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DEUXIEME PARTIE : LES DROITS SUBJECTIFS

Nous avons défini le droit subjectif comme étant telle ou telle prérogative dont un sujet
de droit est titulaire. Le sujet de droit est donc celui qui possède une aptitude juridique, qui a la
possibilité d’être titulaire de prérogatives juridiques mais aussi d’être tenu d’obligations à
l’égard des autres sujets de droit. Le sujet de droit est, en fait, la personne envisagée dans sa
fonction juridique (Titre I). Nous verrons les principales classifications des droits subjectifs
(Titre II) puis la preuve des droits subjectifs (Titre III) et enfin, la sanction des droits subjectifs
(Titre IV).

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TITRE I : Le titulaire des droits subjectifs

L’OBJET DE CETTE ETUDE :

Le droit est formé de l’ensemble des règles obligatoires sanctionnées par l’État et dont
les personnes peuvent se prévaloir dans leurs rapports avec les individus ou avec l’État. Mais
qui peut s’en prévaloir ? à qui s’appliquent les règles de droit ? Quels sont les acteurs de la
vie juridique ? L’étude des sujets de droit permet de répondre à ces questions.

Les sujets de droit ou les personnes ont l’aptitude à être titulaire de droits et doivent se
soumettre aux règles juridiques.

Cette étude nous apprendra de savoir :

- Qui sont les sujets de droit :

Non seulement les êtres humains appelés les personnes physiques mais aussi des groupements
comme les sociétés ou les associations ;

- Quels sont les droits qu’ils peuvent exercer :

À cet égard, le mineur doit être protégé comme certains adultes et n’exerce pas les mêmes droits
que les majeurs.

Dans quelle mesure la création du lien matrimonial modifie leur situation juridique.

Des intérêts s’attachent à cette étude :

Economique : la détermination des différents sujets de droit nous permet de connaître les
différents agents de la vie économique, les hommes qu’ils soient consommateurs ou
producteurs, mais aussi les groupements institutionnels comme la société et les associations ;

Social : l’étude des incapacités nous révèle comment sont protégés les mineurs et certains
majeurs.

La personnalité juridique est l’aptitude juridique à être titulaire de droits et tenu


d’obligations. La personnalité juridique est reconnue non seulement aux individus, mais aussi
à certains groupements de personnes ou de biens. Les individus sont dits « personnes
physiques », tandis que par opposition, les groupements qui ont la personnalité juridique sont
dits « personnes morales ».

CHAPITRE 1 : LES PERSONNES PHYSIQUES

Selon l’auteur Madame ASSI-ESSO Anne-Marie : « Les personnes physiques sont les
êtres humains aptes à acquérir des droits et à assumer des obligations. Il résulte de cette
définition que seuls les êtres humains sont des sujets de droit à l’exclusion des autres êtres
vivants tels que les animaux et le monde végétal. »

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Aujourd’hui, tous les êtres humains ont la personnalité juridique. Cela semble aller de
soi. Il y a pourtant là une conquête relativement récente du droit, puisque l’esclavage n’a été
aboli qu’en 1848. De plus, la mort civile, qui était une sanction accompagnant certaines
condamnations pénales, en vertu de laquelle celui qui en était frappé ne pouvait plus acquérir
de droits, a été abolie. Aujourd’hui, la reconnaissance de la personnalité juridique des êtres
humains est donc absolue, et se confond avec l’existence de la personne physique. De cette
existence découle la reconnaissance d’une prérogative essentielle : la capacité juridique.

Section 1 : L’existence de la personne physique


Cette existence se manifeste par la reconnaissance à la personne physique de la
personnalité juridique qui est l’aptitude à être titulaire de droits et tenu d’obligations. La
personnalité juridique a un début et une fin.

§1-Le début de la personnalité juridique

Le début de la personnalité juridique est situé à la naissance en principe, mais il y a une


exception à ce principe.

I- Le principe

La personnalité juridique commence à la naissance, à condition toutefois que l’enfant


soit né vivant et viable. L’enfant mort-né, ou mort pendant l’accouchement n’a pas la
personnalité juridique et est sensé ne l’avoir jamais eue. L’enfant doit également naître viable.
Cependant, la notion de viabilité - qui signifie que l’enfant doit être apte à survivre, compte
tenu notamment du degré de développement du fœtus, ou des organes dont il est pourvu - est
discutée. La viabilité étant présumée, c’est à celui qui conteste la personnalité d’un enfant de
prouver que cet enfant n’est pas né viable.

II- L’exception

Il arrive parfois que l’on fasse remonter l’acquisition de la personnalité juridique à la


conception. Une règle issue du droit romain prévoit que l’enfant conçu est considéré comme né
quand il y va de son intérêt. Cette règle est implicitement reprise par un certain nombre de
dispositions. Il s’agit notamment de l’article 7 de la loi du 26 juin 2019 relative aux successions,
de l’article 9 de la loi du 7 octobre 1964 relative aux donations entre vifs et aux testaments,
selon lesquels l’enfant conçu peut recueillir une succession ou une donation.

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C’est ainsi que la jurisprudence permet à l’enfant conçu de bénéficier d’une police d’assurance,
en application du principe selon lequel l’enfant conçu est considéré comme né chaque fois qu’il
y va de son intérêt.

§2- La fin de la personnalité juridique

Ici encore, il y a un principe qui est assorti d’une exception.

I- Le principe de la fin de la personnalité juridique au décès

En principe, la personnalité juridique prend fin avec la mort biologique. Mais le


législateur ne donnant pas une définition de la mort, son diagnostic est laissé à l’appréciation
du médecin. Pour la médecine donc, la mort est l’arrêt complet et irréversible des fonctions
vitales constaté sur un corps. Pour les personnes ayant une vie végétative, la date de leur mort
peut être fixée au jour où sont débranchés les appareils les maintenant artificiellement en vie.
Au décès, l’individu ne peut plus acquérir des droits ni être tenu d’obligations. La mort doit être
constatée et portée à la connaissance de l’officier de l’État civil du lieu du décès, dans un délai
de 15 jours, à l’initiative des parents du défunt. L’officier de l’Etat civil dressera un acte de
décès. La personnalité prend fin à compter de la constatation officielle par l’officier de l’État
civil. Ainsi, la personne décédée ne peut plus être titulaire de droits, ni être tenue d’obligations
(sur la mort, voir B. CALAIS, « La mort et le droit », D. 1985 chr 73 ; F. RINGEL et E.
PUTMAN, « Après la mort », D. 1991, chron. 241).

Toutefois, dans certaines hypothèses, on a une incertitude sur le décès de la personne


physique, son cadavre n’ayant pas été retrouvé : on pourra envisager soit son absence soit sa
disparition. La disparition correspond à l’état de l’individu dont on a la certitude ou la quasi-
certitude qu’il est mort mais sans que le cadavre ait pu être retrouvé. C’est aussi la situation
d’une personne qui était dans une situation de nature à mettre sa vie en péril ou en danger
lorsqu’on l’a vu pour la dernière fois. La probabilité du décès étant très grande, la loi assimile
le disparu au décédé. Mais la procédure de déclaration du décès est judiciaire c’est-à-dire
qu’elle se fait devant le tribunal. Le procureur de la République ou toutes personnes intéressées
(le conjoint, les héritiers, les créanciers...) pourront par requête demander au tribunal de déclarer
judiciairement le décès du disparu. Le tribunal compétent est fonction du lieu de survenance de
l’événement à l’origine de la disparition.

Il sera alors rendu un jugement déclaratif de décès qui tient lieu d’acte de décès (cf Civ.
15 janv. 1968, D. 1968, 263 ; R.T.D Civ. 1968, 705). Ainsi, le décès doit être transcrit sur les
registres de l’État civil (registre des décès) au même titre qu’un acte de décès. A partir de cet
instant, le disparu est considéré comme mort. Son mariage sera dissous et sa succession ouverte.

Tout différent est le régime de l’absence. Dans le langage usuel, l’absence est le fait de
ne pas être présent en un lieu dans lequel on devrait normalement se trouver à un moment donné.
Il s’agit en réalité de la non présence. Au sens juridique du terme, l’absence est la situation
d’une personne dont on ignore si elle est encore en vie ou morte alors qu’aucun événement
périlleux ne fait présumer le décès (voir VIVANT, le régime juridique de la non présence, RTD.

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Civ. 1982 p.1 ; VEAUX, absents et disparus, D. 1947, chr. 169 ; Tribunal de 1ère instance
d’Abidjan, 8 février 1986, jugement n°1O6, inédit).

Dans une telle situation, le droit va alors prendre en compte un ensemble d’intérêts :
ceux de l’absent et ceux de la famille de celui-ci. C’est ce qu’on appelle le régime juridique de
l’absence qui laisse entrevoir trois périodes. Toutefois, l’article 70 nouveau de la loi de 2019
relative à l’Etat civil permet à toute personne intéressée ou au procureur de la république,
d’adresser une requête au tribunal pour obtenir un jugement déclaratif de décès de l’absent dix
ans après la date des dernières nouvelles.

II- Les atténuations au principe

Il existe des hypothèses où l’on prolonge la personnalité juridique du défunt après sa


mort : c’est une fiction juridique. On peut citer :

• Le testament : c’est un acte juridique par lequel une personne dispose de ses biens après sa
mort. Avec le testament, c’est comme s’il y avait survie de la personnalité juridique du défunt
: le testament prend effet au décès du testateur.

. La loi considère qu’une personne stipule au profit de ses ayants-cause universels et à titre
universels c’est-à-dire de ses légataires universels. Ainsi les héritiers qui recueillent la totalité
ou une partie (quotte part) de la succession du decujus, sont considérés comme continuant la
personnalité juridique de leur auteur. Ils succèdent à ce titre aux droits et obligations du décujus
sauf à ceux conclus intuitu personae.

• Les atteintes à la mémoire du défunt sanctionnées en droit pénal

• La décoration à titre posthume

Section 2 : La capacité juridique des personnes physiques


La capacité juridique se définit comme l’aptitude à être titulaire de droits et tenu
d’obligations, et l’aptitude à les exercer. Aussi, distingue-t-on deux degrés dans la capacité
juridique : la capacité de jouissance : aptitude à avoir des droits et des obligations qui
correspond à la personnalité juridique et la capacité d’exercice : le pouvoir de mettre en oeuvre
soi-même ses droits et ses obligations. La capacité juridique est donc la règle. Mais, certaines
personnes sont pourtant privées de la faculté d’exercer les droits et les obligations dont elles
sont titulaires. On les appelle les incapables.

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§1-Généralités sur les incapacités

A- La classification des incapacités

On distingue :

Les incapacités de jouissance : Il y a incapacité de jouissance lorsqu’un individu est privé d’un
ou de plusieurs droits. Autrefois, il existait des incapacités générales de jouissance c’est-à-dire
qui privaient des personnes de tous les droits. On déniait à ces personnes la personnalité
juridique. C’était le cas des esclaves. Mais aujourd’hui, il n’y a que des incapacités spéciales
de jouissance c’est-à-dire certains individus sont privés de certains droits seulement. En effet,
ces dernières incapacités visent plus à protéger ces incapables ou à les sanctionner.

Les incapacités d’exercice : Il y a incapacité d’exercice quand un individu est titulaire d’un
droit, mais la loi pose des restrictions à l’exercice par lui, dudit droit. Ces incapacités peuvent
être générales ou spéciales.

B- Les remèdes aux incapacités

Lorsqu’une personne est incapable, on peut intervenir à deux niveaux pour la protéger :
par des mesures préventives et par des mesures répressives

• Les mesures préventives : Il s’agit du mécanisme de représentation qui convient au mineur et


au majeur interdit judiciaire et le mécanisme d’assistance qui correspond au faible d’esprit et
au prodigue. La représentation consiste à dessaisir le représenté de l’administration de son
patrimoine au profit du représentant qui agit et passe les actes au nom et pour le compte de
l’incapable représenté. Quant à l’assistance, c’est un mécanisme qui laisse l’incapable à la tête
de la gestion de son patrimoine mais exige qu’il obtienne le consentement de son représentant
avant de passer certains actes énumérés par la loi.

Il faut aussi déterminer les actes que l’incapable peut être amené à faire et ceux qui lui sont
interdit. On distingue les actes conservatoires, les actes d’administration, les actes de la vie
courante et les actes de disposition qui sont graves et qu’il ne peut accomplir seul.

• Les mesures répressives : elles concernent essentiellement la nullité c’est-à-dire


l’anéantissement rétroactif de l’acte passé en violation de la loi. Cette nullité peut être demandée
par le représentant légal ou le mineur parvenu à la majorité ou à l’émancipation.

§2- Les différents types d’incapables

I- Le mineur

Le mineur est défini par la loi comme l’individu de l’un ou l’autre sexe qui n’a pas
encore atteint l’âge de 18 ans accomplis : article 1er de la loi du 26 juin 2019 relative à la
minorité. Il faut voir à présent sa condition et sa protection.

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A- La condition juridique du mineur

Elle dépend du point de savoir si le mineur est non émancipé ou si le mineur est
émancipé.

• Le mineur non émancipé : c’est l’individu de l’un ou l’autre sexe qui n’a pas encore atteint
l’âge de 18 ans accomplis et qui n’est pas encore affranchi de l’autorité parentale. Selon les
articles 32 et 33 de la loi relative à la minorité, ce dernier est incapable de contracter c’est son
représentant qui doit agir à sa place. Le représentant du mineur non émancipé est un
administrateur légal (les père et mère) ou un tuteur. Il suit de là que le mineur non émancipé est
frappé d’une incapacité générale d’exercice qui concerne tous les actes juridiques et les actions
en justice. Mais, il y a des exceptions légales à cette incapacité du mineur. Elles sont relatives :

- Aux faits juridiques : ex : un accident, des coups et blessures etc. selon l’article 36 de la loi
sur la minorité, le mineur engage son patrimoine par ses délits, ses quasi délits et son
enrichissement sans cause. Donc pour les faits juridiques qu’il commet le mineur devra
répondre personnellement. La victime du mineur peut également poursuivre les père et mère
sous le fondement de l’article 1384, alinéa 3 du code civil.

- Le contrat de travail : à 16 ans le mineur non émancipé peut conclure et rompre son contrat
de travail assisté de son représentant légal.

- Les actes conservatoires : selon l’article 34 de la loi sur la minorité, le mineur peut accomplir
seul les actes conservatoires sur son patrimoine. Ce sont des actes nécessaires et urgents qui
tendent à empêcher les biens de sortir du patrimoine de l’incapable. Ce sont des actes qui
permettent de sauvegarder la consistance du patrimoine. Ex : renouvellement de l’inscription
d’une hypothèque.

- Les actes que le représentant légal aurait pu faire seul sans autorisation : Article 37 de la loi
sur la minorité. Cette règle permet ainsi de valider certains actes passés seul par le mineur non
émancipé. D’abord les actes de la vie courante : ce sont les menus achats, les actes nécessaires
à la vie courante. Ex : achat de vêtements, de denrées alimentaires, conclusion d’un contrat de
transport etc. Ensuite les actes d’administration : ce sont des actes de pure gestion du patrimoine
qui ne portent pas atteinte à l’intégrité et à la consistance du patrimoine. Ex : conclusion d’un
contrat de bail portant sur l’appartement appartenant au mineur. En revanche, si l’acte est de
ceux que le représentant légal n’aurait pas pu faire seul sans autorisation, c’est-à- dire un acte
de disposition (acte qui met en péril le patrimoine du mineur : article 44, alinéa 4 de la loi sur
la minorité), la nullité relative de l’acte peut être demandée par le représentant légal durant toute
la minorité de l’enfant, ou dans un délai de 5 ans par le mineur parvenu à l’émancipation ou à
la majorité. Les actes que le mineur non émancipé peut valablement accomplir sont toutefois
rescindables en faveur de ce dernier, pour lésion quelle que soit l’importance de la lésion subie
par le mineur. Lorsque l’action en nullité ou rescision aboutie, le mineur n’est tenu de restituer
ce qui lui a été payé que s’il est prouvé que ce paiement a tourné à son profit.

• Le mineur émancipé : L’émancipation est l’acte par lequel un mineur acquiert la pleine
capacité d’exercice par son affranchissement de l’autorité parentale ou de la tutelle. Il devient

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capable d’accomplir tous las actes de la vie civile et se trouve de ce fait assimilé à un majeur :
article 119. Cependant, pour l’exercice du commerce et son adoption, il faut l’autorisation des
père et mère ou celui qui exerce l’autorité parentale ou le conseil de famille : article 125 à 126.

Depuis la réforme de 2019, l’émancipation par le mariage n’existe plus. Aujourd’hui,


l’émancipation est exclusivement volontaire. Elle résulte de la déclaration conjointe des père et
mère ou de l’un d’eux en cas de désaccord, à condition que le mineur ait atteint 16 ans révolus.
Cette déclaration est reçue par le juge des tutelles qui recueille le consentement du mineur et
prononce l’émancipation si elle satisfait aux intérêts du mineur et s’il y a de justes motifs :
article 120. L’émancipation des mineurs sous tutelle ou non placés sous tutelle est régie par les
articles 121 et 122 de la loi sur la minorité.

B- Les mécanismes de protection du mineur

Il y a le système normal qui est celui où le mineur a au moins l’un de ses deux parents.
Dans ce cas, il s’agit de l’autorité parentale et de l’administration légale. C’est un ensemble de
pouvoirs conférés aux parents sur la personne et les biens de leur enfant mineur : article 3 de la
loi sur la minorité.

Les attributs de l’autorité parentale sont relatifs à la personne de l’enfant mineur : le


droit de consentir à l’adoption, le droit de garde et de surveillance, le droit à l’entretien et à
l’éducation, l’obligation de répondre des dommages causés par son enfant, et aux biens du
mineur : il s’agit notamment du droit d’administrer les biens de l’enfant et du droit de disposer
des revenus de l’enfant : article 4.

Il y a le système exceptionnel qui est l’hypothèse où le mineur n’a plus de père et mère
ou quand ces derniers sont dans l’impossibilité de manifester leur volonté ou ont été déchus. Il
s’agit dès lors de la tutelle. La tutelle s’ouvre quand il y a décès, absence, éloignement ou
déchéance des droits de la puissance paternelle des père et mère. Elle peut s’ouvrir aussi par
intervention du juge des tutelles s’il estime que le mode de protection normale ne protège pas
l’enfant : article 53.

II- Le Majeur Incapable

Pour les majeurs, le principe est la capacité juridique. Dès lors qu’elles pourraient être
les causes de l’incapacité du majeur ? De façon globale, c’est l’altération de la volonté qui
justifie son incapacité d’exercice. Certains parmi ces incapables sont protégés d’autres non.

A- Les incapables majeurs non protégés

Ils ne font l’objet d’aucune mesure de protection car leur aliénation n’a pas été déclarée.
Dans ce cas la protection est occasionnelle et diffère selon qu’il s’agit de faits ou d’actes
juridiques.

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• Les actes juridiques passés par un majeur non protégé : En principe, le majeur aliéné demeure
capable tant que son incapacité n’a pas été déclarée par le juge. Toutefois, s’il est rapporté la
preuve de l’existence de l’aliénation de celui-ci au moment de l’acte, l’acte accompli sera frappé
de nullité.

• Les faits juridiques (dommages) causés par un majeur non protégé : En principe, vu
l’aliénation mentale due à l’inconscience totale de l’acte posé, l’aliéné mental ne peut être tenu
personnellement responsable. En effet, les conditions de la responsabilité civile délictuelle
notamment la faute qui comprend un élément matériel et un élément psychologique font défaut.

Toutefois, la jurisprudence retient la responsabilité civile personnelle de l’aliéné lorsque l’acte


illicite a été commis dans un intervalle de lucidité ou lorsqu’il y a usage de stupéfiants, d’alcool,
de drogue. Enfin, on pourrait engager également la responsabilité civile personnelle de celui
qui a la garde de l’aliéné si celui-ci s’est rendu coupable d’un défaut de surveillance.

B- Les incapables majeurs protégés

Ce sont les interdits judiciaires, les aliénés internés et les prodigues et les faibles d’esprit.

• Les interdits judiciaires : Ce sont les majeurs qui sont dans un état habituel d’imbécillité, de
fureur ou de démence. L’interdiction est prononcée grâce à l’action introduite par les parents,
le conjoint ou par le Procureur de la 1République. L’interdiction a pour effet de mettre en place
un régime de protection de l’interdit qui est la tutelle. L’interdit judicaire est frappé d’une
incapacité générale d’exercice. C’est alors le tuteur qui représente l’aliéné dans
l’accomplissement des actes juridiques.

• Les aliénés internés : Ce sont les personnes qui sont enfermées dans un établissement
psychiatrique. Frappées d’une incapacité générale d’exercice, elles seront représentées par un
tuteur pour l’accomplissement de tout acte juridique.

Les prodigues et les faibles d’esprit : Les prodigues sont des personnes qui se livrent à
des dépenses inconsidérées inspirées par la passion et non la raison risquant de compromettre
leur patrimoine. Les faibles d’esprit sont des personnes dont les facultés mentales sont affaiblies
sans qu’il y ait perte totale et habituelle de la raison. Toutes ces personnes bénéficient d’un
conseil judiciaire pour la conclusion de certains actes juridiques notamment ceux plus
importants (vente, emprunt...). Elles font l’objet d’une mesure d’assistance et non de
représentation.

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CHAPITRE 2 : LES PERSONNES MORALES

On n’entend par personne morale, un groupement de personnes organisé en vue


d’atteindre un objectif précis.

La personne morale est un sujet de droit, c’est-à-dire qu’elle est titulaire de droits et
tenue d’obligations. Elle se distingue des individus qui la composent et la font fonctionner. Ces
derniers ont mis en commun des biens ou leur activité, en vue d’atteindre cet objectif à travers
le groupement. Il est lucratif ou désintéressé. L’individualisation de la personne morale
s’effectue par son nom, son domicile et sa nationalité. Elle est titulaire d’un patrimoine, c’est -
à-dire d’un ensemble de biens, qu’elle gère par l’intermédiaire de ses organes, et elle peut agir
en justice.

Il faut cependant nuancer cette séparation entre la personne morale et les individus qui
la composent car, dans certains cas, ils supportent personnellement ses dettes : les sociétés de
personnes par exemple.

Une personne morale est toujours créée pour atteindre un objectif déterminé, qui est
établi avant sa création et toutes ses activités doivent être centrées exclusivement sur cet
objectif. Ce principe répond à l’obligation de respecter le principe de spécialité, qui délimite la
sphère de compétence de ces groupements.

Plusieurs catégories de personnes morales existent en droit :

- Les personnes morales de droit public : l’État, les collectivités territoriales ou locales (les
départements, les régions, les communes), les établissements publics tels que les universités ou
les hôpitaux.

- Les personnes morales de droit privé, que l’on distingue en fonction de leur activité
désintéressée (associations, fondations) ou non : les sociétés civiles, les sociétés commerciales.

RESUME

Les titulaires des droits subjectifs sont les personnes juridiques ou sujets de droit. On en
distingue deux : les personnes physiques et les personnes morales. Toutes les personnes
physiques ont vocation à être sujets de droit. Cette qualité commence en principe à la naissance
à condition de naître vivant et viable. Exceptionnellement, s’il a un intérêt, l’enfant conçu peut
bénéficier d’une personnalité conditionnelle avant sa naissance. Quoi qu’il en soit la
personnalité juridique s’éteint en principe au décès. Mais la loi prévoit des hypothèses de
prolongation de cette personnalité après le décès.

Tout autre est la situation dans laquelle, on n’a pas de nouvelles d’une personne dont le
corps n’a pourtant pas été retrouvé. La loi encadre ces situations soit par le régime de l’absence,
soit par celui de la disparition afin de pourvoir à la gestion des biens de l’intéressé et protéger
également les intérêts des héritiers et des tiers.

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La personnalité juridique permet à la personne physique de jouir en principe de la
capacité. Toutefois, certaines raisons peuvent amener le législateur à prévoir que des personnes
sont incapables. C’est le cas des mineurs non émancipés à cause de leur âge et de certains
majeurs à cause de leur aliénation mentale. Dans ces conditions, ils sont réputés incapables
d’exercer eux même leurs droits, c’est le représentant légal ou judiciaire qui agit en leur nom.
Cependant, l’incapacité du mineur non émancipé comporte plusieurs exceptions, ce qui n’est
pas le cas des interdits et internés. Tout autre est la situation des majeurs incapables tels que les
prodigues et les faibles d’esprit qui sont plutôt assistés et donc ils sont laissés à la tête de leur
patrimoine.

Les personnes morales sont aussi des sujets de droit qui sont créés pour des objectifs
précis et qui ont aussi des droits et des obligations. Elles sont des personnes de droit public ou
de droit privé (on soit un but lucratif ou non lucratif).

BIBLIOGRAPHIE :

- B. CALAIS, « La mort et le droit », D. 1985 chr 73.

- F. RINGEL et E. PUTMAN, « Après la mort », D. 1991, chron. 241.

- VIVANT, « le régime juridique de la non présence », RTD. Civ. 1982 p.1.

- VEAUX, « absents et disparus », D. 1947, chr. 169.

EXERCICE 1 : CAS PRATIQUE

ENONCE

Antoine a vingt-cinq ans. Il est parti avec un ami en vacances dans le désert.

Il a promis à sa femme, qu’il a épousée un an auparavant et qui attend un enfant, de donner des
nouvelles chaque fois que cela lui sera possible. Sa femme est très inquiète car la dernière fois
qu’il l’a appelée, c’était il y a trois semaines et il lui avait annoncé qu’ils partaient en excursion
malgré l’annonce d’une tempête de sable. Il aurait dû rentrer avec son ami depuis déjà deux
semaines. Elle a appelé les autorités locales ainsi que l’ambassade de France, mais personne
n’a pu lui donner le moindre renseignement au sujet de son mari. La famille de l’ami d’Antoine
est elle aussi sans nouvelles.

1. Que peut-on faire pour organiser la situation d’Antoine ?

2. L’enfant qu’attend la femme d’Antoine pourrait-il hériter de son père si ce dernier ne


réapparaît pas ?

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TITRE II : La classification des droits subjectifs

Rattachés aux personnes juridiques, les droits subjectifs sont multiples. Ils ont fait
l’objet de plusieurs classifications qui ne sont pas fortuites. Il faut même dire que ces
classifications sont très importantes. Pour l’essentiel, Il faut bien comprendre qu’à chaque
catégorie de droit correspond un régime juridique particulier. Il est donc important de savoir à
quelle catégorie appartient telle prérogative pour connaître la nature du droit applicable. La
distinction majeure divise les droits en fonction de leur caractère pécuniaire (Chapitre 1) ou non
(Chapitre 2).

CHAPITRE 1- LES DROITS PATRIMONIAUX

Le principe de classement est simple : seuls les droits évaluables en argent sont des
droits patrimoniaux et seuls ces droits font partie des éléments du patrimoine. On peut ainsi
citer, le droit de propriété, le droit de créance.

Il est important de définir le patrimoine (Section 1) avant de passer en revue les différents types
de droits patrimoniaux (Section 2).

Section 1 : Notion de patrimoine


Le Code civil ne définit pas le patrimoine. C’est au XIXe siècle qu’Aubry et Rau ont
tenté de le définir. Pour Aubry et Rau, "le patrimoine est l’ensemble des biens d’une personne,
envisagé comme formant une universalité de droit ". L’idée de patrimoine se déduit directement
de celle de la personnalité. Dans cette théorie classique d’Aubry et Rau, le patrimoine présente
trois caractères essentiels que nous étudierons successivement.

I- Universalité du patrimoine

L’ensemble des droits d’une personne forme une universalité : son patrimoine. Cet
ensemble forme un seul bloc : Le patrimoine est une universalité juridique. Le patrimoine
comporte deux subdivisions : L’actif et le passif.

À l’actif, figurent tous les droits, les éléments qui ont une valeur positive.

Au passif, figurent toutes les obligations, les éléments qui ont une valeur négative.

- La principale conséquence résultant de l’universalité des éléments du patrimoine est le lien


qui existe entre l’actif et le passif. Les éléments actifs d’un patrimoine, par exemple les droits
de propriété et les droits de créance, sont liés aux éléments passifs, c’est-à-dire aux dettes de la
personne. L’actif répond du passif. En conséquence, les créanciers de la personne peuvent se
payer sur l’actif. Les créanciers chirographaires (celui qui n’a aucune sûreté) ont un droit de
gage général sur le patrimoine de leur débiteur (art. 2092 C. civ.).

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- Une autre conséquence de cette universalité concerne les principes qui gouvernent la
transmission du patrimoine à cause de mort. L’ayant-cause universel ou à titre universel hérite
de son auteur, le patrimoine dans son ensemble. Le passif et l’actif étant liés, l’héritier recueille
à la fois les droits de son auteur mais aussi ses dettes : Cette transmission est dite à titre
universel. Les ayants cause à titre particulier ne reçoivent quant à eux qu’un élément de l’actif
du patrimoine du défunt. Cette transmission de l’ensemble ne peut se produire qu’à l’occasion
du décès de la personne, car le patrimoine est lié à la personne.

II- Lien entre la personne et le patrimoine

- Seules les personnes ont un patrimoine. Il ne peut y avoir de patrimoine sans le support d’une
personne, physique ou morale. Le Patrimoine n’est pas seulement lié aux personnes physiques.

Les personnes morales ont un patrimoine différent des personnes physiques qui les composent.
Par exemple dans une société commerciale, c’est l’actif de la société qui répond de son passif
c’est-à-dire de ses dettes.

- Toute personne a nécessairement un patrimoine. Le patrimoine est le contenant de ses droits


et obligations. Toute personne physique ou morale a nécessairement un patrimoine, même si
son contenu est nul. En effet, même si le passif est supérieur à l’actif, la personne n’en a pas
moins un patrimoine. Toute personne a un patrimoine parce qu’elle est apte à avoir des droits
et des obligations, qui prendront place dans ce patrimoine. Le patrimoine est lié à l’existence
de la personne juridique. Le patrimoine n’est donc pas transmissible entre vifs.

- Une personne n’a qu’un patrimoine en principe. L’héritier n’est pas titulaire de deux
patrimoines, le patrimoine du défunt va se fondre dans le sien. Aussi, on ne peut isoler un bloc
de droits et d’obligations que si on peut les rattacher à une personne juridique. Ceci explique la
différence qui existe entre le commerçant qui exerce individuellement son négoce et celui qui
l’exerce sous forme de société. Dans le premier cas, le fonds de commerce est un élément du
patrimoine du commerçant et les dettes résultant de l’exploitation de ce commerce seront
compensées par tous les éléments actifs appartenant personnellement au commerçant. Tandis
que le commerçant qui exerce sous forme de société, personne morale, a créé une autre
universalité de droits, le patrimoine dont la société est titulaire. Les deux patrimoines sont
distincts. A une personnalité juridique correspond donc un patrimoine quelles que soient ses
activités. C’est ainsi que le commerçant ne peut avoir deux patrimoines : un affecté à l’exercice
du commerce et un autre réservé à la vie civile et familiale. C’est la prohibition du patrimoine
d’affectation.

Cependant aujourd’hui cette prohibition n’est plus absolue avec l’Acte Uniforme relatif
aux sociétés commerciales qui prévoit en son article 5 que “la société commerciale peut
également être créée par une seule personne, dénommée associé unique’’. Dans cette hypothèse
une personne n’a pas à elle seule deux patrimoines puisque la société unipersonnelle a la
personnalité morale, mais l’unicité d’associé rend artificielle la dualité des personnes. Si bien
qu’en fin de compte la situation de l’associé unique, est égale à celle d’une personne qui aurait
deux patrimoines distincts.

65
De plus en droit français, avec la nouvelle loi de 2010 relative à l’entrepreneur
individuel à responsabilité limitée (EIRL), le législateur français consacre le patrimoine
d’affectation. En effet cette nouvelle loi permet à tout entrepreneur individuel d’affecter une
partie de ses biens à l’exercice de son activité (commerciale, artisanale, libérale ou agricole)
par une déclaration d’affectation. La conséquence de cette déclaration d’affectation est de
limiter le gage des créanciers professionnels aux biens ayant fait l’objet d’affectation. On
aboutit ainsi à la situation où une même personne juridique a deux patrimoines sans avoir crée
au préalable une deuxième personne juridique (société ayant la personnalité morale
notamment), comme cela a toujours été admis.

III- Le patrimoine ne contient que des droits pécuniaires

Pour Aubry et Rau, le patrimoine ne comprend que des droits de valeur pécuniaire, évaluables
en argent. L’idée est que les droits sans valeur pécuniaire sont hors du patrimoine parce qu’ils
ne peuvent être saisis par les créanciers.

Section 2- La classification des droits patrimoniaux

Cette classification des droits patrimoniaux permet de faire la distinction entre les droits
réels et les droits personnels.

Le droit réel est le droit qui porte directement sur une chose, un pouvoir dont une
personne est titulaire sur cette chose. Le droit de propriété est un droit réel, il donne à son
titulaire les pouvoirs les plus complets sur une chose. En revanche, le droit personnel ou
obligation s’exerce contre une personne.

C’est le droit dont une personne, appelée le créancier, est titulaire contre une autre
personne, appelée le débiteur, lui conférant le pouvoir de contraindre celle-ci à faire ou à ne pas
faire quelque-chose à son profit. Par exemple le droit de créance.

Des différences profondes existent entre droits réels et droits personnels :

- Les droits personnels sont en nombre illimité. En effet, en raison du principe de la liberté des
conventions, les contractants peuvent, par leur volonté, créer des rapports juridiques que le
législateur n’avait pas prévus. Par contre, les droits réels sont en nombre limité. C’est la loi qui,
seule, est susceptible de créer les droits réels, de préciser les pouvoirs d’une personne sur une
chose. Le rôle de la volonté est nul, il n’existe pas de droit réel en dehors d’une loi.

- Caractère absolu et caractère relatif :

Le droit réel est opposable à tous, il a un caractère absolu. Mais parfois une publicité est
nécessaire pour que le droit réel soit opposable aux tiers. Dans ce cas l’absence de publicité est
sanctionnée par l’inopposabilité aux tiers.

66
Le droit personnel n’est opposable qu’au débiteur. Il a un caractère relatif. Néanmoins, il ne
faudrait pas exagérer cette différence, car le droit de créance existe à l’égard de tous. Cependant,
les tiers peuvent ignorer la convention, et on ne saurait les obliger à une convention à laquelle
ils sont étrangers.

- Le droit réel comporte un droit de suite contrairement au droit personnel : c’est-à-dire que le
titulaire du droit réel peut suivre le bien en quelques mains où il se trouve pour le revendiquer
ou le saisir. En revanche, dans un droit personnel si le débiteur cède un bien de son patrimoine
le créancier ne peut le reprendre dans les mains de l’acquéreur pour le réintégrer dans le
patrimoine du débiteur en principe.

- Le droit réel confert un droit de préférence à son titulaire : cela signifie qu’en cas de vente du
bien, le titulaire du droit réel se fait payer de préférence aux autres créanciers sur le prix de
vente du bien. Alors que le créancier chirographaire le plus ancien ne peut exiger d’être payé
avant les créanciers les plus récents. Ils concourent tous sur le patrimoine de leur débiteur
commun.

- Le droit personnel est un élément de l’actif du patrimoine, une créance, envisagé du côté du
créancier, et un élément passif, une dette, si on l’envisage du côté du débiteur. Le droit réel est
toujours un élément d’actif : il n’entraîne aucune dette dans le patrimoine.

Il y a donc coexistence de ces deux types de droit.

I- Les droits réels

Le droit réel est, dans la théorie classique, un rapport juridique immédiat et direct entre la
personne et une chose. Le droit réel comprend donc le rapport direct sur une chose ou encore
pouvoir (A) et la chose sur laquelle s’exerce ce droit (B).

A- le pouvoir exercé sur une chose

Le titulaire du droit réel n’est pas toujours doté des mêmes pouvoirs ou prérogatives sur la chose
; tout dépend de la nature du droit réel dont il jouit. En effet on distingue les droits réels dits
principaux (1) et les droits réels dits accessoires (2).

1- Les droits réels principaux

a- Le droit de propriété

L’article 544 du Code civil dispose, "la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses
de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois et
règlements". De cette définition, en résulte que le propriétaire d’une chose a tout pouvoir sur la
chose. Le droit de propriété est un droit absolu et total. Cet ensemble de pouvoirs peut se
décomposer en trois attributs :

- l’usus : c’est le droit d’user de la chose : le propriétaire peut se servir de sa chose ou peut la
laisser inutilisée ;

67
- le fructus : le droit de jouir de la chose : la jouissance pour le propriétaire est d’abord le droit
de faire fructifier son bien ou de le laisser improductif. Quand un bien est mis en valeur, la
jouissance consiste dans le droit de percevoir les fruits de toutes sortes que produit cette chose
(fruits naturels : cueillette, moisson, vendange mais aussi fruits civils : encaissement des loyers) ;

- Abusus : le droit de disposer de la chose : le propriétaire a le droit de conserver la chose, de


l’abandonner, la donner, la vendre, la détruire.

b- Les démembrements de la propriété

Les attributs du droit de propriété peuvent se trouver dissociés entre plusieurs titulaires. La
propriété se trouve alors démembrée. On peut relever l’existence de l’usufruit, la servitude,
l’emphytéose.

- L’usufruit et la nue-propriété : L’usufruit est un démembrement du droit de propriété qui


confère à son titulaire l’usus et le fructus sur la chose, tandis que le droit d’aliéner la chose,
l’abusus, se trouve entre les mains d’une autre personne, le nu-propriétaire. L’usufruit est un
droit nécessairement viager, c’est-à-dire qu’il s’éteint à la mort de son titulaire et ne se transmet
pas.

- Les servitudes : La servitude consiste dans le droit du propriétaire d’un fonds de se servir de
certaines utilités du fonds voisin. Ainsi, par exemple, il existe des droits de passage, des droits
de puiser de l’eau. La servitude est attachée à un fonds, quel que soit le propriétaire. Même en
cas de ventes successives, la servitude reste attachée au fonds. Le fonds qui bénéficie de la
servitude est appelée fonds dominant, le fonds qui supporte la servitude est appelé fonds
servant.

- L’emphytéose : C’est le droit qu’a le locataire sur la chose qui a été louée pour une durée qui
varie de 18 à 99 ans. L’emphytéose devrait conférer comme à tout locataire, un droit personnel.
La loi a décidé qu’il s’agissait d’un droit réel étant donné la longueur du bail. Le bail
emphytéotique est très rare en pratique.

2- Les droits réels accessoires

Ce sont des droits réels car ils portent directement sur la chose mais accessoires, parce
qu’ils sont l’accessoire d’une créance. En effet, pour garantir l’exécution de sa créance, le
créancier exige parfois d’avoir, en plus du droit de gage général sur le patrimoine de son
débiteur, un droit direct sur une ou plusieurs choses appartenant à son débiteur : c’est un droit
réel accessoire. Ces droits réels accessoires sont des sûretés réelles, en ce qu’elles assurent
l’exécution de la créance en exerçant un pouvoir sur une chose. Ces sûretés réelles sont :

- l’hypothèque : C’est une sûreté qui porte sur un immeuble

- Le gage : c’est une sûreté qui porte sur un bien mobilier corporel. Le bien gagé peut être remis
au créancier (gage avec dépossession), comme il peut rester en la possession du débiteur ou du
constituant du gage (gage sans dépossession).

- Le nantissement porte sur un bien mobilier incorporel.

68
Effets des sûretés :

- Le créancier muni d’une sûreté réelle bénéficie d’avantages par rapport au simple créancier
chirographaire. Alors que les créanciers chirographaires viennent en concours et se partagent le
patrimoine du débiteur, le créancier muni d’une sûreté réelle bénéficie d’un droit de préférence
qui lui permettra de se payer le premier sur le prix de la chose sur laquelle il a un droit réel.

- le titulaire d’une sûreté réelle a un droit de suite qui lui permettra de saisir la chose en quelques
mains qu’elle se trouve, même si la chose a été vendue.

B- Les biens objet du droit réel

Les biens sur lesquels peuvent porter le droit réel sont divers et variés. Toutefois ces biens font
l’objet de plusieurs classifications dont la distinction majeure est la distinction, biens meubles
et biens immeubles (1) complétée par diverses distinctions secondaires (2).

1- La distinction majeure : Les biens meubles et immeubles

Cette distinction fondamentale se fonde sur l’art.516 C. Civil qui énonce que tous les biens sont
meubles ou immeubles.

a- Les biens immeubles

Il en existe 3 catégories

- les immeubles par nature constitués par tout ce qui est fixe, tout ce qui adhère au sol, tout ce
qui ne peut pas se déplacer ou être déplacé. Ex : une maison, un appartement, un terrain, les
végétaux et les arbres.

- les immeubles par destination. Ils sont des meubles par nature à l’origine qui constituent
l’accessoire d’un immeuble. Par conséquent, ils finissent par prendre le caractère immobilier.
Ils sont destinés soit à l’exploitation ou au service d’un fonds (tracteur, les animaux attachés à
la culture, les ustensiles aratoires) soit, ils sont attachés au fonds à perpétuelle demeure (les
statues ornant certaines demeures et qui sont placées dans une niche pratiquée pour les recevoir,
fresques, boiseries, tapisseries).

- les immeubles par l’objet auquel il s’attache. Il s’agit des droits qui portent sur des immeubles
: les droits réels immobiliers (usufruit d’une chose immobilière, droits d’usage et
d’habitation…), les créances immobilières, les actions immobilières (actions possessoires et
actions pétitoires).

b- Les biens meubles

L’art.527 du code civil fait la classification des meubles. On distingue ainsi les meubles
corporels et les meubles incorporels :

• Les meubles corporels : ils comprennent deux espèces :

69
- les meubles par nature. Ce sont des choses corporelles susceptibles de se déplacer ou d’être
déplacées (les animaux, les véhicules, les meubles meublants etc.).

- les meubles par anticipation : c’est une création jurisprudentielle qui envisage les immeubles
par nature sous l’aspect futur et définitif qu’ils auront : les récoltes sur pied avant la récolte, les
matériaux de démolition avant la démolition.

• Les meubles incorporels :

- ce sont les droits mobiliers par l’objet auquel ils s’appliquent (les droits réels mobiliers, les
créances mobilières, les actions mobilières) et

- les droits mobiliers par détermination de la loi (les parts sociales, les rentes, les propriétés
incorporelles).

2- Les distinctions secondaires

a- Les biens corporels et incorporels

Les biens corporels sont des choses meubles ou immeubles par nature qui sont tangibles,
c’est-à-dire que ce sont des choses que l’on peut matériellement toucher. Quant aux choses
incorporelles, elles peuvent être considérées comme des droits puisqu’ils sont dépourvus de
tout support matériel. Ex : droit de la propriété littéraire et artistique, droit d’associé etc.

b- Les biens consomptibles et biens non consomptibles

Les biens consomptibles sont des biens qui se consomment nécessairement par l’usage
qu’on en fait, ce sont des biens dont on ne peut faire usage sans les consommer. La
consommation s’entend d’abord au sens propre du terme (acte matériel qui aboutit à leur
destruction physique), c’est notamment le cas du carburant, des produits alimentaires etc. la
consommation s’entend aussi au sens figuré c’est-à-dire qu’elle correspond à tout acte juridique
d’aliénation. Ex : la monnaie est une chose juridiquement consomptible car on ne peut l’utiliser
sans l’aliéner.

Les biens non consomptibles sont au contraire des premiers, ceux dont on peut se servir
sans les aliéner, ni les détruire. Ex : un véhicule, une maison, un vêtement etc.

L’intérêt de la distinction est que la restitution des choses consomptibles en nature est
impossible et seules les choses non consomptibles sont susceptibles de prêt à usage ou
d’usufruit. La consomptibilité tient à la nature de la chose, mais les parties peuvent intervenir
dans la qualification, rendre consomptible un bien qui ne l’est pas, ou inversement.

c- Les biens fongibles et les corps certains

Les choses fongibles sont des choses interchangeables parce qu’il existe une
équivalence entre elles. (ex. 1 quintal de blé et la même quantité de cette denrée, une voiture de
série, 40 000 FCFA et 40 000 FCFA). Dites aussi "choses de genre" c’est-à-dire celles qui se
déterminent par leur nombre, à la mesure, au poids. Le débiteur d’une chose fongible est en
droit de désintéresser le créancier en lui remettant tout objet du même genre.
70
Les choses non fongibles sont appelées "corps certains" (choses certaines et
déterminées) qui se présentent comme des choses uniques, irremplaçables, non
interchangeables. Si elles sont dues, le débiteur ne peut leur substituer aucun autre bien comme
moyen de paiement. Ex : un bijou de famille, une maison de campagne, un cheval ou tout autre
animal de race, un tableau de maitre, un meuble d’époque etc.

Lors d’un contrat de transfert de propriété, le transfert à lieu lors de la conclusion du


contrat (échange des consentements) s’il s’agit d’un corps certain ; s’il s’agit d’une chose de
genre, le transfert n’a lieu que lorsque la chose est individualisée (sauf stipulations contraires).

d- Les fruits et produit

Les choses frugifères sont des choses produisant des fruits. On fait toutefois la
distinction entre les fruits et les produits. Au sens juridique, les fruits sont les biens produits
périodiquement et régulièrement d’une chose sans altération de la substance de cette chose. Il
y a 3 catégories de fruits :

- les fruits naturels sont produits de manière spontanée sans effort de mise en valeur (produits
de la terre et des animaux). Ex : produits des arbres non cultivés.

- les fruits industriels obtenus par le travail de l’homme, ce sont pour l’essentiel les produits
agricoles.

- les fruits civils qui résultent d’une rémunération que les tiers donnent de la jouissance de la
chose. ex. loyers des maisons, rentes, les fermages, l’intérêt des capitaux placés ou prêtés
(art.584 code civil).

Les produits ne sont pas périodiques et leur apparition altère la substance de la chose.
On appelle produits, tout prélèvements opérés sur une chose au détriment de sa substance et
ayant ainsi pour effet d’en entamer la substance et de l’épuiser en définitive. Ex : les coupes de
bois

II- Les droits personnels ou droits de créance

Le droit personnel est un droit qui permet à une personne d’exiger d’une autre quelque
chose. C’est le droit par lequel une personne appelée créancière peut exiger d’une autre appelée
débitrice, une prestation qui l’oblige à faire, à donner ou à ne pas faire quelque chose.

Les droits personnels ou droits de créance ont pour objet la personne du débiteur, et de
manière indirecte, le patrimoine de celui-ci. Le créancier a le pouvoir d’exiger du débiteur qu’il
exécute sa prestation. Mais, la situation du débiteur n’est pas analogue à la chose sur laquelle
porte un droit réel. Le créancier ne dispose pas de pouvoirs sur la personne du débiteur.

Certes dans le droit ancien, le débiteur qui ne payait pas sa dette était enchaîné, mis à
mort ou réduit en esclavage. Mais heureusement aujourd’hui la sanction de l’inexécution ne se
fait plus sur la personne du débiteur, mais sur ses biens : il n’y a plus de prison pour dette. En
effet, le code civil dispose que le patrimoine du débiteur constitue le gage général du créancier:

71
c’est le droit de gage général. Le droit de créance atteint donc indirectement l’actif du
patrimoine du débiteur. Les droits de créance font naître différents types d’obligations :

- L’obligation de donner : C’est celle faite au débiteur de transférer la propriété de la chose au


créancier. Il peut être à titre gratuit ou onéreux. Cette obligation est plus évidente dans les
contrats de vente de chose de genre (ou fongibles). Le transfert de propriété ne se réalise pas à
la conclusion du contrat mais est retardé jusqu’à l’individualisation de la chose. Pour les corps
certains, cette obligation offre peu d’intérêt car le transfert de propriété est instantané et se
réalise du seul accord de principe des parties. Ex : obligation du vendeur, du donateur etc.

- L’obligation de faire : le débiteur doit exécuter un fait matériel, une prestation positive
distincte du transfert de propriété. Ex : obligation de l’entrepreneur de bâtir une maison, de
l’employé de fournir sa prestation de travail etc.

- L’obligation de ne pas faire : le débiteur doit s’abstenir de faire certains actes. Ex : obligation
de non concurrence.

Ces obligations ont deux sources essentielles :

- Le contrat ou la convention : on les appelle des obligations conventionnelles ou contractuelles.


Elles naissent d’un contrat c’est-à-dire d’un acte juridique procédant d’un accord de volonté
des parties et dont le but est de créer des effets de droit. Au sens de l’article 1101 du C.Civil, le
contrat est une convention génératrice d’obligations. Pourtant au sens strict toute convention
n’est pas un contrat. La convention est un acte juridique résultant de l’accord de volonté de 2
ou plusieurs personnes tendant à produire un effet de droit quelconque : faire naître des
obligations, les transférer, les éteindre etc. Le Code Civil dans cette classification laisse de côté
certaines obligations. Ce sont celles qui résultent de la manifestation d’une seule volonté dans
le but de créer des effets de droit : les actes juridiques unilatéraux. Certains auteurs ont donc
critiqué cette classification et aujourd’hui on s’accorde à intégrer dans la même catégorie les
obligations naissant d’un accord de volonté et celles naissant de l’expression d’une seule
volonté : c’est la catégorie des actes juridiques.

- La loi : ces obligations trouvent leur source dans la loi qui les prévoit et les réglemente. Ces
obligations naissent de faits juridiques c’est-à-dire de tous évènements volontaires ou
involontaires dont il résulte des obligations que les parties n’ont jamais voulues. C’est alors la
loi qui leur impose ces obligations. Elles peuvent résulter soit des quasi-contrats (ce sont au
terme de l’article 1371 des faits purement volontaires dont ils résultent un engagement
réciproque des 2 parties), soit des délits (ce sont des faits illicites, intentionnels qui obligent
leur auteur à réparation quand ils sont dommageables pour autrui) soit des quasi-délits (ce sont
des faits illicites non intentionnels qui obligent leur auteur à réparation quand ils sont
dommageables pour autrui : imprudence par exemple).

72
CHAPITRE 2– LES DROITS EXTRAPATRIMONIAUX

Certains droits ont seulement une valeur morale : ils ne représentent pas, par eux-
mêmes, un avantage évaluable en argent. Ils ne sont donc pas dans le patrimoine, mais sont hors
commerce. On peut citer le droit à une filiation déterminée, le droit au nom, le droit au respect
de la vie privée, le droit à l’honneur, etc...

Toutefois, il ne faut pas exagérer la portée de cette distinction puisque la lésion d’un
droit extrapatrimonial peut donner lieu à une indemnité de nature pécuniaire (action fondée
principalement sur l’article 1382 du C. civ.).

Néanmoins, les droits extrapatrimoniaux présentent un certain nombre de caractères qui


les opposent aux droits patrimoniaux (Section 1) en dépit de leur diversité (Section 2).

Section 1- Les caractères généraux des droits extrapatrimoniaux

Les droits extrapatrimoniaux s’opposent aux droits patrimoniaux en ce qu’ils sont hors
commerce. Ils présentent un certain nombre de caractères communs :

- Les droits extrapatrimoniaux sont intransmissibles. Ils ne sont pas transmis aux héritiers du
patrimoine. Ils s’éteignent avec la personne. Le principe subit quelques atténuations (possibilité
d’exercer une action en vue de protéger sa mémoire, …).

- Les droits extrapatrimoniaux sont insaisissables : les créanciers n’ont aucun droit quant à
l’exercice de ces droits extrapatrimoniaux. En principe, cela ne représente aucun intérêt pour
eux puisqu’ils ne sont pas évaluables en argent.

- Les droits extrapatrimoniaux sont indisponibles, c’est-à-dire hors commerce. Ils ne peuvent
faire l’objet d’une convention, d’une renonciation. Ce type de convention serait nulle, de nullité
absolue. Ainsi le corps humain a un caractère extrapatrimonial : « Les conventions, ayant pour
effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont
nulles ». Il est interdit de « monnayer » le corps ou ses éléments.

- Les droits extrapatrimoniaux sont imprescriptibles. Ils ne s’éteignent pas par leur non-usage.
Ils peuvent donner lieu à une action judiciaire sans limitation de délai. Il en va ainsi par exemple
des actions sur le nom (Il y a des exceptions en matière de filiation).

Section 2- Les différents types de droits extrapatrimoniaux

On peut les classer en deux sous-groupes :

I- Certains droits de la famille

Les rapports personnels entre époux d’une part et parents et enfants d’autre part,
traduisent l’exercice d’un certain nombre de droits extrapatrimoniaux. Ex : le droit de garde, de

73
surveillance et d’éducation que la loi reconnait aux parents sur leurs enfants mineurs ; dans les
rapports personnels entre époux : le droit à la communauté de vie, à la fidélité, à l’assistance de
l’autre conjoint en cas de besoin. Toutefois tous les droits de famille ne sont pas
extrapatrimoniaux car il existe un droit patrimonial de la famille. Ex : le régime matrimonial
qui s’occupe de la gestion des biens des époux.

II- Les droits de la personnalité

Certains des droits de la personnalité interviennent dans les rapports entre particuliers : ce sont
les droits individuels de la personnalité ou droits de la personnalité stricto sensu : ce sont les
droits à l’intégrité physique, droits à l’intégrité morale (droit à l’honneur, au respect de la vie
privée, droit à l’image, droits de propriété littéraire et artistique).

D’autres interviennent dans les rapports des individus avec l’Etat, ce sont les droits publics de
l’homme (appelés communément les droits de l’homme): le droit à la vie, les libertés physiques
(liberté d’aller et venir) et morales (la liberté religieuse, la liberté d’expression, de réunion etc.)
et les libertés professionnelles.

RESUME

La diversité des droits justifie leur classification et à chaque classification correspond un


régime juridique spécifique. On fait la distinction entre les droits patrimoniaux et les
droits extrapatrimoniaux. Les premiers sont rattachés au patrimoine et donc évaluables
en argent. Ils sont transmissibles ou cessibles, saisissables. Ils sont composés des droits
réels et des droits personnels.

Le droit réel est le pouvoir exercé par un sujet de droit sur une chose. Ce pouvoir du
titulaire du droit réel peut être principal (droit de propriété et ses démembrements) ou
accessoire à une créance (les sûretés réelles : hypothèque, gage, nantissement). Ce pouvoir
peut s’exercer sur un bien meuble ou immeuble. Le droit réel confère à son titulaire 2
prérogatives essentielles : droit de suite et droit de préférence.

Le droit personnel permet à un créancier d’exiger du débiteur l’exécution d’une


obligation de donner, de faire ou de ne pas faire. Il ne comporte aucun droit de suite ni de
préférence sur le patrimoine du débiteur.

Aux droits patrimoniaux, on oppose les droits extrapatrimoniaux qui sont en dehors du
patrimoine. Par conséquent, ils n’ont pas de valeur vénale, ils sont en principe
intransmissibles, incessibles et insaisissables. Ils sont composés de certains droits de la
famille et des droits de la personnalité. Ces derniers comprennent les droits publics de la
personnalité et les droits privés de la personnalité.

74
EXERCICE

1- Qu’est-ce que le droit réel ? Qu’est-ce que le droit personnel ?

2- Pourquoi dit-on que le droit réel est plus fort que le droit personnel ?

3- Faites la distinction entre les choses consomptibles et non consomptibles, les choses
fongibles et les corps certains, les fruits et les produits.

4- Donnez la définition du patrimoine et ses caractères.

5- La personnalité juridique se confond à la capacité juridique. Vrai ou faux ? Justifiez votre


réponse

75
Titre III : La preuve des droits subjectifs

La preuve permet à celui qui se prévaut d’une affirmation de la faire tenir pour vraie et
d’en tirer les bénéfices juridiques qui y sont attachés. En matière judiciaire, il s’agit de
convaincre le juge de la vérité de l’allégation. Cette matière présente un intérêt pratique
considérable et bien souvent l’issue d’un procès dépend directement de la preuve d’un droit.

CHAPITRE 1- LES PRINCIPES FONDAMENTAUX

Section 1- L’objet de la preuve

L’objet de la preuve est ce sur quoi doit porter la preuve c’est-à-dire ce que les parties
doivent prouver. Pour déterminer l’objet de la preuve, il faut faire la distinction entre le fait et
le droit. En principe, les faits sont objet de preuve et non le droit.

I- Les faits sont en principe objet de preuve

Les éléments de fait (à distinguer du fait juridique qu’on oppose à l’acte juridique) sont
constitués par les faits, les actes et les situations juridiques. Ainsi si une personne se prétend
créancière d’une autre au titre de la réparation du dommage qui lui a été causé à l’occasion d’un
accident, la réalité de l’accident ainsi que le préjudice subi par la victime sont des éléments de
faits. De même si une personne revendique la propriété d’un bien en se fondant sur un acte de
vente, l’existence et la teneur de l’acte sont des éléments de fait. Le principe en matière de
preuve est que les éléments de fait doivent être prouvés. Le fait est donc par principe objet de
preuve. Les faits allégués par une partie au soutien de sa prétention doivent être prouvés par
cette partie. Mais seuls les faits contestés et contestables sont matière de preuve cela signifie
qu’un fait reconnu ou simplement non contesté n’a pas besoin d’être prouvé. De plus, seuls les
faits pertinents et concluants sont matière à preuve. Cela signifie que la preuve d’un fait ne doit
être rapportée que si sa démonstration est en rapport avec l’affaire et utile à la solution du juge.

Toutefois dans certains cas lorsque la preuve des faits est difficile à rapporter, ou lorsque
le législateur désire éviter des disputes sur la preuve de certains faits, il prévoit des
présomptions.

Selon l’art. 1349 du Code Civil " les présomptions sont des conséquences que la loi ou
le Magistrat tire d’un fait connu à un fait inconnu ". Ce sont donc des déductions effectuées par
le législateur ou par le Juge. Lorsqu’elles sont l’œuvre du Juge, on les qualifie de présomptions
de fait ou de l’homme. Les présomptions légales sont celles inscrites dans des textes de loi. Les
présomptions du fait de l’homme (admises par le juge) et certaines présomptions légales
s’analysent en un déplacement de l’objet de la preuve. Cela signifie que dans les hypothèses où
la preuve directe est difficile à rapporter, le juge ou le législateur peuvent admettre que cette
preuve soit indirectement rapportée. Ex : la présomption de paternité qui dispense l’enfant né
dans le mariage de rapporter la preuve qu’il est l’enfant du mari de sa mère. Il suffit que la
preuve des conditions de la présomption de paternité soit rapportée (enfant conçu ou né pendant

76
le mariage) pour que l’enfant soit considéré comme l’enfant du mari de sa mère (en l’espèce la
preuve directe de la paternité du mari n’a pas été rapportée en réalité).

Par ailleurs dans certaines hypothèses, le législateur dispense la partie sur qui pèse la
charge de la preuve, d’en fournir. Le mécanisme utilisé pour aboutir à ce résultat est la
présomption irréfragable. Ce type de présomption fait disparaître le fait en tant qu’objet de
preuve, exclu toute charge de preuve. La présomption irréfragable pose le fait qui en bénéficie
de vrai, par conséquent la preuve contraire est exclue.

Ex : l’article 1350 du code civil établi comme vrai le jugement définitif rendu par le juge : c’est
une présomption irréfragable. En principe le pouvoir de poser des présomptions irréfragables
n’appartient qu’au législateur. Pourtant, la jurisprudence s’est reconnu implicitement le pouvoir
d’admettre des présomptions irréfragables spécialement au sujet de l’obligation de garantie des
vices cachés de la chose vendue pesant sur le vendeur.

II- Le droit n’est pas en principe objet de preuve

En principe le droit n’est pas un objet de preuve. En effet les parties n’ont pas à prouver
l’existence, le contenu ou la portée des règles juridiques qu’elles invoquent pour appuyer leur
prétention car « nul n’est censé ignorer la loi ». Cela signifie aussi que chacun connaît la loi et
qu’il n’est pas besoin de la prouver aux autres. Ce principe se justifie aussi par le fait qu’il
revient au juge de dire le droit et non aux parties.

Toutefois lorsque la règle de droit est une coutume ou un usage, elle doit être établie
dans son existence et dans sa teneur par celui qui l’invoque, en cas de contestation. Cette
exigence se justifie par le fait que la coutume ne fait pas l’objet de codifications et de
publications comme la loi. Pour échapper à cette exigence la coutume ou les usages doivent
prendre place dans une loi.

Section 2- La charge de la preuve

La détermination de celui sur qui pèse la charge ou le fardeau de la preuve est commandée par
un principe qui admet des exceptions.

I- Le principe : la charge initiale de la preuve

C’est à la personne qui réclame un changement dans une situation établie de rapporter
la preuve que ce changement doit être opéré. L’art. 1315 du Code Civil prévoit que "celui qui
réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ". Cela signifie que la preuve doit être
rapportée par celui qui soumet une prétention au juge, s’il veut obtenir gain de cause. La charge
de la preuve pèse donc d’abord sur le demandeur qui est généralement le demandeur à
l’instance. Ainsi si le demandeur demande la nullité d’un contrat, il doit rapporter la preuve du
vice qui affecte la validité dudit contrat sinon sa demande sera rejetée.

Le second alinéa de l’article 1315 ajoute que c’est à celui qui se prétend libéré que
revient la charge de justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Or généralement quand une partie prétend être libérée, c’est plutôt pour se défendre contre une

77
demande de paiement formulée par le demandeur. Cet alinéa ne fait que traduire l’alternance
qui s’établit entre les parties au procès (demandeur et défendeur) au niveau de la charge de la
preuve En définitive le demandeur ayant la charge de la preuve est bien souvent le demandeur
à l’instance mais dans le déroulement du procès, le défendeur devient aussi demandeur. Ce
principe sur la charge de la preuve est atténué.

II- Les exceptions au principe : le renversement de la charge de la preuve

Le principe énoncé plus haut est atténué par l’existence de certaines règles :

• La licéité des conventions sur la preuve : les règles sur la charge de la preuve ainsi que les
mécanismes mêmes des preuves n’ont pas un caractère d’ordre public (ce sont les règles sur
l’administration de la preuve qui ont un caractère d’ordre public), sauf exceptions notamment
en matière d’état des personnes (naissance, décès, mariage etc.). Par conséquent il est possible
aux parties d’y renoncer par des conventions sur la charge, sur l’admissibilité de la preuve ou
la force probante d’un acte. Il est d’ailleurs fréquent qu’un plaideur assume une preuve qui
n’était pas à sa charge. Ex : dans un contrat, les parties peuvent prévoir qu’un des
contractant pourra rompre le contrat sans rapporter la preuve d’une cause légitime de
rupture, la charge de prouver une rupture abusive incombant alors à l’autre partie.

• La charge de la preuve peut se trouver modifiée par le jeu des présomptions légales. En effet
il peut arriver que le législateur prévoie que le demandeur sera dispensé de la charge de la
preuve. Ici le législateur n’a pas pour but d’éliminer toute question de preuve sur un certain fait,
mais il modifie la désignation de celui qui a la charge de la preuve. Ex1 : l’article 2268 du code
civil présume la bonne foi du demandeur. Cela signifie que le demandeur qui se prévaut de sa
bonne foi est dispensé d’en rapporter la preuve. Toutefois la loi n’écarte pas définitivement tout
débat sur l’existence ou non de la bonne foi. Car il appartient au défendeur de prouver que le
demandeur est de mauvaise foi.

Ex2 : l’article 2279 du code civil présume la qualité de propriétaire du possesseur d’un meuble
corporel.

Section 3- Le rôle du juge

I- Le principe de la neutralité du juge

La charge de la preuve incombe aux parties elles-mêmes. La neutralité du juge est donc
un principe : Il n’appartient pas au Juge d’établir par ses propres moyens la vérité des faits
allégués, mais uniquement de statuer sur les preuves qui lui sont fournies par les parties et sur
celles-là seulement. En définitive, il appartiendra au Juge de déterminer quelles sont les
meilleures preuves.

II- Le rôle actuel du juge

Le rôle actuel du juge lui donne un pouvoir accru en matière de preuve. Le Code ivoirien
de Procédure Civile, commerciale et administrative donne une ‘importance au rôle du Juge en

78
matière de preuve. Ainsi son article 48 prévoit qu’il peut ordonner toutes mesures (expertise,
vérification d’écriture…) pour l’instruction du dossier. Toutefois en matière de preuve, les
pouvoirs du Juge sont limités : Une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que
si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas il
ne peut l’être en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve. Mais
quels sont les procédés de preuve ?

CHAPITRE 2- LES PROCEDES DE PREUVE

L’on distingue les procédés de preuve parfaits des procédés de preuve imparfaits. Les
premiers sont en principe admissibles en toutes matières et lient le juge car il n’a aucun pouvoir
d’appréciation, il est convaincu. Quant aux seconds, ils ne sont admis qu’exceptionnellement
et ne lient pas le juge. Ils font l’objet d’une appréciation souveraine par les juges du fond.

Section 1- Les procédés de preuve parfaits

Ils sont de 3 ordres : les écrits ou preuve littérale, l’aveu judiciaire et le serment décisoire.

I- Les écrits ou preuves littérales

La preuve littérale est celle qui résulte d’écrits émanant des parties destinés à servir la preuve.
Il en existe deux catégories : l’écrit traditionnel ou sur support papier et l’écrit électronique.

A- l’écrit traditionnel ou sur support papier

1) Les actes authentiques

L’acte authentique ou public est celui qui est reçu par un officier public ayant le droit
d’instrumenter tant en considération du lieu que de la nature de l’acte et avec les formalités
requises : article 1317 code civil.

a) Officiers compétents pour l’établissement des actes authentiques

Ce sont :

• les notaires qui peuvent se définir comme des officiers chargés de manière générale de rédiger
les actes auxquels les parties veulent ou doivent conférer le caractère de l’authenticité et d’en
assurer la conservation en gardant par-devers eux les originaux.

• les officiers publics qui pour certains actes seulement rentrant dans leur ministère ont qualité
pour dresser un acte authentique, à savoir les officiers d’état civil, les commissaires de justice
et à l’étranger les consuls etc.

Ex d’actes authentiques : les actes notariés, les actes de l’état civil, les décisions de justice,
les actes des commissaires de justice conformément à leurs attributions légales etc.

79
b) Conditions d’authenticité

• L’écrit doit être dressé par un officier public

• L’officier public doit être compétent selon la nature de l’acte et selon son lieu de compétence

• La rédaction des actes authentiques est assujettie à un formalisme exigé.

Lorsque ces formalités font défaut (acte incomplet ou non-respect de la forme exigée) ou
lorsque l’officier public est incompétent l’acte est nul en tant qu’acte authentique mais est
valable en tant qu’acte sous seing privé à condition toutefois qu’il ait été signé par les parties :
article 1318du code civil.

c) Force probante

La force probante de l’acte authentique est renforcée ce qui justifie sa supériorité à l’acte
sous seing privé. Si les dires des parties consignés dans l’acte authentique par l’officier public,
sans vérification peuvent être contestés par tous moyens par les tiers, l’acte authentique fait
pleine foi au regard de l’existence de l’acte et aux constatations directement effectuées par
l’officier public jusqu’à inscription de faux. Celui qui conteste l’exactitude ou la sincérité de
l’acte doit s’inscrire en faux au greffe du Tribunal et engager ainsi une procédure très complexe.
S’il succombe, il perd sa preuve et est condamné aux frais du procès : article 1319, alinéa 2 du
code civil.

2) Les actes privés

Il y en a deux catégories à savoir les actes sous seing privé, et les écrits spéciaux.

a- Les actes sous seing privé

Ils sont dressés par les seules parties. Ils tirent toute leur valeur de la signature des parties
intéressées dont ils sont revêtus. Il n’y a en principe aucune formalité de rédaction. L’acte doit
donc intervenir sous signature privée, c’est-à-dire sous seing privé. Pour valoir comme preuve,
l’acte sous seing privé doit obéir à certaines conditions :

Il doit d’abord comporter la signature des parties à l’acte. Ensuite, pour un acte relatant
des conventions synallagmatiques, il doit en principe être établi en autant d’exemplaires
originaux qu’il y a de partie ayant un intérêt distinct. (Un seul exemplaire pourrait suffire dans
la mesure où il est déposé par toutes les parties entre les mains d’un notaire ou d’un tiers chargé
de le tenir à la disposition de tous). De plus, il faut que chaque original contienne la mention du
nombre des originaux qui ont été faits. Le non-respect de cette exigence est sanctionné par la
nullité de l’instrument probatoire dressé par les parties comme preuve parfaite : le contrat est
certes valable mais l’acte qui le constate ne vaut pas comme preuve parfaite c’est-à-dire que
l’acte ne lie pas le juge. Il vaut comme commencement de preuve par écrit car il n’est pas
complet et il doit être complété par d’autres preuves qui seront laissées à l’appréciation du juge.

80
Les actes constatant les promesses unilatérales de sommes d’argent ou de choses
appréciables en argent, sont valables même s’ils sont rédigés en un seul exemplaire. Mais
l’article 1326 du code civil impose la mention manuscrite c’est-à-dire une mention écrite à
l’origine de la main de celui qui s’engage, le débiteur en chiffre et en lettre. En cas de différence
entre les 2 montants, c’est le montant en lettre qui l’emporte. Le non-respect de cette exigence
légale est la disqualification de l’acte comme preuve parfaite.

La force probante de l’acte sous seing privé est atténuée par rapport à celle de l’acte
authentique. En effet la partie à qui l’on oppose l’acte sous seing privé peut le repousser sans
avoir besoin de s’inscrire en faux. Il suffit qu’elle désavoue c’est-à-dire qu’elle dénie sa
signature si l’acte a l’apparence d’être signé par elle, ou qu’elle se contente de méconnaître
l’écriture si on lui oppose un acte soi-disant signé par l’un de ses auteurs, c’est-à-dire de déclarer
qu’elle ne connaît point l’écriture ou la signature de ce signataire prétendu. Dans cette
hypothèse, l’acte ne vaut pas preuve littérale tant qu’il n’y a pas eu procédure de vérification
d’écriture.

A l’égard des tiers, les actes sous seing privé ne font pas foi de leur origine. Or cette
condition est exigée pour l’opposabilité de l’acte sous seing privé aux tiers. Pour acquérir date
certaine et être opposable aux tiers l’article 1328 du code civil prévoit 3 conditions alternatives
:

- Si l’acte sous seing privé a été enregistré, la date certaine est celle du dépôt de l’acte à
l’enregistrement.

- Lorsque l’auteur qui a souscrit l’acte est mort, le jour de la mort est la date certaine.

- Lorsque l’acte sous seing privé est constaté dans un acte authentique

b- Les écrits spéciaux

Certains écrits signés ou non signés peuvent exceptionnellement être invoqués comme
preuve bien qu’ils n’aient pas forcément été établis à cette fin La correspondance privée peut
être produite comme preuve. Le destinataire d’une lettre peut s’en servir pour établir le bien-
fondé de sa prétention. La lettre peut constituer un aveu extra judiciaire si elle contient une
reconnaissance du droit contesté. Elle peut également constituer une simple présomption, et
l’on peut y trouver un commencement de preuve par écrit.

Les registres ou papiers domestiques sont notamment les notes et livres de compte tenus
par les particuliers. La loi leur confère un rôle probatoire précis dans certaines hypothèses
concernant l’état des personnes. Ils peuvent en effet servir à prouver le mariage, la naissance,
en cas d’absence ou de perte des registres d’état civil. Ils peuvent aussi constituer un
commencement de preuve par écrit de la maternité. Ils ne peuvent en aucun cas faire preuve au
profit de celui qui les a écrits.

81
Les écritures mises sur un titre ou une quittance : Un créancier recevant un paiement à
titre d’acompte peut par exemple au lieu de dresser une quittance régulière en faire mention sur
le titre constatant la créance.

Les livres de commerce : doivent être tenus conformément aux dispositions légales.
Dans les litiges entre commerçants, ces livres peuvent faire foi en faveur de ceux qui les ont
tenus.

B- L’écrit électronique :

La loi n° 2013-546 du 30 juillet 2013 sur les transactions électroniques reconnait l’écrit
électronique comme une des formes de l’écrit littéral. Selon l’article 23 de ladite loi, l’écrit
électronique est admis comme mode de preuve au même titre que l’écrit sur support papier et à
la même force probante que celui-ci à deux conditions : l’identification de la personne dont il
émane et sa conservation de nature à en garantir l’intégrité.

II- L’aveu Judiciaire

Il consiste de la part de celui contre lequel on allègue un fait, à en reconnaître


l’exactitude. Il ne peut porter que sur une question de fait et non sur une question de droit,
l’existence ou le sens d’une règle juridique ne pouvant dépendre de l’aveu d’une partie.

Acte unilatéral, l’aveu produit effet indépendamment de toute acceptation de la partie


adverse et il n’est pas nécessaire qu’il ait été fait dans la pensée qu’il pourra servir de preuve.
Il vaut, dès lors qu’il émane d’une volonté consciente et non viciée. Il doit émaner de la partie
à laquelle on l’oppose et non d’un tiers au litige, sinon ce serait un témoignage.

De toutes les preuves, c’est celle qui paraît à première vue les plus convaincantes.
Toutefois le code civil distingue deux sortes d’aveu : l’aveu judiciaire et l’aveu extra judiciaire.
L’aveu judicaire est celui qui est fait au cours d’un procès devant le juge compétent, soit dans
des conclusions écrites, soit verbalement à l’audience ou dans un interrogatoire lors de la
comparution des parties. Tout aveu fait hors ces hypothèses est un aveu extra judicaire qui ne
lie pas le juge mais qui est soumis à son appréciation. Seul l’aveu judiciaire est un procédé de
preuve parfait car le juge quel que soit son intime conviction, doit tenir pour exact les faits
avoués. L’aveu judicaire fait foi contre celui qui l’a fait. Il est en principe indivisible et
irrévocable. Toutefois il peut être révoqué pour cause d’erreur de fait et non de droit.

III- Le serment décisoire

Il peut être défini comme la déclaration par laquelle un plaideur affirme, d’une manière
solennelle et devant le juge, la réalité d’un fait qui lui est favorable. Il intervient sous une forme
solennelle destinée autant que possible à éviter le mensonge. Le serment n’est qu’une promesse
ou une affirmation solennelle faite en levant la main droite et en disant "Je le jure". Il en existe
deux formes : le serment décisoire et le serment supplétoire. Seul le serment décisoire entre
dans la catégorie des procédés de preuve parfait, et le second entre dans la catégorie des
procédés de preuve imparfaite. Dans le serment décisoire, l’un des plaideurs offre de s’en

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remettre au serment de son adversaire pour établir le fait contesté, dont dépend l’issue du débat.
Un faux serment est réprimé par le Code Pénal.

Les effets du serment décisoire sont particulièrement énergiques puisqu’il permet le gain
du procès par celui qui a prêté serment. Le serment décisoire dicte en effet la décision du juge.

Section 2- Les procédés de preuve imparfaits

Ce sont le témoignage, la présomption ou les indices et le serment supplétoire. Ils ne lient pas
le juge qui reste libre de leur appréciation.

I- La preuve testimoniale ou le témoignage

La preuve testimoniale découle du témoignage. Le témoignage est une déclaration faite par une
personne sur des faits dont elle a eu connaissance par elle-même c’est-à-dire personnellement,
soit parce qu’elle y a assisté, soit parce qu’elle en a eu indirectement connaissance. Ex : il y a
témoignage lorsque le déclarant rapporte le récit qu’une personne déterminée a fait en sa
présence. Le témoignage peut se faire par écrit ou à l’oral. Le témoin doit relater ce qu’il a
personnellement vu et entendu et non les « on dit » ou « les ouï dire » qu’on appelle preuve par
commune renommée. Compte tenu de son caractère dangereux de par son imprécision, ce type
de preuve n’est admis qu’à titre exceptionnel. S’agissant de la force probante du témoignage, il
ne lie pas le juge qui dispose d’un pouvoir d’appréciation des déclarations faites.

II- La preuve par présomption ou indices

Selon l’art. 1349 du Code Civil " les présomptions sont des conséquences que la loi ou
le Magistrat tire d’un fait connu à un fait inconnu". Ce sont donc des déductions effectuées par
le législateur ou par le Juge. Lorsqu’elles sont l’œuvre du Juge, on les qualifie de présomptions
de fait ou de l’homme. Les présomptions légales sont celles inscrites dans des textes de loi.
Seules les présomptions de fait ou de l’homme et les présomptions légales conduisant à un
déplacement de l’objet de la preuve, constituent des modes de preuve. Ces présomptions sont
dites simples ou réfragables car elles sont susceptibles d’être renversées par la preuve contraire.
Quant aux présomptions qui sont insusceptibles de la preuve contraire, elles sont des
présomptions irréfragables. En principe les présomptions irréfragables sont d’origine légale.

L’art. 1353 du Code Civil précise que le Juge "ne doit admettre que des présomptions
graves, précises et concordantes et dans le cas seulement où la loi admet les preuves
testimoniales, à moins que l’acte ne soit attaqué pour cause de fraude ou de dol ".

III- Le serment supplétoire

Le serment décisoire et le serment supplétoire sont les deux formes de serment. Seul le serment
supplétoire entre dans la catégorie des procédés de preuve imparfaits.

Le serment supplétoire est celui que le Juge peut déférer d’office quand n’étant point convaincu
par les preuves produites, il veut corroborer les conclusions ou en compenser l’insuffisance (art.

83
1366 du Code Civil). C’est le juge qui défère d’office ce serment et non les parties. L’art. 1367
du code civil indique que deux conditions sont nécessaires pour la délation de ce serment.

Le serment supplétoire sera déféré par le Juge à celle des parties en laquelle il aura le plus
confiance. En général il est cependant déféré à celle qui produit à l’appui de cette prétention un
commencement de preuve par écrit.

L’autorité du serment supplétoire est loin d’égaler celle du serment décisoire puisque le serment
supplétoire n’est qu’une mesure ordonnée par le Juge. De plus le Juge dispose d’un pouvoir
discrétionnaire et il n’est jamais tenu de déférer ce serment même si les parties le demandent.

Le serment supplétoire ou le refus de le prêter ne font pas foi et ne lie pas le Juge. Celui-ci
conserve toute faculté d’appréciation. De même la partie à qui ferait tort le serment supplétoire
prêté par l’adversaire, serait en droit d’en démontrer la fausseté.

CHAPITRE 3- LES CONDITIONS DE RECEVABILITE DES MOYENS DE PREUVE

La question de la recevabilité des preuves soulève celle de savoir si en cas de litige, il


est possible d’invoquer n’importer quelle preuve. Non, car les modes de preuve retenus sont en
toutes hypothèses ceux que la loi a prévus et définis. Ainsi qu’il s’agisse d’actes juridiques ou
de faits juridiques en matière civile, c’est la loi elle-même qui définit le procédé de preuve à
utiliser.

Il y a lieu de procéder à une distinction entre le fait juridique et l’acte juridique.

Section 1-La preuve des faits juridiques

Le fait juridique s’analyse comme tout événement ou toute activité d’une personne
physique ou morale qui produit des effets juridiques sans que les intéressés les aient
volontairement recherchés. Il peut s’agir d’un événement étranger à l’homme : ex : tremblement
de terre qui en détruisant un immeuble loué entraîne la résiliation des baux ; ou concernant un
individu, mais sans qu’il ait voulu lui faire produire d’effet de droit : ex : le décès qui transfère
aux héritiers la propriété des biens du défunt.

En principe lorsque l’on est en présence d’un fait juridique la preuve est libre. On dit
que la preuve des faits juridiques peut être faite par tous moyens : écrits, témoignages, aveu,
présomption, constat demandé à un commissaire de justice etc. Cela signifie que les parties sont
libres d’utiliser indistinctement et sans rapport de préférence et de hiérarchie tous les moyens
de preuve, parfaits comme imparfaits.

Toutefois la preuve de certains faits juridiques n’est pas libre car leur preuve est soumise
à des règles de preuve spéciale. C’est notamment le cas de la naissance, du décès pour lesquels
la loi exige un écrit authentique.

84
Section 2- La preuve des actes juridiques

L’article 1341 du code civil pose le principe selon lequel la preuve d’un acte juridique
doit se faire par écrit. Ce principe admet toutefois des atténuations.

A) Le principe de la preuve par écrit : article 1341 du code civil

Les actes juridiques sont les manifestations de volonté qui tendent à produire des effets
de droit. Il peut s’agir soit d’un acte unilatéral accompli par un seul individu (le testament) soit
d’une convention passée entre deux ou plusieurs personnes (contrat de vente…). Quand il y a
un acte juridique, la preuve n’est pas libre. Elle doit obligatoirement se faire par écrit. Cette
règle s’explique surtout pour des raisons de sécurité. Il faut préciser que l’écrit n’est qu’une
condition de preuve et non une condition de validité de l’acte juridique qui est en principe
soumis au principe du consensualisme.

Selon ce principe, la preuve des actes juridiques doit être faite par écrit lorsque leur objet
excède 500F1 (mais il semble qu’en pratique les juges appliquent 5000fcfa). En effet l’acte
juridique a été voulu par les parties, donc les parties doivent se préoccuper des moyens de
preuve exigés par la loi au moment de la conclusion de l’acte. Ce peut être un écrit authentique,
un acte sous seing privé (qu’il soit unilatéral ou multilatéral, il doit respecter les conditions
légales que nous avons déjà vues pour avoir une valeur probatoire) ou un écrit électronique.

Cette règle signifie aussi qu’on ne peut prouver contre un écrit ou outre un écrit que par écrit.
En d’autres termes, lorsqu’un écrit a été dressé, et qu’on veut prouver contre le contenu de
l’acte, c’est-à-dire le contraire des énonciations de cet acte, on doit le faire par écrit. De même,
si on veut prouver outre ce contenu, c’est-à-dire prétendre qu’il y a des omissions, on doit le
faire par écrit.

Si la charge de la preuve d’un acte juridique est soumise à des restrictions, il faut avouer
que cette sévérité a été peu à peu atténuée par la loi elle-même et par l’interprétation assez
libérale qu’en fait la jurisprudence.

B) Les exceptions au principe de l’art. 1341

Dans un certain nombre de cas, la preuve d’un acte juridique est libre :

- En matière commerciale

L’art. 1341 in fine prévoit que ces dispositions doivent s’appliquer " sans préjudice de
ce qui est prescrit dans les lois relatives aux commerces ". En effet le commerce a besoin de
rapidité ce qui empêche souvent la rédaction d’actes écrits. Entre commerçants et contre un
commerçant la preuve est libre. Toutefois s’il s’agit pour un commerçant de faire la preuve
contre un civil alors on revient à l’application du principe de l’article 1341 du code civil.

1
C’était le franc français de l’époque.

85
- Les actes de moindre valeur : Pour les actes dont la valeur est inférieure ou égale à 500f(les
juges, semble-t-il appliquent 5000FCFA), l’écrit n’est pas nécessaire.

- Lorsqu’il ya un commencement de preuve par écrit (art. 1347 du code civil)

Lorsqu’un acte juridique d’une valeur supérieure à 500 F n’est pas constaté par un écrit, mais
qu’il existe un commencement de preuve écrit, il pourra être complété par n’importe quel
moyen de preuve.

Le commencement de preuve par écrit suppose la réunion de plusieurs conditions :

• d’un écrit : n’importe quel écrit peut constituer un commencement de preuve. Sont d’abord
visées les déclarations d’une partie au cours d’une comparution personnelle et contresignées
dans un procès-verbal, une photocopie, une copie sur papier carbone, un écrit ne comportant
pas toutes les mentions requises par la loi, une reconnaissance de dette sur laquelle la signature
du débiteur est raturée, un texte dactylographié et non signé par son auteur etc. La jurisprudence
admet aussi l’absence d’une partie ou le refus d’une partie de répondre comme des équivalents
au commencement de preuve par écrit.

• l’écrit doit émaner de l’adversaire c’est-à-dire de celui contre lequel la demande est formée
ou son représentant (il ne peut jamais émaner d’un tiers.)

• l’écrit doit rendre vraisemblable la prétention de celui qui l’invoque : en cas de doute, il ne
peut valoir commencement de preuve par écrit. Cette question est soumise à l’appréciation
souveraine du juge. Si l’écrit est retenu par le juge, il peut être complété par d’autres moyens
de preuve tels que le témoignage ou les présomptions.

- A l’égard des tiers : la règle de l’article 1341 ne s’applique qu’aux parties et les tiers peuvent
faire la preuve d’un acte juridique par tous les moyens car les tiers sont des étrangers à l’acte
juridique.

- L’impossibilité absolue de produire un écrit

L’art. 1348 repose sur l’idée qu’à l’impossible nul n’est tenu. S’il est impossible de produire
un écrit, la preuve peut se faire par tous les moyens. La preuve est libre quand l’écrit
préconstitué a été perdu. Par exemple un acte juridique avait été constaté par écrit mais cet écrit
a été perdu. La preuve devient libre, mais avant il faut prouver que l’écrit a été perdu par un cas
de force majeure.

La preuve est aussi libre lorsque l’une des parties était dans l’impossibilité morale de se
constituer un écrit : ex : reconnaissance de dette entre époux ou concubins.

86
RESUME

La preuve permet à une partie de convaincre le juge de la véracité de ses allégations.


L’administration de la preuve obéit à un certain nombre de règles qui oriente la charge
de la preuve, l’objet de la preuve et le choix du procédé de preuve et sa force probante.
Au cours du procès, qui a la charge initiale de la preuve ? En principe c’est le demandeur.
Que doit-il prouver ? Les faits contestés et pertinents. Tous les moyens de preuve ont-ils
la même force probante pour le juge ? Non car la loi tient certains procédés comme
parfaits et d’autres imparfaits. Les premiers sont légalement réputés exprimer la vérité
et lient donc le juge. Ce sont : la preuve écrite ou littérale, l’aveu judiciaire et le serment
décisoire. Quant aux seconds, ils ne lient pas le juge et sont laissés à son appréciation
souveraine. Ce sont : le témoignage, les présomptions, le serment supplétoire. Pour autant,
a-t-on la liberté de choisir le procédé de preuve qu’on veut ? Tout dépend de ce qu’on
veut prouver : si c’est un fait juridique, on a cette liberté de choix car la preuve du fait
juridique se fait en principe par tous moyens ; si c’est un acte juridique, on n’est pas libre
car la loi nous impose en principe un écrit.

EXERCICES

1- Qu’est-ce que la preuve ? Le fait est-il susceptible de preuve ?

2- à quelles conditions l’écrit électronique peut servir de preuve ?

3- A qui incombe la charge de la preuve ?

DISSERTATION

SUJET : La preuve des actes juridiques

87
TITRE IV : La sanction des droits subjectifs : l’action en justice

Selon l’article premier du Code ivoirien de procédure civile, commerciale et


administrative, « Toute personne, physique ou morale, peut agir devant les juridictions de la
République de Côte d’Ivoire, en vue d’obtenir la reconnaissance, la protection ou la sanction
de son droit… » L’action en justice est donc ce droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être
entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée. L’action est envisagée
comme un droit subjectif.

On ne peut de son propre fait exiger du débiteur l’exécution de son obligation. Nul ne peut se
faire justice soi-même. La justice est publique, elle est assurée par l’Etat. Les particuliers
doivent recourir aux tribunaux pour faire reconnaître et sanctionner leurs droits, ils doivent user
des voies de droit.

L’action en justice confère le pouvoir d’exiger du juge qu’il examine au fond la prétention de
celui qui s’estime titulaire d’un droit subjectif.

L’étude de la mise en œuvre de cette action (chapitre 2) sera précédée d’une présentation de
l’appareil judiciaire ivoirien, cadre organique de cette action. (Chapitre 1)

CHAPITRE 1- L’ORGANISATION DE L’APPAREIL JUDICIAIRE IVOIRIEN

Pour Montesquieu, « c’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir
est porté à en abuser, il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites. Pour qu’on ne puisse abuser du
pouvoir, il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir ». D’où l’existence
des trois pouvoirs : l’Exécutif, le Législatif, le Judiciaire.

L’ancienne constitution ivoirienne notait cette séparation en consacrant une « autorité


judiciaire ». Mais une grande avancée était constatée avec la Constitution du 1er Aout 2000 qui
instaurait un « pouvoir judiciaire ». La constitution du 8 novembre 2016 s’inscrit dans cette
évolution (voir l’article 139 de ladite constitution).

Pour s’acquitter de sa mission, la justice applique la loi aux litiges qui lui sont soumis.
Ce fonctionnement doit suivre un certain nombre de principes directeurs qui sont les
orientations générales garantissant une justice équitable, accessible et fiable. Quelques-uns de
ces principes garantissent l’accès à la justice (section 1), d’autres permettent l’organisation des
juridictions (section 2), et des personnes chargées d’animer l’appareil judiciaire (section 3).
Enfin les principes gouvernant le déroulement du procès seront étudiés dans le cadre de
l’instance au chapitre 2 de ce titre.

Section 1- Le principe du libre accès à la justice

Ce principe se traduit par deux principes :

88
I- le principe de l’égalité devant la justice

Toute personne doit être jugée selon les mêmes règles établies et ne doit subir aucune
discrimination quant à sa race, son sexe, sa religion, sa condition sociale et son appartenance
politique ou ethnique. La justice doit être la même pour tous. Tous les ivoiriens doivent en
principe être jugés par les mêmes juridictions et selon les mêmes règles de droit et de procédure.
Toute discrimination entre les justiciables se trouvant dans la même situation est prohibée. Ce
principe bénéficie à tous les justiciables. Ce principe a pour corolaire l’indépendance, la
neutralité, l’impartialité et l’inamovibilité du juge qui le protègent des pressions, des préjugés
et des tendances ou incitations à des discriminations entre justiciables (voir les articles 139 à
141 de la constitution de novembre 2016).

II- le principe de la gratuité de la justice

L’accès à la justice est libre et gratuit car la justice est un service public de l’État. Les
plaideurs ne rétribuent pas les juges, qui sont payés par l’État. L’inobservation de ce principe
par le juge qui accepte de recevoir des présents ou des deniers dans l’exercice de ses fonctions,
est sanctionné par l’article …du code pénal. Le juge pourrait être poursuivi pour le délit
d’avantage illégitime. Ainsi tout citoyen riche ou pauvre peut ester en justice.

Toutefois l’intervention souvent nécessaire des auxiliaires de justice (avocats, huissiers)


entraine des frais à la charge des plaideurs. Pour remédier à cette situation, l’article 27 du code
de procédure civile prévoit l’assistance judiciaire pour aider ceux qui n’ont pas de ressources à
ester en justice sans frais de justice.

Section 2- l’organisation des juridictions

La justice se matérialise dans les juridictions. Une juridiction est un organe crée par la
loi qui a pour but de trancher des litiges en droit et dont la décision a une autorité qui s’impose
aux parties au litige. Les juridictions sont hiérarchisées et se présentent sous forme pyramidale.
A chaque niveau de la pyramide, on distingue une diversité de juridictions. Il faut donc
déterminer quelle est la juridiction compétente par rapport à chaque situation ou à la nature de
l’affaire (§1) et celle compétente sur le plan géographique ou territorial (§2).

§1- la compétence matérielle des juridictions ivoiriennes

Déterminer la compétence matérielle d’une juridiction, revient à rechercher à quelle


catégorie de juridiction il revient de connaître du litige ou de l’affaire suivant la nature de celle-
ci et son degré de traitement. Ces règles de compétence matérielle ou d’attribution selon l’article
9 du code de procédure civile, sont d’ordre public par conséquent, l’exception d’incompétence
d’attribution peut être soulevée à tout moment du procès, même par le juge lui-même, et les
parties ne peuvent en principe transiger sur cette question.

Il est donc nécessaire de respecter la répartition faite entre les juridictions selon la nature de
l’affaire et respecter aussi l’ordre et le degré juridictionnel.

89
En effet les juridictions sont hiérarchisées. La justice est organisée sous forme
pyramidale. A la base se trouve les juridictions de premier degré, au-dessus les cours d’appel
et au sommet les juridictions suprêmes. Cette hiérarchisation des juridictions répond au souci
de respecter le principe du double degré de juridiction qui permet au plaideur qui n’est pas
satisfait de la décision rendue par la juridiction de 1er degré de faire appel pour que l’affaire
soit rejugée par la cour d’appel. De plus si le plaideur estime que la cour d’appel dans sa
décision a violé la loi, alors il peut saisir la cour suprême par un pourvoi en cassation. A côté
de ces juridictions qui sont traditionnellement connues(I), on constate que d’autres modes de
règlement des conflits ont vu le jour : c’est notamment le cas de l’arbitrage (II).

I- Les juridictions classiques

Ces juridictions sont dites classiques parce qu’elles correspondent au mode traditionnel
de règlement des conflits qui se traduit nécessairement par le recours au juge. Cependant parmi
elles, on distingue celles qui siègent de manière permanente (A), de celles qui ne se réunissent
que pour un objet précis (B). Il faut également envisager le cas des juridictions spécialisées
telles que le tribunal militaire et les tribunaux de commerce (C).

A- Les juridictions permanentes

Ces juridictions sont permanentes parce qu’elles tiennent des audiences durant toute
l’année selon un calendrier établi à l’avance par ordonnance du chef de la juridiction. Ce sont :

1- Les juridictions de premier degré

Les juridictions de premier degré sont constituées par les tribunaux de première instance
et les sections de tribunal.

a- Les tribunaux de première instance

Au nombre de 9, les tribunaux de première instance sont implantés dans les villes
d’Abidjan-Plateau, d’Abidjan- Yopougon, Bouaké, Daloa, Man, Korhogo, Abengourou,
Bouaflé et Gagnoa. Ils sont composés de magistrats du siège et de magistrats du parquet. Les
magistrats du siège sont le président du Tribunal, le ou les vice-présidents, les juges
d’instruction, les juges d’enfants, les juges de tutelle et d’autres juges. Ils sont chargés de
présider les audiences, rendre les jugements et instruire les dossiers en prenant des ordonnances.
Les attributions du président du Tribunal sont d’ordre juridictionnel et administratif : il préside
les audiences, assure le service intérieur du Tribunal et délivre les certificats de nationalité. Les
magistrats du parquet regroupent les procureurs de la République, les procureurs adjoints et les
substituts. Les tribunaux de 1ère instance siègent en formation collégiale et sont compétents en
toutes matières : pénale (délits et contraventions), civile, sociale, administrative (contentieux
de pleine juridiction), sauf les matières que la loi leur retire expressément. C’est le cas en
matière militaire par exemple et commerciale lorsqu’il existe un tribunal de commerce dans le
ressort. L’article 143 nouveau de la constitution de 2016 prévoit la création des tribunaux
administratifs pour connaitre des affaires où une personne publique est partie.

90
Le fonctionnement effectif de ces tribunaux administratifs sera la manifestation de la dualité de
juridiction dans notre pays et le retrait de ces contentieux aux tribunaux de 1ère Instance.

Par ailleurs, la loi n°2018-975 du 27 décembre 2018 portant code de procédure pénale
en Côte d’Ivoire, institue une juridiction permanente appelée le Tribunal criminel, désormais
compétent pour juger en premier ressort les individus renvoyés devant lui par l’arrêt de mise en
accusation : article 262 du CP Pénale. A ce titre, il remplace la Cour d’Assises, juridiction non
permanente. Il est compétent en matière pénale pour juger en premier ressort les infractions les
plus graves c’est-à-dire les crimes et les infractions connexes à ces crimes. Les sessions de
jugement des affaires criminelles se tiennent au siège de chaque tribunal de première instance
pour les affaires criminelles instruites dans le ressort de ce tribunal : article 263 du CP Pénale.
Alors que les arrêts de la Cour d’Assises étaient insusceptibles d’appel, les jugements du
tribunal criminel peuvent faire l’objet d’appel.

b- Les sections de tribunal

Au nombre de 25 elles sont détachées des tribunaux de première instance. Depuis la loi
N° 99- 435 du 6 juillet 1999, elles comprennent au moins 3 magistrats : un président de section,
un juge d’instruction, un substitut résident dotés des mêmes attributions que ceux des tribunaux
de première instance. Les sections détachées sont également compétentes en toutes matières
sauf exceptions légales.

Les décisions rendues par les tribunaux de 1ère instance et les sections détachées sont appelées
des jugements.

2- Les juridictions de second degré

Les cours d’appel représentent le second degré de juridiction. Elles sont compétentes pour
connaître des recours formés par les justiciables contre les jugements rendus en premier ressort
par les juridictions du premier degré en toute matière, lorsque la nature et la valeur du litige le
leur permettent.

Selon l’article 162, alinéa 1 du code de procédure civile (CPC), l’appel est la voie de
recours par laquelle une partie sollicite de la Cour d’appel, la réformation de la décision rendue
par une juridiction de première instance. Sont susceptibles d’appel les décisions rendues en
premier ressort, contradictoirement ou par défaut. Sont considérées comme décisions rendues
en premier ressort par l’article 6 du CPC :

- Les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à 500 000 FCFA ou est indéterminé

- Les demandes relatives à l’état des personnes

- Les demandes en matière administrative et fiscale c’est-à-dire les demandes où une personne
publique est concernée.

- En matière de compétence juridictionnelle.

91
L’appel est formé par exploit d’huissier c’est-à-dire assignation en principe, mais pour
les décisions gracieuses, on peut faire appel par voie de requête.

Le délai de l’appel est en principe d’un mois à partir de la signification de la décision dont
appel. Dans les deux mois à compter de la signification de l’appel, à peine de forclusion, les
parties doivent se conformer aux exigences de l’article 166 CPC relatives au dépôt de
conclusions et de pièces.

On n’admet en principe comme appelant que les parties déjà présentes au premier degré
et qui ont finalement perdu totalement ou partiellement.

L’appel interjeté par un intimé est un appel incident.

Sauf disposition contraire de la loi, l’appel interjeté dans le délai légal est suspensif, à
moins que l’exécution provisoire (qui peut être de droit ou facultative : articles 145 à 148 du
CPC) ait été ordonnée. Pour la jurisprudence ivoirienne, non seulement l’exercice effectif de
l’appel (comme de l’opposition) est suspensif d’exécution de la décision de justice, mais
également le délai pendant lequel l’appel peut être exercé.

Il existe 3 Cours d’appel implantées dans les villes d’Abidjan, Bouaké et Daloa. Ces
juridictions sont constituées de chambres civiles, sociales, correctionnelles, criminelles,
commerciales, administratives. Elles regroupent les magistrats du siège que sont le premier
président, les présidents de chambre et les conseillers, ainsi que des magistrats du ministère
public ou parquet général, comprenant le procureur général, les avocats généraux et les
substituts du procureur général. Les arrêts de la cour d’appel sont toujours rendus par au moins
3 magistrats. Ce peut être des arrêts confirmatifs (la cour d’appel tranche dans le même sens
que le tribunal) ou des arrêts infirmatifs (la cour d’appel contredit la décision du tribunal).
Lorsque l’appelant (celui qui a fait appel) ou l’intimé (son adversaire) ne sont pas satisfaits par
l’arrêt de la cour d’appel, ils peuvent former un pourvoi en cassation.

3- Les juridictions suprêmes

Nous avons les juridictions suprêmes de l’ordre interne (a) et une juridiction suprême
dans le cadre communautaire (b).

a- Les juridictions suprêmes dans l’ordre interne ivoirien

a- 1) La Cour de Cassation : articles 147 et 148 nouveau de la constitution

Elle connaît des pourvois en cassation formés contre les décisions des juridictions
inférieures (tribunaux et cours d’appels) sur lesquelles elle exerce un contrôle de légalité
(affaires pénales, civiles, sociales). Elle est la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire. Elle
n’est pas en principe juge de fait mais de droit, car elle n’est pas un 3ème degré de juridiction.
Elle a une mission d’unification de l’interprétation de la règle de droit (élaboration de la
jurisprudence).

Elle rend deux types de décisions : les arrêts de rejet (du pourvoi) si elle estime que les
juridictions inférieures ont eu une bonne interprétation de la loi, les arrêts de cassation si elle

92
constate une erreur d’interprétation de la règle de droit. Dans cette dernière hypothèse, le
pouvoir d’évocation lui est reconnu par l’article 28 nouveau de la loi n° 97-243du 25/4/97
portant modification du code de procédure civile, c’est-à-dire de connaître l’affaire au fond
(comme les juridictions de 1er et second degré). Toutefois le renvoi est obligatoire dans deux
hypothèses :

En cas de cassation pour incompétence, la cour de cassation renvoie l’affaire à la


juridiction compétente.

En cas de cassation d’une décision intervenue sur l’action publique, la cour de cassation renvoie
l’affaire devant une autre juridiction de même nature expressément désignée ou devant la même
juridiction autrement composée.

a-2) Le Conseil d’État : article 147 et 149 nouveau de la constitution

Il est la plus haute juridiction de l’ordre administratif. Il connaît en premier et dernier ressort
des recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décisions d’autorités administratives,
ainsi que des pourvois en cassation formées contre les décisions des juridictions inférieures,
dans les affaires où une personne morale de droit public est partie. Il exerce en outre une
fonction consultative. Il peut être sollicité à ce titre par le Président de la République pour avis,
sur toute question de nature administrative.

a.3) La Cour des Comptes

Selon l’article 152 de la constitution, la Cour des Comptes est l’institution suprême de
contrôle des finances publiques. Elle a des attributions juridictionnelles, de contrôle et de
consultation. La cour des comptes contrôle la gestion des comptes des services de l’État, des
collectivités territoriales ou des autres personnes morales de droit public et sanctionne les fautes
de gestion.

a.4) Le Conseil Constitutionnel

Il a été institué par la constitution de 2000 en remplacement de la chambre


constitutionnelle de la cour suprême et maintenu par la constitution du 8 novembre 2016. La
composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement du conseil constitutionnel sont
d’abord fixés par la loi n° 94-438 du 16 août 1994. Il est régi aujourd’hui par les dispositions
de la Constitution du 8 novembre 2016 (articles 126 à 138) qui fixent ses attributions, en
déterminent l’organisation et le fonctionnement.

Ainsi selon les articles 126 et 127, le conseil constitutionnel est juge de la constitutionnalité des
lois. Il est l’organe régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics. Il contrôle la régularité
des opérations de référendum et en proclame les résultats. Il statue également sur l’éligibilité
des candidats aux élections présidentielles et législatives, les contestations relatives à l’élection
du président de la république et des députés, et proclame les résultats définitifs des élections.
Le conseil constitutionnel constate la vacance de la présidence de la république, il contrôle la
conformité des engagements internationaux et des lois à la constitution. Les projets et
propositions de lois peuvent lui être soumis pour avis.

93
Le conseil constitutionnel est composé d’un président nommé par le président de la
république, et de six conseillers dont trois sont nommés par le président de la république. Il
comprend également des anciens présidents de la république, sauf renonciation expresse de leur
part (article 128). Les décisions du Conseil Constitutionnel sont insusceptibles de recours.

b- La juridiction suprême communautaire : la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage


(CCJA)

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’OHADA a été créée par le


Traité de Port Louis du 17 octobre 1993 entré en vigueur en 1995, qui prévoit la nomination de
7 juges ressortissants des États membres qui exercent en toute indépendance leurs fonctions au
sein de la CCJA, pour un mandat de 7 ans renouvelable une fois.

Les juges sont élus, aux termes de l’article 31 du Traité, pour un mandat de 7 ans
renouvelables une fois, parmi les ressortissants des Etats parties, dans les fonctions et sous les
conditions suivantes : les magistrats ayant acquis une expérience judiciaire d’au moins quinze
années et exercé de hautes fonctions juridictionnelles ; Les avocats inscrits au barreau de l’un
des États parties, ayant au moins quinze années d’expérience professionnelle ; Les professeurs
de droit ayant au moins quinze années d’expérience professionnelle

La Cour de Justice et d’arbitrage de l’OHADA est une juridiction communautaire dont


la mission est déterminée par l’article 14 du traité. Elle siège à Abidjan (Côte d’Ivoire).

Les pouvoirs de la CCJA :

* fonction consultative

La CCJA donne un avis préalable à l’adoption des Actes Uniformes et tranche des
différends entre les États quant à l’interprétation ou l’application du Traité. En outre, la CCJA
est compétente pour toutes les questions relatives à l’application des Actes Uniformes, à
l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales. La CCJA bénéficie d’un transfert
de compétences anciennement dévolues aux juridictions de cassation nationales, et contribue
indéniablement à assurer une interprétation commune par les juges du fond de l’espace
OHADA d’un même droit substantiel communautaire.

* fonction contentieuse

La Cour de Justice et d’arbitrage est une Cour de cassation, se prononçant sur les
décisions rendues (concernant l’application des actes uniformes) par les juridictions d’appel des
États ou sur les décisions non susceptibles d’appel, avec la particularité de statuer au fond sans
renvoi devant une autre juridiction (pouvoir d’évocation).

Les arrêts de la CCJA ont autorité de la chose jugée et force exécutoire et peuvent donc
être exécutés sur le territoire de chacun des États parties sans qu’il soit besoin de recourir à la
procédure d’exéquatur. La seule formalité exigée est l’apposition de la formule exécutoire de
l’autorité nationale compétente.

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La CCJA peut être saisie directement par l’une des parties à une instance devant une
juridiction nationale ou sur renvoi d’une juridiction nationale statuant en cassation. En effet elle
peut être saisie de 3 manières :

- par un recours en cassation formé par l’une des parties

- par l’arrêt de renvoi de l’affaire par une juridiction de cassation nationale saisie à tort (article
51 du traité)

- lorsqu’une juridiction nationale de cassation a méconnu la compétence de la CCJA

Par ailleurs, la CCJA intervient dans le domaine de l’arbitrage. Elle organise l’arbitrage mais
n’arbitre pas elle-même. Elle nomme ou confirme les arbitres, est informée du déroulement de
l’arbitrage et examine les projets de sentence. Elle peut prendre une décision d’exequatur pour
l’exécution forcée d’une sentence arbitrale rendue dans un État.

B- Les juridictions non permanentes

Ce sont des juridictions qui ne siègent pas en permanence parce que leur sphère de
compétence est limitée à un objet précis. Avec la suppression de la Cour d’Assises par le
nouveau code de procédure pénale, seule la Haute Cour de Justice fera l’objet de nos analyses.

Instituée par la constitution de 2000, la Haute Cour de Justice a été maintenue par la
constitution de 2016 : article 156 et suivants. La Haute Cour de Justice est une juridiction
d’exception composée de députés et de sénateurs que l’assemblée nationale et le sénat élisent
en leur sein, dès la première session de la législature. Elle est présidée par le président de la
cour de cassation. La Haute Cour de Justice est compétente pour connaître des crimes et délits
commis par le vice-président de la république et les membres du gouvernement dans l’exercice
de leurs fonctions. Elle est liée par la définition des crimes et délits et par la détermination des
peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits compris dans les poursuites.

Le président de la république n’est toutefois responsable des actes accomplis dans l’exercice de
ses fonctions et traduit devant la Haute Cour de Justice qu’en cas de haute trahison.

C- Les juridictions spécialisées

On a le tribunal militaire et les juridictions de commerce.

1- Le tribunal militaire

C’est une juridiction permanente spécialisée en ce sens qu’elle est compétente au plan
pénal pour juger les militaires des armées de terre, de mer et de l’air. Sa compétence s’étend
aussi aux membres de la garde républicaine, les militaires des services de santé, les gendarmes,
certains civils liés à l’armée par certains contrats, les prisonniers de guerre même civils.

Depuis la loi 78- 635 du 28 juillet 1978 portant statut des corps des personnels de la
police nationale, le tribunal militaire a vu sa compétence s’étendre aux policiers. En effet depuis
cette loi, le personnel de la police nationale est militarisé. Ainsi en cas d’infractions commises

95
par les policiers, le tribunal militaire est compétent dans les mêmes conditions que pour les
militaires des forces armées.

La compétence du tribunal militaire se limite à l’action publique et couvre les infractions


militaires (désertion en temps de guerre, insoumission, abandon de poste, trahison et complot
etc.) et les infractions de droit commun commis par les militaires dans l’exercice de leur
fonction ou à l’occasion du service. Le parquet près le tribunal militaire joue le même rôle que
le parquet civil. Il est placé sous l’autorité du commissaire du gouvernement qui est l’équivalent
du procureur de la république et doit être obligatoirement militaire.

Des 3 tribunaux militaires crées, seul le tribunal militaire d’Abidjan fonctionne effectivement.

2- Les Juridictions de commerce

Depuis son indépendance, la Côte d’Ivoire n’avait pas cru nécessaire de créer une
juridiction spéciale consacrée à la matière commerciale. Pourtant le besoin d’un traitement
spécialisé, efficace et accéléré des affaires commerciales existait. Ce besoin a emmené les
pouvoirs politiques à instituer des tribunaux de commerce par la loi organique n° 2014-424 du
14 Juillet 2014 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce.

Selon l’article 2 de cette loi, les juridictions de commerce sont des juridictions spéciales
de 1er et second degré qui sont soumises sauf dispositions contraires, la loi portant organisation
judiciaire et celle portant code de procédure civile, commerciale et administrative. L’appel des
jugements rendus par les tribunaux de commerce est porté devant la Cour d’Appel compétente.
A ce sujet, l’article 27 de la présente loi prévoit la création des chambres commerciales
spéciales au sein des Cours d’Appel, pour statuer sur l’appel des jugements des tribunaux de
commerce. Quant au pourvoi en cassation, il est porté devant la juridiction suprême compétente.
La détermination de la compétence matérielle des tribunaux de commerce est faite par l’article
7 de la présente loi. Ainsi les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître :

- Des contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants au sens de


l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général

- Des contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un groupement d’intérêt
économique

- Des contestations entre toutes personnes relatives aux actes de commerce au sens de l’Acte
Uniforme relatif au Droit Commercial. Toutefois, dans les actes mixtes, la partie non
commerçante demanderesse peut saisir les tribunaux de droit commun

- Des procédures collectives d’apurement du passif

- Plus généralement des contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les
commerçants à l’occasion de leur commerce et de l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil

- Des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par les tribunaux de commerce.

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Selon l’article 8, les tribunaux de commerce statuent en 1er ressort sur toutes les
demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à 1 Milliard ou est indéterminé. Pour les
demandes dont l’intérêt du litige n’excède pas 1 Milliard, ils statuent en 1er et dernier ressort.

Le juge saisi doit tenter au préalable de concilier les parties (article 5). Il apparaît ainsi comme
un arbitre.

Selon l’article 39 de la présente loi, jusqu’à la mise en place effective des juridictions de
commerce, les juridictions de droit commun conservent leur compétence en matière
commerciale.

II- Les juridictions arbitrales

A l’opposé des méthodes classiques de résolution des conflits qui nécessitent le recours
aux juridictions étatiques, d’autres modes de résolutions des conflits (Modes Alternatifs de
Résolution des Conflits : MARC) ont vus le jour et se sont beaucoup développés ces dernières
années, c’est notamment le cas de l’arbitrage.

L’arbitrage est une procédure dans laquelle le litige est soumis, par convention entre les
parties, à un ou plusieurs arbitres qui rendent une décision contraignante. En décidant de
recourir à l’arbitrage, les parties optent pour une procédure de règlement des litiges privée en
lieu et place d’une procédure judiciaire.

L’arbitrage est une procédure consensuelle c’est -à-dire que le recours à l’arbitrage ne peut
avoir lieu que si les deux parties y ont consenti. En effet selon l’article 2 du règlement
d’arbitrage de la CCJA de l’OHADA : « la mission de la CCJA est de procurer (…) une solution
arbitrale lorsqu’un différent d’ordre contractuel, en application d’une clause compromissoire
ou d’un compromis d’arbitrage, lui est soumis par toute partie à un contrat (…). Pour recourir
à l’arbitrage il faut donc remplir certaines conditions :

- Être partie à un contrat car l’arbitre n’intervient que dans le domaine contractuel.

- Il faut que les parties soient d’accord toutes les 2 pour recourir à l’arbitrage. Cet accord peut
être énoncé :

Soit par une clause compromissoire incluse dans le contrat liant les parties, et qui prévoit le
recours à l’arbitrage en cas de litige. Elle doit être stipulée par écrit, désigner le ou les arbitres.

Soit par un compromis d’arbitrage ou convention d’arbitrage, qui est un contrat signé après la
naissance du conflit, dans lequel les parties s’accordent pour recourir à l’arbitrage.

L’arbitrage constitue une des missions de la CCJA de l’OHADA. Elle organise


l’arbitrage mais n’arbitre pas elle-même. Elle nomme ou confirme les arbitres, est informée du
déroulement de l’arbitrage et examine les projets de sentence.

Elle est compétente pour prendre une décision d’exequatur pour l’exécution forcée d’une
sentence arbitrale rendue dans un Etat.

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Par ailleurs d’autres structures internes telles que la Cour Arbitrale de Côte d’Ivoire
(CACI, créée en 1997), structure de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte d’Ivoire,
ont une compétence en matière arbitrale.

§2- La compétence territoriale des juridictions ivoiriennes

Les règles de compétence territoriale au contraire des règles de compétence


d’attribution, sont d’ordre privé. En effet selon l’article 18, alinéa 1er du CPC « il peut être
dérogé aux règles de compétence territoriale par convention expresse ou tacite. La convention
est réputée tacite dès lors que l’incompétence du tribunal n’a pas été soulevée avant toute
défense au fond.

Toutefois les règles de compétence territoriale sont d’ordre public en matière


administrative et lorsqu’une disposition légale attribue compétence exclusive à une juridiction
déterminée ». Hormis les domaines dans lesquels la compétence territoriale est d’ordre public,
les parties à un contrat sont libres de passer des conventions sur la détermination du tribunal
compétent territorialement. Ces conventions découlent le plus souvent de l’insertion dans le
contrat d’une clause attributive de compétence désignant telle juridiction en cas de conflit dans
l’exécution du contrat.

L’affirmation du caractère d’ordre privé des règles de compétence a pour conséquence


que l’exception d’incompétence territoriale doit être soulevée avant toute défense sur le fond,
et cette incompétence ne peut être soulevée que par la partie adverse c’est-à-dire le défendeur.
Pour la détermination du tribunal compétent territorialement, le code de procédure civile
distingue la matière civile (I), la matière commerciale (II), la matière administrative et fiscale
(III).

I- Les règles de compétence territoriale en matière civile

Il y a une règle qui comporte des exceptions.

A- Le principe : la règle « actor séquitur forum réï »

Selon l’article 11, alinéa 1 du CPC, le tribunal compétent en matière civile est celui du
domicile réel ou élu du défendeur et en l’absence de domicile, celui de sa résidence. S’il y a
plusieurs défendeurs, l’action peut être portée indifféremment devant le tribunal du domicile
ou, à défaut, de la résidence de l’un d’eux. Si le domicile ou la résidence du défendeur sont
inconnus, le tribunal compétent est celui du dernier domicile ou à défaut de la dernière résidence
connue. D’après cette règle le domicile réel ou élu et à défaut la résidence du défendeur fonde
la compétence territoriale du tribunal.

Le domicile est le lieu du principal établissement c’est-à-dire le centre principal des


intérêts matériels et moraux d’une personne. Pour les personnes morales, c’est le lieu du siège
social. Mais la jurisprudence admet la saisine du tribunal du lieu de situation d’une succursale
importante relativement aux grandes sociétés. Quant à la résidence, c’est le lieu d’une habitation
pratique.

98
B- Les exceptions au principe

1) Les exceptions prévues par l’article 11 du CPC

- Si le défendeur est un ivoirien établi à l’étranger, ou un étranger n’ayant en Côte d’Ivoire ni


domicile, ni résidence, le tribunal compétent est celui du domicile du demandeur.

- Outre le tribunal du domicile du défendeur, est également compétent : en matière de pension


alimentaire, celui du domicile du demandeur ; en matière de contestations relatives à des
fournitures, travaux, locations, louage d’ouvrage ou d’industrie, celui du lieu où la convention
a été contractée ou exécutée ; en matière de responsabilité civile, lorsque celle- ci résulte d’un
contrat, d’un délit, ou d’un quasi délit, celui du lieu où le fait constitutif du dommage s’est
produit.

2) Les exceptions prévues par l’article 12 CPC

- En matière immobilière, le tribunal compétent est celui de la situation de l’immeuble litigieux;

- En matière de garantie, celui devant lequel la demande principale est pendante

- En matière de succession, celui du lieu de l’ouverture de la succession

II- Les règles de compétence en matière commerciale

En matière commerciale, le demandeur a le choix entre plusieurs juridictions :

- Celui du domicile réel ou élu du défendeur, et en l’absence de domicile, celui de sa résidence

- Celui dans le ressort duquel la promesse a été faite et la marchandise a été ou devait être livrée

- Celui dans le ressort duquel le paiement a été ou devait être effectué

- Sont également applicables les dispositions des alinéas 2, 3 et 4 de l’article 12

- En matière de société commerciale, le tribunal compétent est soit celui du siège social, ou
d’une succursale, soit devant celui du domicile ou de la résidence de son représentant.

III- Les règles de compétence en matière administrative et fiscale

En matière administrative le tribunal compétent est :

- Celui du lieu d’affectation de l’agent pour tout litige d’ordre individuel intéressant les
fonctionnaires ou les agents au service de l’État ou d’une collectivité publique

- Celui dans le ressort duquel se trouvent les immeubles litigieux pour les litiges relatifs aux
déclarations d’utilité publique, au domaine public et aux affectations d’immeubles

- Celui du lieu d’exécution des marchés, contrats ou concessions, pour les litiges relatifs à cette
exécution

99
- Celui du lieu où le fait générateur du dommage s’est produit, en matière de dommages
résultant d’une cause autre que la méconnaissance d’un contrat

- Dans tous les autres cas, celui dans le ressort duquel l’autorité qui a pris la décision attaquée
ou a signé le contrat litigieux, a son siège.

En matière fiscale le tribunal compétent est celui du lieu de l’établissement de l’impôt.

Section 3- les animateurs de l’appareil judiciaire

Ce sont d’abord les magistrats (I) et les auxiliaires de justice ensuite (II).

I- Les magistrats

Ce sont des professionnels du droit à qui l’État confie le pouvoir de dire le droit ou de
juger (magistrats du siège) (A) ou de requérir l’application de la loi (Ministère Public) (B).
Qu’ils soient du siège ou du Ministère Public, ils sont des fonctionnaires de l’État soumis aux
mêmes règles relatives au recrutement, à la formation, à l’obligation de résidence, aux
incompatibilités et interdictions.

A- Les magistrats du siège

On les appelle la magistrature assise parce que lors des audiences ils sont toujours assis.
Ce sont des juges c’est-à-dire qu’ils tranchent des litiges et rendent des décisions de justice. Ils
sont caractérisés par deux principes :

1- Le principe de l’indépendance

Ce principe est affirmé à l’article 140 de la constitution du 8 novembre 2016 en ces


termes : « le juge n’obéit qu’à l’autorité de la loi. » cela signifie que dans l’exercice de leurs
fonctions, les magistrats du siège ne doivent recevoir d’instructions ou d’ordres de personne, ni
subir de pressions de la part de leurs chefs, des autorités politiques ou administratives, ni même
de leurs familles.

2- Le principe de l’inamovibilité du magistrat

Selon l’article 140 de la constitution du 8 novembre 2016, « les magistrats du siège sont
inamovibles ». Le magistrat du siège ne peut pas être affecté, déplacé sans son consentement,
sauf nécessités de service.

B- Les magistrats du ministère public

Ils constituent la magistrature debout parce que lors des audiences, ils se tiennent debout
pour prendre la parole. Le Ministère Public est composé notamment du procureur de la
république et de ses substituts, du procureur général et ses substituts, des avocats généraux.
Nommés par décret du Président de la République sur proposition garde des sceaux, ces
magistrats du ministère public, à la différence des magistrats du siège, sont amovibles et

100
révocables. Ils constituent auprès des juridictions répressives ce qu’on appelle le parquet. Le
rôle du ministère public est de représenter et défendre les intérêts de la société, de l’Etat en
requérant l’application de la loi. A ce titre le ministère public est un représentant du pouvoir
exécutif et une partie principale au procès pénal. Par conséquent il est caractérisé
essentiellement par trois principes :

1- Le principe de la subordination hiérarchique

Contrairement aux magistrats du siège qui sont indépendants vis-à-vis du pouvoir


exécutif, les magistrats du ministère public, reçoivent des ordres de leurs supérieurs
hiérarchiques auxquelles ils doivent obéir. Toutefois le magistrat du parquet retrouve sa liberté
lorsqu’il développe oralement, les observations qu’il croit convenables au bien de la justice, en
vertu de l’adage « la plume est serve, mais la parole est libre ».

2- Le principe de l’indivisibilité

Les magistrats du ministère public sont juridiquement considérés comme ne formant


qu’une seule et même personne. Celui d’entre eux qui agit ou prend la parole, est considéré
comme agissant au nom du parquet tout entier ; ils sont à ce titre interchangeables car ils peuvent
se remplacer au cours d’une même audience, ce qui n’est pas possible pour les magistrats du
siège.

3- Le principe de l’irrécusabilité du ministère public

Alors qu’un juge du siège peut être récusé, le magistrat du ministère public ne peut pas
être récusé par les individus qu’il poursuit parce qu’il est demandeur au procès pénal, c’est-à-
dire l’adversaire de l’inculpé contre qui il requiert l’application de la loi.

II- Les auxiliaires de justice

Les auxiliaires de justice sont des professionnels du droit qui ne sont pas magistrats mais
participent toutefois directement ou indirectement à la mission de service public de la Justice.
Ils sont nombreux, on peut les classer en deux groupes : ceux qui ont une participation directe
(A) et ceux qui interviennent de manière indirecte(B).

A- Les auxiliaires à participation directe

Dans cette catégorie on peut citer le greffier (1), l’expert (2) et l’avocat (3).

1- Le greffier

C’est un fonctionnaire de l’Etat recruté par voie de concours. Il a diverses fonctions : il


est considéré comme la mémoire et la plume du tribunal.

En effet il assiste le magistrat à l’audience. Il tient le répertoire général des affaires et le


registre d’audience. IL assiste le juge, conserve les minutes des décisions et en délivre des
expéditions et des copies.

101
2- L’expert

L’expert est un professionnel dans son domaine qui intervient dans le procès à la
demande du juge. Il a pour mission d’éclairer le juge sur un problème technique dont la solution
est indispensable au litige. Il peut intervenir dans divers domaines : médical, comptable,
immobilier etc. c’est le juge qui définit sa mission et le temps qui lui est imparti.

Toutefois l’expert ne fournit qu’un avis qui ne lie pas le juge. En effet le juge est libre
de son appréciation finale. L’expert est choisi sur une liste officielle dressée par la Cour
Suprême ou la Cour d’Appel. Les candidats à l’inscription doivent remplir un certain nombre
de critères de moralité et de compétence professionnelle. L’expert perçoit des honoraires à la
charge des plaideurs. L’expert peut engager sa responsabilité civile et pénale pour ses
manquements.

3- L’avocat

En droit, l’avocat est un juriste exerçant une profession libérale dont la fonction
traditionnelle est de défendre ses clients, personnes physiques ou morales, en justice, en plaidant
pour faire valoir leurs intérêts et, plus généralement, pour les représenter. L’avocat s’acquitte
d’une fonction de conseil et de rédacteur d’actes (contrats, statuts d’une société). Le ministère
d’avocat est parfois rendu obligatoire par la loi notamment afin d’assurer les droits de la défense
devant certaines juridictions.

L’avocat, qui est un auxiliaire de la Justice, est soumis à une surveillance étatique. Il
doit respecter les règles professionnelles et déontologiques sous peine de sanctions. L’avocat
est en outre soumis aux règles associatives du barreau qui est administré par le Conseil de
l’Ordre des avocats dirigé par le Bâtonnier. L’avocat est soumis au secret professionnel pour
toute l’activité qu’il déploie dans le cadre de sa profession (conseils juridiques, représentation
en justice, résolution extrajudiciaire des litiges). Ce secret protège la relation de confiance entre
le client et son avocat. Les honoraires de l’avocat sont en principe fixés en fonction du temps
qu’il doit consacrer à l’affaire, à un tarif horaire qui peut être fixé librement avec le client.

B- Les auxiliaires à participation indirecte : les officiers ministériels

Les officiers ministériels sont des personnes titulaires d’un office c’est-à-dire d’une
charge, conféré à vie par l’autorité publique et disposent du droit de présenter leur successeur.
Ils ne peuvent exercer leurs fonctions qu’au sein de cet office dont ils sont titulaires. Leur
nomination s’exerce par voie d’agrément du garde des sceaux pris sous la forme d’un arrêté.
Nous avons : d’une part les notaires (1), et d’autre part les huissiers de justice et les
commissaires-priseurs dont les attributions ont été réunies pour créer un nouveau corps de
métier : les commissaires de justice (2).

Les Officiers Ministériels font partie d’une catégorie plus vaste que sont les "Officiers
publics" qui dressent des actes authentiques et obligatoires. Mais tous les officiers publics ne
sont pas des Officiers Ministériels. Par exemple les "Officiers de l’État civil", les greffiers sont
des officiers publics mais pas des officiers ministériels car ils ne sont pas titulaires d’une charge.

102
En fait, seuls les commissaires de justice et les notaires sont à la fois officiers publics et
ministériels.

1- Les notaires

Les notaires sont des officiers publics et ministériels investis du pouvoir de délivrer des
actes authentiques, dotés de la force exécutoire sans qu’il soit besoin de recourir à une décision
de justice. Ils exercent leur profession dans un cadre libéral. Ils ont également une mission de
conseil des particuliers et des entreprises, liée ou non à la rédaction d’actes, et peuvent
intervenir, à titre accessoire, dans la gestion de patrimoines et la négociation immobilière. Leurs
domaines d’intervention principaux sont ceux du droit de la famille (opérations de liquidations
et partage des biens de la communauté, successions, libéralités (rédaction de testament par
exemple), adoptions), du droit immobilier et des contrats civils et commerciaux... L’organe
représentatif de la profession auprès des pouvoirs publics est la chambre des notaires.

2- Les huissiers de justice et les commissaires-priseurs : les commissaires de justice

Les huissiers de justice sont des officiers publics et ministériels. Nommés dans leurs
fonctions par arrêté du garde des sceaux, ils ont seuls qualité pour signifier les actes de
procédure et les décisions aux parties, et amener à exécution les décisions de justice ainsi que
les actes ou titres en forme exécutoire. Ils peuvent, en outre, soit sur commission des tribunaux,
soit à la demande de particuliers, procéder à des constats. En dehors de tout contentieux,
l’huissier de justice peut procéder au recouvrement des créances à titre amiable et peut
administrer des immeubles (encaissement des loyers pour le compte du propriétaire moyennant
rémunération par exemple). Quant aux commissaires-priseurs, ils constituent un corps
d’officiers ministériels qui bénéficient du monopole des ventes aux enchères publiques (il doit
s’agir de biens meubles). Ce monopole a été établi pour assurer la sécurité du vendeur et des
acheteurs ainsi que pour éviter les scandales liés à la vente d’objets recélés. A titre accessoire
il peut être autorisé à exercer les fonctions d’administrateur d’immeuble ou d’agent
d’assurance. Ce sont ces deux professions qui ont été fondues pour donner un nouveau corps
de métier appelé les commissaires de justice. Le Commissaire de justice est compétent pour
exercer les attributions de l’huissier de justice et du commissaire-priseur.

CHAPITRE 2- LA MISE EN OEUVRE DE L’ACTION EN JUSTICE

L’action en justice confère le pouvoir d’exiger du juge qu’il examine au fond la


prétention de celui qui s’estime titulaire d’un droit subjectif.

L’étude du déroulement de l’instance (section 3) sera précédée des conditions de recevabilité


de l’action en justice (section 1) et des formes de l’action en justice (section 2).

103
Section 1- les conditions de recevabilité de l’action en justice

L’article 3 du Code de Procédure Civile, Commerciale, Administrative est essentiel en


matière de conditions d’existence de l’action. Il dispose que celui qui veut ester en justice doit
justifier d’un intérêt légitime, juridique, direct et personnel, mais aussi qu’il doit avoir la qualité
et la capacité à agir. À ces conditions, il faut joindre une condition préalable qui est celle de la
personnalité juridique.

I- La personnalité juridique

L’article 3 du Code de Procédure civile semble ignorer cette condition préalable


puisqu’il n’en fait pas cas. Pourtant cette condition s’impose comme un préalable en ce sens
que l’action en justice n’est possible que pour ou contre une personne juridique, c’est-à-dire
une personne apte à être titulaire de droits et tenus d’obligations.

Pour les personnes physiques, la personnalité juridique commence à la naissance viable


sauf l’exception de l’adage "infans conceptus". Cette personnalité juridique prend fin au décès
de la personne. Cela signifie qu’au décès de la personne, l’action en justice n’est plus possible.
Toutefois si la personne est décédée alors que le tribunal saisi, n’avait pas encore rendu sa
décision, l’action initiée subsiste au décès de la partie. Après que le juge ait relancé les héritiers,
l’instance peut être reprise selon les modalités prévues par le code de procédure civile. Si
l’affaire était déjà en état, la décision peut être rendue.

Cependant, certaines actions sont intransmissibles car attachées à la personne de leur


auteur. Ces actions prennent fin au décès de leur auteur.

Concernant les personnes morales, elles ont le droit d’ester en justice lorsqu’elles ont la
personnalité morale. Si pour les personnes morales de droit public (l’Etat, les collectivités
publiques, les Etablissements publics etc.), le problème ne se pose pas, il en est autrement pour
les personnes morales de droit privé. En principe les groupements de personnes tels que les
associations, les sociétés, les syndicats, les partis politiques, les fondations etc. régulièrement
constitués ont le droit d’ester en justice (ils peuvent être soit demandeurs ou défendeurs).
Toutefois lorsque ces groupements n’ont pas revêtus les formes régulières légales ou l’ont
perdu, ils ne peuvent être ni demandeurs ni défendeurs en justice.

II- la capacité juridique

Pour que l’action soit recevable, il faudrait que le demandeur ait la capacité d’agir. Il ne s’agit
pas de la capacité de jouissance qui en principe se confond avec la personnalité juridique. Ce
qui est en cause c’est la capacité d’exercice, qui est l’aptitude à exercer les droits dont on est
titulaire. En droit ivoirien, le mineur non émancipé et le majeur incapable sont frappés d’une
incapacité d’exercice. Pour ester en justice en principe (il y a des exceptions pour le mineur non
émancipé notamment dans le domaine de la filiation), ils ont besoin d’être représentés ou
assistés.

104
III- l’intérêt pour agir

Il ne suffit pas, en effet, d’être titulaire d’un droit pour agir. Encore faut-il justifier d’un
intérêt. L’intérêt est donc le fondement de l’action. Seul celui qui a un avantage à voir sa
prétention reconnue en Justice peut exercer une action : "Pas d’intérêt, pas d’action". L’intérêt
doit remplir quatre conditions :

- L’intérêt doit être direct et personnel au demandeur :

Cela signifie que l’intérêt doit être lié directement au droit dont il est demandé
reconnaissance au juge, par conséquent seule la personne lésée dans son intérêt propre ou
désignée par la loi peut agir en justice en principe.

À chacun de défendre ses intérêts. Cependant, dans certains cas, la loi reconnaît à
certains groupements la faculté d’exercer l’action en réparation d’un préjudice qu’ils n’ont pas
subi personnellement et qu’aucun des membres n’a subi personnellement. Ainsi, un syndicat
professionnel représente les intérêts de la profession. Il peut ester en justice pour exercer les
droits visant à obtenir réparation de l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession qu’il
représente.

- L’intérêt doit être légitime et juridiquement protégé :

Cela signifie que l’intérêt ou la prétention doit être fondé en droit, il ne doit pas être
fondé sur un acte illicite ou immoral. C’est au nom de ce principe que la jurisprudence refusait
à la concubine toute indemnisation pour le préjudice subi du fait du décès accidentel de son
concubin, parce qu’à cette époque le concubinage était immoral.

- L’intérêt doit être né et actuel. Cette exigence signifie qu’aucune action n’est accordée pour
faire réparer un préjudice éventuel, hypothétique. On ne peut faire respecter un droit dont on
n’est pas sûr qu’il a été violé. On ne sait pas encore si le préjudice existe. Cela ne signifie pas
pour autant qu’il soit nécessaire que le préjudice soit précisément déterminé, il suffit qu’il
puisse être déterminable. Un préjudice futur peut être certain, si l’on est sûr qu’il se réalisera,
mais qu’on ne connaît pas précisément la date de cette réalisation.

IV- la qualité pour agir

La qualité est "le titre qui permet au plaideur d’exiger du juge qu’il statue sur le fond du
litige". La qualité tend à se confondre selon les auteurs, au caractère direct et personnel de
l’intérêt. En effet c’est le titulaire du droit lésé qui a en principe qualité pour agir sauf si la loi
désigne d’autres intéressés. Ainsi en matière de divorce, seul le mari ou la femme ont qualité
pour agir. En matière d’absence, toute personne intéressée a qualité pour saisir le juge pour la
gestion des biens du présumé absent ou pour la déclaration d’absence.

105
Section 2- les formes de l’action en justice

L’action en justice se manifeste concrètement par la saisine du juge. Cette saisine du


juge se manifeste par l’introduction d’une demande en justice. Elle peut se définir comme l’acte
juridique par lequel une personne soumet une prétention à un juge. Il existe plusieurs sortes de
demandes selon la forme (I) et selon le fond (II).

II- La forme des demandes

Le juge peut être saisi de la prétention des parties par une assignation, une comparution
volontaire, une requête ou des conclusions écrites dans certains cas.

A- L’assignation

L’assignation est un exploit de commissaire de justice qui permet de convoquer un


adversaire devant une juridiction. Il prend le nom de citation directe en matière pénale. Selon
l’article 32 nouveau du CPC, l’assignation est le mode principal d’introduction des instances
en matière civile, commerciales ou administrative. L’article 33 du CPC donne des indications
sur les mentions obligatoires que doit contenir l’assignation, l’article 34 nouveau du CPC, le
délai qui doit exister entre le jour de l’assignation et celui de la comparution (en principe 8 jours
au moins). Quant aux articles 247 et suivants du CPC, ils donnent des indications sur la remise
des exploits.

B- La comparution volontaire des parties

C’est une solution que le législateur accorde aux justiciables face au caractère solennel
et couteux de l’assignation. Ainsi selon l’article 39 du CPC, les parties peuvent, sans assignation
ni requête se présenter volontairement devant la juridiction compétente, pour y être jugées, sous
réserve de satisfaire aux obligations prévues par l’article 43 (sauf hypothèse de l’assistance
judiciaire la consignation d’une somme suffisante pour garantir le paiement des frais
notamment). En réalité la comparution volontaire des parties est rarement utilisée, sans doute à
cause de l’ignorance de cette voie et des modalités de cette comparution. En effet selon les
termes de la loi, cette comparution des parties (en litige ?!!!!) semble conjointe. Si une telle
comparution des parties n’est pas impossible, il faut bien admettre qu’elle demeure très rare en
pratique.

C- La requête

C’est une demande écrite ou orale présentée au greffe de la juridiction compétente pour
connaître de l’affaire, par le demandeur en personne ou par son représentant ou mandataire. Ce
n’est donc pas un acte solennel comme l’assignation, mais elle ne dispense pas du paiement des
frais de greffe. Son domaine est beaucoup plus réduit que celui de l’assignation, car elle n’est
possible que dans les affaires personnelles (droit des personnes et de la famille), ou dans les
affaires à caractère patrimonial dont l’intérêt n’excède pas 500 000 FCFA (article 32, alinéa 2
du CPC).

106
D- Les conclusions écrites

Quand une instance est déjà en cours et que certaines personnes veulent y intervenir, la
jurisprudence ivoirienne admet qu’elle puisse le faire par simples conclusions écrites.

Ces différentes modes de saisine des juridictions revêtent différentes modalités au fond.

IV- Le fond des demandes

Selon le fond des demandes, on peut citer la demande initiale qu’on oppose aux
demandes incidentes.

A- La demande initiale ou demande introductive d’instance

La demande initiale est la demande qui entame, ouvre pour la première fois l’instance.
Elle émane nécessairement du demandeur. On l’appelle aussi demande principale qu’on oppose
aux demandes incidentes.

B- Les demandes incidentes

1- La demande additionnelle

Elle provient du demandeur initial, c’est-à-dire de l’auteur de la demande initiale. Elle


lui permet d’en rajouter, c’est-à-dire de modifier l’objet de sa demande soit en plus soit en
moins. Toutefois l’article 100 du CPC apporte des restrictions quant aux modalités d’une telle
demande. Elle doit être fondée sur une cause qui existait au moment de l’introduction de la
demande initiale et doit être introduite en principe avant la clôture de l’instruction.

2- La demande reconventionnelle

C’est une demande qui provient du défendeur, qui ne se contente pas seulement
d’assurer sa défense, mais réclame aussi un avantage particulier. L’article 101 du CPC donne
les conditions de recevabilité d’une telle demande. Ex : une partie à qui l’on exige l’exécution
de ses obligations contractuelles, peut demander la nullité ou la résolution du contrat.

3- La demande en intervention

Elle émane des tiers qui sont intéressés à une instance, à une action déjà engagée. Cette
intervention peut être volontaire ou forcée (le juge ou l’une des parties oblige le tiers à intervenir
dans le débat : article 103 et suivants). Le Ministère Public a également la faculté d’intervenir
dans certaines affaires (article 105 CPC). Le CPC limite les modalités d’une telle intervention
(articles 104, 167 du CPC).

Section 3- le déroulement de l’instance

L’instance "se présente comme une série d’actes de procédure, allant de la demande en
justice jusqu’au jugement ou à l’abandon de la prétention par un désistement". L’instance est
la mise en œuvre de l’action en justice. Un rapport d’instance est créé entre les parties qui

107
deviennent des plaideurs. Nous étudierons successivement les règles applicables à l’instance et
son issue : le jugement.

I- Les principes directeurs de l’instance

Le déroulement du procès est commandé par quelques grands principes :

A- Le principe de la neutralité du juge

Ce principe se manifeste à divers niveaux :

• Au niveau de la saisine du juge : Ce principe signifie tout d’abord que le juge ne se saisit
jamais d’office. Il tranche les litiges qui lui sont soumis soit par le ministère public, en matière
pénale, soit par les parties pour toutes les autres matières.

• Au niveau du déroulement de la procédure : Il signifie également que les parties ont la


direction de la procédure. Il appartient aux parties d’accomplir les actes de procédure dans les
formes et délais requis par la loi. Le juge doit rester neutre et veiller au bon déroulement de
l’instance"

• Au niveau de l’objet et la cause du litige : toujours sur le fondement du principe de la neutralité


du juge, les parties ont aussi le choix de l’objet et de la cause sur laquelle elles fondent leur
action.

L’objet est ce qui est réclamé et la cause est le fondement de cette prétention. Le juge ne peut
pas statuer "ultra petita" ou "extra petita :

Le juge ne peut ni ajouter de nouveaux faits à ceux dont il est saisi, ni leur appliquer d’autres
règles que celles qu’invoquent les parties.

B- Le principe du contradictoire

C’est un principe fondamental gouvernant le procès. Les impératifs de justice


nécessitent le respect des droits de la défense.

En effet, chacune des parties doit être en mesure de se faire entendre afin d’exposer son
point de vue et discuter les éléments qui peuvent être utilisés pour aboutir à la solution du litige.
C’est pourquoi les communications doivent être faites "en temps utile". Selon l’article 144 du
CPC sont contradictoires, les décisions rendues contre les parties qui ont eu connaissance de la
procédure soit parce que l’acte introductif d’instance leur a été signifié ou notifié à personne,
soit parce qu’elles ont comparu en cours de procédure, soit elles–mêmes soit par leurs
représentants ou mandataires, soit parce qu’elles ont fait valoir à un moment quelconque de la
procédure leurs moyens. Sont par défaut les décisions rendues hors ces cas visés.

Le CPC a organisé une procédure par défaut pour éviter que l’adversaire ne se dérobe.
Des précautions ont été prises pour garantir les droits de la partie défaillante. On lui permet si
le jugement a été rendu en son absence de faire opposition : le même tribunal sera saisi pour
que l’affaire soit à nouveau jugée dans son entier, après débat contradictoire. Le délai pour faire
opposition est en principe de 15 jours.
108
C- Le principe de la publicité

La justice doit être rendue publiquement pour permettre à chacun d ‘apprécier la loyauté
d e la procédure (art. 138 du cp civile). Les audiences doivent se dérouler publiquement.
Toutefois pour sauvegarder la vie privée dans certains cas, la publicité est écartée par la loi.

D- Le principe de la collégialité

Le principe de collégialité signifie que la décision de justice doit être rendue par un
collège de juges statuant à la majorité. Ce principe qui était déjà appliqué dans les juridictions
de second degré (cour d’appel) et dans la juridiction suprême (cour suprême), est rendu
obligatoire dans les tribunaux de 1ère instance par la loi du 23 décembre 1999. Ce principe est
un garant d’une justice impartiale, équitable, indépendante et permet de diminuer les risques de
mauvais jugements. Toutefois ce principe n’est pas encore totalement appliqué dans les sections
détachées des tribunaux, où un seul juge statue.

II- Le jugement

Après avoir précisé la notion de jugement nous en étudierons la force.

A- Notion de jugement

Le mot jugement a un sens large et un sens restreint. Au sens large, le mot "jugement"
désigne toute décision judiciaire. Toutefois, il faut constater que les décisions émanant d’une
juridiction ne sont pas toutes des jugements. Il convient de distinguer les jugements contentieux,
les actes d’administration et les décisions gracieuses. Seuls les jugements contentieux sont de
véritables actes juridictionnels.

Les actes d’administration judiciaires sont destinés à assurer le bon fonctionnement du


service de la justice. Par exemple une date d’audience est un acte de pure administration
judiciaire. Les décisions gracieuses se caractérisent par le fait qu’elles ne tranchent pas un litige.
Il s’agit, par exemple d’ordonner la rectification d’un acte de l’état civil, etc...

Entre les jugements, il existe une classification courante par laquelle on oppose les
jugements déclaratifs aux jugements constitutifs. Les actes déclaratifs se bornent à constater
une situation juridique qui existait antérieurement à la demande en justice. Ainsi, est déclaratif
le jugement qui reconnaît le droit de propriété d’un des plaideurs. Le juge se borne à reconnaître
un état de droit qui existait déjà mais qui était contesté.

Les jugements constitutifs sont ceux qui créent un état de droit nouveau, une situation
nouvelle. Ainsi est constitutif de droits, le jugement qui prononce un divorce. Le juge
transforme l’état des plaideurs : ils passent de l’état de personnes mariées à l’état de personnes
divorcées. Les jugements constitutifs créent des droits pour l’avenir.

Cette opposition entre les jugements déclaratifs et les jugements constitutifs présente
une grande importance puisqu’ils n’ont pas la même autorité. En effet, les jugements déclaratifs
n’ont qu’une autorité relative, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être opposés qu’aux parties au litige
et à leurs ayants cause. Les tiers peuvent ignorer le jugement : il ne leur est pas opposable. Au

109
contraire, les jugements constitutifs ont la plupart du temps une autorité absolue. Cette solution
est indispensable : le divorce des deux époux doit être opposable aux tiers. L’opposabilité peut
néanmoins présenter des inconvénients pour les tiers qui peuvent ignorer l’existence du
jugement constitutif. Aussi, le législateur a souvent organisé une publicité afin de renseigner
les tiers. Ainsi, pour le divorce, il n’est opposable aux tiers que s’il est mentionné sur les
registres de l’état civil. Tant que cette publicité n’est pas faite, les tiers sont en droit d’ignorer
cette situation nouvelle.

Théoriquement le jugement existe dès qu’il est prononcé à l’audience mais il nécessite
une rédaction pour son exécution ou l’exercice des voies de recours. Le jugement doit contenir
un certain nombre de mentions énumérées par l’article 142 du CPC.

On appelle minute l’original du jugement rédigé par le juge ou sous sa direction par le
greffier et déposé au greffe.

La grosse est une copie de l’original revêtue de la formule exécutoire que le greffier en
chef délivre à la partie gagnante.

Au sens strict le jugement désigne une décision rendue par une juridiction de premier
degré : tribunal de 1ère Instance, section de tribunal. Les décisions rendues par une cour
d’appel, ou une juridiction suprême : la cour de cassation, le Conseil d’Etat, le Conseil
Constitutionnel, la CCJA etc. sont des arrêts.

B- Force du jugement

Le jugement va acquérir l’autorité de la chose jugée. Quand le litige a été définitivement


tranché, il va acquérir une force particulièrement importante. Cela signifie que ce qui a été
définitivement jugé ne peut plus être remis en cause. Il convient de circonscrire le domaine de
l’autorité de la chose jugée avant d’en examiner les conditions.

1- Le domaine de l’autorité de la chose jugée

L’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux décisions définitives. Une décision est
définitive lorsqu’aucune voie de recours n’est plus possible. Un tel jugement acquiert l’autorité
de la chose jugée.

Le jugement susceptible d’un recours acquiert force jugée à l’expiration du délai du


recours si ce dernier n’a pas été exercé dans le délai. S’il n’y a aucune voie de recours, le
jugement est immédiatement définitif et acquiert l’autorité de la chose jugée. S’il est susceptible
d’une voie de recours, il ne devient définitif et acquiert l’autorité de la chose jugée qu’à
l’expiration de ce délai.

L’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux décisions contentieuses, quelle que soit
la juridiction qui a tranché le litige et elle empêche le réexamen de l’affaire.

110
2- Les conditions de l’autorité de la chose jugée

- Il faut qu’il y ait identité d’objet. Cela signifie que la chose demandée doit être la même. Si la
demande n’est pas la même, le juge peut donc l’examiner sans se heurter à l’autorité de la chose
jugée. Ainsi après avoir échoué dans une demande en divorce, le juge peut examiner une
demande en séparation de corps.

- Il faut qu’il y ait identité de cause. Cela signifie que la demande doit être fondée sur la même
cause, sur le même fondement juridique pour que puisse être opposée l’autorité de la chose
jugée. Si la cause n’est pas la même, le juge peut examiner la demande.

- Il faut qu’il y ait identité des parties. Cela signifie que l’autorité de la chose jugée est, en
principe, relative : La chose jugée n’est opposable qu’aux parties aux procès. Pour invoquer
l’autorité de la chose jugée, il faut en principe que "la demande soit entre les mêmes parties et
formée par elles ou contre elles en la même qualité".

Conclusion : La chose jugée, le défaut d’intérêt, le défaut de qualité, la prescription, sont des
fins de non-recevoir : elles interdisent au juge d’examiner la demande.

EXERCICES

1- Qu’est-ce qu’une juridiction ?

2- Quelles sont les juridictions suprêmes dans l’ordre interne ivoirien ?

3- Quelles sont les règles de détermination de la compétence territoriale des juridictions


ivoiriennes ? Quelle est la nature de ces règles ? Justifie votre réponse.

4- Qu’est- ce qu’un magistrat du siège ? Qu’est-ce que la magistrature debout ? A quels


principes sont-ils soumis ?

5- Quand ont été créés les tribunaux du commerce ? Et quelle est leur compétence ?

6- Qu’est-ce que la CCJA ? Dans quels domaines est-elle est compétente ?

111

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