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UFR - Sciences de l’Ingénieur

Université de Thiès
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Chapitre 0 - Introduction à la Géophysique

1 Introduction
Dans les Sciences de la terre et les Sciences du sol, la connaissance de la structure et des
propriétés physiques de la partie interne, invisible de terre, est un problème récurrent. A titre
d’exemple, l’ingénieur civil ou l’ingénieur géotechnique cherche à comprendre la structure et
les propriétés du sous-sol pour une bonne implantation de son ouvrage ; l'hydrogéologue
cherche à comprendre la structure interne d'un aquifère ; le géologue pétrolier cherche à
comprendre la présence et la qualité d’un réservoir d’hydrocarbures ; le géologue minier
cherche la disposition spatiale d'un filon de minéralisation.

L’investigation en vue de la connaissance de la structure interne de la terre fait appel à deux


grandes familles de méthodes : les méthodes d’investigation directes et les méthodes
d’investigation indirectes.

Les méthodes d’investigation directes se font par observation directe d'affleurements, de


fouilles, d’excavation, de forages, de sondages ou de puits d’exploration.

Figure 1 : Exemple d’affleurement naturel en bordure de mer (photo à gauche),


d’excavation dans une carrière (photo au centre) et de sondage mécanique sur un site
d’exploration (photo à droite)

Ces méthodes comportent cependant un certain nombre de limitations :


• Les affleurements sont en général très localisés surtout lorsque le relief est peu
marqué et ne renseignent que ponctuellement sur la structure interne. (Affleurement le
long des routes, chemins de fer, falaises, côtes). Il s'y ajoute qu'en climat tropical,
l'altération superficielle tend à homogénéiser les affleurements par le processus de la
latéritisation.
• Les sondages sont techniquement difficiles à mettre en œuvre et souvent
économiquement couteux. Le cout technique et financier augmente rapidement
lorsque la profondeur. A titre d'exemple, le forage le plus profond à ce jour est le forage
de Kola en Russie. Avec un objectif de départ de 15'000 m, le forage s'est arrêté à
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12'262 mètres.
• Pour avoir de l'information sur la structure et les propriétés du sous-sol sur une grande
étendue, la seule alternative dans le cas des méthodes directes consiste à multiplier
les sondages, ce qui devient rapidement irréalisable.
• Enfin, malgré l'importance des moyens nécessaires pour leur mise en œuvre, les
méthodes directes même si elles sont fiables, ne donnent qu'une information
ponctuelle sur la structure interne de la terre.

Les méthodes indirectes tentent de contourner les difficultés opérationnelles et


économiques rencontrées avec les méthodes directes. Elles proposent de comprendre la
structure interne du globe en étudiant les variations de comportement d'un champ de force
physique à travers le sous-sol.

Le champ de force utilisable peut être naturel (exemple du champ gravitationnel) ou artificiel
(exemple du champ électrique).

La géophysique utilise l'approche indirecte pour comprendre la structure interne du globe. Les
méthodes indirectes sont non destructives ou non invasives. De façon plus précise, nous
pourrons dire que la géophysique utilise les méthodes de la Physique à la solution de
problèmes relatifs à la Terre. En effet, il existe une corrélation entre les propriétés physiques
et les caractéristiques d'un terrain.

La géophysique est une science, très utile pour l'ingénieur, qui évolue à la frontière des
géosciences, de la physique, des mathématiques et de l'informatique.

Il est important de noter que les méthodes géophysiques ne cherchent pas à éviter
l’utilisation des forages pour l’exploration des terrains, mais visent à les optimiser en réduisant
leur nombre en leur trouvant un emplacement optimal.

Figure 2 : Exemple de comparaison des méthodes directes et indirectes : ici l’utilisation


des forages (méthode directe) pour l’investigation du sous-sol ne permet pas de voir
l’existence d’un dôme de calcaire. Alors que celle-ci aurait été mise en évidence par une
méthode géophysique (méthode indirecte) (source Transportation research, octobre
2008)

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2 Principe de la Géophysique
Il existe une multitude de méthodes géophysique. Chaque méthode est sensible à une ou
plusieurs propriétés physiques des terrains. De ce fait les méthodes géophysiques sont
souvent combinées pour une plus grande efficacité. Ainsi les zones d’ombre laissées par
une méthode peuvent être comprises avec les autres méthodes.

L'approche de la géophysique est essentiellement expérimentale avec comme objectif final la


compréhension de la structure interne de la terre et ses propriétés physiques.

La mise en œuvre d'une méthode géophysique nécessite plusieurs étapes que sont
l'acquisition de données, le traitement et l'interprétation des données.

2.1 L'acquisition
Elle nécessite une source d’énergie naturelle ou artificielle générant un champ de force. En
général, les champs de force naturels permettent d’investiguer des profondeurs plus
importantes, mais les champ de force artificiels permettent de voir plus de détails.

Le champ de force peut être qui une onde se propage dans les terrains encaissants en fonction
des propriétés physico-chimiques et suivant une loi physique spécifique. A titre d’exemple, le
champ électrique se propage dans un milieu en fonction des propriétés électriques suivant
la loi d’ohm.

Une partie de l'énergie est généralement absorbée par les terrains tandis qu'une autre partie
est réfléchie à la surface ou elle est détectée par des récepteurs qui permettent à un utilisateur
d’enregistrer les données ou signal.

Dans les systèmes modernes, le relevé manuel des données est remplacé par un système
d'enregistrement automatique (ordinateur ou data logger) qui se charge du stockage
numérique des données.

Figure 3 : Utilisation de champ de forces ou énergie électromagnétique pour la mesures


des propriétés physiques sur une digue (photo à gauche) et sur une éprouvette au
laboratoire (photo à droite)

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2.2 Le traitement
Il nécessite généralement des outils de traitement du signal. En effet, le signal émis par le
terrain en réponse à la source est porteuse de l'information sur les propriétés intrinsèques du
terrain étudié mais le signal peut également être parasité ou bruité suivant les cas soit par
interférence avec d'autres signaux ou sources voisines ou directement par l'imperfection
inhérente aux appareils de mesure.

Le but principal du traitement est d'augmenter le rapport signal/bruit. Un objectif idéal du


traitement est d’avoir un signal après traitement renfermant au moins 95% de bonne
information (encore appelée signal) et au maximum 5% de bruit.

A la fin du traitement, les données filtrées sont représentées sous forme graphique. Toutes les
informations en rapport avec la géométrie ou la localisation sont ajoutées de façon à faciliter
l'interprétation.

Figure 4 : Représentation sur une carte de mesures de résistivités après traitement.

2.3 L'interprétation
Dans cette étape, les résultats sont interprétés en termes de signification géologique. Un
concept souvent utilisé est le concept d’hétérogénéité ou d’anomalie. Si la propriété physique
mesurée a un rapport avec l’objet recherchée, tout changement de la nature du terrain
s’accompagne changement de propriétés physiques.

Les techniques d'interprétation varient beaucoup en fonction de la méthode géophysique. A


titre d’exemple, dans la prospection par méthode magnétique, l’interprétation est faite en
comparant le champ magnétique mesurée en un point avec ce que devrait être le champ dans
des conditions normales : nous parlons dans ce cas d’anomalie magnétique.

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L’interprétation peut se faire par simple identification des structures hétérogènes ou anormales
que le géophysicien peut entrevoir et les conforter par sa connaissance des conditions
géologiques, hydrogéologiques ou géotechnique du terrain.

Dans d’autres cas l’interprétation peut nécessiter une modélisation inverse communément
appelée inversion. L’inversion vise à retrouver les propriétés du terrain en fonction des
données mesurées.

3 Exemples de méthodes géophysiques


3.1 Méthode sismique
La sismique permet de déterminer la structure du sol en se basant sur les propriétés de
propagation d’une onde sismique. Pour cela on génère une vibration avec une masse, de la
dynamite ou un camion vibreur. L'onde ainsi créée se propage dans le sol, se réfléchit ou se
réfracte avant d'être enregistré par des récepteurs ou géophones sensibles aux moindres
déplacements du sol.

Figure 5 : Acquisition de données sismiques sur un chaussée. Nous avons les


géophones sur le sol, reliés au sismographe et le tout connecté à l’ordinateur

C'est de loin la méthode géophysique la plus utilisée notamment dans la prospection


pétrolière. Elle permet d'investiguer de grandes profondeurs, jusqu'à plusieurs kilomètres.

Elle est utilisée en prospection et lors de la caractérisation des réservoirs dans la tentative de
compréhension de corps sédimentaires complexes afin d'optimiser la disposition des forages
d'exploration et d'exploitation.

En géotechnique la sismique est utilisée pour la compréhension de la structure et des


propriétés physiques des terrains superficiels, lors des travaux de fondation ou en génie
parasismique. A titre d’exemple, la vitesse des ondes sismiques, notamment les ondes P, peut
être corrélée avec la densité des roches.

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3.2 Méthode électrique
La méthode électrique est basée sur la mesure des propriétés de propagation du courant
électrique. A titre d’exemple, la mesure de l'intensité et de la différence de potentiel électrique
entre les deux électrodes du dispositif de mesure permet de déduire la résistivité des terrains
étudiés.

Les méthodes électriques sont très utilisées dans l'étude de la résistivité apparente des sols
dans la prospection hydrogéologique, dans l’étude du gonflement des argiles, dans les
problèmes de pollution ou dans l’étude des problèmes de la salinisation.
La méthode électrique est caractérisée par la souplesse dans sa mise en œuvre et est souvent
très efficace dans l'étude des terrains superficiels.

Figure 6 : Méthodes électriques. Nous avons les électrodes plantés au sol reliés au
résistivimètre par un câble

3.3 Méthode gravimétrique


La gravimétrie se propose de mesurer les variations de densité des terrains superficiels pour
comprendre la structure des terrains. Elle utilise une source naturelle: le champ gravitationnel.
Le champ gravitationnel mesuré est comparé avec un champ théorique selon un modèle.
Toute différence ou anomalie gravimétrique est interprété comme un excès ou un défaut de
densité.
C'est une méthode géophysique fastidieuse et difficile à mettre en œuvre mais présente une
grande efficacité dans la détection des cavités souterraines, en hydrogéologie, en prospection
pétrolière, en géologie minière et dans l'étude des structures géologiques.

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Figure 7 : Méthode gravimétrique. L’élongation du ressort due à la gravité (au poids) est
moins importante en présence de vide et plus importante en présence de roche dense

3.4 Méthode magnétique


La méthode magnétique étudie les variations du champ magnétique terrestre causées par les
objets pour déduire leur présence. En général on mesure la norme du champ magnétique total
en un point donné que nous comparons à une valeur de référence. La différence observée ou
anomalie magnétique est interprétée comme liée à la présence d’objet magnétique.
C'est une méthode très efficace dans la prospection minière ou dans la détection d’objets
métalliques (tels que les UXO, les réseaux).

Figure 8 : Méthodes magnétiques. Le champ magnétique terrestre normal est perturbé


par la présence de certains corps a magnétiques. (anomalie magnétique)

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4 Classification des méthodes géophysiques
Il existe plusieurs types de classification des méthodes géophysiques :

4.1 Classification basée sur la finalité


Cette classification répertorie les différents secteurs faisant appel à la géophysique à une
étape déterminée. On distingue la géophysique pétrolière, la géophysique minière, la
géophysique hydrogéologique, la géophysique de sub-surface (pour la géotechnique), etc.
Ces différents domaines s’intéressent à des profondeurs d’investigation et à des résolution
différentes.
A titre d’exemple, en exploration pétrolière la profondeur investiguée peut atteindre plusieurs
kilomètres, tandis qu’elle ne sera que de quelques centaines de mètres en hydrogéologie et
quelques dizaines de mètres en géotechnique. Lorsque la profondeur d’investigation
augmente la résolution diminue et vice versa.

4.2 Classification basée sur le milieu d'application


Cette classification se base sur le domaine ou milieu d'application de la géophysique. On
distinguera de ce fait la géophysique aérienne, la géophysique marine ou la géophysique
terrestre.

4.3 Classification basée sur la nature physique du phénomène


mesuré
Cette classification distingue les méthodes potentielles, basées sur la mesure d’un champ
dérivant d'un potentiel (exemple gravimétrie, géomagnétisme), des méthodes d'onde
(exemple sismique). Cependant aujourd'hui cette distinction perd tout son sens dans la
mesure où la résolution de l'équation de propagation des ondes montre que le mouvement
des particules lors de la propagation des ondes dérive également d'un potentiel.

4.4 Classification selon la méthode naturelle/provoquée


D'un point de vue méthodologique, comme du point de vue de la mise en œuvre il semble plus
logique de distinguer les méthodes spontanées des méthodes provoquées :
• Les méthodes spontanées ou méthodes passives utilisent une source naturelle.
Exemple: gravimétrie, géomagnétisme.
• Les méthodes provoquées ou méthodes actives utilisent une source artificielle pour en
mesurer l'effet. Exemple: Méthodes sismiques, électriques.

Il est évident que les méthodes provoquées seront plus lourdes et plus chères à mettre en
œuvre car en plus des outils de mesure, il faudra déployer tout un dispositif d'émission.

Tableau 1 : Classification des méthodes géophysique selon l’approche


naturelle/provoquée

Méthode Classification Grandeur mesurée Paramètre


Temps de trajet des ondes Vitesse
Sismique réflexion Provoquée
Amplitude des ondes Impédance
Sismique réfraction Provoquée Temps de trajet des ondes Vitesse
Électrique Provoquée Potentiel électrique Résistivité
Gravimétrie Naturelle Accélération de la pesanteur Densité
Magnétisme Naturelle Champ magnétique Susceptibilité

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5 Applications de la Géophysique
Les applications pratiques de la géophysique dans la vie de tous les jours fait l'objet d'un
domaine à part entière désigné sous le terme générique de géophysique appliquée. Utilisée
dans un premier temps pour désigner la prospection géophysique qui recherche de
substances utiles du sous-sol, le terme de géophysique appliquée est aujourd'hui
généralisé à toutes les utilisations pour les activités humaines dans tous les domaines.

L’exploration géophysique se fait en général par étape en combinant plusieurs méthodes.


Par exemple dans la prospection géophysique pétrolière, les investigations commencent par
une étude gravimétrique permettant de voir la répartition de la densité des roches (le pétrole
est associé à des défauts de densité). Par la suite la méthode sismique permet de circonscrire
des structures géologiques types, sur lesquelles des investigations de détail seront réalisées.

Les domaines d'application de la géophysique sont très variées mais le secteur dominant est
de loin le secteur pétrolier qui effectue environ 95% des campagnes géophysiques et
81.7% des campagnes sismiques. L'industrie minière arrive en deuxième place avec 2%. Le
reste est partagé entre l'hydrogéologie, la géotechnique, l'étude de la croute terrestre,
l'archéologie, etc. Cependant cette répartition très inégale de l'utilisation de la géophysique
appliquée ne doit pas masquer la grande variabilité des domaines d'utilisation.

Tableau 2 : Application de la Géophysique selon les articles de l'American Geophysical


Union (AGU) Fall Meeting, October 2009.
http://www.agu.org/meetings/fm09/program/abstract_submissions.php

Disciplina Number Percent %


Hydrology (H) 1924 12.17
Atmospheric Sciences (A) 1760 11.13
Volcanology, Geochemistry and Petrology (V) 1266 8.01
Tectonophysics (T) 1232 7.79
Biogeosciences (B) 958 6.06
Paleoceanography and Paleoclimatology (PP) 771 4.88
Seismology (S) 715 4.52
Planetary Sciences (P) 696 4.40
SPA-Magnetospheric Physics (SM) 684 4.33
Cryosphere (C) 546 3.45
Union (U) 527 3.33
Earth and Planetary Surface Processes (EP) 470 2.97
Education and Human Resources (ED) 423 2.68
Geodesy (G) 431 2.73
Natural Hazards (NH) 413 2.61
SPA-Solar and Heliospheric Physics (SH) 419 2.65
Earth and Space Science Informatics (IN) 396 2.50
Global Environmental Change (GC) 341 2.16
Ocean Sciences (OS) 344 2.18
SPA-Aeronomy (SA) 320 2.02
Geomagnetism and Paleomagnetism (GP) 262 1.66
Mineral and Rock Physics (MR) 260 1.64
Study of Earths Deep Interior (DI) 237 1.50
Nonlinear Geophysics (NG) 158 1.00
Near Surface Geophysics (NS) 124 0.78
Atmospheric and Space Electricity (AE) 111 0.70
Public Affairs (PA) 25 0.16
Total 15813 100

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6 Conclusion
De façon générale, les méthodes géophysiques sont utilisées en combinaison de 2 ou 3 types
pour une améliorer l’efficacité, réduire les risques d’erreur et faciliter l’interprétation. Les
tableaux ci-dessous donnent une idée de l'applicabilité des différentes méthodes en
géotechniques.

Tableau 3 : Résumé des méthodes géophysiques généralement utilisées en


Géosciences (Source Anderson 2006)

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Tableau 4 : Résumé des méthodes géophysiques généralement utilisées en
Géosciences - Suite (Source Anderson 2006

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Tableau 5 : Applicabilité de méthodes géophysiques à des problèmes en Géosciences (Anderson, 2006) M : très adapté, X : peu adapté

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Tableau 6 : Applicabilité de méthodes géophysiques à des problèmes en Géosciences (Anderson, 2006) M : très adapté, X : peu adapté

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