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CONTENU DE L’EXPOSE
INTRODUCTION ......................................................................................................................... 4
1 PRESENTATION DE L’AUTEUR .................................................................................................. 4
2 PRESENTATION GENERALE DE L’OUVRAGE ET BIBLIOGRAPHIE ............................................................ 4
3 IDEE GENERALE DE L’OUVRAGE (THEME PRINCIPAL) ....................................................................... 6
4 CONTENU DE L’OUVRAGE : IDEES, THEMES ET LEUR EXPLICATION SELON L’AUTEUR ..................................... 6
4.1 CHANGER L’ECOLE CLASSIQUE ............................................................................................... 6
4.1.1 L’école africaine dans l’impasse ................................................................. 7
4.1.1.1 Une sous-scolarisation qui est aussi une mal scolarisation ...................... 7
4.1.1.2 Sur-scolarisation et désintégration d’un État : le cas malien ................... 8
4.1.1.3 Y-a-t’il des solutions ? .................................................................................... 9
4.1.2 La formation des maîtres à l’étude du milieu ............................................. 9
4.1.3 L’utilisation des langues nationales à l’école : commencer par le début ou
la fin ? .................................................................................................................. 10
4.1.3.1 Commencer par le début ............................................................................. 10
4.1.3.2 Commencer par la fin................................................................................... 10
4.2 A LA RECHERCHE DES FORMULES NOUVELLES ........................................................................ 11
4.2.1 L’expérience malienne .............................................................................. 11
4.2.1.1 Recherche sur l’éducation de base au Mali .............................................. 11
4.2.1.2 L’alphabétisation pour quoi faire ? ............................................................ 13
4.2.1.3 Alphabétisation et développement « endogène » .................................. 14
4.2.1.4 Une expérience de formation « supérieure » de jeunes ruraux en
langue bambara ................................................................................................................
......................................................................................................................... 15
4.2.2 L’expérience nigérienne............................................................................ 17
4.2.2.1 L’expérience de formation de jeunes couples.......................................... 17
4.2.2.2 La formation sur place (Des CPT « fixes » aux CPT « tournants » :
l’expérience de Guessedoundou)............................................................................... 18
4.2.3 L’expérience voltaïque .............................................................................. 19
5 IDEES ET THEMES D’AUTRES AUTEURS ...................................................................................... 21
6 POSITION PERSONNELLE PAR RAPPORT AUX IDEES ET THEMES DE L’AUTEUR.......................................... 23
CONCLUSION .......................................................................................................................... 24
ANNEXES .............................................................................................................................. 26
Annexe 1 : Taux brut de scolarisation 2008 – 2009 ............................................................ 26
Annexe 2 : La situation du pays ....................................................................................... 26
4
INTRODUCTION
L’école africaine est aujourd’hui dans une véritable impasse. Si les pays d’Afrique Noire
restent, dans leur grande majorité, des pays sous-scolarisés, la totalité d’entre eux sont
déjà « sur-scolarisés » si l’on prend en considération le coût du système scolaire pour
les finances publiques et la capacité d’absorption des sortants par le secteur dit
moderne de l’économie.
Face à cette situation, Guy BELLONCLE propose un ensemble de formules dont les
premières expériences posent des jalons pour l’avenir : alphabétisation et formation
supérieure des jeunes au Mali, centres de promotion rurale et de perfectionnement
technique au Niger, centres de formation des jeunes agriculteurs au Burkina,
apprentissage des langues nationales, etc.
1 PRESENTATION DE L’AUTEUR
Né en Bretagne en 1938, ancien élève de l'École Normale Supérieure de Saint-Cloud et
de l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, Belloncle est docteur en sociologie
du développement, en lettres et en sciences humaines.
Spécialiste du développement, il fut secrétaire général adjoint de l'Institut de
recherche et d'application des méthodes de développement (en 1975). Professeur
honoraire de sociologie de l'Université de Tours, Guy BELLONCLE a également travaillé
comme expert et consultant dans différents pays d’Afrique Noire. Il enseigne (depuis
2005) à l'Institut catholique de Madagascar.
monde, il pose les véritables problèmes de l’éducation (et non uniquement de l’école)
africaine et propose des solutions concrètes (tirées d’expériences réelles) afin
d’équilibrer l’épineuse et complexe équation d’éducation et de développement.
Ainsi, cet ouvrage est constitué de deux parties intitulées : « Changer l’école
classique » (première partie) où Belloncle fait le diagnostic de l’école en Afrique Noire
et « A la recherche des nouvelles formules » (deuxième partie) dans laquelle il
propose des solutions concrètes et réalistes.
Par ailleurs, Guy BELLONCLE est aussi l'auteur de nombreux ouvrages sur l'éducation,
la formation et le développement dans le Tiers-monde(en particulier à destination des
paysans).
Chez le même éditeur :
1. La question paysanne en Afrique noire, 1982, 128 p.
2. Alphabétisation et gestion des groupes villageois (en collaboration avec P.
EASTON, P. SÈNE, P. ILBOUDO), 1982, 276 p.
3. L’éducation des adultes en Afrique noire (manuel d’auto-évaluation assistée) 3
tomes(en collaboration avec P. EASTON).
4. Participation paysanne et aménagements hydro-agricoles (début 1985).
5. Alphabétiser les adultes africains et malgaches en trois mois. Procédé d'un
guide pratique pour une alphabétisation sélective, intensive et fonctionnelle liée
à la gestion d'organisations paysannes, Collection Tropiques, 2005, 156 p.
Chez d’autres éditeurs :
1. Santé et développement en milieu rural africain (en collaboration avec Dr G.
FOURNIER). Éditions Ouvrières, 1975, 236 p.
2. Quelle éducation pour le Mali ? Institut International de Planification de
l’Éducation (IIPE), 1979, 250 p.
3. Coopératives et développement en Afrique noire sahélienne. Université de
Sherbrooke, 1979, 449 p.
4. Le chemin des villages. L’Harmattan, 1979, 288 p.
5. Jeunes ruraux du sahel. L’Harmattan, 1979, 235 p.
6. L’hivernage. Roman. L’Harmattan, 1979, 140 p.
7. Quel développement rural pour l’Afrique noire ? Nouvelles éditions africaines,
1979, 204 p.
8. Femmes et développement en Afrique sahélienne. Éditions Ouvrières, 1980, 212
p.
9. Le tronc d’arbre et le caïman. Carnets de brousse maliens. L’Harmattan, 1981,
198 p.
10. Dix années d’alphabétisation en Haïti. Agence de Coopération Culturelle et
Technique (ACCT), 1981, 120 p.
6
Dans cette première partie, Belloncle fait un diagnostic des véritables problèmes de
l’école en Afrique noire et montre les voies à suivre pour la sortir de cette impasse.
7
quelques heures à un enfant sachant déjà lire en français pour apprendre également à lire
dans sa langue maternelle. L’apprentissage de l’écriture sans faute est un peu plus long mais
ne devrait guère dépasser une cinquantaine d’heures. Ainsi, son extrême simplicité devrait en
faciliter l’adoption : elle ne perturbe en effet aucunement le système éducatif actuel, en plus
la maîtrise des deux langues est aussi d’un grand intérêt pour l’enfant. En outre, elle créerait
une dynamique qui, sans traumatisme inutile, amènerait progressivement à la démarche
logique qui consiste bien sûr à commencer l’apprentissage de la lecture et de l’écriture dans la
langue maternelle. Cela se ferait à travers une acquisition progressive de la maîtrise des
langues nationales par les maîtres qui voudront à la longue revenir à la logique ; la
transformation des relations de l’école et du milieu (l’acquisition de la maîtrise écrite de sa
langue maternelle conduit immédiatement à une revalorisation de la société elle-même) et le
consentement des parents qui seront ravis de voir leurs enfants lier et écrire dans leurs
langues, voire devenir « alphabétiseurs » et « formateurs » au niveau de leurs villages.
Alors commencer par le début ou commencer par la fin ? Au lecteur maintenant de se
prononcer.
Ce fut dans ce contexte, souligne l’auteur, que l’idée de « rechercher des nouvelles
formules pour assurer une éducation de base1 à la plus grande majorité des
populations africaines » a vu le jour. C’est donc dans ce cadre que s’inscrit également
l’étude de l’éducation de base au Mali.
Au Mali, les résultats obtenus par l’alphabétisation fonctionnelle sont très
encourageants quant à la réalisation d’une éducation de base pour tous. En outre, il y
existe aussi à côté de cette formule d’autres « ressources éducatives cachées » très
utiles. Il s’agit des initiatives éducatives d’origine religieuses, soit islamique (écoles
coraniques), soit chrétienne (écoles bibliques, écoles catéchistes). La méthodologie
proposée pour l’étude sur l’éducation de base a donc été de partir d’un inventaire et
d’une évaluation de l’ensemble de ces formules éducatives existantes afin d’être en
mesure de dégager à partir de là des propositions réalistes pour un type d’éducation
mieux adapté. (p. 78). C’est cette méthodologie, bien plus que les résultats, qui
explique véritablement l’intérêt de cette étude dans cet ouvrage car pouvant être une
source d’inspiration dans une large mesure pour nombre de pays soucieux de faire
l’inventaire de ce que l’auteur a appelé très justement les « ressources éducatives
cachées ».
C’est donc dans cette perspective que l’équipe pluridisciplinaire chargée de l’étude,
après une analyse rapide des « institutions éducatives » existantes, a finalement
retenu fondamentalement six axes de recherche qui sont :
Comment faire de l’enseignement fondamental une éducation de base ?
La formation des adolescents ruraux.
La formation des adultes.
La formation continue.
Recherche linguistique appliquée et Production de matériaux en langues
nationales.
Stratégies Éducatives Régionales.
L’interrogation suivante s’inscrit dans le dernier axe intitulé stratégies éducatives
régionales.
1
« L’éducation de base dispense, compte tenu des moyens dont dispose la société concernée, un
contenu éducatif minimum (connaissances, valeurs, attitudes, savoir-faire) à préciser dans chaque
particulier, susceptible d’aider tout bénéficiaire à comprendre les problèmes de son milieu, à avoir
conscience en tant que citoyen de ses droits et de ses devoirs, à participer au développement socio-
économique de sa communauté et à s’épanouir en tant qu’individu.
L’éducation de base est fondamentale dans la perspective de l’éducation permanente puisqu’elle en
constitue la première phase préparant à des acquisitions ultérieures. Elle est fonctionnelle puisqu’elle
recherche une adaptation souple au milieu en donnant une place particulière aux problèmes pratiques de
la vie tels : santé, nutrition, travail productif. Atteindre effectivement et progressivement le plus large
public, elle utilise des formules éducatives peu onéreuses. » (pp. 76 à 77)
13
2
Guide de l’alphabétisation fonctionnelle, UNESCO, Paris, 1972.
3
Auteur du Guide et non Belloncle.
14
Par ailleurs, même s’il est incontestable que l’alphabétisation constitue pour les
paysans dans leur ensemble un moyen de défense par rapport au monde extérieur, les
motivations de ces paysans sont diverses et variées. Il importe donc de partir des
réelles motivations des paysans (contrôle du commerce ; facilité des relations avec
l’administration ou même défense culturelle) afin de mieux répondre à leurs besoins.
4.2.1.3 Alphabétisation et développement « endogène »
L’auteur évoque ici l’impact de l’alphabétisation sur le développement des trois
villages de Kita4. Toutefois, avant d’aller à l’impact, il fait une description très
sommaire de la situation de l’alphabétisation dans cette zone. L’alphabétisation est
présente à Kita dans un village sur deux (284 villages et hameaux sur 528 existant) et
près de 400 centres étaient en fonctionnement en 1978. Golobilaji fut le premier des
trois villages à expérimenter l’alphabétisation en 1969. Il sera suivi par Mourougoula
(1970) et Souransan-Toumounto en 1972. Les premiers centres d’alphabétisation (un
par village) furent construits par les associations de jeunes. Le service
d’alphabétisation forma d’abord les futurs animateurs (anciens scolarisés revenus vivre
au village) et qui après une dizaine de jours de cours intensifs en écriture, lecture et
calcul en bambara ouvriront les cours.
Les premiers élèves étaient des jeunes gens et jeunes adultes (de 15 à 30 ans) venant
de chaque grande famille. Progressivement, les auditeurs réguliers apprennent à lire, à
écrire et à compter et au bout de 3 à 4 ans se crée dans chaque village un premier
noyau d’alphabétisés allant d’une quinzaine à une trentaine de jeunes gens et adultes.
Auparavant, il est constaté aussi que déjà à un ou deux ans selon le village, des
nouveaux centres se créent pour accueillir d’une part les enfants (ou quelques fois les
vieux) et d’autre part les femmes.
S’agissant de l’impact produit par l’alphabétisation, les constats sont époustouflants.
Le nombre d’alphabétisés grandissant, les initiatives se multiplient de village en village.
En effet, à Golobilaji, la première initiative fut de mettre en place une « contre-
équipe » d’achat formée des jeunes alphabétisés et chargée de contrôler l’équipe
d’achat officielle. Cela a pour conséquences (positives bien sûr) : « plus grande
confiance des paysans, libération du personnel d’encadrement, pour d’autres tâches,
diminution des coûts de commercialisation, etc. » (p. 118).
La deuxième initiative est venue de Morougoula : il s’agit du contrôle des rôles de
l’impôt : « Avant, nous ont dit les paysans, [souligne l’auteur], le commandant disait au
village : tu dois tant et le village devait payer, mais aujourd’hui, grâce à
l’alphabétisation, nous pouvons comprendre comment on calcule l’impôt. » et « ainsi,
disent les villageois, il n’y a plus de tricherie. »
4
Petite ville de la première région du Mali et qui est située sur le chemin de fer Bamako-Dakar, à 200 km
environ de Bamako.
15
5
Une sorte de deuxième cycle, le premier étant l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul
élémentaire.
16
6
Acronyme de Compagnie Malienne de Développement des Textiles.
17
7
Ville du sud du Niger proche de la frontière avec le Nigéria.
8
Un district agricole regroupe en moyenne une trentaine de villages et de 15 à 20 000 habitants.
9
Au départ, le recrutement était exclusivement à l’endroit des jeunes célibataires. Mais pour des raisons
telles que d’une part l’instabilité de ces jeunes après leur formation dans leurs villages (souvent, ils
vendent même l’équipement qui leur a été donné pour partir en exode) et d’autre part, même s’ils se
réinstallent, le fait qu’ils ne disposent pas d’exploitation personnelle (de par leur statut) les empêchait
d’appliquer les nouvelles techniques culturales apprises.
18
base en agriculture (ou l’on « théorise » ce qui a été fait le matin) et à ce que l’on
pourrait appeler une formation générale comprenant l’alphabétisation dans la langue
maternelle (hausa ou zarma), des éléments d’éducation civique (connaissance du pays
et de ses institutions), une formation coopérative (dispensée par l’agent local de
l’Union Nigérienne de Crédit et de Coopération), et une éducation sanitaire de base
(dispensée par l’infirmier du dispensaire). » (p. 146).
Ainsi, à la fin de la formation dans les CPR/CPT, « on devrait se trouver en présence de
jeunes couples où l’homme et la femme seraient alphabétisés, auraient pratiqué
ensemble une agriculture nettement plus productive et surtout devraient avoir retrouvé
confiance dans les possibilités d’améliorer les conditions de vie dans leurs villages
d’origine. » (p. 147). Autrement dit, ils disposeront désormais de diverses ressources
qu’ils sont en mesure de mobiliser pour changer de façon considérable leur vie de tous
les jours.
Enfin, l’auteur estime que ces centres connaissent néanmoins un certain nombre de
limites que l’on peut surmonter par un choix raisonné des stagiaires ; une véritable
préparation et un suivi de ceux-ci à leur réinsertion dans les villages et une extension
de la formation à la technologie et à la formation des « formateurs » locaux des futurs
stagiaires.
4.2.2.2 La formation sur place (Des CPT « fixes » aux CPT
« tournants » : l’expérience de Guessedoundou)
L’évaluation des CPR/CPT a conduit à l’expérimentation d’une nouvelle forme
pédagogique dite CPT « tournant » ou encore CPT « au village ». Le CPT de
Guessedoundou fait partie de ces premiers centres expérimentaux. Les réflexions sur
cette expérience ont porté sur : la phase de préparation ; l’alphabétisation et la
formation générale ; la formation technique et les travaux pratiques agricoles et enfin
l’avenir de l’expérience et la nécessaire articulation entre CPT « fixes » et CPT
« tournants ».
La phase préparatoire (étendue sur trois mois) a consisté à une « information-
sensibilisation » des intéressés sur la « philosophie » de cette nouvelle formule du CPT
et sur les modalités pratiques de sa mise œuvre (désignation des stagiaires,
construction de l’infrastructure, etc.). Belloncle reproche à cette phase le fait que
l’information soit purement descendante, c’est-à-dire que les villageois étaient invités
à adhérer à un projet pensé « en dehors d’eux ».
Quant à l’alphabétisation et de la formation générale, elle a commencé au bout de la
phase préparatoire conformément à la nouvelle méthode intensive. Toutefois, même
si plusieurs hommes et femmes ont su lire, écrire et calculer, l’alphabétisation n’était
hélas pas fonctionnelle (en tant que réutilisation systématique des acquis) pour autant.
S’agissant de la formation technique et les travaux pratiques agricoles, les travaux
pratiques agricoles se font d’une part sur un « champ » de 2 hectares cultivés en
19
commun, d’autre part, sur des parcelles personnelles d’un demi-hectare. Ici, il s’agit de
démontrer tous les avantages des innovations techniques agricoles « modernes » en
termes de productivité et surtout de gain de temps de jachère dans la culture continue
des terres difficilement cultivables. Cela nécessite de faire appel à des techniques et
pratiques agronomiques beaucoup plus complexes. Ces pratiques doivent donc être
éclairées par des connaissances théoriques solides, c’est-à-dire une formation
technique en matière d’agronomie (sur les sols, les plantes, le complexe sol-eau-
plante, les systèmes de protection, etc.) qui peut bel et bien se faire progressivement
dans les langues africaines. Il faut juste définir les contenus agronomiques et mettre au
point une pédagogie qui convient aux réalités locales.
Quant à son avenir, l’auteur estime que l’expérience de Guessedoundou paraît bien
engagée et riche de promesses. Elle doit, en effet, « montrer qu’il est possible de
« former au village et pour le village » et à des coûts supportables par les ressources
nationales. » (p. 170). Toujours est-il qu’elle s’inscrit dans une durée plus longue et
qu’elle soit vue comme pouvant être complémentaire de l’expérience des CPT « fixes »
(qui présentent d’ailleurs une supériorité manifeste quant à la nouvelle formule) et
non comme concurrente.
Belloncle estime enfin que ces expériences, au-delà du Niger, méritent d’être connues
et confrontées avec d’autres expériences d’inspiration similaire.
10
Depuis août 1984, la Haute-Volta est devenue le Burkina Faso.
20
Joseph KI-ZERBO, dans son livre intitulé « A quand l’Afrique ? » ouvre une importante
parenthèse à l’éducation actuelle qu’il qualifie « d’éducation anti développement »
car elle n’est pas adaptée à l’Afrique et de ce fait, détruit l’avenir de la plupart des
enfants africains. Or, l’éducation doit être considérée comme le cœur même du
développement. Mais l’éducation et le développement ne doivent être mis en
équation que s’il s’agit d’une éducation adaptée.
Pour améliorer cette éducation, il faut diminuer le nombre d’écoles afin de les adapter
culturellement et socialement ; changer les contenus et les structures actuels.
L’alphabétisation est une condition sine qua non du changement multiforme du
système éducatif. Elle passe forcément par les langues africaines, un moyen d’assurer
l’alphabétisation totale. En passant par les langues nationales, on restaure également
la dignité du paysan. Si on passe au registre des langues africaines, les paysans se
présenteront comme l’élite, et non plus comme ceux qui trainent derrière et qu’on
22
doit tirer à bout de bras. C’est une approche psychologique qui satisfait les apprenants
paysans en valorisant une culture où ils sont à leur aise comme le poisson dans l’eau.
Bref, il ne faut pas chercher à augmenter la vitesse du train de l’éducation, mais de
changer la direction des rails, déclare-il.
Ndongmo, dans son livre intitulé « Éducation scolaire et lien social en Afrique noire :
Perspectives éthiques et théologiques de la mise en place d'une nouvelle philosophie
de l'éducation » (2007), part de l'hypothèse de départ selon laquelle l'origine de la
crise généralisée de l'Afrique subsaharienne n'est pas d'abord économique mais à
proprement parler une question de mentalité. Il y a eu une profonde perturbation
mentale liée à l'implantation de l'école moderne en Afrique noire. Cette école qui
serait à l'origine d'importants bouleversements sociaux, n'a pas seulement entamé et
déstructuré le paysage culturel africain en remettant en cause tout son système de
valeurs morales et symboliques, mais plus profondément, elle a défait le lien social à
cause de son insularité. Le procès se redouble lorsqu'on réalise que l'implantation de
cette école en Afrique noire a été initiée par les missionnaires chrétiens. Par leur
engouement pour les écoles, l'on peut se demander s'ils n'ont pas ruiné non
seulement le lien social mais aussi la pertinence de l'Évangélisation.
nouvelle page de l'histoire africaine, souvent écrite par d'autres. Tel est le processus
auquel voudrait participer la réflexion proposée par Stanislas dans cet ouvrage.
Ainsi, il faut donc reconnaître que les idées défendues par Belloncle sont encore
d’actualité. L’école africaine en général et malienne en particulier se trouve encore à
sa case de départ c’est-à-dire coincée toujours dans une véritable impasse : un peu
plus du tiers du budget national est toujours consacré au système éducatif ;
cependant, les produits formés agrandissent chaque année qui passe le monde des
diplômés sans emploi.
Il est évident, tout comme le montre Belloncle, que l’école telle qu’elle a été importée
et telle qu’elle existe de nos jours encore en Afrique nous oriente plus vers une école
élitiste et surtout coupée du peuple que vers une école du peuple. Élitiste parce
qu’aujourd’hui encore les enfants des villes ont plus de chance d’accès à l’école que
ceux des villages. En plus, le fait même que l’école se fasse dans une langue étrangère
(expliquant en partie sa coupure du peuple) favorise les enfants des villes (où le
français rentre progressivement dans la vie de tous les jours) vis-à-vis des enfants
ruraux qui vivent beaucoup plus le déséquilibre école et société.
Ainsi, nous sommes d’avis de l’auteur qu’il n’est que caricatural de vouloir scolariser
tous les enfants africains, c’est même une illusion. Il est encore plus illusoire de poser
l’équation scolarisation = développement surtout quand il s’agit d’une école qui est
coupée de son peuple comme la nôtre. Le développement de l’Afrique ne peut se faire
qu’en Afrique, avec des africains et pour l’Afrique. Ainsi, il n’interpelle pas que les
scolarisés, mais tout le monde d’où la réalisation du minimum éducatif proposé par
Belloncle à tous les africains.
En outre, nous convenons aussi avec Belloncle que les langues nationales doivent
occuper une place de choix dans ce développement de l’Afrique. D’ailleurs, cela n’est
même pas possible en dehors de ces langues. Ce développement des langues
nationales passe non seulement par une alphabétisation « fonctionnelle » de tous ceux
qui ne sont pas allés à l’école mais aussi par leur appropriation par les intellectuels
africains.
Les problèmes soulevés et les solutions proposées sont certes réalistes et pertinents.
Toutefois, nous estimons qu’elles méritent une amélioration. Nous convenons qu’il
24
faut encourager l’enseignement non formel, mais nous ne pensons pas que cela soit
une réponse suffisante aux problèmes que connait aujourd’hui l’éducation en Afrique
en général et particulièrement au Mali.
De même, la planification au niveau régional est une bonne chose, mais il faudrait
d’abord une bonne politique de décentralisation au plan politique et économique. De
même nous ne pensons pas qu’investir plus dans l’école que les autres secteurs de
développement soit une mauvaise chose en soi. Mais aujourd’hui comme hier, le
problème ne serait-il pas plus lié à une question de planification, de gestion et de
responsabilisation qu’à celle de coût ?
CONCLUSION
En définitive, cet ouvrage de Belloncle retrace les voies et moyens qui permettent à
l’Afrique de sortir de l’ornière de l’école du colonisateur pour poser de façon
véritablement autonome les jalons d’une éducation qui réhabilite ses valeurs
socioculturelles, répond aux besoins immédiats des africains et pour ainsi mettre en
place des stratégies d’auto-développement.
L’école doit donc cesser d’être « la machine efficace pour fabriquer du consommateur
européen » et se mettre au service du peuple. Pour cela, il faut former l’africain à
l’Afrique d’abord et au monde ensuite. C’est-à-dire qu’il faut le former à ses véritables
réalités, aux véritables besoins de l’Afrique et aux nouveaux défis de développement.
Pour ce faire, il faut :
manuels) pour vulgariser toutes les techniques et technologies qui nous sont
nécessaires et leur appropriation par tous : chaque africain doit savoir lire,
écrire et calculer dans sa langue maternelle. Ainsi, ils seront en mesure de créer
et d’expérimenter des nouveaux modèles d’organisation socio-économique et
de construire un type de développement réellement au service du peuple.
Mettre un accent particulier sur la formation technique et professionnelle avec
la multiplication et l’équipement des structures en charge de cette formation
tout en veillant à la formation d’enseignants de qualité et en quantité au niveau
de tous les types et ordres d’enseignement.
En outre, renforcer l’éducation civique et morale en vue de former des
patriotes conscients et résolument engagés pour le développement de la
nation.
Également, impliquer les entreprises dans l’élaboration des politiques en
matière d’éducation afin de mieux planifier les ressources vis-à-vis des emplois.
Ouvrir l’école à la vie avec des innovations et reformes comprises et acceptées
de tous les acteurs concernés car ayant été fortement impliqués mais aussi et
surtout ouvrir l’école aux nouveaux défis d’un monde sans cesse en mutation.
Bref, il est temps pour les décideurs africains d’être réalistes et de regarder les
choses en face. Il ne s’agit plus de jouer avec des chiffres, mais il faut plutôt
donner à chaque africain un minimum éducatif qui est son droit le plus
légitime. Il faut lui donner les moyens de contrôler son univers, son
environnement afin d’en faire sortir ce qui lui est utile. L’école, à elle seule, ne
saurait réaliser un tel projet. Donc aujourd’hui plus que jamais les décideurs
doivent donner plus de place à d’autres formules telles que le non formel. Car,
il s’agit d’intéresser tout le monde au développement collectif et non individuel
et ainsi faire de chacun un responsable et acteur principal du développement
de l’Afrique. L'Afrique est capable de décoller à condition de compter d'abord
sur ses propres forces, c'est -à-dire sur ses propres hommes, dans le respect de
leur patrimoine et de leurs besoins réels. Donc, il ne s’agit plus de scolariser
tout le monde et à rien mais d’éduquer tout le monde.
26
ANNEXES
Annexe 1 : Taux brut de scolarisation 2008 – 2009
courantes de l’État11 plaçant le pays parmi ceux affichant la plus grande priorité
pour leur secteur éducatif. Seulement 36,5% des dépenses courantes d’éducation
sont allouées à l’enseignement fondamental contre 46,2% en moyenne dans les
pays comparables au Mali (Benin, Burkina Faso, Burundi, Congo, Cote d’Ivoire,
Guinée, Guinée Bissau, Libéria, Madagascar, Malawi, Niger, RCA, Sénégal et Togo).
2. La dépense totale d’éducation des familles est en augmentation régulière et
correspond en 2008 à 16% de la dépense nationale d’éducation. Par ailleurs, les
familles contribuent en moyenne pour 33% des dépenses dans les deux cycles du
fondamental contre 23% dans les niveaux post fondamental où très peu d’élèves
d’origine modeste accèdent. En effet, les disparités selon les revenus sont
relativement faibles au premier cycle de l’enseignement fondamental, se creusent
dès le second cycle du fondamental et s’accentuent davantage dans les cycles
secondaire et supérieur.
Au plan de l’accueil des élèves et des rendements interne/externe par ordre et type
d’enseignement
6. Les données sur le préscolaire sont très parcellaires. En dehors des effectifs du
public, il est difficile de cerner l’effectif des autres types d’établissement (privé,
communautaire et communal) rendant difficile toute analyse approfondie de ce
niveau d’enseignement.
7. 1 enfant sur 5 n’a pas accès à l’enseignement fondamental et seulement 54% de
ceux qui y entrent, atteignent la fin de ce cycle. La pauvreté des populations et
l’absence d’une offre de scolarisation à proximité (plus du tiers des enfants de 7-12
11
Hors service de la dette.
28
ans sont à plus de 30 minutes de l’école fondamentale la plus proche de leur foyer)
sont, entre autres, des facteurs qui concourent à cette situation.
8. Plus de la moitié des élèves des classes ayant subi le test du Centre National
d’Education ont un niveau inférieur au niveau minimum requis en langue et
communication et en sciences mathématiques et technologiques.
9. Au niveau du fondamental 1, depuis 2004, les abandons stagnent en moyenne
autour de 23 %. La proportion des redoublants est passée de 19% en 2004 à 14 %
en 2008.
10. En 2008, le taux d’accès dans le Fondamental 2 est de 45% et seulement 34% de
jeunes achèvent le cycle. Le taux d’abandon est estimé à 15% et la proportion des
redoublants à 17%.
11. L'ETP concerne un peu plus de 60 000 élèves en 2008. Il est essentiellement
professionnel avec plus d'élèves dans les formations tertiaires longues. Cependant,
les débouchés pour ce niveau d'enseignement sont plus élevés dans le secteur
primaire (agriculture élevage) et secondaire (extraction aurifère) que dans le
secteur tertiaire.
12. L’offre de formation professionnelle actuelle est une multitude de petits
programmes indépendants (pour les non-orientés, via les Centres d’Education pour
le Développement, les centres d’apprentissage ou chez un maître artisan, via
l’apprentissage dual, formation modulaire etc.). Ces programmes sont souvent des
programmes courts, ne débouchant généralement pas sur l’obtention d’une
qualification reconnue ou sanctionnées par un diplôme. Par ailleurs, il y a une trop
faible représentation des formations agricoles et de spécialisations techniques.
13. L’enseignement supérieur n’arrive pas à absorber chaque année la totalité des
bacheliers. Et ceux qui ne continuent pas leur scolarité à l’enseignement supérieur
ont du mal à s’insérer sur le marché du travail.
14. Depuis 2004, l’effectif des étudiants à l’université de Bamako s’est accru en
moyenne de 22% chaque année sans augmentation conséquente des capacités
d’accueil. Cette situation a entrainé une dégradation des conditions
d’enseignement et une baisse de la qualité. Par ailleurs, seuls 41% des sortants de
l’enseignement supérieur occupent un poste de cadre dans le secteur moderne,
25% sont au chômage et 34% occupent un emploi sous-qualifié par rapport aux
compétences acquises.
Source : Cellule de Planification et de Statistique des ministères en charge de
l’éducation in Cadre des dépenses à moyen terme (2010 – 2012) du secteur de
l’éducation (pp. 6-7).