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PARTIE 2 : LES DROITS SUBJECTIFS

TITRE 1. LES TITULAIRES DES DROITS SUBJECTIFS

Seuls sont titulaires de droits subjectifs les personnes au sens juridique


du terme, c’est-à-dire des sujets de droit. Elles ont la personnalité
juridique, elles sont aptes à être titulaire de droit et assujettis à des
obligations. Cette notion de personne a été étendue au-delà des seuls
être humains. On peut distinguer les personnes physiques et les
personnes morales.

CHAPITRE 1. LES PERSONNES PHYSIQUES

Ce sont les être vivants et plus précisément les êtres humains. Hypothèse des
animaux, cette question est discutée. Les animaux ne sont pas des personnes
au sens juridique du terme. Ce sont des objets de droit, des biens, des choses.
Un animal ne peut pas hériter, ne peut pas être condamné pour avoir tué
quelqu’un… Ils sont considérés comme des meubles. Pour autant, il ne s’agit
que d’une catégorie juridique. C’est un bien protégé.
Article 515-14 reconnait que les animaux sont des êtres vivants dotés de
sensibilité.

Section 1. L'existence de la personne physique


Il s’agit de se demander à partir de quel moment sommes-nous des
personnes juridiques et jusqu’à quand?

§1. Le début de la personnalité juridique


La question qui se pose est à quel moment commence la personne
juridique? Dès la conception? Ou au moment de la naissance?

A- Le principe
La personnalité juridique ne commence qu’à la naissance, pendant tout
le stade de la vie in utero le foetus n’est pas une personne pour le droit.
La condition de la naissance est une condition nécessaire mais pas
suffisante. Il faut naitre vivant et viable. Ce sont des conditions
cumulables.
- Naitre vivant: respirer
- Naitre viable: avoir une aptitude à la vie, pouvoir survivre hors le ventre
de la mère.
Ce n’est qu’à ces conditions que l’enfant va devenir une personne
juridique.
La naissance est un fait juridique qui va produire des effets juridiques.
La loi fait produire à ces faits des effets juridiques. La naissance doit
être déclarée à l’état civil dans les 5 jours.
Sont exclus de la catégorie de personnes les embryons et les foetus (ce
sont des objets de droit juridiquement parlant). Ce sont des objets
protégés et qui doivent être protégés. La question qui est la plus posée,
en cas d’accident de la route qui provoque la mort du foetus, est-ce un
homicide? Le droit français et la CEDH ont considéré qu’il ne s’agissait
pas d’un homicide.

B - Le tempérament
Il s’agit de l’hypothèse de l’enfant qui est seulement conçu. Si l’enfant
est seulement conçu peut être considéré comme né s’il va de son
intérêt. L’hypothèse classique est l’hypothèse de la succession. L’enfant
peut-il hériter de son père alors qu’il n’est pas encore né? Ceci est dans
son intérêt donc on va lui permettre d’hériter, Ce principe produira
pleinement ses effets à la naissance de l’enfant, à la condition que
l’enfant naissent vivant et viable.

§2. La fin de la personnalité juridique


La personnalité juridique prend fin à la mort de la personne physique. Il
n’existe plus de mort civile comme au Moyen-Age. La mort est un fait
juridique, la loi va faire produire par ce fait des conséquences juridiques.
- Fin de la personnalité juridique, la personne n’existe plus, il faut
déclarer le décès à l’état civile
- Dissolution du mariage
- Succession, transmission des biens aux héritiers
- Passage de l’état de personne pour le droit à l’état d’objet, de bien
(chose particulière qui doit être traité avec respect: Art 16-1-1 du
Code Civil relatif au respect du corps humain ne cesse pas avec la
mort
Il y également des questions qui sont plutôt liés à la science qu’au droit.
Des critères sont posés par le Code la santé publique, on va considérer
que trois critères doivent être réunis: absence totale de conscience,
abolition des réflexes du tronc cérébral et absence de ventilation
spontanée, il faut également deux électroencéphalogrammes plats.

§3. Les incertitudes sur l’existence de la personne

Incertitudes difficile pour question du mariage et la gestion des biens.


Deux hypothèses sont prévues:
- Absence (pas de nouvelles, pas d’éléments qui permettent de dire si la
personne est vivante ou décédée) - il s’agit d’une situation d’attente.
- Disparition (éléments qui laissent à penser que la personne est
décédée) - on va pouvoir plus rapidement arriver à une déclaration de
décès.
Section 2. L’identification de la personne physique
Etre une personne pour le droit signifie qu’on peut agir en justice, avoir
des biens, se marier…
Pour cela il faut pouvoir être identifié par le droit, c’est-à-dire
individualisé des autres personnes. Il y a certains critères: nom, prénom,
sexe, domicile, nationalité. Ces différents critères vont être organisés
dans le cadre de l’état civil, élément qui réuni l’ensemble des qualités de
la personne. Permet d’identifier les personnes. Il y a ces différents
éléments et on va ajouter d’autres événements qui entourent la vie
(naissance d’enfants, mariage…). Cet état des personnes est
indisponible. Il y a un principe d’indisponibilité de l’état des personnes,
on ne peut pas en disposer, on ne peut pas prêter, abandonner, vendre
son état civil. En principe on ne peut pas le changer, mais il y a des
exceptions (mariage, changement de nom, domicile…). Il y a différents
types de changement:
- rectification de l’état civil: réparer les erreurs initiales (faute
d’orthographe dans le prénom…) - rétroactivité
- Modification de l’état civil: pas de rétroactivité

§1. Le sexe
C’est l’Article 57 du Code Civil qui prévoit que l’acte de naissance de
l’enfant doit contenir le sexe. Il s’agit d’un critère d’identification qui va
être noté sur la majorité des documents administratifs. La question qui a
pu être discuté est le changement de la mention du sexe à l’état civil
dans le cadre du transsexualisme. Autrefois considérée comme une
maladie mentale, aujourd’hui
La Cour de cassation à l’origine a refusé la rectification de l’état civil sur
le fondement de l’indisponibilité de l’état civil. La France a été
condamnée par la CEDH sur le fondement de l’atteinte à la vie privée. Le
raisonnement de la CEDH est le suivant: une personne transsexuelle qui
adopte l’apparence du sexe opposé, à chaque fois qu’elle présente une
pièce d’identité, doit révéler son transsexualisme.
La France s’est inclinée par deux arrêts de l’Assemblée Plénière. Elle
pose certains critères, quatre conditions:
- Reconnaissance médicale du transsexualisme
- Opération chirurgicale réalisée
- Apparence physique transformée
- Comportement social transformé
Depuis les années 1990s il y a eu un changement. Le législateur s’est
saisi de la question dans la loi Justice du 21e siècle de 2016, il a allégé
ces conditions et notamment sur l’exigence d’opération chirurgicale,
cette condition par conséquent a été abandonné. Art 61-5 et suivant du
Code Civil. On est sur une réunion de faits qui justifie le changement de
sexe.
L’article 61-6 précise que le fait ne pas avoir subi une opération
chirurgicale n’est plus un motif légitime pour le refus de changement de
sexe.

§2. Le nom et le prénom


Il s’agit de l’appellation qui sert à désigner une personne dans sa vie
familiale et dans sa vie en société. La composition est un nom de famille
et un prénom obligatoirement.

A - Le nom de famille
L’attribution du nom de famille était auparavant forcément le nom du
père, ce qui est contraire au principe d’égalité. La loi du 4 mars 2002 a
modifié les règles d’attribution du nom de famille. Aujourd’hui il y a une
liberté de choix des parents: si l’affiliation est établit simultanément des
deux cotés les parents ont le choix d’attribuer à l’enfant le nom du père,
le nom de la mère ou bien les deux dans l’ordre qu’ils souhaitent.
Cependant si les parents ont déjà deux noms ils ne peuvent en choisir
qu’un seul. Si les parents n’arrivent pas à se mettre d’accord, l’enfant
prendra les deux noms dans l’ordre alphabétique. Si l’enfant est d’abord
reconnu par un des deux parents, l’enfant prendra le nom de celui qui l’a
reconnu en premier. Mais les parents peuvent le changer au moment de
la deuxième filiation. Une fois qu’un nom a été décidé, il vaut pour tous
les enfants de la fratrie.
Les orphelins sont pupilles de l’Etat, l’officier de l’état civil choisit trois
prénoms (les deux premiers sont le prénom et le troisième le nom).
On parle d’immutabilité du nom de famille. En principe on ne peut pas
changer de nom, mais ce n’est pas un principe absolu:
- Lorsqu’il y a un changement de filiation (dans l’hypothèse d’une
adoption): adoption simple (on garde le nom de la famille d’origine) et
adoption plénière (on se voit attribuer le nom de l’adoptant)
- Indépendamment de toute hypothèse d’adoption, on peut changer de
nom (prévu à l’Art 61 du Code Civil), s’il y a un intérêt légitime: si le
nom risque de s’éteindre…
- Hypothèse de francisation du nom (demande de nationalité française):
afin de favoriser l’intégration.
- Dans le cadre du mariage, le nom de l’époux peut être utilisé en tant
que nom d’usage de l’épouse

Il faut mettre en place une procédure administrative. La demande est


adressée au garde des Sceaux qui peut demander l’avis du Conseil
d’Etat. Le changement est autorisé par décret et publié au journal
officiel.
B - Le prénom

Il s’agit d’un autre critère d’identification qui se surajoute au nom de


famille. Les prénoms sont choisis par les parents. Les parents attribuent
au moins un prénom. Les parents peuvent donner plusieurs prénoms,
selon les textes il n’y a pas de limite mais la pratique veut qu’on en
donne moins de quatre. Il y a un ordre au moment de dresser l’acte de
naissance, cet ordre devra être conservé pour tout autre document
administratif. Le premier prénom est le prénom usuel. Le choix n’est pas
totalement libre, c’est l’officier de l’état civil qui peut avertir le procureur
de la République s’il considère que le choix des prénoms est de nature à
porter atteinte au droit des tiers ou à nuire à l’enfant. On a le même
principe d’immutabilité quant au changement de prénom. On ne peut pas
changer de prénom mais on a le même tempérament à ce principe que
pour le nom:
- hypothèse de la rectification de l’état civil (cette mesure sera utilisée
dans l’hypothèse d’un changement de sexe ou bien dans l’hypothèse
de l’adoption ou de la francisation dans le processus d’acquisition de
la nationalité française)
- Intérêt légitime à changer de prénom: il faut demander au juge des
affaires familiales.

Section 3. La capacité
Il y a deux ou trois éléments fondamentaux. La capacité juridique est
l’aptitude d’une personne à être sujet de droit et d’obligation. Ceci
découle de la personnalité juridique. La personnalité juridique est
abstraite alors que la capacité juridique est plus concrète. Tout etre
humain a la personnalité juridique mais tout être humain n’a pas
forcément la pleine capacité juridique (les enfants…). Les incapables au
sens juridique du terme sont les mineurs et les majeurs protégés (placés
sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice). Il ne s’agit pas d’une
incapacité absolue, totale (actes juridiques tels qu’acheter du pain…)

CHAPITRE 2. LES PERSONNES MORALES

Ce sont des personnes pour le droit. Ce ne sont pas des êtres humains:
groupements de personnes, groupements de biens, des instituions… mais ce
sont des personnes pour le droit. Ils existent juridiquement: ils ont un
patrimoine propre (société: en cas de difficulté financière, on paye les dettes
sur son patrimoine et non le patrimoine des dirigeants..).

Section 1. L'existence des personnes morales


Les personnes sont des entités qui peuvent être très différentes. Pour
opérer une classification on distingues les personnes morales de droit
public et les PM de droit privé.

§1. Les personnes morales de droit public

L’Etat est une personne pour le droit ainsi que ses différentes
émanations (régions, communes…). Il y a égalements les établissements
publics (hopitaux, université…).

§2. Les PM de droit privé

Les sociétés, les associations, les syndicats…

A quel moment une société… acquiert la personnalité morale? Pas au


moment de la naissance comme les individus. Il faut qu’une formalité
soit réalisée comme l’immatriculation pour les sociétés.

Section 2. Le statut des personnes morales

Les personnes morales doivent être identifiées comme les personnes


physiques. Il faut un nom, une dénomination sociale pour les sociétés
par exemple. Il faut un domicile également, le siège social pour une
entreprise. La nationalité va également être prise en compte.

La personnalité juridique permet aux personnes physiques d’exister


pleinement mais les personnes morales sont gouvernées par un principe
de spécialité, les personnes morales ont un objet, une mission à remplir,
ils n’ont droit de faire des actes que pour remplir cet objet, cette
mission. Les personnes morales peuvent engager leur responsabilité
civile (payer dommages et intérêts) et pénale (en cas d’infraction).

§1. Le début de la personnalité juridique

§2. Les éléments d’identification

§3. Le fonctionnement

§4. La fin de la personnalité juridique

Elle peut prendre différentes formes. Elle peut être volontaire, tenir à la
volonté de ses membres (mettre fin à une société). Elle peut arriver de
manière automatique, de plein droit (association qui organise un
événement). Elle peut également être judiciaire.
TITRE 2. LA CLASSIFICATION DES DROITS SUBJECTIFS

CHAPITRE 1. LES DROITS EXTRA-PATRIMONIAUX

Référence au patrimoine. Droits qui ont une valeur morale, droits


rattachés à la personne et leur caractéristique est qu’ils sont incessibles
(on ne peut pas les céder, les vendre), intransmissibles, insaisissables et
imprescriptibles (pas de date de péremption). C’est ce qu’on appelle les
droits de la personnalité.
Les deux sont issus du même texte (Art 9 du Code Civil qui évoque
expressément la vie privée mais c’est sur ce fondement que la
jurisprudence a reconnu l’existence d’un droit à l’image). Ce sont deux
droits qui peuvent se recouper, un même fait peut porter atteinte et à la
vie privée et à la vie privée.

Section 1. Le droit au respect de la vie privée


La source est l’article 9 du Code Civil. A cet article il faut ajouter l’article
8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Aucun de ces
textes défini la vie privée. Tout ce qui est vie personnelle, vie familiale
et intimité, vie sentimentale, état de santé … En sont exclus la vie
professionnelle et la situation financière. Toute personne a un droit au
respect de la vie privée. Cependant les personnes morales ne peut se
prévaloir de la vie privée. Il s’agit d’un droit qui va potentiellement se
heurter à d’autres droits comme le droit à l’information.
Pour pouvoir porter atteinte à la vie privée, il faut un motif d’actualité.
Les sanctions sont des sanctions civiles (dommages et intérêts, faire
supprimer la publication… ou des sanctions pénales (Art 226-1 du Code
pénal qui le prévoit).

Section 2. Le droit à l’image

Le fondement est l’article 9 du Code Civil, ce texte a été utilisé par les
juges pour créer ce droit à l’image. Il s’agit d’un droit jurisprudentiel. Le
principe est que pour utiliser l’image de quql’un, il faut une autorisation.
Il y a des exceptions, pour se passer de l’autorisation il faut que 4
conditions soient remplies:
- il faut que l’image soir prise dans un lieu public
- Image prise à l’occasion d’un évé d’actualité
- Ceci doit tjrs se faire dans le respect de la dignité de la personne
humaine.
Si au moins l’une de ces conditions n’est pas réunie, il peut y avoir des
sanctions civiles et sanctions pénales (45 000€ d’amende, 1 an
d’emprisonnement) lorsque la photo a été captée dans un lieu privé.

CHAPITRE 2. LES DROITS PATRIMONIAUX

Droits à caractère pécuniaires d’une personne. Le patrimoine est une notion


abstraite. Il s’agit d’un ensemble de biens mais pas seulement. Plus
précisément un ensemble d’actifs et de passifs d’une personne. L’actif est
ce que les gens possèdent en positif et le passif est la dette d’une
personne. Le patrimoine est une universalité des droits càd que le
patrimoine est une entité indépendante de la somme des éléments qui la
composent. Si on a un patrimoine vide, le patrimoine ne disparait pas.
L’universalité des droits signifie qu’il y a à la fois de l’actif et du passif alors
que l’universalité de fait signifie qu’il n’y a que le passif.

Toute personne a un patrimoine à partir du moment où il est une personne


au sens juridique (l’enfant qui vient de naitre, les personnes morales…). En
principe, les personnes n’ont qu’un seul patrimoine. Ce point est à nuancer
car on peut affecter une partie de son patrimoine à l’exercice d’une activité.
Les droits patrimoniaux sont cessibles (ils peuvent être vendus, cédés,
donnés, échangés…), transmissibles (au moment du décès on les transmet),
prescriptibles et saisissables (saisis pour rembourser dettes…).

Au sein des droits patrimoniaux on va distinguer les droits personnels et les


droits réels

Droits personnels: il s’agit d’un droit u’on a sur une personne, droit d’exiger
que la personne exécute une prestation (hypothèse de la dette).
Droits réels portent sur une chose, sur un bien. Le principal droit réel est le
droit de propriété.

Section 1. La classification des biens sur lesquels portent les droits


patrimoniaux

§1. La distinction entre les meubles et les immeubles

A. Les critères de la distinction


B. L’intérêt de la distinction
§2. Les autres qualifications
Section 2. Les principaux droits patrimoniaux
§1. Les droits personnels
§2. Les droits réels principaux

CHAPITRE 3. LA SOURCE DES DROITS

Distinction entre l’acte juridique et le fait juridique. Ce qui les réunit c’est le
juridique, les deux produisent des effets juridiques. La seule distinction est
le fondement. Dans l’hypothèse de l’acte juridique, la volonté fait naître des
effets juridiques, l’exemple classique est le contrat ou le testament. Dans
l’hypothèse du fait juridique, la volonté n’a aucune incidence sur la
production des effets juridiques, peu importe la volonté des individus, c’est
la loi qui fait produire des effets juridiques (la naissance, la mort, accident
de la route…).

Q° sur le paiement (conséquence très important sur la preuve selon le


montant). La Cour de cassation n’a jamais précisé s’il s’agissait d’un acte
ou d’un fait.

Section 1. L’acte juridique

Section 2. Le fait juridique


TITRE 3. LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS

Importance du problème de la preuve – Pour réclamer le respect d'un


droit, il faut évidemment démontrer la réalité de celui-ci : en apporter la
preuve. La question de la preuve présente donc une importance pratique
considérable. Suivant une constatation traditionnelle, il revient au même
qu'un droit n'existe pas ou qu'il ne puisse être prouvé : idem est non
esse aut non probari. La constatation est décisive – même si
l'impossibilité de prouver le contrat n'en compromet pas la validité : le
contrat valablement conclu, mais qui ne peut être prouvé contre celui
qui refuse de l'exécuter, restera inexecuté.
́

Objet de la preuve : distinction du fait et du droit. Le principe est que


l'objet de la preuve – ce qui doit être prouvé, notamment au cours d'un
procès – se limite aux faits générateurs du droit invoqué ; la reglè de
droit qui consacre celui-ci n'a pas à être démontrée par le plaideur : le
juge est présumé en avoir connaissance. Qu'une personne se prétende
creancier
́ d'un tel en vertu d'un contrat, il lui faut établir l'existence de
ce contrat ; elle n'a pas à faire la preuve de la loi qui fait produire au
contrat l'effet de droit recherché.

Exceptions. Cette délimitation de l'objet de la preuve n'a cependant pas


un caractère absolu. Il est deux types de règles dont la jurisprudence
laissait traditionnellement aux parties le soin d'établir l'existence, parce
que les règles considérées ne peuvent être regardées comme présumees ́
connues par le juge. Il s'agit :
– d'une part, des usages, dont la nécessaire notoriété ne peut équivaloir
à l'efficacité d'une publication officielle. Celui qui les invoque doit en
faire la preuve, par tous moyens (par témoins, par experts, ou encore, en
matière commerciale, par parères – certificats délivrés, notamment, par
les chambres de commerce et qui attestent l'existence de l'usage).
Toutefois, il est admis que le juge doit, le cas écheant,
́ faire état et se
recherche par voie d'expertise ou de consultation ;
– d'autre part, la loi étrangere,
̀ lorsqu'elle régit un litige qui se déroule en
France. On considérait traditionnellement que la présomption suivant
laquelle le juge est censé connaître le droit perd tout fondement dans ce
cas, ce pourquoi la jurisprudence assimilait le droit étranger à un
élément de fait, de sorte que celui qui invoque la loi étrangere ̀ devait en
faire la preuve, en pratique par le moyen d’attestations émanant de
juristes étrangers et dites « certificats de coutumes ». Néanmoins, par
touches successives, la jurisprudence a renversé la regle ̀ et c'est
désormais au juge qu'il appartient d'établir, éventuellement avec la
coopération des parties, la teneur de la loi étrangère.

Absence de caractère imperatif


́ (règles prévues par le Code Civil sont
des règles supplétives càd peuvent être aménagées) de la
réglementation des preuves et limites.

Conventions sur la preuve. En matiere ̀ de preuve, les règles légales ne


sont pas, en principe, impératives : elles ne sont pas d'ordre public. Elles
peuvent être écartees ́ par la convention des parties, voire par la
renonciation, même tacite, du plaideur à qui la règle est favorable. Cette
liberté entraîne que les règles de preuve ne peuvent, de façon genérale,
́
ni être soulevées d'office par le juge, ni être invoquées pour la première
fois devant la Cour de cassation.
Cette liberté des parties connaît cependant des limites. Certains
principes généraux de la preuve ont un caractère d'ordre public qui
s'oppose à toute convention, ou renonciation, contraire. Ainsi en va-t-il
de la règle qui, en vertu du principe de la contradiction affirmé pour la
sauvegarde des droits de la défense (C. pr. civ., art. 16), impose que les
preuves soient soumises à une discussion contradictoire ; ou de celle
qui interdit au juge de déléguer ses pouvoirs d'appréciation des preuves.
Il faut également tenir compte, dans les contrats conclus entre
professionnels et non- professionnels ou consommateurs, de la
réglementation des clauses abusives. Le nouvel article R. 212- 1, 12° du
Code de la consommation, issu du décret du 29 juin 2016, présume, de
manière irrefragable,
́ abusives, et interdit donc, les clauses ayant pour
objet ou pour effet d'imposer au non-professionnel ou au consommateur
la charge de la preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait
normalement incomber à l'autre partie au contrat. Pour sa part, le nouvel
article R. 212-2, 9°, presume
́ abusives, sauf au professionnel à rapporter
la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de limiter
indûment des moyens de preuve à la disposition du consommateur.
L’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et
de la preuve des obligations affirme la validité des contrats sur la preuve
dès lors qu'ils portent sur des droits dont les parties ont la libre
disposition (art. 1356, al. 1er).
Loyauté de la preuve (joue sur la recevabilité de la preuve). Il faut
encore ajouter à cela que la recevabilité des preuves est soumise, en
vertu de l'article 9 du Code de procédure civile et de l'article 6 de la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des
libertés fondamentales à un principe de loyauté de la preuve que la
jurisprudence applique avec une grande sévérité, au moins en matière
civile.

Etude qui suit le plan du code adopté par l'ordonnance : les dispositions
générales (chap. 1), l'admissibilité de la preuve (chap. 2), les modes de
preuve (chap. 3).

Chapitre I – Dispositions générales

Section 1. La charge de la preuve

Article 1353 (Charge de la preuve - qui doit prouver) = fardeau de la


preuve
Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou
le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Alternance de la charge de la preuve au cours du procès

Section 2. La présomption

Article 1354
Présomption: on présume quelque chose comme vraie parce que quelque
chose en lien a été démontré. Ex de la présomption de paternité entre
l’enfant conçu pendant le mariage a été conçu par le mari.
La présomption allège, facilite la preuve.
La presomption
́ (légales, de droit ≠ judiciaire) que la loi attache à
certains actes ou à certains faits en les tenant pour certains dispense
celui au profit duquel elle existe d'en rapporter la preuve.
Il existe 3 types de présomption: simple, mixte et irréfragable:
- Elle est dite simple, lorsque la loi réserve la preuve contraire, et peut
alors être renversée par tout moyen de preuve ;
- Elle est dite mixte, lorsque la loi limite les moyens par lesquels elle
peut être renversée ou l'objet sur lequel elle peut être renversée ;
- Elle est dite irrefragable
́ lorsqu'elle ne peut être renversée.

Article 1355
L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'egard
́ de ce qui a fait l'objet du
jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande
soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes
parties, et formée par elles et contre elles en la même qualite.́

Section 3. Les contrats sur la preuve

Article 1356
Les contrats sur la preuve sont valables lorsqu'ils portent sur des droits
dont les parties ont la libre disposition.
Néanmoins, ils ne peuvent contredire les présomptions irréfragables
établies par la loi au profit d’une des parties, ni modifier la foi attachée à
l'aveu ou au serment. Ils ne peuvent davantage établir au profit de l'une
des parties une présomption irréfragable.

Article 1357
L'administration judiciaire de la preuve et les contestations qui s'y
rapportent sont régies par le code de procédure civile.

Le chapitre 1er est consacré aux règles générales du droit de la preuve.


Il est composé de cinq articles qui posent les principes généraux du
droit de la preuve.
Contient :
- un texte sur la charge de la preuve (art 1353) (cf. prochaine section)
- un autre légalisant les contrats sur la preuve (art. 1356) (cf. section 3)
- un autre (art. 1357) qui renvoie au code de procédure civile pour
l’adminsitration judiciaire de la preuve. Sur ce dernier article, renvoi
logique, pas de portée normative mais sert à montrer la complémentarité
du Code civil et du code de procédure civile en matière probatoire et
rappelle que les questions de preuve ne se posent pas seulement à
l’occasion d’un procès.
Ces trois articles ont bien leur place dans un chapitre sur les
dispositions générales.

Pour les autres articles, les articles 1354 et 1355, la question se pose
davantage.
- L’article 1354 est consacré aux présomptions (cf. section 2). Aurait pu
être contenu dans le chapitre 3 sur les différents modes de preuve, dans
la section 3 consacrée aujourd’hui à la preuve par présomptions
judiciaire (1382), cette dernière aurait pu être consacrée à toute forme
de présomption.
- De meme,
̂ l’article 1355 est consacré à l’autorité de la chose jugée.
L’autorité de la chose jugée exprime l’impossibilité de soumettre à
nouveau à un juge des prétentions qui ont déjà été tranchees ́ à
l’occasion d’une précédente instance. Cette autorité est soumise à des
conditions particulières et d’une étendue déterminée. L’autorité de la
chose jugée est conditionnée à la demonstration
́ d’une triple identité
entre la demande soumise au juge et celle qui a déjà été tranchee ́ (C.
civ., anc. art. 1351, 1355 nouv.). Il faut que la chose demandée soit la
même (identité d’objet), qu’elle soit fondée sur la même cause (identité
de cause) et qu’elle concerne les mêmes parties, prises en la même
qualité (identité de parties).

Dans le chapitre I sont traités trois thèmes : la charge de la preuve, les


présomptions légales et les conventions sur la preuve.

Section 1 - La charge de la preuve

Il est fondamental de savoir sur quelle partie au procès pèsera la charge


de la preuve, car résoudre cette question revient à déterminer quelle
partie supportera le risque du doute si la preuve positive d'un fait ne
peut être apportée.

Le rôle du juge en matière de preuve. On oppose classiquement deux


types de procédures :
- la procedure
́ inquisitoire, dans laquelle l'initiative appartient au
juge qui conduit le procès à la recherche de la vérité
- la procedure
́ accusatoire, dans laquelle la maîtrise du procès
revient aux plaideurs, le juge ne jouant qu'un rôle d'arbitre.
Schematiquement,
́ la procédure penale
́ se rattache traditionnellement
au système inquisitoire ; le procès civil au principe accusatoire.
Ce caractère accusatoire fonde la regle ̀ de neutralité du juge, qui domine
la recherche des preuves en matière civile.
De cette règle essentielle, découlent deux conséquences :
- La premiere ̀ est que le juge n'est jamais autorisé à fonder sa
décision sur des faits qui n'ont pas été régulièrement introduits dans le
débat par les parties elles-mêmes (C. pr. civ., art. 7). Il lui est en
particulier interdit de faire état de la connaissance personnelle qu'il
aurait pu avoir des faits litigieux en dehors du procès.
- La seconde est qu'en règle genérale
́ le juge n'intervient pas dans
la recherche des preuves. Il statue seulement sur celles qui lui sont
apportées par les plaideurs. Mais la règle est loin d'être absolue et
jamais notre droit n'a consacré la passivité totale du juge. Dès 1812, le
Code de procédure civile lui avait reconnu la faculté d'ordonner d'office
certaines mesures d'instruction : descente sur les lieux, expertise,
enquête. L'actuel Code de procédure civile a developpé ́ ce pouvoir
d'initiative judiciaire : toute mesure d'instruction peut être ordonnée
d'office, si le juge l'estime opportune ou utile ( C. pr. civ., art. 10 et 143).
Même si, en matière civile, le rôle essentiel appartient toujours aux
parties, le juge n'a pas un rôle passif et il participe à la recherche des
preuves.

Position du problème de la charge de la preuve. Étant acquis que le


débat sur la preuve est organisé et orienté – principalement, sinon
exclusivement – par les parties elles-mêmes, le problème de la charge
de cette preuve peut être formulé de la manière suivante : le demandeur
prétendant à un droit contre le défendeur, qui lui oppose une dénégation,
la question est de savoir lequel des deux doit démontrer qu'il a raison et
donc qui perdra s’il n’arrive pas à prouver ? Est-ce au demandeur
d'établir que sa demande est justifiée ? ou au défendeur de démontrer
qu'elle ne l'est pas ?
Les règles générales sont assez simples mais elles comportent des
aménagements qui résultent de présomptions légales.
Signalons que le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de rappeler que
la détermination de la charge de la preuve relève du domaine de la loi et
non pas du règlement, car elle affecte les droits et obligations des
intéresseś (Cons. const. du 2déc. 1980 no 80-119 L, Rec. Cons. const.
74).

La question de la charge de la preuve était réglee ́ jusqu’ici par l’article


1315 du Code civil. Sur le fond le texte ne subit aucune modification
majeure. Le célèbre article 1315 du Code civil est transposé dans un
article 1353 et le fond est conservé à l’identique.

Art 1353
Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou
le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Ce texte paraît envisager la charge de la production des preuves en


établissant un ordre chronologique :
- le demandeur doit justifier le bien-fondé de sa demande dans un
premier temps,
mais si - dans un second temps -, le défendeur prétend ne plus rien
devoir, il lui appartiendra de rapporter la preuve de sa libération.
Concretement,
̀ le demandeur qui allègue un ou plusieurs faits à l'appui
de sa prétention doit en apporter la preuve. Si le défendeur conteste ces
allégations par de simples dénégations (ex. : le demandeur prétend que
le défendeur lui doit 4 000 € en remboursement d'un prêt ; le défendeur
se contente de nier devoir quoi que ce soit), ce sera au demandeur à
faire la preuve de son droit.
Si le demandeur prouve le fait qu'il alléguait, le défendeur pourra lui
opposer une exception (par ex., si le demandeur prouve l'existence du
contrat de prêt, le défendeur pourra opposer le paiement, ou encore la
nullité de l'acte juridique). Si le demandeur nie l'existence du paiement
ou la nullité de l’acte, ce sera alors au défendeur d'établir les faits
(paiement déjà réalisé par exemple) qu'il allègue en défense, et ceci en
vertu de la règle selon laquelle le défendeur, lorsqu'il invoque une
exception, une défense, est mis dans la position procédurale d'un
demandeur et doit donc prouver les faits invoqués au soutien de
l'exception. On le constate donc, au fur et à mesure du déroulement du
procès, demandeur et défendeur peuvent tour à tour subir le fardeau de
la preuve, au fur et à mesure qu'ils allèguent de nouveaux faits. Le
procès civil est alors dynamique, et celui sur lequel pèse la charge de la
preuve de tel ou tel fait succombera s'il ne parvient pas à la rapporter.

Alternance de la charge de la preuve au cours du procès.


Ainsi se produit ce qu'on a appelé un « va-et-vient », une alternance de
la preuve : la charge en passe de l'une à l'autre partie, à mesure de leurs
allégations successives.

Section 2 - Les présomptions

Les articles sur les présomptions sont totalement remaniés. Les articles
1350 et suivants, qui suscitaient l'incompréhension, laissent place à une
distinction entre « présomptions légales » et « présomptions judiciaires
». Bizarrement, elles ne sont pas traitées au même endroit dans le code
issu de l’ordonnance, les premières sont dans le chapitre sur les
dispositions générales et les secondes dans le chapitre 3 sur les
différents modes de preuve, dans une section 3. Bizarrement également,
la définition de la présomption a disparu : « les présomptions sont des
conséquences que que la loi ou le magistrat tire d’un fait connu à un fait
inconnu ».

Les présomptions « légales » sont celles « que la loi attache à certains


actes ou à certains faits en les tenant pour certains » (C. civ., art. 1354
creé).
́ En réalite,́ cette nouvelle formule vise la catégorie plus générale
des « présomptions de droit », qui peuvent trouver leur source dans la loi
ou la jurisprudence.
Elles doivent être qualifiées « de droit », car la Cour de cassation en
contrôle l'application. Elles se distinguent des présomptions « de fait »
ou du fait de l’homme que l'ordonnance range parmi les modes de preuve
et qu'elle qualifie de « présomptions judiciaires » (C. civ., art. 1382 creé).
́
Ces présomptions, « laissées à l'appreciation
́ du juge », constituent un
mécanisme juridique qui permet au juge d'admettre l'existence d'un fait
en présence d'une incertitude. Pour cela, il doit se fonder sur des indices
«graves, precis
́ et concordants». En d'autres termes, ce mécanisme
dispense le juge de l'obligation d'atteindre une conviction certaine. Ce
dernier peut se contenter d'une approximation ou d'une vraisemblance.

« La presomption
́ que la loi attache à certains actes ou à certains faits
en les tenant pour certains dispense celui au profit duquel elle existe
d'en rapporter la preuve. »
La presomption
́ légale consiste à supposer qu'une chose est vraie parce
qu'une autre est démontrée qui la rend vraisemblable, en raison du lien
logique qui existe entre elles. Exemples : Lorsqu'un dommage est causé
par un enfant mineur, la loi présume la faute de ses parents (art. 1384,
al. 4). Du fait connu – le dommage causé par l'enfant – elle tire une
vraisemblance : mauvaise éducation ou mauvaise surveillance de la part
des parents.

Exemples : l'article 312 du code civil (L'enfant conçu ou né pendant le


mariage a pour père le mari, qui peut tomber dans un certain nombre de
cas) ; l'article 2276 du code civil (« en fait de meuble, la possession vaut
titre », presomption
́ simple).

La presomption
́ légale constitue une dispense de preuve.

Effets de la présomption sur la charge de la preuve. Ainsi caractérisées,


les présomptions légales ont, sur la charge de la preuve, une double
incidence. En premier lieu, ainsi qu'il vient d'être vu, elles allègent la
charge de la preuve. Certes, chaque plaideur demeure tenu de prouver
les faits nécessaires au succès de sa prétention. Mais c'est d'une preuve
plus facile qu'il s'agit : la loi substitue à la preuve naturelle, qui serait
trop difficile, par un déplacement de son objet, une preuve plus facile ;
au point que, parfois, la charge qu'assume le bénéficiaire de la
présomption devient insignifiante. En second lieu, elles suppriment le
risque de la preuve : en imposant au juge de tenir pour vrai un fait
contesté, elles éliminent l'hypothèse du doute. Parce que la preuve est
légalement considérée comme faite, le bénéficiaire de la présomption
triomphe dans sa prétention
Deux nouveautés sont ajoutées à la théorie des présomptions (C. civ.,
art. 1354, al. 2).
D'une part, la définition des présomptions disparaît (le passage d'un fait
connu vers un fait inconnu).
D'autre part, la classification tripartite des présomptions est consacrée.
- Une présomption est dite « simple » lorsque la loi réserve la preuve
contraire. Elle peut alors être renversée par tout moyen.
- Elle est dite « mixte », lorsque la loi limite les moyens par lesquels elle
peut être renversée ou l'objet sur lequel elle peut être renversée.
Ainsi, par exemple, la présomption de responsabilité du fait des choses
tirée de l'article 1384, alinéa 1er du code civil, fait peser sur le gardien
de la chose une responsabilité dont il ne peut s'exonérer qu'en prouvant
la cause étrangere.̀ Il en va de même en matiere ̀ de responsabilité des
père et mère pour les dommages causés par leur enfant mineur vivant
avec eux
- Elle est dite « irrefragable
́ » lorsqu'elle ne peut être combattue.

Il n'est pas toujours aisé de savoir si la présomption édictée par la loi


est de nature simple ou absolue. En principe, toute présomption est
simple sauf disposition légale contraire.

Section 3 - Contrats sur la preuve

Les contrats sur la preuve ont été accueillis comme l'une des
innovations de la réforme de février 2016. Le nouvel article 1356 dispose
que «les contrats sur la preuve sont valables».

Art 1356
Les contrats sur la preuve sont valables lorsqu'ils portent sur des droits
dont les parties ont la libre disposition.
Néanmoins, ils ne peuvent contredire les présomptions irréfragables
établies par la loi, ni modifier la foi attachée à l'aveu ou au serment. Ils
ne peuvent davantage établir au profit de l'une des parties une
présomption irréfragable.

La nouveauté est toute relative, puisque cette validité est admise en


jurisprudence depuis le XIXe siècle et que la loi n° 2000-230 du 13 mars
2000 a consacré ce type de convention dans le Code civil (C. civ., art.
1316-2 ancien : « Lorsque la loi n'a pas fixé d'autres principes, et à
défaut de convention valable entre les parties, le juge règle les conflits
de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus
vraisemblable, quel qu'en soit le support .»). La Cour de cassation avait
admis des clauses sur les modes de preuve admissibles (clause
autorisant la preuve par témoins ou par tous moyens en dérogation à
l’art 1341 : Soc. 24 mars 1964). Admis également des clauses sur l’objet
de la preuve (clause de valeur agréée dans un contrat d’assurance : Civ.
1ère, 24 février 2004, n°02-14005), également des clauses répartissant la
charge de la preuve. Des limites avaient déjà été posées, eu egard
́ au
droit de la consommation par ex : clauses abusives, d’autres tiennent au
droit commun des contrats (art 1170 nouveau : « Toute clause qui prive
de sa substance l'obligation essentielle du débiteur est réputée non
écrite. »). Une limite très genérale
́ avait même été posée sur le
fondement des droits fondamentaux : Civ. 2, 10 mars 2004 : Qu'en
statuant ainsi, alors que la preuve du sinistre, qui est libre, ne pouvait
être limitée par le contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés (art
1315 et s et 6-1 CEDH).
Compte tenu de la généralité des termes de l'article 1356, le domaine
des contrats sur la preuve est potentiellement très vaste. Réaffirme
avec force validité de telles clauses. Les parties pourront modifier la
charge ou l'objet de la preuve ; elles pourront étendre ou restreindre les
modes de preuve admissibles ou déterminer à l'avance leur force
probante. Par exemple, les parties pourront présumer la solidarité de
dettes civiles, par dérogation au nouvel article 1310.

Toutefois, après avoir évoqué le champ des possibles, l'article 1356 pose
surtout des limites. D'une part, la validité de ces contrats est limitée aux
droits dont les parties ont la libre disposition (déjà depuis Cass. 1re civ.,
8 nov. 1989, n° 86-16.197). ex : état des personnes, ex art 194 cc : « Nul
ne peut réclamer le titre d'époux et les effets civils du mariage, s'il ne
représente un acte de célébration inscrit sur le registre de l'état civil » ;
art 310-3 cc : « La filiation se prouve par l'acte de naissance de l'enfant,
par l'acte de reconnaissance ou par l'acte de notoriété constatant la
possession d'état. Si une action est engagée en application du chapitre
III du présent titre, la filiation se prouve et se conteste par tous moyens,
sous réserve de la recevabilité de l'action. »
D'autre part, ces contrats ne peuvent ni établir une présomption
irréfragable au profit d'une partie ni contredire les présomptions
irréfragables d'origine légale. De façon plus anecdotique, ils ne peuvent
modifier la force probante attachée à l'aveu et au serment.

Chapitre II – L’admissibilité des modes de preuve

Après un chapitre 1er consacré aux dispositions générales, le code


contient un chapitre 2 traitant de l’admissibilité des modes de preuve.

Article 1358
Hors les cas où la loi en dispose autrement, la preuve peut être apportee
́
par tout moyen.
Article 1359
L'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un
montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée
ou authentique.
Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte
juridique, même si la somme ou la valeur n'excède pas ce montant, que
par un autre écrit sous signature privée ou authentique.
Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne
peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa
demande.
Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce
montant, porte sur le solde ou sur une partie d'une créance supérieure à
ce montant.

Article 1360
Les règles prévues à l'article précédent reçoivent exception en cas
d'impossibilité materielle
́ ou morale de se procurer un écrit, s'il est
d'usage de ne pas établir un écrit, ou lorsque l'écrit a été perdu par force
majeure.

Article 1361
Il peut être suppleé
́ à l'ecrit
́ par l'aveu judiciaire1, le serment décisoire2
ou un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen
de preuve.

Article 1362
Constitue un commencement de preuve par écrit tout écrit qui, émanant
de celui qui conteste un acte ou de celui qu'il représente, rend
vraisemblable ce qui est allégué.
Peuvent être considerés
́ par le juge comme équivalant à un
commencement de preuve par écrit les déclarations faites par une partie
lors de sa comparution personnelle, son refus de répondre ou son
absence à la comparution.
La mention d'un écrit authentique ou sous signature privée sur un
registre public vaut commencement de preuve par écrit.

1
"l'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai
et comme devant être tenu pour avéré à son égard, un fait de nature à
produire contre elle des conséquences juridiques."
2
"Le serment est la déclaration par laquelle un plaideur affirme d'une
manière solennelle et devant le juge, la réalité d'un fait qui lui est
favorable". (Ghestin et Goubeaux) Le serment décisoire est une espèce
particulière de serment, très rare en pratique, car très dangereux pour
celui qui serait tenté de l'utiliser. Pour cette raison, seules les personnes
capables de disposer de leurs droits peuvent déférer le serment. En
effet, l'un des plaideurs offre de s'en remettre au serment de son
adversaire pour établir le fait contesté, dont dépend l'issue du débat

S’interroger sur l’admissibilité de la preuve c’est en principe s’intéresser


à la recevabilité des preuves et à leur force probante. C’est, en d’autres
termes, se demander si toutes les preuves sont recevables, si elles
auront une force particulière et donc si le juge aura un pouvoir
d’appréciation.

Sur cette question, deux conceptions s’opposent. Deux systèmes, deux


théories :
- la théorie légale de la preuve juridique
- la théorie de la libre évaluation des preuves

Cette opposition a une origine historique, les régimes juridiques de la


preuve légale et de la preuve libre se sont succédés dans le temps et
coexistent aujourd’hui.

Théoriquement ces deux systèmes s’opposent en tous points :

Dans le système de preuve légale:


- les modes de preuves admissibles sont limitativement énumerés
́ par la
loi
- leur force probante est définie légalement de sorte que le juge n’a
aucun pouvoir
d’appreciation
́
- les preuves sont hiérarchisées

Ainsi, seuls sont recevables certains moyens de preuve que la loi


désigne limitativement et auxquels elle attache, parfois, une
présomption de véracité qui échappe à l'appreciation
́ du juge. Par
exemple, en présence d'un écrit, le juge doit s'estimer convaincu, tandis
qu'il doit rejeter d'autres preuves, tels les témoignages. Il ne suffit plus
alors de convaincre le juge ; il faut le faire suivant certaines règles.

Dans le système de preuve libre au contraire :


- la preuve s’établit par tous moyens
- les modes de preuves n’ont aucune force probante prédéterminee,
́ de
sorte que le juge
les apprécie librement
- il n’existe aucune hiérarchie entre ces modes de preuve
Ainsi, tous les moyens de preuve sont recevables. Le tout est de
convaincre le juge ; les procédés par lesquels on y parvient sont
indifférents. Peu importe, par exemple, que l'on détermine sa conviction
en produisant devant lui un écrit ou en lui faisant entendre un témoin.

Part respective des deux systèmes. Ces deux conceptions trouvent à


s'appliquer, en droit positif, selon des combinaisons variées.
Le système de la preuve libre domine en droit pénal.
Sous réserve d'un certain nombre d'exceptions et d'atténuations, la
liberté des preuves est aussi admise en droit commercial : la preuve par
témoins y est, en principe, recevable (C. com., art. L. 110-3).
Les litiges concernant la conclusion et l’execution
́ du contrat de travail
entre l’employeur et le salarié sont régis par le principe de liberté de la
preuve, alors même que l’objet du litige est en rapport avec un acte
juridique (le contrat de travail). Justifications diverses de cette
application du principe de la liberté de la preuve : impossibilité morale
du salarié de préconstituer une preuve, ou lien de subordination (le
critère de qualification du contrat de travail) est un fait juridique qui se
prouve par tout moyen. Peu importe les raisons, la cour de cassation a
affirmé de manière genérale
́ qu’en matiere
̀ prud’homale, la preuve est
libre.
En droit administratif, aucun texte ne pose le pp de liberté de la preuve
mais son respect est assuré par le CE

Le droit civil met en oeuvre un système plus nuancé. Traditionnellement,


on expose que les modes de preuve admissibles diffèrent suivant que le
droit que l'on invoque tire son origine d'un acte ou d'un fait juridique. La
preuve des actes juridiques est légale et celle des faits juridiques est
libre. Cependant, il faut être vigilant car, s’agissant de la l’appreciation
́
des preuves, l’application du système de preuve légale ou de preuve
libre ne dépend pas de la distinction entre acte et fait juridique. Un acte
authentique, un aveu ou un témoignage auront la même force probante,
qu’ils servent à prouver un acte ou un fait juridique.
Cette distinction sert seulement sur la question de la recevabilité de la
preuve. On peut donc préciser que dans ce chapitre sur l’admissibilite
des modes de preuve il est exclusivement question de la recevabilité
des modes de preuves et non de leur appréciation, de leur force
probante qui dépend de chaque mode de preuve.

Sur la question de la recevabilité des modes de preuve on oppose


traditionnellement acte et fait juridique.
Le système de la légalité des preuves était consacré pour les actes
juridiques, et notamment le contrat : ils ne peuvent être prouvés que par
écrit, écrit que les parties doivent rédiger au moment où elles concluent
l'acte (art. 1341). On dit qu'elles sont tenues de « préconstituer » la
preuve : de se la ménager par avance.

Les solutions sont inversées pour les faits juridiques, lesquels peuvent
être, en règle gené
́ rale, etablis
́ par tous moyens. C'est par témoins et
présomptions que l'on prouvera, par exemple, les circonstances d'un
accident.

L'ordonnance portant réforme du droit des contrats contient une section


spécialement consacrée à l'admissibilité des modes de preuve (art. 1359
à 1363) qui reprend pour l'essentiel, en les clarifiant, les dispositions du
Code civil.
Sous cet intitulé, l'ordonnance réécrit en profondeur le Code civil pour le
mettre en conformité avec le droit positif.
L’évolution des rapports entre le système de preuve légale et celui de
liberté de la preuve trouve sa consécration dans le nouvel article 1358,
selon lequel « hors les cas où la loi en dispose autrement, la preuve peut
être apporteé par tout moyen ». Cette formule montre que le principe de
la liberté de la preuve domine le droit civil, comme les autres branches
du droit. L'admissibilité restreinte est cantonnée au domaine des actes
juridiques civils par le nouvel article 1359. L'equilibre
́ entre le principe et
l'exception est posé avec clarté. La liberté de la preuve ne concerne pas
seulement les faits juridiques, mais également toutes les « situations
juridiques » qui échappent à la distinction des faits et des actes. On peut
classer dans cette catégorie la proprieté́ immobiliere,
̀ dont les modes de
preuves sont libres.
La clarté est encore bienvenue s'agissant du paiement, qui se prouve par
tout moyen en application du nouvel article 1342-8.

Cette deuxième section, consacrée à l’admissibilité des modes de


preuve, comporte cinq articles, respectivement relatifs à la preuve des
faits, la preuve des actes excédant un certain montant (deux textes),
l’impossibilité materielle
́ ou morale de se procurer un écrit et le
commencement de preuve par écrit.

Donc le principe c’est la liberté de la preuve : art 1358.


La liberté de la preuve signifie liberté dans la recherche et la production
des preuves. Il s’exprime à travers d’autres formules : « preuve par tout
moyen » - qui peut être utilisé indifféremment au singulier ou au pluriel –
ou possibilité d’utiliser « tout mode de preuve ». c’est un principe qui
avait par le passé été défendu par certains auteurs (Bentham par ex) qui
considérait, en regardant le système de common law, que ce système
permettait d’accumuler plus de preuves ce qui facilitait la découverte de
la vérité.

Ensuite, suit un article consacré au cas des actes juridique : art 1359.
Donc l’exception par rapport au principe de liberté de la preuve :

Art 1359
L'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un
montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée
ou authentique.
Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte
juridique, même si la somme ou la valeur n'excède pas ce montant, que
par un autre écrit sous signature privée ou authentique.
Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne
peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa
demande.
Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce
montant, porte sur le solde ou sur une partie d'une créance supérieure à
ce montant.

Art 1359 alinea ́ 1er : Le régime de la preuve par écrit est réservé aux
actes juridiques à partir d'un seuil déterminé par décret, comme c'était
déjà le cas (1500 €).

C’est une règle ancienne, déjà énoncée dans une ordonnance (de
Moulins) de 1566 qui imposait la preuve des contrats qui excédaient 100
livres par un écrit notarié ou sous seing privé.
Justifications de la préférence pour l’écrit ? preuve préconstitué qui
permet de conserver la preuve d’un acte de façon permanente et
inaltérable, incontestable. Sa plus grande utilité serait de prévenir les
procès, un auteur (Bentham) évoquait la « force anti-litigieuse » de
l’écrit. Aujourd’hui moins évident dans certains cas : par exemple pb
posés par les contrats d’adhésion, mais reste une préférence pour l’écrit.

Art 1359 alinéa 2 : La preuve « outre et contre l'écrit » :


Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte
juridique, même si la somme ou la valeur n'excède pas ce montant, que
par un autre écrit sous signature privée ou authentique.

- prouver contre un écrit c’est contester la véracité d’une mention qu’il


contient et
- prouver outre c’est prétendre que l’acte juridique prévoit des
obligations qui ne
figurent pas dans l’écrit.
Cette question subit une modification importante. L'ancien article 1341
avait été interpreté
́ de façon large par la Cour de cassation, dès qu’on
prouvait quelque chose, acte ou fait, par un écrit, la preuve contre devait
se faire par écrit également. La Cour de cassation a retenu, par exemple,
que la preuve contre une quittance attestant d'un paiement doit être
rapportée par écrit (Cass. 1re civ., 4 nov. 2011, n° 10-27.035). Prouver
contre une quittance revient pourtant à établir la preuve d'un fait
juridique (le défaut de paiement). Sauf à tordre les principes, la preuve
du défaut de paiement est libre. C'est la solution qui ressort de la
rédaction du nouvel article 1359, alinéa 2, selon lequel « il ne peut être
prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte juridique (...) que par
un autre écrit ».
Le régime strict de la preuve contre l'écrit est donc désormais limité aux
actes juridiques. A contrario, un écrit qui établit un fait juridique se
conteste par tout moyen. En pratique, le créancier qui a délivré par
erreur une quittance de paiement sera admis à établir le défaut de
paiement de son débiteur par tout moyen.

Les alinéas 3 et 4 de l’art 1359 existaient déjà avant l’ordonnance

Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne


peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa
demande.
Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce
montant, porte sur le solde ou sur une partie d'une créance supérieure à
ce montant.

Pour l’alinéa 4 signifie que si créance de 2000 euros par exemple, payée
partiellement, reste plus que 1000 euros à obtenir, le solde restant dû
est donc inférieur au seuil fixé par décret, la preuve de la créance doit
quand même être prouvée par écrit.
Ainsi, par ces deux alinéas, le code invite à ne pas tenir compte du
montant de la demande en justice mais bien de la valeur de l’acte
juridique.

Pour le reste, (art 1360, 1361, 1362) les aménagements de la preuve par
écrit sont ordonnés et actualisés. Attention on rappelle que
l’aménagement de l’admissibilité restreinte des modes de preuve peut
résulter d’une convention. Les parties peuvent conventionnellement
écarter l’exigence d’un écrit.

D'une part, l'exigence de l'écrit est écartee


́ dans certaines
circonstances (Art 1360) :
- impossibilité materielle
́ ou morale,
- perte de l'écrit par force majeure,
- existence d'un usage qui dispense de l’écrit.

Art 1360
Les règles prévues à l'article précédent reçoivent exception en cas
d'impossibilité materielle
́ ou morale de se procurer un écrit, s'il est
d'usage de ne pas établir un écrit, ou lorsque l'écrit a été perdu par force
majeure.

L’impossibilité materielle
́ est rare en pratique, une seule décision
significative (en 1964), les juges ont admis la preuve testimoniale car
l’intéressé ne pouvait manifestement pas écrire. Impossibilité morale :
fréquente dans relations familiales, fiancés, amis. Appreciation
́ conrète
par les juridictions.

Par ailleurs le texte comporte un ajout par rapport au texte antérieur. Il


s’agit du « cas où il est d’usage de ne pas faire un écrit ». Le texte
entérine la jurisprudence qui a admis qu’un usage pouvait permettre de
déroger au principe de l’actuel article 1341 du code civil (Cf. par
exemple, Civ. 1e 15 avril 1980, Bull. civ. I, n° 113 ; Com. 22 mars 2001,
Bull. IV, n° 50).

D'autre part, certains mécanismes permettent de « suppléer à l'écrit »


(C. civ., art. 1361 et 1362 :
- le commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de
preuve,
- l'aveu judiciaire,
- le serment.

Il peut être suppleé


́ à l'ecrit
́ par l'aveu judiciaire, le serment décisoire ou
un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de
preuve.

Sur le serment et l’aveu, ces preuves sont communément appelées «


preuves parfaites » comme la preuve par écrit. Pourtant ces preuves ne
présentent aucune garantie de perfection. Seront traitées dans le
chapitre 3.

Plus spécifiquement, l’art 1362 traite du commencement de preuve par


écrit. Ce n’est pas un mode de preuve à proprement parler mais d’un
mécanisme juridique qui peut être actionné. Le commencement de
preuve ne peut pas suppléer à un écrit, il le peut seulement s’il est
corroboré par d’autres éléments.

Art 1362
Constitue un commencement de preuve par écrit tout écrit qui, émanant
de celui qui conteste un acte ou de celui qu'il représente, rend
vraisemblable ce qui est allégué.
Peuvent être considerés
́ par le juge comme équivalant à un
commencement de preuve par écrit les déclarations faites par une partie
lors de sa comparution personnelle, son refus de répondre ou son
absence à la comparution.
La mention d'un écrit authentique ou sous signature privée sur un
registre public vaut commencement de preuve par écrit.

Entrent dans cette définition les reconnaissances de dettes qui ne


comportent pas la mention en lettres de la somme prêtée ou écrit non
signé. Plusieurs conditions : émane de la personne à qui on l’oppose et
rend vraisemblable le fait allégué. Si elles sont remplies, alors on
bascule dans le système de preuve libre : en plus, le CPPE doit être
corroboré par d’autres modes de preuve.

L’article 1362 prévoit également que la déclaration faites par une partie
lors de sa comparution personnelle, le silence d'une partie ou son
absence de comparution peuvent être considerés ́ comme des
commencements de preuve par écrit, alors que la mention d'un écrit sur
un registre public vaut commencement de preuve par écrit.

Chapitre III – Les différents modes de preuve

Section 1 : la preuve par écrit


Section 2 : la preuve par témoins
Section 3 : la preuve par présomption judiciaire
Section 4 : L’aveu
Section 5 : Le serment

Dans un chapitre intitulé « Les différents modes de preuve »,


l’ordonnance se contente principalement de simplifier les dispositions
existantes. Cet intitulé donne le sentiment erroné que les modes de
preuve sont énumeré ́ s de facon
̧ exhaustive dans le Code civil (preuve par
écrit, par témoins, par présomption judiciaire, par aveu et par serment).
Il transcrit surtout une conception du droit de la preuve tournée vers un
lointain passé, qui va jusqu'à ignorer des modes de preuve aussi
essentiels et répandus que le constat d'huissier ou l’expertise.

Section 1 : La preuve écrite


Sous sections :
- dispositions générales
- l’acte authentique
- l’acte sous signature privée
- autres écrits
- les copies
- les actes recognitifs (acte par lequel une personne reconnaît
l’existence d’une situation
juridique attestée par un écrit antérieur. Il a pour effet de remplacer
l’acte primordial perdu ou d’interrompre une prescription)

La preuve écrite a fait l'objet de la plus grande attention. L’expression «


preuve littérale » disparaît au profit de la « preuve par écrit ».

Dispositions générales :

Article 1363
Nul ne peut se constituer de titre à soi-même.

Article 1364
La preuve d'un acte juridique peut être préconstituée par un écrit en la
forme authentique ou sous signature privée.

Article 1365
L'ecrit
́ consiste en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de
tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible,
quel que soit leur support.
Dissocier l’écrit de son support papier, prise en compte de l’écrit
électronique.
Principe d’équivalence.

Article 1366
L'ecrit
́ électronique a la même force probante que l'écrit sur support
papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont
il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à
en garantir l’intégrité.

Article 1367
La signature necessaire
́ à la perfection d'un acte juridique identifie son
auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent
de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère
l'authenticité à l'acte.
Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable
d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache.
La fiabilité de ce procédé est présumee, ́ jusqu'à preuve contraire,
lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire
assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par
décret en Conseil d’Etat.
La signature aujourd’hui ne se défini par sa forme mais par sa fonction.

Article 1368
A defaut
́ de dispositions ou de conventions contraires, le juge règle les
conflits de preuve par écrit en déterminant par tout moyen le titre le plus
vraisemblable.

Art 1363 : nul ne peut se constituer de titre à soi-même. Pp à l’origine


non ecrit.
́
Il est, au demeurant, permis de penser que le principe va de soi : on
imagine mal la consécration comme preuves de documents dont l'auteur
affirmerait unilatéralement, à son profit, un ou plusieurs droits. Les
éléments de preuve que produit une partie doivent être neutres, c'est-à-
dire être exempts de tout soupçon d'impartialité.
Ce principe figure dans la section relative à la preuve par écrit, pour
souligner qu'il s'étend uniquement au domaine de la preuve des actes
juridiques.

Art 1364 : n’apporte pas grand chose par rapport à l’art 1359.

Art 1365 definit


́ l’écrit :
Le Code civil n'avait pas jugé utile de définir l'écrit : la notion allait de
soi. Mais l'apparition de l'informatique, et plus encore celle du
commerce en ligne, ont rendu nécessaire une adaptation des
dispositions légales. Pour admettre en preuve des documents
électroniques, il fallait réaliser une double dissociation :
- dissocier l'écrit de son support traditionnel, le papier,
- et la signature de sa forme usuelle, l'apposition manuscrite du nom.
C'est ce qu'a fait la loi du 13 mars 2000 « portant adaptation du droit de
la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature
électronique ». Sous sa forme habituelle, l'écrit se présente comme une
suite de lettres consignée sur une feuille de papier. Mais l'évolution
technique a fait apparaître d'autres procédés d'écriture. C'est pourquoi
l'article 1316 du Code civil issu de la loi du 13 mars 2000 en donnait une
définition nouvelle : « La preuve littérale, ou preuve par écrit, resulte
́
d'une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres
signes ou symboles dotés d'une signification intelligible, quels que
soient leur support et leurs modalités de transmission. »
L'article 1365 de l’ordonnance portant réforme du droit des contrats
adopte à peu près la même définition :
L'ecrit
́ consiste en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de
tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible,
quel que soit leur support.

Mais en l'appliquant à l'ecrit


́ et en supprimant toute référence aux
modalités de transmission. On le voit, cette définition nouvelle est plus
large et surtout plus abstraite que la définition traditionnelle. Elle
détache en effet la notion d'écrit de ses composants matériels – le mode
d'écriture, le support – pour le caractériser par sa seule intelligibilité.

Principe d'équivalence. Le principe est que l'écrit électronique obéit aux


mêmes règles qu'un écrit « ordinaire », dressé sur papier, qu'il s'agisse
de son admissibilité comme preuve ou de sa force probante (C. civ., art.
1316-1 et 3) 4. Seule la seconde règle est reprise expressément par
l'ordonnance portant réforme du droit des contrats (art. 1366), la
première découlant naturellement de l'indifférence du support pour la
définition de l'écrit (art. 1365).
En cas de conflit ou de contradiction entre deux documents établis sur
des supports différents, la loi ne fixe entre eux aucune hiérarchie et
abandonne au juge le soin de déterminer le titre « le plus vraisemblable
» (C. civ., art. 1316-2 ; ordonnance, art. 1368). Par conséquent, la preuve
informatique est entrée dans le système probatoire sans que lui ait été
attribué un statut particulier, à partir d'une assimilation pure et simple à
l'ecrit
́ traditionnel.

La signature. Pour faire preuve, un écrit doit émaner de celui à qui on


l'oppose. C'est normalement par la signature que se réalise cette
imputabilité de l'écrit à son auteur, ce qui signifie que lorsque je signe
un texte je m'en approprie les énonciations. Ordinairement, la signature
résulte d'un autographe apposé au pied du texte sur une feuille de
papier. La loi du 13 mars 2000, dans l'article 1316-4 du Code civil, en
modifie la définition de la même manière et dans la même inspiration
qu'elle a modifié la notion d'écrit. La signature n'est plus désormais
caractérisée par sa forme mais par sa fonction : « elle identifie celui qui
l'appose », et « manifeste le consentement des parties aux obligations
qui découlent de l'acte ». Constitue par conséquent une signature tout
signe distinctif qui répond à ce double rôle : permettre de reconnaître le
signataire et comporter l'expression d'une volonté. Elle peut donc elle
aussi être électronique, c'est-à-dire résulter de tout procédé fiable
d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache.
Un exemple usuel de signature électronique est fourni par le code secret
nécessaire à l'utilisation des cartes de paiement et, dans le commerce
électronique, par les certificats électroniques de paiement.
Le régime de l'acte authentique est clarifié.

Article 1369
L'acte authentique est celui qui a été reçu, avec les solennités requises,
par un officier public ayant compétence et qualité pour instrumenter.
Il peut être dressé sur support électronique s'il est établi et conservé
dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Lorsqu'il est reçu par un notaire, il est dispensé de toute mention
manuscrite exigée par la loi.

Article 1370
L'acte qui n'est pas authentique du fait de l'incompétence ou de
l'incapacité de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écrit
sous signature privée, s'il a été signé des parties.

Article 1371
L'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de ce que l'officier
public dit avoir personnellement accompli ou constaté.
En cas d'inscription de faux, le juge peut suspendre l'exécution de l’acte.

Acte authentique définit à l’art 1369. En grande majorité, ils sont dressés
par des notaires. mais constituent aussi des écrits authentiques les
décisions de justice, actes de l’état civil par exemple, actes accomplis
par un huissier, etc.
Le nouvel article 1371 dispose qu'il fait « foi jusqu'à inscription de faux
de ce que l'officier public dit avoir personnellement accompli ou
constaté ».

Signifie que la partie qui produit un acte authentique n’a pas à en


demontrer
́ l’authenticité. En plus, très difficile à remettre en cause, la loi
impose pour ce faire le recours à la procédure d’inscription de faux.
Cette force particulière ne concerne que ce que le notaire a
personnellement constaté.
Les énonciations relatives à des faits que l'officier public n'a pas
personnellement constatés ne font foi que jusqu'à preuve contraire : la
procédure de l'inscription de faux n'est pas nécessaire.

L'acte sous signature privée.

Article 1372
L'acte sous signature privée, reconnu par la partie à laquelle on l'oppose
ou légalement tenu pour reconnu à son égard, fait foi entre ceux qui l'ont
souscrit et à l'egard
́ de leurs héritiers et ayants cause.

Article 1373
La partie à laquelle on l'oppose peut désavouer son écriture ou sa
signature. Les héritiers ou ayants cause d'une partie peuvent
pareillement désavouer l'écriture ou la signature de leur auteur, ou
déclarer qu'ils ne les connaissent. Dans ces cas, il y a lieu à vérification
d’écriture.

Article 1374
L'acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des
parties ou par l'avocat de toutes les parties fait foi de l'écriture et de la
signature des parties, tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou
ayants cause.
La procedure
́ de faux prévue par le code de procédure civile lui est
applicable.
Cet acte est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.

Article 1375
L'acte sous signature privée qui constate un contrat synallagmatique ne
fait preuve que s'il a été fait en autant d'originaux qu'il y a de parties
ayant un intérêt distinct, à moins que les parties ne soient convenues de
remettre à un tiers l'unique exemplaire dressé.
Chaque original doit mentionner le nombre des originaux qui en ont été
faits.
Celui qui a exécuté le contrat, même partiellement, ne peut opposer le
défaut de la pluralité d'originaux ou de la mention de leur nombre.
L'exigence d'une pluralité d'originaux est réputée satisfaite pour les
contrats sous forme électronique lorsque l'acte est établi et conservé
conformement
́ aux articles 1366 et 1367, et que le procédé permet à
chaque partie de disposer d'un exemplaire sur support durable ou d'y
avoir accès.

Article 1376
L'acte sous signature privée par lequel une seule partie s'engage envers
une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible
ne fait preuve que s'il comporte la signature de celui qui souscrit cet
engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou
de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence,
l'acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes
lettres.

Article 1377
L'acte sous signature privée n'acquiert date certaine à l'egard
́ des tiers
que du jour où il a été enregistré, du jour de la mort d'un signataire, ou
du jour où sa substance est constatée dans un acte authentique.

Ce sont ceux qui sont rédiges ́ soit par les parties elles-mêmes, soit par
un tiers dépourvu de la qualité d'officier public – ou qui n'a pas agi en
cette qualité.
quant à lui, fait foi entre les parties (C. civ., art. 1372 créé) et peut être
remis en cause par le désaveu d'écriture ou de signature.

La nouveauté du régime de l'acte sous signature privée concerne la


formalité du double original (C. civ., art. 1375 créé), dont les parties sont
dispensées si elles ont remis à un tiers l'unique exemplaire dressé.

En créant l'acte contresigné par un avocat, la loi du 28 mars 2011 a


donné naissance à un nouveau type de signature qui n'entre pas
exactement dans les prévisions de l'article 1316-4 du Code civil car si
elle identifie bien celui qui l'appose, elle n'est pas nécessaire à la
perfection de l'acte juridique. Elle ne manifeste pas le consentement des
parties et elle ne confère pas l'authenticité à l'acte. Elle atteste que
l'avocat a éclairé les parties qu'il conseille sur les conséquences
juridiques de l'acte (art. 66-3-1, L. du 31 déc. 1971, mod. L. du 28 mars
2011). Elle a également pour effet que l'écriture et la signature des
parties ne peuvent plus être déniées ni par elles, ni par leurs ayants
cause (L. du 31 déc. 1971, art. 66-3-2). Le contreseing de l'avocat
dispense également les parties de rédiger les mentions manuscrites
exigées par la loi, à moins que celle-ci n'en dispose autrement (L. du 31
déc. 1971, art. 66-3-3).
L'acte contresigné par un avocat constitue simplement une variété
d'acte sous seing privé doté d'une force probante légèrement supérieure
à l'acte sous seing privé « ordinaire ».

La copie.
Le point le plus important de la réforme des modes de preuve concerne
la copie. Son régime a eté
́ simplifié.

La copie fiable a la même force probante que l'original. La fiabilité est


laissée à l'appreciation
́ du juge. Néanmoins est réputée fiable la copie
exécutoire ou authentique d'un écrit authentique.
Est présumee ́ fiable jusqu'à preuve du contraire toute copie résultant
d'une reproduction à l'identique de la forme et du contenu de l'acte, et
dont l'intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à
des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
Si l'original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée.
L'article 1379 créé prévoit que la copie fiable a la même force probante
que l'original. Par principe, cette fiabilité est souverainement appréciée
par le juge. Par exception, est présumee ́ fiable la copie exécutoire ou
authentique d'un écrit authentique, ou celle qui a été dressée selon un
procédé technique défini par un décret en Conseil d'État. La copie
devrait ainsi pouvoir se substituer à l'ecrit
́ pour établir la preuve d'un
acte juridique conformément à l'article 1359 si l'original n'existe plus.
C'est l'intention affichée par le ministère de la Justice, selon lequel «
une entreprise faisant le pari de la numérisation ne pourra se voir
demander de produire, en cas de litiges, la version papier d'un document
que si elle subsiste » (Min. Justice, communiqué, 11 févr. 2016).

Section 2 : autres modes de preuve

⌘ La preuve par témoins

Art 1381
La valeur probante des déclarations faites par un tiers dans les
conditions du code de procédure civile est laissée à l'appreciation
́ du
juge.

Les témoins sont des personnes qui déposent en justice sur des faits
dont ils ont personnellement connaissance : sur ce qu'ils ont vu ou
entendu. Cette sorte de preuve doit être distinguee ́ de la preuve par
commune renommée, qui est une preuve par « ouï-dire » : les témoins
rapportent alors ce qu'ils ont entendu dire sans l'avoir eux-mêmes
constaté. En principe, la preuve par commune renommée est prohibée en
raison de son extrême incertitude. Sous l'intitulé « la preuve par témoins
», l'article 1381 de l'ordonnance portant réforme du droit des contrats
traite uniquement de la force obligatoire des déclarations faites par un
tiers « dans les conditions du Code de procédure civile ».

Recevabilité de la preuve par témoins. Pour ce qui concerne les


obligations, la distinction faite précédemment entre faits et actes
juridiques est particulièrement nette. Les faits juridiques peuvent être
prouvés par témoins. Cela est imposé parce qu'on ne peut pas
préconstituer la preuve d'un tel fait – celle, par exemple, d'un accident.
Pour les actes juridiques, au contraire, le principe est celui de
l'irrecevabilité de la preuve par témoins. Réserve faite de la dispense
concernant les « petites affaires », l'obligation de préconstituer une
preuve en matière d'actes juridiques est imposée par la loi dans les
termes les plus généraux.
Ces règles ne concernent que les parties et leurs ayants cause
universels. Au contraire, les tiers, c'est-à-dire tous ceux qui n'ont pas
l'une ou l'autre de ces qualités, peuvent toujours faire la preuve de l'acte
par tous moyens. Ils peuvent pareillement faire la preuve outre ou contre
le contenu d'un écrit.
Il reste cependant que les témoignages, alors même qu'ils sont admis,
n'ont jamais la même valeur probante que les écrits. En présence d'un
acte régulier, le juge doit s'estimer convaincu et faire droit à la
demande. En présence de témoignages, même concordants, le juge n'est
pas lié : il reste toujours libre d'en apprécier la valeur ; et cette
appréciation est souveraine.

⌘ La preuve par présomptions

Art 1382
Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi, sont laissées à
l'appreciation
́ du juge, qui ne doit les admettre que si elles sont graves,
précises et concordantes, et dans les cas seulement où la loi admet la
preuve par tout moyen.

Notion de présomption. Bien que l'article 1349 les englobe dans une
même définition, il ne faut pas confondre les présomptions de l'homme,
ou de fait, dont il va être question, avec les présomptions légales,
lesquelles sont, en réalite,́ des dispenses de preuve. Les présomptions
de l'homme sont des modes de preuve : des moyens de convaincre le
juge. L’ordonnance portant réforme du droit des contrats traite d'ailleurs
« la preuve par présomption judiciaire » (art. 1382) dans les différents
modes de preuve. L'expression désigne la preuve résultant d'un
raisonnement qui consiste, en partant d'un fait connu, à en induire la
probabilité du fait litigieux. Ainsi peut on induire de l'existence de traces
de freinage sur une grande longueur, qu'un automobiliste roulait vite. On
dit alors qu'il y a des indices en faveur de la prétention de l'un des
plaideurs. Parce qu'elle est indirecte, c'est une preuve plus conjecturale
que la preuve par écrit ou même qu'un témoignage précis. Les
conditions de recevabilité de la preuve par présomptions sont
exactement les mêmes que celles de la preuve par témoins.
L’ordonnance dit que les présomptions « qui ne sont pas établies par la
loi » ne doivent être admises par le juge que dans les cas seulement où
la loi admet la preuve par tout moyen (art. 1382). Il y a aussi identité de
force probante : comme les témoignages, les présomptions ne lient
jamais le juge.

⌘ L'aveu et le serment
Article 1383
L'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai
un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques
Il peut être judiciaire ou extrajudiciaire.

Article 1383-1
L'aveu extrajudiciaire purement verbal n'est reçu que dans les cas où la
loi permet la preuve par tout moyen.
Sa valeur probante est laissée à l'appreciation
́ du juge.

Article 1383-2
L'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son
représentant spécialement mandaté.
Il fait foi contre celui qui l'a fait.
Il ne peut être divisé contre son auteur.
Il est irrévocable, sauf en cas d'erreur de fait.

Article 1384
Le serment peut être déféré, à titre décisoire, par une partie à l'autre
pour en faire dépendre le jugement de la cause. Il peut aussi être déféré
d'office par le juge à l'une des parties.

L'aveu et le serment présentent la particularité commune d'être des


déclarations émanant des parties elles-mêmes.

L'aveu. Distinction de l'aveu extrajudiciaire et de l'aveu judiciaire. L'aveu


est la reconnaissance, par une personne, d'un fait qui est de nature à
produire contre elle des conséquences défavorables : spécialement la
reconnaissance par un plaideur d'un fait allégué contre lui. Sa force
probante est variable. Le Code civil en reconnait deux variétés. L'aveu
est dit extrajudiciaire lorsqu'il est intervenu en dehors de tout procès, ou
au cours d'un procès différent de celui à l'occasion duquel on prétend
l'invoquer. S'il est écrit, il servira de preuve écrite ou de commencement
de preuve ou de simple indice, selon le cas. S'il est verbal, il ne peut lui-
même être établi que par témoins. Il s'ensuit qu'il ne peut être admis que
dans les cas où la loi admet la preuve par tous moyens (art. 1383-1).
Dans tous les cas, sa valeur probante reste soumise au pouvoir
d'appréciation du juge.
L'aveu est dit judiciaire lorsqu'il intervient au cours du procès même
dans lequel est débattu le fait sur lequel il porte. Au contraire du
précédent, il est traditionnellement considéré comme la « reine des
preuves ». En droit civil, ce qui est avoué est par là même prouvé.
L'article 1382, alinéa 2, dispose en ce sens que l'aveu fait foi contre
celui qui l'a fait.
Caractères de l'aveu judiciaire : irrévocabilité et indivisibilite.́ L'aveu
judiciaire est, d'abord, irrévocable. Mais cette irrévocabilité n'est pas
absolue. L'aveu peut être révoqué lorsqu'il a été la suite d'une erreur de
fait : ainsi lorsqu'un débiteur a reconnu sa dette à la suite d'une
confusion de factures. Au contraire, la révocation est impossible pour
erreur de droit, c'est-à- dire une erreur sur les conséquences juridiques
de l'aveu. Ensuite, l'aveu est indivisible, c'est- à-dire qu'il doit être pris
en son entier. Celui qui s'en prévaut ne peut pas en retenir ce qui lui est
favorable, tout en prétendant en retrancher ce qui lui est préjudiciable.
L'indivisibilité ne se manifeste qu'en présence d'un aveu qualifié ou d'un
aveu complexe. L'aveu qualifié est celui qui est accompagné d'une
précision susceptible de modifier les effets juridiques du fait avoué. Par
exemple, le défendeur, assigné en remboursement d'un prêt à intérêts,
reconnaît le prêt, mais le prétend consenti sans intérêts. Etant ́
indivisible, cet aveu ne peut justifier que le remboursement du capital.
L'aveu complexe est celui qui porte sur deux faits connexes, dont le
second ne peut exister sans le premier. Par exemple, le défendeur
reconnaît le prêt, mais en ajoutant qu'il l'a remboursé, ou le dépôt, en
indiquant qu'il a restitué la chose déposée. Du fait de l'indivisibilité, la
déclaration n'a alors aucun intérêt pour le demandeur.

Le serment.
C'est l'affirmation solennelle de la véracité d'un fait et, comme mode de
preuve, l'affirmation solennelle par l'une des parties, de l'exactitude de
ses allégations. Le serment est, en quelque sorte, l'inverse de l'aveu : il
est une affirmation favorable à son auteur, au lieu de défavorable.
Originairement, le serment a été un acte religieux, d'où il tire encore sa
force probante. Mais il ne saurait dépendre de quiconque de se faire
croire ainsi sur parole : un plaideur n'est admis à prêter serment
qu'autant que celui-ci lui a été déféré soit par le juge, soit par son
adversaire lui-même. Et la force probante du serment n'est pas la même
dans les deux cas. Le Code civil en connait deux sortes.
Le serment supplétif. Lorsqu'il est déféré par le juge, le serment est dit
supplétif. C'est une mesure d'instruction que le juge peut ordonner
d'office, à la double condition que l'acte ou le fait litigieux ne soit ni
pleinement prouvé, ni totalement dépourvu de preuve. Le juge le défère à
celle des parties à qui il accorde a priori le plus de confiance. Il invite,
soit le demandeur à jurer que sa demande est justifiée, soit le défendeur
à jurer qu'elle ne l'est pas. Le serment ainsi prêté n'a pas force probante
absolue. Il ne constitue pour le juge qu'un élément de décision parmi
d'autres et qui lui laisse la plénitude de son pouvoir d'appréciation. Le
code indique expressément que la valeur probante de ce serment est
laissée à l'appreciation
́ du juge. D'utilité minime, il est rarement déféré.
Le serment décisoire. Le serment décisoire est celui qui est déféré par
l'une des parties à l'autre : par exemple, le demandeur invite le
défendeur à jurer qu'il ne doit rien. Ce serment tire son nom du fait qu'il a
force probante absolue de sorte qu'il décide du gain du procès, l'autre
partie n'étant plus admise à prouver la fausseté du serment prêté. Mais
cette solution du procès n'est pas toujours atteinte directement car le
plaideur à qui le serment est déféré a le choix entre trois attitudes. Il
peut prêter le serment demandé, ce qui lui fait gagner le procès. Il peut
refuser de prêter serment, ce qui lui fait perdre le procès. Il peut aussi
référer le serment à son adversaire, c'est-à-dire lui en retourner la
demande : le défendeur, invité à jurer qu'il ne doit rien, invite à son tour
le demandeur à jurer qu'il est bien créancier. Ce dernier n'a plus alors
qu'une option : prêter le serment référé – auquel cas il gagne – ou refuser
de le prêter et perdre alors le procès. On voit bien ainsi que le serment
décisoire détermine toujours – en un ou deux temps, selon le cas – le
résultat du litige. À l'evidence,
́ il s'agit d'un mode de preuve dangereux
en ce qu'il met celui qui en prend l'initiative à la discretion
́ de la loyauté
de son adversaire. Si la loi l'admet néanmoins, c'est d'abord parce que le
faux serment est réprimé par la loi pénale, ce qui permet d'espérer, avec
quelque optimisme, que cela se produira rarement. C'est aussi parce que
la délation du serment est classiquement analysée comme une
transaction : celui qui le défère accepte de s'en remettre à la parole de
son adversaire. Cela explique la limitation des cas où ce procédé est
recevable : comme l'aveu, le serment décisoire est exclu dans les
matières indisponibles. Sous cette réserve, le serment décisoire est, en
principe, recevable en tout domaine.

CHAPITRE 1. LA CHARGE DE LA PREUVE


Section 1. Le principe : celui qui allègue a la charge de la preuve
Section 2. L’exception : les présomptions légales
§1. Source des présomptions légales
§2. Force des présomptions légales
CHAPITRE 2. LES MODES DE PREUVE
Section 1. Les différents modes de preuve et leur force probante
§1. La preuve littérale
A. Les deux types de preuve littérale
B. Les supports des preuves littérales
§2. La preuve testimoniale
§3. Les présomptions judiciaires
§4. L'aveu
§5. Le serment
Section 2. L'admissibilité des modes de preuve
§1. La distinction entre les actes et les faits juridiques
A. La preuve des actes juridiques
B. La preuve des faits juridiques
§2. La question de la « moralité », de la loyauté de la preuve

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