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DEC AMIENS
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OBJET D'ETUDE : La Littérature d'idées du XVIe au XVIIIe siècle
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OBJET D'ETUDE : Le Roman et le récit du Moyen-âge au XXIe siècle
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OBJET D'ETUDE : Le Théâtre du XVIIe au XXIe siècle
Parcours : Crise personnelle, Crise 1- Jean Racine, Phèdre, 1677, Acte I, scène 3
Familiale
Œuvre intégrale 2-
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Les droits de la femme
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne
Olympe de Gouges
« Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ; tu ne lui
ôteras pas du moins ce droit. Dis-moi ? Qui t’a donné le souverain empire d’opprimer mon
sexe ? ta force ? tes talents ? Observe le créateur dans sa sagesse ; parcours la nature dans
Remonte aux animaux, consulte les éléments, étudie les végétaux, jette enfin un coup-d’œil
sur toutes les modifications de la matière organisée ; et rends-toi à l’évidence quand je t’en
offre les moyens ; cherche, fouille et distingue, si tu peux, les sexes dans l’administration de
la nature. Partout tu les trouveras confondus, partout ils coopèrent avec un ensemble
L’homme seul s’est fagoté un principe de cette exception. Bizarre, aveugle, boursouflé de
sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l’ignorance la plus crasse,
il veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ; il
prétend jouir de la révolution, et réclamer ses droits à l’égalité, pour ne rien dire de plus. »
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Préambule
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne
Olympe de Gouges
« Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la Nation, demandent d'être constituées
femme, sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont
résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de
la femme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps
social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs, afin que les actes du pouvoir des
femmes, et ceux du pouvoir des hommes pouvant être à chaque instant comparés avec le but
de toute institution politique, en soient plus respectés, afin que les réclamations des
Citoyennes, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours
sexe supérieur en beauté, comme en courage dans les souffrances maternelles, reconnaît et
déclare, en présence et sous les auspices de l’Être suprême, les Droits suivants de la Femme et
de la Citoyenne [...] »
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Postambule
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne
Olympe de Gouges
« Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais
tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de
de l’usurpation. L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes
pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. O femmes !
Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez
recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles
de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ;
que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme ; la réclamation de votre
patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature. Qu’auriez-vous à redouter pour une si
belle entreprise ? Le bon mot du législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos
politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : « Femmes, qu’y a-t-il de commun
entre vous et nous ? — Tout », auriez-vous à répondre. S’ils s’obstinaient, dans leur faiblesse,
la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards
de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère, et vous verrez bientôt ces
orgueilleux, nos serviles adorateurs rampant à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les
trésors de l’Être suprême. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre
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Louise Labé, épître dédicatoire à Clémence de Bourges.
«Étant le temps venu, Mademoiselle, que les sévères lois des hommes n'empêchent plus les
femmes de s'appliquer aux sciences et disciplines: il me semble que celles qui [en] on la
commodité, doivent employer cette honnête liberté que notre sexe a autrefois tant désirée, à
apprendre celles-ci: et montrer aux hommes le tort qu'ils nous faisaient en nous privant du
bien et de l'honneur qui nous en pouvaient venir: et si quelqu'une parvient en tel degré, que de
pouvoir mettre ses conceptions par écrit, le faire soigneusement et non dédaigner la gloire, et
s'en parer plutôt que de chaînes, anneaux, et somptueux habits: lesquels ne pouvons vraiment
estimer nôtres, que par usage. Mais l'honneur que la science nous procurera, sera entièrement
nôtre: et ne nous pourra être ôté, ni par finesse de larron, ni par force d'ennemis, ni par
longueur du temps. Si j'eusse été tant favorisée des Cieux, que d'avoir l'esprit assez grand pour
comprendre ce dont Il a eu envie, je servirais en cet endroit plus d'exemple que d'admonition.
Mais ayant passé partie de ma jeunesse à l'exercice de la musique, et ce qui m'a resté de temps
satisfaire au bon vouloir que je porte à notre sexe, de le voir non en beauté seulement, mais en
science et vertu passer ou égaler les hommes: je ne puis faire autre chose que prier les
vertueuses Dames d'élever un peu leurs esprits pardessus leurs quenouilles et fuseaux, et
s'employer à faire entendre au monde que si nous ne sommes faites pour commander, si ne
devons-nous être dédaignées pour compagnes tant dans les affaires domestiques que
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La rencontre de Manon et du Chevalier des Grieux
Première Partie
« J'avais marqué le temps de mon départ d'Amiens. Hélas ! que ne le marquais-je un jour plus tôt !
j'aurais porté chez mon père toute mon innocence. La veille même de celui que je devais quitter cette
ville, étant à me promener avec mon ami, qui s'appelait Tiberge, nous vîmes arriver le coche d'Arras,
et nous le suivîmes jusqu'à l'hôtellerie où ces voitures descendent. Nous n'avions pas d'autre motif que
la curiosité. Il en sortit quelques femmes, qui se retirèrent aussitôt. Mais il en resta une, fort jeune, qui
s'arrêta seule dans la cour, pendant qu'un homme d'un âge avancé, qui paraissait lui servir de
conducteur, s'empressait pour faire tirer son équipage des paniers. Elle me parut si charmante que moi,
qui n'avais jamais pensé à la différence des sexes, ni regardé une fille avec un peu d'attention, moi, dis-
je, dont tout le monde admirait la sagesse et la retenue, je me trouvai enflammé tout d'un coup jusqu'au
transport. J'avais le défaut d'être excessivement timide et facile à déconcerter ; mais loin d'être arrêté
alors par cette faiblesse, je m'avançai vers la maîtresse de mon cœur. Quoiqu'elle fût encore moins
âgée que moi, elle reçut mes politesses sans paraître embarrassée. Je lui demandai ce qui l'amenait à
Amiens et si elle y avait quelques personnes de connaissance. Elle me répondit ingénument qu'elle y
était envoyée par ses parents pour être religieuse. L'amour me rendait déjà si éclairé, depuis un
moment qu'il était dans mon cœur, que je regardai ce dessein comme un coup mortel pour mes désirs.
Je lui parlai d'une manière qui lui fit comprendre mes sentiments, car elle était bien plus expérimentée
que moi. C'était malgré elle qu'on l'envoyait au couvent, pour arrêter sans doute son penchant au
plaisir, qui s'était déjà déclaré et qui a causé, dans la suite, tous ses malheurs et les miens. »
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Les retrouvailles au parloir de Saint-Sulpice
Première Partie
« Elle s'assit. Je demeurai debout, le corps à demi tourné, n'osant l'envisager directement. Je
commençai plusieurs fois une réponse, que je n'eus pas la force d'achever. Enfin, je fis un effort pour
chaudes larmes, qu'elle ne prétendait point justifier sa perfidie. Que prétendez-vous donc ? m'écriai-je
encore. Je prétends mourir, répondit-elle, si vous ne me rendez votre cœur, sans lequel il est
impossible que je vive. Demande donc ma vie, infidèle ! repris-je en versant moi-même des pleurs,
que je m'efforçai en vain de retenir. Demande ma vie, qui est l'unique chose qui me reste à te sacrifier ;
car mon cœur n'a jamais cessé d'être à toi. A peine eus-je achevé ces derniers mots, qu'elle se leva avec
transport pour venir m'embrasser. Elle m'accabla de mille caresses passionnées. Elle m'appela par tous
les noms que l'amour invente pour exprimer ses plus vives tendresses. Je n'y répondais encore qu'avec
langueur. Quel passage, en effet, de la situation tranquille où j'avais été, aux mouvements tumultueux
que je sentais renaître ! J'en étais épouvanté. Je frémissais, comme il arrive lorsqu'on se trouve la nuit
dans une campagne écartée : on se croit transporté dans un nouvel ordre de choses ; on y est saisi d'une
horreur secrète, dont on ne se remet qu'après avoir considéré longtemps tous les environs.
Nous nous assîmes l'un près de l'autre. Je pris ses mains dans les miennes. Ah ! Manon, lui dis-je en
la regardant d'un œil triste, je ne m'étais pas attendu à la noire trahison dont vous avez payé mon
amour. Il vous était bien facile de tromper un cœur dont vous étiez la souveraine absolue, et qui
mettait toute sa félicité à vous plaire et à vous obéir. Dites-moi maintenant si vous en avez trouvé
d'aussi tendres et d'aussi soumis. Non, non, la Nature n'en fait guère de la même trempe que le mien.
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L’Évasion de Saint-Lazare
Première Partie
« Comme je n’en avais pas à perdre, je repris la parole pour lui dire que j’étais fort touché
de toutes ses bontés, mais que, la liberté étant le plus cher de tous les biens, surtout pour moi à
qui on la ravissait injustement, j’étais résolu de me la procurer cette nuit même, à quelque prix
que ce fût; et de peur qu’il ne lui prît envie d’élever la voix pour appeler du secours, je lui fis
voir une honnête raison de silence, que je tenais sur mon juste-au-corps. Un pistolet! me dit-il.
Quoi! mon fils, vous voulez m’ôter la vie, pour reconnaître la considération que j’ai eue pour
vous? À Dieu ne plaise, lui répondis-je. Vous avez trop d’esprit et de raison pour me mettre
dans cette nécessité ; mais je veux être libre, et j’y suis si résolu que, si mon projet manque
par votre faute, c’est fait de vous absolument. Mais, mon cher fils, reprit-il d’un air pâle et
effrayé, que vous ai-je fait? quelle raison avez-vous de vouloir ma mort? Eh non! répliquai-je
avec impatience. Je n’ai pas dessein de vous tuer, si vous voulez vivre. Ouvrez-moi la porte,
et je suis le meilleur de vos amis. J’aperçus les clefs qui étaient sur sa table. Je les pris et je le
priai de me suivre, en faisant le moins de bruit qu’il pourrait. Il fut obligé de s’y résoudre. À
mesure que nous avancions et qu’il ouvrait une porte, il me répétait avec un soupir: Ah! mon
fils, ah! qui l’aurait cru? Point de bruit, mon Père, répétais-je de mon côté à tout moment.
Enfin nous arrivâmes à une espèce de barrière, qui est avant la grande porte de la rue. Je me
croyais déjà libre, et j’étais derrière le Père, avec ma chandelle dans une main et mon pistolet
dans l’autre. Pendant qu’il s’empressait d’ouvrir, un domestique, qui couchait dans une
chambre voisine, entendant le bruit de quelques verrous, se lève et met la tête à sa porte. Le
bon Père le crut apparemment capable de m’arrêter. Il lui ordonna, avec beaucoup
d’imprudence, de venir à son secours. C’était un puissant coquin, qui s’élança sur moi sans
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Zola, Nana,
Extrait du Chapitre V
« — Je vous demande pardon, messieurs, dit Nana en écartant le rideau, mais j’ai été
surprise…
Tous se tournèrent. Elle ne s’était pas couverte du tout, elle venait simplement de boutonner
un petit corsage de percale, qui lui cachait à demi la gorge. Lorsque ces messieurs l’avaient
mise en fuite, elle se déshabillait à peine, ôtant vivement son costume de Poissarde. Par-
derrière, son pantalon laissait passer encore un bout de sa chemise. Et les bras nus, les épaules
nues, la pointe des seins à l’air, dans son adorable jeunesse de blonde grasse, elle
tenait toujours le rideau d’une main, comme pour le tirer de nouveau, au moindre
effarouchement.
— Oui, j’ai été surprise, jamais je n’oserai… balbutiait-elle, en jouant la confusion, avec des
tons roses sur le cou et des sourires embarrassés.
— Allez donc, puisqu’on vous trouve très bien ! cria Bordenave.
Elle risqua encore des mines hésitantes d’ingénue, se remuant comme chatouillée, répétant :
— Son Altesse me fait trop d’honneur… Je prie Son Altesse de m’excuser, si je la reçois
ainsi…
— C’est moi qui suis importun, dit le prince ; mais je n’ai pu, madame, résister au désir de
vous complimenter…
Alors, tranquillement, pour aller à la toilette, elle passa en pantalon au milieu de ces
messieurs, qui s’écartèrent. Elle avait les hanches très fortes, le pantalon ballonnait, pendant
que, la poitrine en avant, elle saluait encore avec son fin sourire. Tout d’un coup, elle parut
reconnaître le comte Muffat, et elle lui tendit la main, en amie. Puis, elle le gronda de n’être
pas venu à son souper. Son Altesse daignait plaisanter Muffat, qui bégayait, frissonnant
d’avoir tenu une seconde, dans sa main brûlante, cette petite main, fraîche des eaux de toilette.
Le comte avait fortement dîné chez le prince, grand mangeur et beau buveur. Tous deux
étaient même un peu gris. »
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Phèdre, Jean Racine
PHÈDRE
Acte I, scène 3 – Phèdre, Oenone
Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée
Sous les lois de l'hymen je m'étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait s'être affermi,
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.
Par des vœux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l'orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée,
D'un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l'encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse,
J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J'offrais tout à ce Dieu que je n'osais nommer.
Je l'évitais partout. O comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j'osai me révolter :
J'excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l'ennemi dont j'étais idolâtre,
J'affectai les chagrins d'une injuste marâtre ;
Je pressai son exil, et mes cris éternels
L'arrachèrent du sein et des bras paternels.
Je respirais Oenone, et depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l'innocence.
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
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De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaines précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J'ai revu l'ennemi que j'avais éloigné :
Ma blessure trop vive a aussitôt saigné,
Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C'est Vénus tout entière à sa proie attachée.
J'ai conçu pour mon crime une juste terreur ;
J'ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur.
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