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Pour la majorité du public et l'Académie des beaux-arts, qu'est-ce qui caractérise une œuvre d'art et la rend
belle ?
Après avoir lu le dossier sur Olympia de Manet, expliquez ce qui a été reproché à ce tableau et pourquoi
il a choqué alors que d'autres, comme celui de Cabanel, non.
Lisez dans votre manuel les documents du débat p 439 (documents iconographiques + documents complémentaires
à lire ou visionner en ligne) : expliquez en quoi les œuvres d'art présentées dans ce dossier ont remis en question
les caractéristiques traditionnelles d'une œuvre d'art.
LECTURE CURSIVE
Les codes esthétiques ébranlés :
qu'est-ce qu'une œuvre d'art ?
CORPUS 1
Le siècle constitue une période d'évolution accélérée et bouillonnante dans tous les
domaines. Pour mieux saisir les enjeux de certaines querelles esthétiques qui portent sur
la conception que l'on se fait de l'art et de la beauté, il convient d'abord de brosser un
rapide aperçu du contexte global dans lequel elles naissent
Les productions artistiques au XIXème siècle sont extrêmement variées et les « écoles se multiplient. Plusieurs
mouvements artistiques et littéraires traversent le siècle se prolongeant les uns les autres (ainsi du naturalisme poursuivant
le réalisme ou au contraire s'opposant (comme le réalisme au romantisme).
Les conceptions que l'on se fait de la beauté artistique sont donc diverses, Les goûts des artistes et des lettrés, ceux des
institutions académiques, ceux du public peuvent se rejoindre, mais au cours du siècle, ils divergent de plus en plus. On
dégagera cependant certaines lignes de fracture récurrentes.
OPPOSITION ENTRE L'ANCIEN ET LE MODERNE
La protestation contre la tour Eiffel, construite par un ingénieur et faite de « tôle boulonnée », s'explique peut-
être moins de la part de ces artistes par un goût exclusif pour l'architecture ancienne, que par le rejet de ce qui
symbolise à leurs yeux l'antithèse de l'art : l'industrie.
En effet, tout produit industriel est susceptible d'être reproduit à l'identique, qui plus est par des machines. L'art,
au contraire, crée des objets uniques, non reproductibles et entièrement originaux. La possibilité d'une production
et d'une reproduction à l'infini des objets les dévalue instantanément : ce n'est qu'une pacotille vouée à être
remplacée, tandis que les œuvres d'art demeurent éternelles.
Enfin, si l'art permet à l'homme d'exercer ses plus hautes facultés intellectuelles et morales, et de les accomplir
dans l'acte de création, l'industrie ne fait que répondre à des besoins matériels.
Le jugement esthétique recouvre très souvent un jugement moral : ce qui est beau est pur et noble, tandis que la laideur
est impureté et trivialité. Ces associations sont constamment mobilisées à l'égard du réalisme pictural ou littéraire.
C'est ce qui est évoqué ci-après dans le dossier consacré à la réception du tableau de Manet, Olympia. La critique académique
et une très large partie du grand public estiment qu'une œuvre ne saurait être belle si elle s'intéresse à un sujet trivial,
Comme dans le cas du procès intenté au roman de Flaubert, Madame Bovary, on
réprouve le fait de chercher à produire une œuvre belle qui ne soit pas en même temps
« morale ». Or, la moralité recherchée se réduit souvent à une idéalisation et
s'accompagne d'un refus de représenter dans l'art certaines réalités, notamment celles du
monde moderne, des classes populaires, et plus largement de tout ce qui se rapporte au
corps.
C'est dans la deuxième moitié du XIXème siècle que naît une scission entre le
goût du public et les productions artistiques. Jusqu'alors, les artistes gagnaient
l'adhésion de leurs contemporains. Depuis cette époque, la plupart n'ont été
reconnus d'un public large que plusieurs années plus tard. Constantin Meunier, Au
pays noir, 1890
CORPUS 2
Manet présente, au Salon de 1865, un nu jugé à l'époque scandaleux : Olympia. Si on se presse pour le voir, c'est non
pour l'admirer, mais pour s’en moquer. Cependant, quelque vingt ans plus tard, en 1890, le tableau est offert à l'État
français grâce à une souscription publique organisée par Claude Monet. Il se trouve actuellement au musée d'Orsay.
Et tout le monde a crié : on a
trouvé ce corps nu indécent ; cela
devait être, puisque c’est là de la
chair, une fille1 que l'artiste a jetée
sur la toile dans sa nudité jeune et
déjà fanée. Lorsque nos artistes
nous donnent des Vénus, ils
corrigent la nature, ils mentent.
Édouard Manet […] nous a fait
connaitre Olympia, cette fille de
nos jours, que vous rencontrez sur
les trottoirs et qui serre ses maigres
épaules dans un mince châle de
laine déteinte.
1. Une prostituée.
HISTOIRE DE LA CARICATURE
La caricature se développe avec l'essor de la presse à la fin du siècle.
Aux côtés du dessin de presse, elle illustre les propos écrits, mais elle a
aussi une fonction satirique. Le message qu'elle véhicule peut être
renforcé par une légende ironique jouant sur les mots ou sur la mise en
scène de la personne dans le dessin. Au XIXème siècle, des journaux se
spécialisent dans la satire (Le Charivari, Journal amusant...) et certains
caricaturistes se font un nom (Honoré Daumier, Cham, Bertall). Les
lecteurs sont alors à l'affût de leurs productions.
Du XVIIème au XIXème siècles, la hiérarchie des genres picturaux, parfois contestée, n'a
pas varié. Les genres nobles, considérés comme plus difficiles techniquement, sont : la
peinture d'histoire, dont le sujet est tiré de la religion, de l'histoire ou de la mythologie le
portrait, autoportrait ou portrait de groupe. Les genres mineurs sont : la peinture de genre
(scènes de la vie quotidienne) ; le paysage ; la nature morte et la peinture animalière. A cette
hiérarchie des genres correspondait une hiérarchie des formats : du grand format (histoire)
au petit format (nature morte).
Ce qui peut troubler le public, c'est également la présence d'éléments dont l’interprétation
est difficilement déchiffrable, car ils ne correspondent pas aux symboles habituels : le
chien (Titien), symbole de fidélité, est devenu un chat ; Olympia est nue mais porte des
bijoux, la servante lui apporte des fleurs mais pas de vêtements, etc.
Surtout, le personnage d'une part est mis en valeur, d'autre part s'impose au spectateur.
Olympia paraît être une femme réelle.
L'HOMMAGE DE ZOLA À MANET
Émile Zola, alors jeune feuilletoniste, visite le Salon et s'enthousiasme pour Manet et Courbet, Il trouve dans leurs
œuvres des analogies avec son propre projet littéraire de rendre compte de la réalité avec vérité.