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Vincent ZAKANE
Secrétaire général du Ministère de la Promotion
des droits humains (Burkina Faso)
58 A noter que le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples
portant création d’une Cour africaine des droits de l’Homme et des Peuples, adopté à
Ouagadougou le 28 juin 1998, à l’occasion du 34ème Sommet de la Conférence des Chefs
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Mais, le mécanisme de contrôle sur rapport n’est pas ignoré des systèmes
régionaux de protection des droits de l’Homme. Il est, en effet, prévu aussi
bien par la Convention européenne des droits de l’Homme que par la
Convention interaméricaine des droits de l’Homme et par la Charte africaine
des droits de l’Homme et des Peuples61.
Quel que soit cependant le cadre dans lequel il est organisé, le mécanisme de
présentation des rapports étatiques invite à s’interroger sur son efficacité en
tant que mécanisme international de protection des droits de l’Homme. En
d’autres termes, ce mécanisme constitue-t-il une véritable garantie
internationale des droits de l’Homme ?
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A. Un mécanisme non-juridictionnel.
63 Voir Frédéric SUDRE, Droit international et européen des droits de l’Homme, Paris, PUF,
4e éd., 1999, n° 280.
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2 – Le contrôle politique
Le contrôle politique est celui opéré par un organe politique, c’est à dire un
organe composé de représentants gouvernementaux, donc dépendants de la
volonté des Etats. Bien que plus réaliste que le contrôle technique, parce que
réalisé par des organes politiques ou intergouvernementaux, mieux à même
d’apprécier les difficultés d’application des dispositions relatives aux droits de
l’Homme, ce type de contrôle échappe difficilement aux considérations
politiques. Il est, en effet, le plus souvent dominé davantage par des
considérations politiques que par des considérations juridiques. Aussi, le
respect des droits de l’Homme est-il apprécié le plus souvent à l’aune des seuls
intérêts nationaux, ce qui tend à faire de ce type de contrôle un instrument de
combat idéologique, voire un moyen de propagande politique utilisé à des fins
politiques ou géo-strategique.
Le Conseil économique et social a ainsi invité les Etats membres des Nations
Unies a présenter, à la Commission, des rapports sur les droits de l’Homme
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selon un cycle triennal : La première année sur les droits civils et politiques, la
deuxième année sur les droits économiques, sociaux et culturels et la
troisième année sur la liberté d’information. Ce système de rapport, très prisé
par les Etats, parce que non contraignant, est cependant d’une efficacité
limitée, même au regard de son objectif essentiel qui est celui de l’information.
De fait, il est fréquent que les Etats ne fournissent pas les rapports demandés
ou ne les transmettent qu’avec beaucoup de retard.
B - Un mécanisme d’autocontrôle
Cette prééminence de la volonté des Etats est donc manifeste aussi bien au
stade de l’élaboration même du rapport qu’à celui de la présentation orale de
celui-ci.
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Certes, afin d’amener les Etats à une coopération fructueuse dans ce domaine,
la plupart des organes de contrôle ont élaboré et mis à la disposition des Etats
des directives sur l’élaboration des rapports, qui concernent aussi bien leur
forme et leur structure que la nature et les types d’informations qu’ils doivent
contenir.
Toutefois, dans la pratique, non seulement ces directives ne sont pas toujours
suivies par les Etats, mais en outre les Etats ne fournissent généralement que
les informations qu’ils veulent bien fournir aux organes de contrôle. Or, en la
matière, l’organe de contrôle ne peut examiner au premier chef que les
informations fournies par les Etats. Tout dépend donc de la bonne volonté de
coopération des Etats et du climat de confiance qui règne entre eux et les
organes de contrôle. Malheureusement, il y a, en la matière, une certaine
méfiance des Etats à l’égard de cette forme de contrôle dont ils craignent
qu’elle n’entame leur souveraineté.
Le rapport fourni à l’organe de contrôle par l’Etat fait généralement l’objet d’un
examen par l’organe de contrôle, en la présence de l’Etat concerné. A cette
occasion, il s’engage le plus souvent un véritable dialogue entre l’organe de
contrôle et l’Etat. A partir d’un exposé liminaire de son rapport présenté par
l’Etat contrôlé, il s’ensuit un jeu de questions – réponses, dans lequel l’organe
de contrôle s’efforce de demander des éclaircissements sur des points
ambigus du rapport ou d’interpeller l’Etat concerné sur les insuffisances de sa
législation nationale au regard des dispositions conventionnelles le liant et
violations constatées et l’Etat s’efforce de défendre et justifier ces
insuffisances.
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1 – L’absence de contrainte
La présentation par les Etats de rapports devant les organes de contrôle donne
généralement lieu à un rapport d’évaluation établi par les organes de contrôle
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Ainsi, depuis 1992, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies adopte,
a l’issue de la présentation de chaque rapport étatique, des conclusions finales
– sans complaisance et parfois accablantes pour l’Etat – qui font état des
lacunes dans l’application du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques et n’hésite pas à formuler des observations et des recommandations
pour y remédier. Il se réserve même parfois le droit de décider qu’un ‘’Etat parie
ne s’est pas acquité de certaines de ses obligations qui lui incombent en vertu
du Pacte’’64.
D’aucuns en ont déduit que le mécanisme des rapports est de portée juridique
quasiment nulle65. Il faut cependant observer que les conclusions de ces
rapports d’évaluation ne sont pas dépourvues de tout effet juridique, ne serait-
ce qu’au regard des constatations d’insuffisances et des recommandations
qu’elles contiennent. D’ailleurs, on pourrait se demander si dans certains cas
la procédure de contrôle sur rapport ne contient pas une certaine contrainte
pour l’Etat contrôlé, surtout lorsque l’organe de contrôle se livre à une véritable
investigation à travers l’examen du rapport fourni par l’Etat.
2 – La tendance à l’investigation
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de toute contrainte pour l’Etat contrôlé. En effet, non seulement l’Etat est au
moins tenu de fournir et présenter les rapports requis, mais en outre il peut se
retrouver dans une situation d’autant plus inconfortable que la procédure
d’examen des rapports s’assimile parfois à une véritable procédure
d’investigation. Désireux de lier et de contrôler le plus efficacement possible
les Etats, certains organes de contrôle, surtout les organes indépendants,
tendent aujourd’hui à assurer, à travers leur contrôle, le respect maximum des
instruments internationaux sur la base desquels les rapports sont établis,
notamment en s’engageant dans ce que Régis de GOUTTES appelle « une
logique d’investigation »’66 qui s’avère relativement contraignante pour les
Etats. Il s’agit, en quelque sorte, d’amener les Etats à s’expliquer sur les
insuffisances et lacunes de la législation nationale au regard des dispositions
conventionnelles, voire à rendre compte publiquement de certains
manquements aux instruments internationaux qu’ils se sont volontairement
engagés à respecter.
66 Régis de GOUTTES, ‘’La présentation des rapports français devant les organes mondiaux
de protection des droits de l’Homme’’, in Hubert THIERRY et Emmanuel DECAUX (dir.),
Droit international et droits de l’Homme. La pratique juridique française dans le domaine
de la protection internationale des droits de l’Homme, Paris, Montchrestien, 1990, pp.
163-182.
67 Voir, par exemple, les directives générales de la CEDAW du 11 août 1983, du Comité pour
l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 6 décembre 1983, ou les
directives provisoires du Comite contre la torture de mai 1988.
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Dans ces conditions, on voit difficilement comment un Etat, qui accepte une
telle épreuve ne ferait aucun effort pour tirer au moins certaines conséquences
juridiques des conclusions de l’organe de contrôle. Dans les faits, les Etats,
soucieux de garder une bonne image devant les organes de contrôle,
s’efforcent, entre deux rapports, de corriger les imperfections constatées.
Ainsi, bien que n’aboutissant pas à une décision contraignante pour les Etats,
la procédure de présentation des rapports n’en comporte pas moins des effets
juridiques s’analysant comme de véritables contraintes de fait. C’est pourquoi
les Etats sont parfois paradoxalement réticents a ce type de contrôle qui,
lorsqu’il se veut trop rigoureux, peut être considéré comme une atteinte à leur
souveraineté. Cependant, cette contrainte demeure incertaine dans la mesure
où les Etats peuvent toujours l’éviter ou la limiter, notamment en s’en tenant
au strict minimum requis ou en s’abstenant simplement de produire les
rapports demandés.
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C’est un truisme de dire que chaque Etat est, dans les relations internationales
contemporaines, soucieux de soigner son image et d’apparaître comme un Etat
sérieux, respectable et crédible. Or, la violation des droits de l’Homme par un
Etat, surtout lorsqu’elle atteint un certain degré de gravité, tend aujourd’hui à
ternir l’image de marque d’un Etat qui se fait « épingler ». Aussi, les Etats ne
tiennent-ils pas à se faire passer pour des Etats qui violent ou méconnaissent
les droits de l’Homme.
Cette attitude des Etats, qui s’assimile à un « jeu politique », peut cependant
avoir des effets positifs sur le respect des conventions internationales au plan
68 Voir, par exemple, la pratique française en la matière : Régis DEGOUTTES, Art. cit., pp.
163-182.
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2 – La nécessité d’avoir une bonne place dans le concert des nations civilisées
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naturellement les Etats à choisir en quelque sorte leur camp, c’est à dire,
concrètement, à faire la preuve qu’ils sont dignes de faire partie du camp des
« Etats de l’axe du bien ». A cet égard, la présentation des rapports étatiques,
surtout devant les organes des Nations Unies, apparaît comme une occasion
privilégiée pour faire cette preuve. Soucieux donc de figurer parmi les Etats
civilisés et démocratique, les Etats soumis à la procédure de contrôle sur
rapport s’efforcent de démontrer qu’ils ne violent pas les droits de l’Homme et
qu’ils sont respectueux de leurs engagements internationaux.
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69 Sur les difficultés liées à la présentation des rapports périodiques dans le cadre de la
Commission africaine, voir René DEGNI-SEGUI, Les droits de l’Homme en Afrique noire
francophone. Théories et réalités, Abidjan, Ed. CEDA, 2è éd., 2001, pp. 206-208.
70 Cf. document n° E/CN.4/1997/74.par. 112 et 113.
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