Vous êtes sur la page 1sur 108

GRANDS ARRETS DE LA JURISPRUDENCE

SOCIALE
MARCHANDAGE FRAUDE ET PREJUDICE
Cour de Cassation
Chambres réunies

Audience publique du 31 janvier 1901 Annulation

Publié au bulletin

Rpr M. Cotelle
Proc.Gén. M. Laferrière
Av. Demandeur : M. Devin

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


ANNULATION, sur le pourvoi du sieur Loup (Jules), d'un arrêt rendu, le 20 juin
1900, par la Cour d'appel de Bourges, chambre correctionnelle qui l'a condamné à
50 francs d'amende, etc., dans la cause d'entre le susnommé et les sieurs Boeuf et
autres, parties civiles.

LA COUR,

En chambres réunies,
Ouï à l'audience publique d'hier M. le conseiller Cotelle, en son rapport, Me Devin,
avocat du demandeur, en sa plaidoirie, et à celle d'aujourd"hui M. le procureur
général Laferrière, en ses conclusions ; après en avoir délibéré ;

Statuant sur le pourvoi formé par le sieur Loup contre un arrêt de la cour d'appel de
Bourges, en date du 20 juin 1900, qui l'a condamné comme complice d'un délit de
marchandage en 50 francs d'amende et 200 francs de dommages-intérêts, pourvoi
renvoyé à l'examen des chambres réunies, conformément à l'article premier de la loi
du 1er avril 1837 par un arrêt de la chambre criminelle du 16 novembre suivant ;

Vu le décret du 2 mars 1848, ainsi conçu :

"Considérant que l'exploitation des ouvriers par les sous-entrepreneurs ouvriers dits
marchandeurs ou tâcherons est essentiellement injuste, vexatoire et contraire au
principe de la fraternité.

Le gouvernement de la République décrète :

ART. 2 : L'exploitation des ouvriers par des sous-entrepreneurs, ou marchandage,


est abolie. Il est bien entendu que les associations d'ouvriers qui n'ont pas pour
objet l'exploitation des ouvriers les uns par les autres ne sont pas considérées
comme marchandage ..."

Vu l'arrêté du 21 mars 1848 ainsi conçu :

"Réservant la question du travail à la tâche,

Toute exploitation de l'ouvrier par voie de marchandage sera punie d'une amende
de 50 à 100 francs pour la première fois, de 100 à 500 francs en cas de récidive, et
s'il y avait double récidive, d'un emprisonnement qui pourrait aller d'un à six
mois ..."

Vu également l'article premier du Code pénal ;

Sur le moyen pris de la violation des décret et arrêté susrelatés, et de l'article


premier du Code pénal, lequel a déjà fait l'objet, dans la même affaire, d'un
précédent pourvoi suivi de cassation à la date du 16 février 1900 ;

Attend qu'il résulte du texte même, tant du décret du 2 mars 1848 que de l'arrêté du
21 du même mois, que le fait qui a été d'abord interdit puis puni de peines
correctionnelles par le Gouvernement provisoire, n'est point tout embauchage
d'ouvriers à la journée par un tâcheron, mais seulement l'exploitation des ouvriers
au moyen de ce marchandage, exploitation qui ne consiste, de la part du sous-
traitant, qu'à tirer un profit abusif du travail de ceux qu'il emploie ; que l'acte
nécessite donc, pour devenir délictueux, la réunion de ces trois éléments ; un fait
matériel, l'intention de nuire et un préjudice causé aux ouvriers ;

Qu'en condamnant le demandeur en cassation à raison d'un prétendu délit de


marchandage sans constater ni l'existence d'une fraude, ni le caractère
dommageable des conditions dans lesquelles les ouvriers avaient été employés, la
cour d'appel de Bourges a violé la loi ;

Par ces motifs,

Sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés ;

CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour de Bourges, en date du 20 juin 1900, et


pour être statué sur le fond, conformément à la loi du 1er avril 1837, renvoie la
cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération
en chambre du conseil.

Publication : Bulletin Criminel Cour de Cassation Chambres réunies N. 31 P. 48


Concl. Proc. Général Laferrière, Sirey 1902 1 p.157. A. Brun, La jurisprudence en
droit du travail, p.51. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du
travail, p.247
Décision attaquée : Cour d'Appel Bourges 1900-06-20

MALADIE ET CONTRAT DE TRAVAILCour de


Cassation
Chambre civile

Audience publique du 3 décembre 1934 REJET

Inédit titré

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR : Sur le moyen unique ; Attendu que la dame Spagnoli, téléphoniste à
l'Hôtel Terminus PLM à Marseille, est tombée malade le 14 février 1934, et a fait
prévenir son employeur qu'elle serait absente une quinzaine de jours ; que, douze
jours après le début de sa maladie, elle a fait connaître qu'elle pourrait reprendre
son travail sous huitaine ; qu'elle a ensuite averti la direction qu'elle pourrait
reprendre son travail dans les trois jours, mais que, ce délai expiré, elle a été avisée
qu'elle était remplacée depuis le 7 mars ; Attendu que, par jugement entrepris, le
conseil de prud"hommes de Marseille a condamné l'Hôtel Terminus à payer à la
dame Spagnoli une somme de 750 francs à titre de délai-congé, et qu'il est fait grief
à cette décision d'avoir violé l'article 1780, paragraphe 3, du Code civil en ce
qu'elle a déclaré à tort que la résiliation était le fait de l'employeur, alors que
l'absence de la dame Spagnoli, non justifiée par un certificat médical régulier,
s'était prolongée outre mesure, et que l'employeur avait dû, en raison des nécessités
de l'entreprise, pourvoir à son remplacement ;
Mais attendu que la maladie de l'employé ne rompt pas de plein droit le contrat de
travail ; Attendu que le jugement constate que l'absence ne s'est pas prolongée de
façon anormale ; que, dès le premier jour, la direction a été informée de sa cause
due à la maladie de l'employée ; que, si le règlement de l'hôtel exige que l'employée
fasse parvenir un certificat médical dès le premier jour, le jugement ne constate pas
que l'employeur, prévenu de la cause de l'absence, ait requis ce certificat, ni fait
aucune réserve au sujet de sa non-production ; qu'enfin, en raison des fonctions de
la dame Spagnoli, il était possible à l'employeur d'engager une remplaçante
temporaire ; qu'il suit de là que le conseil de prud"hommes a pu statuer ainsi qu'il
l'a fait sans violer le texte visé au pourvoi.

CONTRAT DE TRAVAIL ET
Par ces motifs, Rejette ... .

NOUVEAU CONCESSIONNAIRECour de Cassation


Chambre sociale

Audience publique du 27 février 1934 Cassation

Publié au bulletin

Rpr M. Lepelletier
Av.Gén. M. Sens-Olive
Av. Demandeur : M. Gaudin
Av. Défendeur : M. Auger

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CASSATION, sur le pourvoi du sieur X..., d'un arrêt rendu, le 13 mai 1931 "par la
cour d'appel d'Alger, au profit de la société Union hydro-électrique de l'Ouest
constantinois".

LA COUR,

Ouï, en l'audience publique de ce jour, M. le conseiller Lepelletier, en son rapport ;


MM. Y... et Auger, avocats, en leurs observations, ainsi que M. l'avocat général
Sens-Olive, en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur le moyen unique ;

Vu le paragraphe 7 de l'article 23 nouveau du livre 1er du Code du travail ;

Attendu que ce texte destiné à assurer aux salariés des emplois plus stables doit
recevoir son application dans tous les cas où la même entreprise continue à
fonctionner sous une direction nouvelle ; qu'il suit de là que le nouveau
concessionnaire d'un service public qui, à l'expiration d'un précédent contrat de
concession passé avec une autre personne, est chargé par l'autorité compétente de
continuer le fonctionnement du même service public doit être considéré comme un
nouvel entrepreneur, au sens du texte susvisé, tenu, dès lors, de respecter les
contrats de travail en cours ;

Attendu qu'il résulte tant des motifs propres de l'arrêt attaqué que de ceux des
premiers juges qu'il adopte, que X... a loué ses services, en qualité d'ingénieur, pour
une période indéterminée, à Z..., concessionnaire du service public d'éclairage
électrique de la ville de Sétif ; qu'en prévision du refus de cette ville de renouveler
cette concession à son expiration, il a pris une part active à la constitution d'une
société dite Union hydro-électrique de l'Ouest constantinois ; que des pourparlers
furent engagés entre lui et les fondateurs en vue de la signature d'un contrat lui
assurant l'emploi de directeur de l'usine électrique de Sétif, au cas où cette société
deviendrait concessionnaire du service au lieu et place de Z..., mais que X... rompit
ces pourparlers par lettre du 22 janvier 1929 ;

Attendu que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de X... tendant au payement par la
société sus-désignée, devenue concessionnaire après Z..., du même service public,
de dommages-intérêts pour rupture brusque et abusive du contrat de travail qui le
liait à Z... et qui subsistait suivant sa prétention ;

Attendu que, pour statuer ainsi, la Cour d'appel d'Alger, sans contester que X... ait
inséré dans sa lettre de rupture du 22 janvier 1929 des réserves pouvant être
interprétées en ce sens que s'il rompait les pourparlers relatifs à la signature d'un
nouveau contrat de travail, il requérait subsidiairement le bénéfice du paragraphe 7
susvisé, s'est fondée sur ce motif, erroné en droit, qu'aucun contrat n'étant survenu
entre Z... et la Société Union hydro-électrique de l'Ouest constantinois, qui tirait
directement ses droits de la commune de Sétif en vertu d'un cahier des charges
distinct et différent ..., on se trouve en présence de deux employeurs successifs,
sans lien de droit entre eux et qu'à aucun titre, le second ne saurait être tenu des
obligations contractées par le premier ;

Qu'en statuant ainsi, il a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs,

Casse ... .
Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale N. 51 P. 101
Gazette du Palais, 1934 II p. 40. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de
droit du travail, p. 287. Sirey, 1934 1 p. 179
Décision attaquée : Cour d'Appel Alger 1931-05-13

LOUAGE DE SERVICES ET CHARGE DE LA


PREUVE D'UNE GRATIFICATIONCour de Cassation
Chambres réunies

Audience publique du 5 août 1941 Cassation

Publié au bulletin

Rpr M. Debuc
Av. Demandeur : M. Labbé
Av. Défendeur : M. Chévrier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


CASSATION, sur le pourvoi de l'Agence Havas, d'un jugement rendu, le 8
novembre 1935, par le conseil de prud"hommes d'Aix-en-Provence, au profit du
sieur X....

LA COUR, statuant toutes chambres réunies,


Ouï, M. le conseiller Debue en son rapport, MM. Y... et Chévrier, avocats en la
Cour, en leurs observations, et M. le procureur général en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré, conformément à la loi ;

Sur l'unique moyen de cassation :

Vu l'article 1315 du Code civil ;

Attendu qu'il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation d'en
rapporter la preuve ;

Attendu que X..., employé à la succursale de l'Agence Havas à Marseille, congédié


le 24 mars 1934, avec un préavis d'un mois, a assigné son employeur devant le
conseil de prud"hommes en paiement d'une indemnité de 950 francs qu'il prétend
lui être due en vertu d'une décision du conseil d'administration qui, portée à la
connaissance des intéressés le 6 juin 1934, allouait à tous les agents de cette société
une gratification égale aux appointements touchés par chacun d'eux le 31 décembre
1933 ; qu'il a soutenu que, bien que ne faisant plus partie du personnel en juin
1934, il avait droit à cette gratification afférente à l'exercice 1933 ;

Mais attendu que le doublement du salaire mensuel d'un employé ne peut être exigé
par celui-ci, à défaut d'une convention expresse intervenue entre les parties, qu'en
exécution d'un usage constant auquel les contractants doivent être présumés avoir
adhéré ;

Qu'il ne résulte pas des énonciations du jugement attaqué l'existence d'un accord de
cette nature ou d'un usage d'après lequel X... aurait eu droit, en sa qualité d'employé
de l'Agence Havas, à une gratification afférente à l'exercice de l'année écoulée, en
raison de cette seule circonstance qu'il était encore à la date du 31 décembre 1933
au service de cette société ;

Qu'il n'est pas contesté, au contraire, que la gratification de 100 % du traitement du


mois de décembre 1933 allouée au personnel a été votée au mois de juin 1934 et
que, d'après les circulaires portées à la connaissance des intéressés, cette
gratification n'était accordée qu'aux employés présents au moment du vote ;

Qu'il est, en outre, constaté par la décision attaquée qu'à cette date X... ne faisait
plus partie du personnel ;

Attendu, dès lors, qu'en condamnant l'Agence Havas à payer à X... la gratification
ci-dessus spécifiée par le motif qu'on ne saurait "homologuer le point de vue de la
société subordonnant le paiement de cette gratification à la présence de l'employé
au mois de juin 1934", le conseil de prud"hommes d'Aix-en-Provence n'a pas
légalement justifié sa décision ;

Par ces motifs, casse et annule le jugement rendu entre les parties par le conseil de
prud"hommes d'Aix-en-Provence, le 8 novembre 1935, et renvoie devant le conseil
de prud"hommes d'Avignon.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambres réunies N. 211 P. 377
Note Perrin, Droit social 1941 p. 118. Note Perreau, Juris Classeur Périodique 1941
II n. 1734. A. Brun, La jurisprudence en droit du travail, p. 60. Lyon-Caen et
Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du travail p. 263
Décision attaquée : Conseil des Prud'hommes Aix-en-Provence 1935-11-08

CONGES PAYES ET MALADIE


Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 19 mars 1954 Cassation

N° de pourvoi : 54-02158
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Gallut
Av.Gén. M. Blanchet
Av. Demandeur : M. Mayer
Av. Défendeur : M. de Ségogne

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu les articles 54, g, h, k, du livre II du Code du travail, tels que
modifiés par les lois des 20 juillet 1944, 18 avril 1946 et 27 août 1948 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes, que si, pendant la durée de la période des vacances,
telle qu'elle a été fixée en vertu de l'article 54 h, susvisé, pour l'entreprise, un travailleur a
été mis dans l'impossibilité d'exécuter les obligations de son contrat de travail pour cause
de maladie, et n'a pu bénéficier du congé annuel payé, auquel il pouvait prétendre par
suite de son temps de présence dans l'entreprise, le patron est tenu, à défaut de congé, de
lui verser une indemnité compensatrice ; Attendu qu'il est constant que X... s'est vu
accorder par les établissements Delatre et Frouard, du 7 au 21 août 1950, le congé payé
auquel lui donnait droit son temps de présence dans l'entreprise, mais qu'il n'a pu en
bénéficier ayant été malade du 1er août 1950 jusqu'au 31 octobre 1950 ; qu'il réclama à
son employeur le payement d'une indemnité compensatrice, mais que celle-ci lui a été
refusée ;
Attendu qu'il a, alors, cité les établissements Delatre et Frouard devant la juridiction
prud"homale pour obtenir le payement de cette indemnité, et que le Conseil des
Prud"hommes, par sentence du 12 janvier 1951, lui a donné satisfaction ; mais que le
Tribunal, sur appel, l'a débouté au motif "qu'aux termes de l'article 54 k du livre II du
Code du travail, le salarié n'a droit à une indemnité compensatrice de congés payés que
dans le cas de résiliation de son contrat de louage de service" ;

Or, attendu que le fait pour X... d'avoir été absent pour cause de maladie pendant la
période des vacances de l'entreprise ne saurait le priver de l'indemnité compensatrice à
laquelle il a droit aux termes de l'article 54 g du livre II du Code du travail dans sa
rédaction du 18 avril 1946 ; Attendu que les congé payés, qui s'acquièrent mois par mois
et constituent un élément de salaire à payement différé, entrant dans le calcul du prix de
revient, restent acquis à l'ouvrier quel que soit son état ; que l'article 54 k (rédaction du
27 août 1948), qui a prévu que l'indemnité compensatrice est due, sauf au cas où la
résiliation du contrat a été provoquée par la faute lourde du salarié, indique ainsi qu'elle
devait être versée, même en cas de maladie de ce dernier ; D'où il suit qu'en statuant ainsi
qu'il l'a fait, le juge du fond a violé, par fausse application, les textes visés au moyen ;

PAR CES MOTIFS : CASSE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 203 P. 155
Note G.B., Juris Classeur Périodique, 1954 II N° 8221. Note A. Brun, La jurisprudence
en droit du travail, p.179. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands arrêts de droit du
travail, p.316
Décision attaquée : Tribunal civil Melun 1951-03-07
ACCORDS ET CONVENTIONS
COLLECTIVESCLAUSE DE RESPONSABILITE DU
SALARIECour de Cassation
section sociale

Audience publique du 19 novembre 1959 Cassation

N° de pourvoi : 57-40656
Publié au bulletin

Pdt Mme Lagarde CDFF


Rpr M. Laroque
Av.Gén. M. Lindon
Av. Demandeur : M. Hersant
Av. Défendeur : M. Le Sueur

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique et le premier moyen additionnel réunis, pris de la violation des
articles 32 et suivants, 50, 51, 99 b, du Livre 1er du Code du travail, et 7 de la loi
du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ; Attendu qu'il est fait
grief au jugement attaqué d'avoir refusé d'accueillir la demande en compensation du
déficit de caisse dû à la Société du Lait intégral par la dame X..., vendeuse, ayant
été à son service, avec les salaires revenant à cette dernière et avec le
cautionnement affecté à sa gestion, au motif que la compensation aurait pour
résultat de réduire la rémunération de la dame X... à un niveau inférieur à celui du
salaire minimum interprofessionnel garanti, alors qu'il a été ainsi fait une confusion
entre la naissance et l'étendue de la créance de la salariée, d'une part, et d'autre part,
le mode d'extinction de cette créance, lequel peut être une compensation aussi bien
qu'un payement, alors que les textes susvisés ne font aucune distinction entre le
salaire minimum interprofessionnel garanti et les salaires plus élevés, et alors en
tous cas que le cautionnement, d'ailleurs motivé par la responsabilité éventuelle de
l'employée prise comme mandataire de l'entreprise, était légalement affecté à la
garantie de l'employeur et ne pouvait s'évanouir en totalité ou en partie du fait que
cette dernière n'était créancière que d'un salaire égal ou de peu supérieur au salaire
minimum interprofessionnel garanti, ou même inférieur ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que si la dame X..., première
vendeuse, chargée de la gérance salariée d'un dépôt de vente de la société "Au Lait
intégral", était, d'après le règlement intérieur, responsable de la gestion financière et
du déficit de caisse, elle n'était pas seule à posséder les clefs du magasin, que ses
collaborateurs lui étaient imposés, que sa malhonnêteté n'était pas alléguée, et que
c'était par l'imputation de risques normaux d'exploitation sur les sommes qui lui
étaient dues par la société que celle-ci se proposait de ramener la rémunération de
son travail à une somme inférieure au salaire minimum interprofessionnel garanti ;

Or attendu que si selon l'article 21 de la loi du 11 février 1950, les employeurs et


les organisations syndicales les plus représentatives des travailleurs peuvent
conclure librement des conventions de salaires, aucun salarié ne peut être rémunéré
à un taux inférieur à celui du salaire minimum interprofessionnel garanti, déterminé
conformément à l'article 31 x, du livre 1er du Code du travail ; D'où il suit qu'en
contrepartie du travail fourni à son employeur par la dame X..., il devait entrer dans
son patrimoine une somme au moins égale au montant du salaire minimum
interprofessionnel garanti, que celle-ci ne pouvait être ramenée à un montant
inférieur par l'imputation sur la paye ni sur le cautionnement de risques normaux
d'exploitation, et que le jugement attaqué a donné de ce chef une base légale à sa
décision ;

Mais sur le deuxième moyen additionnel : Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;


Attendu qu'après avoir constaté que le règlement intérieur de la société "Au Lait
intégral" était nul et ne devait pas recevoir d'application en tant qu'entraînant le
payement à la dame X... d'un salaire dont le montant était inférieur au salaire
minimum interprofessionnel garanti, le jugement attaqué déboute pour le tout la
société de sa demande reconventionnelle en payement des sommes mises à la
charge de ladite dame en vertu du règlement susvisé ; qu'en statuant ainsi, sans
limiter leur décision au montant du salaire minimum interprofessionnel garanti,
alors que le règlement intérieur n'était contraire à l'ordre public que dans la mesure
où il entraînait le versement à la dame X... d'une rémunération inférieure à ce
montant et qu'il faisait, pour le surplus, la loi des parties, les juges du fond, qui se
sont contredits, n'ont pas légalement justifié leur décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE le jugement rendu entre les parties par
le Tribunal civil de la Seine, le 12 avril 1957 ; remet en conséquence la cause et les
parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit jugement et, pour être
fait droit, les renvoie devant le Tribunal de grande instance de Versailles.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 1154 P. 917
Note Lindon, Dalloz 1960 p.74. Note Bizière, Juris Classeur Périodique, 1960 II N.
11397. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands arrêts de droit du travail, p.259
Décision attaquée : Tribunal civil Seine 1957-04-12

RUPTURE DU CONTRAT DE
TRAVAILOBLIGATION DE REINTEGRATION ET
INEXECUTIONCour de Cassation
section sociale
Audience publique du 27 novembre 1952

N° de pourvoi : 52-01718
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Hamel
Av.Gén. M. Deraze
Av. Demandeur : M. David
Av. Défendeur : M. Roques

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, tiré de la violation des articles 22
de l'ordonnance du 22 février 1945, modifiée, 1142 et suivants du Code civil, 23 du
livre 1er du Code du travail, 1er livre II du même code, ensemble violation de
l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il résulte, des constatations du jugement attaqué, que X..., ingénieur,
depuis le 8 avril 1930, au service de la Compagnie Industrielle des Téléphones dite
C.I.T., a été compris, en raison des notes "partiales" qui lui ont été attribuées, dans
un licenciement collectif, pour compression de personnel, et congédié le 14 janvier
1948 avec dispense d'assurer son préavis, malgré le refus d'assentiment du comité
d'entreprise, dont il était membre, et le refus d'autorisation de l'inspecteur du
Travail ; qu'il a alors demandé, le 16 mars 1948, la condamnation de son employeur
au payement d'une somme de 48.750 francs pour salaires et indemnités
représentatives et sa réintégration, sous astreinte de 2.000 francs par jour de retard,
au Conseil des Prud"hommes, qui, sur itératif défaut, a accueilli sa requête, réserve
lui étant donnée de tous ses droits en vue d'une demande ultérieure en dommages-
intérêts ; que, sur appel, le Tribunal civil de la Seine, tout en constatant que le
licenciement de ce salarié était "irrégulier et abusif", a décidé qu'il ne pouvait y
avoir lieu à réintégration, que le contrat de travail a continué à exister jusqu'au 16
mars 1948, date à laquelle ledit salarié a saisi le Conseil des Prud"hommes de sa
demande, et qu'il a droit à ses salaires jusqu'à cette date et à des dommages-intérêts
à raison du licenciement abusif dont il a été l'objet, qu'il était enfin donné acte à X...
de la réserve de ses autres droits, et, notamment, de celui de demander des
dommages-intérêts pour la rupture abusive de son contrat de travail ;

Attendu que, dans sa première branche, le pourvoi fait grief au jugement attaqué
d'avoir refusé la réintégration d'un salarié, licencié irrégulièrement et abusivement,
alors que le congé, qui a été ainsi donné, est nul, faute d'avoir obtenu les avis
favorables imposés par l'article 22 de l'ordonnance susvisée, et que, dès lors, le
contrat de travail subsistant, ce salarié avait droit à sa réintégration et non pas
seulement à des dommages-intérêts ;

Mais attendu que l'obligation de réintégrer constitue une obligation de faire, dont
l'inexécution ne peut donner lieu qu'à l'allocation de dommages-intérêts, aux termes
de l'article 1142 du Code civil ; D'où il suit que par ce motif de pur droit, substitué
à ceux fournis par le jugement attaqué et qui justifient son dispositif, la première
branche du moyen n'est pas fondée ;

PAR CES MOTIFS ; REJETTE la première branche du moyen ;

Mais sur la deuxième branche du moyen : Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;


Attendu que, pour décider que le contrat de travail n'a subsisté que jusqu'au 16 mars
1948, le jugement attaqué se fonde sur cet unique motif que c'est à cette date que le
Conseil des Prud"hommes a été saisi par X... de la demande introduite contre son
employeur pour qu'il soit statué sur les conséquences de son congédiement ;

Mais attendu que la juridiction prud"homale n'aurait pu mettre fin au contrat de


travail, liant les parties, que si elle avait été saisie d'une demande en résolution
judiciaire dudit contrat par application de l'article 1184 du Code civil, aux termes
duquel la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats
synallagmatiques pour le cas où l'une des parties n'a pas satisfait à ses engagements
; Attendu, dès lors, que le contrat de travail subsistait, d'où il suit qu'en statuant
ainsi qu'il l'a fait, le jugement attaqué n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE, mais seulement du chef qui a décidé que le contrat
de travail a pris fin au 16 mars 1948, date à laquelle le Conseil des Prud"hommes a
été saisi par X... de sa demande, le jugement du Tribunal civil de la Seine.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 853 P. 611
Sinay et Lyon-Caen, Juris Classeur Périodique, 1970 I n° 2335. Brun, La
jurisprudence en droit du travail, n° 145. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands
arrêts de droit du travail, p.186

Décision attaquée : Tribunal civil Seine 1949-04-07 LOUAGE DE


SERVICES A DUREE INDETERMINEE ET
RUPTURE ABUSIVE
Cour de Cassation
Chambre civile

Audience publique du 18 mars 1930 CASSATION

Publié au bulletin

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


CASSATION, sur le pourvoi de la Société des automobiles Berliet, d'un jugement rendu,
le 18 avril 1929, par le tribunal civil d'Alger, au profit du sieur Le X... de la Y....

ARRET.

Du 18 Mars 1930.

LA COUR,

Ouï, M. le conseiller Lepelletier, en son rapport ; Maître Morillot, avocat, en ses


observations, et M. Regnault, conseiller faisant fonctions d'avocat général, en ses
conclusions ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi en sa chambre du conseil ;


Sur le moyen unique :

Vu les articles 23 du livre 1er du Code du travail, modifié par la loi du 19 juillet 1928, et
7 de la loi du 20 avril 1810 ;

Attendu que le contrat de louage de services fait sans détermination de durée peut
toujours cesser par la volonté d'un seul des contractants ; que si la loi du 19 juillet 1928
prescrit aux tribunaux de mentionner, et par suite de discuter, le motif de rupture allégué,
et si elle facilite l'administration de la preuve d'un abus du droit de résiliation, rien dans
son texte ne permet de dire qu'elle abroge la règle suivant laquelle le fardeau de cette
preuve incombe à celui qui a subi la rupture ;

Attendu que Le X... de la Y..., engagé en 1923 en qualité de voyageur, pour une durée
indéterminée, par la société des automobiles Berliet, a été congédié, en 1929, avec
l'observation du délai-congé de quinze jours prévu par les accords ;

Attendu que pour allouer à cet employé, en sus des salaires afférents à cette quinzaine,
offerts par la société, une indemnité pour rupture abusive du contrat, le jugement attaqué
se fonde sur ces motifs qu'après avoir exprimé, dans la correspondance, sa satisfaction à
Le X... de la Y..., et reconnu que, dans la province de Constantine, il avait fait "un effort
continu", fécond en résultats, la société l'avait congédié, sous le prétexte, non justifié, que
cet effort avait été ensuite insuffisant ; que le congédiement survenant à une époque où il
lui était difficile de trouver un emploi similaire lui avait causé un préjudice matériel ; que
la rupture du contrat, par sa brusquerie, faisant supposer qu'il avait commis une faute
lourde, lui avait causé un préjudice moral ;

Mais attendu que la société était seule juge de la question de savoir si les services que lui
rendait son voyageur étaient satisfaisants ; que s'il résulte des motifs ci-dessus analysés
que le congédiement a été préjudiciable à l'employé, il n'en résulte pas que ce dernier ait
rapporté la preuve qui lui ioncombait, d'une faute commise par l'employeur dans
l'exercice de son droit de
congédiement ;

Attendu, d'autre part, que le motif déclarant que le renvoi a été brusque, est en
contradiction avec celui où le tribunal décide que le délai-congé de quinze jours prévu
par le contrat, et observé par la société, était licite et obligatoire ; qu'une telle contrariété
équivaut à un défaut de motifs ; qu'il suit de là qu'en statuant comme il a fait le tribunal
d'Alger a violé les textes ci-dessus visés ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE mais seulement du chef qui a alloué à Le X... de la Y... une
indemnité de 25000 francs pour rupture abusive du contrat.

Publication : Bulletin ARRETS Cour de Cassation Chambre civile N. 56 p. 113


Dalloz, les grands arrêts de la jurisprudence civile, observations Henri CAPITANT, Alex
WEILL, François TERRE, p. 688
Décision attaquée : Tribunal civil Alger 1929-04-18

LIQUIDATION JUDICIAIRE ET
CONGEDIEMENTCour de Cassation
section sociale

Audience publique du 31 mai 1956 Cassation

N° de pourvoi : 56-04323
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Gallut
Av.Gén. M. Albucher
Av. Demandeur : M. Galland
Av. Défendeur : M. Le Sueur

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu l'article 23 du Livre 1er du Code du travail ; Vu l'article 7 de la loi du 20 avril
1810 ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes le louage de services fait sans
détermination de durée peut toujours cesser par la volonté d'une des parties
contractantes, que cette faculté, accordée par la loi à l'employeur comme à
l'employé, tient à l'essence même de ce contrat ; qu'il s'ensuit que l'auteur de la
résiliation qu'il soit patron ou salarié ne peut être condamné à des dommages et
intérêts envers l'autre partie que si celle-ci prouve contre lui, outre le préjudice subi,
l'existence d'une faute dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat ; Attendu
que s'il appartient aux juges du fait de constater souverainement les circonstances
d'où dérive la responsabilité d'un fait dommageable, l'appréciation à laquelle ils se
livrent de ces mêmes circonstances en leur attribuant le caractère légal d'une faute
imputable à l'une des parties entraînant pour elle l'obligation de réparer le préjudice
souffert par l'autre est susceptible d'être révisée par la Cour de Cassation ;

Attendu que pour allouer des dommages et intérêts pour rupture abusive de son
contrat de travail, à demoiselle X..., mécanicienne en chaussures au service de la
société anonyme "Les Etablissements A. Y... et Fils", congédiée avec tout le
personnel lors de la fermeture de l'entreprise, par suite de dépôt de bilan et mise en
liquidation judiciaire ; le Tribunal retient que l'employé doit compter sur la stabilité
de son emploi, qu'il ressort des comptes rendus du comité d'entreprise que l'usine
n'était pas gérée, depuis plusieurs années, d'une façon normale, que l'employeur
avait eu tort de cacher au comité d'entreprise, certains renseignements - sans autre
précision - et avait méconnu les suggestions et les avis qui lui étaient prodigués par
ce comité, en vue d'un redressement qui s'avérait possible étant donné le chiffre peu
important du déficit, par rapport à celui du chiffre d'affaires de l'entreprise ; que
cette dernière était viable, les créanciers ayant obtenu un concordat très
avantageux ; que, par conséquent, la fermeture des usines de Y... n'était pas
justifiée par des raisons inéluctables, mais était la conséquence d'une faute lourde,
purement quasi délictuelle, qui, néanmoins, se situait au-delà de l'exécution du
contrat de travail ;

Attendu qu'il ne résulte pas de tels motifs, que demoiselle X... ait apporté la seule
preuve qui lui incombait, que la société ait commis une faute dans l'exercice de son
congédiement et ait agi soit avec intention de nuire, soit avec légèreté blâmable ;
Qu'en effet, l'employeur qui porte la responsabilité de l'entreprise est seul juge des
circonstances qui la détermine à cesser son exploitation et aucune disposition légale
ne lui fait l'obligation de maintenir son activité à seule fin d'assurer à son personnel
la stabilité de son emploi, pourvu qu'il observe, à l'égard de ceux qu'il emploie, les
règles édictées par le Code du travail ; D'où il suit qu'en statuant ainsi qu'il l'a fait,
le Tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 499 P. 369
Note Esmein, Juris Classeur Périodique, 1956 II N. 9393. Note Levasseur, Dalloz
1958 p.21. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du travail,
p.204
Décision attaquée : Tribunal civil Etampes 1954-06-24

NON PAIEMENT DES SALAIRESCour de Cassation


section sociale

Audience publique du 22 octobre 1959 REJET

N° de pourvoi : 57-41001
Publié au bulletin

Pdt Mme Lagarde CDFF


Rpr M. Jeanniot
Av.Gén. M. Lindon
Av. Demandeur : M. Rousseau

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur les premier et deuxième moyens réunis, pris de la violation des articles 1134 et
1184 du Code civil, 23 du Livre 1er du Code du travail, et 7 de la loi du 20 avril
1810, défaut de motifs et manque de base légale ; Attendu qu'il est fait grief au
jugement attaqué, d'une part, d'avoir accordé à X... une indemnité de préavis, au
motif que, la Société technique des appareils centrifuges industriels ne lui ayant pas
payé les salaires qui lui étaient dus, il était en droit de rompre sans préavis le
contrat de louage de services qui le liait à la société, alors qu'un contrat
synallagmatique n'est pas résolu de plein droit lorsqu'une des parties ne remplit pas
ses obligations, mais que la résolution doit être demandée en justice par celui
envers lequel l'engagement n'a pas été exécuté, d'autre part, d'avoir décidé que
ladite société était l'auteur de la rupture pour n'avoir pas payé pendant deux mois le
salaire convenu, et que X... n'avait pas commis de faute lourde exclusive de son
droit aux indemnités qu'il réclamait ;

Mais attendu que selon les énonciations du jugement attaqué, la Société technique
des appareils centrifuges industriels dite "STACI", n'ayant réglé à son personnel le
30 avril 1955 que la moitié des salaires dus, par suite de difficultés de trésorerie,
s'était engagée à payer l'autre moitié peu de temps après, mais qu'elle ne tint pas de
ses engagements ; que c'est ainsi que X..., employé cadre du service des achats,
n'ayant reçu à fin mai 1955 ni le solde de ses appointements du mois d'avril, ni ses
appointements du mois de mai, cessa d'exercer ses fonctions ;

Que l'employeur, qui n'avait pas exécuté à l'égard de X... les obligations résultant
du contrat synallagmatique de travail, n'était pas fondé à prétendre exiger de lui
qu'il continue à remplir les siennes sans contrepartie ; Qu'en déduisant de leurs
constatations que la rupture du contrat de travail incombait à la Société "STACI" et
en allouant à X... une indemnité de préavis, les juges du fond ont légalement justifié
leur décision ;

Sur le troisième moyen, pris de la violation des articles 232 et suivants du Code de
procédure civile, et 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut et contradiction de motifs,
manque de base légale ; Attendu qu'il est encore reproché au jugement attaqué, tout
en accueillant comme acquis les faits invoqués par la Société "STACI" et relatifs
aux difficultés financières qu'elle éprouvait, d'avoir rejeté, sans tenter de les
contrôler, les faits invoqués par la Société concernant le départ concerté, préparé et
organisé par X... et par ses collègues, lesquels faits n'étaient pas contestés par X...
et que la Société pouvait, en conséquence, considérer comme étant acquis aux
débats, alors que si les faits sont admissibles et s'ils sont déniés, la preuve pourra
être ordonnée, et que le Tribunal pourra aussi ordonner d'office la preuve des faits
qui lui paraissent concluants ;

Mais attendu que les juges du fond, qui ont apprécié souverainement qu'ils étaient
suffisamment éclairés, pour se prononcer, par les éléments d'information dont ils
étaient saisis, n'étaient nullement tenus d'ordonner une mesure d'instruction qu'ils
ne jugeraient pas opportune et qui, d'ailleurs, ne leur était pas demandée ; D'où il
suit que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi formé contre le jugement rendu le 1er
juillet 1957 par le Tribunal civil de la Seine.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 1032 P. 820
Note F.O., Juris Classeur Périodique, 1960 II N. 11535. Lyon-Caen et Pélissier,
Sirey, les grands arrêts de droit du travail, p.333
Décision attaquée : Tribunal civil Seine 1957-07-01

RUPTURE ABUSIVE DU CONTRAT DE TRAVAIL


PAR LE SALARIECour de Cassation
section sociale

Audience publique du 19 juin 1959 Cassation

N° de pourvoi : 58-40515
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Laroque
Av.Gén. M. Cherpitel
Av. Demandeur : M. Galland
Av. Défendeur : M. Boulloche
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu l'article 23 du Livre 1er du Code du travail et l'article 7
de la loi du 20 avril 1810 ;

Attendu que par application du premier de ces textes, le contrat de louage de


service conclu sans détermination de durée peut toujours cesser par la volonté d'un
seul des contractants ; mais que l'auteur de la résiliation peut être condamné à des
dommages-intérêts envers l'autre partie si celle-ci prouve contre lui, outre le
préjudice subi, l'existence d'une faute qui lui soit légalement imputable dans
l'exercice de son droit de mettre fin au contrat ;

Or attendu que la dame X..., mannequin au service de la SARL Christian Dior,


ayant rompu brusquement et sans préavis son contrat de travail au cours de la
journée de présentation à la clientèle de la collection qui comprenait des modèles
créés sur ses propres mesures, les premiers juges avaient estimé qu'elle avait agi
abusivement, non seulement avec légèreté blâmable, mais avec esprit de malice,
sachant qu'elle mettait son employeur dans l'embarras ; que le jugement attaqué a
infirmé cette sentence, au motif que si la société avait subi un dommage, l'article 23
susvisé ne mettait pas pareils risques à la charge du salarié, qui ne partageaient pas
les profits de l'entreprise, et qu'il garantissait uniquement le salarié contre l'abus par
l'employeur de son droit de rompre unilatéralement son contrat de travail ; Qu'en
statuant ainsi, alors que le contractant qui rompt le contrat de travail, qu'il soit
employeur ou salarié, doit réparer le préjudice qu'il a causé s'il a commis une faute
dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat, le jugement attaqué n'a pas
légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE le jugement rendu le 12 février 1958
par le Tribunal civil de la Seine, et renvoie devant le Tribunal de grande instance de
Versailles.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 779 P. 626
Note Anon, Dalloz 1959 p.513. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands arrêts de
droit du travail, p.363

DEMISSION D'UN
Décision attaquée : Tribunal civil Seine 1958-02-12

MANDATAIRE SOCIAL SALARIECour de Cassation


Chambre sociale

Audience publique du 5 juin 1959 REJET

N° de pourvoi : 59-06218
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Laroque
Av.Gén. M. Albucher
Av. Demandeur : M. Galland
Av. Défendeur : M. Labbé

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 1338 et 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi du 20
avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que le contrat de travail de X... s'était poursuivi
pour une durée indéterminée, la communication à lui faite en 1941 au cours d'une réunion du conseil
d'administration de la décision d'y mettre fin ayant eu lieu avec un préavis inférieur à celui qui avait été
convenu ; alors qu'en l'absence de réserves de sa part, son accord tacite valait ratification et couvrait l'irrégularité
de la tardiveté de la notification ;
Mais attendu que les juges du fond ont constaté que, par contrat du 1er février 1937, la société anonyme des
Etablissements Tréfousse avait confié à X... la direction générale, technique et commerciale de son entreprise,
pour une durée de cinq années, à compter du 1er janvier 1937 ; qu'il était prévu qu'elle serait prorogée pour cinq
autres années, par tacite reconduction, si, douze mois avant l'expiration de la première période en cours, l'une des
parties n'avait pas dénoncé par lettre lesdits accords à l'autre partie ; que, si le conseil d'administration avait
décidé, le 24 décembre 1940, d'y mettre fin pour le 31 décembre 1941, il n'était pas établi que X... eut assisté à
cette réunion, et que, si le procès-verbal en avait été approuvé en sa présence lors de la séance du 7 avril 1941,
cette dernière réunion, tenue moins d'un an avant l'expiration de la première période quinquennale, était tardive ;
que X... avait, d'ailleurs, continué à percevoir, jusqu'en 1956, les rémunérations fixées par le contrat du 1er
février 1937 ; qu'en en déduisant que le contrat de travail de X... n'avait pas été résilié pour le 31 décembre 1941
et s'était poursuivi après cette date, le jugement attaqué a légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen, pris de la violation de l'article 2 de la loi du 16 novembre 1940, modifié par l'article 13
de la loi du 4 mars 1943, de l'article 16 de la loi du 4 mars 1943 et de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut
de motifs et manque de base légale ; Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir décidé que X...,
devenu en 1945 administrateur de la société anonyme, avait pu cumuler son mandat avec les fonctions de
directeur général salarié de la même société, alors que la loi du 4 mars 1943, applicable aux contrats et situations
en cours à la date de son entrée en vigueur, interdit à tout administrateur autre que le président, le directeur
général délégué et le directeur général adjoint d'assurer les fonctions de direction dans la société ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que le contrat de travail conclu par X... en 1937 n'avait pas eu
pour but de supprimer la révocabilité ad nutum d'un mandataire ce qu'il n'était devenu que bien après ; qu'ils
relèvent à juste titre qu'à défaut de fraude, la loi du 16 novembre 1940, modifiée par celle du 4 mars 1943, ne
comporte aucune prohibition d'un cumul entre les fonctions d'administrateur, directeur général adjoint
mandataire d'une société anonyme et celle de directeur technique ou commercial lié à la société par un contrat de
louage de service ; qu'ils ont ainsi légalement justifié leur décision ;

Et sur le troisième moyen, pris de la violation de l'article 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi du 20 avril
1810, dénaturation de documents, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que X... n'avait donné sa démission que de
directeur général mandataire et d'administrateur, alors qu'il était nettement précisé dans les documents versés aux
débats qu'il avait démissionné de ses fonctions de directeur technique et commercial, lié par un contrat de louage
de services ;

Mais attendu que les juges du fond, appréciant la portée des documents versés aux débats et interprétant
l'intention des parties quand ils étaient susceptibles de plusieurs sens, ont estimé que si X... avait présenté
oralement à deux reprises sa démission, celle-ci ne concernait que ses fonctions de directeur général mandataire
et d'administrateur de la société ; qu'ils ont ainsi donné une base légale à leur décision que la rupture du contrat
de travail de X... avait été le fait de la société ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE.
Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale N. 690 p. 552
Les grands arrêts de la jurisprudence commerciale, Sirey, note Jean NOIREL, p. 303.

RUPTURE DU
Décision attaquée : Tribunal civil Chaumont 1956-05-28

CONTRAT DE TRAVAIL ET FORCE MAJEURE


Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 12 février 2003 Cassation partielle sans renvoi

N° de pourvoi : 99-42985
Publié au bulletin

Président : M. Sargos
Plusieurs conseillers rapporteurs :M. Merlin (arrêt n° 1), M. Frouin (arrêt n° 2), Mme Bourgeot (arrêt
n° 3).
Avocats généraux : M. Lyon-Caen (arrêt n° 1), M. Duplat (arrêt n° 2), Mme Barrairon (arrêt n° 3).
Avocats : la SCP Boullez, MM. Blanc, Carbonnier (arrêt n°1), la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez,
la SCP Masse-Dessen et Thouvenin (arrêt n° 2).

ARRET N°1

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à l'AGS-CGEA d'Ile-de-France de ce qu'elle se désiste du troisième moyen de son
pourvoi ;

Attendu que la société de droit français Télémax et la société de droit italien Compagnia generale RT
ont conclu un contrat de coproduction d'une série télévisée comprenant plusieurs épisodes et portant
le titre provisoire de "Une famille en jaune" ; que la société italienne était l'unique et exclusif
propriétaire des droits pour la production télévisée et dirigeait seule la production en sa qualité de
coproducteur majoritaire ; que pour la réalisation de cette production la société italienne a engagé
comme artiste interprète Ugo A... alors que la société française a embauché Mme X... par contrat à
durée déterminée de quatre-vingts jours à effectuer entre le 16 juillet 1990 et juillet 1991 moyennant
une somme de 639 400 francs ; qu'en raison du décès en cours de tournage d'Ugo A..., la société
italienne a arrêté la production de la série télévisée et la société Télémax a rompu le contrat de Mme
X... par lettre du 7 décembre 1990 ; que cette dernière a saisi la juridiction prud'homale en réclamant
le paiement de dommages-intérêts ; que la société Télémax a sollicité la garantie de la société
Compagnia generale RT et, postérieurement au jugement du conseil de prud'hommes a été déclarée en
liquidation judiciaire par jugement du 7 décembre 1995, M. Y... étant désigné en qualité de
mandataire liquidateur ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'AGS-CGEA d'Ile-de-France et le deuxième moyen du


pourvoi incident de M. Y..., ès qualités :

Attendu que l'AGS-CGEA d'Ile de France et M. Y... ès qualités font grief à l'arrêt d'avoir condamné la
société Télémax à payer à Mme X... des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la
rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée, alors, selon le premier moyen du
pourvoi principal :

1 / que l'impossibilité absolue pour l'employeur de fournir du travail au salarié lui permet de rompre,
avant l'échéance du terme, le contrat conclu pour une durée déterminée ; qu'en s'abstenant de
rechercher si la décision irrévocable prise unilatéralement par la société Compagnia generale RT, en
sa qualité de producteur délégué, d'arrêter le tournage de la série télévisée, à la suite du décès d'Ugo
A..., qu'elle avait elle-même embauché pour tenir le rôle principal, ne mettait pas la société Télémax
dans l'impossibilité absolue d'exécuter le contrat de travail qu'elle avait elle-même conclu de son côté
avec Mme X..., dès lors qu'elle ne pouvait pas poursuivre la production de cette série, en l'absence de
la société Compagnia generale RT qui dirigeait seule la production, en sa qualité de producteur
majoritaire, peu important que le sujet ait été repris par un autre producteur, la cour d'appel a privé sa
décision de base légale sous le rapport de l'article 1148 du code civil, ensemble l'article L.122-3-8 du
Code du travail ;

2 / que l'irrésistibilité de l'événement est, à elle seule, constitutive de force majeure, lorsque sa
prévision ne saurait permettre d'en empêcher les effets, sous réserve que le débiteur ait pris toutes les
mesures requises pour éviter la réalisation de l'événement ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel a violé
l'article 1148 du Code civil, ensemble l'article L.122-3-8 du Code du travail, en énonçant que le décès
d'Ugo A... a été prévu par la conclusion d'un contrat d'assurance garantissant cet aléa, quand la
prévision de la mort d'Ugo A... ne saurait permettre d'empêcher la survenance de cet événement, ni
même d'en prévenir les effets sur le tournage de la série télévisée, et ce, même par la conclusion d'un
contrat d'assurance par la société Compagnia generale qui garantissait seulement les dommages
découlant directement et exclusivement de l'interruption forcée du tournage ou de l'impossibilité de le
mener à son terme, sans permettre pour autant à la société Télémax de poursuivre le contrat de travail
de Mme X..., en l'absence de la société Compagnia generale ; alors, selon le deuxième moyen du
pourvoi incident :

1 / que l'impossibilité absolue pour l'employeur de fournir du travail au salarié lui permet de rompre
avant l'échéance du terme, le contrat conclu ; qu'ainsi, la cour d'appel aurait dû rechercher si la
décision irrévocable de la société Compagnia Generale, en sa qualité de producteur délégué et de
producteur majoritaire seul décisionnaire, d'arrêter le tournage de la série télévisée, à la suite du décès
d'Ugo A..., qu'elle avait embauché pour tenir le rôle principal, ne mettait pas la société Télémax dans
l'impossibilité absolue d'exécuter le contrat de travail qu'elle avait elle-même conclu avec Mme X...,
dès lors qu'elle ne pouvait poursuivre la production de la série en l'absence de la société Compagnia
generale (manque de base légale au regard des articles 1148 du Code civil et L.122-3-3 du Code du
travail) ;

2 / que l'irrésistibilité de l'événement est, à elle seule, constitutive de la force majeure, lorsque sa
prévision ne saurait permettre d'en empêcher les effets sous réserve que le débiteur ait pris toutes les
mesures requises pour éviter la réalisation de l'événement dommageable ; que la cour d'appel ne
pouvait dès lors considérer que le décès d'Ugo A... ne constituait pas un cas de force majeure puisque
cet événement était irrésistible et constitutif à lui seul de la force majeure, violant ainsi les articles
1148 du Code civil et L.122-3-8 du Code du travail ;
Mais attendu que la force majeure permettant à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des
obligations nées de la rupture du contrat de travail s'entend de la survenance d'un événement extérieur
irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat ;

Et attendu que les juges du fond, qui ont constaté que le décès de l'acteur principal ne faisait pas
obstacle à la poursuite de la production de la série télévisée avec un autre acteur, ont caractérisé le fait
que la poursuite du contrat de Mme X... n'était pas impossible et ont ainsi légalement justifié leur
décision ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal de l'AGS-CGEA d'Ile-de-France et le troisième moyen


du pourvoi incident de M. Y..., ès qualités :

Attendu que l'AGS-CGEA d'Ile-de-France et M. Y..., ès qualités, font encore grief à l'arrêt d'avoir
rejeté l'appel en garantie de la société Télémax à l'encontre de la société Compagnia generale, alors,
selon le deuxième moyen du pourvoi principal :

1 / que I'article 2 du contrat de production stipule que "le présent contrat ne devra en aucun cas être
considéré comme une constitution de société entre les deux groupes (et que) la responsabilité de
chaque groupe (c'est-à-dire les sociétés française et italienne parties au contrat) est limitée aux
obligations prises par les présentes et particulièrement vis-à-vis des tiers (et) qu'en aucun cas, un
groupe ne pourra être appelé à répondre pour les obligations prises par un autre groupe, même si
celles-ci peuvent se référer au présent contrat" ; qu'en énonçant que l'article 2 du contrat de
production exonérait la société Compagnia generale RT de toute responsabilité, à raison des
dommages causés à la société Télémax par la rupture du contrat de travail qu'elle avait conclu avec
Mme X... pour les besoins de la production de la série télévisée qui avait été arrêtée par la société
Compagnia generale RT, quand l'article 2 du contrat de coproduction se bornait à exclure toute
solidarité entre ces deux sociétés qui imposerait à l'une d'entre elles d'exécuter l'obligation contractée
par l'autre sans exclure pour autant toute action en responsabilité contractuelle entre elles, la cour
d'appel a dénaturé la convention des parties ; qu'ainsi, elle a violé l'article 1134 du Code civil ;
2 / que doit être réputée non écrite la clause exonératoire de responsabilité qui contredit la portée de
l'engagement pris, en déchargeant de toute responsabilité l'un des contractants qui a manqué à
l'obligation essentielle qu'il avait souscrite ; qu'il est constant que la société Compagnia generale RT
avait contracté envers la société Télémax l'obligation essentielle de mener à son terme le tournage de
la série télévisée, en sa qualité de producteur délégué majoritaire ;

qu'en énonçant que la société Compagnia generale a pu s'exonérer de toute responsabilité, en raison
de l'inexécution de cette obligation essentielle, en application de l'article 2 du contrat de production,
quand cette clause exonératoire aurait dû être réputée non écrite dès lors qu'elle contredisait la portée
de l'engagement pris envers la société Télémax de mener la production à son terme, la cour d'appel a
violé l'article 1131 du Code civil ;

3 / que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en énonçant que les
stipulations du contrat d'assurance conclu avec un tiers par la société Compagnia generale la
dispensait de répondre de l'inexécution de l'obligation essentielle qu'elle avait souscrite envers la
société Télémax de mener le tournage à son terme, la cour d'appel a violé l'article 1165 du Code
civil :

4 / qu'il résulte des constatations auxquelles la cour d'appel a procédé que "la société Télémax
soutient qu'elle n'a fait que répercuter sur Mme X... l'annulation de la production décidée par la seule
Compagnia generale RT, en sa qualité de productrice déléguée, et qu'en conséquence, cette dernière
doit la garantir des conséquences financières de la résiliation du contrat de travail de Mme X..." ;
qu'en énonçant que la société Télémax n'alléguait pas que la société Compagnia generale RT avait
commis une faute, quand la société Télémax reprochait à la société Compagnia generale d'avoir
rompu le contrat de production et d'avoir donc commis une faute contractuelle, la cour d'appel a
dénaturé les termes du litige dont elle était saisie, en violation de l'article 4 du nouveau Code de
procédure civile ;

5 / que la résolution unilatérale d'un contrat s'étend à tous les engagements conclus avec des tiers,
pour la réalisation de son objet, auxquels il est donc uni par un lien d'indivisibilité ; qu'il s'ensuit que
celui qui rompt unilatéralement un contrat doit répondre du préjudice causé à l'autre partie par la
rupture des engagements qu'elle avait elle-même conclus avec des tiers pour l'exécution de ce contrat-
là et qui constituent donc un tout indivisible ; qu'en énonçant que la rupture du contrat de travail de
Mme X... n'était pas imputable à la Compagnia generale RT qui avait pris la décision irrévocable
d'arrêter la production de la série télévisée interprétée par Mme X..., quand son contrat de travail était
indivisible du contrat de production pour l'exécution duquel il avait été conclu, la cour d'appel a violé
l'article 1184 du Code civil, ensemble les articles 1147 et 1150 du même Code ; et alors, selon le
troisième moyen du pourvoi incident :

1 / que l'article 2 du contrat de production stipulait "il est expressément convenu que le présent contrat
ne devra en aucun cas être considéré comme une constitution de société entre les deux groupes, la
responsabilité de chaque groupe est limitée aux obligations prises par les présentes et particulièrement
vis-à-vis des tiers ; en aucun cas un groupe ne pourra être appelé à répondre pour les obligations
prises par un autre groupe, même si celles-ci peuvent se référer au présent contrat" ; que cette
stipulation ne faisait pas obstacle à un appel en garantie de la société Télémax dirigé contre la société
Compagnia generale du fait de l'annulation de la production décidée par cette seule société, en sorte
qu'en retenant que chaque groupe conservait sa gestion interne pour débouter la société Télémax de
son appel en garantie, la cour d'appel a dénaturé ledit article (violation de l'article 1134 du Code civil)
;

2 / qu'à supposer que la société Compagnia generale pût s'exonérer de toute responsabilité par l'effet
de l'article 2 précité, cette clause exonératoire de responsabilité, qui contredisait l'engagement pris par
la société Compagnia generale envers la société Télémax de mener à son terme le tournage de la série
en sa qualité de producteur majoritaire, devait être réputée non écrite (violation de l'article 1131 du
Code civil) ;

3 / que les stipulations du contrat d'assurance conclu par la seule Compagnia generale avec un
assureur n'étaient pas de nature à justifier de l'inexécution de ses obligations vers la société Télémax,
le contrat n'ayant d'effets qu'entre les parties contractantes (violation de l'article 1165 du Code civil) ;

4 / que la société Télémax, en faisant valoir n'avoir fait que répercuter sur Mme X... l'annulation de la
production décidée par la seule société Compagnia generale, en sa qualité de producteur délégué, et
qu'en conséquence cette dernière devait la garantir des conséquences financières de la résiliation du
contrat de travail de Mme X..., avait bien imputé la résiliation à la Société Compagnia generale, par
hypothèse fautive si la société Télémax était condamnée à indemniser Mme X... ;
que la cour d'appel a retenu que la société Télémax n'alléguait pas que la société Compagnia generale
avait commis une faute et a dénaturé les termes du litige (violation de l'article 4 du nouveau Code de
procédure civile) ;

5 / que la résiliation unilatérale du contrat de production par la société Compagnia generale,


producteur délégué et majoritaire, emportait par voie de conséquence nécessaire la résiliation du
contrat conclu par la société Télémax avec Mme X..., en raison de l'indivisibilité liant les deux
contrats, le second étant sur la dépendance du premier ; qu'ainsi la cour d'appel ne pouvait écarter
l'appel en garantie de la société Télémax (violation des articles 1147 et suivants, 1184, 1217 et 1218
du Code civil) ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, en retenant qu'en vertu de l'article 2 du contrat conclu entre
la société Compagnia generale et la société Télémax aucune des deux parties ne pouvaient être
appelée à répondre des obligations prises par l'autre, n'a pas dénaturé le contrat ;

Attendu, ensuite, que devant la cour d'appel M. Y..., ès qualités, et l'AGS-CGEA Ile-de-France se sont
bornés à soutenir que la société Compagnia generale devait garantir la société Télémax car elle avait
souscrit une police d'assurance couvrant les risques de la coproduction ; qu'il en résulte que la cour
d'appel en énonçant qu'aucune faute n'avait été alléguée à l'encontre de la société Compagnia generale
susceptible d'engager la responsabilité de cette dernière n'a pas dénaturé les termes du litige et que les
griefs invoquant la nullité de la clause limitative de responsabilité, l'effet relatif des contrats et
l'indivisibilité de la résiliation du contrat de coproduction et du contrat de travail sont nouveaux et
irrecevables comme mélangé de fait et de droit ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de M. Y... pris en sa troisième branche :


Attendu que M. Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à Mme X... 6
000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel,
alors, selon le moyen, que les créances de Mme X... au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel
avaient une cause antérieure à la procédure de liquidation judiciaire en sorte que la cour d'appel aurait
dû appliquer d'office les dispositions d'ordre public en obligeant Mme X... à se soumette à la
procédure de vérification des créances (violation des articles 47 et 50 de la loi du 25 janvier 1985) ;

Mais attendu que la créance au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et celle des
dépens mis à la charge du débiteur trouvent leur origine dans la décision qui statue sur leur sort et
entre dans les prévisions de l'article L. 621-32 du Code de commerce lorsque cette décision est
postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident de M. Y...

Vu l'article 127 de la loi n 85-98 du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-129 du Code de
commerce ;

Attendu que, selon ce texte, les relevés des créances résultant d'un contrat de travail visés par le juge-
commissaire ainsi que les décisions rendues par les juridictions prud'homales sont portés sur l'état des
créances déposé au greffe ;

Attendu que la cour d'appel a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes qui avait condamné la
société Télémax à payer à Mme X... la somme de 639 400 francs à titre de dommages-intérêts, celle
de 7 500 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait alors que ces créances, qui étaient nées antérieurement au jugement
de liquidation judiciaire de l'employeur, ne pouvaient faire l'objet d'une condamnation du débiteur à
les payer à la salarié et qu'elle devait se borner à déterminer le montant des sommes à inscrire sur
l'état des créances déposé au greffe, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi de ce chef, la Cour de Cassation pouvant donner au litige sur ce
point la solution appropriée en application de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions confirmant la condamnation, en première


instance, de la société Télémax au paiement de dommages-intérêts, à une somme au titre de l'article
700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Télémax la créance de Mme X... à la somme de
639 400 francs (97 475,9 euros) à titre de dommages-intérêts à celle de 7 500 francs (1143,37 euros)
au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à la somme représentative des dépens
de première instance ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera
transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son
audience publique du douze février deux mille trois.

Publication : Bulletin 2003 V N° 50 p. 45


Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 1999-03-24

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1999-07-12, Bulletin 1999, V, n°


344, p. 251 (cassation partielle), et les arrêts cités.

Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 12 février 2003 Rejet

Publié au bulletin

Président : M. Sargos
Plusieurs conseillers rapporteurs :M. Merlin (arrêt n° 1), M. Frouin (arrêt n° 2), Mme Bourgeot (arrêt
n° 3).
Avocats généraux : M. Lyon-Caen (arrêt n° 1), M. Duplat (arrêt n° 2), Mme Barrairon (arrêt n° 3).
Avocats : la SCP Boullez, MM. Blanc, Carbonnier (arrêt n° 1), la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez,
la SCP Masse-Dessen et Thouvenin (arrêt n° 2).
ARRET N°2

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu leur connexité, joint les pourvois n° V 01-40.916 à C 01-40.923 ;

Attendu que le passage du cyclone "Luis" sur l'Isle de Saint-Martin, le 4 septembre 1995, a entraîné la
destruction d'une partie importante du village-hôtel exploité à Saint-Martin par la société La Belle
Créole ; que, le 15 septembre 1995, la société a notifié à l'ensemble des salariés de l'hôtel la rupture
de leur contrat de travail pour force majeure ;

que des salariés, dont certains étaient des salariés protégés, ont saisi la juridiction prud'homale d'une
demande tendant à contester la validité de la rupture et en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen commun à tous les pourvois :

Attendu que la société La Belle Créole fait grief aux arrêts attaqués (Basse-Terre, 20 novembre 2000)
d'avoir dit, pour certains salariés, que la rupture de leur contrat de travail était nulle, ordonné leur
réintégration et de l'avoir condamnée à leur payer une indemnité compensatrice de la perte de leurs
salaires ou, à défaut de réintégration, une indemnité égale au montant des salaires dus depuis le 15
septembre 1995 jusqu'au jour de la notification de l'arrêt, et d'avoir dit, pour les autres salariés, qu'ils
avaient fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à leur payer
une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que des indemnités de rupture
alors, selon le moyen :
1 ) qu'ayant constaté, d'une part, le caractère imprévisible et irrésistible du cyclone Luis survenu le 4
septembre 1995, qui a entraîné la destruction à 70 % de l'hôtel La Belle Créole avec la cessation
subséquente complète de toute activité, d'autre part, les difficultés financières rencontrées par la
société La Belle Créole, menacée de cessation des paiements, enfin, le fait qu'une reprise partielle de
l'activité hôtelière n'avait pu être envisagée avant janvier 1997, ce dont il résultait que la société La
Belle Créole s'était bien retrouvée, par la survenance du cyclone Luis, dans l'impossibilité absolue et
durable de poursuivre l'exécution des contrats de travail, la cour d'appel ne pouvait écarter le caractère
de force majeure de la rupture intervenue le 15 septembre 1995, qu'en se déterminant de la sorte, la
cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient
nécessairement au regard des articles L. 122-4, L. 122-12 du Code du travail et 1148 du code civil ;

2 ) qu'en ses écritures d'appel, la société la Belle Créole faisait valoir qu'au mois de septembre 1995,
elle était dans l'incapacité de savoir si l'exploitation pourrait reprendre un jour et à quelle date, compte
tenu de l'importance des dommages, du coût élevé de la reconstruction de l'hôtel et de sa propre
situation financière ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un
défaut de réponse à conclusions et l'a privé de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code
de procédure civile ;

3 ) que pour écarter l'existence de la force majeure, la cour d'appel déduit l'absence de caractère
insurmontable des difficultés financières de la société la Belle Créole de ce que celle-ci s'est vue aidée
par la société Winfair Investments ltd, dont elle est une filiale, laquelle a réglé pour son compte en
1995 et 1996 diverses charges et dettes pour un montant de près de 6 millions de francs, envisageait
l'avance sans intérêt d'une somme de 12 millions de francs et lui a évité à deux reprises l'ouverture
d'une procédure de redressement judiciaire par des versements sur ses comptes bancaires de 412 800
francs et 250 000 US dollars en1996 et de 2 418 190 francs en 1998 ; qu'en omettant cependant de
rechercher si le fait même d'avoir été assignée deux fois aux fins d'ouverture d'une procédure
collective, en dépit de l'aide apportée par son actionnaire, n'était pas le signe de l'impossibilité pour la
société la Belle Créole de surmonter, en l'état de ses ressources financières, les conséquences
imprévisibles du cyclone, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.
122-12, L. 122-4 du Code du travail et 1147 du code civil ;

4 ) qu'en énonçant à l'appui de sa décision que la reprise au moins partielle d'activité était possible, le
refus de l'employeur de rouvrir l'hôtel tenant à la permanence d'un conflit avec les salariés, sans
étayer cette affirmation du moindre motif de nature à la justifier, ni répondre, aux conclusions de la
société la Belle Créole dans lesquelles celle-ci faisait valoir d'abord, en se fondant sur les conclusions
non contestées de l'expert nommé en 1996 dans le cadre de l'ouverture d'une procédure de
redressement judiciaire aux fins d'examiner les conditions financières nécessaires à la reprise
d'activité, que la situation actuelle et à venir de la Belle Créole était totalement dépendante de la
contribution de la société Winfair Investments ltd laquelle, malgré les sommes perçues de la
compagnie d'assurances, devrait, pour faire face au règlement des différentes dettes exigibles,
apporter en compte courant une somme d'au moins 37 millions de francs et qui soulignait ensuite que
si le prononcé du redressement judiciaire avait pu être évité par les versements aux comptes bancaires
effectués par ladite société Winfair, celle-ci ne pouvait satisfaire aux recommandations de l'expert en
apportant en compte courant une somme d'un tel montant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux
exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et, par voie de conséquence, a de
nouveau privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

Mais attendu que la force majeure, permettant à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des
obligations nées de la rupture d'un contrat de travail, s'entend de la survenance d'un événement
extérieur irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat ;

Et attendu qu'ayant relevé que la destruction partielle du village-hôtel occasionnée par le passage du
cyclone ne rendait pas impossible la reprise de l'exploitation de l'hôtel, après remise en état, et,
partant, la poursuite du contrat de travail des salariés, la cour d'appel a, sans encourir aucun des griefs
du moyen, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen propre aux pourvois n° V 01-40.916 et Z 01-40.920 :

Attendu que la société La Belle Créole fait encore grief à l'arrêt d'avoir retenu que la rupture des
contrats de travail de Mmes X... et Y... s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et
d'avoir proposé leur réintégration leur allouant, à défaut de celle-ci, des dommages-intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1 ) que les juges ne sont pas tenus par la qualification juridique que l'employeur a donnée à la rupture,
que la cour d'appel qui déduit l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture de la seule
constatation que la force majeure n'est pas établie, sans rechercher si les faits invoqués dans la lettre
de rupture, à savoir la fermeture totale de l'établissement et l'impossibilité pour l'employeur de fournir
du travail pendant une durée indéterminée, consécutives à la destruction de l'hôtel, ne permettaient
pas au moins de caractériser une cause économique réelle et sérieuse de licenciement, a privé sa
décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;

2 ) et pour les mêmes raisons, qu'elle a violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen qui ne serait pas de nature à permettre
l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société La Belle Créole aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société La Belle Créole à payer
aux 8 salariés défendeurs la somme globale de 2 300 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son
audience publique du douze février deux mille trois.
Publication : Bulletin 2003 V N° 50 p. 45
Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 2000-11-20

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1999-07-12, Bulletin 1999, V, n°


344, p. 251 (cassation partielle), et les arrêts cités.

Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 12 février 2003 Rejet

N° de pourvoi : 00-46660
Publié au bulletin

Président : M. Sargos
Plusieurs conseillers rapporteurs :M. Merlin (arrêt n° 1), M. Frouin (arrêt n° 2), Mme Bourgeot (arrêt
n° 3).
Avocats généraux : M. Lyon-Caen (arrêt n° 1), M. Duplat (arrêt n° 2), Mme Barrairon (arrêt n° 3).
Avocats : la SCP Boullez, MM. Blanc, Carbonnier (arrêt n°1), la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez,
la SCP Masse-Dessen et Thouvenin (arrêt n° 2).

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ARRÊT N° 3

Sur les deux moyens réunis :


Attendu que Mme X... a été engagée le 11 février 1996 en qualité de serveuse par la société
Restaurant Les Cygnes, selon un contrat à durée déterminée de retour à l'emploi devant expirer le 11
novembre 1997 ; qu'à l'issue d'un arrêt de travail pour maladie, la salariée a été déclarée par le
médecin du travail inapte à son emploi, le 16 octobre 1996 ; que cet avis était confirmé le 30 octobre
suivant ; que l'employeur a rompu le contrat de travail de la salariée le 16 novembre 1996 pour
inaptitude physique et impossibilité du reclassement présentant, selon lui, les caractères de la force
majeure ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt attaqué (Chambéry, 24 octobre 2000) de l'avoir condamné
à payer à la salariée une somme au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 122-3-8 du Code du travail
et invoque des griefs tirés de la violation, d'une part, de cet article en ce qui concerne la force
majeure, d'autre part, de l'article L. 122-24-4 du même code ;

Mais attendu que la force majeure permettant à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des
obligations nées de la rupture d'un contrat de travail s'entend de la survenance d'un événement
extérieur irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat ; que ne présente
pas ce caractère l'inaptitude à son emploi d'un salarié ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre
l'admission du pourvoi ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 2003 V N° 50 p. 45
Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 2000-10-24

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1999-07-12, Bulletin 1999, V, n°


344, p. 251 (cassation partielle), et les arrêts cités.

Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 7 mai 2002 Rejet.

N° de pourvoi : 00-42370
Publié au bulletin

Président : M. Merlin, conseiller doyen faisant fonction. .


Rapporteur : M. Poisot.
Avocat général : M. Duplat.
Avocat : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X... a été engagé en qualité de croupier, le 1er avril 1983 par la société Casino
municipal d'Aix-Thermal ; que le 22 janvier 1994, il a fait l'objet de la part du ministre de l'intérieur
d'une mesure d'exclusion des salles de jeux, cette décision précisant que cette mesure valait retrait
d'agrément à l'égard d'un employé des jeux ; que par lettre du 24 janvier 1994, l'employeur lui a
notifié la rupture de son contrat de travail pour cas de force majeure ; que contestant cette mesure, il a
saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 janvier 2000) d'avoir dit que
son licenciement procédait d'une cause étrangère, exonérant l'employeur de l'obligation de lui payer le
préavis et une indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :
1° que l'article 8 du décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959, fait obligation au directeur responsable
du casino de congédier sans délai toute personne employée à un titre quelconque dans les salles de
jeux, à qui le ministre de l'intérieur aurait retiré l'agrément ; que la décision d'exclusion des salles de
jeux ne constitue pas un motif de rupture sans délai du contrat de travail par l'employeur ; qu'en
jugeant néanmoins que le licenciement sans indemnité ni préavis de M. Raoul X..., était justifié par le
fait du prince, au motif que l'inscription de son nom sur une liste confidentielle de personnes exclues
des salles de jeux valait retrait d'agrément, ce qui ne résulte en aucun cas des textes applicables, la
cour d'appel a violé l'article 8 du décret précité du 22 décembre 1959 par fausse application ;

2° que subsidiairement l'employeur ne peut se prévaloir du fait du prince, pour justifier la rupture du
contrat de travail d'un salarié sans préavis ni indemnité, qu'à la double condition que la décision
administrative soit imprévisible et ne résulte pas de son propre fait ; qu'en l'espèce, il était constant
que la Société Casino municipal d'Aix-Thermal avait porté plainte contre M. X... du chef de vols
commis à son préjudice et que cette procédure avait motivé la décision du ministre de l'intérieur de
l'exclure des salles de jeux ; que son employeur ne pouvait en conséquence pas se prévaloir de cette
décision, qui était à la fois prévisible et liée à sa propre intervention pour justifier le licenciement de
M. Raoul X... par le fait du prince ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134
et 1148 du Code civile ensemble l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;

3° que subsidiairement encore, en jugeant que la Société Casino municipal d'Aix-Thermal ne pouvait
valablement satisfaire à l'obligation que lui imposait l'article 8 du décret n° 59-1489 du décret du 22
décembre 1959, qu'en licenciant M. X..., alors qu'elle pouvait valablement y satisfaire en considérant
le contrat de travail de ce dernier comme suspendu et non rompu, la cour d'appel a violé l'article 8 du
décret du 22 décembre 1959 ;

4° qu'enfin, il appartient au juge saisi d'un litige relatif à un licenciement de rechercher au-delà du
motif invoqué par l'employeur dans la lettre de licenciement la cause véritable du licenciement ; qu'en
s'abstenant de rechercher si le motif véritable du licenciement de M. X... ne résidait pas dans le seul
engagement de poursuites pénales à son encontre, ainsi pourtant que l'y invitaient les conclusions
d'appel de ce dernier et ainsi que cela résultait de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement,
dès avant toute décision d'exclusion de M. X... des salles de jeux par le ministre de l'intérieur, la cour
d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu, qu'aux termes de l'article 8 du décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959, portant
réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, le directeur
responsable du casino est tenu de congédier sans délai, toute personne employée à titre quelconque
dans les salles de jeux à qui le ministre de l'intérieur aurait retiré l'agrément ;

Et attendu, qu'ayant constaté que la décision ministérielle du 4 janvier 1994, précisait que l'exclusion
des salles de jeux prononcée à l'encontre de M. X... valait retrait d'agrément à son égard, la cour
d'appel, qui n'a été saisie d'aucune question préjudicielle de légalité concernant ce retrait et qui a
procédé à la recherche prétendument omise, a décidé à juste titre que cette mesure constituait un cas
de force majeure privatif des indemnités de rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 2002 V N° 143 p. 148


Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2000-01-25

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1993-05-05, Bulletin 1993, V, n°


126, p. 188 (cassation).

RUPTURE EN PERIODE D'ESSAIPERIODE


D'ESSAI ET USAGECour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 23 novembre 1999
N° de pourvoi : 97-43022
Publié au bulletin Cassation.

Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. ., président


Rapporteur : M. Soury., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Martin., avocat général

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que Mme X... a été engagée par la société Nectarys, le 3 octobre 1994, en qualité de
responsable de clientèle ; que son employeur a rompu le contrat de travail par lettre du 17
octobre 1994 en se prévalant d'une rupture en période d'essai ; que la salariée a saisi la
juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans
cause réelle et sérieuse et d'une indemnité compensatrice de préavis ;

Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt attaqué énonce qu'il est
constant que l'usage dans la profession, laquelle relève de la vente, est de soumettre les
salariés à une périoded'essai dont la durée est au minimum d'un mois ; que la rupture a été
prononcée durant le premier mois d'activité ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'une période d'essai ne peut résulter que du contrat de travail ou
de la convention collective et ne peut être instituée par un usage, la cour d'appel a violé le
texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mai 1997, entre les
parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel
de Rennes.

Publication : Bulletin 1999 V N° 448 p. 330

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, du 6 mai 1997

ABSENCE DE STIPULATION EXPRESSE D'UNE


PERIODE D'ESSAI
Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 4 mars 1992 Rejet.

N° de pourvoi : 88-45049
Publié au bulletin

Président :M. Cochard


Rapporteur :M. Monboisse
Avocat général :M. Chauvy
Avocats :M. Choucroy, la SCP Piwnica et Molinié.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le premier moyen :


Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 1988) et la procédure, M. Tzola a été engagé le 24
février 1986 par la société Socorev en qualité de directeur technico-commercial ; que le contrat de travail
ne mentionnait pas de période d'essai mais renvoyait à la convention collective ; que, par lettre du 22 avril
1986, la société a mis fin aux relations contractuelles en exposant que la période d'essai expirait le 24 avril
1986 ; que M. Tzola a saisi la juridiction prud'homale aux fins de condamnation de la société au paiement
de différentes sommes ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Socorev à payer à M. Tzola une
somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif et une autre somme sur le fondement de
l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors que, selon le moyen, d'une part, lorsque le contrat
de travail ne réglemente pas spécialement la période d'essai, mais renvoie expressément à la convention
collective pour toute matière non envisagée par ledit contrat, les stipulations de la convention collective
relatives à la durée de la période d'essai s'imposent aux parties ; qu'en l'espèce, le contrat de travail signé le
24 février 1986 par la société Socorev et M. Tzola stipulait expressément que " pour toute éventualité
n'ayant pas été prévue dans le présent contrat, les parties contractantes se réfèrent à la législation en
vigueur et à la convention collective " ; que l'article 6 de l'avenant du 9 mai 1963 annexe III " ingénieurs et
cadres " de la convention collective de la maroquinerie prévoit que " tout engagement comporte une
période d'essai dont la durée est fixée à 3 mois ", de sorte que viole ledit article 6 l'arrêt attaqué qui refuse
d'en faire application aux rapports de la société Socorev et de M. Tzola ; alors que, d'autre part, en
procédant de la sorte, en l'état des stipulations du contrat de travail, l'arrêt attaqué se trouve manquer de
base légale au regard des dispositions de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 5 de l'avenant du 9 mai 1963, de l'annexe III " ingénieurs et cadres "
de la convention collective de la maroquinerie du 12 mai 1961, tout engagement sera confirmé
préalablement à l'entrée dans l'entreprise par une lettre stipulant notamment la durée, les conditions de la
période d'essai ; que la cour d'appel a fait une exacte application de ce texte en décidant que la référence à
la convention collective n'est pas suffisamment explicite pour permettre de retenir l'existence d'une période
d'essai ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Publication : Bulletin 1992 V N° 149 p. 93


Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 1988-09-20
Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1992-01-07 , Bulletin 1992, V, n° 6, p.
4 (rejet), et l'arrêt cité.
PERIODE D'ESSAI ET CONGEDIEMENT
Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 10 octobre 1957 Cassation

N° de pourvoi : 57-04605
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Terrier
Av.Gén. M. Lindon

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique : Vu les articles 23, livre I du Code du travail et 7 de la loi du 20 avril 1810 ;

Attendu que la rupture du contrat de travail peut avoir lieu sans préavis si l'engagement a été conclu à
l'essai et tant que dure la période d'épreuve dont les parties demeurent libres de déterminer la durée ;

Attendu que le jugement attaqué, après avoir constaté que X..., qui avait été engagé pour un essai de
durée non précisée, le 1er décembre 1952, par les établissements Clément Robert, en qualité de chef
d'atelier, avait le 24 décembre 1953 reconnu par écrit que la période d'épreuve qui lui avait été
indiquée comme n'ayant pas donné satisfaction, était prolongée jusqu'au 28 février 1954, - puis avait
été licencié le 27 février, - lui reconnaît cependant droit à un délai-congé de trois mois en déclarant
"que ce serait éluder l'application régulière de la loi que d'accepter la prolongation indéfinie d'une
période d'essai", et que la signature par X... d'une lettre préparée à l'avance ne saurait changer cette
règle, la reconnaissance d'un état de fait illégal ne pouvant être admise ;

Attendu que par de tels motifs, desquels il ressort pas que le consentement donné par X... à la
prolongation de la période d'essai ait été entaché d'un vice quelconque, le Tribunal n'a pas légalement
justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 925 P. 655
Note B.P., Juris Classeur Périodique, 1957 II N. 10402. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands
arrêts de droit du travail, p.225
Décision attaquée : Tribunal civil Béziers 1955-01-03
EMPLOYEUR METTANT FIN A LA PERIODE
D'ESSAI DU SALARIE SANS LE REMPLACERCour de
Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 30 septembre 1992 Cassation partielle.

N° de pourvoi : 89-41820
Publié au bulletin

Président :M. Cochard


Rapporteur :M. Choppin Haudry de Janvry
Avocat général :M. Kessous
Avocats :la SCP Piwnica et Molinié, M. Foussard.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 9 février 1989), que M. Provent a été engagé par la société Auguste
Thouard le 2 avril 1986 en qualité d'expert en évaluation ; que le contrat de travail stipulait une période d'essai de
3 mois renouvelable une fois et une rémunération mensuelle brute de 20 000 francs durant les trois premiers
mois, puis, à compter du quatrième mois, de 40 % des honoraires encaissés pour les travaux du salarié ; que les
parties sont convenues de proroger de 3 mois la période d'essai qui expirait initialement le 27 octobre 1986 ; que,
le 26 janvier 1987, la société Auguste Thouard notifiait à M. Provent la cessation des relations contractuelles au
motif que ses méthodes de travail ne correspondaient pas à celles utilisées par la société ; qu'ayant appris la
suppression de son poste, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Auguste Thouard fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Provent une somme
à titre de dommages-intérêts et une autre à titre de rappels de salaires et d'indemnités de congés payés et de
préavis, alors, selon le moyen, qu'en convenant expressément, à l'expiration de la période d'essai de 3 mois, de la
renouveler " aux conditions de l'essai initial " durant lequel M. Provent n'avait perçu qu'une rémunération fixe de
20 000 francs par mois, la société Auguste Thouard, qui s'est bornée à maintenir cette même rémunération, et M.
Provent, qui n'a élevé aucune contestation, ont écarté, par là même, les stipulations antérieures au contrat de
travail prévoyant à partir du quatrième mois de présence une rémunération au pourcentage du chiffre d'affaires ;
qu'en refusant dès lors d'appliquer la lettre modificative du 24 octobre 1986, aux motifs que le contrat du 2 avril
1986 avait limité le " fixe " aux trois premiers mois et que la rémunération de M. Provent avait été placée dans
ses bulletins de salaires à la rubrique " commissions " bien qu'elle ait constaté qu'aucune commission n'a jamais
été versée, la cour d'appel a dénaturé la lettre du 24 octobre 1986 et, partant, violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que le contrat de travail prévoyait, sans qu'aucune relation ne soit faite avec
la période d'essai et son renouvellement, que le salarié bénéficierait d'une rémunération fixe mensuelle durant les
trois premiers mois de sa présence dans l'entreprise et qu'à compter du quatrième mois ladite rémunération
correspondrait à 40 % des honoraires encaissés sur ses travaux, c'est sans dénaturer les termes de l'accord du 24
octobre 1986 prolongeant la période d'essai de 3 mois aux conditions prévues par l'essai initial que la cour
d'appel a décidé que le salarié devait être rémunéré à compter du quatrième mois non sur la base d'un fixe, mais
en fonction du chiffre d'affaires réalisé ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que, pour condamner l'employeur à payer au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts
pour rupture abusive de la période d'essai, la cour d'appel énonce que le poste de M. Provent a été effectivement
supprimé en 1987 ; que l'appelante ne démontre pas que la mutation de M. Brunier ait été motivée par la
nécessité de le remplacer ; qu'il est donc établi que le motif de la rupture est étranger à la finalité de la période
d'essai et que, dans ces conditions, le conseil de prud'hommes a décidé à bon droit que l'employeur avait agi
abusivement et avec une légèreté blâmable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le fait de ne pas avoir remplacé un salarié dont l'employeur a mis fin à la période
d'essai n'est pas à lui seul constitutif d'un abus de l'exercice du droit de tout employeur de mettre fin à l'essai, la
cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Auguste Thouard à payer à M. Provent
la somme de 200 000 francs à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt rendu le 9 février 1989,
entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans
l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes

Publication : Bulletin 1992 V N° 484 p. 304

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 1989-02-09 PERIODE D'ESSAI


SUCCEDANT A UN CONTRAT
D'APPRENTISSAGECour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 4 mars 1992 Rejet.

N° de pourvoi : 88-44217
Publié au bulletin

Président :M. Cochard


Rapporteur :M. Fontanaud
Avocat général :M. Chauvy
Avocat :la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 septembre 1987), que M. Langlois a été embauché le 1er septembre 1982
par la société Janville distribution en qualité d'apprenti boucher pour une période de 2 ans ; que ce contrat
d'apprentissage a été suivi à son terme d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er septembre
1984 assorti d'une période d'essai d'un mois ; que ce contrat a été résilié le 28 septembre 1984 au motif que
l'essai n'avait pas été concluant ;

Attendu que M. Langlois fait grief à l'arrêt d'avoir dit que l'employeur pouvait mettre un terme à la période
d'essai du salarié, un mois après l'avoir engagé, par contrat à durée indéterminée faisant suite à un contrat
d'apprentissage de 2 ans alors, selon le moyen, que la période d'essai ayant pour objet de déterminer les aptitudes
réciproques de l'employeur et du salarié à travailler ensemble, il est constant que son point de départ se situe à la
date de l'entrée en fonction du salarié dans l'entreprise ; que dans ces conditions, la période de 2 ans où le salarié
était employé comme apprenti, avant d'être embauché par le même employeur avec un contrat à durée
indéterminée, devait s'imputer sur la période d'essai prévue lors de cet embauchage ; qu'en l'espèce, bien que
l'essai ait été effectué sous un autre statut juridique, il devait être considéré comme partie intégrante de la période
d'essai, ce qui interdisait à l'employeur de rompre le contrat ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé
les articles L. 122-4 et suivants du Code du travail ;
Mais attendu qu'un contrat de travail pouvait être assorti d'une période d'essai permettant à l'employeur
d'apprécier l'aptitude du salarié à accomplir la tâche qui lui était confiée, alors même que le salarié venait de
recevoir une formation dans la même entreprise dans le cadre d'un contrat d'apprentissage ; que le moyen n'est
pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Publication : Bulletin 1992 V N° 150 p. 93


Revue de jurisprudence sociale, Francis Lefebvre, avril 1992, n° 4, p. 237.
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 1987-09-29
Titrages et résumés CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Engagement à l'essai - Période d'essai - Période
d'essai succédant à un contrat d'apprentissage - Possibilité

Un contrat de travail peut être assorti d'une période d'essai permettant à l'employeur d'apprécier l'aptitude du
salarié à accomplir la tâche qui lui est confiée, alors même que le salarié vient de recevoir une formation dans la
même entreprise dans le cadre d'un contrat d'apprentissage.

APPRENTISSAGE - Contrat - Contrat suivi d'un contrat de travail avec période d'essai - Possibilité

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1987-07-16 , Bulletin 1987, V, n° 484, p. 308

PERIODE D'ESSAI POUR LA DUREE DE


(cassation).

REALISATION D'UN TRAVAIL


Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 29 mai 1979 Cassation

N° de pourvoi : 77-41631
Publié au bulletin

Pdt M. Laroque
Rpr M. Brisse
Av.Gén. M. Gauthier
Av. Demandeur : M. Nicolay

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

SUR LES DEUX MOYENS REUNIS : VU LES ARTICLES L. 122-4 DU NOUVEAU CODE DU
TRAVAIL ET 455 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;
ATTENDU QUE, POUR DIRE QUE LE LICENCIEMENT DE DAME COUTTIN, STYLISTE
MODELISTE, INTERVENU LE 28 JANVIER 1976, AU COURS DE LA PERIODE D'ESSAI, ETAIT
ABUSIF, LA COUR D'APPEL A ENONCE, D'UNE PART, QU'EN L'ESPECE L'ENGAGEMENT A
L'ESSAI PAR LA SOCIETE ANONYME CONSORTIUM GENERAL TEXTILE AVAIT UN TERME
PRECIS : LA REALISATION ET LA PRESENTATION D'UNE COLLECTION POUR LA FIN DU
MOIS DE JANVIER 1976,

QU'AINSI AU MOMENT DE CONCLURE L'ENGAGEMENT A DUREE INDETERMINEE AVEC


UNE PERIODE D'ESSAI, LA SOCIETE SAVAIT DEJA QU'ELLE METTRAIT FIN A CE CONTRAT
A LA DATE DE REALISATION DE LA COLLECTION, PROCEDE LUI PERMETTANT D'EVITER
DE CONCLURE AVEC LES STYLISTES AUTEURS DE COLLECTIONS, DES CONTRATS A
DUREE DETERMINEE PLUS ONEREUX POUR LA SOCIETE,

QUE CE FAISANT CELLE-CI AVAIT DENATURE LE SENS DE LA PERIODE D'ESSAI ET,


D'AUTRE PART, QU'ELLE N'AVAIT PAS APPORTE LA PREUVE DES FAUTES ET
NEGLIGENCES ALLEGUEES PAR ELLE POUR LICENCIER DAME COUTTIN ;

QU'EN STATUANT AINSI, SANS PRECISER D'OU IL RESULTAIT QUE, AU MOMENT DE


CONCLURE L'ENGAGEMENT, LE 22 SEPTEMBRE 1975, LA SOCIETE SAVAIT QU'ELLE
METTRAIT UN TERME AU CONTRAT A LA FIN DU MOIS DE JANVIER 1976, NI EN QUOI LA
CONCLUSION DU CONTRAT LITIGIEUX ETAIT ALORS POUR ELLE MOINS ONEREUSE QUE
CELLE D'UN CONTRAT A DUREE DETERMINEE AYANT CETTE ECHEANCE, ET ALORS
QU'AUCUNE INDEMNITE N'EST DUE EN PRINCIPE QUAND LA RUPTURE DU CONTRAT DE
TRAVAIL INTERVIENT AU COURS DE LA PERIODE D'ESSAI, SAUF INTENTION DE NUIRE,
L'EMPLOYEUR S'ETANT RESERVE LA FACULTE D'APPRECIER SI LA SALARIEE A FAIT
PREUVE DES QUALITES NECESSAIRES PENDANT LA DUREE DE L'EPREUVE A LAQUELLE
ELLE A CONSENTI A SE SOUMETTRE, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE
SA DECISION ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES LE 27 AVRIL
1977 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS ; REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES
PARTIES, AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET,
POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale N. 462


Note Ph. Langlois D 1980 p. 23
Décision attaquée : Cour d'Appel Paris (Chambre 22 ) 1977-04-27

PERIODE D'ESSAI ET ABSENCE DU SALARIE


Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 26 octobre 1999 Rejet

N° de pourvoi : 97-43266
Inédit

Président : M. WAQUET conseiller

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. David Mercier, demeurant 5, rue des Marronniers, 81600 Gaillac,

en cassation d'un arrêt rendu le 2 mai 1997 par la cour d'appel de Toulouse (chambre sociale), au profit des
Laboratoires Induscol Phytagri, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est zone
industrielle de Couffouleux, 81800 Rabastens,

défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 juillet 1999, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen
faisant fonctions de président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, MM.
Finance, Texier, conseillers, M. Duplat, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les conclusions de M. Duplat, avocat
général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux moyens réunis :

Attendu que M. Mercier a été engagé le 3 décembre 1994, en qualité de représentant exclusif, par les
Laboratoires Induscol phytagri dans le cadre d'un contrat de qualification d'une durée de 22 mois,
comportant une période d'essai d'un mois, la prise d'effet du contrat ayant été fixée au 5 décembre 1994 ;
que par lettre recommandée du 3 janvier 1995 reçue par le salarié le 9 janvier suivant, l'employeur, se
prévalant de ce que la période d'essai était toujours en cours, a rompu le contrat de travail ; que le salarié a
saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir notamment paiement de dommages-intérêts correspondant
aux salaires qu'il aurait perçus jusqu'à l'expiration de son contrat de travail ;

Attendu que M. Mercier fait grief à l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 mai 1997) d'avoir dit que la rupture de son
contrat de travail était intervenue en période d'essai et de l'avoir débouté de sa demande en paiement de
dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que le contrat a réellement commencé le 5 décembre
1994, que l'article L. 122-3-2 du Code du travail fixe très précisément la durée maximale de la période
d'essai d'un contrat à durée déterminée ; que dans le cas d'espèce, le délai ne pouvait être supérieur à un
mois ; qu'il convient de distinguer entre une absence pour maladie imputable au salarié et la fermeture pour
congés payés au titre de la cinquième semaine imputable à l'employeur ; qu'également, l'employeur
n'ignorait pas, lors de la signature du contrat de travail, que M. Mercier était convoqué pour la sélection
militaire fin décembre 1994, pour une période de deux jours ; que la loi n° 78-59 du 19 janvier 1978
prévoit que l'absence du salarié compte pour la détermination des congés payés ;

qu'en plus, l'article 15 "Périodes militaires" de la Convention collective de la chimie dont dépend
l'employeur impose le paiement de ces deux jours d'absence ; qu'il convient de censurer la cour d'appel
pour ne pas avoir recherché l'imputabilité des suspensions du contrat de travail ; qu'elle fait reposer les
absences sur la seule responsabilité du salarié et exonère l'employeur de ses responsabilités ; alors, d'autre
part, que la cour d'appel, bien que reconnaissant que le salarié avait travaillé plusieurs jours pendant la
période de fermeture de l'entreprise, n'en a pas tiré les conséquences de droit en violation de l'article L.
141-1 du Code du travail ; qu'en plus, l'article 1134 du Code civil impose aux parties le respect des
engagements du contrat ; que la responsabilité essentielle de l'employeur est la fourniture de travail et de la
formation spécifique ; qu'il n'ignorait pas, en signant, le 3 décembre 1994, le contrat de qualification à
durée déterminée, que son entreprise serait fermée du 28 décembre 1994 au 9 janvier 1995 ; qu'il se devait
donc de mettre en place toutes les mesures nécessaires, soit pour fournir le travail et la formation, soit
exécuter les démarches auprès de la Direction départementale du travail et de l'emploi pour que le salarié
bénéficie du chômage partiel ; que sur ce point, la décision de la cour d'appel est surprenante, car, non
seulement, elle ne tient pas compte des dispositions légales, mais, elle affirme sans certitude que dès lors
que le salarié n'a pas fourni de rapport de visite, c'est qu'il en avait profité pour prendre des vacances ; que
la cour d'appel fait, pour justifier sa décision, un amalgame entre congés scolaires et congés payés ;

Mais attendu que la période d'essai ayant pour but de permettre l'appréciation des qualités du salarié, celle-
ci est prolongée du temps d'absence du salarié ;

Et attendu que la cour d'appel qui, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui
étaient soumis, a constaté que le salarié s'était absenté deux jours pour subir les épreuves de sélection du
service national, et qu'il avait pris trois jours de congé pendant la période de fermeture annuelle de
l'entreprise, a légalement justifié sa décision ; que les moyens ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Mercier aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des Laboratoires Induscol
Phytagri ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience
publique du vingt-six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.

Décision attaquée : cour d'appel de Toulouse (chambre sociale) 1997-05-02

LICENCIEMENT EN PERIODE D'ESSAI POUR


UN MOTIF CONNU AVANT LA PERIODE
D'ESSAI
Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 6 décembre 1995 Cassation.

N° de pourvoi : 92-41398
Publié au bulletin

Président : M. Gélineau-Larrivet .
Rapporteur : Mme Ridé.
Avocat général : M. Martin.
Avocat : M. Spinosi.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail et l'article 1134 du Code civil ;

Attendu, selon le jugement attaqué, qu'à l'issue d'un stage de formation effectué au sein de la société
Educational Business Services (EBS), Mlle Roche a été engagée par cette société en qualité de
représentant suivant contrat à durée déterminée du 30 juillet 1990 comportant une période d'essai de 3
mois ; qu'avant son embauche, elle avait refusé que soit insérée à son contrat de travail une clause
l'obligeant à donner le nom de personnes garantissant sa moralité ; que, le 2 août suivant, l'employeur
a mis fin au contrat ; qu'en soutenant qu'il avait ainsi abusé de ses droits en mettant fin au contrat au
seul motif qu'elle avait refusé d'accepter la clause susvisée, la salariée a saisi le conseil de
prud'hommes d'une demande en dommages-intérêts ;

Attendu que, pour débouter la salariée de sa demande et la condamner au paiement de dommages-


intérêts pour procédure abusive, le conseil de prud'hommes a énoncé que l'employeur avait mis fin au
contrat de travail comme il en avait le droit au cours de la période d'essai, la salariée ayant, pour sa
part, fait preuve d'esprit chicanier en refusant de donner à l'employeur le nom de personnes
garantissant sa moralité ;

Attendu, cependant, que si l'employeur peut discrétionnairement mettre fin aux relations
contractuelles avant l'expiration de la période d'essai, ce n'est que sous réserve de ne pas faire
dégénérer ce droit en abus ;

Que le conseil de prud'hommes, saisi d'une demande fondée sur l'abus de droit, ayant constaté que
l'employeur avait mis fin aux relations contractuelles 4 jours à peine après le début de la période
d'essai fixée à 3 mois, et alors que le différend qui l'avait opposé à la salariée était antérieur à la
signature du contrat de travail, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 septembre 1991, entre les
parties, par le conseil de prud'hommes de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans
l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de
prud'hommes de Nanterre.

Publication : Bulletin 1995 V N° 330 p. 235


Semaine Juridique, 1996-07-03, n° 27, p. 301, note G. PUIGELIER.
Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 1991-09-03

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1990-11-27, Bulletin 1990, V, n°


592, p. 357 (rejet).

LICENCIEMENT AU COURS DE LA PERIODE


D'ESSAI ET LEGERETE BLAMABLE
Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 18 juin 1996 Cassation.

N° de pourvoi : 92-44891
Publié au bulletin

Président : M. Gélineau-Larrivet .
Rapporteur : M. Frouin.
Avocat général : M. Terrail.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que, selon le jugement attaqué, M. Climent a été engagé, le 3 septembre 1991, en qualité de
chauffeur-livreur par la société Conforama avec une période d'essai d'un mois, renouvelable ; que l'essai fut
effectivement renouvelé jusqu'au 3 novembre 1991 ; que M. Climent a été arrêté pour maladie à compter
du 24 septembre 1991 avec deux prolongations jusqu'au 27 octobre 1991 ; que, le 10 octobre 1991, la
société Conforama a notifié à M. Climent qu'elle mettait fin à l'essai à compter du même jour ;
Attendu que, pour débouter le salarié de ses demandes d'indemnité de préavis, d'indemnité pour non-
respect de la procédure de licenciement et dommages-intérêts pour rupture abusive, le conseil de
prud'hommes a énoncé qu'aucune indemnité n'était due quand la rupture du contrat intervenait pendant la
période d'essai, sauf intention de nuire, que le fait que le salarié fût en arrêt de maladie ne faisait pas
obstacle à ce que l'employeur signifie sa décision d'interrompre l'essai dont il tenait les résultats pour non
concluants, qu'en l'espèce le demandeur n'apportait pas la preuve d'une intention de nuire de la part de son
employeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il avait relevé que l'essai avait été renouvelé par l'employeur et
que le contrat de travail du salarié avait été suspendu avant même le début de la période de renouvellement
et alors, d'autre part, qu'il résultait de ses énonciations que l'employeur avait mis fin à l'essai avant la
reprise du travail par le salarié et en raison du dynamisme et de la qualité des prestations de son
remplaçant, le conseil de prud'hommes, qui a ainsi caractérisé une légèreté blâmable de l'employeur, n'a
pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 mai 1992, entre les parties, par
le conseil de prud'hommes de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles
se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes
d'Aix-les-Bains.

Publication : Bulletin 1996 V N° 247 p. 173


Semaine Juridique, 1996-12-04, n° 49, p. 473, note G. PUIGELIER.
Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Chambéry, 1992-05-14

DETOURNEMENT DE LA FINALITE DE LA
PERIODE D'ESSAICour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 5 octobre 1993
N° de pourvoi : 90-43780
Publié au bulletin Rejet.

Président : M. Zakine, conseiller le plus ancien faisant fonction. ., président


Rapporteur : M. Monboisse., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Chauvy., avocat général
Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Gatineau., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 mai 1990), M. X... a été engagé le 1er juillet 1988 par l'Office
public d'aménagement et de construction du Pas-de-Calais (OPAC), en qualité d'assistant technique principal, en
vue d'exercer les fonctions de responsable de la sécurité ; que le 23 septembre 1988, l'employeur a mis fin au
contrat de travail, en précisant qu'il cesserait à l'expiration de la période d'essai de 3 mois, c'est-à-dire le 30
septembre 1988 ; que, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'OPAC à payer à M. X... des dommages-intérêts
pour rupture abusive du contrat de travail à l'expiration de la période d'essai ; alors que l'Office faisait valoir dans
ses conclusions que si M. X... avait fait preuve de compétence technique, par contre il était apparu au cours de
la période d'essai qu'il ne présentait pas les qualités relationnelles et humaines attendues ; qu'ainsi, les conditions
de déroulement de l'essai avaient démontré son caractère insatisfaisant ; qu'en se fondant cependant, sur une note
établie le 24 août 1988, soit plus d'un mois et demi après le début de l'essai, note faisant état du caractère
normalement temporaire de la présence du salarié et sur ce document seul sans relever aucun indice relatif à la
position de l'employeur, au moment de la conclusion du contrat, pour en déduire que dès l'origine, il était dans
les intentions de l'OPAC de limiter les prestations de M. X... à la durée de l'essai, la cour d'appel n'a pas
légalement justifié sa décision, au regard de l'article L. 122-4 du Code du travail ; et alors, en conséquence, qu'en
ne répondant pas à l'argument tiré de ce que l'attestation de compétence technique ne démontrait pas que le
salarié avait toutes les qualités nécessaires à l'embauche, de sorte que la rupture de l'essai tenait à ses qualités
professionnelles, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a retenu que l'intention de l'employeur, dès l'origine, de limiter l'emploi du
salarié à la durée de l'essai était établie, a fait ressortir que la période d'essai avait été détournée de son objet ;
que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 1993 V N° 223 p. 154

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, du 18 mai 1990

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du jeudi 22 février 1979
N° de pourvoi : 78-40072
Publié au bulletin Cassation partielle REJET Cassation

Pdt M. Laroque, président


Rpr M. Oneto, conseiller rapporteur
Av.Gén. M. Gauthier, avocat général

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur la fin de non-recevoir soulevée par la défense :

Attendu que Poubelle soulève l'irrecevabilité du pourvoi au motif que le signataire du mémoire ampliatif ne
produit aucune pouvoir l'habilitant à déposer un tel mémoire ;

Mais attendu que le mémoire déposé à l'appui du pourvoi de la société Smith-Corona-Marchant a été signé par
l'avocat qui avait reçu un pouvoir spécial en vue de former un pourvoi contre l'arrêt rendu dans le litige
l'opposant à Poubelle ; qu'un tel pouvoir comporte celui d'énoncer les moyens invoqués à son appui ;

Par ces motifs :

Rejette la fin de non-recevoir ;

Sur le premier moyen, pris de la violation des articles L 122-4 et suivants, L 122-8, L 122-14-6 du Code du
travail, 1134 du Code civil, 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile, 7 alinéa 2 de la loi du 20 avril
1810, dénaturation d'une stipulation claire et précise, manque de base légale ; Attendu que la société Smith-
Corona-Marchant fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Poubelle une indemnité
compensatrice de préavis et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au motif que
la prolongation de la période d'essai, acceptée par les deux parties, était sans valeur, le règlement intérieur ne
mentionnant pas la possibilité d'une prorogation de la période d'essai, alors que le règlement intérieur qui fixe à
trois mois la période d'essai pour le personnel des ventes et les cadres, prévoit la prolongation automatique de la
durée de stage de formation pour le personnel dont le début d'emploi est conditionné par un stage de formation ;
que le règlement intérieur n'exclut pas la possibilité d'un renouvellement de la période d'essai en cours
d'exécution de cet essai, après accord entre les parties, une disposition expresse dudit règlement prévoyant une
telle possibilité ; qu'il s'ensuit que les parties étaient en droit de convenir d'une prorogation de la période d'essai,
cette prorogation n'étant pas écartée par le règlement intérieur ;

Mais attendu, d'une part, qu'il est constant que la société avait, le 1er septembre 1974, engagé à l'essai pour trois
mois, Poubelle comme directeur technique et avait, ensuite, avec l'accord de l'intéressé, prorogé cet essai, pour
une nouvelle période de trois mois ; que l'employeur y avait mis fin à la date du 30 janvier 1975 ; que la Cour
d'appel relève que, si la société affirmait s'être séparée de Poubelle parce qu'il ne lui donnait pas satisfaction, elle
lui avait, le 3 février 1975, adressé une lettre dans laquelle elle déclarait s'être trouvée dans l'obligation de
réintégrer un ancien directeur technique détaché à l'étranger, qui avait exprimé le désir de rentrer en France ;
qu'elle regrettait vivement ces circonstances, ayant pendant cinq mois apprécié la compétence de l'intéressé et les
rapports très cordiaux qu'il avait noués au sein de l'équipe de direction ; que les juges d'appel observent que si la
société soutenait avoir menti pour être agréable à Poubelle et faciliter son reclassement, elle n'en avait pas
rapporté la preuve ; que, de ces énonciations non critiquées par le moyen et desquelles il résulte que la société
avait détourné de son but lapériode d'essai et ne l'avait prolongée que pour lui permettre d'assurer à moindre frais
l'intérim du poste de directeur technique réservé à un ancien collaborateur dont elle connaissait le désir de retour
en France, la Cour d'appel a déduit que le licenciement de Poubelle était intervenu sans motif réel et sérieux et
lui ouvrait droit à une indemnité compensatrice de préavis et des dommages-intérêts ;

Qu'ainsi le premier moyen ne peut être accueilli ; Par ces motifs :

Rejette le premier moyen ;

Attendu que les juges du fond ont condamné la société à verser à Poubelle une indemnité compensatrice de
préavis égale à trois mois de salaire et au prorata du treizième mois correspondant ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre, quel qu'en soit le mérite, aux conclusions de la société qui soutenait avoir
payé à Poubelle, en le dispensant de l'accomplir, le mois de février 1975 qui aurait dû entrer en ligne de compte
pour le calcul du montant de l'indemnité compensatrice de délai-congé lui revenant, la Cour d'appel a méconnu
les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, du chef seulement du reliquat de préavis dû à Poubelle, l'arrêt rendu le 27 avril 1977,
entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même
et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de
Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en la Chambre du conseil ;

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale N. 167 P. 119

Décision attaquée : Cour d'appel Paris (Chambre 21 C ) du 27 avril 1977

RENOUVELLEMENT DE LA PERIODE
D'ESSAI
V° PERIODE D'ESSAI

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 10 novembre 1998
N° de pourvoi : 96-41579
Publié au bulletin Cassation partielle.

Président : M. Gélineau-Larrivet ., président


Rapporteur : M. Soury., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Martin., avocat général
Avocat : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu que Mme X... a été engagée, le 29 mars 1993, en qualité d'intervenante responsable chargée d'animer la
salle de gymnastique exploitée par M. Y... ; que son contrat de travail prévoyait une période d'essai de 3 mois ;
que, le 23 juin 1993, son employeur l'a informée de sa volonté de renouveler la période d'essai pour 3 nouveaux
mois ; que, par lettre recommandée du 10 juillet 1993, Mme X... a notifié sa démission à son employeur avec un
délai de prévenance de 8 jours ; que, soutenant que sa volonté de démissionner n'était pas réelle car faisant suite
au renouvellement de sa période d'essai imposé par son employeur, elle a saisi la juridiction prud'homale pour
obtenir paiement d'une indemnité de préavis, de rappels de rémunérations ainsi que de dommages-intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le second moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que, pour débouter Mme X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle
et sérieuse, l'arrêt énonce que l'employeur n'a pas agi abusivement en prévoyant une période d'essai de 3 mois et
en émettant la volonté de la prolonger ; qu'il était fondé, à titre conservatoire, à ne pas contracter avec une
salariée qui n'était pas encore exclusivement à son service ; que Mme X..., en signant sans réserve la lettre du 23
juin 1993 lui notifiant la prolongation de la période d'essai, n'en a pas seulement accusé réception, mais a accepté
cette mesure ; qu'à tout le moins, même si, par lettre du 5 juillet 1993, elle s'est ravisée et a contesté la
nouvelle période d'essai en écrivant : " Il est donc impératif que, pour le 31 juillet, vous me donniez votre
réponse. Si à cette date mon engagement devait être définitif... ", elle acceptait une période d'essai jusqu'au 31
juillet 1993 ; que, sans attendre cette date, Mme X..., par lettre recommandée du 10 juillet 1993, a fait part à son
employeur de sa volonté de démissionner avec un délai de prévenance de 8 jours ; que les termes de cette lettre
exprimaient sans équivoque la volonté de la salariée de rompre son contrat de travail ;

Attendu, cependant, que le renouvellement ou la prolongation d'une période d'essai doit être expressément prévu
par le contrat de travail ou la convention collective ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si le contrat de travail conclu entre les parties prévoyait le
renouvellement ou la prolongation de la période d'essai initialement convenue, la cour d'appel n'a pas donné de
base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande en paiement de


dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt rendu le 6 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel
de Nancy ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims.

Publication : Bulletin 1998 V N° 483 p. 360

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, du 6 décembre 1995

DUREE DE LA PERIODE D'ESSAI FIXEE PAR LA


CONVENTION COLLECTIVECour de cassation
chambre sociale
Audience publique du jeudi 30 mars 1995
N° de pourvoi : 91-44079
Publié au bulletin Rejet.

Président : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonction. ., président


Rapporteur : M. Monboisse., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Lyon-Caen., avocat général
Avocat : la SCP Delaporte et Briard., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Valence, 24 juin 1991), Mme X... a été
engagée le 21 septembre 1990 par la société Europa discount Rhône-Alpes en qualité de caissière-réassortisseuse
; que le contrat de travail précisait que celui-ci ne deviendrait définitif qu'à l'expiration
d'une période d'essai d'une durée d'un mois éventuellement renouvelable une fois ; que, le 15 octobre 1990,
la période d'essai a été renouvelée par l'employeur pour une durée d'un mois et qu'elle a pris fin à l'initiative de
l'employeur le 31 octobre 1990 ; que, se prévalant de ce que la convention collective des magasins de vente
d'alimentation et d'approvisionnement fixait, dans l'article 2 de l'annexe 1, à un mois la période d'essai sans
envisager de prorogation et prétendant que, dans ces conditions, la période d'essai avait été irrégulièrement
renouvelée, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société Europa discount fait grief au jugement de l'avoir condamnée à payer une indemnité de
préavis et des dommages-intérêts pour rupture abusive, alors, selon le moyen, que les parties peuvent
valablement convenir d'une période d'essai supérieure à celle prévue par la convention collective ou de son
renouvellement à condition que l'accord du salarié soit exprès et non équivoque et que les particularités du poste
le justifient ; que, dès lors, en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société Europa discount selon
lesquelles Mme X... avait non seulement accepté l'éventualité du renouvellement de sa période d'essai en signant
son contrat qui le prévoyait, mais encore en approuvant expressément le principe, le 15 octobre 1990, lors de la
décision de renouvellement justifié d'ailleurs par les fonctions de caissière-réassortisseuse imposant
d'importantes facultés de mémorisation, le conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du nouveau Code de
procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que, répondant ainsi aux conclusions, le conseil de prud'hommes, après avoir relevé que
la convention collective applicable des magasins de vente d'alimentation et d'approvisionnement ne prévoyait
pas la possibilité de renouveler la période d'essai d'un mois, a exactement décidé, en conformité avec les
dispositions de l'article L. 135-2 du Code du travail, que la clause du contrat de travail prévoyant un tel
renouvellement, qui était moins favorable au salarié, était nulle ;

Et attendu que, d'autre part, le salarié ne peut renoncer pendant la durée du contrat de travail aux droits qu'il tient
de la convention collective ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 1995 V N° 117 p. 84

Décision attaquée : Conseil de prud'Hommes de Valence, du 24 juin 1991


Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1988-01-07, Bulletin 1988, V, n° 20,
p. 12 (rejet). A RAPPROCHER : (2°). Chambre sociale, 1994-07-06, Bulletin 1994, V, n° 226, p. 155 (cassation
partielle), et l'arrêt cité

CONDITIONS DU RENOUVELLEMENT
DE LA PERIODE D'ESSAI
Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du jeudi 23 janvier 1997
N° de pourvoi : 94-44357
Publié au bulletin Cassation.

Président : M. Gélineau-Larrivet ., président


Rapporteur : M. Frouin., conseiller rapporteur
Avocat général : M. de Caigny., avocat général

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le second moyen :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que Mlle X... est entrée au service de la société Lilper le 10 septembre 1993, en qualité de vendeuse, par
contrat de travail à temps partiel prévoyant une période d'essai d'un mois renouvelable ; que, le 8 novembre
1993, l'employeur a mis fin à la période d'essai ; que faisant valoir qu'à aucun moment l'essai n'avait été
renouvelé, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de dommages-intérêts pour
licenciement abusif ;

Attendu que, pour débouter la salariée de sa demande, le conseil de prud'hommes a énoncé que le contrat de
travail prévoyait une période d'essai d'un mois à compter du 10 septembre 1993 renouvelable une fois et que ni
les dispositions contractuelles, ni la convention collective ne conditionnent la validité de la prolongation de
la période d'essai à un accord des parties ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le renouvellement de la période d'essai ne peut résulter que d'un accord exprès des
parties intervenu au cours de la période initiale, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 juillet 1994, entre les parties, par le
conseil de prud'hommes d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Beauvais.

Publication : Bulletin 1997 V N° 33 p. 22

DECISION
Décision attaquée : Conseil de prud'Hommes d'Amiens, du 6 juillet 1994

DE LICENCIEMENT ET EXPIRATION
DE LA PERIODE D'ESSAI
Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 12 décembre 2000
N° de pourvoi : 98-45296
Publié au bulletin Cassation.

Président : M. Gélineau-Larrivet ., président


Rapporteur : M. Poisot., conseiller rapporteur
Avocat général : M. de Caigny., avocat général
Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Coutard et Mayer., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du statut national du personnel des industries électriques et gazières et l'article L. 122-14-4 du Code
du travail ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, la durée du stage est fixée pour tout le personnel à un an de service
effectif et qu'à l'issue du stage, le stagiaire est titularisé ou licencié ;
Attendu que M. X... a été admis le 6 janvier 1992 à effectuer un stage d'agent d'exploitation d'une durée d'un an ;
que la relation contractuelle a été rompue le 25 mars 1993, au terme d'une procédure de licenciement engagée le
17 novembre 1992 ; que contestant cette rupture, il a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Attendu que pour dire que la décision prise par EDF de ne pas titulariser M. X... était régulière et débouter celui-
ci de ses demandes pour licenciement abusif, l'arrêt relève que par lettre du 13 octobre 1992, le chef du centre a
proposé au service des ressources humaines qu'il soit procédé au licenciement de M. X..., sans attendre la fin de
sa période de stage ; que son dossier a été présenté pour avis à la Commission supérieure nationale du personnel,
sous-commission de titularisation, à la séance du 17 novembre 1992 ; qu'après avis de cette commission, le
directeur général d'EDF a décidé le 25 novembre 1992 de procéder au licenciement de M. X... ; que par lettre du
3 décembre 1992, celui-ci a fait appel de cette décision ; qu'un nouvel examen du dossier par la Commission
supérieure nationale du personnel a eu lieu le 29 janvier 1993 ; qu'à l'issue de ce nouvel examen, le directeur
général d'EDF a décidé de licencier M. X... ; que ce licenciement est intervenu par lettre du 25 mars 1993 avec
mention du préavis d'un mois ; que la cour d'appel en conclut que la procédure de licenciement a été suivie
conformément aux dispositions statutaires ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la décision définitive de licenciement était
intervenue après l'expiration de la période de stage et qu'elle devait, dès lors, se prononcer sur les motifs du
licenciement,la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 avril 1998, entre les parties, par la cour
d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt
et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

Publication : Bulletin 2000 V N° 421 p. 323

PERIODE D'ESSAI ET
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 30 avril 1998

CONVENTION COLLECTIVECour de cassation


chambre sociale
Audience publique du jeudi 26 septembre 2002
N° de pourvoi : 00-43874
Publié au bulletin Cassation partielle.
M. Merlin, conseiller doyen faisant fonction. ., président
Mme Nicolétis., conseiller rapporteur
M. Duplat., avocat général
la SCP Waquet, Farge et Hazan., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 10 de la Convention collective nationale des cabinets de courtage d'assurance ou


de réassurance ;

Attendu que, selon ce texte les salariés sont admis à l'essai pendant un délai de trois mois pour
les cadres et d'un mois pour les employés ;

Attendu que pour condamner la société Chelsea International à payer à M. X... des dommages
et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des congés payés, une indemnité de
préavis et des congés payés sur préavis, la cour d'appel énonce que l'existence
d'une période d'essai ne peut résulter que d'un accord des parties dès lors que la convention
collective ne la rend pas obligatoire, qu'en l'absence de prévision d'un caractère obligatoire de
la période d'essai, par l'article 10 de la Convention collective nationale des cabinets de
courtage d'assurance ou de réassurance, les parties conservaient toute liberté de stipulation
d'une telle période et que les courriers produits n'étant pas signés par les parties, l'essai n'était
pas accepté par le salarié ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait alors que, l'article 10 de la Convention collective nationale
des cabinets de courtage d'assurance ou de réassurance institue de façon obligatoire
une période d'essai et qu'il lui appartenait de rechercher si le salarié avait été informé, au
moment de son engagement, de l'existence de cette convention collective, et mis en mesure
d'en prendre connaissance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions condamnant la société Chelsea


International à payer à M. X... les sommes de 190 000 francs à titre d'indemnité pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9 394,11 francs à titre de congés payés, 93 941,13
francs à titre d'indemnité de préavis et 9 394,11 francs à titre d'indemnité de congés payés sur
préavis, l'arrêt rendu le 27 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet,
en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera
transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en
son audience publique du vingt-six septembre deux mille deux.

Publication : Bulletin 2002 V N° 282 p. 271

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, du 27 avril 2000


Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1998-03-25, Bulletin
1998, V, n° 173, p. 125 (cassation) et l'arrêt cité.

RENOUVELLEMENT D'UN CDD ET PERIODE


D'ESSAI
Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 26 février 2002
N° de pourvoi : 00-40749
Publié au bulletin Cassation partielle.

Président : M. Merlin, conseiller doyen faisant fonction. ., président


Rapporteur : M. Soury., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Kehrig., avocat général
Avocats : la SCP Delaporte et Briard, la SCP Baraduc et Duhamel., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que M. X... a été engagé par le centre de Coopération internationale en recherche
agronomique pour le développement (CIRAD) dans le cadre de trois contrats à durée
déterminée successifs, du 18 janvier 1996 au 17 juillet 1997 en qualité d'agent de maîtrise, du
26 janvier au 28 février 1998 en qualité d'ouvrier agricole et, à compter du 1er mars 1998 en
qualité d'agent de maîtrise ; que l'employeur a rompu ce dernier contrat à durée déterminée
par lettre du 27 mars 1998 en se prévalant d'une rupture en cours de période d'essai ; que le
salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de son premier contrat
à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ainsi que le paiement de rappels de
rémunérations, de congés payés et de dommages-intérêts au titre de la rupture de son dernier
contrat à durée déterminée ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts au
titre de la rupture de son dernier contrat à durée déterminée, l'arrêt attaqué énonce que celui-
ci, qui n'entend pas solliciter la requalification de ce contrat en contrat à durée indéterminée,
soutient en revanche qu'il a été rompu irrégulièrement et abusivement, en l'absence de faute
grave ou de force majeure ; que, cependant, ce contrat, conclu pour la période du 1er mars
1998 au 28 février 1999, prévoit expressément une période d'essai d'un mois ; que la rupture
est intervenue avant l'expiration de la périoded'essai ; que cette rupture ne résulte pas de
l'intention de nuire ou de la légèreté blâmable de l'employeur et qu'effectuée durant
la période d'essai pendant laquelle chaque partie est libre de rompre sans donner de motif, elle
est régulière ; qu'il s'ensuit que le salarié ne peut prétendre à des dommages-intérêts au titre de
la rupture anticipée de ce contrat à durée déterminée ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié avait, du 18 janvier 1996 au 17
juillet 1997, exercé le même emploi d'agent de maîtrise auprès du même employeur qui avait
donc déjà pu apprécier ses capacités professionnelles, ce dont il résultait
qu'une période d'essai d'un mois ne pouvait être valablement stipulée lors de son engagement
à durée déterminée du 1er mars 1998, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de
ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition déboutant le salarié de ses demandes


au titre de la rupture de son contrat à durée déterminée du 1er mars 1998, l'arrêt rendu le 22
novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence,
quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être
fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France.

Publication : Bulletin 2002 V N° 78 p. 71

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, du 22 novembre 1999

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 2000-03-07, Bulletin

CONDITIONS DE LA RUPTURE
2000, V, n° 87, p. 68 (rejet).

DE LA PERIODE D'ESSAICour de cassation


chambre sociale
Audience publique du mercredi 5 décembre 2001
N° de pourvoi : 99-45758
Non publié au bulletin Cassation partielle

Président : M. LE ROUX-COCHERIL conseiller, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Pierre X..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 octobre 1999 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre A), au profit :

1 / de M. Y..., mandataire liquidateur de la société Harden GPS, domicilié ...,

2 / du CGEA d'Orléans, dont le siège est ...,

3 / de l'AGS de Paris, dont le siège est ...,

défendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 2001, où étaient présents : M. Le Roux-Cocheril, conseiller le


plus ancien faisant fonctions de président, Mme Quenson, conseiller rapporteur, M. Texier, conseiller, Mme
Bourgeot, M. Besson, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier
de chambre ;
Sur le rapport de Mme Quenson, conseiller, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir
délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux premiers moyens réunis :

Vu l'article L. 122-4 du Code du travail ;

Attendu que M. X... a été engagé en qualité de VRP par la société Harden grand public sécurité, selon contrat à
durée indéterminée prenant effet le 9 octobre 1995 comportant une période d'essai de trois mois et une clause de
non-concurrence ; que la société a mis fin à la période d'essai le 8 janvier 1996 ;

Attendu que, pour juger que la rupture était intervenue au cours de la période d'essai et débouter M. X... de ses
demandes d'indemnité de préavis, congés payés sur préavis et dommages et intérêts pour rupture abusive, la cour
d'appel énonce que la loi n'impose pas à l'employeur de forme particulière pour rompre la période d'essai, qu'il
suffit d'établir que le salarié a bien été informé avant l'échéance de son terme et que les attestations versées aux
débats par deux salariés indiquant bien que M. X... avait été informé lors de la réunion tenue le lundi 8 janvier
1996 du fait qu'était mis fin à la période d'essai, en raison notamment de la remise par le salarié de faux bons de
commande ;

Qu'en statuant ainsi, alors que si la décision de l'employeur de mettre fin à l'essai n'est soumise à aucun
formalisme particulier sauf dispositions contractuelles ou conventionnelles contraires, cette décision ne peut,
cependant, pas revêtir la forme d'une déclaration orale en présence de salariés de l'entreprise, la cour d'appel a
violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives à la rupture et à la clause de non-
concurrence, l'arrêt rendu le 5 octobre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et,
pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être
transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience
publique du cinq décembre deux mille un.

Décision attaquée : cour d'appel de Versailles (5e chambre A) du 5 octobre 1999

ENGAGEMENT DE L'EMPLOYE D'UN


CONCURRENT POUR OBTENIR DES SECRETS
DE FABRICATIONCour de cassation
Chambre sociale

Audience publique du 12 mars 1959 Rejet

N° de pourvoi : 57-11897
Publié au bulletin

Président : M. Carrive
Rapporteur : M. Laroque
Avocat général : M. Albucher
Avocats : MM. Compain et Mayer

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que Y... avait utilisé des
manoeuvres déloyales pour détourner la dame X..., ouvrière de Z..., de l'exécution
de son contrat de travail et pour la faire venir effectuer dans son usine des stages
destinés à lui enseigner des procédés de fabrication qu'il ignorait, alors que l'arrêt
constate par ailleurs qu'il s'agissait de simples essais, que ceux-ci devaient
nécessairement précéder l'embauchage de la dame X... par Y..., que les faits relevés
ne sont pas constitutifs de faute, et qu'il n'est précisé ni en quoi la dame X... était
tenue contractuellement de réserver ses services à Z..., ni si Y... avait eu
connaissance d'une telle obligation ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté qu'après avoir pris contact à A...
avec un émissaire de Y..., la dame X..., ouvrière employée depuis une quinzaine
d'années dans l'usine de Z..., avait été attirée à Montbrison chez Y... à deux
reprises, en octobre 1949, puis en janvier 1951, moyennant une rémunération et un
défraiement exceptionnellement élevés ; que la dame X... avait dévoilé les procédés
de fabrication de Z... à Y..., qui, sans cela, n'était pas en mesure de réaliser des
perruques de poupées de la qualité de celles de Z..., et que Y... ne pouvait contester
avoir provoqué l'indélicatesse dont la dame X... avait reconnu s'être rendue
coupable, en usant à ces fins "de manoeuvres de séduction très proches d'un
racolage frauduleux" ; qu'en en déduisant qu'ils avaient ainsi commis des fautes
dont ils devaient réparation, l'arrêt attaqué a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :


Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir alloué à Z... des
dommages-intérêts destinés à réparer l'intégralité du dommage résultant de
l'embauchage de la dame X... par Y..., alors qu'il avait décidé qu'il n'y avait ni
révélation de secret de fabrique, ni racolage frauduleux, et que seuls étaient retenus
comme fautifs les deux essais effectués par la dame X... dans les ateliers de Y... ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que Y... s'était décidé, après deux
ans de réflexion et deux essais prolongés, à engager la dame X..., ouvrière de Z...,
qui était rompue à la méthode de celui-ci par son enseignement, et dont il avait,
entre temps, obtenu grâce à ses manoeuvres frauduleuses, tous les renseignements
nécessaires pour que l'atelier qu'elle serait appelée à diriger pût entrer
immédiatement en action ; que c'était par l'ensemble de ces moyens fautifs que Y...
avait réussi à coiffer convenablement ses poupées sans avoir à subir le retard
inséparable de toute période d'adaptation à de nouvelles productions industrielles,
ce qui avait causé à Z... un grave trouble commercial et un préjudice moral profond,
que, sans se contredire, l'arrêt attaqué a souverainement évalué le montant des
dommages-intérêts dus de ce chef à Z... ;

Par ces motifs :

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 18 mars 1957 par la Cour d'appel de
Toulouse.
Publication : Bulletin 1959 IV N° 375 p. 307

HEURES SUPPLEMENTAIRES
Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 5 février 1959 REJET

N° de pourvoi : 59-05663
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Terrier
Av.Gén. M. Cherpitel
Av. Demandeur : M. Nicolas

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, tiré de la violation des articles 1er de la loi du 25 février 1946, 44 C du Livre 1er du
Code du travail, 7 de la loi du 20 avril 1810 ; Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir
débouté X... de la demande par lui formée contre la Société Bahuaud, au service de laquelle il avait été, en
payement des majorations légales afférentes à des heures supplémentaires par lui effectuées au cours de la
période 21 juillet 1949 - 21 avril 1953, et selon lui non acquittées au taux légal, au motif qu'en ne
protestant pas contre la rémunération forfaitaire des heures supplémentaires pratiquée dans l'entreprise, il
avait tacitement adhéré à ce mode de rémunération, alors que, nonobstant toutes dispositions contraires,
X... était en droit de réclamer le payement des heures supplémentaires dans les conditions légales d'ordre
public, et qu'au surplus l'adhésion à un mode de rémunération dérogatoire ne pouvait être tacite et s'inférer
d'une attitude passive ;

Mais attendu que le jugement constate qu'il résulte de l'expertise effectuée que la rémunération totale
perçue par X... au cours de la période en cause suivant un mode forfaitaire était supérieure à la
rémunération, majorée des heures supplémentaires, à laquelle il avait légalement droit, et relève que dans
l'entreprise les heures supplémentaires étaient prévues d'avance puisque l'horaire du travail y affiché
comportait une durée hebdomadaire de soixante heures ; qu'au vu de ces constatations, le Tribunal a pu,
comme il l'a fait, estimer que le mode de rémunération pratiqué à l'égard d'X... était licite puisqu'"il ne
l'avait pas défavorisé par rapport au système de rémunération légale", et qu'il résultait d'une convention
entre lui et la société ; Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 183 P. 153
Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands arrêts de droit du travail, p.268
Décision attaquée : Tribunal civil Nantes 1955-09-30

POUVOIR DISCIPLINAIRE DE
L'EMPLOYEURMISE A PIED ET REDUCTION DE
SA DUREE PAR LE JUGE
Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 16 juin 1945 Cassation

Inédit titré

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR : Sur le premier moyen ; Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;
Attendu qu'il résulte des qualités et des motifs du jugement attaqué que Vialard, employé
depuis sept ans par les Etablissements Poliet et Chausson comme meunier à ciment, a
refusé, le 26 juillet 1943, d'exécuter un travail de concassage de charbon qui lui était
commandé par le contremaître de l'usine ; que, mis à pied pendant une semaine pour ce
refus, il a réclamé de son employeur devant le conseil de prud"hommes une somme de
450 F à titre de dommages-intérêts pour privation de six jours de salaires ; que le
jugement attaqué fait droit à cette demande par le motif, d'une part, que l'employeur n'a
produit aucune stipulation d'un règlement intérieur susceptible de justifier une mesure
d'autant plus préjudiciable à l'ouvrier qu'elle l'avait atteint à une époque où les règles
relatives au contrôle et à l'orientation de la main-d"oeuvre l'avaient empêché de trouver
un travail de remplacement ; d'autre part, que Vialard, ouvrier spécialisé, et dont la
capacité physique de travail était réduite, n'avait commis aucune faute en refusant le
travail nouveau qui lui était commandé ;
Mais attendu que la seule question dont le tribunal était saisi par les conclusions des
parties était celle de savoir si, dans la mesure prise à l'égard de Vialard, les
Etablissements Poliet et Chausson s'étaient rendus coupables d'une faute les obligeant à
la réparation du préjudice que cette mesure avait pu causer à l'employé ;
Or, attendu, tout d'abord que, contrairement au motif du jugement attaqué, cette faute ne
résultait pas du seul fait que la mesure prise n'était pas prévue par un règlement intérieur,
cette circonstance ne pouvant, en effet, priver le patron d'un pouvoir disciplinaire,
inhérent à sa qualité, et dont il a la faculté en l'absence de dispositions restrictives d'un
règlement intérieur, de faire usage sous la seule réserve du contrôle de l'autorité judiciaire
; qu'il suit de là que, dans la cause, le jugement attaqué ne pouvait condamner
l'employeur à payer des dommages-intérêts qu'à la condition de constater la faute dont
celui-ci s'était rendu coupable ; Attendu, en second lieu, que l'existence de cette faute ne
résulte pas davantage de ce que la mesure a eu pour conséquence de priver l'employé de
salaire pendant six jours, ce fait pouvant être retenu pour l'évaluation des dommages-
intérêts, mais non pour l'établissement de la faute ; Attendu, en troisième lieu, que le
patron n'est pas en faute pour avoir ordonné un travail que l'employé avait la faculté de
refuser ;
Attendu, enfin, que les motifs prérappelés du jugement étaient d'autant plus insuffisants
que les Etablissements Poliet et Chausson, par des conclusions reproduites aux qualités
dudit jugement et auxquelles le tribunal n'a pas répondu, ont soutenu qu'une faute ne
pouvait leur être reprochée dans la mesure d'éloignement par eux prise à l'égard de
Vialard, parce que la demande d'un nouveau travail faite à cet ouvrier avait eu pour cause
unique le manque d'approvisionnement de l'usine, parce que cette demande avait été faite
avec cette précision que le changement d'emploi serait momentané, parce qu'elle avait eu
lieu, enfin, dans le seul but d'éviter à Vialard une mise en chômage en lui offrant le seul
travail qui pouvait lui être donné à cette époque ; D'où il suit que le jugement attaqué, en
statuant comme il l'a fait, a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen ; Casse ... .

MISE A PIEDCour de Cassation


section sociale

Audience publique du 6 novembre 1959 Cassation

N° de pourvoi : 58-40133
Publié au bulletin
Pdt Mme Lagarde CDFF
Rpr M. Laroque
Av.Gén. M. Lindon
Av. Demandeur : M. Le Bret
Av. Défendeur : M. Lyon-Caen

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu l'article 1134 du Code civil et l'article 7 de la loi du 20
avril 1810 ;

Attendu qu'après avoir constaté que X..., délégué du personnel, avait commis une
faute en se servant de son titre pour inciter un ouvrier à désobéir aux mesures que le
chef de garage de la SITA avait été amené à prendre pour assurer la marche de
l'entreprise, et que son employeur lui avait infligé la sanction d'un mois de mise à
pied, conformément à l'avis du Conseil de discipline, le jugement attaqué a estimé
qu'il y avait une disproportion certaine entre la sanction prise et la faute commise,
que la mise à pied devait être limitée à un jour, et il a condamné la SITA à verser à
X... une somme égale aux salaires qu'il aurait perçus si son travail n'avait pas été
interrompu ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la SITA avait pris la sanction, compte tenu de son
opportunité et de la discipline de son établissement, après accomplissement des
formalités réglementaires, dans les limites prévues par le statut du personnel qui
faisait la loi des parties, pour une faute indiscutable, les juges du fond qui se sont
bornés à substituer leur appréciation à celle de la société ainsi qu'à celle du Conseil
de discipline unanime sans relever de fait constitutif d'un détournement de son but
du pouvoir disciplinaire exercé par l'employeur dans l'intérêt du bon
fonctionnement de l'entreprise, n'ont pas donné de base légale à leur décision ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE le jugement rendu entre les parties par
le Tribunal civil de la Seine, le 30 octobre 1957, remet en conséquence, la cause et
les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit jugement, et pour
être fait droit, les renvoie devant le Tribunal de grande instance de Versailles.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 1089 P. 867
Note Lindon, Juris Classeur Périodique, 1962 II N. 12507. Lyon-Caen et Pélissier,
Sirey, les grands arrêts de droit du travail, p.92
Décision attaquée : Tribunal civil Seine 1957-10-30

REPRESENTATION DES
SALARIESGREVEGREVE ET CONTRAT DE
TRAVAIL
Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 28 juin 1951 REJET

N° de pourvoi : 51-01661
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Deis
Av.Gén. M. Deraze
Av. Demandeur : M. de Ségogne

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Attendu que la dame X..., Secrétaire à la Société des Maïseries de la Méditerranée, était déléguée du
personnel dans l'entreprise ; Attendu que, le 12 novembre 1947, elle a abandonné son travail sans
motif d'une revendication professionnelle quelconque et a exhorté ses camarades à la suivre pour aller
participer devant le Palais de Justice de Marseille à un mouvement de protestation contre l'arrestation
de trois ouvriers ; Attendu que ce mouvement de grève, ayant ainsi débuté pour des raisons étrangères
au travail, se transforma en un mouvement général de revendications portant sur l'augmentation des
salaires ; que la reprise du travail ayant eu lieu au début du mois de décembre, la dame X... se
présenta à l'entreprise pour reprendre son poste, mais qu'elle se heurta à un refus au motif que par son
attitude elle avait elle-même rompu le contrat de travail ; que, néanmoins, l'intéressée persistant à se
rendre à son bureau, la société dût la faire expulser par ordonnance de référé ;

Attendu que la dame X... a assigné cette dernière en payement de diverses indemnités ; attendu que le
jugement attaqué, confirmant la sentence du Conseil de Prud"hommes, a validé les offres de la société
en ce qui concerne l'indemnité de congé payé, le prorata sur le treizième mois de salaire et le rappel
de salaire, et, pour le surplus de la demande, a renvoyé les parties à suivre la procédure instituée par
l'article 16 de la loi du 16 avril 1946, tous droits des parties demeurant réservés, à raison de la qualité
de déléguée du personnel qu'avait la dame X... ; Attendu que, selon le pourvoi, c'est à tort que le
jugement s'est fondé, pour statuer comme il l'a fait, sur ce que l'exercice du droit de grève, garanti par
la Constitution du 27 octobre 1946, n'entraînait pas la rupture du contrat de travail si ce n'est au cas
d'abus dudit droit de grève, alors que toute grève entraîne ce résultat et que la proclamation de
principe formulée dans le préambule de la Constitution susvisée est sans incidence sur les
conséquences juridiques d'un acte dont la licéité est seule affirmée par cette proclamation ;

Mais, attendu que l'affirmation solennelle par les Constituants du droit de grève, lequel est devenu
une modalité de la défense des intérêts professionnels, ne peut logiquement se concilier avec la
rupture du contrat de travail qui résulterait de l'exercice de ce droit ;

Attendu, d'autre part, que le Tribunal a retenu, par adoption des motifs des premiers juges, qu'il était
reproché à la dame X... d'avoir communiqué des renseignements confidentiels sur les prix pratiqués
par la société à des journaux qui s'en étaient emparés pour déclencher une campagne de presse
tendancieuse contre la société, et d'avoir incité le personnel de l'entreprise à abandonner le travail
pour aller manifester devant le Palais de Justice ; Attendu que les juges du fond ont ainsi constaté
l'existence de fautes graves commises par un délégué du personnel ;

Que, dès lors, c'est à bon droit qu'ils ont fait application de l'article 16 de la loi du 16 avril 1946, aux
termes duquel tout licenciement d'un délégué du personnel envisagé par l'employeur, devra être
obligatoirement soumis à l'assentiment du comité d'entreprise et, en cas de faute grave, le chef
d'entreprise a la faculté de prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé en attendant la décision
définitive ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.


Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 524 P. 372
Droit social, 1951 p.532. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du travail, p.35
Décision attaquée : Tribunal civil Marseille 1948-10-22

Cour de Cassation
Chambre criminelle

Audience publique du 3 juillet 1951 Cassation

Inédit titré

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu que, d'après les articles 9 et 10 de l'ordonnance du 24 mai 1945, et sous les sanctions prévues
par l'article 12 de cette ordonnance, le chef d'entreprise dont l'industrie est visée par l'arrêté du 6
octobre 1945 doit, lorsqu'il résilie un contrat de travail, quels que soient les motifs sur lesquels se
fonde cette résiliation, et quand bien même l'autorisation de l'Administration n'était pas nécessaire à la
validité de cette résiliation, en formuler la demande au Service de la main-d"oeuvre dans les
conditions fixées par les articles 1, 3, 5 et 6 du décret du 23 août 1945 ;

Attendu que Piégay, directeur responsable des Fonderies de Ferrandière, était poursuivi pour avoir
licencié divers ouvriers de son établissement sans avoir accompli les formalités prévues par les
articles précités, et que l'arrêt attaqué l'a relaxé par le motif que ces ouvriers avaient pris part à une
grève au cours de laquelle ils avaient occupé sans droit les locaux de l'usine, et se seraient rendus
ainsi coupables d'une faute lourde ayant eu pour conséquence la rupture par leur chef de leurs contrats
de travail ; qu'ils ne pouvaient dès lors être considérés comme ayant été licenciés par le prévenu ;
Mais attendu qu'il ne résulte d'aucune des constatations de l'arrêt que les circonstances de la grève
aient impliqué la volonté tacite ou expresse des salariés qui y prenaient part d'abandonner
définitivement leur emploi ;

Que, dès lors, la faute commise par eux au cours de cette grève n'a pu par elle-même rompre leur
contrat de travail et a seulement constitué un motif de résiliation de ces contrats ; Qu'il en résulte que
Piégeay était tenu de notifier les licenciements auxquels il procédait à l'Administration dans les
formes prescrites par les articles susvisés et que, par suite, en décidant le contraire, la cour d'appel a
violé les articles visés au moyen et n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, casse et annule l'arrêt de la cour de Lyon en date du 24 février 1950 et renvoie devant
la cour d'appel de Grenoble.

Décision attaquée : Cour d'Appel Lyon 1950-02-50

Cour de Cassation
Chambre civile

Audience publique du 15 mai 1907 CASSATION

Publié au bulletin

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

CASSATION, sur le pourvoi de Valentin-Roussel, d'un Jugement rendu, le 26 février 1907, par
le Tribunal civil de Lille, au profit du sieur Chombeau.

ARRET.

Du 15 Mai 1907.

LA COUR,
Ouï M. le conseiller Rau, en son rapport, Maîtres Cail et Raynal, avocats, en leurs observations,
et M. l'avocat général Mérillon, en ses conclusions, et après en avoir délibéré conformément à la
loi ;

Statuant sur le pourvoi de Valentin-Roussel et fils, fabricants, demeurant à Tourcoing, contre un


jugement du tribunal civil de Lille, en date du 26 février 1907 ;

Sur le premier moyen de cassation ;

Vu les articles 1780 nouveau et 1184 du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1780 du Code civil complété par la loi du 27 décembre 1890,
le louage de services fait sans détermination de durée peut toujours prendre fin par la volonté
d'un seul des contractants, sauf à celui-ci, au cas d'exercice abusif et préjudiciable de son droit de
résiliation, à être passible de dommages-intérêts envers l'autre partie ;

Attendu que l'ouvrier qui se met en grève rend impossible, par son fait volontaire, la
continuation de l'exécution du contrat de travail qui le liait à son patron ;

Que cet acte, s'il ne lui est pas interdit par la loi pénale, n'en constitue pas moins de sa part, quels
que soient les mobiles auxquels il a obéi, une rupture caractérisée dudit contrat ;

Et que les conséquences juridiques d'un fait de cette nature ne sauraient être modifiées par la
circonstance que son auteur aurait entendu se réserver la faculté de reprendre ultérieurement, à
son gré, l'exécution de la convention mise par lui à néant ;

Attendu qu'il résulte des constatations du jugement attaqué que Chombeau travaillait comme
ouvrier tisserand chez les sieurs Valentin-Roussel et fils, et qu'il avait été engagé pour un temps
indéterminé ; que cet ouvrier s'est mis en grève avec les autres tisserands de la maison à la suite
du renvoi de trois de leurs camarades ; qu'à la fin de la grève les demandeurs en cassation ont
refusé de reprendre Chombeau dans leurs ateliers, et que ce dernier, prétendant que ce refus
constituait à son égard un congédiement sans préavis, a actionné ses patrons en payement d'une
indemnité de ce chef ;
Attendu que, pour accueillir cette action et rejeter la demande reconventionnelle de Valentin-
Roussel et fils, le jugement attaqué s'est fondé sur ce que les ouvriers, lorsqu'ils se mettent en
grève, entendraient suspendre simplement et non pas abandonner définitivement leurs relations
de travail avec leurs patrons, et qu'en conséquence le seul fait par Chombeau d'avoir usé du droit
de grève, dont la légalité est reconnue par la loi, ne devait pas le faire considérer comme ayant
rompu le contrat de travail, et ne pouvait justifier son renvoi sans préavis par Valentin-Roussel et
fils ;

En quoi, le jugement attaqué a méconnu les conséquences légales des faits par lui constatés et a
violé les textes de loi susénoncés ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le deuxième moyen, CASSE,

Publication : Bulletin ARRETS Cour de Cassation Chambre civile N. 67 p. 115


Dalloz, les grands arrêts de la jurisprudence civile, observations Henri CAPITANT, Alex
WEILL, François TERRE, p. 692
Décision attaquée : Tribunal civil Lille 1907-02-26

PIQUET DE GREVE
Cour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 1 juin 1951 REJET

N° de pourvoi : 51-01763
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Deis
Av.Gén. M. Deraze
Av. Demandeur : Me Pluyette
Av. Défendeur : Me Mayer
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique, tiré de la violation de l'article 1780 du Code Civil, de l'article 23 du
livre 1er du Code du Travail, de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 6 septembre 1948 et
de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;

Attendu que, sur appel et en confirmation de la sentence du Conseil des Prud'hommes, le


jugement attaqué a condamné la Société ardennaise d'Outillage et de Constructions
mécaniques à verser la prime exceptionnelle de 2500 francs instituée par l'arrêté du 6
septembre 1948 à chacun de ses travailleurs qu'elle a licenciés, le 15 septembre 1948,
après la grève par eux déclenchée le 24 août précédent ;

Attendu que le pourvoi soutient, d'une part, que c'est à tort que cette condamnation a été
prononcée, alors que le jugement a constaté que, pendant la durée de la grève, un piquet
de grévistes, placé à l'entrée de l'usine, a interdit l'accès de celle-ci au personnel de
direction ; que l'exercice du droit de grève, proclamé par la Constitution du 27 octobre
1946, est limité par l'abus qui peut en être fait, et qu'ainsi la faute ci-dessus constatée
avait provoqué la rupture des contrats de travail, à la charge des ouvriers, à partir du 24
août ;

Attendu, d'autre part, que le pourvoi prétend que les travailleurs étaient sans droit au
payement de la prime susvisée, laquelle n'était due, aux termes de l'article 2 de l'arrêté,
qu'aux salariés occupés dans les entreprises industrielles ou commerciales à la date de
l'entrée en vigueur dudit arrêté ;

Mais attendu, sur les deux branches du moyen réunies, qu'il résulte des énonciations du
jugement que, depuis juin 1948, des pourparlers avaient été engagés sans résultat entre la
société et son personnel ; que la grève, "décidée pour des motifs strictement
professionnels, fut votée à la suite d'un vote régulièrement acquis au bulletin secret ;
qu'elle se déroula sans occupation de l'usine et sans violence sur les personnes, et qu'au
lendemain de la promulgation de l'arrêt du 6 septembre 1948, portant allocation d'une
prime exceptionnelle de 2500 francs à tous les travailleurs des entreprises industrielles ou
commerciales, les salariés en cause décidèrent la reprise du travail, mais qu'ils furent
l'objet d'une mesure de congédiement notifiée le 15 septembre suivant par la société" ;
Attendu qu'il est exact que le jugement a relevé qu'un piquet de grève ayant été placé à la
porte de l'usine, du 25 août au 6 septembre, le personnel en grève a, le 25 août, refusé à la
direction, qui le lui avait demandé, d'autoriser l'entrée dans l'usine de trois chefs de
service dont l'un devait terminer la mise au point d'une scie prototype destinée à être
exposée à la Foire de Bâle entre le 18 et le 26 septembre ;

Mais attendu que le jugement a retenu qu'il n'était pas établi que le personnel de direction
se fût effectivement présenté au piquet de grève pour accéder à l'intérieur de l'usine,
aucune précision n'étant apportée par la société sur les circonstances du refus d'accès
dans l'usine ni sur les moyens qui auraient été employés par les grévistes pour interdire
l'accès des établissements ;

Attendu que les juges ont déduit de ces constatations que "la faute dont s'agit, si elle était
suffisante pour dispenser la société de verser une indemnité de préavis, n'avait pas le
caractère d'une faute lourde ; qu'en effet, elle avait été commise sans mauvaise foi par des
salariés se conformant à une décision collective en se méprenant sur leurs droits tels
qu'ils résultent de la législation actuelle" ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations et appréciations, les juges ont pu décider que
cette faute n'était pas une faute lourde de nature à provoquer la rupture des contrats de
travail, et que, par voie de conséquence, les salariés avaient continué à faire partie du
personnel de l'entreprise jusqu'au 15 septembre, date de leur congédiement par la
société ;

Attendu, dès lors, que ces derniers remplissaient l'unique condition exigée par l'arrêté du
6 septembre 1948 pour avoir droit à la prime exceptionnelle ;

Par ces motifs :


Rejette.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale N. 432 p. 309
Dalloz, les grands arrêts de la jurisprudence civile, observations Henri CAPITANT, Alex
WEILL, François TERRE, p. 694
Décision attaquée : Tribunal civil Niort 1949-03-16

GREVE ET OCCUPATION D'USINE


Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 29 mai 1953 REJET

N° de pourvoi : 53-02046
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Deis
Av.Gén. M. Deraze
Av. Demandeur : M. Cail

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le premier moyen, pris de la violation de l'article 4 de la loi du 30 août 1883 et des
règles de l'organisation judiciaire, en ce que le jugement attaqué aurait été rendu par
quatre magistrats dont il constate la présence, à savoir : M. Coste, Président ; Mmes X...,
Dupret et Aldebert, juges suppléants ;
Mais attendu qu'il résulte de l'expédition certifiée conforme du jugement produit à l'appui
du pourvoi qu'étaient présents : M. Coste, Président, Mmes X..., Dupret et Aldebert,
juges suppléants ; Qu'ainsi le moyen manque en fait ;

Sur le deuxième moyen, pris de la violation des articles 1351 du Code civil, 4 de la loi du
11 février 1950 et 7 de la loi du 20 avril 1810 ; Attendu que le pourvoi reproche au
jugement attaqué d'avoir décidé que l'occupation des lieux du travail par des grévistes ne
constituait une faute lourde de nature à rompre le contrat de travail que dans la mesure où
elle portait atteinte au droit de propriété de l'employeur ou à la liberté du travail des
autres salariés de l'entreprise, alors que les juges du fond se trouvaient liés par leur
précédent jugement, intervenu dans la même affaire, aux termes duquel ils avaient
indiqué dans leurs motifs qu'une occupation des lieux du travail constituait une faute
lourde entraînant la rupture du contrat de travail, mais seulement à l'égard des ouvriers
qui y avaient pris une part personnelle, ce qui excluait pour eux la possibilité de retenir
ultérieurement toute autre circonstance présentant un caractère restrictif ;

Mais attendu que les juges ont constaté qu'il résultait de l'enquête ordonnée par eux que
l'occupation des chantiers Chagnaud par les grévistes n'a été que partielle, la cour située à
l'intérieur et le réfectoire ayant seuls été occupés à l'exclusion des ateliers proprement
dits, que cette occupation a été limitée au temps du travail, les grévistes évacuant les
lieux à l'heure du repas de midi pour ne revenir que peu nombreux l'après-midi et se
retirer complètement à 18 heures, qu'à aucun moment l'entreprise n'a mis en demeure les
grévistes d'avoir à se retirer et qu'elle n'a même pas soutenu qu'elle avait été contrainte de
leur livrer passage, qu'enfin pendant toute la durée de la grève et de cette occupation le
personnel de l'entreprise, payé au mois, a pu continuer à travailler normalement ;

Attendu que de l'ensemble de ces constatations les juges ont pu déduire qu'en l'espèce
l'occupation n'était pas suffisamment caractérisée pour décider que Y..., qui y avait
participé, avait commis une faute lourde justifiant le refus de réintégration dans son
emploi à l'expiration de la grève, et, par suite, le rejet de sa demande en payement de
dommages et intérêts ; Attendu qu'en statuant ainsi et en déniant l'existence d'une
véritable occupation, par les grévistes, les juges ne sont pas mis en contradiction avec ce
qu'ils avaient affirmé dans les motifs de leur précédent jugement, par lequel ils avaient
ordonné une enquête en vue de rechercher si la grève litigieuse avait été accompagnée de
l'occupation des lieux du travail et si Y... avait pris une part personnelle à cette
occupation ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 409 P. 300
Note Bizière, Juris Classeur Périodique, 1960 II n° 11624. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey,
les grands arrêts de droit du travail, p.48
Décision attaquée : Tribunal civil Marseille 1951-03-16. Tribunal civil Marseille 1951-
06-11

GREVE POLITIQUE ET NON PROFESSIONNELLE


Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 23 mars 1953 REJET

N° de pourvoi : 53-01398
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Deis
Av.Gén. M. Blanchet
Av. Demandeur : M. Le Sueur
Av. Défendeur : M. Labbé

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique tiré de la violation des articles 1382 du Code civil, 4 de la loi du 11
février 1950 et 7 de la loi du 20 avril 1810 ; Attendu que le pourvoi fait grief au jugement
attaqué d'avoir débouté X..., cheminot au dépôt de la gare Saint-Charles à Marseille, de
sa demande en remboursement de la somme de 200 francs retenue par la S.N.C.F. sur sa
prime à la production ainsi que de sa demande en dommages et intérêts au motif que la
grève à laquelle il a participé n'avait pas un caractère professionnel et n'avait pas été
précédée de la procédure de conciliation instituée par les articles 5 et suivants de la loi du
11 février 1950, alors que le jugement se borne à affirmer qu'il s'est agi d'une grève
politique, sans permettre à la Cour de Cassation d'exercer son droit de contrôle sur le
caractère de cette grève, et que l'absence de la procédure de conciliation n'est pas
obligatoirement constitutive d'une faute lourde dès lors qu'il n'est pas constaté par les
juges du fond qu'il en est résulté un trouble dans le fonctionnement des services de la
S.N.C.F..

Mais attendu, d'une part, qu'il résulte des énonciations du jugement que le caractère
essentiellement politique de la grève à laquelle ont pris part le 4 mars 1950 les cheminots
du dépôt de la gare Saint-Charles à Marseille, lesquels ont abandonné le travail avant
l'heure normale, ne saurait être sérieusement contesté dès lors que la résolution émanant
du bureau syndical a revêtu la forme d'une violente protestation contre les incidents qui
avait marqué la veille la séance de l'Assemblée Nationale à Paris, et que la revendication
relative au versement d'un acompte mensuel en faveur des cheminots n'avait la valeur
que d'un simple prétexte ;

Attendu que de l'analyse qu'ils ont faite de la résolution susvisée les juges ont pu déduire
que la cause de la grève était "essentiellement politique" ; Attendu, d'autre part, que le
jugement n'a relevé l'absence de la procédure de conciliation que pour affirmer davantage
le caractère non professionnel de cette grève ; Qu'ainsi le moyen n'est fondé dans aucune
de ses branches ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE.


Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 253 P. 188
Note Delpech, Juris Classeur Périodique, 1953 II n° 7709. Note Levasseur, Dalloz 1954
p.89. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, les grands arrêts de droit du travail, p.39
Décision attaquée : Tribunal civil Marseille 1950-10-31

GREVE PERLEECour de Cassation


section sociale

Audience publique du 5 mars 1953

N° de pourvoi : 53-01392
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Deis
Av.Gén. M. Deraze
Av. Demandeur : M. Hersant
Av. Défendeur : M. Le Sueur

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et
l'article 4 de la loi du 11 février 1950 ;

Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, le droit de grève s'exerce dans le
cadre des lois qui le règlementent et qu'en vertu du second la grève ne rompt pas le
contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ; Attendu qu'en application
de ces textes, le contrat de travail liant les employeurs aux salariés est suspendu
tant que dure la grève ; Attendu que par l'effet de cette suspension, d'une part, le
rapport contractuel est maintenu entre les parties jusqu'au jour de la reprise
ultérieure du travail, et, d'autre part, chacune des parties se trouve dispensée de
mettre à exécution les obligations qui lui incombent, à savoir, les salariés de fournir
un travail et les employeurs de verser un salaire ; Attendu qu'il n'y a pas arrêt du
travail lorsque le travail est exécuté au ralenti ou dans des conditions
volontairement défectueuses ;

Attendu, qu'il résulte des constatations des juges du fond, qu'à la suite du rejet par
la Société Dunlop de diverses revendications d'ordre professionnel présentées par
eux, les ouvriers de cette Société ont décidé de pratiquer une grève dite "grève
perlée", le 23 novembre 1949, en effectuant un travail réduit, coupé par de
fréquentes interruptions, spécialement dans l'atelier chargé de la vulcanisation des
pneumatiques 50 x 15 destinés à l'équipement des poids lourds automobiles, que
malgré l'intervention de l'ingénieur, chef du service, en date du 10 décembre, cet
état de choses persista, que la consigne était de porter à la cuisson un unique
pneumatique par homme et par équipe, qu'enfin X..., qui appartenait à l'atelier
susvisé, a été congédié le 13 décembre, sans préavis ni indemnité, pour avoir
contrevenu aux instructions données en vue de la reprise de la production normale ;
Attendu qu'il résulte de ces constatations qu'il n'y a pas eu arrêt du travail ;

Attendu, dès lors, que les parties demeuraient soumises à leurs obligations
contractuelles régies par l'article 23, livre 1er, du Code du travail, et que X... ne
pouvait exciper du droit de grève invoqué par le jugement pour protester contre son
congédiement, malgré le caractère interprétatif qui s'attache à l'article 4 de la loi du
11 février 1950 ; Attendu qu'en décidant le contraire et en condamnant la Société
Dunlop à verser à X... des dommages et intérêts pour renvoi abusif de ce salarié
ainsi qu'une indemnité délai-congé, le jugement attaqué a faussement appliqué et,
par suite, violé les textes visés au moyen ;

PAR CES MOTIFS : CASSE, sauf du chef du jugement ayant débouté X... de sa
demande en dommages et intérêts pour ouverture, hors de sa présence, de son
vestiaire renfermant ses effets personnels.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 185 P. 140
Brun, La jurisprudence en droit du travail, n° 181. Lyon-Caen et Pélissier, Sirey,
les grands arrêts de droit du travail, p.43
Décision attaquée : Tribunal civil Montluçon 1950-10-25

GREVE ET FAUTE LOURDE


Cour de Cassation
section sociale

Audience publique du 20 mai 1955 Cassation

N° de pourvoi : 55-02582
Publié au bulletin

Pdt M. Carrive
Rpr M. Terrier
Av.Gén. M. Blanchet
Av. Demandeur : M. Mayer
Av. Défendeur : M. Talamon

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu l'alinéa 7 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
et l'article 4 de la loi du 11 février 1950 ;
Attendu, d'une part, qu'aux termes du premier de ces textes "le droit de grève s'exerce
dans le cadre des lois qui le réglementent" ; qu'aux termes du second, qui, en raison de
son caractère interprétatif est applicable à une grève qui lui est antérieure, "la grève ne
rompt pas le contrat de travail sauf faute lourde du salarié" ; et que la faute lourde visée
est uniquement celle qui est imputable au salarié, et est indépendante d'autres fautes qui
ont pu être retenues contre l'ensemble des ouvriers en grève ; Attendu, d'autre part, que la
participation d'un salarié à un mouvement de grève dont il n'est pas démontré qu'il ait eu
un but autre que professionnel ne présente pas le caractère d'une faute personnelle
constituant de sa part un abus du droit de grève ;

Or, attendu que pour décider que X..., ouvrier au service de la société Jérôme Bonnefoy
et Cie, qui exploite une usine de verrerie à Courbevoie, avait rompu le contrat de travail
qui le liait à cette société et pour le condamner au payement à celle-ci d'indemnités pour
défaut de préavis et rupture abusive de contrat le jugement attaqué, qui constate qu'aucun
fait susceptible de lui être imputé personnellement ne lui était reproché retient seulement
sa participation à une grève qui s'était déroulé du 22 novembre au 11 décembre 1947 et
qu'il déclare inspirée par un esprit de méchanceté et de malveillance et détournée des buts
normaux d'une grève pour avoir été déclenchée au cours même de pourparlers suivis
entre organismes patronaux et ouvriers en vue d'examiner les revendications formulées
par ces derniers et pour avoir eu pour résultats premiers l'occupation de l'usine et l'arrêt
de son fonctionnement normal ;

Attendu que les juges du fond, qui ne constatent ni l'existence d'une faute personnelle du
salarié ni le caractère non professionnel de la grève à laquelle il a pris part, n'ont pas
légalement justifié leur décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE.


Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 427 P. 319
Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du travail, p.56
Décision attaquée : Tribunal civil Versailles 1952-02-29

INTERRUPTION DU TRAVAIL PAR UN PIQUET


DE GREVE ET SALAIRECour de Cassation
section sociale

Audience publique du 28 octobre 1957 Cassation

N° de pourvoi : 57-05595
Publié au bulletin

Pdt Mme Lagarde CDFF


Rpr M. Laroque
Av.Gén. M. Albucher
Av. Demandeur : M. Hersant
Av. Défendeur : M. Lesueur

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique : Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;

Attendu que le défaut de réponse aux conclusions équivaut à l'absence de motifs ;


Attendu que, pour condamner la Société anonyme des pneumatiques Dunlop à
indemniser son ouvrier X..., non gréviste, de la perte de salaires résultant de la
fermeture de son atelier le 7 septembre 1955, le jugement attaqué se borne à retenir
que l'occupation de l'usine par les grévistes ne constituait pas un cas de force
majeure, puisqu'à cette date l'atelier de mécanique, où travaillait X..., assurait son
service ainsi que le personnel de bureau et de maîtrise ;

Mais attendu que la société avait précisé dans ses conclusions qu'elle n'avait plus le
contrôle des accès de l'établissement passé aux mains des grévistes occupants de
l'usine, ni de ses installations, ce qui constituait pour elle un obstacle insurmontable
à l'exécution de ses obligations d'employeur, qu'elle n'avait pu laisser continuer
l'activité d'un atelier isolé, et qu'elle avait usé de toutes les diligences possibles pour
récupérer la libre disposition des usines, notamment en assignant à cet effet en
référé d'heure en heure ; Qu'en ne répondant pas à ces conclusions, les juges du
fond n'ont pas donné de base légale à leur décision ;

PAR CES MOTIFS : CASSE.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation section sociale N. 1016 P. 723
Lyon-Caen et Pélissier, Sirey, Les grands arrêts de droit du travail, p.64
Décision attaquée : Conseil des Prud'hommes Montluçon 1956-01-06

ABUS DU DROIT DE GREVECour de Cassation


Chambre sociale

Audience publique du 18 janvier 1995 Cassation.


N° de pourvoi : 91-10476
Publié au bulletin

Président : M. Kuhnmunch .
Rapporteur : M. Waquet.
Avocat général : M. de Caigny.
Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, M. Copper-Royer.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Constate qu'à la suite du redressement judiciaire de la société Publicom, M. Lavergne, pris en sa qualité
d'administrateur judiciaire et M. Rey, pris en sa qualité de représentant des créanciers, reprennent l'instance
introduite contre ladite société ;

Sur les quatre premiers moyens communs aux demandeurs, réunis :

Vu l'alinéa 7 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article L. 521-1 du Code du travail et l'article
1382 du Code civil ;

Attendu que la cessation collective et concertée du travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles
caractérise l'exercice du droit de grève ; que la commission, par certains salariés grévistes, d'actes illicites au
cours de leur mouvement, ne suffit pas, à elle seule, à modifier la nature de ce dernier ; que ce n'est qu'au cas où
la grève entraîne ou risque d'entraîner la désorganisation de l'entreprise qu'elle dégénère en abus ; qu'enfin, la
responsabilité d'un salarié ou d'un syndicat à l'occasion soit d'une grève, en raison d'actes illicites commis
pendant celle-ci, soit d'un abus du droit de grève, ne peut être engagée qu'à raison du préjudice découlant
directement de son comportement fautif ;

Attendu que, pour condamner, in solidum, le Syndicat du livre CGT, MM. Combebiac et Cuallado, M. Michaud
et dix-sept autres salariés à payer la somme de 1 242 023,39 francs, la cour d'appel retient d'abord que si le motif
de cessation du travail invoqué était licite en tant qu'il était fondé sur une solidarité interne à l'entreprise, cette
justification cessait à partir de la saisine de la juridiction compétente : le tribunal d'instance, même si celui-ci
devait par la suite donner raison aux deux salariés, les exigences de la solidarité cessant de s'imposer à partir du
moment où était mis en oeuvre l'arbitrage judiciaire prévu par la loi pour le type de conflit concerné ; qu'elle
ajoute qu'en toute hypothèse une grève, même licite, peut devenir illicite en raison des moyens employés par
ceux qui y recourent ; qu'en l'espèce, la présence voulue de personnes étrangères à l'entreprise, les piquets de
grève, les violences et intimidations, l'utilisation non consentie par l'employeur du matériel et du papier de
l'imprimerie, le refus de vote en vue de la reprise du travail, le maintien de l'occupation après les décisions de
justice, les dégâts importants commis aux locaux et au matériel caractérisent l'existence de l'illicéité de la grève
considérée, l'abus du droit de grève étant très largement caractérisé ; qu'elle conclut que le syndicat, les
permanents syndicaux et les dix-huit salariés assignés doivent réparer l'entier préjudice matériel et commercial
subi par l'employeur au cours de la période du 9 novembre 1983 au 11 février 1984, sous déduction de la somme
mise à la charge de l'Etat par la juridiction administrative en raison du refus de concours de la force publique
pour procéder à l'expulsion des occupants des locaux de l'entreprise ;

Attendu, cependant, en premier lieu, que la cessation collective et concertée du travail a été précédée de
revendications qui se rattachaient tant à l'exercice du droit syndical qu'à l'exigence du respect de règles légales et
conventionnelles, et présentaient donc un caractère professionnel ; qu'elle constituait l'exercice du droit de grève,
constitutionnellement reconnu, peu important la saisine par l'employeur du juge compétent pour statuer sur la
validité des désignations contestées par lui ;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel a énuméré un certain nombre d'actes illicites commis au cours de
la grève, en se bornant à relever une désorganisation de la production, sans préciser si, et à quel moment, ces
actes illicites avaient révélé un risque de désorganisation de l'entreprise elle-même ; que, dès lors, elle n'a pas
caractérisé un abus du droit de grève ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel ne pouvait mettre à la charge du syndicat, de MM. Combebiac et Cuallado et
de dix-huit salariés grévistes la réparation de l'entier préjudice subi par l'entreprise ; qu'il lui appartenait de
préciser, en ce qui concerne chacune des personnes concernées, à quel acte fautif précis elle avait participé et
qu'elle ne pouvait prononcer condamnation qu'à raison du seul préjudice résultant du comportement incriminé ;

D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le cinquième moyen relevé par le Syndicat du livre CGT
Toulouse, et onze autres demandeurs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 novembre 1990, entre les parties, par la
cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.

Publication : Bulletin 1995 V N° 27 p. 18


Droit social, 1995, n° 2, p. 183, note Ph. Waquet
Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 1990-11-15
Titrages et résumés CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Abus du droit de grève - Constatations
nécessaires .

La cessation collective et concertée du travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles caractérise
l'exercice du droit de grève.
La commission, par certains salariés grévistes, d'actes illicites au cours de leur mouvement, ne suffit pas, à elle
seule, à modifier la nature de ce dernier ; ce n'est qu'au cas où la grève entraîne ou risque d'entraîner la
désorganisation de l'entreprise qu'elle dégénère en abus.

La responsabilité d'un salarié ou d'un syndicat à l'occasion soit d'une grève, en raison d'actes illicites commis
pendant celle-ci, soit d'un abus du droit de grève, ne peut être engagée qu'à raison du préjudice découlant
directement du comportement fautif incriminé.

CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Définition - Caractère professionnel - Arrêt de travail en vue
de satisfaire des revendications professionnelles - Nécessité
CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Abus du droit de grève - Définition - Désorganisation de
l'entreprise - Nécessité
CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Acte illicite commis pendant la grève - Syndicat -
Responsabilité - Conditions - Préjudice découlant directement du comportement fautif - Nécessité
CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Acte illicite commis pendant la grève - Salarié -
Responsabilité - Conditions - Préjudice découlant directement du comportement fautif - Nécessité
CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Abus du droit de grève - Syndicat - Responsabilité -
Conditions - Préjudice découlant directement du comportement fautif - Nécessité
CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Abus du droit de grève - Salarié - Responsabilité - Conditions
- Préjudice découlant directement du comportement fautif - Nécessité

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1991-01-30, Bulletin 1991, V, n° 40 (2), p.


25 (cassation partielle) et les arrêts cités ; Chambre sociale, 1992-11-04, Bulletin 1992, V, n° 529, p. 335
(cassation partielle), et l'arrêt cité.

RETENUES EN CAS D'ABSENCE MOTIVEES


PAR LA GREVECour de Cassation
Chambre sociale

Audience publique du 18 janvier 1995 Cassation

N° de pourvoi : 91-42476
Inédit titré

Président : M. KUHNMUNCH

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le pourvoi formé par :

1 / M.

LA COUR, en l'audience publique du 22 novembre 1994, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M.


Merlin, conseiller rapporteur, MM. Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, M. Desjardins, conseillers, Mlle Sant, MM.
Frouin, Boinot, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Merlin, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de MM. B,
Chenevoy, Genelot, Menetrier, Morel, Pointelin et Tritz, de Me Roger, avocat de la société Solvay et compagnie,
les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique pris en sa première branche ;

Vu l'article L. 521-1 du Code du travail ;

Attendu qu'à la suite de leur participation à une grève au cours de l'année 1979, plusieurs salariés de la société
Solvay et compagnie ont subi un abattement sur leur prime ou allocation de fin d'année ; que M. B et six autres
salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de la retenue pratiquée par leur employeur ;

Attendu que, pour rejeter la demande des salariés, le conseil de prud'hommes, statuant sur renvoi après cassation,
énonce que la prime litigieuse n'est pas une prime d'assiduité mais constitue un élément du salaire versé en
contrepartie d'une prestation de travail, que les absences autres que celles rémunérées en vertu de la loi ou de la
convention collective ne donnent aucun droit au paiement de la prime, qu'aucune retenue discriminatoire pour
faits de grève n'est établie car, si les permissions et les congés sans solde de cinq jours au maximum
n'entraînaient pas un abattement proportionnel de la prime, l'arrêt de travail des salariés pour faits de grève avait
excédé cinq jours et que la grève qui suspend l'exécution du contrat de travail ne peut donner lieu au versement
d'une rémunération ;
Attendu, cependant, que l'exercice du droit de grève ne peut donner lieu de la part de l'employeur à des mesures
discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux ; qu'ayant été constaté que toutes les
absences, autorisées ou non, n'entraînaient pas les mêmes conséquences sur l'attribution de la prime litigieuse,
qu'elle qu'en soit la nature, il en résultait que les retenues opérées par l'employeur, en raison d'absences motivées
par la grève, constituaient des mesures discriminatoires ; que dès lors, en statuant comme il l'a fait, sans tirer les
conséquences légales de ses constatations, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que les salariés sollicitent sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de 10 000 francs ;

Attendu qu'il y a lieu d'accueillir partiellement cette demande ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 mars 1991, entre les parties, par le
conseil de prud'hommes de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de
Montbéliard ;

Condamne la société Solvay et compagnie, envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent
arrêt ;

La condamne, également, à payer à chacun des salariés la somme de mille francs sur le fondement de l'article
700 du nouveau Code de procédure civile ;

Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis
pour être transcrit sur les registres du conseil de prud'hommes de Besançon, en marge ou à la suite du jugement
annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience

publique du dix-huit janvier mil neuf cent quatre-vingt-quinze. LITIGES DU


TRAVAIL

Vous aimerez peut-être aussi