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Journal of Applied Language and Culture Studies pISSN 2605-7506

Issue 4, 2021, pp. 121-142 e2605-7697


https://revues.imist.ma/index.php?journal=JALCS

Le Statut du Français au Maroc Face à l’Hégémonie de


l’Anglais : Attitudes des apprenants envers le Français et
l’Anglais

Asma Nifaoui
Mohammed V University, Rabat, Morocco

To cite this article: Nifaoui, A. (2021). Le statut du français au Maroc face à


l’hégémonie de l’anglais: Attitudes des apprenants envers le français et l’anglais. Journal
of Applied Language and Culture Studies, 4, 121-142.

Résumé
Depuis l’indépendance du Maroc en 1956, l’Etat a entrepris une série de
réformes linguistiques pour relever les défis auxquels sont confrontés les
différents domaines clés de la société dont le système éducatif représente
la priorité des responsables de l’éducation. Trois langues (le français,
l’anglais, l’espagnol) se partagent l’enseignement des langues étrangères
au Maroc. Le français a longtemps bénéficié d’une place privilégiée au
sein de la société marocaine comme langue d’ascension sociale, de
modernité et de prestige malgré son statut indéterminé jusqu'à présent.
Cependant, la langue française risquerait de perdre cette position
privilégiée, au profit de l’anglais devenu une langue internationale aux
yeux de la nouvelle génération au Maroc. L’objectif de cette étude est
d’identifier les différents enjeux pouvant déstabiliser le statut du français
(première langue étrangère) en présence de l’anglais (deuxième langue
étrangère). Les résultats obtenus de l’enquête menée auprès des lycéens
marocains ont clairement révélé des attitudes positives envers

121
l’apprentissage de l’anglais contre une démotivation enregistrée à
l’égard du français. Certes les élèves portent un regard positif sur les
Français et les communautés francophones mais la maitrise de l’anglais,
pour eux, est devenue une nécessité, sinon une obligation vu sa
domination grandissante dans le monde des affaires, le marché du travail
et son utilité sur le plan international.
Mots clés: le statut du français au Maroc, l’hégémonie de l’anglais,
attitudes envers le français, attitudes envers le français et l’anglais
0. Introduction
Le paysage linguistique marocain se distingue par une diversité complexe
et dont la présence est liée aux circonstances propres à l’histoire de
chaque langue. De ce fait, les Marocains sont exposés à trois groupes de
langues : les langues officielles (l’arabe et l’amazighe), les langues
maternelles (l’arabe marocain et l’amazighe) et bien évidemment les
langues étrangères (le français, l’anglais et l’espagnol). Pour bien gérer
cette richesse linguistique, l’instauration d’une politique linguistique
efficace s’imposait, et ce depuis l’indépendance du Maroc en 1956. Les
différentes réformes linguistiques entreprises par l’Etat ont cerné trois
objectifs majeurs visant, en premier lieu, le maintien des langues locales,
une maitrise parfaite des langues étrangères tout en développant des
attitudes positives envers tout type de processus d’apprentissage
linguistique. Une politique est aussi nécessaire pour assurer le respect
mutuel et le dialogue entre les citoyens marocains et ceux des différents
pays voisins sans négliger le principe de l’équité en ciblant « une
politique fondée sur l’égalité des chances, des langues et des cultures »
(Boukous, 2008, p. 36).
La question de l’appellation relative au statut du français comme langue
présente dans l’enseignement au Maroc, a été longuement débattue
(Benzakour, 2010, 2012 ; Marley, 2000 ; Benzakour, 2012).
Actuellement, le statut de « fait » attribué au français est celui de la
première langue étrangère enseignée dès la première année du cycle
primaire. Elle est fort présente dans les médias, l’économie, les
institutions sociales, et dans l’enseignement supérieur. Cependant, ce
statut privilégié est en position de concurrence vu l’expansion croissante
de l’anglais au Maroc (Errihani, 2017) et son positionnement en tant que
langue internationale (Seidlhofer, 2005 ; Jenkins, Baker, & Dewey,
2017). La diffusion de la langue anglaise et ses effets en terme de

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l’apprentissage des autres langues ont suscité l’intérêt de beaucoup de
chercheurs comme (Pennycook, 1995 ; Crystal, 2003; Skutnabb-Kangas,
2000). Cependant, l’attirance des jeunes envers l’anglais et l’émergence
de ce dernier en tant que lingua franca pourraient renforcer davantage sa
présence au Maroc. Sur le long terme, cela affecterait la place qu’occupe
le français dans la société marocaine compte tenu des changements
produits récemment et privilégiant l’anglais comme langue
d’enseignement, notamment, la création en 2014 des sections
internationales du baccalauréat marocain dont l’enseignement des
matières scientifiques se fait exclusivement en anglais.
1. La Situation Linguistique au Maroc
Trois groupes de langues caractérisent le panorama linguistique
marocain. Sur le plan constitutionnel l’arabe et l’amazighe constituent le
groupe des langues officielles. L’arabe marocain (darija) avec les trois
dialectes de l’amazighe forment le groupe des langues maternelles. Selon
le recensement national de 2014 publié par le « Haut-commissariat au
plan », l’arabe marocain, en tant que dialecte, il est compris et parlé par
presque 90% de la population marocaine (www.hcp.ma). De plus, son
usage quotidien est attesté, à la fois, dans les situations de communication
informelle et formelle. En ce sens, des mouvements menés par des
intellectuels ne cessent de revendiquer, constamment, l’intégration de
l’arabe marocain dans des domaines tels que l’enseignement et les
médias
Le cas est différent pour l’amazighe, longtemps marginalisé et tenu à
l’écart par la politique d’arabisation, il a connu un changement radical à
partir de l’année 2001 qui a été marquée par la création de « L’institut
Royal de la Culture Amazighe (IRCAM) » et en 2003 par l’adoption du
« Tifinagh » (système de transcription de la langue amazighe reconnue
officiellement). Ce changement a été promulgué par Dahir royal appuyé
par le discours du trône du 17 octobre en 2011 et qui a attribué aux
amazighs le prestige d’un patrimoine national et culturel au Maroc. Ces
moments historiques ont permis d’officialiser le statut de l’amazighe,
d’avoir un alphabet officiel (Tifinagh), de s’introduire dans
l’enseignement, et de prospérer dans les arts et les médias (Jay, 2016).
Toutefois, les progrès réalisés ne représentent pas l’ensemble des
objectifs à cause du manque des ressources financières (Errihani 2006), et
d’une véritable volonté politique (Nachef, 2018). L’amazighe, comme le

123
darija, luttent encore pour renforcer davantage leur présence dans les
domaines clés de la société.
Concernant le répertoire des langues étrangères, (le français, l’anglais,
l’espagnol), chacune de ces langues disposent d’un statut « de fait »
défini clairement dans la politique linguistique éducative marocaine. Le
français reconnu comme première langue étrangère, il bénéficie de
plusieurs privilèges dans la société marocaine. Il est la langue du prestige,
de la modernité et de l’ascension sociale. Il est enseigné dès la première
année du primaire, de plus, son omniprésence dépasse le milieu scolaire
pour toucher les différents secteurs de la société (ex., économie, industrie,
travail, médias). La présence de l’espagnol au Maroc est aussi liée à
l’histoire de l’instauration du protectorat espagnol en 1912. Cependant, sa
diffusion au sein du pays s’est limitée, principalement, dans le nord et le
sud du Maroc. Il est enseigné comme langue optionnelle dans le Cycle
Secondaire Qualifiant.
2. Le Statut de la Langue Française au Maroc
L’introduction de la langue française dans l’enseignement au Maroc a
connu un long parcours. En effet, son ancrage dans le milieu scolaire est
passé par des étapes essentielles qui ont marqué son processus et abouti à
son statut actuel. L’implantation de la langue française au Maroc a débuté
au moment de la mise en place du protectorat en 1912. Pour ce qui est du
milieu scolaire, l’intrusion du français dans l’enseignement pendant cette
période au Maroc n’a pas réalisé de réels progrès vu le nombre faible des
enfants marocains qui ont fréquenté les écoles françaises. Cependant, ce
constat n’a pas empêché l’école française de s’implanter et de s’enraciner
davantage dans le pays. En effet, une élite moderne a vu le jour et s’est
engagée à défendre le maintien de la langue française tout en s’opposant
à une élite arabisante dont le cursus éducatif était purement traditionnel
(Burke, 1973; Benzakour, 2010).
Après l’indépendance en 1956, l’arabe devient la langue officielle du
Maroc. Ce changement s’est produit grâce à la politique d’arabisation
soutenue à l’époque par des mouvements menés par le Parti Conservateur
Istiqlal. (Hammoud, 1982, p. 31-Traduction de l’anglais). En1960, il a été
décidé dans les instructions officielles de réduire les heures consacrées à
l’enseignement du français au profit de la langue arabe. Cette décision a
été complétée par l’arabisation dont la première tentative date de 1957.
Elle a été qualifiée de mesure improvisée (Grandguillaume, 2006) et a été

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vouée à un échec total. Trois ans plus tard, et sous les directives du
ministre de l’Education Nationale, le « Conseil Supérieur de l’Education
Nationale recommande l’arabisation totale des trois cycles de
l’enseignement. Ainsi, l’année 1962, marque le début officiel de
l’arabisation à partir de la première année du primaire. (Grandguillaume,
2006). Cependant, cette situation a connu un grand bouleversement suite
à des changements au niveau des nominations au sein du secteur de
l’éducation. De ce fait, les années (1966-1976) ont été marquées par une
remise en cause de l’arabisation et le retour à l’enseignement en français
des programmes éducatifs. Cet état de fait a suscité de nombreuses
revendications et suite à des événements à caractère politico-national
comme la marche verte en 1975 et la question du Sahara marocain, le
pays se trouvait dans l’obligation d’établir une union nationale. Ainsi, En
1977, le débat autour la problématique de l’arabisation a repris,
conduisant à une réelle réforme, en 1985, qui va officialiser le retour de
l’arabisation (Grandguillaume, 2006).
Récemment, et précisément, en 2017 l’arabisation de l’enseignement des
matières scientifiques est remise en question et un retour à la francisation
des trois disciplines (mathématique, sciences physiques, sciences de la
vie et de la terre) a été officiellement entamé dès la première année du
Cycle Secondaire Collégial. Ainsi, depuis les années du protectorat
jusqu’ à aujourd’hui, l’enseignement du français a été parmi les priorités
des responsables éducatifs.
3. Le Statut de l’Anglais au Maroc
L’implantation de l’anglais au Maroc remonte à la période de la
deuxième guerre mondiale, lorsque des bases américaines ont été établies
à Tanger et Kenitra. Les Marocains ayant eu des contacts à cette époque
avec les Américains, ont été encouragés à apprendre l’anglais afin de
communiquer avec eux (Ennaji, 2005). L’anglais est devenu depuis une
langue étrangère importante dans le paysage linguistique du Maroc.
Selon Ennaji (1991), cette popularité est due à l’absence de connotations
négatives associées à l’anglais contrairement au français dont
l’implantation au Maroc remonte à la période coloniale ; il s’y ajoute, les
attitudes positives envers cette langue et son émergence comme langue
internationale de la science (Buckner, 2011 ; Errihani, 2017; Marley,
2004). Sadiqi (1991) a identifié quatre facteurs majeurs expliquant la
promotion de l’anglais au Maroc. Il s’agit de la politique linguistique

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éducative adoptée depuis l’indépendance, l’émergence de l’anglais
comme langue internationale dominante, largement utilisée dans les
secteurs principaux de la société (commerce, industrie, relations
internationales, finances); les attitudes positives des Marocains vis-à-vis
de l’anglais ; et l’absence d’un passé colonial au Maroc. Cet état des lieux
explique clairement la présence croissante de l’anglais dans les domaines
comme l’éducation, les médias, les sites Internet, les entreprises et le
tourisme (Ennaji, 1991). Dans le secteur touristique et en particulier le
tourisme privé (hôtels, guides touristiques, agence de voyages etc.),
l’anglais est devenu la langue de communication indispensable dans les
différentes situations du secteur concerné, Marley, 2004). De même pour
la politique éducative adoptée au Maroc depuis l’indépendance qui a
entrepris une série de réformes au profit de l’anglais. A titre d’exemples,
l’introduction de l’enseignement de l’anglais, d’abord dès la troisième
année du cycle secondaire collégial, puis, la création en 2014, de
nouvelles filières dont l’enseignement des matières scientifiques est
dispensé en anglais. Il en va de même dans l’enseignement supérieur,
l’anglais est enseigné comme langue complémentaire aux étudiants de
première année inscrits dans différentes filières et dont l’enseignement
des disciplines se fait en français ou en arabe. Cependant, cela n’a pas
affecté réellement la présence du français comme langue étrangère de
facto. Plusieurs étudiants universitaires affiliés à des écoles de sciences et
d’ingénierie sont fortement en faveur de l’utilisation de l’anglais comme
langue d’enseignement en raison de son rôle en tant que langue
universelle de la recherche scientifique et de la publication académique
(Belhiah & Abdelatif, 2016).
Par ailleurs, il existe au Maroc un nombre considérable de centres de
langues privés dédiés à l’enseignement de l’anglais. On note dans ce
cadre, le centre de langues américaines, le British Council et
AMIDEAST. Les inscriptions dans ces centres privés continuent de
s’accroitre au cours des dernières années et de nombreux centres de
langue anglaise ont connu une recrudescence de plus de 20% par an en
2005-2007 (Errihani, 2017). Par conséquence, des études récentes ont
montré que dans le futur, l’anglais pourrait entrer en concurrence sérieuse
avec le français surtout dans le domaine de l’éducation, de la science, de
la technologie, et les médias (Boukous, 2009; Buckner, 2011; Errihani,
2017).

126
4. L’hégémonie de l’Anglais dans le Monde
Parmi les dix premières langues utilisées sur Internet, l’anglais occupe la
première place avec environ 1 531 179 460 (25,9%) devançant ainsi le
français classé septième avec environ 431 503 032 utilisateurs (2,6%
(https://www.internetworldstats.com/stats7.htm - dernière mis à jour,
janvier 31, 2020). Les publications académiques sont aussi un domaine
avantageux favorisant la diffusion rapide et mondiale de l’anglais. Au
tournant du 20ème siècle, l’allemand, le français et l’anglais étaient les
trois langues dominantes dans la transmission du savoir scientifique
(Ammon, 1998). A titre d’exemple, l’allemand était dominant en
médecine, en biologie ou en chimie, le français en droit et en sciences
politiques, et l’anglais en économie politique et en géologie.
Progressivement, l’anglais a pris de l’ampleur sur le français et
l’allemand grâce à l’émergence des États-Unis en tant que
superpuissance économique et politique, en particulier, après la fin des
deux guerres mondiales. Au milieu des années 90, les taux en
pourcentage des revues internationales publiées en anglais sont revus à la
hausse pour atteindre les 90% et 82,5% dans les domaines des sciences
naturelles et ceux des sciences sociales et humaines. Benfield et Howard
(2000) ont démontré par la publication des statistiques, datant de la
période de (1980 et 1996), une élévation estimant à 72,2% à 88,6%, le
pourcentage des revues scientifiques médicales en anglais, tandis qu’une
forte baisse a été attestée dans les taux en pourcentage affichés par les
autres langues comme l’allemand (de 5,8% à 2,2%), le japonais (de 2,8%
à 1,8%) et l’espagnol (de 1,3% à 1,2%). « Aujourd’hui, nous nous
trouvons au moment probablement déterminant ou un modèle de
plurilinguisme réduit, marqué par une forte hégémonie de l’anglais, mais
plurilingue malgré tout, risque de passer au monopole de l’anglais »
(Hamel, 2013, p. 54).
Le phénomène de l’anglais comme première langue internationale
«Global English» a été considéré comme une menace pour la diversité
linguistique qui caractérise plusieurs pays en voie de développement ou
dont l’anglais est co-présent avec une première langue étrangère. Le
besoin de communication n’est pas la seule motivation responsable de ce
changement, d’autres raisons d’ordre historico-politiques ont pris la
forme de tentatives postcoloniales visant la promotion de l’anglais au
détriment des langues indigènes (Phillipson, 2009, 2017). L’ensemble de
ces actions ont été menées par la « United States Information Agency »,

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le « British Council » et les projets « English Language Teaching ». De
telles tentatives, d’après le même auteur, visaient à transformer
complètement des communautés multilingues en régimes monolingues
grâce à « l’impérialisme linguistique ». Pour Phillipson, il s’agit d’une
forme de « linguistique », similaire au racisme ou au sexisme, puisqu’il
s’agit d’une idéologie déployée pour légitimer le contrôle des
déséquilibres du pouvoir et de ressources. Skutnabb-Kangas (2000) met
en garde contre la politique de l’homogénéisation privilégiée au dépend
de la diversité linguistique. De plus, l’anglais est projeté comme la langue
qui répond le mieux aux défis de la société du 21ème siècle plus
préoccupée par le modernisme et l’avancée technologique qui envahit la
plupart de ses secteurs. Pour Skutnabb-Kangas, cette idéologie conduit à
la stigmatisation des cultures indigènes et de leurs langues, qui au fil du
temps, deviennent marginalisées et considérées comme des obstacles,
plutôt que des ressources, entravant la modernisation de la société. La
mondialisation est pour ainsi dire « un agent meurtrier» (Skutnabb-
Kangas, 2000, p. Xi).
D’autres travaux de recherches ont tenté d’étudier les attitudes des
étudiants à l’égard de l’anglais, en particulier, son impact sur la culture
locale et les langues autochtones. Malgré les préoccupations politiques,
idéologiques et linguistiques soulevées dans les propos des chercheurs
discutés ci-dessus, les attitudes des étudiants sont généralement
favorables au phénomène de l’anglais, langue internationale (ex.
Lasagabaster, 2004 ; Lai, 2001). Partant de ce constat, ces attitudes
positives à l’égard de la langue anglaise s’expliquent par l’exposition à
l’anglais, rendue facile et illimitée grâce aux multimédias et aux moyens
technologiques qui envahissent les foyers familiaux, les écoles et le
milieu extrascolaire de ces jeunes. Dans le même sens Fishman estime
que « la résistance attitudinale à l’anglais [...] devrait s’affaiblir à mesure
que les jeunes générations réussissent à se débarrasser de plus en plus des
idéologies puristes et exclusivistes que leurs parents et enseignants ont
formulées et adoptées au cours des luttes formatives pour la politique et
l’indépendance culturelle. » (Fishman, 1977, p. 164 – traduction de
l’anglais).
5. Problématique
Actuellement, le français et l’anglais sont présents au Maroc à des degrés
divers, dans les secteurs majeurs de la société comme l’éducation,

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l’économie et les médias. Ceci dit, la question qui se pose est de savoir si
le français maintient toujours son statut (première langue étrangère)
devant l’avancée de l’anglais
L’objectif de la présente étude est d’analyser les enjeux qui se présentent
à l’enseignement/apprentissage du français, première langue étrangère,
en présence de l’anglais, deuxième langue étrangère. Plus précisément,
cette étude examinera les attitudes des lycéens marocains à l’égard du
français et de l’anglais afin de mieux comprendre cet intérêt grandissant
envers l’anglais reconnu comme langue de la mondialisation. Le contenu
du questionnaire a été conçu selon la thématique suivante :(1) Quelles
sont les attitudes des lycéens marocains envers le français ?(2) Quelles
sont leurs attitudes envers l’anglais ? (3) quelle relation entre le type
d’enseignement (public vs. privé) et les attitudes des lycéens ? (4) Dans
quelle mesure l’anglais représente-t-il une menace pour le français ?
6. Méthodologie de Recherche
6.1 Contexte et participants
320 lycéens, inscrits en terminale, dont 166 filles et 154 garçons, relevant
de la préfecture de Rabat, ont pris part à cette enquête. Ils sont
équitablement répartis entre l’enseignement public (160) et
l’enseignement privé (160). Le type d’enseignement a été pris en
considération vu les conditions différentes qui caractérisent chaque type
en termes de qualité, de rendement et surtout d’égalité des chances.
6.2 Instrument
Pour répondre aux besoins de l’enquête, nous avons opté pour le
questionnaire à échelle Likert fréquemment utilisé pour une identification
plus nuancée des attitudes des participants. Nous avons élaboré 20
questions inspirées des recherches récentes sur la motivation et les
attitudes des étudiants envers l’apprentissage des langues étrangères
(Ushioda & Dörnyei, 2009; Yashima, 2009; Dörnyei, 2019). Nous avons
sollicité les commentaires de deux professeurs de linguistique et
didactique avant de distribuer le questionnaire. Nous l’avons ensuite
traduit en arabe pour rendre le contenu plus accessible aux enquêtés qui
ne maitrisent pas le français. Dans un souci de clarification et de
compréhension, la traduction arabe a été soumise à deux enseignants
d’arabe dont les recommandations ont abouti à des modifications au
niveau de la formulation des questions.

129
6.3 Collecte des données
L’étude a été menée sur une période de 2 mois (mars 2020 - avril 2020).
Nous avons sollicité l’aide de nos collègues pour distribuer le
questionnaire en partageant le lien électronique contenant le
questionnaire avec leurs élèves via le formulaire Google. Le même
processus a été adopté pour la collecte des réponses. Nous avons
également informé les élèves sur le protocole de confidentialité,
garantissant l’anonymat total, et nécessaire pour obtenir l’accord relatif à
leur participation à l’étude.
7. Résultats
La présentation des résultats est organisée en cinq sections. Dans la
première section, nous examinons les attitudes des étudiants envers les
deux cultures française et américaine. Le choix de la culture américaine
se justifie par le lien étroit entre la langue et la culture, de plus, la plupart
des travaux de recherche menés sur la motivation pour apprendre
l’anglais, ont choisi la culture américaine comme champ d’étude (ex.
Ryan, 2009 ; Dörnyei, & Taguchi, 2009). La deuxième section sera
consacrée aux attitudes envers la communauté francophone et la
communauté anglophone. La troisième abordera la motivation
instrumentale envers l’apprentissage des deux langues. L’analyse des
attitudes des élèves envers l’utilité des deux langues sur le plan
international fera l’objet de la quatrième section. En dernier lieu, la
discussion portera sur l’étude du rôle des deux langues dans la création
d’un modèle idéal de soi en langue étrangère.
7.1 L’intérêt pour les cultures française et américaine
Dans cette rubrique dédiée à la culture des deux pays, nous avons
demandé aux participants, sur une échelle allant de 1 à 5, de cocher la
case permettant de mesurer leur attitude envers les affirmations liées aux
deux cultures américaine et française. Les résultats obtenus indiquent que
plus des deux tiers des enquêtés ont une attitude favorable à l’égard des
deux cultures avec une très légère différence (76,5% pour la culture
française et 77% pour la culture américaine) (Tableau 1). Une petite
minorité (10 %) a exprimé son désintérêt total envers ces deux cultures. Il
ressort des pourcentages affichés que les deux cultures américaine et
française sont identiquement appréciées malgré la diffusion grandissante
de l’anglais.

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Tableau 1. L’intérêt pour la culture française et la culture américaine
Je suis tout Je ne suis Je ne suis pas
Je suis Je suis
Français à fait pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
1. J’aime la musique
70% 7% 12% 7% 4%
française.
2. Apprendre le français
est important pour s’ouvrir 67% 22% 3% 4% 4%
sur la culture française.
3. J’aime le cinéma
63% 15% 19% 3% 0%
français.
4. J’aime les programmes
43% 19% 20% 18% 0%
télévisés français.
60.75% 15.75% 13.50% 8% 2%
Moyenne
_________________________________
Je suis tout Je ne suis Je ne suis pas
Je suis Je suis
Anglais à fait pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
1. J’aime la musique
70% 7% 12% 7% 4%
américaine.
2. Apprendre l’anglais est
important pour s’ouvrir sur 66% 22% 4% 4% 4%
la culture anglophone.
3. J’aime le cinéma
62% 15% 19% 4% 0%
anglais.
4. J’aime les programmes
44% 18% 20% 18% 0%
télévisés anglais.
Moyenne 61% 16% 8% 2%
14%

7.2 Attitudes envers la communauté francophone et la communauté


anglophone
Dans la deuxième section, les élèves ont été interrogés sur leurs attitudes
vis-à-vis des communautés francophone et anglophone. La majorité des
élèves ont exprimé des attitudes positives à l’égard des deux
communautés avec 68,5 % en faveur de la communauté francophone et
66 % pour la communauté anglophone (Tableau 2). Par ailleurs, on note
que moins de la moitié des élèves ont une attitude favorable à l’égard des
Américains, tandis que plus de la moitié (56%) apprécient le peuple
français. Ceci-dit, aimer un pays ou admirer son peuple uniquement parce
qu’il est plus développé et plus avancé, comme c’est le cas des Etats-Unis
dans le cadre de notre recherche, n’est pas le seul critère de base.

131
Tableau 2. Attitudes envers la communauté francophone et la communauté anglophone
Je
suis Je
Je suis Je ne suis
tout à suis Je ne suis pas du
Français d’acco pas
fait neutr tout d’accord
rd d’accord
d’acc e
ord
5. J’aime les français. 16% 40% 18% 13% 13%
6. Les pays francophones jouent un
27% 43% 16% 10% 4%
rôle important dans le monde.
7. Les pays francophones sont
29% 45% 17% 5% 4%
avancés et développés.
8. J’adore les gens issus des pays
25% 48% 14% 6% 7%
francophones.
24.25 16.25
Moyenne 44% 8.50% 7%
% %
_________________________________
Je ne
Je suis tout Je suis suis
Je suis Je ne suis pas du
Anglais à fait d’acco pas
neutre tout d’accord
d’accord rd d’acco
rd
5. J’aime les américains. 37% 8% 44% 7% 4%
6. Les pays anglophones jouent un
74% 7% 15% 4% 0%
rôle important dans le monde.
7. Les pays anglophones sont
56% 26% 15% 3% 0%
avancés et développés.
8. J’adore les gens issus des pays
30% 26% 40% 4% 0%
anglophones.
49% 17% 29% 5% 1%
Moyenne

7.3 L’instrumentalité
La lecture des résultats enregistrés dans cette section centrée sur la
motivation instrumentale des élèves envers l’apprentissage de l’anglais et
du français, indique clairement que les élèves ont une attitude plus
favorable envers l’anglais (93%) par rapport au français (62%) (Voir
Tableau 3, ci-dessous). 100% des étudiants ont exprimé à l’unanimité
que l’apprentissage de l’anglais est avantageux pour un meilleur avenir
professionnel tandis que 96% ont affirmé que la maîtrise de l’anglais est
indispensable pour voyager et communiquer en dehors de son pays.
Trouver un bon emploi ou s’imprégner dans d’autres cultures étrangères
est tributaire d’une bonne maitrise de l’anglais selon les enquêtés ; ce qui
explique la motivation extrinsèque affichée par les données obtenues.

132
Tableau 3. Instrumentalité
Je suis tout Je ne suis Je ne suis pas
Je suis Je suis
Français à fait pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
9. Je pense que,
actuellement, la langue
25% 34% 18% 13% 10%
française est très utile dans
le monde.
10. La maitrise du français
est indispensable en cas de 25% 29% 27% 8% 11%
voyage hors du Maroc.
11. Apprendre le français
favorise une connaissance 21% 45% 25% 7% 2%
approfondie.
12. Apprendre le français
est important pour un
30% 39% 21% 7% 3%
meilleur avenir
professionnel.
25.25% 36.75% 22.75% 8.75% 6.50%
Moyenne
_________________________________
Je suis tout Je ne suis Je ne suis pas
Je suis Je suis
Anglais à fait pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
9. Je pense que,
actuellement, la langue
82% 15% 2% 1% 0%
anglaise est très utile dans
le monde.
10. La maitrise de l’anglais
est indispensable en cas de 89% 7% 1% 2% 1%
voyage hors du Maroc.
11. Apprendre l’anglais
favorise une connaissance 56% 22% 19% 3% 0%
approfondie.
12. Apprendre l’anglais est
important pour un meilleur 67% 33% 0% 0% 0%
avenir professionnel.
Moyenne 74% 19% 6% 2% 0%

7.4 Le contact international


L’étude de plus près des attitudes des élèves, quant à la valeur de
l’anglais dans la création d’un réseau relationnel d’une grande ampleur, a
révélé une haute appréciation des enquêtés avec un taux en pourcentage
estimé à (97%). Une légère baisse est à noter en considérant le nombre
des participants 77,5% qui privilégient le français comme moyen efficace
pour établir des contacts au niveau international (Tableau 4). Il convient
de conclure des résultats de ces deux dernières sections que l’anglais

133
demeure la langue privilégiée par les enquêtés pour approfondir
davantage leurs relations avec les gens d’autre pays toutes nationalités
confondues (natifs et anglophones).
Tableau 4. Le contact international
Je suis tout Je ne suis Je ne suis
Je suis Je suis
Français à fait pas pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
13. Apprendre le français
m’aidera à rencontrer des 30% 52% 13% 4% 1%
individus d’autres pays.
14. Apprendre le français
m’aidera à établir des
29% 48% 18% 4% 1%
relations avec des gens
d’autres pays.
15. Apprendre le français
m’aidera à communiquer
32% 43% 14% 7% 4%
avec des individus d’autres
pays.
16. Apprendre le français
m’aidera à faire
30% 46% 16% 4% 4%
connaissance avec des
individus d’autres pays.
Moyenne 47.25% 15.25% 4.75% 2.50%
30.25%
_________________________________
Je suis tout Je ne suis Je ne suis
Je suis Je suis
Anglais à fait pas pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
13. Apprendre l’anglais
m’aidera à rencontrer des 70% 30% 0% 0% 0%
individus d’autres pays.
14. Apprendre l’anglais
m’aidera à établir des
59% 37% 4% 0% 0%
relations avec des gens
d’autres pays.
15. Apprendre l’anglais
m’aidera à communiquer
56% 41% 4% 0% 0%
avec des individus d’autres
pays.
16. Apprendre l’anglais
m’aidera à faire
59% 37% 4% 0% 0%
connaissance avec des
individus d’autres pays.
Moyenne 61% 36% 3 0% 0%

134
7.5 L’idéal de soi en langue étrangère
Dans la dernière rubrique, il a été question de s’exprimer par rapport à
l’idéal de soi en langue étrangère, c’est-à-dire une représentation de
l’image idéale de soi inspirée de leurs espoirs, de leurs aspirations ou de
leurs souhaits personnels. De ce fait, être fortement motivé pour
apprendre une langue étrangère dépend en grande partie de la valeur
qu’occupe la langue cible dans la réalisation d’une image idéale de soi.
Psychologiquement, cela est imputé à notre désir de réduire l’écart entre
notre soi actuel et notre futur soi. Les enquêtés ont différemment exprimé
leurs avis par rapport au choix de la langue pour visualiser leur propre
idéal de soi, (77 %) ont priorisé l’anglais contre (47,5 %) uniquement qui
ont favorisé la présence du français dans leur vie future (Tableau 5). Il
convient de préciser à ce stade que presque tous les participants ont
approuvé à l’unanimité l’utilité de l’anglais dans leurs projets d’avenir et
dans la réalisation de leurs rêves. Il ressort de ces résultats qu’aux yeux
des participants, l’apprentissage de l’anglais offre les meilleures
perspectives pour les jeunes d’aujourd’hui qui aspirent constamment aux
changements pour une vie meilleure.

135
Tableau 5. L’idéal de soi en langue étrangère
Je suis tout Je ne suis Je ne suis
Je suis Je suis
Français à fait pas pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
17. Le français est
nécessaire pour mes projets 27% 34% 23% 9% 7%
d’avenir.
18. Je m’imagine parler
parfaitement français, à
16% 27% 30% 20% 7%
chaque fois que je pense à
ma future carrière.
19. Mes rêves dépendent en
grande partie de ma parfaite 21% 25% 36% 13% 5%
maitrise du français.
20. Mes pensées sur l’avenir
évoquent toujours l’utilité 18% 22% 32% 21% 7%
du français.
Moyenne 20.50% 27% 30.25% 15.75% 6.50%
_________________________________
Je suis tout Je ne suis Je ne suis
Je suis Je suis
Anglais à fait pas pas du tout
d’accord neutre
d’accord d’accord d’accord
17. L’anglais est nécessaire
74% 19% 7% 0% 0%
pour mes projets d’avenir.
18. Je m’imagine parler
parfaitement l’anglais, à
56% 15% 19% 6% 4%
chaque fois que je pense à
ma future carrière.
19. Mes rêves dépendent en
grande partie de ma parfaite 33% 37% 30% 0% 0%
maitrise de l’anglais.
20. Mes pensées sur l’avenir
évoquent toujours l’utilité 44% 30% 19% 3% 4%
de l’anglais.
Moyenne 52% 25% 19% 2% 2%

7.6 Comparaison des variables genre (fille, garçons) et type


d’enseignement
Sur la base d’une technique de mesure largement utilisée dans l’étude des
attitudes linguistiques (Oskamp, 1991), un indice global d’attitude envers
chacune des deux langues a été obtenu en additionnant les scores
correspondant aux 20 éléments du questionnaire, afin de déterminer
l’impact de la variable du genre et celle du type d’enseignement sur la
nature des attitudes exprimées. Ainsi, en analysant les attitudes des élèves
envers les deux langues en fonction de la variable genre et du type
d’enseignement, le test a révélé que la variable genre et le type

136
d’enseignement ne représentent pas un facteur significatif dans les
attitudes des étudiants envers le français car la valeur « p » était
supérieure à 0,01 (type d’enseignement, p = 0,118 ; genre, p = 0,102).
Inversement, la variable genre et le type d’enseignement sont deux
facteurs significatifs dans l’attitude des étudiants envers l’anglais en
considérant la valeur « p » qui est inférieure à 0,01 (type d’enseignement,
p = 0,0013 ; genre, p = 0,0012).

137
8. Conclusion
Cette étude s’est donnée pour objectif d’explorer les attitudes des lycéens
marocains à l’égard du français, supposée être la première langue
étrangère du pays, et à l’égard de l’anglais, deuxième langue étrangère du
pays ayant un statut de langue mondiale. Les résultats obtenus ont
clairement démontré une grande motivation envers l’apprentissage de
l’anglais contre une régression plus prononcée vis-à-vis du français. Bien
que les attitudes des lycéens demeurent favorables envers le français en
considérant leurs opinions positives sur les Français et les communautés
francophones, l’anglais occupe toujours la position privilégiée quant à
leurs aspirations professionnelles et également dans leurs représentations
projetées de l’idéal de soi. Autrement dit, la génération d’aujourd’hui
perçoit l’anglais comme la langue qui détient les clés d’un futur prospère
dans leur pays d’origine comme dans les autres pays toutes nationalités
confondues. Les caractéristiques linguistiques de l’anglais sont loin de
constituer la principale cause de cette attirance grandissante, mais on peut
avancer l’hypothèse relative à l’influence de la mondialisation, faisant de
l’anglais la langue des affaires internationales, des télécommunications et
des voyages.
Certes, le français maintient toujours son statut de langue privilégiée à
l’échelle nationale dans les domaines clés de la société et en particulier
dans la politique linguistique éducative du pays, mais l’avancée
incessante de l’anglais pourrait, dans le futur, avoir de sérieuses
implications sur l’avenir du français au Maroc. Selon Ferguson, « parmi
les conditions nécessaires à la promotion réussie d’une lingua franca ...
figurent (1) l’absence de résistance idéologique à ce qui est promu, et (2)
la perception populaire selon laquelle il y’a un certain avantage personnel
à tirer de l’adoption ». (Ferguson, 2006, p. 130). Les résultats de
l’analyse des données de cette étude confirment le bien-fondé de la
suprématie des attitudes positives envers l’anglais au dépend du français.
A vrai dire, le système éducatif marocain a subi, lui aussi, un changement
menant à une réorientation vers un enseignement anglophone. Cela est
attesté dans la création en 2014 des filières scientifiques, au cycle
secondaire qualifiant, faisant de l’anglais la langue de l’enseignement, le
nombre croissant des universités et instituts d’enseignement supérieur
anglophones (ex. l’université Al Akhawayn à Ifrane, International
Institute for Higher Education in Morocco (IIHEM) à Rabat, The
University of Sunderland and Cardiff Metropolitan University à

138
Casablanca, Rabat et Tanger; et The University of New England à
Tanger) ou celles qui adoptent, progressivement, un programme d’études
bilingue, français et anglais (ex. l’Université Internationale de Rabat
(UIR), Private International Institute of Management and Technology
(PIIMT) à Rabat et à Casablanca). De plus, Certains départements
universitaires de l’enseignement supérieur public proposent également
des cours en anglais et encouragent les étudiants à rédiger leurs thèses
doctorales en anglais. Dans le même cadre de s’ouvrir sur le monde
anglo-saxon, l’enseignement universitaire marocain marquera une
rupture avec le système LMD (licence en 3 ans), en vigueur depuis 2003
et inspiré du modèle européen, pour renouer dès la rentrée prochaine avec
le modèle du « Bachelor » (licence à 4ans). La grande nouveauté de ce
système est la priorité donnée à l’apprentissage des langues étrangères et
dont l’enseignement de l’anglais sera doté d’un statut au même titre que
les matières fondamentales. Toujours dans l’optique d’améliorer la
mobilité internationale, le ministère marocain de l’enseignement
supérieur envisage d’adopter, pour la première année, appelée aussi
année de transition, un programme d’études élaboré par le Centre de
Carrière (CC) sous l’affiliation de L'Agence des États-Unis pour le
Développement International (USAID).
Pour conclure, il est donc possible d’avancer l’idée que le pouvoir des
politiques linguistiques de l’Etat marocain et les efforts de l’Institut
français du Maroc, actuellement le plus grand centre culturel français
dans le monde, demeurent fortement limités par une variété de facteurs
sociaux, politiques et économiques qui continuent de favoriser la
croissance de l’anglais au Maroc. À moins que de nouvelles politiques
visant à changer les attitudes des gens ne soient élaborées, il est très
probable que le français perdra son statut de deuxième langue au Maroc
dans les prochaines décennies.
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