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1 - Propriétés optiques

Théorie du champ de ligands

I. Approche solide : saphirs et impuretés colorées


1. Composés de substitution ……………..…………………………………………………………………….. 3
2. Métaux de transition, propriétés…………………..………………………………………………….……. 4
3. Champ de ligands et conséquences……………………………………………………………….…… 6
4. Origine de la couleur, spectres optiques……………………………………………………..……… 7
5. Un peu d’exercice… ………………………………………………………………………………………….... 9

II. Approche moléculaire : chimie de coordination


1. Complexes de coordination …….. ………………………………………………………...…………… 10
2. Comment moduler l’arc-en-ciel ? ………………………………………………………...…………… 10
3. Influence de la géométrie du complexe - Coordinence, complexes et géométrie :
complexes hexacoordinés et tétracoordinés………………………………………………………..11
4. Influence du métal
a. électronégativité, rayon, charge………………………………………..…………………………… 13
b. degrés d’oxydation………………………………………………………………………………………… 13
c. critère HSAB (Hard and Soft Acid Base, Pearson) et conséquences……..………… 15
d. un peu d’exercice…..…………………………………………………………………………………………16
5. Influence des ligands
a. ligands mono et polydentates…………………………………………………………...……………17
b. série spectrochimique ……………………………………………………………………….……….…. 18
c. Nature de la liaison métal-ligand …………………………………………………………...…….…19
d. série spectrochimique et théorie du champ de ligands …………………………..……. 21
e. Diagramme d’orbitales moléculaires : modèle du recouvrement angulaire…… 25
f. Un peu d’exercice…………………………………………………………………………………………… 28
6. Stabilité des complexes inorganiques
a. force du champ de ligands : complexes haut spin/ bas spin ;
énergie de stabilisation en champ cristallin (ESCC)……………………………………….... 28
b. Evaluer la force du champ de ligands…………………………………...…………………………. 29
c. Un peu d’exercice… ……………………………………………………………………………………….… 30
d. Déterminer la géométrie préférentielle en calculant la ESCC………………………...... 30
7. Influence de la géométrie et de la force des ligands sur le magnétisme
du complexe……………………………………………………………………………………………….............. 34

III. Conclusion…………………………………………………………………………………………….……………….. 36

IV. Les points essentiels ………………………….…………………………………………..………………….. 37

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Ouvrages à consulter à la bibliothèque
Théories du champ cristallin et du champ de ligands, propriétés optiques
(cours n°1 + TD n°1 + Tut Couleurs)

1. Inorganic Chemistry, K.F. Purcell & J.C. Kotz, Holt-Saunders Int. Ed., 1977

Métaux de transitions et propriétés 527


Théorie du champ cristallin 532
Ligands et série spectrochimique 536
Modèle du recouvrement angulaire 543
Energie de site préférentiel et stabilisation 551
Effet Jahn-Teller 553
VSEPR 75

2. Chimie Inorganique : Théories et applications, G. Wulfsberg, Dunod, 2002


Théorie du champ cristallin 427
Principe HSAB (Pearson) 239
Ligands et série spectrochimique 442
Orbitales moléculaires 610
Energie de site préférentiel et stabilisation 455
VSEPR 127

Sites internet pouvant être consultés (les meilleurs…)


Théories du champ cristallin et du champ de ligands, propriétés optiques
(cours n°1 + TD n°1 + Tut Couleur)

Classification périodique et propriétés des éléments chimiques


http://www.webelements.com/webelements/elements/text/periodic-table/comp.html

Chimie de coordination, métaux de transition


http://chemistry.semo.edu/crawford/ch186/lectures/ch20/index.html
http://wwwchem.uwimona.edu.jm:1104/courses/IC10Kout.html
http://www.chemguide.co.uk/inorganic/complexmenu.html#top (chapitres 1 à 4)

Chimie de coordination, métaux de transition


http://www.univ-lemans.fr/enseignements/chimie/01/deug/CHIM204B.html (chapitres 1 et 2)

Chimie de coordination, recouvrement angulaire, couleurs et magnétisme


http://www-chimie.u-strasbg.fr/~lcmes/mci/mci.htm

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Les matériaux inorganiques sont en général très colorés. L’origine de ces couleurs est associée dans la
plupart des cas à des transitions ou des transferts électroniques provoqués par une excitation lumineuse,
radiative ou thermique. Cependant, on devra distinguer les cas où la transition électronique se produit à
l’échelle moléculaire (transitions d-d et transferts de charge) ou à l’échelle du solide cristallin (centres
colorés et semi-conducteurs, cf. cours SN 3 et 4).

I. Approche solide : saphirs et impuretés colorées


1. Composés de substitution
On s’intéresse ici aux saphirs et au rubis. Le terme saphir vient de deux origines probables : du grec
sappheiros (« pierre de couleur bleue ») ou de l'hébreu sappir (« la plus belle chose »). L'utilisation du
mot saphir seul est réservée à la variété de couleur bleue mais il existe des saphirs de couleur rose,
jaune, orange, violette, verte, etc...

A première vue, ces pierres précieuses et semi-précieuses diffèrent par leur couleur et bien
évidemment par leur prix ! En effet, pour une pierre de 1,5 carat (soit 0.3 g), le rubis, rouge, est
presque 1.5 fois plus cher qu’un saphir bleu… Comme toujours, ce qui est rare est cher… et la couleur
est une référence en matière de ‘rareté’ pour ces pierres précieuses et semi-précieuses. D’autres
critères feront le prix comme le poids, la transparence, les défauts, etc…
En réalité, elles sont très semblables car elles présentent la même structure cristalline : le corindon. Il
s’agit d’un réseau hexagonal compact d’oxygène O2- dans lequel tous les sites octaédriques sont
occupés par des ions trivalents d’aluminium Al3+ (groupe d’espace R-3c). Le corindon est donc une
alumine, semblable à celle utilisée en chromatographie, qui à l’état pur est incolore.
Une microanalyse des saphirs et rubis montre que quelques pourcents des ions aluminium sont
substitués par d’autres ions métalliques. On parle d’impuretés colorées.

Structure Corindon Al2O3

Substitution des Al3+ par Mn+


Cation d’un métal de transition Mn+
Corindon = incolore
0.1 - 1% d’ions métalliques

Les ions métalliques responsables des différentes couleurs de saphirs sont invariablement des
métaux de transition Mn+. Ces éléments se situent au centre du tableau de Mendeleev, dans ce que
l’on définit comme le bloc d. Cela signifie que leur couche de valence est une couche d (orbitales
atomiques de type d). Leur configuration électronique est donc de la forme [gaz rare]s2d n , avec n,
le nombre d’électrons de valence variant de 1 à 10.
De même, on définit le bloc s (métaux alcalins et alcalino-terreux : sodium, potassium, calcium,
barium…) et le bloc p (non-métaux comme oxygène, carbone, azote, halogènes … et métaux ou
métalloïdes comme étain, bismuth, tellure, etc…).

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Attention cependant ! Tous les ions ne conviennent pas… La substitution des ions obéit en effet à
deux règles : il faut que taille et charge de l’ion impureté soient en adéquation avec celles de l’ion
substitué.
Ainsi, si l’ion de substitution est trop gros, il ne peut pas entrer dans le réseau compact d’oxygènes
sans le déformer. A l’inverse, s’il est trop petit, il ne peut pas être retenu par interactions ioniques
avec le réseau. La substitution n’est possible que s’il n’y a pas plus de 15% d’écart entre les deux
rayons. Dans le cas de l’aluminium trivalent, le rayon devra donc être compris entre 0.57 et 0.77 Å.
De même, si l’ion n’est pas trivalent (charge 3+ comme l’aluminium), il y aura un défaut ou un excès
de charge qui devront être compensés par l’addition d’autres ions (cations positifs ou anions
négatifs) pour conserver la neutralité de l’édifice ionique. C’est ce qu’on observe pour le saphir où
les ions colorants sont le fer divalent et le titane tétravalent. La charge globale substituée est donc
bien de trois.

2. Métaux de transition, propriétés


On donne, en angströms, Å, les rayons atomiques des métaux de la première série de transition ainsi
que les rayons ioniques des ions di- et trivalents.

On voit bien que les ions trivalents définis comme impuretés colorées des saphirs et rubis ont des
rayons qui conviennent à la substitution de l’aluminium dans le corindon.
On notera que le rayon de l’ion divalent est nettement inférieur à celui de l’atome, alors que la
différence entre l’ion di et trivalent est moins marquée. Ceci peut s’expliquer simplement si l’on
regarde la première énergie d’ionisation.

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Plus on se déplace vers la droite du tableau périodique, plus les couches de valence sont remplies et
s’approchent de la configuration du gaz rare. Il est alors de plus en plus difficile de ioniser un atome
et on observe des valeurs croissantes jusqu’au pic du gaz rare, valeurs qui retombent quand on
passe dans la couche de valence supérieure.
Pour les métaux de transition, on observe une valeur faible et surtout presque constante de la
première énergie d’ionisation. On se souvient en effet que la configuration électronique de ces
éléments est s2d n . La première ionisation revient donc à arracher un électron du niveau ns supérieur
en énergie au niveau (n-1)d, et ce pour tous les éléments de la série. Cette opération est peu
énergétique car elle ne ‘vide’ que la moitié de l’orbitale atomique s et ne crée pas ainsi de grande
instabilité. Enfin, on comprend que le rayon soit nettement diminué pour l’ion divalent puisqu’on a
touché à une couche de valence supérieure. A l’inverse, le rayon de l’ion trivalent sera moins modifié
puisqu’on touche cette fois à des électrons de la couche d.

Le corindon (alumine utilisée en chimie organique pour les colonnes de séparation) est incolore
quand sa structure cristalline ne contient pas d’impuretés. Ce sont donc bien les ions en substitution
qui sont à l’origine de la couleur des saphirs et du rubis.
L’aluminium, élément du bloc p, a une configuration électronique fondamentale 3s23p1. Dans sa
forme ionique trivalente, il perd donc tous ses électrons de valence et atteint la configuration du gaz
rare Néon.
Dans le rubis, l’impureté colorée est le chrome. Sa configuration électronique fondamentale est 4s
2
3d 4, et sous sa forme ionique trivalente devient 4s 03d 3. Il reste donc trois électrons dans la
couche de valence n = 3. Ils sont à l’origine de la couleur.
Cependant, bien que l’existence d’électrons sur la couche de valence soit nécessaire, elle n’est pas
suffisante. Il faut aussi la présence d’orbitales atomiques vides, accessibles en énergie (ou du moins
dont l’énergie de saut est de l’ordre d’une longueur d’onde du visible) et de symétrie compatible.
Ici, la transition électronique se produit entre orbitales d du chrome et est à l’origine de la couleur
rouge du rubis.

Les orbitales atomiques d sont au nombre de 5. Elles sont définies par quatre lobes de signe opposé
deux à deux.

On peut distinguer les orbitales axiales, dz2 et dx2-y2, qui pointent directement sur les axes d’un repère
cartésien ; et les orbitales diagonales, dxy, dxz, dyz, qui pointent entre les axes du repère.
Energétiquement, dans un environnement parfaitement sphérique (plus haute symétrie possible),
toutes les orbitales sont dégénérées, ie. elles ont la même énergie.

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On a vu que le corindon est un empilement de plans d’oxygènes et de plans d’aluminium. Chaque
aluminium est donc entouré de six oxygènes (premiers voisins) répartis en deux triangles de part et
d’autre du plan de l’aluminium. Cet arrangement compact des oxygènes, appelés ligands, définit
alors un environnement ou champ octaédrique (groupe de symétrie ponctuelle Oh). C’est le champ
de ligands.

3. Champ de ligands et conséquences


Les ligands, O2- dans le cas du rubis, ont des paires d’électrons sur leur couche de valence. Dans la
théorie du champ cristallin (CFT : Crystal Field Theory), ils sont assimilés à des charges négatives
ponctuelles. Le métal, Cr3+ dans le cas du rubis, possède également des électrons sur sa couche de
valence (3d 3). Ainsi, lorsque les ligands entourent le métal dans un environnement compact, il y a
répulsion entre les électrons des ligands et ceux du métal : les orbitales d sont déstabilisées (E > 0).

Dans un environnement hypothétique idéalement sphérique (plus haute symétrie possible), toutes
les orbitales d ressentent la même répulsion e-/e- et sont déstabilisées de la même façon, elles
restent dégénérées, ie. ont la même énergie.
Cependant, on a vu que pour le corindon, l’empilement compact correspond à une symétrie
octaédrique : les orbitales d ne ressentent alors pas les ligands de la même façon. Il y a alors levée
de dégénérescence, ie. l’abaissement de la symétrie particularise les orbitales.
Les lobes des orbitales axiales, dz² et dx²-y² pointent exactement sur les six ligands (placés par
convention sur les axes du repère cartésien). L’interaction électrostatique répulsive e-/e- de ces
orbitales avec celles des ligands est alors maximale et conduit à un niveau doublement dégénéré eg,
plus déstabilisé encore que dans la symétrie sphérique.
Les trois orbitales d diagonales, dxy, dxz, dyz, ont des orientations à mi-chemin des ligands.
L’interaction répulsive est alors moins forte que dans la symétrie sphérique et conduit à un niveau
triplement dégénéré t2g.

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Les désignations eg et t2g proviennent du fait que les orbitales moléculaires formées ont
respectivement les symétries Eg et T2g dans l’octaèdre. Ces notions seront développées un peu plus
loin.
Par convention, la différence d’énergie entre les niveaux eg et t2g est désignée par ∆o, exprimée en cm-1
ou en eV. Par rapport au niveau d’énergie des orbitales d dans le champ idéal sphérique (référence), le
niveau t2g est abaissé de 0.4∆ο tandis que le niveau eg est augmenté de 0.6∆ο.

L’énergie ∆ο, appelée également valeur du champ (ici octaédrique), est de l’ordre de quelques
kilojoules par mole (quelques eV), c’est-à-dire proche de l’énergie quantique hν des photons du
spectre visible.
Les photons d’énergie exactement égale à ∆ο seront donc absorbés par le métal et créeront des
transitions électroniques d-d entraînant un peuplement des niveaux d’énergie élevée.

On voit ainsi que la présence d’électrons sur la couche de valence d est une condition nécessaire au
phénomène optique (par comparaison avec le corindon incolore) mais elle n’est pas suffisante. Il faut
aussi la présence d’orbitales moléculaires vides, accessibles en énergie (ou du moins dont l’énergie
de saut est de l’ordre d’une longueur d’onde du visible) et de symétrie compatible.

On voit sur le diagramme d’énergie des orbitales d du chrome que la transition électronique se
produit entre orbitales d et est à l’origine de la couleur rouge du rubis.

Ce phénomène, à l’origine de nombreuses colorations rencontrées dans les solides est décrit par la
théorie du champ cristallin (CFT) et la théorie du champ de ligands (LFT : Ligand Field Theory).

4. Origine de la couleur et spectres optiques


Le spectre d’absorption peut être relié à la couleur. En effet, on peut calculer la longueur d’onde
absorbée par les relations :
chN A
∆ = hν et λ=

avec c, la vitesse de la lumière (m/s), h la constante de Planck et NA le nombre d’Avogadro (mol-1).
Si on superpose des faisceaux lumineux, la résultante est additive.
La lumière blanche peut être décomposée par un prisme en une suite continue de longueurs d’onde.
Sur une feuille de papier noir, la résultante des trois couleurs primaires additives (rouge, vert bleu)
donne du blanc.

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En revanche, la couleur d’une peinture vient du fait qu’une partie de la lumière (blanche) visible est
absorbée par un pigment. Elle résulte donc de la soustraction de certaines longueurs d’onde du
spectre visible.
La couleur obtenue avec un mélange de pigments sera donc appelée un mélange soustractif. Le
mélange des trois couleurs primaires soustractives (magenta, jaune, cyan) absorbant chacune 1/3
du spectre (respectivement vert, bleu, rouge), donne du noir.

On observe alors que si l’on retire, ie. absorbe, l’une des couleurs primaires soustractives, le mélange
des deux couleurs restantes correspond à la couleur observée, qui est une couleur primaire additive !
Ainsi, le mélange du magenta et du cyan, qui résulte de l’absorption du jaune, donne du bleu. Le
jaune et le bleu sont dits complémentaires. De même, le magenta et le vert, le cyan et le rouge.

Dans le cas du rubis, l’énergie lumineuse absorbée  pour exciter l’électron d du Cr3+ est la longueur
d’onde du cyan, 500 nm. La couleur complémentaire observée est donc le rouge.
Le diagramme chromatique établi en 1931 par la Commission Internationale de L’Eclairage (CIE) a
permis de rationaliser la notion de couleur. Les notions de colorimétrie seront développées dans le
chapitre 3, électrons piégés dans les solides (SN).

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5. Un peu d’exercice…

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II. Approche moléculaire : chimie de coordination
1. Complexes de coordination
Pour faire un lien avec la chimie organique, on peut noter que l’ion métallique Mn+ est un acide de
Lewis qui peut réagir avec les bases de Lewis que sont les ligands. Les interactions sont alors du
type datif et peuvent s’expliquer par la théorie du lien de valence (VSEPR).
Cependant, la structure cristalline du rubis est faite de quelques ions métalliques Cr3+ insérés dans
des sites octaédriques d’un cristal ionique constitué d’oxydes O2-. Les interactions sont alors
clairement du type ionique et trouvent une explication par la théorie du champ cristallin.

A l’échelle moléculaire, c’est-à-dire pour des molécules finies dénommées complexes de


coordination, le cation métallique central Mn+ est entouré de ligands soit chargés négativement
(anions Lm-) soit neutres mais porteur d’au moins une paire libre (L). Il arrive même parfois que le
métal soit non chargé ! Les interactions ne peuvent donc plus être considérées comme purement
ioniques ou purement datives. Elles peuvent être expliquées par une évolution des deux précédentes
théories : la théorie du champ de ligands.

2. Comment moduler l’arc-en-ciel ?


On sait désormais que la couleur des saphirs et des complexes de coordination est due à une
absorption d’énergie ∆o du visible qui correspond à une transition électronique entre deux niveaux
d. On comprend donc que la modulation de la couleur passera par la modulation des répulsions
électroniques à l’origine de leur levée de dégénérescence.

Plusieurs paramètres peuvent ainsi être modifiés. Ainsi, l’arc-en-ciel de saphirs provient d’ions
métalliques différents pour un champ de ligands identique. De la même façon, pour un même ion
métallique, les couleurs seront différentes selon la nature des ligands et/ou selon leur nombre
(coordinence) ou leur arrangement (géométrie) autour de l’ion.

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3. Influence de la géométrie du complexe
Dans tout ce qui précède, on n’a rencontré que des complexes octaédriques. Or, le nombre et la
position des ligands peuvent être très variables. Cependant, les géométries rencontrées obéissent
souvent à des règles classiques de chimie (stabilité, encombrement, …) et certaines sont plus
communes que d’autres.

a. Coordinence, complexes et géométrie : complexes hexacoordinés et tétracoordinés


En chimie du solide et en chimie de coordination, on modélise les édifices par des empilements
compacts ou semi-compacts de sphères dures non interpénétrées. On définit alors la coordinence
qui donne le nombre de plus proches voisins du métal et qui peut prendre des valeurs de 2 à 12.
Pour chaque coordinence, on peut définir une ou plusieurs géométries, qui pourront être
déterminées en appliquant la VSEPR (l’hybridation du métal induit la géométrie autour de lui).
Chacune de ces géométries est décrite par un groupe d’espace.

La coordinence 6 peut donner lieu à trois géométries, mais seuls l’octaèdre (Oh) et l’octaèdre
déformé (D4h) existent. La levée de dégénérescence des OA d du métal est naturellement différente
selon la géométrie du champ de ligands.

Pour expliquer le diagramme d’OA d dans l’octaèdre déformé, on peut partir de la première levée de
dégénérescence dans l’octaèdre régulier qui conduit aux deux niveaux : t2g et eg.

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Dans l’octaèdre déformé (D4h), on éloigne les ligands situés selon l’axe z. En conséquence, les
répulsions OA d/ligands sont moins fortes selon cette direction et les OA de composante z (dz², dxz,
dyz) sont moins déstabilisées, leur niveau baisse. Puisque l’énergie totale est conservée, les OA de
composantes x et y sont augmentées d’autant.
Les transitions d-d sont plus énergétiques : la longueur d’onde absorbée diminue vers le bleu et
l’ultra-violet (hypsochrome).
La coordinence 4 conduira au champ tétraédrique (Td) et au plan carré (D4h).

Pour le plan carré, il suffit de reprendre le diagramme de l’octaèdre déformé précédent et d’envoyer
les ligands de l’axe z à l’infini. Les OA de composante z sont encore plus fortement stabilisées.
Pour le tétraèdre, on voit que les orbitales diagonales subissent davantage que les orbitales axiales
les répulsions électrostatiques des ligands. On observe alors les deux niveaux d’énergie respectifs t2
et e. Les ligands ne pointant pas directement sur les OA d, les énergies de déstabilisation sont moins
importantes que pour l’octaèdre. Le champ de ligands ∆t est faible, quelque soit le ligand. La
transition d-d est donc moins énergétique, on se déplace vers les fortes longueurs d’onde (rouge et
infrarouge, effet batochrome).
b. Diagramme d’orbitales moléculaires
Ainsi, la coordinence et la géométrie ont impact direct sur la levée de dégénérescence des OA d du
métal et donc sur les propriétés physico-chimiques du complexe. On peut observer les différents
diagrammes d’orbitales moléculaires suivants :

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4. Influence du métal
Commençons par l’influence du métal. Les facteurs à prendre en compte sont son électronégativité,
sa charge et sa taille.
a. Electronégativité, charge et taille
L’électronégativité des métaux de transition est faible (1.10 à 1.70), ce sont des acides de Lewis. Elle
augmente légèrement avec le nombre d’électrons d : pour la première série de transition, on trouve
les valeurs suivantes :
Sc Ti V Cr Mn Fe Co Ni Cu Zn
1.20 1.32 1.45 1.56 1.60 1.64 1.70 1.75 1.75 1.66

Ainsi, plus l’électronégativité augmente, plus la répulsion électrons d/ligands augmente, provoquant
ainsi une augmentation de la valeur du champ de ligands ∆o.

Les interactions cation/ligands augmentent avec la charge du cation métallique. Les distances
interatomiques étant plus courtes, les répulsions entre électrons sont plus élevées. De nouveau, la
valeur du champ est plus élevée.

De même, lorsque le rayon ionique diminue, les ligands peuvent, dans une certaine limite (répulsions
ligand/ligand), se rapprocher du cation et provoquer ainsi une augmentation de la valeur du champ.

Enfin, si l’on regarde les éléments de la deuxième et troisième série de transition, on constate que les
valeurs de champ sont toujours fortes. On ne peut cependant invoquer ni l’électronégativité
(toujours plus faible que celle des éléments de la première série), ni la charge (on suppose que l’on
compare des ions de charge égale), ni la taille (toujours plus élevée que celle des éléments de la
première série). On doit alors considérer la charge effective Z* du cation. En effet, ces éléments
possèdent des électrons internes (couches d et/ou f) qui n’écrantent que faiblement et induisent
ainsi un Z* élevé (règles de Slater). On revient donc à une attraction cation/ligands plus forte
conduisant à une répulsion forte.

b. Degrés d’oxydation
On voit que le degré d’oxydation (= la charge) de l’ion sera un paramètre déterminant dans la
valeur du champ ∆o.
Quels seront les degrés d’oxydation les plus fréquents pour les métaux de transition ?
Contrairement aux éléments des blocs s et p pour lesquels un ou deux degrés d’oxydation existent
(+I pour les alcalins, +II pour les alcalino-terreux, +III, pour l’aluminium, +IV pour le carbone, -II pour

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les chalcogènes…), les éléments de transition peuvent prendre de nombreux degrés d’oxydation
par pertes successives de leurs électrons s et d.

Comme on l’a vu précédemment, il n’est pas très coûteux en énergie de perdre les deux électrons
de la couche supérieure s. Tous les éléments présentent donc un degré d’oxydation +II.
Dans la partie gauche de la série (du Scandium au Manganèse), les éléments perdent facilement
leurs électrons d pour atteindre la configuration du gaz rare précédent et satisfaire ainsi à la règle
de l’octet.

A l’inverse, dans la partie droite de la série (du Fer au Zinc), il est de plus en plus difficile d’arracher
des électrons à la couche d à moitié remplie.
On a fait apparaître en rouge les degrés d’oxydation les plus stables pour chacun des éléments de
la première série de transition. Lorsque l’on regarde la configuration électronique et la répartition
des électrons dans les orbitales atomiques (OA) en champ octaédrique (t2g/eg), on constate que
cette stabilité peut être reliée directement au remplissage des OA. En effet, pour chacun, les deux
jeux d’OA, t2g et eg, sont peuplés de façon identique.
Il n’y a alors pas de différence de symétrie et d’énergie entre les OA, différences qui devraient
résulter en une levée de dégénérescence supplémentaire. La densité des électrons d est alors
isotrope et les interactions électrostatiques sont les mêmes pour toutes les OA.

Pour les premiers éléments de la série de transition, les degrés d’oxydation sont très élevés et
confèrent à l’ion la configuration du gaz rare.

La première conséquence est que ce sont des ions puissamment oxydants (gourmands en
électrons). On reconnaîtra notamment le permanganate et le dichromate de potassium, utilisés en
chimie organique pour oxyder des alcools ou des oléfines.
Pour la même raison, ces ions sont des acides de Lewis extrêmement forts. En effet, leurs OA d sont
vides mais accessibles en énergie et peuvent interagir avec les paires libres de bases de Lewis.
Il en résulte que les complexes hexaaqua et hydroxydes de ces éléments n’existent pas de façon
stable et évoluent spontanément en oxydes. En effet, un des doublets de l’oxygène du ligand H2O
ou HO- est attiré par les OA d du métal et forme une double liaison M=O, en libérant un proton.

Une conséquence de l’acidité des cations métalliques se rencontre lorsqu’on étudie leurs complexes
aqueux. En effet, lorsqu’on met un sel métallique (idéalement un chlorure) en solution dans l’eau, il se
forme le complexe hexaaqua :
FeCl3.6H2O + H2O (solvant) → [Fe(H2O)6]Cl3 + H2O

Cependant, comme on l’a vu précédemment pour les DO les plus élevés, les cations métalliques sont
très acides et attire les doublets électroniques des ligands oxygénés, comme l’eau. Ce faisant, des
protons sont libérés et acidifient fortement la solution. On a alors la suite de réactions :

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[Fe(H2O)6]Cl3 + H2O (solvant) → [Fe(OH)(H2O)5]Cl2 + H3O+ + Cl-
[Fe(OH)(H2O)5]Cl2 + H2O (solvant) → [Fe(OH)2(H2O)4]Cl + H3O+ + Cl-
[Fe(OH)2(H2O)4]Cl + H2O (solvant) → [Fe(OH)3(H2O)4] + H3O+ + Cl-

Toutes les réactions étant équilibrées, toutes les espèces sont en présence dans la solution. Pour
empêcher la neutralisation des espèces aqua, il faut donc se placer en milieu acide fort et déplacer
ainsi les équilibres dans le sens inverse. On choisira un acide minéral (en général aqueux) et dont le
contre ion ne peut se complexer, typiquement, l’acide nitrique HNO3 sera préférable à l’acide
chlorhydrique HCl, NO3- étant un mauvais ligand à l’inverse de Cl-.
Le complexe [Fe(OH)3(H2O)3] est le complexe de charge nulle. A partir de cette espèce, des
oligomères se forment et précipitent (polymérisation inorganique). Il n’y a donc a priori pas de
neutralisation ultérieure. (cf. cours Chimie douce, SN)

Enfin, on pourra s’étonner que le cuivre existe, de façon stable, au degré d’oxydation +I, comme
l’argent ou l’or (même colonne du tableau périodique). Cependant, si l’on regarde leur configuration
électronique s2d 9, on peut comprendre que l’atome gagne en stabilité à compléter sa sous-couche d
et à laisser à moitié remplie sa couche s, sous la forme s1d 10. L’ion Cu+ correspond alors à l’ionisation,
peu coûteuse, du seul électron s. Cependant, si ce degré est réellement stable pour l’argent et l’or, il
n’existe que pour les halogénures de cuivre. Il faut en chercher la raison dans le critère de dureté et
de mollesse, HSAB.

c. Critère HSAB (Hard and Soft Acid Base, Pearson)

En 1796, Berzélius avait constaté que certains ions métalliques ont tendance à exister dans la nature
sous forme de sulfures plutôt que d’oxydes, de carbonates, de sulfates ou de silicates. Cela pose la
question : tel ion métallique formera-t-il un complexe avec tel ligand ?
La réponse à cette question tient dans le principe de Pearson (ou principe HSAB, Hard-Soft Acid-
Base) : les acides de Lewis durs ont tendance à se combiner avec les bases de Lewis dures ; les
acides mous préfèrent les bases molles.

Ce principe résulte de l’observation de milliers de réactions de chimie organique, inorganique,


biochimique, etc… La notion de dureté/mollesse est reliée à l’électronégativité, la charge et le rayon
ionique de l’élément, ces trois facteurs étant étroitement liés.

On voit ainsi que la première partie de la série possède une électronégativité faible (< 1.6) et que
les rayons ioniques sont petits (< 0.9Å). Ce seront donc des cations particulièrement durs qui

15
réagiront très favorablement avec des bases dures comme les oxydes, et ce d’autant plus que leur
DO sera élevé et par conséquent leur rayon plus petit (TiO2, V2O5, Cr2O72-, MnO4-). Pour le fer et le
cobalt, l’électronégativité est déjà un peu élevée mais les ions trivalents sont suffisamment petits
pour se comporter comme des acides durs. On fait ici le lien entre dureté et acidité de Lewis.
La seconde partie de la série est plus électronégative (> 1.6) mais les rayons ioniques restent petits
(< 0.9Å). C’est pourquoi ces ions sont des acides de dureté « frontière » qui réagissent bien avec les
bases dures comme les fluorures ou les oxydes, mais aussi avec des bases plus molles comme les
composés azotés, phosphorés, carbonés.
On notera enfin que le CuI est bien un acide mou avec une électronégativité supérieure à 1.6 (1.90)
et un rayon ionique de 0.96 Å.
Ainsi, dans la plupart des cas, le critère de Pearson permet de prévoir le sens de réactions de
substitutions et par conséquent de définir des schémas réactionnels. On verra que la chimie de
coordination dépend de nombreux facteurs physico-chimiques souvent semblables à ceux de la
chimie organique.

d. Un peu d’exercice…

1. La réaction suivante, LiF + CsI → est-elle possible ?

2. Expliquer pourquoi on injecte de la métallothionine (protéine cystéine) aux personnes


empoisonnées aux métaux lourds comme le cadmium, le plomb, le mercure ?
L'affinité des ions métalliques pour les sites de fixation des MT varie : la stabilité de la liaison
avec le cuivre(I) est 100 fois plus élevée que celle avec le cadmium(II), elle-même 1000 fois
plus forte que celle avec le zinc(II) ; le mercure(II) et l'argent(I) ont une affinité pour les MT plus
grande que celle du cuivre.

ions Cu(I) Cu(II) Zn(II) Ag(I) Cd(II) Hg(II)


électronégativité 1.9 1.9 1.65 1.93 1.69 2.0
rayons ionique (Ǻ) 0.91 0.72 0.83 1.13 1.03 1.12

16
5. Influence des ligands
Les ligands sont des bases de Lewis possédant au moins une paire libre, neutres ou anioniques. Ainsi,
lorsqu’ils sont organiques, les ligands se lient par leurs hétéroatomes (O, S, N, P) et/ou leur carbone
sous forme de carbanion C-. L’hydrogène se lie sous sa forme d’hydrure H- et les halogènes sous leur
forme halogénure X-.

a. Ligands mono et polydentates


Certains ligands possèdent plus d’un atome susceptible de se coordiner au métal. Ils sont
polydentates. Le ligand est alors décrit comme une mâchoire retenant le métal entre ses dents, et si
sa géométrie le permet de tels ligands s’accrochent par toutes les ‘’dents’’ disponibles.

17
b. Série spectrochimique
Pour un même métal, différents ligands donneront différentes couleurs. Ils ont donc une influence
très nette sur l’absorption d’énergie ∆o du visible.

On peut classer les ligands selon leur aptitude (ou force) à lever la dégénérescence des niveaux d :
c’est la série spectrochimique.

La force du ligand est facteur important à considérer. Ainsi, les complexes chlorés réagiront
généralement facilement (Cl-, ligand faible) tandis que les complexes cyanés sont quasiment inertes
à la substitution (CN-, ligand très fort).

Cette différence de force de ligand peut être mise en évidence dans l’empoisonnement au cyanure
ou au monoxyde de carbone CO.
Le cytochrome c oxidase (ou complexe IV) est le dernier enzyme de la chaîne respiratoire. C’est une
protéine transmembranaire complexe de la mitochondrie. Il catalyse la réduction du dioxygène en
eau : il reçoit un électron de chacune des 4 molécules cytochrome c et les transfère à une molécule
d’oxygène pour la convertir en deux molécules d’eau. De même, il pompe un proton à travers la
membrane pour chaque proton consommé dans la réduction, créant ainsi un gradient
électrochimique utilisé pour la synthèse de l’ATP.

18
Si l’on tente de rationaliser ce classement, il apparaît qu’on a des difficultés à le relier aux paramètres
intrinsèques des ligands (électronégativité, nucléophilie, etc…) et qu’il correspond assez justement à
la suite des groupes de la classification périodique. Ainsi, les halogènes (groupe 17 ou VIIB) sont
moins forts que les chalcogènes (groupe 16 ou VIB, ligands oxygénés et soufrés), que les ligands
azotés ou phosphorés (groupe 15 ou VB), que les ligands carbonés (groupe 14 ou IVB).

c. Nature de la liaison métal-ligand

On doit donc se poser la question de la nature de la liaison métal-ligand de la molécule complexe.

La première théorie appliquée aux complexes de coordination est la théorie du lien de valence qui
fait appel à la VSEPR.

Dans ce modèle, la liaison est considérée comme dative : interaction d’une paire électronique du
ligand avec une orbitale vide (lacune) du métal. Avec ce modèle, on rend compte de l’interaction
acide/base de Lewis, on peut expliquer la géométrie des complexes et leur magnétisme, mais on
n’explique pas la levée de dégénérescence des orbitales d du métal dans le champ de ligands et
encore moins la série spectrochimique.
Pour expliquer la levée de dégénérescence, on fait appel au modèle de liaison ionique, qui permet
d’expliquer, d’une part la stabilité des molécules complexes par l’attraction électrostatique des
charges opposées du métal et des ligands et, d’autre part la levée de dégénérescence des orbitales
d du métal par les répulsions électrostatiques des électrons de la couche d du métal et ceux des
ligands.

19
Cette théorie du champ cristallin (CFT : Crystal Field Theory) a été développée à la fin du XIXème
siècle et est la base de la chimie de coordination. Cependant, elle trouve sa limitation lorsque le
complexe est constitué d’un métal et de ligands neutres et dans l’explication de la force des
ligands (série spectrochimique) qui sera expliquée plus loin.

La théorie du champ de ligands, extension moderne de la théorie du champ cristallin, a donc été
développée dans les années 1960 pour rendre compte au mieux des propriétés physico-chimiques
et de la réactivité des complexes.

Ce modèle est alors le plus satisfaisant car il permet d’expliquer non seulement les propriétés
optiques et magnétiques des complexes de coordination (rationalisation de la série
spectrochimique) mais aussi leur réactivité (orbitales-frontière HOMO et LUMO).

20
d. Série spectrochimique et théorie du champ de ligands
Les interactions entre orbitales moléculaires (OM) des ligands et orbitales atomiques (OA) du métal
seront bien entendues dépendantes de la symétrie et des énergies de celles-ci.

On rappelle que les OM proviennent des recouvrements d’OA de même symétrie et d’énergie
voisine. Ces recouvrements peuvent être liants (combinaison linéaire symétrique des fonctions
d’onde, notées σ, π, etc…) ou antiliants (combinaison linéaire antisymétrique des fonctions d’onde,
notées σ∗, π∗, etc…).

Lorsque deux OA ont même énergie mais pas même symétrie (le plus souvent perpendiculaires l’une
de l’autre), elles ne peuvent interagir. On dit alors que le niveau est non-liant.

Les ligands, liés au métal par leurs hétéroatomes très électronégatifs, ont des OM plus basses en
énergie que les OA d du métal. Les OM antiliantes σ/σ∗ et π/π∗ des ligands interagissent avec les OA
s, p et d du métal (les OM liantes sont pleines) et conduisent donc à des OM complexes liantes, anti-
liantes et/ou non liantes. Le diagramme général complet des OM du complexe ressemble au schéma
suivant :

On va maintenant détailler les interactions métal/ligands selon la nature du ligand : σ-donneur, π-


donneur, π-accepteur.

21
 Ligands σ−donneurs
Les atomes du groupe VA (azote, phosphore, etc…) ne possèdent qu’une seule paire libre, alignée
sur l’axe de liaison métal-ligand et qui peut être figurée par une orbitale de symétrie sphérique
(comme une OA s). Les ligands sont dits σ-donneurs.

Dans le complexe octaédrique, les six ligands sont positionnés sur les axes du repère. Les OA du
métal et les OM des ligands ne peuvent se recouvrir (interagir) que si elles ont même symétrie.
Ainsi, l’OA 4s de symétrie a1g dans l’octaèdre peut interagir avec l’OM a1g des ligands. Il en résulte
pour le complexe une OM liante σ et une OM anti-liante σ* toutes deux de symétrie a1g. On obtient la
même chose en faisant interagir les OA 4p de symétrie t1u avec les OM t1u des ligands.
On voit que les ligands pointent directement sur les lobes des orbitales axiales eg (dz2 et dx2-y2).
L’interaction de ces OA avec les OM eg des ligands conduit à un niveau liant σ et un niveau anti-liant
σ* tous deux de symétrie eg.
En revanche, les ligands sont perpendiculaires aux OA d axiales (dxz, dyz, dxy). Par conséquent,
leur recouvrement est nul, les OM du complexe sont un niveau non liant de symétrie t2g.

On voit alors sur ce diagramme qu’on retrouve la levée de dégénérescence mise en évidence pour
expliquer les propriétés optiques des complexes de coordination (∆o).

Les six ligands se lient au métal à l’aide d’une paire électronique chacun, soit un total de 12
électrons. Ces 12 électrons vont remplir les 6 OM liantes formées dans le complexe (a1g + t1u + eg). Les
électrons du métal remplissent donc les OM non liante (t2g) et anti-liante (eg) du complexe.

C’est donc une particularité des complexes inorganiques : les orbitales frontières, HOMO (ici t2g) et
LUMO (ici eg), sont toutes antiliantes et/ou non liantes. Comme ces orbitales frontières permettent
d’expliquer la réactivité et les propriétés optiques des complexes, dans la pratique, on ne dresse que
le diagramme des OM frontières, ie. la position relative de t2g/eg.

22
 Ligands π-donneurs
Les éléments des groupes VIA (oxygène, soufre) et VIIA (halogènes) possèdent deux à quatre paires
libres. La première paire est alignée selon l’axe des liaisons métal-ligand et les interactions sont du
même type que celles obtenues avec des ligands σ-donneurs, on a un diagramme d’OM équivalent
avec six OM liantes (a1g ⊕ eg ⊕t1u), que l’on appelle TASO, 6 OM anti-liantes (a1g* ⊕ eg* ⊕ t1u*). Et un
niveau non liant t2g.
En revanche, les paires libres restantes sont perpendiculaires à l’axe des liaisons. Il existe 12 OM π de
symétrie t1g + t2g + t1u + t2u. Les ligands sont dits π-donneurs.

On se souvient que les OA du métal et les OM des ligands ne peuvent interagir que si elles ont même
symétrie. Ainsi, seule les OA 3d de symétrie t2g et les OA 4p de symétrie t1u dans l’octaèdre pourront
interagir. Il en résulte pour le complexe deux OM liantes π et deux OM anti-liante π* de symétrie
respective t2g et t1u.

Les six ligands se lient au métal à l’aide d’au moins deux paires électroniques chacun, soit un total de
24 électrons. 12 électrons vont remplir les 6 OM σ liantes formées dans le complexe (a1g + t1u + eg) et
les 12 autres remplissent les 6 OM π liantes formées dans le complexe (t2g + t1u). Là encore, les
électrons du métal remplissent les OM anti-liantes (t2g et eg) du complexe, on ne dresse que le
diagramme des OM frontières, ie. la position relative de t2g/eg.

23
 Ligands π-accepteurs
Enfin, il existe des ligands dits π-accepteurs, comme le carbonyle CO ou le cyano -CN. Ce sont des
ligands qui se lient par un carbone enrichi en électrons, soit sous forme de carbanion C- (-C≡O+, -C≡N)
ou sous forme de liaisons double (C=C) ou triple (C≡C). Pour comprendre cette appellation « π-
accepteurs », il convient de regarder leur propre diagramme d’orbitales moléculaires.
Leur OM HOMO est de type σ et possède deux électrons : elle ne peut donc interagir qu’avec des OA
ou OM de symétrie σ, ie. les OA d axiales, dz2 et dx2-y2. Il y a donation (σ-donneurs = nucléophiles,
déstabilisation des OM eg).
Leur OM LUMO est de type π* : elle ne peut interagir qu’avec les OA d diagonales t2g de symétrie π.
Cependant, l’interaction est cette fois stabilisante (énergie d’interaction négative) car les OM π* des
ligands sont vides d’électrons. On dit qu’il y a rétrodonation du métal vers le ligand (ligand π-
accepteur = électrophile), l’interaction est du type dππ*.

Sur le diagramme des OM du complexe, on voit que les OM π des ligands, parce qu’elles sont vides
d’électrons, sont plus hautes en énergie que les OA d du métal libre. Il en résulte que les OM liantes π
formées dans les complexes sont plus hautes en énergie que pour un ligand π−donneur et que l’OM
anti-liante π* est plus haute en énergie que la t2g* d’un complexe à ligands π-donneurs. Par ailleurs,
les 6 ligands π-accepteurs ne présentent que 12 électrons σ mais aucun électrons π : l’OM t2g du
complexe est donc vide d’électrons des ligands et sera remplie des électrons du métal. La HOMO du
complexe est de type liant π.

24
 Force du champ de ligands
En utilisant la théorie du champ de ligands, on peut expliquer la série spectrochimique : la valeur de
champ ∆o augmente quand il n’y a pas d’interactions de type π (ligands σ-donneurs) ou quand les
interactions π sont stabilisantes (ligands π-accepteurs) : π-donneurs < σ-donneurs < π-accepteurs.

Pour retrouver rapidement le diagramme d’OA d du métal dans n’importe quelle géométrie, on peut
utiliser le modèle du recouvrement angulaire (Angular Overlap Model, AOM).

x = r sin θ cos ϕ Ligand 1 2 3 4 5 6


y = r sin θ sin ϕ θ 0 π/2 π/2 π/2 π/2 π
z = r cos θ ϕ 0 0 π/2 π -π/2 0

La mécanique quantique nous donne l’expression de l’intégrale de recouvrement Sab de deux


fonctions d’onde a et b. En coordonnées polaires, on peut définir pour chaque type d’orbitale (s, p,
d, f) en interaction avec une autre (s, p, d, f), les angles θ et φ qui définissent leurs positions relatives.
On arrive alors à des expressions complexes pour chaque orbitale atomique et chaque type de
recouvrement (σ, π) impliqué.

25
Dans le cas des complexes de coordination, pour les géométries les plus courantes, les expressions
vont se simplifier compte-tenu des valeurs singulières de θ et φ .

Pour chaque OA du métal on définit les coefficients des intégrales d’échange pour diverses
géométries : octaédrique (positions 1, 2, 3, 4, 5, 6), tétraédrique (positions 9, 10, 11, 12), bipyramide
base trigonale (positions 1, 2, 6, 7, 8).

Pour déterminer le niveau d’énergie E correspondant, il suffit alors de multiplier l’intégrale de


recouvrement par une énergie unitaire de recouvrement σ (εσ) ou π (επ), la première étant plus
énergétique que la seconde. Selon la nature du ligand, on prend ou non en compte les interactions.
Pour un ligand σ-donneur, seules les interactions du type σ sont à considérer et l’énergie
d’interaction est positive (déstabilisation) (εσ > 0). Pour les ligands π-donneurs ou π-accepteurs, on
devra prendre en compte les interactions déstabilisantes σ (εσ > 0) et les interactions π,
déstabilisantes pour les premiers (επ > 0) mais stabilisantes pour les seconds (επ < 0).
On dresse ainsi les diagrammes des OA d d’un métal dans un champ octaédrique de ligands σ-
donneurs, π-donneurs et π-accepteurs. Le niveau de référence est celui des OA d de l’ion libre.

26
27
En comparant les ESCL des trois complexes octaédriques précédents, on retrouve bien que la
stabilité du complexe est étroitement liée à la valeur du champ :
π-donneur (ESCL=+12επ) < σ-donneur (ESCL=0) < π-accepteur (ESCL=-12 επ )
Ainsi, plus le champ de ligands est fort, plus le complexe est stable, moins il est réactif dans des
réactions de substitution. Ceci devra être pris en compte dans les stratégies de synthèse de
complexes de coordination (cf. Option CMI Réactivité des complexes inorganiques).

e. Un peu d’exercice…

6. Stabilité des complexes inorganiques


A l’aide du recouvrement angulaire, on peut dresser le diagramme d’orbitales moléculaires de tout
ion complexe, quelle que soit sa coordinence et sa géométrie. A partir de ce diagramme, il est alors
possible d’évaluer sa stabilité (ESCL) et par conséquent sa réactivité, mais également d’évaluer la
valeur du champ ∆ qui permet d’expliquer ses propriétés optiques (couleur du complexe) et
magnétiques.

a. Force du champ de ligands : complexes haut spin/bas spin ; énergie de stabilisation ESCC
La force du champ de ligand aura une grande importance quant au remplissage des orbitales d de
l’ion métallique.
En effet, si le champ de ligand ∆o est plus faible que l’énergie d’appariement P (de 17000 à 30000
cm-1) de deux électrons d, le remplissage se fera selon la règle de Hund : toutes les OA sont remplies
avec un électron avant d’apparier. On dira que le complexe est haut spin.
A l’inverse, si le champ est plus fort que l’énergie d’appariement, alors les électrons seront d’abord
appariés avant que d’aller peupler le niveau eg plus déstabilisé. Le complexe est alors bas spin.

28
Les répercussions de cet arrangement de spin sur les propriétés du complexe sont nombreuses. On
le voit directement sur les propriétés optiques (couleur des complexes), mais cela joue également
sur les propriétés magnétiques, la stabilité et la réactivité des complexes.
Pour un complexe octaédrique, connaissant ∆o et l’énergie d’appariement, on peut évaluer la
stabilité du complexe octaédrique. On peut calculer ainsi l’énergie de stabilisation en champ
cristallin (ESCC) selon la formule :
ESCC = -0.4n∆o + 0.6m∆o
où l’on prend comme référence le niveau d’énergie des cinq OA d déstabilisées dans un champ
idéalement sphérique (cf. I.3).
Tout électron peuplant une orbitale de basse énergie stabilisera l’ion dans le champ cristallin, tout
électron peuplant une orbitale de haute énergie produira l’effet inverse.
Cette énergie de stabilisation relative, exprimée en ∆o, peut être calculée pour toutes les
coordinences et géométries :

On notera que cela n’est possible que lorsque les ligands sont identiques et à des distances
équivalentes du métal. Ainsi, pour le complexe [MX5Y] et pour le complexe [MX4Y2], les valeurs ne
peuvent être données de façon fixe, la force de chaque ligand étant variable.

b. Evaluer la force du champ de ligands


La série spectrochimique, telle qu’on l’a présentée précédemment, est empirique (basée sur
l’expérience) et est la même quel que soit l’ion métallique utilisé. Il devient alors souvent possible
d’estimer la valeur absolue de ∆0. Jorgensen a défini ainsi un facteur f du ligand et un facteur g de
l’ion, tels que :
∆0 = f × g
Dans ce classement, le ligand H2O est pris comme référence (f=1) et l’ion hexaaqua permet de
calculer le facteur g de l’ion.

29
Les facteurs gion (en cm-1) ont été calculés pour tous les ions métalliques pouvant former des
complexes hexaaqua.

A travers les valeurs de gion (∆o du complexe hexaaqua), on retrouve quelques points établis pour
l’influence du métal sur la valeur du champ : elle augmente avec la charge de l’ion métallique et
quand on descend une colonne (3d < 4d < 5d). En revanche, l’expérience ne confirme pas qu’elle
augmente avec le nombre d’électrons d.
On observe que les valeurs rencontrées pour les métaux des 2ème et 3ème séries de transition sont
particulièrement élevées, toujours supérieures à l’énergie d’appariement la plus élevée. Il en résulte
que pour ces ions métalliques, quelle que soit la nature du ligand (même faible π-donneur), le champ
est fort et, le cas échéant, le complexe bas spin.
A l’inverse, pour les métaux de la première série de transition, c’est le ligand qui dans la plupart des
cas est déterminant pour le type haut ou bas spin du complexe.

c. Un peu d’exercice…
 Déterminer le nombre de coordination (ou coordinence), le degré d’oxydation et la configuration
électronique des ions métalliques dans les ions complexes suivants. Préciser leur configuration
haut spin/bas spin et calculer leur ESCC.
a) [Fe(CN)6]4- b) [Cr(NH3)6]3+ c) [PtCl6]4- d) [CoCl4]2-

d. Déterminer les géométries préférentielles en calculant l’ESCC

 Octaèdre déformé : effet Jahn-Teller


L’effet Jahn-Teller se retrouve pour les métaux qui ont des niveaux d’énergie dégénérés et peuplés
de façon asymétrique. L’exemple le plus connu et le plus étudié est celui de l’ion cuivrique CuII dont
la configuration électronique est 4s03d 9.
Dans un environnement octaédrique, son niveau doublement dégénéré eg est peuplé de 3 électrons
ce qui le rend instable. En effet, il lui manque un électron pour atteindre la plus haute symétrie

30
sphérique d 10, pour laquelle la densité des électrons d est alors isotrope : les interactions
électrostatiques sont les mêmes pour toutes les OA. Cette instabilité peut être améliorée par la levée
de dégénérescence du niveau anisotrope, ici eg.

Du fait de ces trois électrons, les répulsions électroniques entre les ligands et la dz² sont très fortes
mais les ligands, bases de Lewis, sont peu attirés par l’ion cuivrique, faible acide de Lewis. Pour
pouvoir se stabiliser, le complexe va donc avoir tendance à se déformer selon l’axe z (déformation
dite tétragonale car on va vers une symétrie D4h), et ce d’autant plus facilement que la répulsion
électronique est forte et que l’attraction ionique est faible.

Les ligands de cet axe s’éloignent alors du métal : les OA du métal de composante z sont moins
déstabilisées, il y a une nouvelle levée de dégénérescence. L’énergie de stabilisation du complexe
déformé est alors plus importante. C’est l’effet décrit par Jahn et Teller en 1937 :
« Tout système moléculaire ayant un niveau électronique dégénéré est instable et se déforme pour
abaisser sa symétrie et lever sa dégénérescence. »

De même, lorsque la densité des électrons d est anisotrope sur le niveau t2g, le complexe aura
tendance à se déformer pour gagner en stabilité. La déformation n’est plus tétragonale mais
trigonale pour préserver l’axe ternaire de l’octaèdre et s’observe comme une compression.
L’exemple connu est celui du titane (III) dont la configuration électronique est 4s03d 1. La levée de
dégénérescence inverse est observée pour les complexes du vanadium (III) en d 2.
On notera cependant que, dans un complexe octaédrique, les interactions ligands/t2g sont moins
importantes que celles avec le niveau eg. Les effets de la distorsion trigonale sont donc moins faciles
à mettre en évidence expérimentalement car plus ténus.

 Plan carré : complexes des éléments d 8


La géométrie plan carré ne se rencontre presqu’exclusivement que pour les métaux de transition en
d 8, notamment pour les ions divalents du nickel, palladium et platine. Cette géométrie n’est pas due
à un effet Jahn-Teller extrême (ligands selon z envoyés à l’infini) car le niveau eg de ces ions, peuplé
de deux électrons, est symétrique et donc stable. Le calcule de l’ESCC pour l’octaèdre déformé
montre d’ailleurs qu’il n’y a pas de gain en stabilité.
Pour comprendre cette préférence de géométrie, il faut comparer la valeur du champ de ligands
avec l’énergie d’appariement des deux électrons eg. S’il est plus faible, alors le complexe reste en
géométrie octaédrique (plus compacte). En revanche, s’il est plus fort, le complexe se déforme et
adopte la géométrie plan carré. En effet, dans ce cas, on observe une levée de dégénérescence
supplémentaire du niveau eg, qui permet d’apparier les deux électrons eg. L’énergie de stabilisation
du complexe est alors plus élevée et compense l’énergie d’appariement nécessaire à cette
géométrie.

31
Les ions Pd2+ et Pt2+, respectivement de la 2ème et 3ème série de transition, sont toujours en champ fort.
Ils sont donc exclusivement en géométrie plan carré.

 Tétraèdre vs octaèdre
On a vu que la géométrie octaédrique est la plus fréquente, car la plus compacte et la plus
stabilisante pour l’ion métallique. Cependant, on sait aussi que la géométrie d’un complexe est
souvent liée à sa stabilité.

Il n’est pas rare que pour des raisons stériques, on rencontre des complexes tétraédriques, moins
compacts. Si l’on comprend que l’encombrement stérique d’un ligand induise cette décompression,
on comprend moins que les métaux puissent avoir une préférence de géométrie. C’est pourtant ce
que montre l’expérience puisque certains métaux, quels que soient les ligands, n’existent que sous
forme octaédrique alors que d’autres forment fréquemment des complexes tétraédriques.
Pour l’expliquer, on calcule l’énergie de préférence de site octaédrique, EPSO, qui correspond à la
différence des énergies de stabilisation en champ octaédrique et en champ tétraédrique.

On notera que quel que soit le ligand, un champ tétraédrique est faible et est estimé à 4/9∆o. Les
complexes sont donc exclusivement haut spin. Les EPSO sont donc calculées pour des champs
octaédriques haut spin.

On constate que quel que soit l’ion l’EPSO est négative ou nulle. On explique ainsi que la géométrie
octaédrique est la plus fréquente.
Cependant, pour les ions d 3 et d 8, l’EPSO est très négative ce qui laisse supposer que ces ions ne
forment que des complexes octaédriques. En effet, seuls les ions d 8 peuvent former des complexes
tétraédriques (surtout déformés en D2d) mais surtout plan carré avec des ligands encombrants et/ou
forts.

32
Pour les autres ions, les complexes tétraédriques ne sont pas rares et se rencontrent le plus souvent
avec des ligands encombrants ou faibles.

 Un peu d’exercice…

1. [CrF6] 3- a une géométrie proche de l’octaèdre parfait avec des liaisons Cr-F de 1.9 Å. [MnF6] 3- a
également une géométrie octaédrique mais déformée avec quatre liaisons Mn-F à 1.91 Å et deux à
2.09 Å. Expliquer cette différence de structure.
2. Avec CN-, [Fe(H2O)6]2+ forme [Fe(CN)6]4- alors [Ni(H2O)6]2+ forme [Ni(CN)4]2- . Expliquer.

33
7. Influence de la géométrie et de la force des ligands sur le magnétisme du complexe
La magnétite FeIIFeIII2O4 est un spinelle inverse qui possède, comme son nom l’indique, des
propriétés magnétiques ! Dans cette structure cristalline, tous les ions fer sont entourés d’oxygènes
qui forment des champs faibles octaédrique ou tétraédrique. Les configurations sont donc :
Fe2+ (octa) : d 6 HS : t2g4eg2 : 4 électrons non appariés
Fe3+ (octa) : d 5 HS : t2g3eg2 : 5 électrons non appariés
Fe3+ (tétra) : d 5 HS : e2t23 : 5 électrons non appariés
Le magnétisme de ce matériau provient donc des électrons non appariés.

On peut estimer le moment magnétique par la formule : µ = n(n + 2) M.B. (Magnéton de Bohr), où
n est le nombre d’électrons non appariés de l’atome.
Pour les métaux de la première série de transition, on trouve :

Si µ = 0, l’atome est diamagnétique, sinon l’atome est paramagnétique.

 Un peu d’exercice…

1. Quand [Mn(H2O)6]2+ réagit avec CN-, il se forme [Mn(CN)6]4- qui présente un électron non apparié.
Avec I-, il se forme [MnI4]2- qui présente cinq électrons non appariés. Expliquer.
2. Les cristaux verts de [Ni(PPh2Et)2Br2] ont un moment magnétique effectif de 3.2 µB. Dissous dans
le chloroforme, ils donnent une solution verte ayant un moment magnétique de 2.69 µB. Dissous
dans le benzène, ils donnent une solution rouge qui, refroidie à -78°C, permet d’obtenir des
cristaux rouges diamagnétiques de [Ni(PPh2Et)2Br2. Stockés à température ambiante, ces cristaux
redeviennent verts. Expliquer.

34
Dans le cristal de magnétite, tous les ions ferreux et ferriques, sont paramagnétiques. Cependant, le
cristal lui-même est ferrimagnétique.
Le type de magnétisme d’un matériau est défini par des interactions à longue distance entre
moment magnétiques individuels. On distinguera ainsi des matériaux ferromagnétiques,
antiferromagnétiques ou ferrimagnétiques. Si les interactions ne sont pas ou plus assez fortes pour
maintenir un ordre à longue distance, le matériau est paramagnétique. Pour les matériaux
magnétiques, on détermine la température de transition ordre/désordre (ferri ou F/para :
température de Curie ; AF/para : température de Néel).

Lorsque ces interactions sont assurées via les atomes non magnétiques du réseau cristallin (les
oxygènes pour la magnétique) on parle de couplage magnétique de super échange.

La nature du couplage magnétique (F ou AF) est liée à l’interaction des orbitales atomiques
magnétiques (OAM) de chaque ion métallique (orbitale atomique possédant un électron non
apparié).

35
III. Conclusion
A l’aide du recouvrement angulaire, on peut dresser le diagramme d’orbitales moléculaires de tout
ion complexe, quelle que soit sa coordinence et sa géométrie. A partir de ce diagramme, il est alors
possible d’évaluer sa stabilité (ESCL) et par conséquent sa réactivité, mais également d’évaluer la
valeur du champ ∆ qui permet d’expliquer ses propriétés optiques (couleur du complexe) et
magnétiques.
Cependant, la théorie du champ de ligands permet-elle de tout expliquer ?
Si elle suffit à expliquer la couleur rouge du rubis (Cr3+, d 3 en champ octaédrique d’oxyde), elle
n’explique pas que la même impureté, dans un champ octaédrique d’oxyde voisin (béryl), donne sa
couleur verte à l’émeraude !
En y regardant de plus près, le spectre optique du complexe hexaaqua du chrome III présente deux
transitions optiques, là où la théorie du champ de ligands n’en prévoit qu’une !

On en conclut que la théorie est trop « simple », et qu’on a fait des approximations qui ne
permettent pas d’expliquer ces deux absorptions. En effet, on a admis, à l’encontre des règles de
base de la mécanique quantique, que les électrons étaient identiques quelle que soit leur orbitale
d’origine et leur orbitale d’arrivée et qu’ils n’interagissaient pas les uns avec les autres. Pour rendre
compte de ces phénomènes, on doit compléter le modèle avec des perturbations supplémentaires :
la répulsion interélectronique, HRE, qui conduit à l’établissement des termes spectraux (niveaux
d’énergies correspondant aux différentes façons arranger les électrons dans les orbitales) et le
couplage spin-orbite, HSO, qui particularise les différentes valeurs de spins de chaque électron. Ces
deux notions seront développées en cours (cours Luminescences : établissement des termes
spectraux, SN) et en préceptorat (HRE + HSO, Couleurs).

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IV. Les points essentiels

 Les complexes de coordination sont constitués d’un ion métallique central et de ligands. Les ions
étudiés sont des métaux de transition (bloc d du tableau périodique). Les ligands sont des anions ou
des molécules neutres ayant des hétéroatomes. Ils se lient au métal à l’aide de paires électroniques
(charge – ou hétéroatomes) et décrivent un champ de ligands autour de l’ion métallique.

 Les géométries les plus fréquentes sont l’octaèdre et le tétraèdre. On peut montrer en calculant les
énergies de stabilisation, que la géométrie octaédrique est la plus stable.

 Les interactions entre les électrons d du cation métallique et les électrons des ligands sont répulsives
(énergie d’interaction positive). Elles induisent une levée de dégénérescence des OA d du cation
métallique. Dans un champ de ligands octaédrique, on observe alors deux niveaux d’énergie t2g et eg.
La différence d’énergie entre ces deux niveaux est notée ∆o, et appelée champ de ligands. Quand
cette valeur est de l’ordre de l’énergie du visible, la transition électronique d-d correspond à la
couleur du complexe

 La valeur de ce champ dépend de l’ion métallique, des ligands et de la géométrie du complexe.

 Pour la 1ère série de transition, les ligands peuvent induire des champs forts ou faibles. Ils sont classés
selon leur force (série spectrochimique). Seule la théorie du champ de ligands (orbitales
moléculaires) permet d’expliquer ce classement, et définit différents types de ligands selon les
orbitales impliqués dans les liaisons. On a alors : π-donneurs < σ-donneurs < π-accepteurs.

 Pour la 1ère série, en champ fort, les électrons du métal seront appariés, le complexe est bas spin,
tandis qu’en champ faible, le remplissage des orbitales suit la règle de Pauli, le complexe est haut
spin. Pour les métaux des 2ème et 3ème séries de transition, les complexes sont toujours bas spin
(champ induit par l’ion métallique très fort).

 La nature haut spin ou bas spin joue sur la stabilité, la réactivité et le magnétisme du complexe.

 La géométrie du complexe est fortement dépendante de l’ion métallique et dans une moindre
mesure de l’encombrement stérique des ligands. Le calcul de l’Energie de Préférence de Site
Octaédrique (EPSO) permet de prédire la géométrie d’un complexe. Pour la plupart des ions, cette
énergie est négative, ce qui traduit une préférence pour la géométrie octaédrique. Ainsi, les ions en
d 3 et d 8 préfèrent exclusivement l’octaèdre, tandis que les autres sont susceptibles d’adopter une
autre géométrie si les ligands sont encombrés. On note cependant, que les ions en d 8 peuvent
adopter une géométrie plan carré lorsque la valeur du champ de ligands est supérieure à l‘énergie
d’appariement. Enfin, les ions en d 1, d 4, d 6 et surtout d 9, ont tendance à déformer la géométrie
octaédrique pour stabiliser le complexe (déformation de Jahn-Teller). Ces préférences géométriques
auront une incidence assez forte sur la réactivité des complexes (cf. cours 7. Réactivité).

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