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[DISSERTATION] Droit civil : mourir dans la dignité

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Voici un exemple de dissertation en droit civil, qui traite du rapport


entre la mort et la dignité. Cette copie est composée de deux parties :
l'affirmation de la dignité au moment de la mort, puis la réaffirmation
de la dignité après la mort. Découvrez comment réussir une
dissertation juridique avec cette copie qui a obtenu la note de 15,5/20.
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Sommaire :

I/ L'affirmation de la dignité au moment de la mort

A) La mort, fait volontaire et libre

B) L'euthanasie : fin de la dignité ?

II/ La réaffirmation de la dignité après la mort

A) La protection de la dignité du défunt par le droit

B) L'utilisation du cadavre à des fins scientifiques : continuité de la dignité ?

N.B. : cette copie est le fruit de la réflexion d’un étudiant en droit. La découvrir
vous permettra de comprendre le raisonnement de ce dernier, qui lui a valu la
note indiquée. Elle vous aidera à ce que vous ayez les outils pour formuler
votre propre réflexion autour du sujet donné. Pour rappel, le plagiat est
formellement interdit et n’est évidemment pas recommandé si vous voulez
vous former au droit. En d’autres termes, réfléchissez vous-même ! Enfin, cette
copie n’a pas eu 20/20, gardez un œil critique sur ce travail qui n’est donc
pas parfait.

Disclaimer : attention ! N’oubliez pas que la méthodologie peut varier selon


les facultés, mais aussi en fonction des enseignants. La méthodologie utilisée
dans cette copie n'est donc pas universelle. Respectez la méthodologie
enseignée par vos chargés de travaux dirigés et par vos enseignants 😊.

[Accroche] « Aucune fortune au monde ne vaut la dignité humaine. Et même


le corps d’un mort en a le droit ».

[Contextualisation historique et politique] En droit français, chaque être


humain acquiert la personnalité juridique dès la naissance, à condition
d'être né vivant et viable. Dès lors, se pose très largement la question du
statut et de la place du foetus en droit français. En principe, tant que
l’enfant n’est pas né, il n’est pas considéré par le droit en tant que personne
physique dotée de la personnalité juridique. Or, il est toutefois primordial de
reconnaître au foetus un statut d'être humain, de personne à en devenir tel
que le rappelle le Conseil Constitutionnel en 1994. À ce sujet, la Cour
européenne des droits de l’Homme, confrontée à la question de savoir si
« l’enfant à naître doit être considéré comme une personne au sens de
l’article 2 de la Convention des droits de l’homme et du citoyen protégeant le
droit à la vie », affirme que l’enfant à naître pourrait être titulaire de droits et
libertés, et ce avant la naissance (arrêt 26/12/2010).

Au regard de ces considérations, il est évident que le statut du foetus ne se


borne pas à une chose résiduelle mais bel et bien à un statut de personne
physique à en devenir. Notons toutefois que la mort du foetus n’a a priori
pas de conséquences juridiques. En ce sens, l’Assemblée plénière de la Cour
de cassation, par un arrêt rendu le 22 juin 2001, répond par la négative
quant à la possibilité de qualifier d’homicide involontaire la négligence d’une
personne à l’égard d’un foetus lui provoquant la mort.
Ainsi acquise, la personnalité juridique confère à la personne, née vivante et
viable, toute une série de droits et de protections. Parmi les effets de la
personnalité juridique, se dégage l’un des grands principes fondamentaux
qu’est la dignité de la personne. Ce droit est consacré à l’article 16 du Code
civil disposant que « la loi assure la primauté de la personne, et interdit
toute atteinte à la dignité de celle-ci ». Principe à valeur constitutionnelle
depuis le 27 juillet 1994, la dignité de la personne humaine constitue « la
base même des droits fondamentaux », si bien qu’il sera inscrit dans le
préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948.

La dignité de la personne assure la primauté de celle-ci, la protection de son


intégrité physique et morale, et ce, jusqu’à la fin de son existence. Jusqu’à la
fin de vie, la dignité de la personne est assurée, c’est-à-dire, jusqu’au décès.
Dès lors, le décès médicalement constaté entraîne la fin de la personnalité
juridique de la personne. Par ailleurs, se pose très largement la question de
savoir s’il y a une « survivance » de la personne après la mort. En effet,
l’article 16-1-1 du Code civil dispose que « le respect dû au corps humain ne
cesse pas après la mort, les restes de la personne décédée devant être traité
avec respect, dignité et décence ».

Certes, la mort de la personne emporte sa personnalité juridique, et par la


même manière, son statut de personne lui conférant des droits tels que la
dignité de la personne. De ce fait, il n’est pas totalement incohérent de
penser que la personne décédée n’est plus bénéficiaire de la dignité. En
réalité, le défunt est tout de même protégé par le droit. En ce sens, il
conserve un statut de droit au moment de la mort et après celle-ci, tel que le
dispose l’article 16-1-1 du Code civil.

[Problématique] C’est pourquoi, il est d’une importance majeure de


connaître le statut et la réalité de la personne au moment de la mort, mais
aussi après celle-ci. De savoir si le défunt conserve une part de dignité, avec
éventuellement le choix de sa mort mais aussi avec la manière dont il va être
retraité après la mort. Par ailleurs, dans quelle mesure, la mort peut-elle
préserver la dignité ?
[Annonce de plan] Si la dignité s’affirme au moment de la mort (I), elle ne
cesse pas après celui-ci, si bien qu’elle à tendance à se réaffirmer par le droit
(II).

I/ L'affirmation de la dignité au moment de la mort

[Chapô] Il est intéressant d’observer la mort comme la manifestation de la


dignité, du fait de son caractère volontaire et libre (A), avant de constater
certaines pratiques telle que l’euthanasie pouvant mettre fin à la dignité (B).

A) La mort, fait volontaire et libre

« En tant que processus biologique, la mort est un événement subi ». La


question principale gravitant autour de ce sujet, est celle de savoir s’il est
envisageable pour une personne physique de choisir la manière et à quel
moment sa vie peut prendre fin. Lors d’un arrêt rendu le 29 juillet 2002, le
Conseil d’Etat considéra que « le choix de sa sépulture avant son décès
participe à la manifestation de ses convictions personnelles, et à ce titre doit
en principe être respecté ». Ici, pour une personne, quel que soit son état de
santé, il est tout à fait possible de manifester sa volonté en vue du choix de
sa sépulture, et ce par testament. Notons toutefois qu’en France, le mode de
sépulture est régi par le droit au nom de l'intérêt de l’ordre public. Par
ailleurs, il existe évidemment un droit de choisir la manière dont la personne
veut passer « l'après-mort ». C’est ici une manifestation évidente de la dignité
de la personne que de choisir le futur de sa dépouille.

Le droit de mourir, de faire le choix de la manière dont la personne veut


mettre un terme à son existence, et à quel moment, n’est pas seulement un
désir de mourir dans la dignité, c’est aussi l’un des aspects de l’article 8 de
la Convention européenne des droits de l’homme. En ce sens, l’article 8 de la
CEDH dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et
familiale, de son domicile et de sa correspondance ». Ce droit de mourir est
consacré par la Cour européenne des droits de l’homme lors de l’affaire Koch
c/ Allemagne le 19 juillet 2012. Avant 2012, le Cour européenne des droits
de l’homme refusait catégoriquement de reconnaître un droit de mourir. La
Cour considérait qu’il n'était pas envisageable d’interpréter l’article 2 de la
CEDH, garantissant le droit à la vie, comme conférant « un droit
diamétralement opposé à l’ouverture d’un droit de mourir ». Or, la position
de la Cour a évolué en la matière. En effet, en 2012, lors de l’affaire Koch c/
Allemagne, elle jugea que « le droit d’un individu de décider de quelle
manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à conditions qu’il soit en
mesure de former librement sa volonté à ce propos et d’agir en conséquence,
est l’un des aspects du droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8
de la CEDH ».

[Transition] Autrement dit, la Haute juridiction européenne reconnaît un


droit de mourir au nom du droit au respect à la vie privée à condition que ce
choix soit fait de la totale volonté de la personne concernée. En outre, par
l’un des droits dérivés de la dignité de la personne, la CEDH ouvre un droit
de mourir. Ici, il revient de dire que l’un des effets de la dignité de la
personne est de pouvoir jouir du droit de mourir, en vue du choix de la
manière et du moment de la mort.

B) L’euthanasie : fin de la dignité ?

Le progrès médical est tel qu’il est possible aujourd’hui de retarder


l’échéance de la mort. De la même manière, il est tout à fait possible de
provoquer volontairement le décès d’une personne, que ce soit par
l’euthnasie, le suicide assité ou la sédation profonde. En France, le coeur du
débat tourne autour de l’euthanasie. Du grec euthanasia, cette pratique
consiste à provoquer le décès d’un individu atteint d’une maladie incurable
lui causant des souffrances morales et physiques. En principe, le droit
français prohibe cette pratique médicale. En Belgique, depuis 2003, l’aide
active à mourir est possible pour les personnes malades atteintes d’une
maladie incurable. Ce droit à l’aide active à mourir prend la forme d’une loi
dite de compassion. Elle permet au malade souffrant de faire le choix de
mettre un terme à son existence, en toute décence et dignité. Cette pratique
de l’euthanasie en Belgique permet de la même maniére d’éviter aux patients
de subir un acharnement thérapeutique. En ce sens, l’euthanasie entre dans
le champ de l’euthanasie puisqu’elle permet de mettre fin aux souffrances
d’un individus, par un choix éclairé et conscient. Bien que le progrès médical
permette de vivre plus longtemps, il fait aussi que « des personnes qui
auparavant, se seraient rapidement éteintes, se retrouvent durablement
maintenues en vie dans un état ou leurs facultés sont très largement
altérées », d'après Anne-Laure Boch.

Ici, il est question de l’obstination déraisonnable consacrée à l'article 37 du


Code de déontologie médicale. C’est ainsi qu’en 2005 est votée en France la
loi dite Leonetti. Cette loi légalise un droit à mourir, qui autorise un médecin
après autorisation du patient, « d’appliquer un traitement anti-douleur qui
peut avoir pour effet d’abréger la vie ». De plus, en 2016 est votée la loi qui
instaure un droit de l’endormissement, pour les patients atteints d’une
infection grave et incurable. En considération des pays voisins, la France à
peu à peu ouvert la possibilité aux patients gravement malade, de mourir
dans la dignité en échappant à l’acharnement thérapeutique et l’obstination
déraisonnable du corps médical. En revanche, l’article 38 du Code de
déontologie médicale dispose que le médecin n’a « pas le droit de provoquer
délibérément la mort ». Or, dans le cas où le patient gravement malade n’a
pas fait part de sa volonté et qu’il n’est plus en mesure de la manifester, le
médecin peut engager le processus de fin de vie au motif de refus de
l’obstination déraisonnable.

L’article 37 du Code déontologie médicale permet de la même manière


d’abréger les souffrances du patient. Il apparaît dès lors une contradiction
entre ces deux articles au sens ou l’un des deux permet à un médecin de
mettre fin aux souffrances du patient afin d’éviter l’acharnement
thérapeutique tandis que l’autre ne permet pas au médecin de provoquer la
mort volontairement du patient gravement malade. De ce fait, dans un arrêt
rendu par le Conseil d’État le 29 décembre 2000, un médecin a mis
délibérément fin à la vie d’un patient en état de fin de vie programmée sur le
fondement de ses propres conclusions. Dès lors, un médecin peut entraver la
dignité d’une personne qui n’a pas exprimé sa volonté du fait de son état de
santé. Le médecin peut donc contrevenir au principe selon lequel « le droit
d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie prend fin
[...] est l’un des aspects du droit à la vie privée ». Le moment de la mort n’est
pas une fin en soi pour la dignité de la personne. La dignité ne s’applique
pas seulement à la mort mais aussi après celle-ci.

II/ La réaffirmation de la dignité après la mort

[Chapô] Le droit ne s’évince pas des personnes après la mort, et protège


toujours ces dernières (A), d’autant plus que les cadavres font l’objet de
recherches scientifiques (B).

A) La protection de la dignité du défunt par le droit

En droit français, le cadavre humain ne se réduit pas à une chose résiduelle.


Juridiquement, le cadavre dépourvu de fait de sa qualité de personne est
une chose. Or, ici il est question de « personne décédée », de sorte à
privilégier « la vocation de l'être qu’il a été ». C’est ici que prend tout son sens
l’article 16-1-1 du Code civil disposant que « le respect du corps humain ne
cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les
cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traitées
avec respect, dignité et décence ». Autrement dit, le droit français est
catégorique quant à la préservation de la dignité après la mort des
personnes. En ce sens, l'exposition Our Body à corps ouvert exposant des
cadavres humains à des fins commerciales fut interdite par le Conseil d’État
par un arrêt confirmatif le 2 juillet 1993. En effet, le tribunal de grande
instance avait interdit cette expositions sur le fondement de l'article 16-1-1
du Code civil tout en rappelant le principe général du respect et dignité du
corps humain selon lequel « l’espace assigné par la loi au cadavre est celui
du cimetière, la commercialisation des corps par leur exposition porte une
atteinte manifeste au respect qui leur est dû ». Après la mort, certains
défunts avaient de leurs vivants manifesté la volonté d'être incinérés par
crémation. Or, les cendres des défunts peuvent parfois faire l’objet de bien
meubles de la part de la famille. Elles sont parfois perçues par la famille
comme un patrimoine.

Or, l’article 16-1 du Code civil rappelle que « le corps humain et ses éléments
et produits ne peuvent pas faire l’objet d’un droit patrimonial ». Considéré
comme tel, le défunt serait dépourvu de toute dignité. C’est pourquoi en
France, depuis la loi du 19 décembre, le partage des cendres du défunt est
prohibé par le droit. De la même manière, il est plus permis d’y faire une
conservation personnelle.

B) L’utilisation du cadavre à des fins scientifiques : continuité de la


dignité ?

En France, il est tout à fait possible de faire don de son corps à la science
dans le but d’aider l’enseignement et la recherche médicale. Dès lors, toute
personne ayant la majorité peut faire don de son corps à la science par
demande rédigée de son vivant, à la main, datée et signée. Ainsi, par la
production de cet écrit sous seing privé, la personne consent au don de son
corps. Ici, la mort de la personne aura plus ou moins des conséquences
positives sur l’avenir, d’autant plus que c'est un acte de pleine volonté.
Notons tout de même qu’il existe une exception quant au consentement
direct de la personne à faire don de son corps à la science. En effet, une
personne en état de mort cérébrale et maintenue en vie artificiellement est
considérée par le droit français comme décédée.

De ce fait, le prélèvement d’organes sur cette personne est tout à fait légal,
d’autant plus qu’il existe une présomption d’accord dès la majorité de la
personne. Pour s’opposer à cette présomption d’accord, il faut de son vivant
s'être enregistré au registre national des opérations de prélèvements
d’organes. En revanche, dans le cas où la personne n’a pas été en mesure au
cours de sa vie de faire part de son opposition à ce prélèvement, la
présomption d’accord s’applique et contrevient à la volonté de la personne.
En ce sens, l’affaire Milhaud a permis de rappeler l’indispensabilité du
consentement de la personne quant aux expériences scientifiques après le
décès qui portent effectivement atteinte à la dignité et au respect dû aux
morts.

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