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« Sur la terre des vivants, le Droit n’est pas le lieu des purs esprits.

En
aucune de ses parties, il n’est angélique. Quand il a fallu désigner ses sujets
d’origine, il les a tout naturellement nommés personnes physiques : êtres qui
viennent à la personnalité juridique1 en s’incarnant 2 ».

Cette étude de l’introduction à l’étude du droit a trait aux étapes


procédurales menées par des personnes.

La notion de la personne est à la fois sujet de droit et « moteur » de


l’action. Une action qui est le droit reconnu aux particuliers de s’adresser à la
justice pour obtenir le respect de leurs droits et de leurs intérêts légitimes. La
personne représentera le point de départ de cette étude.

Donc, il va falloir déterminer précisément - dans un premier temps - la


notion de personne. A partir de là, on peut poser des questions : Qui est une
personne ? Jusqu’à quand est-on une personne ? A partir de quand reconnaît-on
l’existence d’une personne ? Quand cesse-t-on d’être une personne ? La
personne est un sujet de droit. Qu’est-ce qu’un sujet de droit ?

En principe, le Droit protège toute personne physique. Les droits de la


personnalité sont reconnus à chacun et sont immuables.

L’action est le droit reconnu à toute personne pour ester en justice3. La


personne peut être physique comme elle peut être morale. Pour autant, nous
nous intéressons ici plus à la personne physique qui est le noyau de la société.

1
Selon SALEILLES R., "De la personnalité juridique" ; Histoire et théories ; Vingt-cinq leçons
d’instruction a un cours de droit civil comparé sur les personnes juridiques, 2 ème éd. La
mémoire du droit, 2003, la personnalité juridique comprend deux composantes, la capacité de
jouissance et la capacité d'exercice.
Voir aussi article 207 sur la capacité de jouissance et article 208 sur la capacité d’exercice du
Code de statut personnel marocain :
Article 207 : La capacité de jouissance est la faculté qu’a la personne d’acquérir des droits et
d’assumer des devoirs tels que fixés par la loi. Cette capacité est attachée à la personne durant
toute sa vie et ne peut lui être enlevée.
Article 208 : La capacité d’exercice est la faculté qu’a une personne d’exercer ses droits
personnels et patrimoniaux et qui rend ses actes valides. La loi fixe les conditions d’acquisition
de la capacité d’exercice et les motifs déterminant la limitation de cette capacité ou sa perte.
2
CORNU G., Préface à la thèse de DUBOIS P., "Le physique de la personne", ECONOMICA,
Coll. Droit civil, Etudes et documents, 1986.
3
Idem, article 121.
Il n’est pas douteux que la société est composée d’individus. S’il n’y
avait pas d’individus, il n’y aurait pas de société ; le fait se comprend de lui-
même. La société elle-même est bâtie par la personne physique. Ainsi, lorsque
cette dernière est touchée dans sa dignité, dans sa sécurité, dans sa moralité, la
société s’affaiblira, ses fondements seront ébranlés et sa construction dans sa
globalité sera mise à mal. Par là, plusieurs questions se posent sur cet important
noyau de la société et qui n’est autre que la personne physique.

Pour autant la personne est elle définit par le droit ? Qu’est-ce qu’une
personne selon le droit ?

Le mot « personne » est la traduction du mot latin « persona » qui


désignait originairement le masque dont se servaient les acteurs pour jouer sur
scène. Ce masque était disposé de manière à rendre la voix plus retentissante
« vox personabat », d’où le nom de « persona » donné au masque.

Plus tard, on employa le mot personne pour désigner le rôle, ou tout au


moins le personnage que jouait l’acteur, ce rôle, ce personnage, était souvent
figuré sur le masque. Finalement, le vocable persona désignera l’individu lui-
même envisagé du point de vue du rôle joué dans la société4.

Cette explication étymologique - sur laquelle s’accordent beaucoup


d’auteurs5 - nous aide à comprendre la signification que donne le droit au mot
« personne »6.

Le droit va, en quelque sorte, distribuer les rôles aux personnes qu’il
souhaite voir entrer sur la scène juridique. Il va donc attribuer aux êtres, qu’il
souhaite voir entrer sur cette scène, les prérogatives qui vont venir caractériser
la personne.

4
LABBÉE X., "Condition juridique du corps humain : avant la naissance et après la mort ",
Presses Universitaires du Septentrion 2012, p. 28.
5
Voir par exemple : ACCARIAS C., "Les personnes", Précis de droit romain, Paris 1882, p. 81
LACANTINERIE B., "Droit civil", 10ème éd., Tome I, p. 70 et suiv.
6
MAZEAUD H., "Les personnes", 5ème éd., Coll. Montchrétien, Tome I, p. 470.
Les personnes, disent les auteurs7, sont les êtres envisagés « comme
pouvant être sujets actifs ou passifs de droits », ce sont des « êtres qui jouissent
de la personnalité juridique »8. Parce qu’un être est titulaire de droits, parce
qu’il est, selon l’expression de ZACHARIAE9 « capable d’obliger les autres
envers lui, et de s’obliger envers les autres », on dira qu’il est sujet de droit. Il
s’agit d’une communication juridique entre deux -corps- sujets du droit.

Cependant, comment définir ce corps humain avant la naissance et


après la mort ?

Les formidables progrès de la science ont contraint le juriste à définir le


corps humain avant la naissance et après la mort.

Dans la mesure où il n’existe aucune définition juridique du corps


humain avant la naissance et après la mort 10, il nous faut avoir recours aux
distinctions classiques opérées par le droit.

Le Code civil français est divisé en trois livres : le premier est consacré
aux personnes, la seconde traite des biens et des différentes modifications de la
propriété. Le troisième livre est relatif aux différentes manières d’acquérir la
propriété. La distinction des personnes et des biens se retrouve également en
droit pénal11.

7
MAZEAUD H., "Les personnes", précité et de façon générale WEILL, "Les personnes", p. 6
et s.
8
CORNU G., "Vocabulaire juridique", Association Henri Capitant, éd. PUF, 10ème éd., 2014.
9
BERCHON P., " La condition juridique des morts", Thèse Toulouse, 1983, p. 25.
10
La personnalité juridique s’éteint avec le décès de la personne. On peut avoir un doute sur
l’existence de la personne : est-elle décédée ou toujours en vie ?
Le décès : Il n’y a pas définition légale du décès. Le décès peut être constaté, et la date du
décès est souvent facile à déterminer. Il faut déterminer la date mais aussi l’heure du décès. Les
progrès de la médecine font que parfois, il peut être difficile de déterminer la mort de la
personne.
On n’a pas de définition légale du décès, sauf avec l’article 671-7 sur le prélèvement d’organe.
On ne prend les organes que sur les personnes décédées. Il a fallu déterminer des conditions
précises pour dire qu’une pers est décédée. Ici, on a une procédure : absence de conscience, des
réflexes cérébraux, d’activité motrice, pas de respiration spontanée. Il faut faire 2 électro-
encéphalogrammes à 4 heures d’intervalle pour déterminer la date du décès.
11
LABBÉE X., "Condition juridique du corps humain : avant la naissance et après la mort",
Presses Universitaires du Septentrion 2012, p. 15.
L’homme est considéré comme une personne selon le droit depuis sa
naissance jusqu’à sa mort. Faut-il pour autant admettre que la personnalité
commence avant la naissance, et se prolonge au-delà de la mort ? Et quand
bien même cela serait, peut-on admettre que le corps de la personne est, avant
la naissance et après la mort, considéré comme la personne ? Le corps est-il
synonyme de personne ?

Pour répondre à toutes ces questions, nous devons préalablement


rappeler la définition juridique de la personne physique, et s’attardant sur les
conséquences qu’implique cette définition sur les sujets du droit.

La personne humaine12, sujet de droit13 constitue un thème majeur de la


réflexion juridique. Il s’agit d’un de ces thèmes qui a su attirer
immanquablement la pensée de plusieurs philosophes14. La personne humaine
est certainement aujourd’hui au centre de bien des contradictions. Elle est à la
fois menacée et mieux protégée. En droit comparé, à peu près tous les systèmes
rattachent directement l’apparition de la personnalité juridique et donc de
l’ensemble complexe des droits qui s’y attache, à la naissance15.

12
BIOY X., "Le droit à la personnalité juridique ", RDLF 2012, chron. n° 12 : "La
personnalité juridique se distingue donc d’une autre notion, elle aussi tout autant juridique,
qu’est la personne humaine. Terme utilisé depuis une soixantaine d’années pour désigner le
sujet des droits fondamentaux, ceux de tout être humain, l’usage de la notion de personne
humaine met ce sujet juridiquement en situation -d’être un corps- , d’entretenir des relations
sociales, d’être un corps socialement situé ". C’est l’expression qu’utilise le Conseil
constitutionnel dans sa décision de 1998 relative au Traité de Rome (Cour pénale
internationale) : La France peut conclure des engagements internationaux en vue de favoriser la
paix et la sécurité du monde et d’assurer le respect des principes généraux du droit public
international. Les engagements souscrits à cette fin peuvent prévoir en particulier la création
d’une juridiction internationale permanente destinée à protéger les droits fondamentaux
appartenant à toute personne humaine.
13
Une chose n’est pas un sujet de droit, une chose ne peut pas avoir des droits et des
obligations, une chose ne peut plaider un procès, par là, dire que la personne physique est une
personne humaine cache un but, c’est que toute personne physique n’est pas une personne
humaine, l’animal est considérée comme une chose, juridiquement, considérées comme des
« choses » : c’est pourquoi on peut en être propriétaire (c’est-à-dire exercer des droits sur eux).
Dans ce sens, le journal Le Figaro a traité le même sujet sous le titre – FERRY L : « Les
animaux ne sont ni des choses ni des humains », par TREMOLET DE VILLERS V., Publié le
15/04/2014 à 18:36 : « Dans les traditions philosophiques, quel est le rang de l’animal entre
l'être et la chose? »
Ce sujet est d’une très grande actualité tant au niveau législatif que
jurisprudentiel. S’agissant de l’être humain en devenir, une question est à
évoquer et concerne la protection de sa vie. Nous accompagnerons également,
dans cette étude, la personne physique depuis sa naissance jusqu’au terme de
l’exercice de son droit d’ester en justice.

FERRY L : C’est toute la question, et elle est cruciale, d’une profondeur philosophique
abyssale. Les animaux ne sont ni des choses, comme le prétendait Descartes de façon
aberrante, ni non plus des humains, quoi qu’en disent les militants fondamentalistes qui
discréditent leur propre cause par leurs délires «zoophiles». La preuve? Les animaux n’ont pas
de morale, d’éthique et ils n’enterrent pas non plus leurs morts, ce qui dénote aussi une absence
d’interrogation métaphysique. On a déjà vu des humains dépenser des trésors d’énergie pour
sauver une baleine, on n’a jamais vu, sauf dans les contes de fées, une baleine en faire autant
pour eux. Ce sont en revanche, comme nous, des êtres sensibles, susceptibles d’éprouver du
plaisir et de la peine et même, pour les mammifères supérieurs, de développer une intelligence
et une affectivité considérables. C’est cela qu’il faut prendre en compte et respecter, sans pour
autant les «humaniser». Le problème, c’est que le cartésianisme a marqué profondément la
tradition française avec sa fameuse théorie des «animaux machines». DESCARTES pensait
sérieusement que les animaux n’étaient que des automates, des machines ultrasophistiquées,
sans doute, mais quand même des machines sans affect. Par exemple, il déclare tranquillement
que les hurlements que pousse un animal pendant une vivisection n’ont pas plus de
signification que le «timbre d’une pendule». C’est évidemment absurde, et aucun scientifique
aujourd’hui ne défend plus cette thèse. Déjà Maupertuis objectait à DESCARTES que si les
animaux étaient vraiment des automates, personne ne s’amuserait à être sadique avec eux. On
n’a jamais vu personne, disait il, torturer une horloge alors qu’on a souvent vu des enfants ou
même des adultes prendre plaisir à torturer une bête...
14
La notion de personne dans l’éthique de SPINOZA et HOBBES : « Ils ont cherché à fonder la
philosophie politique sur l’étude de la personne humaine telle qu’elle est — et non telle qu’elle
devrait être comme le faisaient les Anciens dont l’objet est de la réalisation de la perfection
humaine, ne réduit pas l’homme à une chose parmi les choses ».
15
La plupart des droits exigent aussi une naissance vivante et, en outre, la viabilité. Il en est
ainsi en droit français (art. 725, 906, C.C : code civil français) et en droit québécois (art. 608,
838 C.c.B.c : Le Code civil du Bas-Canada est une ancienne loi québécoise qui régissait le
droit privé du Québec). La détermination de la viabilité a cependant parfois posé certains
problèmes : A. C. MONETTE, (1928) 66 C.S. 291.

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