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Du « Soft power » au « ruan shili » : la diplomatie culturelle selon Pékin

Ce podcast a été publié par France Culture, une station de radio culturelle nationale du groupe Radio
France.

Émission préparée par Marguerite Catton


- Emmanuel Lincot: Professeur à l'Institut Catholique de Paris, chercheur associé à l'Iris et
sinologue
- François Bougon: Journaliste, responsable du service international de Mediapart
- Carole Gomez: Géopoliticienne

I. Introduction

- Après des années de propagande interieure, l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir marque le


début d’une nouvelle ère, et le reveil de l’impérialisme chinois. Le but est de promouvoir le
“rêve chinois”, l’idéologie, la langue, et la culture chinoise sur le territoire national mais aussi
à l’étranger.
- C’est à la fin de la guerre froide (années 90), que les autorités chinoises ont commencé à
s’intéresser au soft power avec un tropisme chinois: la culture est une prioritée du pouvoir
régalien. Mais dans ce contexte s’ajoute une singularité du pouvoir chinois: une nature
autoritaire.
- Le soft power, comme le définit Joseph Nye, est une nouvelle forme de pouvoir politique qui
cherche à séduire, persuader en utilisant des moyens non coercitifs afin de promouvoir ses
intérêts.

II. L’emergence du soft power en chine

- Le soft power chinois a été officialisé lors du 17e Congrès du Parti Communiste Chinois
(PCC) en 2007: il a été adopté par le gouvernement chinois comme un principe politique.
- Dans le 10e Congrès du PCC, Xi Jinping a fait un discours dans lequel il explique que le
socialisme et le rêve chinois sont entrés dans le cœur de leur peuple. En Chine, la création
littéraire et artistique a connu une progression durable: les œuvres culturelles sont prospères.
De plus, l’internet n’a pas cessé d’évoluer avec Huawei, Xiaomi, etc..
- Le reve chinois est le ciment du nouveau nationalisme, et la Chine va s’emparer
d’instruments classiques pour le promouvoir: langue, culture, art.. toutes les ficelles de
persuasion.

La Chine à développer deux différentes stratégies et théories:


- La première repose sur un fond idéologique du type schmittien: c’est une théorie selon
laquelle on est l’ami de la Chine, ou on en est l’ennemi. Si un pays est étranger, il est
considéré comme un ennemi, et la Chine va alors s'en méfier.
- La deuxième consiste en esayant de circonvenir une autre puissance en la neutralisant par
l’argent: la Chine en est bien maître.

III. Wang Huning

- Il pose pour la première fois la notion de soft power chinois en 1993.


- Après l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, la Chine cherche à nuancer les modalités du
discours. Alors que le pays était plus fermé avant, c’était une puissance dite “isolée”, il y a
une volonté sur le plan de la rhétorique de vouloir rehausser le ton et de ne plus faire profil
bas comme avant.
- Wang Huning est un intellectuel, professeur de sciences politiques, juriste et francophone.
C’est le patron de l’idéologie et de la propagande du PCC, et c’est aussi un penseur: il
participe à l’elaboration des apports théoriques.
- Wang Huning veut un régime néo-autoritaire, avec une personne forte à la tête du pays pour
régler les problèmes et prendre des décisions plus rapidement. Il a également un discours
anti-américain, et explore la théorie du declin et du renouveau dans son livre “Les États-Unis
contre les États-Unis”
- Wang est également très important dans les relations entre la France et la Chine car il est
francophone. Il a notamment assisté à la visite d’Emmanuel Macron en 2017.
- C’est un spécialiste de la pensée légiste, un auteur de la pensée antique chinoise qui fait la
part belle à la raison de l’État, afin d’assurer une cohérence globale.
- Ainsi, Wang Huning est essentiel dans la formation et la diffusion du “rêve chinois”

IV. Les outils du soft power

- En 2015, Xi Jinping remet le Parti au cœur du jeu, et cherche à faire du neuf de l’ancien. Il
réanime un département qui dépend du comité central: le département du Front-uni qui
existait depuis longtemps et qui était considéré comme l’une des trois armes secrètes du
Parti. Ainsi, en 2015, ce département revient au centre du soft power chinois.

a) Instituts Confucius
- A partir de la fin des années 90, la Chine va commencer a reflechir à comment se doter de
moyens institutionnels. Ainsi, les instituts Confucius vont être créés.
- Le premier institut ouvre en 2004 en Ouzbékistan, et il sert comme premier laboratoire de la
diplomatie chinoise. Aujourd’hui, il y a en a 548 dans le monde dans 146 pays différents, dont
18 en France.
- Ces instituts participent à la diffusion de la culture chinoise, passant par les traditions,
l’histoire, la philosophie et la langue.
- On voit bien qu’ils sont au service du PCC, avec des modalités de programmes et réunions
qui regroupent les directeurs de chaque institution afin de leur rappeler les directives en
matière culturelle.
- Ces institutions n’ont pas marché dans certains pays comme la France a cause de la
perception de la nature du régime et de l’iféologie chinois qui ne séduit pas l’opinion français.
Cependant, ils marchent très bien en Afrique sub-saharienne parce que le pouvoir de
résistence est infiniment plus faible que celui des pays occidentaux.
- Tout ce qui porte atteinte au Parti et à l’histoire de la Chine est écarté, comme le Tibet et le
Taiwan qui ne sont pas évoqués. Ici, on peut voir une forme d’auto-censure. La Chine se
justifie en disant qu’il s’agit de sécurité culturelle, de sécuriser l’espace chinois contre des
mauvais éléments.

b) Les médias
- En octobre 2007 (date d’arrivée du soft power), la Chine lance de nouvelles chaines de
télévisions, dont une en français. Ils diffusent des journaux, documentaires, cours de chinois,
chroniques qui ervent d’outils de soft power.
- Les organes de médias sont considérés comme des organes du Parti: ils sont au service du
Parti, et non de la Chine. Ils promouvoient les priorités du PCC. Ainsi, ces médias sont très
réglementés avec des visites régulières.
- L’objectif de la Chine est de faire transparaître la belle image de la Chine, de faire en sorte
que les occidentaux voient les hommes de Xi Jinping, et lui même.
V. Quelles réponses apporter à ce soft power

- Emmanuel Macron en a déjà parlé à la conférence des Ambassadeurs, où évoque les


Nouvelles routes de la soie, et le fait qu’il faut prendre en compte les intérêts pour les
européens: il faut construire une relation stable avec la Chine, mais en ne laissant aucunes
ambiguités sur les équilibres de pouvoir et les valeurs européens.
- Ce discours est fondateur car c’est la première fois qu’un chef d’État français prend en
compte le projet des Nouvelles Routes de la Soie.
- François Bougon dit que du point de vue de notre imaginaire, les frontières de l’Union
Européenne ne commencent pas avec celles de l’Ukraine, mais avec celles de l’Asie
Centrale. De plus, il dit aussi qu’il faudrait créer un nouvel organe au niveau européen de la
cinologie pour répondre d’une voix commune à la Chine.

VI. Wang Jianlin

- Wang Jianlin est un ancien soldat de l'Armée populaire de libération et membre du Parti
communiste chinois. En 1989, il prend la direction du groupe Wanda Commercial dont le
siège se trouve à Dalian.
- Cet homme est l’un des emblêmes du soft power chinois, et c’est l’un des hommes le plus
riche de Chine. Il est à la tête du réseau de salles de cinéma, ce qui est clé à la diffusion du
Chinawood (industrie du cinéma).
- Jianlin a une stratégie économique et une ambition politique qui correspond aux aspirations
du pouvoir chinois.

VII. Le secteur du sport dans le soft power chinois

- Le sport est à présent un secteur sur lequel le gouvernement Chinois veut se concentrer,
afinde réaffirmer sa puissance. L’une des prioritées dans ce secteur est le développement du
comité national olympique de la Chine, en formant une équipe compétitive.
- Jusqu’à présent, la Chine n’était pas perçue comme une nation compétitive dans les secteurs
sportifs - elle est d’ailleurs placée en 54ème position sur FIFA, vue comme une injure pour Xi
Jinping.
- Après la chute de l’URSS, qui était l’adversaire principale des États-Unis lors des jeux
olympiques ou tournoi sportif, la Chine voit cela comme une opportunité pour développer ce
nouvel outil de soft power.
- La diplomatie du ping pong en Chine est essentielle, avec la visite de Nixon en 1972 à Pékin.
- L’une des autres cibles importantes de la Chine est le football: elle souhaite être candidate à
l’accueil de la Coupe du monde en 2030, concurrrencer des grandes nations du football afin
d’être qualifiée et finalement remporter la coupe du monde d’ici 2050.

Conclusion

La Chine a comme objectif clé d’améliorer son image à l’international avec la création du
“rêve chinois”. La notion du soft power a d’abord été développée en 2007, lors du Congrès, et est
aujour’hui l’un de ses principaux atouts. La nouvelle Chine de Xi Jinping développe son soft power, en
faisant appel à différents outils comme les Instituts Confucius qui ont aujourd’hui le plus grand
nombre d’instricts, devant l’Alliance Française, mais aussi les médias. On pourrait être amené à se
demander dans quelle mesure le soft power chinois pourrait être perçu comme une menace pour les
valeurs des démocraties libérales occidentales.

J’ai trouvé ce podcast très intéressant, malgré le fait qu’il était assez long et qu’il touchait
différents aspects du soft power chinois, je ne m’y suis pas perdue. Par contre, je trouve qu’il faut
savoir différencier ce qui est dit de manière objective, et lorsque les invités parlent de leurs propres
avis. J’ai trouvé cet article Mythe et Réalité du Soft Power Chinois très intéressant à lire à côté.

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