’ils
couvrent bien tous les bénéficiaires ciblés et que les prestations sont de bonne qualité. La
sous-traitance des services, l’établissement de partenariats publics-privés et la dévolution de
budgets aux personnes handicapées afin de leur donner le contrôle sur leurs soins, peuvent
contribuer à une amélioration de la prestation des services.
Pour améliorer l’accessibilité économique des biens et services destinés aux personnes
handicapées et pour compenser les dépenses supplémentaires associées au handicap, […]
il faudrait envisager d’étendre la couverture de l’assurance maladie et des assurances
sociales, en veillant à ce que les personnes handicapées démunies et vulnérables bénéfi-
cient de programmes de protection ciblés sur la pauvreté, et d’instaurer des exonérations
de frais, des réductions tarifaires pour les moyens de transport et des diminutions des taxes
et droits à l’importation d’aides techniques.
✓ Les personnes qui concourent à l’admi- avant tout et surtout sur l’État. Le texte
nistration de la justice – conseils, juges, tout entier énonce les responsabilités
personnel pénitentiaire, police, avocats qu’a l’État de promouvoir, protéger et
défenseurs de l’intérêt général, etc.; garantir les droits des personnes handi-
capées. Cela ne signifie pas que l’État
✓ Des entreprises;
doive fournir les services lui-même. C’est
✓ Des prestataires de services non gou- la raison pour laquelle la Convention
vernementaux – organisations à but non indique qu’il s’engage, par exemple, à
lucratif et ONG, par exemple; «promouvoir», «encourager» ou «facili-
ter» la prestation de services. Il y a des
✓ Les médias;
cas, cependant, où il doit fournir lui-
✓ Les professionnels de la santé; même des services – par exemple dans
les régions reculées, dans celles où les
✓ Les personnels de l’éducation; entreprises privées ne sont pas implan-
tées parce que l’activité économique n’y
✓ Les inspecteurs du travail;
est pas rentable, ou dans les zones que
✓ Les syndicats; les organisations à but non lucratif ne
parviennent pas à atteindre.
✓ Les organisations patronales.
2. Réglementer le secteur privé: Lorsque
Le rôle de l’État des acteurs privés fournissent certains
services, il est inutile que l’État en fasse
S’agissant de la réforme de la législation autant; il a cependant l’obligation de
et des politiques, l’État est à l’évidence l’acteur réglementer les organisations privées
principal, mais en ce qui concerne la prestation qui les proposent. C’est ce qu’affirme en
de services, le secteur privé et la société civile
particulier le paragraphe 1 de l’article 4
nationale et internationale sont également
de la Convention:
parties prenantes. Pour ce qui est de l’État, les
autorités centrales ont un rôle de régulation et Les États parties s’engagent à …
de prestation de services, mais d’autres admi-
e) Prendre toutes mesures appropriées
nistrations, municipales et locales notamment,
pour éliminer la discrimination fondée
doivent également intervenir.
sur le handicap pratiquée par toute
Quel est donc le rôle de l’État? personne, organisation ou entreprise
privée.
La responsabilité de l’État est primor-
diale: Les instruments des droits de l’homme La signification très large que la Conven-
font de l’État le principal responsable de la tion donne au terme de «discrimination»
promotion, la protection et l’application de signifie que l’obligation de l’État de
la Convention. réglementer le secteur privé (y compris
L’État doit: les particuliers) ne se limite pas aux cas
de discrimination directe. Elle englobe
1. S’acquitter de ses obligations en tant aussi la discrimination indirecte (par
que principal responsable: Les obliga- exemple, lorsque des personnes han-
tions découlant de la Convention pèsent dicapées sont exclues dans la pratique
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
76 GUIDE DE FORMATION
parce que des équipements sont inac- obtiennent le consentement libre et éclairé
cessibles ou que les services nécessaires des personnes handicapées concernées;
ne sont pas proposés). à cette fin, les États Parties mènent des
activités de formation et promulguent des
La Convention traite aussi de domaines règles déontologiques pour les secteurs
précis dans lesquels l’État devrait régu- public et privé de la santé de façon, entre
ler le secteur privé: autres, à sensibiliser les personnels aux
droits de l’homme, à la dignité, à l’auto-
✓ Accessibilité (art. 9): Les États Parties
nomie et aux besoins des personnes han-
prennent également des mesures appro-
dicapées;
priées pour…faire en sorte que les orga-
nismes privés qui offrent des installations ✓ Emploi (art. 27): Les États parties …
ou des services qui sont ouverts ou four- favorise[nt] l’emploi de personnes han-
nis au public prennent en compte tous dicapées dans le secteur privé en met-
les aspects de l’accessibilité par les per- tant en œuvre des politiques et mesures
sonnes handicapées; appropriées, y compris le cas échéant
des programmes d’action positive, des
✓ Liberté d’expression et accès à l’informa-
incitations et d’autres mesures.
tion (art. 21): Les États Parties prennent
toutes mesures appropriées pour que les 3. Réglementer les différents niveaux de
personnes handicapées puissent exercer l’administration: L’administration cen-
le droit à la liberté d’expression et d’opi-
trale doit également réglementer sa
nion … [et à cette fin ils] demandent
propre activité de prestation de services
instamment aux organismes privés qui
et celle des autres niveaux adminis-
mettent des services à la disposition du
tratifs. En vertu de l’alinéa d) du para-
public, y compris par le biais de l’Inter-
graphe 1 de l’article 4, l’État s’engage
net, de fournir des informations et des
à veiller à ce que les pouvoirs publics
services sous des formes accessibles aux
et les institutions agissent conformément
personnes handicapées et que celles-ci
à la présente Convention. Les «pouvoirs
puissent utiliser;
publics» doivent être entendus au sens
✓ Santé (art. 25): Les États parties …exigent large comme comprenant les autorités
des professionnels de la santé qu’ils dis- des différents ministères centraux, mais
pensent aux personnes handicapées aussi – nous l’avons déjà indiqué – tous
des soins de la même qualité que ceux les rouages de l’administration, y com-
dispensés aux autres, notamment qu’ils pris aux échelons provincial et local.
MODULE 4 – LES MESURES D’APPLICATION 77
Les personnes handicapées ont des besoins ordinaires: santé et bien-être, sécurité
économique et sociale, acquisition et développement des compétences […]. Ces besoins
peuvent et doivent être satisfaits à travers les programmes et services ordinaires. L’inclusion
transversale non seulement répond aux exigences des droits de l’homme des personnes
handicapées, mais elle se révèle également plus efficace.
L’inclusion transversale du handicap impose un engagement à tous les niveaux: elle doit être
envisagée dans tous les secteurs et être incluse dans la législation, les politiques, les stratégies
et les programmes, nouveaux ou existants. L’adoption de la conception universelle et la mise en
place d’aménagements raisonnables sont deux stratégies importantes. Cette inclusion suppose
aussi une planification efficace, des ressources humaines et des investissements financiers suffi-
sants, le tout s’accompagnant de mesures spécifiques comme des programmes et services ciblés
pour veiller à ce que les divers besoins des personnes handicapées soient correctement satisfaits.
En plus des services ordinaires, certaines personnes handicapées peuvent avoir besoin
d’accéder à des mesures spécifiques: réadaptation, services de soutien ou formation, par
exemple. La réadaptation, y compris les aides techniques comme les fauteuils roulants, les
aides auditives […], améliore le niveau fonctionnel et l’autonomie. Une gamme de services
de soutien et d’assistance bien réglementés peut satisfaire les besoins de soins et permettre
à ces personnes d’être autonomes et de participer à la vie économique, sociale et culturelle
de leur communauté. La réadaptation et la formation professionnelles peuvent leur ouvrir des
débouchés sur le marché du travail.
✓ Fournir aux personnes handicapées des ✓ La formation des parties prenantes aux
informations accessibles concernant questions d’accessibilité (art. 9);
MODULE 4 – LES MESURES D’APPLICATION 79
[…] Les capacités des ressources humaines peuvent être améliorées par une éduca-
tion, une formation et un recrutement efficaces. Un examen des connaissances et des
compétences du personnel dans les domaines concernés peut être le point de départ pour
l’élaboration de mesures propres à améliorer ces compétences. Une formation adéquate
sur le handicap, intégrant les principes des droits de l’homme, doit être incluse dans les
programmes de formation et dans les procédures d’agrément en vigueur. Une formation
continue en cours d’emploi doit être assurée pour les praticiens en place qui assurent et
gèrent les services. Par exemple, le fait de renforcer les capacités des agents de soins de
santé primaires et d’assurer la disponibilité de personnel spécialisé quand cela est néces-
saire contribue à fournir aux personnes handicapées des soins efficaces et abordables.
De nombreux pays disposent de trop peu de personnel travaillant dans des domaines
tels que la réadaptation […]. La mise au point de normes pour la formation des diffé-
rents types et niveaux de personnel […] peut aider à combler les lacunes.[…] Dans
certains contextes et certains secteurs, des mesures pour fidéliser le personnel peuvent
être pertinentes.
Collecter de l’information sur les connaissances, les perceptions et les attitudes rela-
tives au handicap peut aider à identifier les difficultés de compréhension du grand public,
difficultés qui peuvent être surmontées grâce à l’éducation et à l’information du public.
Les gouvernements, les organisations de bénévoles et les associations de professionnels
devraient envisager de mener des campagnes de marketing social pour modifier les
attitudes vis-à-vis de certaines questions à l’origine de stigmatisations, comme le VIH, les
problèmes de santé mentale et la lèpre. La participation des médias est indispensable
tant pour le succès de ces campagnes que pour diffuser des exemples positifs présentant
des personnes handicapées et leur famille.
MODULE 4 – LES MESURES D’APPLICATION 81
et services publics que les effets de cette Traiter différemment deux personnes
discrimination se font particulièrement dans de telles conditions peut créer la confu-
sentir. (C’est nous qui soulignons) sion et susciter des allégations de discrimina-
tion. Or il ne s’agit pas de discrimination. Il
Si l’observation générale porte spécifi- s’agit de la simple reconnaissance du fait que
quement sur les droits économiques, sociaux les personnes sont différentes mais qu’elles
et culturels, elle pourrait s’appliquer aussi ont les mêmes droits; pour faire de l’égalité
bien aux droits civils et politiques. Nombreux une réalité, il faut parfois procéder différem-
sont par exemple les pays où les personnes ment selon les personnes dont il s’agit.
handicapées ne sont toujours pas autorisées
à voter et n’ont pas la capacité juridique de A. Les formes de
se marier ou de conclure un contrat d’achat discrimination prohibées
ou de vente d’un bien immobilier.
Le droit relatif à la non-discrimination
Il est difficile d’analyser la discrimination fait intervenir un certain nombre de concepts
sans s’intéresser aussi au concept d’égalité. qu’il importe de comprendre.
Dans le droit des droits de l’homme, la non-
discrimination et l’égalité sont réellement Les discriminations de jure
les deux faces d’une même pièce. En luttant et de facto
contre la discrimination, nous espérons
La discrimination de jure (inscrite dans
lutter contre les facteurs qui, dans la société,
la loi)
génèrent l’inégalité. Et en combattant les
facteurs qui sont source d’inégalité, nous Le droit des droits de l’homme prohibe la
espérons prévenir la discrimination. discrimination consacrée par la législation.
Dans certains pays, la loi électorale interdit
Il peut néanmoins y avoir, dans l’étude aux personnes ayant une incapacité mentale
des relations entre non-discrimination et et placées sous tutelle de voter. Dans le droit
égalité, une certaine confusion sur le sens du des droits de l’homme, c’est un exemple
mot «égalité». Celui-ci est souvent compris de discrimination fondée sur le handicap.
comme désignant des réalités qui sont iden- Il s’agit d’une distinction faite par la loi en
tiques ou équivalentes. Dans le cas des droits raison du handicap mental qui a pour but et
de l’homme, il ne signifie aucunement que pour effet de réduire à néant, pour certaines
toutes les personnes sont identiques. Il veut personnes handicapées, la reconnaissance
dire qu’elles ont toutes les mêmes droits. Pour du droit de vote.
que deux personnes aient les mêmes droits, il
La discrimination de facto (exercée dans
faut parfois qu’elle soit traitées différemment
la pratique)
en raison de leurs différences intrinsèques
(par exemple, lorsqu’elles sont de sexes Les personnes sont protégées non seule-
différents, qu’elles n’ont pas le même patri- ment contre la discrimination inscrite dans les
moine linguistique, qu’elles n’appartiennent textes, mais aussi contre celle qui s’exerce
pas toutes deux à une minorité ou qu’elles dans la pratique. Ainsi, elles sont protégées
ont des incapacités différentes). contre les décisions prises par les employeurs
MODULE 5 – LA DISCRIMINATION FONDÉE SUR LE HANDICAP 89
sur la base de stéréotypes ou d’idées précon- disproportionné sur l’exercice de leurs droits.
çues quant aux aptitudes ou à l’efficacité Ainsi, l’imposition par un employeur à tous
du personnel handicapé. L’employeur qui ses salariés d’une seule et même heure de
refuse de promouvoir une personne handi- déjeuner pourrait constituer une discrimina-
capée parce qu’il a la conviction, sans tion envers une personne handicapée tenue
preuve aucune, que son handicap l’empê- de prendre un médicament à heure fixe ou de
chera d’exercer les fonctions de son nouveau se reposer périodiquement pendant la jour-
poste commet, a priori, une discrimination née. Alors que cette obligation s’applique
de facto. C’est là une distinction fondée sur apparemment à tout le personnel et ne vise
le handicap qui a pour but et pour effet de pas les personnes handicapées, elle a un
porter atteinte au droit au travail (y compris effet discriminatoire. Combattre la discrimi-
au déroulement de la carrière). nation indirecte aide à remonter jusqu’aux
partis pris qui sont à la racine de la discri-
Les discriminations directe mination et de l’exclusion. À noter que la
et indirecte discrimination indirecte est parfois difficile à
prouver.
La discrimination directe
Des formes multiples
Il y a discrimination directe lorsqu’une de discrimination
personne est traitée moins favorablement
qu’une autre, qui se trouve dans la même La Convention rappelle dans son préam-
situation, pour un motif lié au handicap. bule «les difficultés que rencontrent les
Ainsi, le refus d’admettre un élève handicapé personnes handicapées, qui sont exposées à
dans le système général d’enseignement des formes multiples ou aggravées de discri-
équivaut à une discrimination directe. Imagi- mination fondées sur la race, la couleur, le
nons un instant qu’une entreprise ait pour sexe, la langue, la religion, l’opinion poli-
principe de n’embaucher aucune personne tique ou toute autre opinion, l’origine natio-
ayant un dos fragile, quelles que soient les nale, ethnique, autochtone ou sociale, la
fonctions du poste à pourvoir. Cette règle fortune, la naissance, l’âge ou toute autre
fait subir une discrimination illégitime aux situation». Une femme handicapée, par
personnes handicapées qui sont en mesure exemple, peut être victime d’une discrimina-
de s’acquitter de ces fonctions: elles sont trai- tion fondée non seulement sur le handicap
tées de manière inéquitable par rapport à mais aussi sur le sexe.
d’autres candidats au poste en raison de leur
Prenons le cas d’une femme déplacée
handicap.
dans son propre pays qui fuit une guerre.
La discrimination indirecte Elle est très pauvre, appartient à une minorité
ethnique et souffre d’un handicap physique.
La discrimination est dite indirecte dans C’est là un scénario courant dans bon
le cas des lois, politiques ou pratiques qui nombre de pays en proie à des conflits et
paraissent neutres mais qui ne tiennent des crises humanitaires. Cette femme pour-
pas compte de la situation particulière des rait être victime de discriminations multiples
personnes handicapées – et qui, de ce fait, en raison de son sexe, sa condition sociale
leur font du tort directement ou ont un impact et son handicap. Les femmes sont souvent
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
90 GUIDE DE FORMATION
chacun, handicapé ou non, puisse jouir des de participer à une activité ou de bénéficier
mêmes droits de l’homme. de services sur la base de l’égalité avec les
autres. Dans le milieu professionnel, cela
Tous les droits de l’homme et toutes peut exiger de modifier les locaux, d’acqué-
les libertés fondamentales dans les rir ou de modifier du matériel, de fournir
domaines politique, économique, les services d’un lecteur ou d’un interprète,
social, culturel, civil ou autres d’assurer une formation ou une supervision
adéquates, d’adapter les méthodes d’essai
La Convention combat la discrimination ou de supervision, d’aménager les horaires
relative à tous les droits de l’homme, qu’ils ou de confier à une autre personne une partie
soient civils, culturels, économiques, poli- des fonctions attachées à un poste.
tiques ou sociaux, et dans tous les domaines.
Il est arrivé, et il arrive encore, que des Si la Convention prescrit que des aména-
personnes et même des États aient tendance gements soient apportés en fonction des
à faire passer certains droits avant d’autres. besoins particuliers d’une personne handi-
Pendant la guerre froide, par exemple, capée, elle qualifie ces aménagements de
les pays à économie de marché mettaient raisonnables. Si l’aménagement fait suppor-
souvent l’accent sur les droits civils et poli- ter une charge disproportionnée ou indue à
tiques, tandis que les pays à économie plani- la personne ou à l’organisme qui est supposé
fiée insistaient sur les droits économiques, le réaliser, le renoncement ne constitue pas
sociaux et culturels. S’agissant du handicap, une discrimination.
l’attention s’est toujours portée davantage
Dans un certain nombre de pays, la loi
sur la protection des droits économiques,
énonce les éléments à prendre en compte
sociaux et culturels que sur celle des droits
pour déterminer si l’aménagement sollicité
civils et politiques. La Convention affirme
constitue un fardeau disproportionné. Ce
clairement que la protection contre la discri-
sont notamment:
mination comprend tous les droits dans tous
les domaines. • La faisabilité des changements requis;
qui a été victime d’un accident de la circu- La discrimination évolue, mais ne recule
lation et qui a besoin de certaines modifica- pas nécessairement. En 2006, lors de l’adop-
tions pour pouvoir continuer à travailler peut tion de la Convention, Kofi Annan, Secré-
demander un aménagement raisonnable à taire général des Nations Unies, déclarait ce
son employeur. L’aménagement raisonnable qui suit:
est différent de l’accessibilité générale de
l’article 9, dont les dispositions s’adressent, «Trop souvent, ceux qui vivent avec un
non pas nécessairement à des personnes handicap ont été considérés comme des
(même si, à l’évidence, c’est à des personnes sujets de gêne et, au mieux, de condes-
qu’elles bénéficient) mais à la collectivité cendance et de charité … Même s’ils
dans son ensemble. Si les États doivent géné- jouissent des mêmes droits que d’autres
raliser l’accessibilité progressivement, une sur le papier, en réalité, ils ont souvent
personne peut demander un aménagement été marginalisés et se sont vu refuser
raisonnable immédiatement et porter plainte les chances que d’autres tiennent pour
s’il n’est pas réalisé. acquises.».
handicapées ont été tuées, et 450 000 des handicaps intellectuels sont souvent
autres ont été stérilisées; victimes d’une stérilisation forcée;
liaison avec le dispositif indépen- • Revoir les stratégies et les politiques pour
dant de suivi visé au paragraphe 2 s’assurer que les droits des personnes
de l’article 33; handicapées sont respectés;
• Coordonner les activités relatives aux • Veiller à ce que les personnes handica-
droits de l’homme et aux droits des per- pées soient associées à l’élaboration des
sonnes handicapées aux échelons fédé- politiques et des lois qui les concernent;
ral, national et régional ainsi qu’aux • Encourager les personnes handicapées
niveaux des États, des provinces et des à participer aux organisations consti-
administrations locales; tuées et à la société civile, et encourager
12
De l’exclusion à l’égalité: Réalisation des droits des per-
la création d’organisations de personnes
sonnes handicapées (2007). handicapées.
MODULE 6 – LES DISPOSITIFS NATIONAUX D’APPLICATION ET DE SUIVI 109
handicapées et les organisations qui les Bien d’autres domaines se prêtent à la consul-
représentent. Aucune indication n’est donnée tation des personnes handicapées et de leurs
quant aux modalités possibles ou souhai- organisations et à leur participation active
tables de cette participation. Le formateur à l’application et au suivi de la Convention.
pourrait inviter les participants à débattre de L’activité collective permettra sans doute d’en
ces modalités, dont voici quelques exemples: mettre en évidence.
L’interpellation directe des ministres nismes dont les activités peuvent avoir une
incidence directe sur les droits des personnes
L’interpellation directe des ministres est handicapées.
possible dans les pays où ils sont membres du
parlement. Les questions peuvent être posées Le contrôle budgétaire et financier
oralement ou par écrit et mettent le gouver-
nement dans l’obligation de s’expliquer. Le parlement exerce une influence consi-
Les personnes handicapées, les organisa- dérable sur les politiques publiques aux
tions qui les représentent ou les mécanismes stades tant de la préparation du budget que
indépendants prévus à l’article 33 peuvent de l’engagement des dépenses, puisque
prendre contact avec des parlementaires c’est lui qui tient les cordons de la bourse. Au
locaux ou avec des membres de commis- cours du processus budgétaire, il peut étudier
sions parlementaires qui se préoccupent des et contrôler l’impact du budget proposé sur
droits de l’homme en vue de l’interpellation différents groupes sociaux, comme celui des
des ministres chargés de l’application de la personnes handicapées.
Convention.
H. Juridictions nationales
Le contrôle des nominations
par l’exécutif Les tribunaux nationaux peuvent eux
aussi jouer un grand rôle dans l’application
Autre mécanisme de supervision particu- et le suivi de la Convention.
lièrement utile dans les pays où les ministres
ne sont pas membres du parlement: l’exa- ✓ Les tribunaux nationaux contribuent
men minutieux des nominations aux postes à protéger les droits consacrés par la
de haut rang. Dans le cas de la nomination Convention. Si les personnes handica-
de médiateurs, de commissaires aux droits pées qui s’estiment victimes d’une viola-
de l’homme et de membres du conseil des tion de leurs droits doivent pouvoir avoir
ministres, il est tout à fait indiqué que le accès aux institutions de défense des
parlement cherche à s’enquérir des connais- droits de l’homme et aux autres méca-
nismes visés à l’article 33, elles doivent
sances de l’intéressé et de ses positions sur
aussi pouvoir obtenir une décision exé-
les questions relatives au handicap.
cutoire d’un tribunal.
particulier, une affaire est particulière- rable n’offre pas seulement réparation
ment importante ou complexe, le méca- au plaignant; elle déclenche souvent une
nisme national peut saisir les tribunaux réforme législative et une clarification
nationaux pour qu’elle soit étudiée à fond de la loi. De plus, elle peut contribuer à
et fasse l’objet d’une décision exécutoire. mieux faire connaître les droits des per-
sonnes handicapées et la Convention, et
La jurisprudence nationale:
éviter ainsi la répétition de violations du
✓ Permet de réfléchir aux domaines où des même ordre.
progrès dans la réalisation des droits
Le formateur peut envisager de recher-
des personnes handicapées ont été
cher dans la jurisprudence les décisions
enregistrés, et à ceux où des problèmes
rendues dans des affaires concernant les
continuent de se poser (en particulier
personnes handicapées. Il peut exposer briè-
lorsqu’un même grief s’exprime dans
vement l’affaire puis encourager les partici-
plusieurs affaires);
pants à débattre des différentes manières dont
✓ Renforce le respect des droits des per- le pouvoir judiciaire a pu affermir et protéger
sonnes handicapées. Une décision favo- les droits des personnes handicapées.
MODULE 7 – L’ÉTABLISSEMENT DES RAPPORTS
AU COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES
HANDICAPÉES: LE RAPPORT DE L’ÉTAT
ET LES RAPPORTS ALTERNATIFS
concernent. Dans le même esprit, les États • Organise des journées de débat général
parties sont invités à tenir dûment compte, sur différents thèmes. Il a déjà consacré
lorsqu’ils désignent leurs candidats, de la des journées de débat à la capacité juri-
disposition énoncée au paragraphe 3 de dique et à l’accessibilité, et une demi-
l’article 4. Celle-ci prescrit aux États parties journée aux femmes et aux filles handi-
de consulter étroitement et de faire active- capées;
ment participer les personnes handicapées
• Adopte des observations générales. Une
– enfants compris – et les organisations qui
observation générale est une déclara-
les représentent à l’adoption des décisions
tion faisant autorité sur certains thèmes
qui les concernent (et en particulier à celles
ou articles de la Convention, qui peut
qui ont trait aux lois et aux politiques). Si
aider les États parties à élaborer leurs
la disposition à ce sujet est formulée dans
rapports au Comité en précisant ce que
des termes relativement peu contraignants signifient telles ou telles dispositions. Le
– puisque les États sont seulement invités à Comité envisage actuellement de rédi-
tenir compte du paragraphe 3 de l’article 4 ger, à la suite des journées de débat qu’il
lors de la désignation de leurs candidats – elle a eues sur ces sujets, des observations
n’en indique pas moins que la désignation générales sur l’accessibilité, la capacité
des candidats ne devrait pas être laissée à juridique, et les filles et les femmes han-
la seule appréciation des gouvernements, et dicapées.
que d’autres sphères de la société ont un rôle
à jouer dans la composition du Comité et des Enfin, le Comité a des pouvoirs concer-
raisons de s’y intéresser. nant sa propre administration. Ainsi:
Les experts du Comité sont élus pour un • Il élit son/sa président(e), adopte ses
mandat de quatre ans, renouvelable une fois. méthodes de travail et son règlement
intérieur, etc.;
La principale mission du Comité est de
• Il procède à des échanges de vues avec
recevoir des rapports détaillés de chaque
des représentants de la société civile,
État partie à la Convention (voir plus loin).
des institutions nationales des droits de
De plus, en vertu du Protocole facultatif, l’homme et des organismes des Nations
le Comité a compétence pour: Unies sur des questions relatives à l’ap-
plication et au suivi de la Convention;
• Recevoir des communications (plaintes)
• Il se concerte avec d’autres organes
et formuler des recommandations à leur
conventionnels pour renforcer le dispo-
sujet (voir le module 8);
sitif qu’ils forment et harmoniser leurs
• Effectuer une enquête dans un pays méthodes de travail.
lorsqu’il est informé par des renseigne-
ments crédibles de violations graves ou 2. L’obligation des États de présenter
systématiques de la Convention (voir le des rapports
module 8).
Aux termes du paragraphe 1 de
Le Comité mène aussi des travaux théma- l’article 35, «Chaque État Partie présente
tiques. Il: au Comité, par l’entremise du Secrétaire
MODULE 7 — L’ÉTABLLISSEMENT DES RAPPORTS AU COMITÉ DES DROITS
DES PERSONNES HANDICAPÉES 119
ne devraient pas être simplement repro- • Si l’État partie a adopté des politiques,
duites; elles devraient être analysées au des stratégies et un cadre juridique
regard des dispositions de la Convention national pour la réalisation de chaque
afin de montrer jusqu’à quel point celles- droit proclamé par la Convention, en
ci sont appliquées et de faire apparaître identifiant les ressources disponibles à
les défis à relever; cet effet et les modalités d’utilisation de
ces ressources qui présentent le meilleur
• Consultation au sein de l’administration
rapport coût-efficacité;
et mise au point du rapport: le projet de
rapport devrait être distribué au groupe • Si l’État partie a adopté une législa-
élargi pour vérifier qu’il traduit la posi- tion complète contre la discrimination à
tion de tous les représentants concernés l’égard des personnes handicapées afin
de l’administration. Celle-ci devrait éga- de donner effet aux dispositions perti-
lement envisager de communiquer le nentes de la Convention;
projet à la société civile afin de respec-
ter les dispositions de l’article 33, qui • Si des mécanismes en place permettent
prescrit la participation des personnes de suivre les progrès accomplis sur la
handicapées au suivi de l’application de voie de la pleine réalisation des droits
la Convention. Le projet pourrait égale- énoncés dans la Convention, notam-
ment être mis à la disposition de l’institu- ment si des indicateurs et des critères
tion nationale de défense des droits de connexes nationaux concernant chaque
l’homme ou du dispositif indépendant droit consacré par la Convention ont été
institué en vertu de l’article 33. adoptés, en complément des informa-
tions fournies conformément à l’appen-
6. Contenu: les directives relatives dice 3 des directives harmonisées et
à l’établissement des rapports14 compte tenu du cadre et des tableaux
d’indicateurs illustratifs établis par le
Pour conseiller les États parties sur la Haut-Commissariat des Nations Unies
forme et le contenu à donner à leurs rapports, aux droits de l’homme (HCDH)15;
le Comité a émis des directives destinées à
en faciliter l’élaboration, à en assurer l’ex- • Si des mécanismes en place permettent
haustivité et à permettre une présentation de veiller à ce que les obligations
uniforme. Si les directives sont respectées, il incombant à l’État partie en vertu de la
sera d’autant moins nécessaire au Comité de Convention soient pleinement intégrées
demander des renseignements complémen- dans ses actions en tant que membre
taires en vertu de l’article 36 de la Conven- d’organisations internationales;
tion ou du paragraphe 3 de l’article 36 de
• Si chaque droit énoncé dans la Conven-
son Règlement intérieur.
tion est transcrit et directement appli-
Pour ce qui est des droits énoncés dans cable dans l’ordre juridique interne, des
la Convention, le document spécifique à 15
Pour de plus amples renseignements, voir le document
l’instrument devrait indiquer: HRI/MC/2008/3 et Indicateurs des droits de l’homme:
Guide pour mesurer et mettre en œuvre (Publication des
14
CRPD/C/2/3. Nations Unies, n° de vente 13.XIV.2).
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
122 GUIDE DE FORMATION
Les mesures prises pour permettre à toutes La carte nationale d’identité est l’unique
les personnes handicapées d’exercer leur titre exigé pour voter. Son utilisation est
droit de vote, seules ou en se faisant aider obligatoire pour tous les citoyens et le Registre
par une personne de leur choix national de l’état civil a adopté un décret
en vertu duquel la carte nationale d’identité
est délivrée gracieusement aux personnes
handicapées, après accréditation.
Les mesures prises pour assurer la pleine En vertu de la loi n° 29478, le Bureau
accessibilité des procédures, locaux et électoral national tient un registre des
matériels électoraux personnes handicapées, qui peut être consulté
sur la page web de cette institution, en vue
de faciliter l’accès au vote, notamment de la
manière suivante: a) élaboration de cartes
d’électeur en braille pour les aveugles;
b) installation de tables de vote au rez-de-
chaussée des bureaux de vote; c) transfert
temporaire des tables de vote situées aux
étages supérieurs afin d’éviter aux personnes
handicapées d’avoir à monter des escaliers;
d) signalisation des bureaux de vote pour
orienter les personnes handicapées et
diffusion des mesures adoptées pour faciliter
l’accès aux bureaux de vote.
Les indicateurs mis en place pour détermi- Entre 2004 et 2007, 10 758 personnes
ner si les personnes handicapées exercent handicapées ont exercé leur droit de vote.
pleinement leur droit de participer à la
vie politique et à la vie publique • Au total, entre 2003 et le 5 mars 2010,
67 729 cartes nationales d’identité ont
été gratuitement délivrées à des per-
sonnes handicapées, dont 38 805 à des
adultes et 28 924 à des mineurs.
MODULE 7 — L’ÉTABLLISSEMENT DES RAPPORTS AU COMITÉ DES DROITS
DES PERSONNES HANDICAPÉES 125
Le soutien apporté, le cas échéant, aux Depuis 2001, le Conseil national pour
personnes handicapées pour la création l’intégration des personnes handicapées
et la gestion d’organisations de défense (CONADIS) tient un registre d’associations,
de leurs droits et intérêts aux niveaux d’ONG et de syndicats qui œuvrent en faveur
local, régional et national des personnes handicapées et s’occupent
de leurs problèmes; dans plusieurs de ces
organisations, ce sont des parents ou des
membres de la famille qui siègent au conseil
d’administration. À ce jour, 310 institutions
sont inscrites au Registre national, ce qui
leur permet de conclure des accords, de
bénéficier de la coopération internationale
et de favoriser l’insertion sociale de leurs
membres.
7. La liste des points à traiter à traiter. Dans son rapport initial, la Tuni-
sie avait donné des renseignements sur
Une fois que le Comité a reçu le rapport les droits des enfants handicapés, mais ils
de l’État partie, celui de ses membres qui est étaient centrés principalement sur la santé et
rapporteur pour ce pays l’étudie, et le Comité l’éducation. Elle n’avait pas donné d’infor-
décide, avec le concours du rapporteur, s’il y mations sur la protection des enfants contre
manque des informations. Le Comité adresse la violence et l’exploitation. Le Comité en a
ensuite à l’État partie une liste des points à donc sollicité. Dans sa réponse (CRPD/C/
traiter afin qu’il complète les renseignements TUN/Q/1/Add.1), la Tunisie a indiqué ce
contenus dans le rapport. En règle générale, qui suit:
les États parties répondent à cette liste par écrit,
avant le dialogue constructif avec le Comité.
16. Des associations ont demandé
La liste des points à traiter est normale- que des efforts accrus soient déployés
ment arrêtée par le Comité à la session qui dans les domaines législatif, adminis-
précède le dialogue constructif avec l’État tratif, social, éducatif, culturel et autres
partie. Cela laisse à ce dernier le temps de pour prévenir de telles pratiques.
réagir. Cela laisse également au Comité le
temps de réfléchir aux renseignements supplé- 17. Nous souhaiterions signaler
mentaires communiqués par le pays et de à ce sujet que le Code de la protec-
décider s’il dispose désormais de suffisam- tion de l’enfant, promulgué par la loi
ment d’informations sur tel ou tel sujet, ou n° 92 du 9 novembre 1995, garantit
s’il faut reprendre la question au cours du aux enfants en général et aux enfants
dialogue constructif. handicapés en particulier le droit de
ne pas être soumis à différentes formes
Le rapport de la Tunisie illustre le fonc-
d’exploitation, de violence ou de
tionnement du système de la liste des points
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
126 GUIDE DE FORMATION
✓ Organiser une table ronde pour étudier ✓ Améliorer la collecte et l’analyse des
données relatives aux personnes handi-
les observations finales avec la société
capées;
civile et l’institution nationale de défense
des droits de l’homme; ✓ Améliorer la compréhension de la
Convention à la faveur de la rédaction
✓ Établir un plan de mise en œuvre des
du rapport;
recommandations assorti de délais et
précisant les noms des organismes res- ✓ Renforcer la coordination au sein de l’ad-
ponsables; ministration (la coordination nécessaire
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
130 GUIDE DE FORMATION
pays auteur du rapport à l’étude, afin de Le rapport alternatif ne prend pas néces-
prendre connaissance de leurs aspira- sairement le contre-pied du rapport de l’État
tions et de leurs sujets de préoccupation. partie; il apporte simplement des éléments
Des personnes peuvent également saisir complémentaires ou un éclairage différent sur
l’occasion de leur passage à Genève certaines questions traitées dans le rapport
pour s’entretenir avec des membres du national. Si, toutefois, celui-ci ne fournit pas
Comité de différentes questions d’appli- les renseignements les plus précis ou les plus
cation qui se posent à l’échelon national. récents, il peut les porter à la connaissance
Les organisations de la société civile et du Comité.
les institutions nationales de défense des
droits de l’homme peuvent aussi assister En apportant un complément d’informa-
au dialogue avec l’État partie. Cela peut tion, les rapports alternatifs ont pour objectif
les aider à mieux comprendre comment ultime de contribuer à assurer aux observa-
le Comité a conçu ses différentes obser- tions finales et aux recommandations la plus
vations finales, ce qui peut à son tour grande pertinence possible afin de faciliter
faciliter l’exercice ultérieur du suivi au la mise en œuvre future.
niveau national;
3. La structure du rapport
• Le suivi des observations finales – Même
si la responsabilité ultime de l’applica- Rien n’oblige à donner au rapport alter-
tion des observations finales incombe natif une structure plutôt qu’une autre; ses
aux pouvoirs publics, les organisations rédacteurs devraient cependant chercher
de la société civile et les institutions natio- à adopter une méthode qui aide le Comité
nales de défense des droits de l’homme à comprendre comment le rapport a été
ont une mission essentielle à remplir. établi et qui fasse ressortir aussi clairement
C’est ce que nous allons voir dans les que possible les questions que la société
paragraphes qui suivent. civile et les institutions de défense des droits
de l’homme veulent porter à l’attention du
2. Un rapport alternatif, pour quoi faire? Comité, ainsi que les solutions envisageables.
Les rapports alternatifs sont, pour la Voici une structure possible, qui s’inspire
société civile et les institutions nationales de en grande partie des directives du Comité
défense des droits de l’homme, un moyen pour l’établissement des rapports:
– dont l’importance ne doit pas être sous-
estimée – de faire entendre leur voix lors de 1. Résumé synoptique récapitulant l’essen-
l’établissement des rapports. Il n’y a pas à tiel des préoccupations, des progrès et
proprement parler de définition du rapport des recommandations;
alternatif, et il n’y a pas non plus de struc- 2. Table des matières;
ture à suivre rigoureusement. En règle géné-
rale, le rapport alternatif apporte au Comité 3. Méthode d’élaboration du rapport,
des renseignements complémentaires par y compris le mode de collecte des don-
rapport à ceux fournis par l’État partie, afin nées et la liste des organisations ayant
qu’il dispose d’une quantité d’informations contribué à l’établissement et à la mise
aussi ample que possible. au point finale du texte;
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
132 GUIDE DE FORMATION
De faire figurer des indicateurs de l’effi- ✓ Étude des sources secondaires. Les orga-
cacité des systèmes de protection telle nisations de la société civile n’ont ni le
qu’elle ressort des suites disciplinaires et temps ni les ressources nécessaires pour
judiciaires apportées aux cas de violation.
collecter des données nouvelles. Pour
D’une manière générale, cette recom- surmonter cette difficulté, elles peuvent
mandation est utile: notamment exploiter des sources secon-
daires fiables telles que:
✓ Elle est claire;
Les rapports de l’institut national de sta-
✓ Elle appelle une quantification;
tistique – résultats des recensements ou
✓ Elle se rapporte à un enjeu de la mise rapports spéciaux, par exemple;
en œuvre;
Les données émanant des ministères de
✓ Elle n’est ni vague ni générale.
l’éducation, de la santé, de la justice,
Elle se trouverait améliorée: des affaires sociales ou des transports;
• Si elle précisait quelle institution publique Les rapports des organismes des Nations
devrait être chargée d’élaborer les indi- Unies et de la Banque mondiale, qui
cateurs;
peuvent contenir des renseignements
• Si elle fixait une échéance pour la mise sur les personnes handicapées ou même
au point des indicateurs. leur être spécialement consacrés;
MODULE 7 — L’ÉTABLLISSEMENT DES RAPPORTS AU COMITÉ DES DROITS
DES PERSONNES HANDICAPÉES 137
Les États parties élisent les experts au Le Comité engage un dialogue constructif
scrutin secret parmi les candidats présentés avec les États parties et émet des observations
par eux. Ils tiennent compte, lors de l’élec- finales et des recommandations destinées à
tion, des compétences et de l’expérience 16
Pour de plus amples renseignements sur le Comité et sur
des experts dans le domaine des droits les fonctions qui lui sont dévolues par la Convention, voir
de l’homme et du handicap, ainsi que des le module 7.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
140 GUIDE DE FORMATION
• L’État partie peut soumettre par écrit au • Si le Comité constate une violation, il
Comité, dans un délai de six mois, des suit les mesures prises par l’État, par
explications éclaircissant la question et exemple dans le cadre de l’examen des
indiquant les mesures qu’il pourrait avoir rapports périodiques futurs.
prises pour remédier à la situation;
Le Comité a adopté à ce jour des
• Le Comité transmet à chacune des par- constatations sur trois communications:
ties les informations fournies par l’autre, H. M. c. Suède (communication n° 3/2011),
et donne à chacune d’elles la possibilité Szilvia Nyusti et Péter Takács c. Hongrie
de formuler dans un certain délai ses (communication n° 1/2010) et Zsolt Bujdosó
observations au sujet de l’argumentation et cinq autres ressortissant hongrois
développée par l’autre partie; c. Hongrie (communication n° 4/2011)17.
Les auteurs avaient fait appel du juge- jugement rendu par la Cour suprême, qui se
ment de première instance, réclamant que fondait sur les réglementations hongroises en
tous les distributeurs automatiques de billets vigueur, était juste. Il ajoutait cependant que
soient rendus accessibles. Ils soutenaient le problème soulevé dans la communication
que leurs activités ne sauraient être limitées était réel et méritait d’être réglé équitable-
aux seules villes dans lesquelles, en applica- ment, faisant trois suggestions qui devaient
tion de la décision du tribunal de première permettre de trouver une solution acceptable
instance, des distributeurs devaient devenir pour toutes les parties. Premièrement, des
accessibles. Ils avaient également demandé mesures devaient être prises afin de modi-
une indemnisation plus importante. La cour fier l’accessibilité des distributeurs et autres
d’appel avait rejeté leur recours, confirmant services bancaires, non seulement pour les
les conclusions du tribunal de première aveugles mais aussi pour les personnes souf-
instance. Les auteurs avaient donc saisi la frant d’autres handicaps. Deuxièmement,
Cour suprême d’un recours en révision de la étant donné son coût et sa faisabilité tech-
décision de la cour d’appel municipale. La nique, cet objectif ne pouvait être atteint que
Cour suprême les avait déboutés. progressivement, en mettant à disposition
et en installant de nouveaux distributeurs
2. La requête qui faciliteraient avant tout l’accessibilité
physique et l’accessibilité en matière d’in-
Les auteurs affirmaient être victimes
formation et de communication. Troisième-
d’une violation par l’État partie des droits
ment, bien que la communication eût trait
qu’ils tenaient des articles 5 (par. 2 et 3), 9
aux services d’une banque particulière, les
et 12 (par. 5) de la Convention. Ils faisaient
obligations susmentionnées devraient être
observer que la cour d’appel et la Cour
respectées par toutes les institutions finan-
suprême, en décidant de ne pas intervenir
cières hongroises. Compte tenu de ces consi-
dans une relation contractuelle à long terme
dérations, le Secrétaire d’État aux affaires
entre eux-mêmes et OTP pour imposer à cette
sociales et familiales et à la jeunesse auprès
banque, comme ils le demandaient, une
du Ministère des ressources nationales avait
obligation d’égalité de traitement, n’avaient
adressé à OTP une lettre priant la banque
pas respecté l’obligation incombant à l’État
de l’informer de ses projets et engagements
partie, en vertu du paragraphe 2 de l’ar-
concernant ses distributeurs automatiques.
ticle 5 de la Convention, d’interdire toutes
Le Secrétaire d’État avait suggéré à OTP de
les discriminations fondées sur le handicap
et de garantir aux personnes handicapées veiller en priorité à l’avenir, dans le cadre
une égale et effective protection juridique de sa politique d’achats, à l’accessibilité des
contre toute discrimination, quel qu’en soit nouveaux distributeurs. L’obligation d’assu-
le fondement. rer l’accessibilité ne devant pas s’imposer à
une seule banque, le Secrétaire d’État avait
3. Les observations de l’État partie également pris contact avec le Président de
sur la recevabilité et sur le fond l’Autorité hongroise de surveillance finan-
cière en lui demandant de voir quels outils
L’État partie a informé le Comité qu’il ne de réglementation et quelles incitations pour-
contesterait pas la recevabilité de la commu- raient être adoptés pour l’ensemble des insti-
nication. Sur le fond, il déclarait que le tutions financières.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
146 GUIDE DE FORMATION
mondiale de la Santé, et que les statistiques rait comme défavorable. Les membres de sa
officielles permettant de mesurer de manière famille avaient cherché à obtenir de la justice
rationnelle les progrès accomplis au fil du une ordonnance enjoignant à l’auteur de ne
temps demeuraient insuffisantes. En outre, la pas faire certaines déclarations et réclamant
proportion d’enfants autistes scolarisés dans des dommages-intérêts. Le tribunal, sans avoir
les établissements d’enseignement géné- entendu l’auteur en personne, avait ordonné
ral ou spécialisé était nettement inférieure à celle-ci de se faire examiner par un méde-
à celle des autres enfants − handicapés ou cin afin de déterminer si elle était capable
non −, et il existait une insuffisance chronique de prendre part à une procédure judiciaire.
en matière de soins et d’appui aux adultes Il avait estimé que le comportement qu’elle
autistes. Pour ces raisons, le Gouvernement avait adopté au cours du procès, notamment
n’avait pas réalisé de progrès suffisants pour les communications nombreuses et très volu-
développer la scolarisation des personnes mineuses qu’elle avait adressées au tribunal,
autistes. Le Comité a également observé que soulevait des doutes quant à sa capacité de
les établissements spécialisés dans l’éduca- prendre part à la procédure. Le tribunal lui
tion et les soins aux enfants handicapés − en ayant enjoint de passer un examen médical,
particulier les enfants autistes − n’étaient l’auteur avait contesté cette décision, affir-
généralement pas financés par le même mant qu’il n’y avait aucune raison objective
budget que les écoles ordinaires. Toutefois, d’ordonner un tel examen et invoquant le fait
qu’elle n’avait pas été entendue avant que
cette situation ne pouvait être assimilée à une
l’ordonnance soit rendue. Ayant perdu son
discrimination dans la mesure où c’était aux
affaire, elle avait saisi deux instances supé-
États eux-mêmes qu’il appartenait de décider
rieures, dont la Cour constitutionnelle fédé-
des modalités de financement.
rale, qui l’avaient toutes deux déboutée.
4. Les conclusions
2. La plainte
Le Comité a déclaré que le Gouverne-
L’auteur s’estimait victime de violations
ment ne respectait pas la Charte.
de l’article 7 (droit de ne pas être soumis
à la torture ni à des peines ou traitements
Comité des droits de l’homme inhumains, cruels ou dégradants), de l’article
M. G. c. Allemagne, 17 (droit au respect de la vie privée) et de
communication l’article 14, paragraphe 1 (droit à un procès
n° 1482/2006 équitable), du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques. Au sujet de l’article
1. Les faits 7, elle affirmait que l’injonction de passer un
examen médical était un traitement «dégra-
Trois membres de la famille de l’auteur dant» en ce qu’elle suscitait des sentiments
avaient engagé des actions contre l’auteur de peur, d’angoisse et d’infériorité de nature
devant les tribunaux chargés des affaires à avilir la victime. S’agissant de l’article 17,
civiles et des affaires familiales. L’auteur elle faisait valoir qu’un examen médical
avait adressé de nombreuses et volumi- forcé constituait une atteinte à la vie privée
neuses communications aux tribunaux et fait ou à l’intégrité de la personne, et que c’était
appel de chaque décision qu’elle considé- seulement dans des circonstances excep-
MODULE 8 – LE PROTOCOLE FACULTATIF 151
tionnelles et pour des raisons impérieuses d’un expert soulevait en soi des questions au
qu’une personne pouvait être contrainte de titre de l’article 7 et que, par conséquent,
se soumettre à des examens médicaux ou cette partie de la communication était irre-
psychiatriques sans son consentement exprès. cevable. De même, le Comité a estimé que
À propos, enfin, de l’article 14, paragraphe l’auteur n’avait pas suffisamment étayé le
1, elle soutenait que le refus du tribunal de grief tiré du paragraphe 1 de l’article 14. Il
l’entendre ou de la voir en personne avant a constaté que l’auteur avait étayé ses griefs
d’ordonner un examen médical constituait au titre de l’article 17 aux fins de la receva-
une violation de son droit à un procès équi- bilité et que l’État n’avait pas contesté ses
table, l’audience publique étant un élément allégations.
essentiel des garanties de la régularité de la
procédure. 5. Les conclusions
Il est intéressant d’étudier ces deux aurait-elle été tranchée par le Comité des
affaires, qui précèdent l’adoption de la droits des personnes handicapées en appli-
Convention, à la lumière des principes et cation du Protocole facultatif se rapportant à
des normes de celle-ci. La seconde soulève la Convention?
des questions particulièrement complexes.
Fait important, la manière de procéder du F. Liste des points à vérifier
tribunal, qui met en doute la capacité juri- lors de la présentation
dique de l’auteur, serait sujette à caution en d’une communication
vertu de la Convention car elle ne respecte
pas la capacité juridique dans des condi- Le Comité a fourni (CRPD/C/5/3/Rev.1)
tions d’égalité avec les autres personnes (le d’utiles indications sur les renseignements à
handicap mental servant peut-être de base à faire figurer dans une communication pour
un déni de la capacité juridique de l’auteur qu’elle puisse être enregistrée. La liste en est
concernant l’affaire). Comment cette affaire reproduite dans l’encadré ci-après:
• Nom de famille
• Prénom(s)
• Nationalité/citoyenneté
• Sexe
• Adresse actuelle
• Adresse postale à utiliser pour la correspondance confidentielle (si elle est diffé-
rente de l’adresse actuelle)
• Nom de famille
• Prénom(s)
• Nationalité/citoyenneté
• Sexe
• Adresse actuelle
• S’il s’agit d’un groupe de personnes qui affirment être des victimes, fournir, comme
cela a été fait plus haut, des renseignements essentiels permettant d’identifier cha-
cune d’elles.
4. Objet de la communication
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
154 GUIDE DE FORMATION
• Donner des renseignements sur la personne ou les personnes qui ont commis la
violation ou les violations présumées de droits
Relater les actions qui ont été engagées en vue d’épuiser les recours internes prévus
dans l’État partie où se sont produites la violation ou les violations présumées de
droits protégés par la Convention, par exemple, pour obtenir un règlement par des
voies judiciaires ou administratives. Toute plainte parvenant au Comité devra avoir été
soumise préalablement à la justice interne.
Indiquer en particulier:
• L’action ou les actions engagées par la victime ou les victimes présumées en vue
d’épuiser les recours internes et, par exemple, les décisions des tribunaux internes
• Si les recours internes n’ont pas été épuisés, expliquer pourquoi de façon détaillée.
Note: Joindre à la communication des copies de tous les documents pertinents, notam-
ment des décisions judiciaires ou administratives ou des lois nationales ayant un rap-
port avec l’affaire en cause, ou résumer ces dernières dans l’une des langues de
travail du secrétariat (anglais, espagnol, français ou russe).
Indiquer si la même question a été examinée ou est en cours d’examen au titre d’une
autre procédure internationale d’examen ou de règlement. Si c’est le cas, fournir les
renseignements suivants:
• Type(s) de procédure(s)
• Organisme(s) saisi(s)
8. Demandes concrètes/Réparation
Date de la communication:
Les dix points de cet encadré sont impor- Convention. À noter qu’il peut s’agir de
tants. Il convient cependant d’appeler l’atten- n’importe quelle «disposition». Les auteurs
tion sur quelques questions particulières. doivent veiller à préciser quelles disposi-
tions ont à leur sens été enfreintes et quelles
Qui peut saisir le Comité? répercussions la violation présumée a eues
pour eux.
Tout ressortissant d’un État partie qui
a accepté la compétence du Comité peut
Comment?
adresser une communication au secréta-
riat de celui-ci. Les groupes de particuliers La procédure des communications est
peuvent eux aussi présenter des communica- écrite et confidentielle; il n’y a pas d’au-
tions. En d’autres mots, deux personnes ou diences. Néanmoins, le Protocole faculta-
davantage peuvent s’associer pour adresser tif n’exclut pas une procédure orale, et le
au Comité une communication dans laquelle Comité pourrait recevoir des communica-
elles allèguent une atteinte à leurs droits.
tions orales, même s’il est peu probable que
De plus, une communication peut être cela se produise jamais.
formulée au nom d’un particulier ou d’un
groupe. Cela signifie qu’un proche, une orga- G. Recevabilité
nisation non gouvernementale, un centre de
consultations juridiques d’intérêt collectif ou un Le Protocole facultatif fixe des conditions
autre organisme peut présenter une communi- rigoureuses de recevabilité (art.1er et 2) qui
cation au nom d’une personne. Le règlement doivent être remplies avant que le Comité
intérieur du Comité précise simplement que puisse se prononcer sur le fond. L’article 1er
les communications peuvent être présentées énonce les critères fondamentaux auxquels
au nom d’un particulier ou d’un groupe de une communication doit satisfaire pour que
particuliers (art. 69). Comme l’indiquent clai- le Comité l’accepte et l’examine. Si elle n’y
rement les informations données plus haut, répond pas, le secrétariat du Comité ne peut
l’auteur d’une communication présentée au pas l’enregistrer, et elle n’atteint même pas le
nom d’une ou de plusieurs victimes présumées stade de l’examen de la recevabilité. En cas
doit établir qu’il a obtenu leur consentement de doute au moment de l’enregistrement, le
(un mandat, par exemple), ou exposer les Comité pourrait avoir à étudier lui-même la
raisons pour lesquelles la communication est conformité de la communication à certains
présentée sans leur consentement. de ces critères au stade de l’examen de la
recevabilité. Exprimés sous forme interroga-
Contre quelle autorité? tive, ces critères sont les suivants:
L’État défendeur doit avoir accepté la • La communication émane-t-elle d’un par-
compétence du Comité en ratifiant le Proto- ticulier ou d’un groupe de particuliers?
cole facultatif.
En d’autres mots, l’auteur a-t-il qualité
pour présenter la communication en
Quel doit être le sujet
vertu du Protocole facultatif? Dans la
de la communication?
négative, le Comité la rejettera pour des
La communication doit alléguer une raisons de forme. Si un auteur soumet
violation de l’une des dispositions de la une communication sans démontrer qu’il
MODULE 8 – LE PROTOCOLE FACULTATIF 157
n’est pas encore fermement établie. À en gnements crédibles indiquant qu’un État
juger par celle des autres organes conven- partie porte gravement ou systématiquement
tionnels, il pourrait ou bien se contenter de atteinte aux dispositions de la Convention.
recommander à l’État partie d’offrir une Les États parties peuvent, tout en ratifiant
«réparation appropriée», ou bien être plus le Protocole facultatif, faire savoir par une
précis et lui recommander par exemple de déclaration et une réserve qu’ils n’acceptent
revoir certaines politiques, d’abroger une pas cette procédure (art. 8). Ils peuvent lever
loi, de verser une indemnisation ou de préve- leurs réserves ultérieurement.
nir d’autres violations.
Par rapport au système des communica-
L’article 75 du règlement intérieur du tions, celui des enquêtes présente principale-
Comité dispose notamment que, dans les six ment les caractéristiques suivantes:
mois suivant la date à laquelle les consta-
tations concernant une communication lui • Premièrement, pour lancer une enquête,
ont été transmises, l’État partie intéressé le Comité n’a pas à attendre de recevoir
fait parvenir au Comité une réponse écrite une plainte officielle: il lui appartient
donnant des renseignements sur toutes les d’engager la procédure (qui peut com-
suites qui leur ont été apportées. Le Comité prendre une visite dans l’État partie sous
peut alors demander un complément d’infor- réserve du consentement de celui-ci);
mation; il peut également inviter l’État partie • Deuxièmement, l’enquête n’est permise
à faire figurer des renseignements dans son qu’en cas de violations graves ou sys-
rapport périodique au Comité. tématiques des droits énoncés dans la
Convention;
Il convient de souligner qu’il existe un point
de contact chargé de suivre la mise en œuvre • Troisièmement, il n’est pas nécessaire
des constatations du Comité. L’article 75 qu’une victime se fasse connaître.
dispose aussi que le Comité peut désigner un
Une violation est dite grave lorsqu’elle
rapporteur spécial ou un groupe de travail
enfreint de manière critique une ou plusieurs
chargé de vérifier les mesures prises par les
dispositions de la Convention: ce pourra
États parties pour donner effet à ses consta-
être par exemple une discrimination qui
tations et recommandations. Le rapporteur
menace la vie, l’intégrité ou la sécurité
spécial ou le groupe de travail peuvent établir
d’une personne. Elle est systématique en cas
des contacts et prendre les mesures adéquates
d’atteintes répétées d’une ampleur et d’une
pour donner suite aux constatations; ils peuvent
fréquence importantes, sans considération
également recommander au Comité des initia-
de l’intention. La violation peut résulter de
tives à prendre. Ils peuvent, avec l’accord du
lois, de politiques ou de pratiques. Des viola-
Comité et de l’État partie, se rendre dans le
tions pourraient être «systématiques» sans
pays et faire rapport au Comité.
être qualifiées de «graves».
• Renforcer la mise en œuvre. En ratifiant tour faciliter la mise en œuvre des recom-
le Protocole facultatif, les États s’exposent mandations et, en définitive, améliorer la
à être l’objet de plaintes individuelles jouissance des droits;
et d’enquêtes. Cela peut les dissuader
de ne pas respecter la Convention. Les • Rendre compte du suivi. Les États
constatations relatives aux communi- devraient veiller à rendre compte scru-
cations et aux enquêtes peuvent éga- puleusement des suites données aux
recommandations dans leurs rapports
lement indiquer les mesures qu’un État
périodiques ultérieurs au Comité.
devrait prendre pour se conformer à ses
obligations; La société civile et les organisations de
personnes handicapées ont une part décisive
• Renforcer les voies de recours internes. Le
à prendre au renforcement de l’application
fait que les victimes présumées puissent
nationale de la Convention en encourageant
faire appel au Comité peut inciter l’État
les États à ratifier le Protocole facultatif et en
partie à renforcer les recours internes
plaidant en faveur de la mise en œuvre des
(par exemple en mettant la justice natio-
recommandations du Comité. En particulier,
nale à même de faire respecter tous les
la société civile peut:
droits) de telle sorte que le Comité n’ait
pas du tout à être saisi; • Favoriser la ratification du Protocole
facultatif. Les organisations de per-
• Fournir au Comité des renseignements
sonnes handicapées et les organisations
en temps opportun. Les États devraient
de la société civile peuvent jouer un rôle
participer activement aux procédures de important en incitant les États à ratifier
communications et d’enquête en fournis- les instruments internationaux, y compris
sant des renseignements précis et à jour, les protocoles facultatifs. C’est souvent
de manière que le Comité puisse agir en sous leur pression que les États décident
toute connaissance de cause; de ratifier. En promouvant la ratification,
ces organisations peuvent aussi plaider
• Donner suite aux recommandations. Les
en faveur de l’acceptation de la procé-
États devraient veiller à donner suite aux
dure d’enquête (c’est-à-dire de la non-
recommandations afin d’offrir une répa-
formulation d’une déclaration en sens
ration aux victimes mais aussi pour que
contraire au moment de la signature ou
le système des organes conventionnels
de la ratification);
soit respecté et efficace. Puisque ce sont
eux qui l’ont créé, il est de leur intérêt • Aider les particuliers à porter plainte.
qu’il fonctionne; Les organisations de personnes handica-
pées et la société civile peuvent jouer un
• Diffuser les constatations du Comité. Les
grand rôle en faisant connaître les procé-
États devraient, à tout le moins, rendre
dures de communications et d’enquête,
publiques les constatations relatives aux
et en fournissant aux victimes les ren-
communications de leur ressortissants. Ils seignements et, souvent, les ressources
devraient également envisager de diffuser nécessaires au dépôt de leur plainte;
les résultats des enquêtes menées au titre
du Protocole facultatif car cela déclen- • Présenter des communications. Les orga-
chera un débat national qui devrait à son nisations de personnes handicapées
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES|
164 GUIDE DE FORMATION
mieux disposés à accepter le principe quête afin de mettre en lumière une situa-
de la compétence des tribunaux concer- tion nationale trop sensible pour qu’elle
nant les droits protégés par la Conven- intervienne directement. Elle peut ainsi
tion. Les équipes de pays des Nations s’en remettre au Comité pour mener une
Unies peuvent rassembler et analyser enquête indépendante qui permettra de
les informations relatives aux cas déjà traiter la question convenablement sans
traités pour montrer comment les pro- se trouver elle-même placée dans une
cédures judiciaires et quasi judiciaires situation difficile vis-à-vis du gouvernement;
peuvent améliorer la réalisation des
droits de l’homme, y compris les droits • Aider à assurer le suivi. Selon la nature
des personnes handicapées; des constations et des recommandations
du Comité et selon les connaissances et
• Sensibiliser et former les acteurs natio- l’expérience de ses propres membres,
naux, tels que magistrats, étudiants en l’équipe de pays des Nations Unies pour-
droit, fonctionnaires, organisations de rait aider l’État partie à mettre en œuvre
personnes handicapées et organisa- ces constatations et recommandations.
tions de la société civile de sorte qu’ils Cela pourrait être particulièrement utile
connaissent le Protocole facultatif, soient dans le cas des enquêtes, qui débouchent
conscients de son importance pour leurs souvent sur des constatations et des recom-
activités et plaident en faveur de la rati- mandations de grande ampleur, portant
fication. Si le Comité a émis des recom- sur toute une série d’aspects interdépen-
mandations relatives à une communica- dants de la mise en œuvre (à la différence
tion ou à une enquête, la formation peut des constatations relatives à une communi-
aider ces acteurs à trouver des moyens cation, qui peuvent avoir trait uniquement
de promouvoir l’application. Les équipes à l’indemnisation d’une personne);
de pays des Nations Unies peuvent
aussi publier un communiqué de presse • Diffuser les constatations et recomman-
à l’occasion du jour anniversaire de l’en- dations du Comité. L’équipe de pays des
trée en vigueur des deux instruments (le Nations Unies pourrait placer les consta-
3 mai), de la Journée internationale des tations et recommandations du Comité
personnes handicapées (le 3 décembre) sur son site web et faire paraître un com-
ou de l’anniversaire de la ratification de muniqué de presse lorsque des décisions
la Convention par l’État partie afin d’en- sont rendues publiques;
courager celui-ci à ratifier le Protocole
• Faire rapport sur le suivi. L’équipe de
facultatif. Lorsque le Comité émet des
pays des Nations Unies peut aussi com-
suggestions et des recommandations à
muniquer, publiquement ou confidentiel-
l’issue d’une enquête ou de l’examen
lement, des informations au Comité au
d’une communication, l’équipe de pays
moment où l’État partie présente son
peut encourager les autorités nationales
rapport périodique. Elle peut donner au
à publier elles-mêmes un communiqué
Comité de précieux renseignements sur
de presse ou à envisager de le faire;
les suites apportées aux constatations et
• Fournir au Comité des renseignements recommandations formulées au titre du
fiables. L’équipe de pays des Nations Protocole facultatif. Le Comité dispose
Unies peut utiliser le mécanisme d’en- ainsi d’informations de source sûre.
CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES
CONVENTION
RELATIVE AUX DROITS
DES PERSONNES
HANDICAPÉES
Guide de formation N° 19
Guide de formation
ISSN 1020-4636