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RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET UNIVERSITAIRE


INSTITUT SUPERIEUR PEDAGOGIQUE ET TECHNIQUE DE
KINSHASA
Section électricité

EXIGENCES LÉGALES ET DÉONTOLOGIE DE LA


PROFESSION
Cours à l’usage exclusive des étudiants de LPTA3 II

Gilbert K. MUSAMPA, PhD

Année Académique 2023-2024


INTRODUCTION GÉNÉRALE

0.1. CONTEXTE DU COURS : L’ÉTHIQUE ET LE L’ÉLÉVATION D’UNE NATION

0.1.1. Le règne des antivaleurs

Sachons que les attitudes, les comportements ou les actes que posent les individus
sont déterminés en grande partie par les valeurs dont ils sont porteurs. Pour ne pas
être un tueur des gens, il faut d’abord être avoir intériorisé que la vie humaine et
sacrée et donc doit être respectée et préservée. C’est cette valeur qui convainc de ne
pas tuer. Les bons comportements constructeurs dérivent des valeurs qu’on se
donne. Les valeurs constructrices sont l’assise fondamentale de tout développement
d’une nation. Aucune nation ne peut survivre, ni se développer sans une assise solide
sur des valeurs constructrices.

Le mot "développement" porte en lui une valeur : changer l’état d’être actuel. En effet,
tout le monde n’a pas intérêt dans le changement de l’état de choses. Bien des gens
n’ont même pas conscience de la nécessité de changer ; de modifier leurs attitudes et
leurs comportements même pour leur propre intérêt : cesser de fumer, dormir sous
moustiquaire imprégné, se laver les mains, bannir les feux de brousse, etc.

Cependant, que des contradictions entre "valeurs" et "intérêt". Pour un intérêt


matériel (argent, villa, voiture, sexe, etc.), bien des gens sont prêts à sacrifier toute
une nation, tout un bataillon militaire au front, les enseignants d’une province, leur
propre père, etc., pour garantir leur propre intérêt materiel.

Que faire face à ce dilemme entre valeurs et intérêts ? Les lois et règlements prévoient
des sanctions et des peines. Malgré cela, nombreux continuent à se méconduire ! Est-
ce parce qu’on ne punit pas du tout ou assez ?

Dans notre pays, la RDC, l’impunité a été souvent décriée et condamnée ; même par
les lois. Malgré tout, il est souvent reporté et documenté des détournements, des
trafics de marchés publics de gré à gré et des faits de corruption impunis. Cependant,
ceux qui punissent ne sont pas bien vus par la famille du délinquant, les membres
de son parti politique, de son église, de sa tribu, etc. Par surcroit, ceux qui les
dénoncent sont mal vus et plus souvent sanctionnés.

La délinquance s’affiche impunément et la société vogue vers la dérive. Que de


victimes d’antivaleurs ! La demande de punition devient pressante : « Fimbu ! ».

Ce cours prend en compte le paradigme africain de la primauté des valeurs avant


le dévoiement (déviation) des sociétés africaines ; d’une part, suite à l’accident
historique de la colonisation qui a imposé les valeurs étrangères, et, d’autre part,
par l’impérialisme des antivaleurs occidentales qui a pour cheval de Troie, les
médias et les NTIC, les systèmes, l’imitation aveugle et les élites aliénées.

2
Seules la re-centration sur les valeurs locales a permis à certains peuples de
survivre à cet impérialisme. Elle est un des piliers du développement durable et
une des stratégies pour libérer la société de la corruption.

0.1.2. La punition des délinquants est-elle la solution idoine ?

Oui ; il faut punir pour dissuader les autres délinquants. Mais un dilemme persiste :

➢ Y a-t-il assez de places dans les prisons pour ces milliers de délinquants publics 1 ?
➢ Hélas non ! Faudra-t-il construire de nouvelles prisons ?
➢ Mais alors que prioriser pour le développement : les prisons ou les écoles !
➢ Pire ; trouvera-t-on des remplaçants peu corruptibles si déjà les jeunes dans les écoles sont
corrompus ? Que des faux bulletins, diplômes d’état, etc. !

La sanction peut dissuader les uns à persévérer dans les antivaleurs et stimuler
d’autres à adopter ou tout au moins à respecter les valeurs positives pour la
société.

Cependant, l’expérience montre que la délinquance continue quelque peu même


lorsqu’on sanctionne. Il faut donc que les enseignants intériorisent les valeurs
propres à la profession d’enseignant et à l’éducation. Cette intériorisation est
fondamentale et est possible :

➢ En implantant des mécanismes de promotion des valeurs dans les institutions éducatives ;
➢ En éduquant les futures cadres et professionnels de l’enseignement, aux valeurs et à
l’éthique dans leur future profession.

0.1.3. La nécessité de la double compétence technique et éthique.

Ce cours s’inscrit dans la mission de l’université congolaise qui est de former des
" conducteurs d’hommes " intègres, et donc compétents tant au niveau technique
qu’éthique. Deux niveaux de compétence : technique et éthique :

➢ Compétence technique : capacité à réaliser une tâche de manière efficace et efficiente :


« the ability to do something successfully or efficiently » ;
➢ Compétence éthique : capacité à conformer son travail aux valeurs de sa profession et à
celles de sa société2.

Quel que soit sa technicité, un cadre dont son comportement professionnel ne


répond pas à ces deux aspects, il est inutile, incompétent et, voire-même,
dangereux pour la société. Dans le jargon purement kinois, il serait un
« Kuluna » en gravette (bandit), dont la société peut se dispenser sans remords.

1 Le Procureur de la République à Goma disait « La prison centrale est surpeuplée d’assassins, de violeurs, de voleurs à
mains armés. Faut-il en libérer pour créer de la place pour ces détourneurs … ».
2 On parle de "do ; not harm" : ne faites pas plus de mal par votre intervention.

3
En fait, la crise multiforme que subissent les habitants en RDC, résulte plus
d’une marginalisation des valeurs d’éthique parmi les acteurs publics et privés3,
que d’un manque de compétences techniques. Les ennemis externes utilisent les
acteurs véreux (malhonnêtes) comme cheval de Troie. À ce stade, pouvons donc,
dire que « si rien n’est fait pour la promotion des valeurs, adieu l’émergence, pas
de développement, rien de bon pour la société congolaise.

0.1.4. Qu’en est-il de ceux qui travaillent sur la personnalité de l’homme ?

La compétence éthique est plus cruciale pour ceux qui travaillent sur la
personnalité de l’homme ; leur maturation et leur comportement en privé et en
société, particulièrement les enseignants, psychologues, les éducateurs, les
communicateurs et les experts des questions sociales sont d’une importance
capitale, car ils sont plus exposés au risque de manipuler l’homme.

0.2. OBJECTIFS DU COURS


0.2.1. But du cours

Préparer l’étudiant (future cadre ou future enseignant) à pouvoir répondre aux


exigences éthiques en milieu professionnel et à la déontologie de sa profession au
sein du système éducatif.

0.2.2. Visé du cours

Ce cours vise à :

➢ Sensibiliser les étudiants à la primauté de la dimension éthique dans l’exercice


d’une profession, à l’occurrence celle d’enseignant ;
➢ Les amener à promouvoir la fonction de l’enseignement au sein de la société ;
➢ Les amener à incarner les valeurs constructrices et devenir ainsi des artisans
de la refondation éthique parmi les élites et cadres congolais au sein d’un monde
dominé par la vénalité.

0.2.3. Objectifs spécifiques du cours

L’étudiant de LPTA3 II qui m’aura suivi avec une attention soutenue sera don,
capable :

➢ D’expliquer les concepts de base en éthique et déontologie professionnelle ;


➢ De rappeler les valeurs éthiques fondamentales en milieu professionnel ;
➢ Décrire les mécanismes et les structures de promotion des valeurs, ainsi que le
processus de leur mise en œuvre au sein d’une organisation ;
➢ D’expliquer les règles éthiques spécifiques à sa future profession d’ingénieur-
d’enseignant ;
➢ D’appliquer ces concepts à l’analyse d’incidents critiques en milieu local.

3 Marchés publics trafiqués pour des routes mal faites ; salaires détournés dont les bénéficiaires meurent par milliers
à petit feu ; délinquance fiscale ; produits contrefaits qui tuent des milliers des congolais, etc.
4
0.3. PLAN DESCRIPTIF DU COURS

Trouvez dans ce plan une description systématique du contenu du cours reparti en


trois chapitres.

Chapitre I
GÉNÉRALITÉS SUR L’ÉTHIQUE ET LA DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE

Y sont définis et différenciés, les concepts de morale, d’éthique, de déontologie, de


profession, de valeur et système de valeurs, de norme et de responsabilité. En fin de
chapitre, ces concepts sont situés dans leur approche actuelle en milieu d’entreprise
et de travail : la responsabilité sociale des entreprises.

Chapitre II
STRATÉGIES DE PROMOTION DES VALEURS AU SEIN D’UNE ORGANISATION

Cette partie du cours expose d’abord les valeurs fondamentales en éthique


professionnelle tout en prenant en compte les ODD4 récemment définis en 2015 qui
implique une responsabilité sociale des organisations, ainsi que des nouvelles
valeurs.

Le chapitre décrit ensuite la procédure pour instaurer les valeurs au sein d’une
organisation. Les conditions de réussite de ces stratégies sont présentées à la fin du
chapitre.

Chapitre III
ETHIQUE ET DÉONTOLOGIE DE LA PROFESSION D’ENSEIGNANT

Le chapitre démarre sur les dispositions pertinentes de la législation congolaise


concernée par l’exercice de la profession d’enseignant. Les éléments basiques du code
de l’enseignant sont ensuite présentés

0.4. ANNEXES :

Annexe 1 : Petit lexique


Annexe 2 : Code de déontologie de l’enseignant (Burkina-Faso).

0.5. BIBLIOGRAPHIE

Elle est reprise en fin support.

0.6. PRÉREQUIS

4
Objectifs du Développement Durable
5
Il est opportun pour ce cours, avoir une bonne « culture générale en didactique,
pédagogie, législation scolaire, psychologie sociale et du développement ».

0.7. EXIGENCES DU COURS

1. Participation pleine et obligatoire à toutes les séances présentielles.


2. Réalisation effective et personnelle des exercices.

0.8. MODES D’ÉVALUATION

Je précise que concernant les modes d’évaluation, il faut retenir que :

- Le TP compte pour la moitié de la cote finale prévue du cours en première et


seconde session.
- L’examen sera exclusivement par écrit et en documents fermés. Il portera sur
la compréhension et la maîtrise des concepts en éthique et déontologie en
général et celle de l’enseignement.

0.9. PRÉSENTATION DES TP

Concernant les travaux pratiques, retenez que :

➢ Individuel ;
➢ Les copies conformes ne seront pas prises en comptent / considérées ;
➢ Conditions de saisis :

Caractère : Bookman Old style


Dimension : 12
Interligne : 1,15 sans espaces avant et après les paragraphes
Justifier le texte au centre.

➢ Imprimez et déposez une copie en hard au près du Professeur titulaire et en


soft à l’adresse suivante : musampagil@gmail.com ;
➢ Les TP doivent me parvenir avant la dernière séance des leçons présentielles.

6
Chapitre I
GÉNÉRALITÉS SUR L’ÉTHIQUE ET LA DÉONTOLOGIE
PROFESSIONNELLE

Les fondements de l’éthique et déontologie professionnelle sont à situer dans les


concepts, ainsi que dans les valeurs fondamentales pour tout professionnel.

La compréhension des concepts de base en éthique et déontologie professionnelle


permet d’amorcer une imprégnation du sens de l’éthique attendu dans l’exercice de
la profession de l’enseignant au sein de la société. Il s’agit des concepts de morale,
d’éthique, de déontologie, de profession, de valeur et norme, de devoir et de
responsabilité. Ces concepts ont émergé dans le contexte de la philosophie et de la
morale ; ce qui explique leur caractère quelque peu abstrait bien que pratique.

I.1. DE LA MORALE, DE L’ÉTHIQUE ET DE LA DÉONTOLOGIE


PROFESSIONNELLE

Les sociétés humaines sont fondées sur une morale du bien ou du mal à laquelle
l'homme est soumis. Au fil du temps et à force d’expériences, chaque société construit
des principes moraux qui permettent une cohabitation pacifique de ses membres et
assurent ainsi sa survie et sa reproduction en prévenant ce qui peut la troubler et
même la tuer (le mal). Par exemple la morale africaine précoloniale, plaçait le respect
des ancêtres et des ainés en tête des principes de base de la morale.

Par la colonisation, nos sociétés africaines ont été projetées dans une mondialisation
dominée par l’Occident comme référentiel organisationnel (suprématie de l’intérêt,
économie marchande, marchandisation du travail, partitocratie, etc.) et culturel
(croyances, mode d’éducation, etc.). Le cadre de l’exercice d’une profession en Afrique
s’inscrit aussi dans le contexte de cet accident de l’histoire.

Aujourd’hui, les principes moraux mettent au premier rang la liberté et les autres
droits de l'Homme ainsi que le droit à un environnement écologique sain. Ces principes
moraux ne s’appliquent pas mécaniquement. Exemple : le droit à la vie peut
s’interpréter face à une légitime défense à apprécier in situ ; etc.

Ainsi ; au contact de ses semblables, et particulièrement dans sa vie professionnelle,


l'homme est amené à réfléchir et à débattre pour mieux comprendre à quoi les
principes moraux l'engagent dans une situation donnée et quelle est leur portée.

Par rapport à une profession donnée, les valeurs et les principes moraux sont
réinterprétés de manière à ce que ceux qui exercent cette profession partagent la
compréhension spécifique des principes moraux sociaux en rapport avec la spécificité
de l’exercice de leur profession au sein de la société. De ces principes moraux, se
dégage une éthique à suivre. Tel est le cas des médecins congolais qui examinent
comment interpréter le principe moral d’assistance à personne en danger dans

7
l’exercice de leur profession face à une nécessité d’aller en grève pour une
amélioration de leur situation sociale.

Définissons d’abord les trois concepts de morale, d’éthique et de déontologie. Ils sont
tellement proches qu’ils sont souvent confondus.

I.1.1. De la morale

Le mot "morale " est issu du latin mos/mores qui traduit le terme grec êthos ; deux
termes - latin et grec – qui désignent ce qui a trait aux mœurs, aux coutumes et plus
largement aux comportements humains. L’éthique et la morale ont donc une même
origine étymologique et renvoient aux règles qu’il est bon de tenir dans la vie sociale
ou professionnelle ; à "l’art de diriger la conduite pour avoir un comportement juste".

Toute société humaine, aussi primitive soit-elle, a des règles qui distinguent le bien
du mal. Il n’y a pas de société sans morale, le cas échéant, elle serait si fragile qu’elle
ne survivrait pas longtemps. C’est ainsi qu’une réflexion permanente prend corps
dans toute société pour construire un système de comportements à tenir pour le bien
et à condamner pour le mal. Ainsi est née « la morale » qui traite de la façon dont il
faudrait vivre. Comme le définit le dictionnaire Larousse, la morale est "l'ensemble
des règles d'action et de valeurs qui fonctionnent comme normes dans une société".

Comme il s’agit des groupes membres de l’espèce humaine, ils vont tous déboucher
sur les mêmes principes de base constitués de valeurs universelles, avec cependant
des normes comportementales particulières selon l’histoire de chaque groupe. Ces
principes ont des variantes selon la culture, les conditions de vie et les besoins de la
société. Ils ont souvent pour origine ce qui est positif pour la survie du clan, du
peuple, de la société. Si de tels principes sont en outre positifs pour l'ensemble des
peuples de la terre, on les considère comme faisant partie de la morale universelle5.

La morale est ainsi un ensemble de principes de jugement, de règles de conduite


relatives au bien et au mal, de devoirs, de valeurs, parfois érigés en doctrine, qu'une
société se donne et qui s'imposent autant à la conscience individuelle qu'à la conscience
collective.

Résumons avec Alain Lercher (cité par Prairat, 2009) en disant que la morale serait
un ensemble de prescriptions destinées à assurer une vie en commun juste et
harmonieuse ; par exemple : il ne faut pas tuer, il ne faut pas voler, etc.

5 Bernard A. O. Williams 1929-2003, grand spécialiste anglais de philosophie morale : « L'Ethique et les limites de la
philosophie ». Philosophe contextualiste, il pose l'idée que l'éthique concerne toujours un individu qui vit dans un
contexte social prédéfini et particularisé (notamment dans un contexte économique, légal, d’organisation, …)
8
I.1.2. De l’éthique

Au sens général

Si la morale est constituée des principes et des règles pour une vie en commun,
l'éthique se réfère à une réflexion sur les comportements à adopter dans un contexte
donné pour rendre le monde humainement habitable 6 . Or, les comportements à
adopter en société sont déterminés par les valeurs partagées entre les membres de
cette société. Elles servent de normes pour apprécier et juger ces comportements. En
cela, s'attache aux valeurs et se détermine de manière relative dans le temps et dans
l'espace, en fonction de la communauté humaine et de l’activité auxquelles elle
s'intéresse.

À propos de valeurs, comme toute communauté est spécifique compte tenu de son
histoire, la société congolaise n’est pas exactement la même que les autres sociétés.
L’exercice d’une profession, en l’occurrence celle d’enseignant, est soumise de
manière spécifique aux principes moraux compte tenu des spécificités de sa
profession en RDC.

A ce titre, on peut dire que l’éthique de l’enseignant en société congolaise ne se


définira pertinemment qu’en s’inscrivant dans le contexte des valeurs de la société
congolaise. Elle ne peut qu’être dynamique car la société congolaise est changeante.
C’est ainsi que Droz (2006) définit l’éthique comme un ensemble rationnellement
structuré de valeurs explicites qui définissent le bien, le juste et le beau, par lequel
quelqu’un rend compte de lui-même, de ce qui le fait exister et agir. Elle est la manière
de dire comment l'individu se doit d’agir ; et à partir de quoi il doit juger et décider. Il
s’agit en conséquence, d’un système explicite et argumenté de valeurs qui induisent
des comportements ou des pratiques sociales dans une situation donnée (Sauvé,
Villemagne, 2006).

On peut décanter une éthique universelle valable pour toutes les professions, et une
éthique appliquée pour désigner l’ensemble des questions éthiques relatives à un
domaine de l’activité humaine comme l’enseignement, la gouvernance, l’entreprise, la
recherche, les élections, la culture, etc.

Toutefois, qu'on parle de morale ou d'éthique, on ne peut pas se soustraire aux


interdits moraux de la société qui conditionnent notre liberté pour le bien de
l'humanité. Ces interdits moraux sont le cadre de la liberté collective puisqu'ils sont
prescrits par les hommes eux-mêmes dans la civilisation qui est la leur.

6 Fondamentalement, l'éthique est la science de la morale et des moeurs. C'est une discipline philosophique qui
réfléchit sur les finalités, sur les valeurs de l'existence, sur les conditions d'une vie heureuse, sur la notion de
"bien" ou sur des questions de moeurs ou de morale. Durant l'époque moderne, le terme « éthique » est
généralement employé pour qualifier des réflexions théoriques portant sur la valeur des pratiques et sur les
conditions de ces pratiques.
9
I.1.3. De la déontologie

La déontologie 7 est définie comme une théorie des devoirs (petit Robert) ou
"l’ensemble de règles et de devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux
qui l’exercent, les rapports entre ceux-ci et avec leurs clients ou le public " (Larousse)
et qui, si elles ne sont pas respectées, peuvent donner lieu à des sanctions8.
De là, les littéraires ont introduit le qualificatif "déontique" pour exprimer l’ordre du
devoir en termes d’obligation, d’interdit ou de permission.

I.1.4. Liens entre morale, éthique et déontologie

Paraphrasant S. Mercier, J-J. Nillès (2003) relève les nuances entres les trois
concepts de morale, éthique et déontologie.

La morale définit des principes ou des lois générales que l’homme doit adopter pour que la vie
reste harmonieuse au sein de la société. La morale ignore la nuance, elle est binaire.
L'éthique réfère aux valeurs qui déterminent la disposition individuelle à agir selon les vertus,
afin de rechercher la bonne décision dans une situation donnée, en tenant compte
des contraintes de la situation. Chaque situation est spécifique par la conjoncture
des facteurs et acteurs du moment. La personne s’interroge, examine les arguments
et décide. Sans ignorer les principes moraux, l’éthique professionnelle recherche la
décision qui est la meilleure dans le cas présent.
La déontologie formalise toutes ces règles morales, après analyse de leur application au sein
d’une entité (une organisation, une profession) pour en faire une contrainte doublée
de sanctions s’imposant à tous les membres de l’entité. La sanction introduit un
aspect juridique.

Pour les professionnels, violer la norme morale donne une mauvaise conscience par
rapport à la vie sociale ; violer la règle déontologique signifie une sanction par la
corporation et l’organisation où il preste. On pourrait donc dire que : réfléchie,
raisonnée, généralisée et appliquée à un domaine professionnel, la morale s'énonce
sous forme de règles de déontologie qui ont force de loi et dont le non-respect est
juridiquement sanctionné.

Pour Paul Ricoeur (1992) ; confronté à une situation professionnelle donnée (qu’est-
ce-que je veux faire ?), l’éthique indique à quelles valeurs et normes il convient de se
référer (qu’est-ce que je dois faire ?), la morale relève de l'obligation (j’ai le droit de
faire ou de ne pas faire).

7 Étymologie du mot déontologie : du grec "dei = il faut" "onto = ce qui est" ; d’où "deonto = ce qu'il faut faire", "déonta
= les devoirs", et " logos – Déontologie : " étude de ce qu’il faut faire, des devoirs".
8 C'est en 1823 que le mot « déontologie » apparaît pour la première fois en langue française, dans la traduction de

l'ouvrage du philosophe utilitariste anglais Jeremy Bentham ; l'Essai sur la nomenclature et la classification des
principales branches d'Art et Science. Il écrit : « L'éthique a reçu le nom plus expressif de déontologie ».
10
Triangle de Paul Ricoeur :

En éthique, il est communément question de valeurs, des principes, des normes.

Ainsi, en définitive, l’éthique professionnelle définit alors :

➢ Des valeurs qui indiquent des idéaux à poursuivre dans une profession ou une
organisation (ex. : justice, autonomie, intégrité),
➢ Des principes : qui donnent des grandes orientations à l'action, fixent des attitudes
(ex. : respect de la vie, libre examen, rendre à chacun son dû)
➢ Des normes et de règles : qui déterminent l'action, encadrent la décision (ex. :
consentement libre et éclairé, prendre les « moyens proportionnés », respect des contrats).

I.1.5. De la profession

I.1.5.1. Définition de la profession

Suffit-il de travailler pour qu’on parle de profession ? Non. Il faut que ce travail soit
stable et corresponde à une spécialité socialement reconnue. La profession fait donc
référence à la fois à un travail stable dans le cadre d’une compétence spécifique dont
la société a besoin 9 . Ceux qui l’exercent le font avec expertise en réponse à une
préoccupation des membres de la société (rôle social), qui les rémunèrent d’une
certaine façon. La société recherche les professionnels pour venir à bout des
problèmes rencontrés dans la vie : un médecin pour un problème de santé, un
enseignant pour des besoins de formation pour soi-même ou les siens, etc.

En rapport avec ce rôle social, en sociologie, on comprend qu’une profession est « un


groupe de rôles "professionnels", c'est-à-dire rôles dans lesquels les titulaires
remplissent certaines fonctions dans la société en général, et par ces activités, "gagnent
leur vie" en exerçant un emploi à plein temps » (Parsons, 1954, p. 372)10.

9 Les dictionnaires définissent le concept profession en se référant au métier, à ceux qui l’exercent, à l’engagement
personnel. Du latin "professio" (« déclaration, déclaration publique, action de se donner comme ») ; la profession
implique un engagement à se rendre capable de bien répondre au besoin associé une profession donnée : la
profession médicale pour la santé. La profession sera spécifiée selon des aspects particuliers du besoin.
10 Par extension, la profession désigne le métier appartenant à un secteur d'activité particulier. On parle ainsi de

profession agricole, commerciale, médicale, artisanale, de la magistrature, de l'enseignement, du bâtiment, de


l'industrie, du commerce.
11
Du fait des dommages qui peuvent être causés au tiers et à toute la société lors de
l’exercice d’une profession, certaines professions sont réglementées, c'est-à-dire que
leur exercice n'est pas libre. Elles sont spécialement organisées par des textes ayant
force de loi, ainsi que des règlements qui en fixent les modalités et la déontologie.

I.1.5.2. Critères d’une profession

Tous les emplois ne sont pas des professions dans son sens plein. Certes on note une
tendance à la professionnalisation du travail : tout le monde veut être reconnu par la
société comme un professionnel dans son domaine afin d’être rémunéré de manière
conséquente. Ainsi, la tâche de définir ce qu'est une profession peut être mal vue par
ceux qui ne seraient pas inclus dans la définition donnée au concept « profession »,
soit parce qu’elle est trop restreinte, elle disqualifierait (ex definitione) certains
groupes comme des professionnels ; ou alors trop large, incluant tout celui qui en fait
un gagne-pain (Parsons, 1954).

Pouvons ici dire qu’une définition typologique de la profession est proposée. Un


ensemble d'activités professionnelles sera appelé une profession si répond aux
caractéristiques suivantes :

➢ Un engagement stable à répondre à un besoin spécifique au sein de la société ;


➢ Ces activités constituent le gagne-pain pour les professionnels ;
➢ Elles exigent des connaissances théoriques spécifiques et/ou des compétences
pratiques que les non-professionnels n'ont pas (experts vs laïcs) ;
➢ La transmission de ces connaissances et compétences est institutionnalisée. Ne
peuvent obtenir l'accréditation à exercer la profession que ceux qui ont acquis les
connaissances théoriques et/ou les compétences pratiques de façon institutionnalisée
suivant la procédure établie11.
➢ Le contrôle de la pratique professionnelle par des professionnels. Dans ce but, une
association professionnelle est créée et se fera officiellement reconnaître pour établir
et contrôler les normes et les procédures d'accès à la profession, les critères de la
bonne et mauvaise pratique professionnelle.

La conformité à ces caractéristiques par un ensemble d'activités professionnelles, en


fait une profession dans son sens plein. Cependant, lorsque l'une ou l'autre de ces
caractéristiques est manquante ou n'est que partiellement remplie, cela ne peut
constituer une raison suffisante pour cesser de qualifier ces activités de "profession",
même si c’est dans un sens incomplet. En outre les caractéristiques se réalisent à
des degrés variables de professionnalisation. Toutes les professions n’atteignent pas
un degré égal de professionnalisation en même temps.

Dans ce cours, le mot profession désignera plus souvent les activités exercées
de manière régulière et compétente en vue de rendre service au public en
réponse à un besoin spécifique.

11 Aujourd'hui les universités ont le rôle important de la transmission du savoir qui donne accès à la pratique de
nombreuses professions. De même, le diplôme universitaire est souvent un prérequis pour être admis à une pratique
professionnelle.
12
Selon Prairat (2009b), une profession n’est ni une association (un rassemblement
volontaire de personnes), ni une communauté (un groupe partageant une même
conception du bien). Ce qui relie les membres, au sein d’une même profession, n’est
ni ce qu’ils sont, ni ce qu’ils entendent devenir mais ce qu’ils ont à faire ensemble, ici
et maintenant. Ainsi, une profession apparaît comme telle lorsque les professionnels
se reconnaissent une tâche commune d’utilité collective et lorsqu’ils sont capables de
se coordonner en s’imposant un ensemble de règles partagées.

I.1.6. À quoi sert une déontologie professionnelle ?

Une déontologie remplit une trilogie fonctionnelle pertinente à savoir.

➢ Faciliter la décision et l’engagement. Elle est d’abord là pour organiser le groupe


de professionnels de l’enseignement en lui donnant des points de repères pour décider,
s’orienter et agir dans des contextes de travail brouillés et difficiles. Loin d’être un
carcan qui les enferme, elle est au contraire un guide pour assumer une responsabilité
en acte.
➢ Définir l’identité d’une profession. Une déontologie est un texte qui essaie toujours
in fine de répondre à la question « quid ? » (De quoi s’agit-il ?). Qu’est-ce que bâtir pour
un architecte ? Qu’est-ce qu’informer pour un journaliste ? Qu’est-ce qu’enseigner
pour un enseignant ? Une déontologie précise une identité professionnelle.
➢ Moraliser les pratiques professionnelles. Enfin, une déontologie précise les bonnes
et les mauvaises pratiques. Une déontologie enseignante n’a pas à fixer des standards
didactiques mais à proposer des critères socio-éthiques qui permettent de récuser ou
de valider certaines pratiques. Une déontologie identifie les pratiques douteuses,
ambiguës ou illégitimes au plan socio-moral pour ne retenir que celles qui méritent
d’être retenues.

I.2. AUTRES CONCEPTS DE BASE

I.2.1. Valeur

I.2.1.1. Approche définitionnelle

La déontologie professionnelle vise à promouvoir les valeurs dans l’exercice d’une


profession. Les valeurs sont « des idéaux à poursuivre » dans l’organisation ou la
profession ; par exemple l’intégrité, la justice, etc.

Une valeur est « ce qui vaut » ; par exemple « être organisé, être propre, ponctuel, etc.
» dans son travail sont des valeurs. Une valeur est ce qui est désirable ou désiré, un
idéal qui permet d’apprécier, "une croyance durable" (Rokeach, 1979), un mode
spécifique de conduite ou d’état final d'existence, qui est personnellement ou
socialement préférable à un autre mode de comportement ou but de l’existence
opposé.

Par exemple, l’équité dans l’évaluation est une valeur en milieu scolaire ; le trafic des
points contre argent ou sexe ; l’évaluation « tribale » sont des « antivaleurs » opposées
13
à l’équité. « Antivaleur » signifie valeur opposée à une valeur ou ce qui est souhaité
dans une communauté sociale donnée. Le deux se réfèrent à des systèmes des valeurs
différents. L’enseignant qui pratique l’antivaleur "évaluation tribale" se réfère à un
système de valeurs (solidarité tribale) qui est différent du système des valeurs prôné
en milieu scolaire (docimologie).

I.2.1.2. Système de valeurs

Un système de valeurs est une organisation durable des croyances concernant les
modes souhaitables de conduite et les conceptions de l'existence. Ce sont des valeurs
reliées entre elles autour d’une conception du monde. Par exemple, dans une
conception capitaliste du monde qui privilégie l’accumulation des richesses à tout
prix ; le travail pour gagner l’argent, l’exploitation de l’autre, la « mise en valeur » des
ressources naturelles rentables (même en polluant), le vol, la tricherie, le mensonge,
l’assassinat au besoin et même la guerre pour prendre les richesses de l’autre,
constituent un système de valeurs.

Une valeur rattachée à un système de valeurs devient durable. Ainsi, intégrer


quelqu’un dans un système est un des moyens pour lui faire adopter une valeur reliée
à ce système. C’est pourquoi il est difficile de changer des valeurs chez des individus.

Exercices :

01. Donnez trois exemples des valeurs dans votre société traditionnelle et dites pourquoi
vous estimez qu’il s’agit d’une valeur.
02. Donnez un exemple d’un système de valeurs dans la société congolaise. Indiquez un
système de valeurs qui lui serait opposé.

I.2.2. Norme

I.2.2.1. Précisassions

Pour que les valeurs prennent corps dans la pratique professionnelle, des normes de
référence s’imposent. Une norme est une règle, un principe, un critère auquel se
réfère tout jugement et qui est admis dans une société, dans une corporation
professionnelle. Nous rencontrons des normes dans toute la vie courante. Par
exemple pour la valeur réussite en milieu scolaire a comme norme la réussite aux
examens avec une moyenne d’au moins 50% sans échec. Les dimensions de la plupart
de biens courants sont fixées par des normes : les piles, les médicaments, etc.

Une norme exprime toujours une recommandation ou une obligation à faire ou à ne


pas faire. Elle recommande ou prescrit.

La norme est l'ensemble des règles de conduite qu'il convient de suivre au sein d'un
groupe social. La plupart des normes sociales sont inscrites dans l'inconscient

14
collectif que nous nous approprions par l’éducation en commençant par l’éducation
en famille. Leur non-respect place l'individu "à la marge" de la société12.

Nous apprenons une profession dans un processus raisonné et volontariste à travers


l’apprentissage des connaissances et des techniques qui la fondent et la constituent.
Les normes professionnelles ne sont donc pas automatiquement acquises ; elles
doivent être délibérément instaurées à travers diverses stratégies (voir chap. 3) en
commençant par leur découverte en cours de formation.

I.2.2.2. Valeur et norme

Les valeurs nous indiquent des idéaux et des préférences au sein d’une entité ou
d’une profession. Elles fonctionnent moins comme des objectifs que comme des
orientations ou des horizons régulateurs.

La norme vise à éliminer, à modifier ou à promouvoir certaines conduites ou pratiques


en fonction des valeurs implicites ou, de préférence, explicites. Elle règle le conflit
entre plusieurs manières de procéder qui sont en suspens. Elle arbitre entre
plusieurs possibles ; fixe un usage là où plusieurs usages sont en concurrence. La
norme permet d’ajuster les conduites et de coordonner les interactions, tous les
membres étant soumis aux mêmes normes.

En fixant un usage, la norme répond toujours à un problème, à une question, à une


attente sociale. Elle a ainsi une dimension opératoire et elle exprime une ou plusieurs
valeurs, un ou plusieurs intérêts.

Une norme peut s’affaiblir lorsque la valeur qu’elle exprime s’étiole, n’est plus irriguée
par la valeur qu’elle entendait magnifier. Elle va néanmoins perdurer ; on parle de
"rémanence normative" pour qualifier la persistance d’une norme qui a perdu toute
pertinence sociale. Toutefois la valeur ne fonde jamais la norme, elle permet
seulement de l’évaluer pour parfois la réviser.

I.2.3. Devoir

La déontologie professionnelle détermine les devoirs du professionnel dans un métier


donné. Le devoir est compris comme une contrainte à tenir dans l’exercice d’une
fonction sociale, d’une profession, d’une responsabilité.

A chaque niveau d’insertion dans la société est associé un ensemble de devoirs qui
peuvent être liés à la profession exercée, (devoirs professionnels), à un rôle social
comme celui d’éducateur ou de parent (devoirs sociaux) ; à la vie commune au sein
de la société (devoirs moraux).

12 En éthique, on parle d'éthique "normative", qui vise à établir des normes (des fondements et des formes) de l'action
juste. L'éthique normative a des rapports avec le droit.
15
Certains devoirs ont un caractère quelque peu général à une macro catégorie sociale
donnée. Par exemple tous les agents publics de l’Etat, qu’ils soient du cadre politique,
du cadre administratif, du cadre mixte (paraétatique).

En définitive ; un devoir est une direction précise de la conduite commandée par


des valeurs données. Une obligation indique un lien d'ordre éthique qui assujettit
l'action de l'individu aux impératifs du devoir.

I.2.4. La responsabilité et la redevabilité

I.2.4.1. La responsabilité

Ce mot vient du latin "respons" – réponse. Il renvoie au fait qu’on doive répondre de
ce qu’on fait, de effets d’une action au cours de l’exercice d’une profession –
enseignant, médecin, etc. -, ou d’une fonction sociale (parent, chef du personnel,
ministre, etc.). En effet l’exercice d’une activité professionnelle peut déboucher sur
des dommages causés à l’usager des prestations du professionnel. Il doit alors
répondre de cela, c’est-à-dire
Si pour l’ingénieur qui a construit un pont, sa relation avec l’écroulement prématuré
du pont peut être assez facile à établir, il n’en est pas de même des prestataires
travaillant sur le psychisme, la personnalité des humains : élèves, travailleurs,
malades mentaux, traumatisés ; etc.

Par exemple l’enseignant de travail qui qui cote mal une élève pour n’avoir pas céder à ses
avances sexuelles ; ou encore qui refuse de vérifier le recours d’un étudiant ajourné par
erreur de calcul de ses points, etc. ; peuvent-ils se reconnaître responsables des
dommages causés sur la personnalité des victimes ?
En effet, l’étudiant exclus malgré ses bonnes motivations, peut développer des
perturbations graves de la personnalité.
Qui doit répondre de ces dégâts ; par ex. être puni et condamner à payer des dommages
à la famille ? Mais hélas, la responsabilité est souvent diluée dans une
"déresponsabilisation" : on parlera de "malchance", de "zoba", de "ndoki", etc.

Du point de vue de la théorie, l’idée de responsabilité renvoie de nos jours à deux


séries de connotations : les premières plutôt négatives avec le sens juridique du
terme, les secondes nettement plus positives avec son sens moral (Obin, 2012).

1. En droit, tant pénal que civil ou administratif, l’idée de responsabilité


renvoie aux effets dommageables d’une action. Elle est connotée
négativement. L’auteur d’un accident se rend en effet responsable d’un
dommage, voire coupable d’une infraction (si une loi l’établit) ; et à ce titre il
doit réparer, dédommager, voire être sanctionné. Les professions sont de plus
en plus confrontées à cette lecture qui focalise la responsabilité sur le risque
de dommage. En toute situation on cherche un responsable. Aucun dommage,
y compris lorsque sa cause en est d’évidence naturelle, ou bien qu’il est dû à
un tiers, pour lequel on ne doive de nos jours trouver et sanctionner des «
responsables ».

16
En effet, depuis une cinquantaine d’années, le principe de responsabilité a
tendance à s’étendre de la faute au risque de causer des dommages, une
notion devenue l’une des bases de la responsabilité civile et pénale, entraînant
dans tous les domaines le développement des assurances pour se protéger des
risques de dommages lors des prestations professionnelles. Cette séparation
de la responsabilité et de la causalité, qui représente une perversion du
principe de solidarité, produit de multiples effets néfastes :

a. D’une part elle encourage la prolifération de normes bureaucratiques,


et elle conduit à l’inaction par crainte du risque ;
b. D’autre part elle pousse à reporter sa faute sur quelqu’un d’autre, voire
à mentir pour se protéger ;
c. Enfin et surtout, elle associe dans l’imaginaire collectif l’idée de
responsabilité au risque de sanction, décourageant ainsi la motivation
à assumer des fonctions de responsabilité.

2. Dans son sens moral, plus positif, le responsable est celui qui accepte de
répondre de ses actes, de ses décisions et de leurs conséquences devant autrui.

Dans les organisations (entreprises, institutions, associations) le responsable


est d’abord une autorité hiérarchique qui doit répondre des résultats. C’est
aussi tout agent dans la sphère de son poste où il doit répondre de la qualité
de ses prestations professionnelles. Plus la structure ou l’organisation est
dédiée l’intégrité de la société et de ses membres individuels ou collectifs, plus
la responsabilité individuelle des professionnels qui y prestent devient grande
: éducateurs, juges, pasteurs ou imams, etc.

Devant qui répondre ?

Devant qui aura-t-on à répondre des conséquences de ses décisions ou de ses


prestations ? Par exemple pour un préfet d’une école secondaire, "autrui"
signifie-t-il qu’il doit répondre des échecs massifs de ses élèves aux examens
d’Etat devant les élèves, leurs familles, le Ministère de l’EPS, ses représentants
proches comme l’Inspecteur principal, le Chef de division, le ministre ; ou alors
devant la société en tant que telle ? Un peu de tout cela sans doute.

I.2.4.2. La redevabilité

De nos jours, on parle de principe de "redevabilité" qui découle de cette responsabilité


publique. Ce principe a été consolidé par l’article 15 de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen du 26 août 1789 ; article qui est sans ambiguïté à cet égard :
« Tout agent public doit rendre compte à la société de son administration ». Le principe
de responsabilité constitue donc pour les agents publics l’un des principes fondateurs
de la démocratie.

17
Qui est responsable et redevable des actes des subalternes ?

Dans la théorie bureaucratique (Max Weber), la responsabilité s’étend jusqu’aux


conséquences de actes des subalternes d’un chef. Ainsi le recteur de l’université
répond de ses actes de gestion mais aussi des actes des secrétaires généraux, des
doyens, et même des étudiants devant le Conseil d’administration, le Ministre de
l’ESU, le gouvernement, le Président de la République, la société.
Si selon Weber la responsabilité s’étend aux actes des subalternes ; qui sera
responsable et redevable devant le public : la société et les instances dirigeantes ?

En fait la responsabilité du chef ne peut diluer celle du subalterne. C’est ainsi que le
chef a le pouvoir de sanctionner et le devoir de prendre des dispositions de prévention.
Celui qui a posé l’acte délictueux est répondant des conséquences devant ses chefs
et devant les victimes. Cependant si cet acte pouvait être prévenu par ses chefs, ou
rentre dans une planification des chefs, alors la responsabilité des chefs est plus forte
et la redevabilité. Tel aura été le cas des chefs nazis, etc.

Le niveau de responsabilité pourrait être un peu inverse du degré d’autonomie de


l’exécutant. Mais l’autonomie totale est-elle possible ? Plus la personne est élevée
dans la hiérarchie, plus elle dispose d’autonomie dans les actes liés à son travail. Il
en est de même des professionnels experts : les enseignants, les psychologues, les
architectes, les médecins, etc. Ils disposent d’une autonomie très élevée dans leurs
prestations et répondent d’abord personnellement de leurs actes. Leur responsabilité
est totalement engagée.

Donc plus d’expertise ou d’autonomie d’un subalterne implique moins de responsabilité


de ses chefs sur les effets de ses actes. Évidemment cette responsabilité n’est jamais
nulle. En plus, le chef du subalterne reste redevable et responsable devant la
communauté, notamment parce que c’est lui qui a affecté cette tâche à l’auteur d’un
acte ravageur, plus souvent c’est lui qui l’a recruté, ou alors qui n’a pas fait rapport
sur son incompétence ou son immaturité sociale et psychologique.
En bref, le public, la société, l’entreprise a besoin de savoir « qui doit être fusillé13 »
pour toute conséquence regrettable d’une action sur autrui, sur la communauté ou
sur son environnement.

Conséquences sur autrui ! Mais, qui est autrui ?

C’est d’abord la victime au sens restreint (la personne) et élargi (ceux qui subissent
les effets, par ex. les orphelins). Au-delà des individus identifiables, c’est aussi tout
humain au sens où le philosophe humaniste Emmanuel Lévinas évoque la notion de
responsabilité morale : « La responsabilité est quelque chose qui s’impose à moi à la
vue du visage d’autrui. ... dès lors qu'autrui me regarde …, je suis convié à lui rendre

13 Expression empruntée à un officier qui expliquait par là ce que signifie la responsabilité, c’est-à-dire qui doit être
sanctionné si le plan ou programme échoue.
18
justice ; … son visage m'interpelle et me réclame justice, paix, harmonie » (Lévinas,
1996) 14.

La responsabilité peut prendre un caractère collectif ; elle peut être institutionnelle.


Tel est du gouvernement ; d’une organisation qui fournit un service ou un produit
non conforme, ou préjudiciable à la santé ; d’un cabinet d’enseignant d’où
l’insomniaque venu en consultation sort amnésique avec une énurésie.

En résumé disons que La responsabilité est une obligation qui consiste d'une part à
rendre compte de ses actes et de ceux dont on a la charge, et d'autre part, à en assumer
les conséquences.

La dilution de la responsabilité

On comprend dès lors l’appréhension de nombreux à assumer la responsabilité de


leurs actes en se donnant bonne conscience. La maxime "tout le monde le fait" est
souvent avancée comme une raison d’agir moralement acceptable dans des situations
pourtant répréhensibles. Cette maxime a pour particularité de concerner des types
d’actions moralement blâmables que des personnes préféreraient ne pas commettre,
mais qu’elles accomplissent néanmoins.

Par exemple, en tant qu’enseignant à charge du concours d’admission, vous devez


rester objectif pour que l’école ait de bons élèves. Mais comme plusieurs « aident les
leurs (famille, clan, tribu, province, école, collègue, etc.), vous organisez une fuite des
questionnaires pour les candidats de votre village. Vous vous donnez bonne
conscience en vous disant « batu nyonso basalaka yango » (tout le monde le fait) ; « yo
nde okobongisa Congo ! » (Est-ce vous qui allez développer le Congo !).

Il s’agit d’actions souvent très répandues au point qu’il semble difficile de faire
autrement que de les accomplir ; par exemple jeter au sol la bouteille plastique vidée
de jus, "comme le fait tout le monde". Lorsque ces personnes doivent justifier une
action de ce genre, elles ont la possibilité de répondre : « Je sais que ce n’est pas bien,
mais tout le monde le fait ! », comme si la maxime pouvait excuser leur action.

Pourtant du point de vue de l’éthique de la vertu, une telle action n’est pas excusable,
et cet argument ne fait pas de l’action accomplie une action morale. En réalité, tout
le monde n’accomplit pas cette action.

Cette maxime semble de mise sur des actions ayant des « faibles » conséquences
négatives directement sur l’individu qui pose l’acte répréhensible. Ainsi par exemple
des corrompus, les détourneurs, et autres professionnels délinquants se donnent
bonne conscience, vont au culte et y prennent même la communion le dimanche,

14 Emmanuel Levinas (philosophe humaniste) épingle notre responsabilité personnelle vis-à-vis de l'Autre humain.
C'est pourquoi il dit : « positivement, nous dirons que dès lors qu'autrui me regarde, j'en suis responsable sans même
avoir à prendre des responsabilités à son égard, … au-delà de ce que je fais ». Il n'y a pas de plus grande violence que
de chosifier l'Autre, de méconnaître son altérité, c'est-à-dire nier son existence. …, son visage m'interpelle et me
réclame justice, paix, harmonie. Mais cette responsabilité est non réversible, elle est à sens unique.
19
sont prédicateurs prêcheurs de bonnes vertus, etc. Souvent ils ne subissent pas
directement les conséquences de leurs défaillances morales - soit que les victimes
(ménages de soldats, d’enseignants privés du salaire volé) sont quelque peu
anonymes car éloignées, soit que les effets dévastateurs sont décalés dans le temps :
on survit par la solidarité familiale, par les bénéficiaires - élèves, justiciables, etc.

I.3. LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES (RSE)

I.3.1. Appréhension de la RSE

L’enseignant travaille dans le cadre d’une organisation - service public, entreprise


privée, etc. – qui vend ou rend disponible un produit ou un service utile aux membres
de la société. La « responsabilité sociale des entreprises » (RSE) consiste pour les
organisations à intégrer le concept de développement durable dans leurs prestations
(Portella, 2008). C’est-à-dire que dans ses activités, une organisation doit prendre en
compte ses impacts environnementaux et sociaux, et respecter ses parties prenantes :
salariés, actionnaires, clients, fournisseurs et acteurs de la société civile.

La RSE est donc à la fois interne (envers les salariés et les actionnaires), et externe
avec les clients, les fournisseurs et l’environnement social dans lequel elle agit
(niveaux local, national, international). C’est à ce prix qu’elle fonde une prospérité
durable en construisant une image percutante et une notoriété qui sont des atouts
concurrentiels fondamentaux et durables par la confiance créée.

On distingue six grands domaines de la RSE :

➢ L’environnement ;
➢ Les ressources humaines ;
➢ La gouvernance d’organisation ;
➢ Les pratiques commerciales ;
➢ L’impact local ;
➢ La citoyenneté.

I.3.2. Que gagne l’organisation à s’engager dans la RSE ?

Au-delà des bénéfices professionnels, humains et environnementaux, l’organisation


en retire des avantages concurrentiels qui préparent ses bénéfices futurs et donc sa
rentabilité durable grâce à la confiance des partenaires et du public. Le maintien de
bonnes pratiques bâtit la confiance du public dans l’organisation et par ricochet dans
ses produits ou service actuels et futurs (image de marque).

Les pratiques illégales, immorales, déloyales ou frauduleuses, peuvent donner des


grands profits à court terme, mais avec des risques quasi évidents à moyen et long
terme : risque de perte de clientèle, de rupture de partenariat, de procès couteux, etc.
Exemple : les amendes pour espionnage industriel peuvent mener à la ruine. Notre
époque vit un développement de l´éthique appliquée en rapport la RSE et des
préoccupations environnementales et sociales.

20
Exemple : Certaines entreprises se sont retrouvées bannies du fait de la Loi Dodd-
Franck américaine contre les "minerais de sang" de l’Est de la RDC à la suite des
dénonciations pour graves violations des droits de l’homme liées aux guerres. Cette
loi comprend des sanctions contre les entreprises américaines ou en partenariat
commercial avec elles qui persisteraient dans ce commerce. Elle a préjudicié bien
des programmes des organisations américaines de la technologie de pointe.

I.3.3. Ethique : clé de développement durable

Vu de façon cynique, on pourrait dire que tout ceci n’est que de la bonne morale qui
sert uniquement d’affichage aux organisations pour dorer ou redorer leur réputation.
C’est certainement vrai dans certains cas lorsque derrière les mots des codes de
conduite, il n’y a rien ni aucune valeur en action.

Quelques éléments paraissent très importants pour que l’éthique d’une organisation
devienne réalité durablement agissante :

➢ Une volonté claire et affichée des Dirigeants qui doivent donner le ton par l’exemplarité
de leurs comportements ;
➢ Des valeurs simples et universelles partagées : intégrité, respect, équité.
➢ Un souci de la qualité pour répondre au mieux aux attentes du client ou de l’usager
du produit ou service.
➢ Un souci de l’image et la réputation, basé sur la transparence et la confiance.

Ainsi comprise, l’Ethique devient un élément-clé du développement durable de


l’organisation et de chacun de ses employés en contribuant de façon importante à
l’exercice d’une véritable responsabilité sociale partagée par tous.

21
Chapitre II
STRATÉGIES DE PROMOTION DES VALEURS AU SEIN
D’UNE ORGANISATION

Nous allons d’abord identifier les valeurs à promouvoir avant de nous pencher sur
comment procéder pour les promouvoir et les protéger.

En effet, les chances de réussite des dispositions pour la promotion des valeurs en
milieu professionnel restent faibles si on se limite aux déclarations – même écrites.
C’est ainsi que quelques dispositions et principes se sont révélés utiles.

II.1. VALEURS FONDAMENTALES EN ÉTHIQUE PROFESSIONNELLE

Tous les codes d’éthique et déontologie professionnelle visent l’atteinte optimale par
les membres de l’organisation ou de la profession, de plus hautes valeurs considérées
comme fondamentales dans un monde où la rectitude est de plus en plus exigée par
le public Elle est même devenue un atout majeur de la compétitivité entre dirigeants
et cadres, entre organisations et entre nations en impitoyable concurrence.

Ne seront développées ici que celles qui, aujourd’hui sont les plus recherchées dans
les milieux professionnels publics tout comme privées à tous les niveaux de
responsabilité au sein de la société. Elles sont puisées dans la littérature ainsi que
dans les textes législatifs congolais dont le Code de conduite de l’agent public de l’Etat
institué par le Décret-Loi 017-2002 du 3 octobre 2002 publié au Journal Officiel du
15 janvier 200315.

Il s’agit de :

1. l’intégrité ;
2. la transparence ;
3. l’équité et les questions de gender ;
4. l’excellence;
5. le développement durable,
6. le respect des droits de l’homme et des lois du pays;
7. le respect de l’environnement,
8. la discrétion,
9. le devoir de réserve.

Les paragraphes qui suivent en font des brefs commentaires.

15 Ce code a fait partie du « Programme Economique du Gouvernement » mené depuis 2001 avec l’appui du FMI et de
la Banque mondiale. Son but est de « moraliser la gestion de la chose publique » afin d’améliorer la gouvernance et
réduire les guerres. Il concerne tout agent public identifié à l’article 1 er : 1. du Président de la République, jusqu’à
l’huissier en passant par les parlementaires, les magistrats, même les employés des organisations privées ou
d'économie mixte exerçant une activité publique pour le compte de l'État.
22
II.1.1. L’intégrité

Au sens premier du dictionnaire, l’intégrité est l’état de quelque chose qui a toutes
ses parties, qui n'a subi aucune diminution, aucun retranchement : l'intégrité du
territoire, d'une œuvre. Elle a conservé ses qualités et son état originel, sans
altération.
L'intégrité comme valeur est le fait d’exercer sa profession conformément à toutes les
valeurs attendues en rapport aux rôles et fonctions exercées ; en toute circonstance
avec honnêteté. Il réalise son travail avec droiture, dévouement et dignité.

- Avec dévouement : il se consacre entièrement à son travail et à ses


responsabilités ; au besoin il est prêt à faire une chose pénible, difficile ou
ennuyeuse pour bien le faire.
- Avec dignité : par son approche du travail, il inspire respect ; notamment par
des attitudes empreintes de gravité, de respectabilité, de prise de conscience de
sa valeur, de sa considération, de son honneur, des égards qu’il mérite. Le Code
de conduite de l’agent public est plus explicite en préconisant qu’il est attendu de
ce dernier de :
-
1. se comporter dignement en public comme en privé, de manière à :

➢ se faire respecter et à refléter une bonne image de l’Etat (art.9, 1);


➢ faire preuve de courtoisie dans son langage, ses écrits et tous ses actes ;
➢ faire preuve de sincérité, d'honorabilité, de civilité et de bonne tenue,
➢ s'abstenir de menaces, injures, intimidations, harcèlement sexuel ou moral
et d'autres formes de violence (art.19) ;

2. s’abstenir de tout acte d’improbité 16 et immoral tel que l’ivrognerie, le


vagabondage sexuel, l’escroquerie, le vol, le mensonge, la corruption, la
concussion (art.9,2) ;
3. s'interdire de solliciter, de réclamer, d'accepter ou de recevoir ou d'offrir un
don, un cadeau ou tout autre avantage en nature ou en espèces pour
s'acquitter ou s'abstenir de s'acquitter de ses fonctions, mandat ou obligations
professionnelles (art. 17) ;
4. s’acquitter de ses devoirs en toute disponibilité et dans le respect des lois,
règlements, instructions et règles déontologiques particulières (art.9, 3).

Toutes ces règles sont valables pour tout membre d’une organisation, d’une
profession qui tient à une considération aux yeux du public. Auprès du public, la
considération débouche sur une plus grande valorisation des services ou produits
livrés. Ce qui peut justifier une rétribution pertinente.

16 Probité (rigoureuse honnêteté), escroquerie (tromper la confiance), corruption (utiliser son pouvoir pour obtenir
un avantage indu) ; concussion (exiger plus /moins que prévu selon son intérêt) ; tous ces concepts sont définis
dans le Lexique en annexe 1.
23
II.1.2. La transparence

Dans les prestations, tout est clair, sans détours ; ce qui justifie chaque action, ce
qui est fait et les résultats sont justifiés, compréhensibles et connus. On demande de
plus en plus souvent aux décideurs (publics ou privés) la transparence dans
l’utilisation des moyens et pour les décisions qu'ils prennent : leur motivation et leur
gestion de ces décisions.

Tout cadre, tout salarié veillera à tout moment à ce que les parties prenantes
(actionnaires, salariés, clients ou usagers, fournisseurs, Etat, société et dirigeants,
dirigés, etc.) perçoivent facilement le fondement, les ressources, les moyens et les
produits de ce qu’il décide ou fait ; dans les limites du secret bien défini et délimité
de l’organisation. La transparence est à la fois descendante et ascendante ; le chef
envers ses subalternes, et ceux-ci envers le chef.

En outre, le professionnel a le devoir d'informer l’usager (apprenant, parent) de


manière exhaustive. Selon le code d’éthique de l’agent public ; dans son domaine de
compétence, l'agent public de l'État a le devoir de fournir au public les informations
qui lui sont destinées. Celles-ci ne doivent pas faire l'objet de monnayage (art.13).

II.1.3. L’équité et les questions de genre (gender)

Les membres de l’organisation adoptent un juste traitement et font preuve


d’impartialité lorsqu’ils s’acquittent de leurs obligations envers ceux qui de droit
sollicitent leurs prestations, un produit ou un service. Le traitement réservé à une
situation doit être le même pour tout usager. L'équité est le principe modérateur du
droit objectif (lois, règlements administratifs) selon lequel chacun peut prétendre à un
traitement juste, égalitaire.

Le membre d’une organisation doit ainsi éviter d’être en situation de conflit


d’intérêt. Il s’agit des situations de conflit entre la mission d'un agent public et ses
intérêts privés, conflit qui peut potentiellement remettre en cause la neutralité et
l'impartialité avec lesquelles la personne doit accomplir sa mission du fait de ses
intérêts personnels.

Le code de conduite de l’agent public lui interdit de se prononcer sur toute affaire au
traitement et à la solution de laquelle il a directement ou indirectement un intérêt
personnel. L'intérêt personnel englobe tout avantage pour lui-même ou en faveur de sa
famille immédiate, de parents, d'amis et de personnes proches ou organisations avec
lesquelles il a des relations d'affaires ou politiques (art ; 11).

En cas de conflit d’intérêts, le code fixe comme règles l’abstention et la probité en


informant sa hiérarchie du risque de survenance d’un tel cas (art.11 et art. 12). Il en
est de même dans les organisations privées.

L’équité concerne autant les situations internes (recrutement, promotion, cotation,


etc.) que les situations externes (appel d’offre, ...). Le code de conduite préconise
24
d’éviter toute discrimination (fondée sur l’origine, la race, le sexe, la religion, l’ethnie,
les convictions politiques ou philosophiques ou d'autres considérations liées à la
personne. (art. 22);

Les questions de genre (gender) font bien partie de la question de l’équité entre
genres masculin - féminin. Le traitement à réserver aux femmes doit faire l’objet d’une
attention particulière car les femmes sont souvent discriminées sans que les hommes
- et quelquefois les femmes elles-mêmes - ne s’en rendent vraiment compte. Il peut
en être de même des hommes qui peuvent se retrouver discriminés dans certaines
circonstances.

Enfin dans notre environnement multiethnique, l’équité appelle aussi à une


sensibilité particulière au risque de discrimination basée sur l’ethnie ; celle des
minorités ethniques, ou minorités sociales comme celles des personnes vivant avec
handicap physique, les ruraux, les vieux, les jeunes, etc.

II.1.4. L’excellence et la compétence professionnelle

L’agent travaillera en visant la qualité la plus haute possible qui surpasse les normes
ordinaires. L'excellence est donc, un objectif en mouvement continu qui peut être
poursuivi :

➢ À travers des actions d'intégrité, en termes de fiabilité des produits / services fournis
sans danger pour les utilisateurs prévus,
➢ Par le respect de toutes les obligations, en appliquant aux mieux les connaissances et
techniques susceptibles de mener aux meilleurs résultats possibles.

Selon le code de l’agent public, « la compétence professionnelle se traduit, dans le chef


de l'agent public de l'État, par la connaissance, la maîtrise, le bon accomplissement de
ses fonctions et par l'effort constant fourni pour améliorer la qualité de ses services (art.
5) ». Il doit donc rechercher le renforcement permanent de son savoir-faire.

On parle de plus en plus de quête permanente de la « qualité totale » : zéro défaut ;


zéro gaspillage ; etc. L’excellence est une valeur de plus en plus requise dans le monde
actuel fortement concurrentiel tant en interne qu’en externe.

II.1.5. Le développement durable et le respect de l’environnement

Il s’agit d’une valeur qui s’est graduellement imposée avec la prise de conscience
croissante de la dégradation de l’environnement écologique, social, économique à la
suite des concurrence économique mondialisée et en conséquence, la destruction des
ressources naturelles et de la qualité de l’environnement écologique ; la course à
l’innovation technologique dangereuse pour la vie ; la marginalisation et la pauvreté
des trois quarts de l’humanité victime de la destruction de l’écologie de l’homme.

Face à la menace sérieuse de disparition de toute vie sur terre ; les hommes ont
commencé à apprécier tout effort de préservation de la vie et de la collectivité.
25
L’organisation et tous les membres doivent endosser les conséquences tant au niveau
social, qu’environnemental et économique des décisions qu’ils peuvent avoir à
prendre.

Il s’agit donc des conséquences sur l’homme, la société, et sur l’environnement.

➢ L’organisation doit avoir une politique sociale de respect strict des droits de l’homme
(les libertés individuelles, les libertés publiques).
➢ L’organisation ne doit pas se retrouver impliquée dans des activités criminelles (trafic
de drogues, d’armes, de personnes, de "minerais de sang" ; promotion de l’alcool,
diffusion de la pornographie, travail d’enfants, etc.), ou qui provoquent des calamités
humaines.
➢ Elle aura une approche stakeholder en se concentrant sur le dialogue de l’organisation
avec l’ensemble de ses parties prenantes (les travailleurs, les actionnaires, les clients,
les populations environnantes, l’Etat) et sur la manière dont celle-ci prend en compte
leurs attentes.
➢ Elle est « citoyenne » ; elle met en avant le respect des lois du pays ; par ex. payer ses
impôts, s’interdire une implication dans la corruption, et contribue aux activités
humanitaires.
➢ Elle bannit le harcèlement sexuel en son sein.
➢ Elle recherche la performance environnementale, c’est-à-dire la diminution de
l’empreinte écologique, ou de tout effet de destruction de l’environnement social et
écologique.

II.1.6. Le devoir de discrétion

Le devoir de discrétion interdit au membre d’une organisation ou d’une profession de


divulguer les secrets professionnels de l’organisation ou de toute tierce partie ; secrets
dont il est informé du fait de ses fonctions ou de l’exercice de sa profession. Il s’agit
notamment :

➢ d’informations voulues secrètes par l’organisation elle-même ou ses partenaires


(fournisseur, banque, organisation cliente, etc.) ;
➢ d’informations sur la vie personnelle (intime) du client, de l’usager, du patient, du
collègue, de l’enquêté, etc.

A ce sujet, tout dossier en cours de traitement est censé être du domaine du secret,
jusqu’à ce que son contenu soit rendu public. En cours comme après sa carrière ou
son mandat, l'agent public a l'obligation de ne pas divulguer le secret professionnel
(art.14)17.

II.1.7. Le devoir de réserve

D’une manière générale, le devoir de réserve peut se définir comme l’obligation pour
le l’employé de faire preuve de mesure tant dans le contenu que dans la forme de sa

17 Le code pénal est sévère quant à la violation du secret professionnel : « les personnes dépositaires par état ou par
profession des secrets qu’on leur confie qui, hors le cas où …, les auront révélés, seront punies d’une servitude pénale
de un à six mois et d’une amende ... » (art. 73).
26
parole lorsqu’elle concerne le fonctionnement de son administration ou son
organisation. Concrètement, l'obligation de réserve interdit au salarié d’adopter une
attitude nuisible ou critique à l’encontre de son employeur, à l’intérieur comme à
l’extérieur ; et à l’encontre des usagers du service, des clients et de toute autre
personne contactée du fait du travail.

Sont ainsi sanctionnés :

➢ la critique publique par l’agent de la gestion de son administration ;


➢ l’exposition publique de ses différends avec son administration ;
➢ les propos injurieux ou violents ;
➢ la mise en cause personnelle de membres de l’administration.

L'objectif est de garantir la neutralité et l'impartialité de l'administration ou de


l’organisation, et de ne pas nuire à son renom. Ceux qui y sont soumis doivent, en
particulier s'abstenir de faire état de leurs opinions personnelles sur des questions
relatives à leur activité ou d'avoir des comportements incompatibles avec la dignité et
l'impartialité de leurs fonctions.

Le devoir de réserve s’impose à tous les salariés et en particulier aux agents de la


fonction publique. Ce devoir de réserve est apprécié en fonction des responsabilités
assumées de par son rang dans la hiérarchie et de la nature de ses fonctions. Plus le
niveau hiérarchique du fonctionnaire est élevé, plus son obligation de réserve est
stricte.

Le devoir de réserve « interdit au fonctionnaire de faire de sa fonction l’instrument


d’une propagande quelconque ». Il s'agit d'une application du principe de neutralité
du service public, néanmoins balancé par les droits dont bénéficie chacun (liberté
d'expression, droits syndicaux etc.), y compris lorsqu'il est fonctionnaire.

Il s'agit pour le fonctionnaire :

➢ d'une part de ne pas se servir de sa position à d'autres fins (ex. : un enseignant


déclarant publiquement que tel étudiant n’est pas intelligent ; cette déclaration
prenant un poids particulier du fait de la position d’enseignant) ;
➢ d'autre part de ne pas mettre en difficulté son administration (ex. : un expert sanitaire
annonçant une catastrophe pendant que l'administration cherche à rassurer par une
communication de crise appropriée afin d’éviter une panique pouvant aggraver la
situation).

Ne commet en revanche aucune faute, l’agent qui s’exprime publiquement, même de


manière polémique, sans mettre en cause son entité ou les fonctions qu’il y occupe ;
ou celui dont les propos, rapportés par voie de presse, n’excèdent pas le droit de libre
commentaire.

En effet, la liberté d'expression des fonctionnaires, garantie par la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen, est reconnue aux fonctionnaires sous réserve d'un usage qui
ne soit ni excessif, ni insultant à l'égard des pouvoirs publics et de la hiérarchie. Ce
27
devoir de réserve est apprécié en fonction des responsabilités assumées de par son rang
dans la hiérarchie et de la nature de ses fonctions.
Le "devoir de réserve" est régit par la jurisprudence ce qui laisse une large plage
d'incertitude et d'interprétation dans son application. Cette jurisprudence peut être
reprise dans les statuts particuliers de certaines professions, comme les magistrats, les
militaires, les policiers, ou devenir une contrainte pour certaines fonctions, compte tenu
de leur position hiérarchique (ambassadeurs, préfets...)
Dans la pratique, les sanctions envers des fonctionnaires pour "manquement au devoir
de réserve" prennent la forme de mutation ou de déplacement car un manquement à
une règle qui n'est pas inscrite dans une loi ne peut faire l'objet d'une sanction officielle.
Le devoir de réserve se distingue du devoir de discrétion qui vise à protéger les secrets
des particuliers.

Liberté d'expression, oui ; mais cette liberté ne doit nuire ni à l’employeur, ni à toute
tierce personne en relation de travail18 !

II.1.8. Le respect des lois du pays

Toute organisation, toute profession agit dans le cadre de lois nationales et


internationales : constitution, droit civil et pénal, droit fiscal, droit des sociétés, du
commerce, du travail, droit international, droit de l’homme... L'éthique
professionnelle invite à prendre en compte ce cadre législatif et réglementaire pour
assurer une bonne citoyenneté à l'organisation, tout en sachant que le légal n'est pas
forcément moral.

Pourquoi se référer aux lois du pays pour des questions d’éthique professionnelle ?

D’abord, il s’agit du premier pilier d’une organisation éthique : la volonté expresse de


se plier, à tous les niveaux de l’organisation, à l’autorité publique dont la mission est
la préservation de l’intérêt général ; sans lequel aucune organisation ne peut
fonctionner.

L’existence d’un code d’éthique de l’enseignant dans un pays n’est pas suffisante pour
protéger les tiers contre des abus que commettrait un enseignant ; ni protéger
l’enseignant ainsi que le métier d’enseignant contre les intrusions de charlatans
éventuels. Cette protection ne devient effective que lorsque ce code est coulé sous
forme de loi, à l’instar des lois relatives à l’ordre des médecins, des avocats, des
infirmiers, des experts- comptables en RDC.

En nous référant aux lois du pays, nous pouvons relever des éléments susceptibles
de concerner la responsabilité civile des parties prenantes dans la mise en œuvre
des pratiques professionnelles relevant de l’enseignement.

18 La liberté d'expression (ou le droit d'exprimer librement sa pensée), garantie par la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen et par la constitution, est reconnue aux fonctionnaires sous réserve d'un usage qui ne soit ni
excessif, ni insultant à l'égard des pouvoirs publics et de la hiérarchie. Ainsi, dans le cadre du travail, cette liberté est
limitée par le devoir de réserve et le devoir de discrétion. Un mandat syndical autorise toutefois des critiques vives
puisque les fonctionnaires bénéficient de droits syndicaux.
28
II.1.9. Conscience professionnelle et discipline au travail

Avoir une conscience professionnelle dans son métier, c’est l’exercer totalement avec
dévouement, avec la compétence la plus élevée, dans le respect des attributions
assignées. La discipline au travail est connexe à la conscience professionnelle. Elle
consiste dans le respect strict des procédures, critères et des normes de travail qui
sont généralement consignés dans le règlement de l’entreprise.

Les instruments de la discipline au travail :

1. Le règlement d’ordre intérieur qui indique les comportements souhaités au sein de


l’entreprise ou de l’association.
2. Le contrat de travail qui fixe les obligations du travailleur et de l’employeur.
3. L’application des sanctions négatives en cas de défaillances (admonestation
lorsqu’elles sont légères, punitions allant jusqu’à la révocation en cas de gravité) ; et
des sanctions positives pour les agents exemplaires en matière (prix, proclamation
publique, etc.).
4. L’exemplarité des chefs dans la discipline au travail.

II.2. MISE EN PLACE DES OUTILS DE PROMOTION DES VALEURS

Il sied de mentionner que, l’éthique professorale est toujours vacillante, toujours


fragile car il est un défi du temps dans le métier du professeur : faire, refaire, encore
refaire… Le défi du temps : tenir, durer, rester fidèle à quelques grands principes. La
moralité d’un professionnel, pour être constante, doit prendre appui non seulement
sur le comportement respectable d’une grande majorité de collègues mais également
sur la promotion par la profession elle-même de standards moraux (Prairat, 2016, p.
2).

En d’autres termes, l’éthique professorale, pour relever les défi s du temps et de la


solitude, doit prendre appui sur un cadre déontologique clair (ibid.). Ainsi, faut-il
mettre en place ce cadre dans le système éducatif tout comme dans les institutions
éducatives comme dans toute association ou entreprise qui veut se développer. La
démarche éthique est un des piliers d’une stratégie de croissance durable d’une
organisation.

Mais à quel niveau faut-il agir pour installer les valeurs ?

L’éthique est fondamentalement à considérer plus au niveau de la personne qu’au


niveau de l’organisation. En effet, seules les personnes sont dotées d’une conscience
qui leur permet de faire preuve de discernement et d’adopter un comportement
éthique. Lorsque l’organisation définit un cadre de valeurs, celui-ci ne peut
fonctionner que s’il repose sur une conscience des individus qui y prestent.

29
Deux principes clés sont à relever :

➢ L’éthique repose fondamentalement sur la conscience individuelle de chacun.


➢ Pour la faire vivre, l’organisation doit se choisir un cadre de valeurs, le faire connaître
à tous et veiller à son application au quotidien.

Il s’agit d’installer des comportements et des attitudes conformes à une éthique


donnée. Il est bien connu qu’il n’est pas facile de changer les comportements des
humains ; surtout lorsqu’ils ont dépassé la période de l’enfance, comme c’est le cas
des cadres et salariés, des professionnels d’un métier, des responsables.

Il faut donc adopter des stratégies appropriées aux adultes et aux équipes. Les
déclarations pompeuses d’intention de changer ; les indignations et les exhortations
orales et/ou écrites ne suffisent pas 19 . Une démarche stratégique pertinente
d’implantation et de promotion des valeurs s’imposent.

Nous allons proposer une approche pragmatique sur base d’expériences multiples
résultant d’une démarche volontariste raisonnée.

En gros, la stratégie d’implantation, de protection et de promotion des valeurs au sein


d’une organisation, peut comporter les étapes minimales suivantes :

➢ le diagnostic de l’état des valeurs dans l’organisation ;


➢ l’adoption d’une charte des valeurs poursuivies ;
➢ le planning des objectifs dans une stratégie globale d’éthique ;
➢ la détermination d’un code d’éthique et de déontologie au sein de l’organisation en
vue de la promotion et de la pérennisation des valeurs;
➢ la mise en place des structures de mise en œuvre du code, y compris bien entendu,
des mécanismes de sanction des déviants.

Nous allons présenter ici les outils de la stratégie d’implantation et de promotion des
valeurs au sein d’une organisation (étapes 4 et 5).

II.2.1. La mise en place d’un code de déontologie

La mise en place d’un code d’éthique est une étape fondamentale dans la stratégie de
promotion des valeurs au sein d’une organisation ou au sein d’une profession. Deux
outils semblent fondamentaux :

1. des principes d’action : une charte de valeur ;


2. un code de bonne conduite.

19 Si plusieurs organisations intègrent des questions éthiques et déontologiques dans les ROI ; rares sont les
organisations locales dotées d’un code de déontologie ; et très peu d’une démarche systématique et continue de
protection des valeurs.
30
II.2.1.1. La charte des valeurs

La charte des valeurs comprend les principes d’action qui réaffirment les valeurs de
l’organisation :

➢ soit de façon générique en mettant en avant quelques valeurs clés qui fondent au
quotidien l’action des collaborateurs et sa politique de management ; qui vont
contribuer à construire l’identité du groupe ;
➢ soit en déclinant les valeurs prioritaires en fonction de parties prenantes (usagers
ou clients, responsables, salariés, etc.)

Exemple d’une charte des valeurs de l’Ordre des enseignantes et des enseignants de
l’Ontario

L'engagement envers les élèves et leur apprentissage occupe une place fondamentale
dans une profession enseignante solide et efficace.

Conscients que leur position privilégiée leur confère la confiance des autres, les
membres de l'Ordre assument ouvertement leurs responsabilités envers les élèves, les
parents et tuteurs, les collègues, les partenaires en éducation et autres professionnels
ainsi que le public. Ils prennent aussi leurs responsabilités en ce qui concerne
l'environnement. Normes de déontologie de la profession enseignante :
Empathie

Le concept d'empathie comprend la compassion, l'acceptation, l'intérêt et le


discernement nécessaires à l'épanouissement des élèves. Dans l'exercice de leur
profession, les membres expriment leur engagement envers le bien-être et
l'apprentissage des élèves par l'influence positive, le discernement professionnel et le
souci de l'autre.
Respect

La confiance et l'objectivité sont intrinsèques au concept de respect. Les membres


honorent la dignité humaine, le bien-être affectif et le développement cognitif. La façon
dont ils exercent leur profession reflète le respect de valeurs spirituelles et culturelles,
de la justice sociale, de la confidentialité, de la liberté, de la démocratie et de
l'environnement.
Confiance
Le concept de confiance incarne l'objectivité, l'ouverture d'esprit et l'honnêteté. Les
relations professionnelles des membres avec les élèves, les collègues, les parents, les
tuteurs et le public reposent sur la confiance.

Intégrité
Le concept d'intégrité comprend l'honnêteté, la fiabilité et la conduite morale. Une
réflexion continue aide les membres à agir avec intégrité dans toutes leurs activités et
leurs responsabilités professionnelles.

II.2.1.2. Le code de déontologie d’une profession ou d’une organisation


Néanmoins les valeurs demeurent trop abstraites pour déterminer au quotidien
l’action des collaborateurs. Elles sont contextualisées dans un code de bonne
conduite dont elles font partie. Le code de déontologie les cadre en indiquant :
31
➢ les comportements souhaités de la part des acteurs internes,
➢ les devoirs subséquents des uns envers les autres,
➢ les devoirs envers les clients ou les usagers, etc.

Bien conçu, le code de bonne conduite des agents est le point de départ d’une
stratégie de prévention de corruption et d’une stratégie de croissance durable grâce
à la bonne image qui en découle, à la confiance qu’elle inspire :

➢ les valeurs déterminent fortement les comportements des acteurs internes au sein
d’une organisation ou d’une profession ; ce qui influe sur la qualité du produit ou
service proposé, et sur les attitudes et comportements des partenaires externes qui
sont notamment les usagers d’un service ou d’une administration, les clients d’une
organisation, d’un cabinet, les consommateurs d’un produit ; les bénéficiaires d’une
activité ; etc.
➢ une dégradation des valeurs au sein d’une organisation peut dévaloriser celle-ci, ses
produits ou service. L’image, le capital confiance sont fondamentaux pour la survie et
le développement d’une organisation, d’une profession.

L’éthique professionnelle aide à prévenir des comportements « mauvais » pour la


profession ou la société et éventuellement les condamner. Elle est évolutive et doit
s’adapter aux diverses situations.

II.2.2. Principes pour la formulation d’un code de déontologie

II.2.2.1. Principes de base


Quatre principes sont proposés : le minimalisme, la sobriété, la stabilité et la
neutralité.

Principe de minimalisme

Une déontologie n’est pas un ensemble de règles que l’on applique de manière
mécanique ; mais un cadre de configuration, c’est-à-dire un ensemble de principes,
de recommandations et de modèles qui permet de configurer des interactions
professionnelles.

Dès lors faut-il dresser une longue liste des règles dans le code pour régir toute la
conduite de l’enseignant ? En effet les anciens codes ont eu tendance à aller dans ce
sens, notamment le Code Soleil ou « Le livre des instituteurs » en France au début du
siècle. Ce code régulait la vie professionnelle, publique et même privée de l’enseignant
(Pachod, 2007).

La tendance actuelle est de s’en tenir à un « minimalisme déontologique » (Ogien,


2007), c’està-dire fixer un code limité à l’essentiel en s’en tenant aux principes
généraux suivants :

- de non nuisance ou non malfaisance (tendre à ne pas nuire),


- d’égal considération des personnes,
32
- de l’indifférence morale ou de la neutralisation : tenir l’éthique à l’écart des « idéaux
de la vie bonne », c’est-à-dire des conceptions plurielles du bonheur. Les « devoirs
envers soi-même » ne doivent plus être tenus pour des devoirs moraux mais pour de
simples préceptes de prudence.

Principe de sobriété

Les normes retenues ne doivent pas être trop nombreuses. Il doit s’agir d’un texte
court articulé autour de quelques articles-clefs, d’un texte de référence sur lequel on
peut prendre appui pour agir et faire des arbitrages. En effet trop de normes
anesthésient la norme.

Un principe de stabilité

Pour que le code soit stable, les obligations ne doivent pas être « chimériques » ou
extravagantes mais raisonnables, c’est-à-dire qu’elles doivent pouvoir être imposées
et acceptées de tous. Elles devraient donner « un sens suffisant de la justice » (Rawls,
2006, p.179183) ou de la morale à l’ensemble des membres d’une profession.

Un principe de neutralité

Enfin, le minimalisme déontologique obéit à un principe de neutralité socio-


professionnelle et didactique. Un code déontologie qui prescrirait les canons
didactiques ruinerait et le crédit et la liberté des praticiens.

Le code devrait rester silencieux sur les formes de l’excellence didactique. Un code de
déontologie n’a pas à dire : « voilà la bonne méthode de lecture ; d’évaluer, etc. ». Cette
abstention offre la possibilité d’un accord pratique sur des normes et des procédures
entre protagonistes ayant des conceptions professionnelles et des convictions morales
différentes (Rawls, 2000, p.358).

II.2.2.2. La formulation d’un code d’éthique.

Les grandes tendances de formulation.

L’éthique professionnelle doit être formulée dans le code de déontologie. Le code


reprend les principes de base de la conduite des membres d’une organisation en
termes des valeurs fondamentales poursuivies, des comportements subséquents, des
normes de références et des sanctions éventuelles.

On peut aujourd'hui relever deux grandes tendances dans la perspective de la


formulation : une dite "normative" d'inspiration anglo-saxonne (Business Ethics),
centrée plus sur les interdictions ; et une autre dite "réaliste" d'inspiration plus
européenne (Real Ethics).

La formulation réaliste du code de bonne conduite est la plus usitée. Elle prend une
forme positive, personnelle et pratique.
33
- Positive sous forme de recommandations positives qui indiquent ce qu’il convient de
faire sans trop se centrer, - comme la morale -, sur ce qu’il ne faut pas faire et qui
s’énonce sous forme d’interdictions négatives (ne pas) 20 ;
- Personnelle en s’adressant aux personnes physiques, seules dotées de conscience
individuelle ;
- Pratique pour être une référence dans la pratique quotidienne.

La formulation des normes dans le code de bonne conduite

Le code de déontologie exprime les normes ou règles déontologiques auxquelles les


professionnels doivent se référer dans leurs comportements en cours d’exercice de
leur profession ou de leur fonction au sein d’une organisation. La norme
déontologique existe de manière objective et s’impose à l’ensemble des professionnels
entrant dans le métier. Elle se vit comme une norme hétéronome (venant de
l’extérieur) à laquelle le professionnel doit se soumettre (Prairat, 2009).

Ainsi, contrairement à la règle juridique, la formulation de la règle déontologique sera


moins impérative. La nuance entre les deux tient en effet du régime déontique ou de
l’impérativité de la règle sur les individus.

La règle juridique n’admet pas de degré ou de gradation dans l’impérativité : un


comportement est interdit ou tout simplement permis ; pas de voie médiane entre les
deux. La logique de la règle juridique est binaire (1 ou 0) ; pas d’attitude "plus ou
moins obligatoire" ou "plus ou moins tolérée". Ce qu’admet la règle déontologique. On
parle alors de "soft law" ou "droit mou" pour qualifier la norme déontologique.

Ainsi, tout en s’imposant à tous les professionnels, la norme déontologique n’obéit


pas entièrement à cette logique déontique binaire de la loi (interdit ou permis). Elle
comprend des dispositions qui ouvrent à la médiation, à une marge de tolérance
interprétative21.

On retrouve ainsi dans les déontologies des adjectifs et formes nominales tels que
"raisonnable", "modéré", "approprié", "avec tact", "avec mesure", "avec discernement".
Ces formes sont qualifiées de "prédicats épais", c’est-à-dire dépendants du contexte ;
opposables aux "prédicats minces", indépendants du contexte, indice d’un régime
déontique binaire (Ruwen Ogien, 2007). L’usage des prédicats épais signale une
impérativité flexible qui va de l’obligation jusqu’à l’interdit en passant par le conseil
ou la recommandation. Il en est ainsi des codes de déontologie. Par contre les lois ne
contiennent pas de tels "prédicats épais".

20 La plupart des philosophes anglo-saxons qui sont à l’origine des "Business ethics" ont confondu éthique et morale.
L’article de référence du français Paul Ricoeur (1992) a rétabli la justesse des termes et des concepts utilisés.
21 Pareilles dispositions se retrouvent dans les codes de déontologie de nombreux métiers. Par exemple celui de la

Police nationale qui stipule que "lorsqu’il est autorisé à utiliser la force et, en particulier, à se servir de ses armes, le
fonctionnaire de police ne peut en faire qu’un usage strictement nécessaire et proportionné au but à atteindre".
34
La formulation des sanctions pour le professionnel déviant

Dans les associations professionnelles, la sanction dans les déontologies est


disciplinaire ou "ordinale", distincte de la sanction pénale. Elle est prononcée par les
instances chargées de prononcer ces sanctions au sein de l’association : Conseil de
l’ordre siégeant en conseil de discipline, un Comité d’éthique, etc. Ces instances
professionnelles disposent d’une large autonomie, avec un contrôle des tribunaux et
pourvoi possible en cassation devant les instances judiciaires : la "Chambre
administrative" de la Cour d’appel ; la Cour de cassation.

Les sanctions disciplinaires à formuler dans le code vont de l’avertissement, au rappel


à l’ordre, au blâme, à la suspension et à l’exclusion avec pour but d’alerter les
membres dans leur propre considération et celle de leurs confrères, et les dissuader
de nouvelles infractions à leurs règles de déontologie (Begel, 1997). Elles ont un
"caractère moral" en vue surtout de ramener le contrevenant sur le terrain de la
probité professionnelle22.

Il reste évident que le professionnel qui, au-delà de la règle déontologique enfreint en


même temps une loi en vigueur (ROI, lois, etc.), s’expose à la rigueur de la loi ; la règle
du droit étant générale et opposable à tous. Les règles déontologiques regardent les
principes et le fonctionnement internes à une profession.

Dans les écoles, les sanctions touchent directement la carrière du professionnel avec
toute la gamme des sanctions prévues dans le contrat. Les décisions du comité
d’éthique sont traduites en sanctions administratives pouvant aller jusqu’à la
révocation.

II.3. LA STRATÉGIE DE MISE EN ŒUVRE DES VALEURS

L’instauration des valeurs dans une organisation, si elle se veut efficace, ne se fait
pas par une simple déclaration, un affichage ou une remise du texte. Au-delà de la
formulation, l’usager et toutes les parties prenantes sont intéressées par la promotion
effective des valeurs en vue d’un service de la qualité attendue.

Une fois le code formulé, la stratégie de mise en œuvre comprend en gros quatre
phases :

1. La sensibilisation par des séminaires


2. L’engagement personnel
3. Les outils de communication continue
4. l’instauration des structures de promotion des valeurs.
5. L’évaluation par un bilan éthique à coté du bilan financier et social.

22 Dans la faute disciplinaire, on peut se référer à l’ensemble du comportement professionnel du fonctionnaire ou du


professionnel. C’est ce qu’on appelle la saisine in personam alors que le juge pénal est saisi in rem, c’est-à-dire des
seuls fait qui lui ont été déférés (Bandet, 1997).
35
II.3.1. Les séminaires sur l’éthique

L’établissement d’un code de bonne conduite sera suivi d’une forte sensibilisation de
tous pour leur faire connaître le contenu de la charte et du code. Dans une
organisation, la sensibilisation vise tous les salariés à tous les niveaux en
commençant par les plus gradés jusqu’aux exécutants.

Pour cela il est organisé des séminaires introductifs qui visent à faire connaître :

➢ l’importance du code de déontologie au sein de la profession et de l’organisation où on


travaille ;
➢ les objectifs poursuivis par l’organisation en instituant le code de déontologie ;
➢ les résultats attendus de chacun et de l’ensemble de l’organisation ou de la profession
quant aux valeurs ; ainsi que les échéances de réalisation par étape ;
➢ les valeurs fondamentales poursuivies par l’organisation ou la profession ;
➢ les règles déontologiques pour arriver à matérialiser les valeurs au sein de
l’organisation ou de la profession ;
➢ les sanctions disciplinaires ;
➢ les structures à mettre en place pour protéger les valeurs.
➢ Analyse de cas promoteurs au sein de l’organisation, discussion d’expériences.

De plus en plus d’organisations exigent ainsi que leurs salariés participent à un


séminaire relatif aux comportements en cours d’exercice de la profession ou des
fonctions au sein d’une organisation. Exposés et débats sont associés à de nombreux
exercices. Cette approche, très participative, permet une forte implication de chacun
et des prises de conscience pour avancer sur son propre chemin.

Toutefois l’information et la sensibilisation sont des actions nécessaires mais non


suffisantes pour installer les valeurs. Aussi faut-il cultiver :

L’obligation de vigilance de tous les acteurs pour eux-mêmes et leur


entourage professionnel sur les valeurs :

la dénonciation des manquements aux règles éthiques quel que soit leur
auteur, indépendamment des liens hiérarchiques ;
la protection de l’identité du collaborateur ayant signalé le
manquement.

L’approche pour traiter les difficultés éthiques rencontrées :

la procédure à suivre ;
les ressources internes ou externes pour résoudre les difficultés
rencontrées.

II.3.2. L’engagement personnel

Il s’agit d’amener les membres de la profession, les salariés d’une organisation à


signer un document indiquant leur adhésion aux valeurs et leur engagement à

36
appliquer les règles de conduite au sein de leur organisation. Cet engagement est
supposé jouer sur la conscience des membres de la profession ou les salariés.

On pourrait s’interroger sur la pertinence des effets d’un engagement personnel d’une
personne à adhérer à des valeurs et à adopter des comportements prescrits.
L’expérience en a démontré l’efficacité. Quoi qu’il en soit, l’engagement sera
périodiquement renouvelé ; par ex. chaque deux ans. Un séminaire sur l’éthique
précède cet acte.

II.3.3. Les affiches, les dépliants, les posters et autres documents

Les affiches sont apposées dans tous les locaux et à tous les lieux de passage - halls,
cages d’escaliers, etc. Leur taille est fonction de la fréquentation des lieux et des
dimensions du local. Les dépliants seront distribués aux membres et aux clients.

Ces affiches et les autres documents affirment :

➢ les valeurs éthiques fondamentales voulues par l’organisation ;


➢ les comportements majeurs attendus des membres ou des salariés ;
➢ les comportements majeurs attendus des partenaires entrant en relations de travail
avec la profession ou l’organisation

Ils ont pour but :

➢ de tenir les membres en éveil sur les valeurs et les comportements typiques majeurs
dont ils doivent faire montre entre eux et avec le public externe ;
➢ de faire connaître au public les valeurs qu’il peut attendre des membres internes de
l’organisation ou de la profession.

Il est bon que tous les documents de communication interne et externe (agendas,
calendrier, papier en-tête, etc.) portent les affirmations fortes des valeurs éthiques
fondamentales et des comportements basiques des membres. Ils peuvent même être
gravées ou incruster dans la pierre ou la brique aux endroits les plus fréquentés.

Remarque

Parfois un décalage s’observe entre la politique éthique déclarée et les pratiques


réelles ; entre les valeurs affichées et les comportements ou attitudes des membres.

Lorsque cette contradiction entre le déclaré et les actes devient flagrante sans qu’il y
ait visibilité de la sanction, la politique éthique de l’organisation semble être un simple
outil marketing, ou pire, un double jeu qu’entretient l’organisation. Ce qui terni son
image et dessert l’organisation à moyen et même à court terme.

Ces types de situations sont justement à combattre par la sanction sans état d’âme
et la prévention grâce notamment à des séminaires périodiques.

37
II.3.4. L’instauration des structures de promotion de l’éthique

Les structures de protection et de promotion des valeurs matérialisent la politique


éthique d’une profession ou d’une organisation. Leur institution est un indicateur
d’une volonté de s’engager dans un processus d’instauration des valeurs dans une
organisation comme une démarche qualité basique.

Les structures les plus fréquentes sont : le Comité d’éthique, le Comité d'examen des
allégations d'inconduite, Comité contre le harcèlement sexuel, l’ombudsman.

Comité d’éthique

Dans les organisations, le comité d'éthique est composé de manière paritaire tel que
la direction et le personnel y sont parties prenantes. Dans le but de promouvoir les
valeurs, il recommande aux instances dirigeantes :

➢ les moyens appropriés de formation, d'information et de sensibilisation de la


communauté de l’organisation à l'éthique.
➢ les mesures concrètes à prendre pour obvier aux comportements qui vont à l'encontre
de l'éthique.

Certaines organisations instituent une direction d’éthique en leur sein. S’il s’agit
d’une direction de l’éthique, sa composition sera un peu délicate du fait du risque de
sa dépendance trop forte de la hiérarchie dont les membres peuvent aussi défaillir.

Comité d'examen des allégations d'inconduite

Il est mis sur pieds soit de manière permanente, soit de manière circonstancielle. Il
travaille en étroite intelligence avec le comité d’éthique dont il peut dépendre. La
séparation des deux présente l’avantage de contourner le risque d’affaiblissement de
toute structure permanente s’occupant des comportements des hommes.

La composition et le mandat des membres de ce Comité d'examen des allégations


d'inconduite sont définis, ainsi que les procédures relatives au traitement des plaintes
concernant l'inconduite. Par rapport au Comité d’éthique, il instruit les dossiers
d’inconduite et les présente devant le Comité d’éthique pour décider de la sanction
finale. Son rôle est comparable à celui du parquet pour la Cour.

La procédure de dénonciation sera simplifiée grâce à l’élaboration d’un formulaire de


dénonciation.

Comité contre le harcèlement sexuel

Une fois définie une politique contre le harcèlement sexuel (entre membres et envers
les clients), l’organisation à intérêt à instituer un comité spécifique contre le
harcèlement sexuel dont le mandat et la composition sont déterminés par ladite
politique. Cette spécificité permet de ne pas limiter les questions éthiques à la seule
38
dimension sexuelle et de perdre de vue les autres valeurs cardinales. Sa composition
et la définition de ses missions et de ses procédures requièrent des analyses
minutieuses du contexte.

L’instauration d’un ombudsman

Dans sa compréhension première, l’ombudsman est une personne chargée, au sein


d’une organisation, - plus souvent une administration publique dans certains pays
(scandinaves, Rwanda, etc.) -, de la défense des droits du public face à
l'administration. Dans certains États, l'ombudsman est élu par le Parlement. Dans
d’autres pays, on l’appelle " médiateur". Il fait le monitoring de l’éthique au sein de
l’organisation en étant l’instance attitrée de l’écoute des incidents critiques en rapport
avec l’éthique et la déontologie professionnelle au sein de l’organisation ou de la
profession.

Dans les organisations ou institutions, il est mis souvent en place une structure qui
joue ce rôle. L’Université du Québec a par exemple institué un "Protecteur
universitaire". En RDC, pareille disposition n’a pas encore été reportée au grand
public, là où elle fonctionnerait sauf dans certaines écoles secondaires.

Toute personne qui se retrouve offusquée par une violation des valeurs de
l’organisation ou de la profession se reporte à lui d’abord au lieu de recourir à la
hiérarchie. En effet celle-ci peut avoir tendance à couvrir les déviants, comme cela
est fréquent dans les administrations publiques, ou suite aux pesanteurs ethniques.

Illustration

En RDC, après que le Code de conduite de l’agent public de l’État ait été voté et
promulgué en 2002, une démarche d’instauration des valeurs prônées dans les
prescrits dudit Code a été engagée en commençant par la mise en place d’une
structure créée par le Décret-loi 075-2003 du 03 mars 2003 : l’Observatoire du Code
d’éthique professionnel, en sigle OCEP. Il recueille et assure le suivi des
dénonciations des méconduites. Outre des rapports de dénonciation, l’OCEP a à son
actif :

➢ L’organisation du Forum National de Lutte contre la Corruption – en avril 2010 où


on a établi un diagnostic sur la corruption au pays ;
➢ Le Plan Stratégique de Lutte contre la Corruption en RDC ;
➢ L’élaboration du projet de loi sur la lutte contre la corruption toujours en instance
d’examen au Parlement depuis la fin de la première législature.

L’élan semble s’être estompé. L’existence d’un code d’éthique n’est donc pas
suffisante en soi pour instaurer les valeurs au sein d’une organisation. Certes elle est
primordiale et constitue une étape basique. L’indépendance des structures et des
mécanismes de mise en œuvre est tout aussi capitale.

39
II.4. L’EFFICACITÉ D’UNE POLITIQUE ÉTHIQUE D’ORGANISATION

En vue de l’efficacité d’une politique éthique, les éthiciens suggèrent qu’elle devrait
être :

➢ Soutenue sans aucune ambiguïté par les plus hauts échelons de la hiérarchie, dans
leurs discours comme dans leurs actes qui constituent autant d’exemples ;
➢ Expliquée par écrit et oralement, avec des rappels réguliers ;
➢ Applicable… c'est-à-dire que les salariés doivent tous pouvoir la comprendre pour la
mettre en œuvre ;
➢ Pilotée par les plus hauts échelons de la hiérarchie, avec des audits de routine sur sa
mise en œuvre et son amélioration ;
➢ Précisée par l’exposé très explicite des conséquences pour tout salarié qui désobéirait
à cette politique ;
➢ D’un contenu neutre par rapport à la question du genre et à toutes les composantes
de l’organisation.

Il apparaît ainsi que non seulement le texte peut poser problème, mais aussi
l’implication de la hiérarchie et l’organisation d’audits de routine quant à ce.
Ainsi la promotion de valeurs au sein d’une organisation ou d’une profession est une
quête permanente grâce à certains instruments tels que :

➢ Les mécanismes de suivi ou de monitoring ;


➢ Les dispositions d’alerte précoce (mécanismes sécurisés de dénonciation, etc.) ;
➢ L’évaluation périodique et un bilan éthique qui devrait donc être fait chaque année, à
l’instar du bilan financier et économique ; du bilan social.

40
Chapitre III
ETHIQUE ET DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNEMENT

Introduction

L’enseignement implique une interaction et une relation quasi permanente entre le


professionnel et l’élève au sens large d’apprenant. Le code d’éthique tient compte de
cette spécificité d’autant plus que les professionnels ont pour mission de marquer
toute la personne par leurs prestations en utilisant des techniques et un pouvoir
pédagogique et d’évaluation qui détermine la carrière scolaire de l’élève. Ils ont donc
une grande emprise sur l’élève avec tous les risques de dérapages si leur action n’est
pas encadrée.

Dans de nombreux pays existent des codes d’éthique de la profession enseignante


coulée sous forme de lois23. Ces lois peuvent être doublées de codes spécifiques aux
établissements selon leur niveau et leur complexité, comme par exemple les
universités. En RDC, il n’existe pas une loi sur le code d’éthique de l’enseignement si
ce n’est le Code de l’agent public de l’État qui ne concerneraient que les enseignants
des écoles publiques. Quelques rares établissements, généralement du secteur de
l’enseignement conventionné, se sont dotés d’un code de bonne conduite. Très peu
ont mis en place des structures de veille et de sanction.

Ce chapitre présente les préalables et les composantes essentielles d’un code


d’éthique et de déontologie professionnelle de l’enseignement. Un exemple de code est
repris en annexe.

Les lois du pays priment sur les codes de déontologies des professions ou des
organisations. Elles contiennent des dispositions relatives aux activités et aux parties
prenantes dans l’enseignement (élèves, etc.) touchant à une interaction avec les tiers.
Ces rapports doivent être encadrer pour éviter tout abus. En outre un code engageant
les professionnels ne les dispense pas d’être passibles des peines relatives à toutes
les infractions au droit commun en cour d’enseignement (vol, viol, coups et blessures,
etc.) prévues dans le code pénal lorsqu’elles sont commises. Il ne peut se prévaloir de
son code spécifique car le pénal tient le civil en état.

III.1. DISPOSITIONS DE LA LÉGISLATION TOUCHANT À L’ÉTHIQUE DE


L’ENSEIGNEMENT

Elles peuvent être repérées dans cinq lois du pays :

A. la Constitution,
B. le Code pénal ; singulièrement la loi sur les violences sexuelles qui en est une mise à
jour du Code pénal,
C. la loi sur la protection des enfants,

23 Au Canada par exemple, ce code est une composante d’une loi sur les professions.
41
D. le Code de l’agent public de l’Etat
E. la Loi-cadre sur l’enseignement.

En fait, violer ces lois dans l’exercice de leur profession, mettrait les professionnels
de l’enseignement en conflit avec les lois. Ce qui engagerait leur responsabilité civile
et pénale devant les cours et tribunaux.

III.1.1. La constitution

La constitution énonce les droits et les devoirs généraux de tous en RDC ainsi que
les principes organisateurs du pays. Elle nous paraît constituer un pilier de l’éthique
professionnelle de l’enseignement du fait des droits et des devoirs des acteurs et des
parties prenantes de l’enseignement.

Travaillant sur le mental et la personnalité de la personne, le professionnel de


l’enseignement est exposé au risque de violer les dispositions constitutionnelles
pertinentes qui concernent les droits de la personne :

1. la personne humaine est sacrée : toute personne a droit à la vie, à l’intégrité physique
ainsi qu’au libre développement de sa personnalité. Nul ne peut être tenu en esclavage
ou dans une condition analogue, ni soumis à un traitement cruel, inhumain ou
dégradant (art. 16), être astreint à un travail forcé ou obligatoire.
2. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 22) ; à
la liberté d’expression (art. 23), à l’éducation (art. 24), au respect de sa vie privée et au
secret de la correspondance, de la télécommunication ou de toute autre forme de
communication, sauf dans les cas prévus par la loi (art. 31)

III.1.2. La loi sur la protection de l’enfant

Du fait de leur vulnérabilité sociale et psychologique, l’enfant et l’adolescent sont les


plus susceptibles d’abus divers liés à l’immaturité de leur capacité de discernement.
À la suite de multiples abus dont ont été victimes les enfants et les adolescents en
RDC et dans le monde, les dispositions de protection de l’enfant ont été renforcées
(Loi n° 09/001 du 10.01.2009). Certaines concernent l’éthique de l’enseignement.

En plus des droits constitutionnels reconnus à tous, l’enfant a le droit :

➢ D’exprimer son opinion sur toute question l'intéressant (Art. 7) ;


➢ De ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants (art. 9) ;
➢ De ne pas être privé de liberté de façon illégale ou arbitraire (art. 10) ; le cas
échéant, d’être traité avec humanité en tenant compte des besoins des personnes
de son âge (art. 11);
➢ De ne pas être harcelé sexuellement (art. 60), ni victime de la pédophilie (art. 169),
de viol (art. 170) ;
➢ D’avoir un milieu familial (art.17) ;
➢ De jouir de la liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 26);

42
➢ De bénéficier du respect de sa vie privée sans immixtions arbitraires ou illégales
dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes
illégales à son honneur et à sa réputation (art. 30) ;
➢ D’être protégé contre toute forme d'exploitation et de violences (art. 57).

Comme l’enseignement implique une relation permanente et durable avec


l’apprenant, le professionnel de l’enseignement (enseignant, responsable et
inspecteur) peut devenir vulnérable aux défaillances à caractère sexuel, et donc aux
infractions liées à cette loi.

Ce risque est encore plus réel du fait du pouvoir pédagogique ainsi que de la
vulnérabilité psychologique de l’adolescent/e aux sollicitations sexuelles. Certains
membres ou apprenants sont de professionnels du sexe. Vulnérables à ce risque, ils
doivent être prudents.

III.1.3. Le Code pénal : La lois sur les violences sexuelles

Elle a renforcé les peines dans le cas de viol (rapport sexuel non voulu) ou de rapport
sexuel avec l’élève mineur (moins de 18 ans). Ces peines sont doublées lorsque
l’auteur est l’enseignant ou a une autorité sur l’élève.

Le code pénal comprend aussi une section sur le secret professionnel :

« Les personnes dépositaires par état ou par profession des secrets qu’on leur confie
qui, hors le cas où elles sont appelées à rendre témoignage en justice et celui où la
loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront punies d’une
servitude pénale de un à six mois et d’une … (art. 73).

III.1.4. La Loi-cadre sur l’enseignement.

Le personnel de l’enseignement national :

➢ a droit à une rémunération juste et honorable, de participer à la gestion de son


établissement et de constituer des associations professionnelles syndicales pour la
défense et la promotion de ses intérêts (art. 200) ;
➢ fait preuve de hautes qualités humaines, morales, intellectuelles et
professionnelles, de sens élevé de responsabilité personnelle et collective ; fait
montre d’esprit d’initiative, de sens civique et de respect du bien commun, des
règlements professionnels ainsi que du code d’éthique (art. 201).

Les apprenants ont droit à une éducation de qualité (art. 202) ; l’étudiant a droit à
l’information, la liberté d’expression à l’école (art. 204).

Il est interdit au personnel enseignant :

➢ d’exploiter les élèves à des fins contraires aux lois du pays, à l’ordre public et aux
bonnes mœurs ou aux objectifs de leur formation (art. 225) ; se livrer à des actes
attentatoires à la dignité de leur profession ;
43
➢ d’octroyer ou faire octroyer un document scolaire ou académique à un élève,
étudiant, apprenant ou à toute autre personne ne remplissant pas les conditions
prévues par la présente loi et les textes particuliers (art. 226) ;
➢ de porter atteinte à la liberté de l’enseignement telle que définie à l’article 3 de la
présente loi (art. 227) ; d’attenter à la liberté du personnel de l’enseignement
national en vue d’obtenir pour lui-même ou pour son protégé un avantage scolaire
ou académique (229) ;
➢ de passer aux voies de faits, aux violences, aux menaces ou pressions faisant
craindre … de perdre leur emploi ou de voir exposer à un dommage quelconque
leurs propres personnes, leurs familles ou leurs biens (230).

Les peines sont l’emprisonnement (3 mois max.) et/ou une amende allant de 50.000
à 100.000 FC ; le tout porté au double si l’auteur est enseignant ou parent (234 &
235) ; sauf pour l’attentat à la pudeur, aux bonnes mœurs, au harcèlement sexuel et
de viol commis sur l’élève, l’étudiant, l’étudiante et autre apprenant (236).

III.1.5. Le Code de l’agent public de ’État

(Décret-Loi 017-2002 du 3 octobre


2002)

Les valeurs pour tout agent public :

➢ Stricte impartialité ;
➢ Disponibilité totale,
➢ Compétence professionnelle
➢ Discrétion
➢ Sens d’éthique professionnelle, qui « se témoigne notamment par le dévouement,
l’intégrité, l’équité, la dignité, l’impartialité, la loyauté, le civisme, la courtoisie et le
devoir de réserve dans ses relations aussi bien avec ses supérieurs, ses collègues
et ses collaborateurs qu’avec le public ».

Les devoirs :

➢ Se comporter dignement en public comme en privé, de manière à se faire respecter


et à refléter une bonne image de l’Etat (art.9, 1);
➢ S’abstenir de tout acte d’improbité et immoral tel que l’ivrognerie, le vagabondage
sexuel, l’escroquerie, le vol, le mensonge, la corruption, la concussion (art.9,2) ;
➢ S’acquitter de ses devoirs en toute disponibilité et dans le respect des lois,
règlements, instructions et règles déontologiques particulières ;
➢ Donner au public toute information utile et nécessaire (art.13), tout en se gardant
de divulguer les secrets professionnels (art.14);
➢ S’abstenir de traiter un dossier dans lequel on a un intérêt personnel direct ou
indirect ; informer la hiérarchie en cas de conflit d’intérêts ;
➢ Éviter toute forme de corruption et toute discrimination (fondée sur l’origine, la
race, le sexe, la religion, l’ethnie, les convictions politiques ou philosophiques…)
(art.15 et 22);
➢ Faire preuve de courtoisie dans le langage, les écrits et tous les actes.

44
III.2. VERS UNE DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNEMENT

III.2.1. Intérêt pour les questions d’éthique et de déontologie de l’enseignement

Nécessité actuelle d’une déontologie de l’enseignant

L’intérêt pour les questions d’éthique professionnelle et de déontologie de


l’enseignement se dégage à la lumière d’une quadruple analyse :

➢ La conduite du personnel de l’enseignement en RDC est devenue une préoccupation


qui entache gravement la crédibilité des titres et des produits qui en sortent, ainsi que
du métier d’enseignant : de l’enseignant aux cadres du ministère, de l’éducation de
base à l’université.
➢ Les sociétés démocratiques modernes sont des « sociétés ouvertes » du fait d’une
pluralité de valeurs et de points de vue idéologiques (progrès des libertés, pluralité des
modes d’expression) qui nécessite un cadrage régulé de la profession d’enseignant.
➢ L’exigence d’une plus grande professionnalisation implique une demande accrue
d’expertise et d’efficacité dans le monde de l’enseignement.
➢ Un contexte de « crise de l’autorité » dans le monde de l’école qui nécessite de
manifester une cohérence éducative plus forte « devant des comportements d’élèves et
des parents que la seule force de l’institution arrive de moins en moins à normer »,
contraignant les enseignants à « se mettre aussi d’accord sur des principes et des
obligations déontologiques » (Kahn, 2006, p. 113).

La déontologie de l’enseignant, qui entend un socle commun de règles, de


recommandations et de procédures pour la pratique de la profession enseignante,
devrait émaner des professionnels eux-mêmes, dans leur désir de s’autogouverner,
sans contrainte quelconque.

Quel est l’apport d’un code de déontologie pour les professionnels de l’enseignement ?

Les principales raisons qui militent aujourd’hui en faveur de l’introduction d’une


charte de déontologie au sein de l’enseignement sont évoqués ci-après.

La revitalisation d’un habitus par la règle

L’existence d’un ensemble incorporé de règles de perception et d’action simplifie


l’appartenance au corps enseignant du fait de l’existence d’un habitus partagé,
c’est-àdire sûr. Car ce sont ces patterns qui fédèrent les professionnels d’une
même branche d’activité et les rendent socialement visibles comme tels vis-à-vis
de l’extérieur.

L’effritement, l’affaiblissement voire la disparition d’un habitus commun pose


problème. Pareil contexte est dominant dans le monde de l’enseignement où
preste un corps socioprofessionnel marqué par une pluralité des références
morales, culturelles et didactiques. L’explicitation des règles semble être un
exercice obligé.

45
« Dès lors que prévaut l’individualisme des conduites, des références morales,
des valeurs auxquelles on se réfère, la seule règle commune permettant la
coexistence se doit d’être explicitée, codifiée dans des textes et actionnées par
des procédures. À partir du moment où il n’est plus possible de faire fond sur
un implicite commun, nos relations avec les autres doivent être régulées par
la loi» (Roman, 1998, p. 55).

En d’autres termes, plus nous sommes indépendants, plus nous avons besoin de
règles. Par l’explicitation des règles du jeu, l’instauration d’un code de déontologie
réactive le sentiment d’appartenance à un corps lorsque celui-ci tend à s’étioler.

Lorsque l’éthos partagé est solidement ancré au sein d’un corps de métier, la
bonne conduite s’instaure facilement sans besoin de surveillance. Lorsque cet
éthos faibli parmi les professionnels, à l’occurrence les enseignants ; - et c’est
bien ce à quoi nous assistons aujourd’hui - ; la lisibilité et la prévisibilité du
comportement de l’enseignant faiblit.

Les usagers n’hésitent plus alors à recourir au droit pour arbitrer les conflits et
les malentendus. Alors le code de déontologie change de valence et devient une
instance protectrice des enseignants contre le risque d’abus inverse et de
dévalorisation de la profession.

Le positionnement de la qualification spécifique

Face à la dispersion extensive et à l’accroissement potentiel des tâches liées à la


complexification de l’enseignement, un code de déontologie permet de fixer ou de
réaffirmer les contours d’une pratique professionnelle parmi des professionnels
techniquement et culturellement divers. Ex. Profs de diverses sections et
disciplines venant d’écoles et milieux différents, etc.

Le code de déontologie facilite la précision de son domaine propre d’activité parmi


les autres professionnels techniquement et culturellement divers mais en
coopération interprofessionnelle ; surtout lorsqu’il n’y a pas entre eux des
rapports de subordination. Un code de déontologie définit donc, in fine, le
domaine de compétence du professionnel, l’espace de l’agir qualifié (Vincent,
2001, p. 50). La délimitation d’un domaine d’expertise produit toujours des effets
de légitimation pour une profession, à l’inverse toute extension inconsidérée de
son champ d’intervention en affaiblit son crédit (Renaut, 2004).

L’assurance psychologique et la sécurité juridique

Les enseignants, en tant que fonctionnaires de l’État, ont la difficulté croissante


d’exercer leur liberté professionnelle (Obin, 1994, p.12). Il s’agit là d’une faible
sécurité psychologique. Celle-ci est doublée d’un faible sentiment de sécurité
juridique face à la montée progressive du contentieux entre enseignants, élèves
et parents jusqu’à contester en justice la plus banale des décisions scolaires
comme une cote d’examen.
46
En réponse, il convient de situer les limites de la compétence du professionnel
enseignant en termes d’obligations de moyens, et non de résultats. Un code de
déontologie travaille à distinguer l’échec de la faute et à restaurer l’échec comme
issue toujours possible d’une situation. Un résultat non souhaité n’est pas la
faute de l’enseignant pourvu qu’il ait utilisé toute sa compétence et tous les
moyens à sa disposition. Si l’objectif n’est pas atteint, cela ne saurait être imputé
au professionnel, mais aux circonstances dont plusieurs sont indépendantes de
l’enseignant24. Ce n’est donc pas une faute, mais un échec.

L’affaiblissement de la caution statutaire ou du titre

Selon Vincent (2001), il s’agit du déficit croissant de légitimité du titre ou du


statut de l’enseignant (Lic., Dr, Pr, CT, …). Pendant longtemps, le titre était perçu
comme la garantie indiscutable de compétences, de savoir-faire et de qualité des
pratiques. Ce lien analytique statut/compétences est en train de se défaire. La
primauté est accordée à la compétence, entendue comme aptitude à mobiliser et
à combiner in situ des ressources dans des contextes complexes et originaux25.
Le professionnel est alors dans l’obligation de faire ses preuves, de signifier et de
manifester qu’il est compétent.

Un code de déontologie est un trait d’union qui rapproche statut et compétences.


Il repose sur l’attestation, et l’extériorisation de comportements et d’attitudes
attendus.

L’exigence de transparence

L’école ne peut plus faire l’économie d’une information et d’une explication sur son
mode de fonctionnement ainsi que sur les dispositifs et les procédures
disciplinaires qu’elle utilise. Cette demande de transparence peut être située au
niveau :

➢ Du fonctionnement institutionnel des établissements : préciser les projets et les


objectifs, expliciter les modes d’organisation et les dispositifs de régulation.
➢ Des différents acteurs dans leur pratique quotidienne ; leurs prérogatives, leurs
tâches, leurs obligations de service, ce qu’ils doivent faire et ne pas faire.

24 Un code de déontologie est un dispositif professionnel qui tend à réduire les risques de recours juridiques en
rendant visible ce qui devait être fait normalement - et de manière minimale - dans certaines situations précises. Le
fait que la situation n’ait pas abouti n’est pas imputable à un manquement ou à une négligence, ce n’est donc pas
une faute mais un échec au sens où l’ensemble des conditions, dont certaines étaient par définition imprévisibles,
n’étaient pas réunies pour que la situation se réalise.
25 La personne compétente est celle qui sait construire des réponses pertinentes pour gérer des situations

professionnelles de plus en plus complexes. Si la formation vise à enrichir le capital des ressources incorporées, à
s’entraîner à leur combinaison et à leur mobilisation, la professionnalisation ajoute à la formation l’organisation de
situations de travail plurielles où s’expérimente, in re, la construction effective des compétences.
47
C’est moins une conformité didactique qu’une lisibilité déontologique qui est exigée
des enseignants. L’accent est mis sur la dimension éthique du métier et, au-delà, sur
le rôle et la place de l’enseignant au sein de l’institution (Prairat, 2002, pp. 138-151).

III.2.2. Arguments pour refuser l’orientation déontologique

Le risque de voir la pratique pédagogique être technicisée.

Avec l’introduction d’un code de déontologie, le risque est de voir la pratique


pédagogique se transformer en une suite d’opérations qui assimilerait l’enseignant en
un simple opérateur. Or dans son travail, l’aspect éthique et la dimension technique
sont indissociables ; la qualité de la relation qu’il entretient avec les élèves contribue
à la qualité du travail d’apprentissage.

L’enseignement implique un travail continu d’ajustement aux attitudes et aux actions


des apprenants. Il comprend une dimension relationnelle (relation enseignant -
apprenant). C’est un art pratique (pratical art). Le code ne vise qu’à l’améliorer
(Scheffler ; 2003, p. 103).

Le risque de privilégier la réglementation et minimiser la sagacité herméneutique

Un code de déontologie est pertinent s’il fournit au professionnel des repères et des
points d’appui pour orienter son action dans les situations difficiles qu’il peut
rencontrer selon différentes facettes du métier.

Cependant le code ne peut inventorier toutes les situations critiques. Il y aura


toujours un cas imprévu, une conjoncture nouvelle, une situation inédite. C’est ainsi
qu’en plus des règles (univoque par principe), code d’éthique est constitué aussi de
principes qui d’office appellent une forme de « sagesse pratique », c’est-à-dire une
capacité « à inventer les comportements justes appropriés à la singularité des cas »
(Ricœur, 1990, p. 313) 26 .

La formulation d’un code de déontologie devra être plus qu’une simple question de
règles, d’interdictions et d’obligations à poser ; elle prend en compte l’espace
inévitable de la raison et de l’imagination pour interpréter et saisir la conjoncture de
chaque situation professionnelle où agit un enseignant (De Munck, 1999, p. 39) 27.

Le risque de réduction de l’autonomie et l’authenticité de l’enseignant.

La profession de l’enseignant est fondée sur une double exigence d’autonomie qui
demande à l’enseignant de se déterminer par lui-même et d’assumer ses actes ; et
d’authenticité qui l’appelle à être lui-même et à pleinement réaliser ses potentialités
(Taylor, 1994, p. 29).

26 Toute norme socio-morale, n’enferme jamais les modalités de son application Elle appelle une « sagacité
herméneutique» et, à l’inverse, présuppose un cadre qui l’oriente. (Guibet-Lafaye, 2006, p. 74).
27 La « compétence éthique » n’est pas une compétence à appliquer, elle est une compétence interprétative.

48
Néanmoins, l’enseignant est un salarié souvent fonctionnaire. Il est soumis à un
statut, un contrat et des règlements, bref à une hétéronomie avec un risque réel d’un
code de déontologie qui tendrait à se transformer en un cahier des charges et devenir
un outil de contrôle des salariés (Boltanski 1999 ; p. 557). Ce qui serait une atteinte
à la nécessaire autonomie et authenticité du travail de l’enseignant (Salas, 2009).

Le code déontologique de l’enseignement devrait ainsi responsabiliser l’enseignant


dans ses différentes interventions qu’il oriente de manière autonome. Responsabiliser
l’enseignant, c’est accroître son autonomie, élargir ses possibilités d’action et ce, dans
le respect d’un ensemble de principes et d’obligations générales qui définissent un
cadre.

La transformation d’un code en un outil de surveillance de l’enseignant.

En fait, comme le note Mouralis (1997, p. 306), sous un contrat qui implique sa
subordination à une autorité, la déontologie est plus utile, pour le professionnel, car
elle réduit la subordination inhérente à la qualité de salarié aux seules sujétions
relatives aux conditions de travail. Le code d’éthique vient protéger l’indépendance
du professionnel dans son domaine strictement professionnel et peut même l’amener,
le cas échéant, à repousser des ingérences de son employeur sur ce terrain.

III.3. ÉLÉMENTS ESSENTIELS D’UNE DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNANT

III.3.1. Référents basiques d’un code de déontologie des enseignants

Il s’agit des référents suivants :

➢ L’encrage du code dans les finalités assignées à l’éducation nationale ;


➢ La prise en compte des épreuves rencontrées par l’enseignant débutant, d’abord
celle de la Vulnérabilité (Moreau, 2004). Ensuite l’épreuve de l’opacité de la
question des élèves en difficulté ;
➢ La troisième épreuve est l’assomption de la responsabilité.

III.3.1.1. L’encrage du code de déontologie dans les finalités assignées à


l’éducation nationale

Pour Weiss et alii (2015), si les normes renvoient à des cadres juridiques, politiques
et sociaux qui les justifient, on peut toujours relever une certaine pluralité des
valeurs, voire des contradictions. Aucune société n’est homogène au point d’abolir
tout conflit, toute divergence entre ses membres. C’est pourquoi l’éthique enseignante
est nécessairement plurielle.

En effet, les valeurs ne tombent pas du ciel. Elles reflètent l’état des représentations,
des aspirations, des idéaux d’une société à un moment donné. C’est pourquoi on ne
saurait parler de l’éthique professionnelle des enseignants d’une manière abstraite et
intemporelle (sans la situer dans son contexte).
49
Deux exemples : le Congo belge et la France.

Les valeurs attendues de l’enseignant dans le Congo Belge, étaient marquées par le
contexte idéologique et philosophique de l’époque et dans les programmes
d’enseignement colonial. Autorité et autoritarisme, hauteur, distance dans les
manières d’être et d’enseigner étaient des valeurs attendues des enseignants. Ainsi le
fouet était de mise sans réprobation des autorités et des collègues. Les lois de l’après
indépendance qui ont introduit des réformes profondes des programmes, ont aussi
reformuler les valeurs attendues de l’enseignant.

En France, le Code Soleil faisait du respect, le fondement de la relation éducative


entre l’enseignant et ses élèves. Cette valeur morale était non seulement un devoir,
mais le principe même de toute pratique éducative. L’enseignant doit avoir une
personnalité lui conférant une « autorité naturelle » et un « rayonnement exemplaire
».

Les finalités du système éducatif français ont été redéfinies en 1989, dans cette même
France : contribution à l’égalité des chances ; insertion dans la vie sociale et
professionnelle. Ces deux finalités entraînent des exigences éthiques et
déontologiques nouvelles : avoir des capacités relationnelles, disposer de techniques
de gestion et de résolution des conflits, se tenir au courant des évolutions de la société.
L’accent a été mis sur :

➢ l’obligation d’équité et d’individualisation de l’enseignement ;


➢ la nécessité du travail en équipe de professeurs de toutes disciplines ;
➢ L’obligation de se former en permanence vu l’évolution rapide des savoirs de référence.

Ces valeurs s’inscrivent dans le contexte du « nouvel esprit du capitalisme » (Boltanski,


1999, p.162) qui, dans la gestion des entreprises, prescrit la rentabilité par le travail
en équipes multidisciplinaires, la coopération sur un projet, la gestion des conflits,
l’individualisation ; l’autonomie, la flexibilité.

De là dérivent trois « qualités déontologiques » à statut normatif :

➢ D’une part l’enthousiasme : on ne demande plus tant à l’enseignant de susciter le


respect, l’admiration, un désir mimétique d’imitation qui fait de lui un modèle, mais
plutôt d’être capable d’animer, de susciter des initiatives, d’insuffler le dynamisme qui
permet à ses collègues et à ses élèves de s’engager dans des projets.
➢ D’autre part la confiance car pour réussir, il faut savoir faire confiance à ceux avec
qui se nouent des liens destinés à évoluer pour développer le projet.
➢ Enfin la flexibilité : il s’agit d’être adaptable, flexible, susceptible de basculer d’une
situation dans une autre très différente et de s’y ajuster.

50
III.3.1.2. La prise en compte des épreuves rencontrées par l’enseignant
débutant

Selon Moreau (2004), le débutant ne peut anticiper la diversité des questions éthiques
qu’il va rencontrer, avec les élèves, les parents, les collègues. Il réalise alors que la
dimension humaine de sa profession et le besoin de dépasser toute déontologie
formelle.

L’enseignant débutant est confronté à trois épreuves éthiques.

D’abord celle de la Vulnérabilité (Moreau, 2004)

L’enseignant découvre la vulnérabilité d’autrui (élève, parent). Son pouvoir


insoupçonné peut être dangereux et autrui-élève y est exposé sans défense. Il lui
importe alors de développer des compétences pour protéger autrui en exposant sa
propre vulnérabilité afin qu’autrui en retour puisse se sentir protégé.

Ensuite l’épreuve de l’opacité de la question des élèves en difficulté

Il n’est pas aisé de comprendre l’élève mis en difficulté à l’école, d’interpréter de


manière fiable ses actions, ses attitudes, ses représentations ou ses croyances ; de
saisir sa démarche cognitive. Alors survient le doute quant à l’omnipotence
pédagogique, la fin de l’illusion qu’il suffit d’apporter à l’élève ce qui lui manque, pour
venir à bout de son incompréhension. Ce qui n’est pas compréhensible, c’est son
incompréhension de ce qui semble à l’expert transparent.

La troisième épreuve est l’assomption de la responsabilité.

Du point de vue éthique, la chute de l’illusion pédagogique l’amène à prendre en


charge globalement le poids moral de son agir professionnel ; à s’assume enfin comme
agent moral dans la mesure où son échec peut conduire le jeune enseignant à la
démission.

III.3.2. L’éthique relationnelle de l’enseignant

III.3.2.1. De la relation pédagogique professionnelle

L’exercice de la profession enseignante exige une capacité de créer et maintenir un


bon climat qui permet une interaction enseignant-élève. On parle alors de « climat
scolaire » qui facilite ou complique la qualité de l’enseignement-apprentissage. Les
principales études sur les composantes du climat scolaire constatent que la qualité
de la relation pédagogique (la qualité des relations entre l’enseignant et les élèves) est
une composante de base du climat scolaire (Marsollier, 2016)28. L’exercice du métier
d’enseignant immerge dans le relationnel.

28 D’autres composantes liées à cette relation seraient notamment : le niveau de moral et de l’engagement des
enseignants ; la violence et le harcèlement entre élèves, et entre élèves et enseignants ; l’engagement des élèves
51
Or la relation pédagogique est asymétrique. L’enseignant jouit d’un grand pouvoir
dans la relation pédagogique car c’est lui qui l’initie et la pilote. Il a l’expertise et la
maturité que n’a pas l’élève enfant ou jeune. Certains élèves sont plus vulnérables et
donc moins résilients. Ce qui appelle donc la responsabilité de l’enseignant.

L’expertise didactique ne peut être féconde sans un savoir-faire relationnel minimal


auquel se réfère en priorité le jeune apprenant (enfant / adolescent). Certains faits
relationnels impactent durablement les rapports entre le jeune et l’école jusqu’au
rejet de l’école. Ils affectent aussi l’estime de soi, l’image de soi et de sa valeur.

Exemples de traces de dérapages verbaux dans la communication pédagogique :

➢ Les prédictions négatives sur l’avenir de l’élève : Bourrique tu es, bourrique tu resteras,
tu ne vas plus changer toi !
➢ Les jugements de valeur négatifs directs sur la personne : Les cancres seront toujours
des cancres !
➢ Les moqueries, l’humour : Ce sont les bébés qui écrivent comme cela !
➢ Les critiques acerbes : C’est impossible de faire un exposé pire que le tien !
➢ Les stigmatisations : D’un âne, on ne fera jamais un cheval de course !
➢ Les prises à témoin de la classe : Oui, tu ne comprends pas, je le sais ! Tout le monde
le sait !
➢ Les insultes : Tu es qu’une simple paresseuse !
➢ Les menaces : Je vais te secouer, tu vas comprendre !
➢ Les marques d’impatience : Bon ! On ne va pas y passer la nuit !

À ces dérapages verbaux s’ajoutent d’autres dérapages par la communication non


verbale et para-verbale : les gestes, mimiques et intonations de la voix29.

III.3.2.2. La violence éducative ordinaire (VEO)30

Si le fouet ou les coups sont une violence perceptible et révoltante, les paroles et toute
la communication non verbale peuvent devenir un autre lieu d’une violence exercée
contre les élèves. Cette violence pernicieuse a des effets dévastateurs sur le psychisme
et la neurobiologie de la victime surtout jeune. Elle peut être qualifié de « violence
éducative ordinaire » (VEO).

Les études récentes en neurosciences affectives et sociales informent plus clairement


sur les effets de la qualité de la communication sur la maturation physiologique du
cerveau humain ; notamment sur l’amygdale cérébrale, centre le de peur, sur
l’hippocampe, actrice dans la mémoire et les apprentissages ; sur le cortex orbitofrontal,
régulateur des comportements émotionnels et sociaux, (avoir de l’empathie,

(Cohen, 2012 ; OCDE, 2009) ; le climat relationnel entre enseignants et entre eux et le personnel de direction ; le
climat de justice (Janosz, 1998).
29 Dans les signes vocaux verbaux Anolli distingue trois paramètres qui déterminent les caractéristiques

de la voix, essentiels pour la compréhension de l’énoncé linguistique : le ton par exemple descendant
de la voix pour prévenir que l’on est en train de terminer de parler ; l’intensité ou le volume de la voix
(fort ou faible) pour souligner, accentuer et emphatiser des éléments particuliers ; la vélocité ou la
rapidité liée au temps de la succession des syllabes (nombre de syllabes par secondes)
30 Autrement dit : Communication violente en éducation

52
comprendre les émotions d’autrui, réguler des différends de manière éthique et
responsable, et aussi éprouver de la compassion. Selon Allan Schore31, le rôle des
adultes dans le développement du cortex orbito-frontal est capital. C’est par les «
neurones miroirs » (actifs lorsqu’on observe un acte ou on l’accomplit), que l’enfant
victime de la VEO déchiffre - est affecté par - les intentions et les émotions de l’adulte.

Plus des 90 % des adultes pratiquent la violence éducative ordinaire dans le monde.

Conséquences de la VEO répétitive chez l’enfant :

➢ Diminution de l’hippocampe et hyperactivité de l’amygdale (Martin Teicher, 2012)


➢ Sous-développement du cortex orbitofrontal, du cortex temporal droit, des cortex
pariétaux, du thalamus, du cervelet et du cortex occipital (E. Gershoff, 2012).

Ce qui provoque :

➢ Des troubles de l’humeur (instabilité émotionnelle), des addictions (alcool, drogue),


➢ Des troubles de la personnalité (hyper narcissisme, paranoïa, bipolarité), de
l’agressivité, la perte d’estime de soi, la timidité, le repli, la dépression, le syndrome
d’hyperactivité, la délinquance, etc.

Il en résulte la peur, la baisse de l’estime de soi qui culminent en un handicap dans


la vie.

➢ La peur du regard des autres, de paraître nul devant eux et le prof, les mauvaises
notes, les comparaisons, sont des sources de stress qui fragilisent l’élève et
l’insécurisent.
➢ L’enfant/ado maltraité et vulnérable a de mauvaises notes, est en situation d’échec,
se sent nul, humilié. Il a peur des autres, et de l’école. Il entre en décrochage scolaire.
➢ Devenus parents, porteurs d’un “ handicap”, ces ex-enfants maltraités deviennent
esclaves de leurs émotions. Quel cercle vicieux de la VEO.

Effets de la « bientraitance » éducative.

L’inverse de la VEO, la bientraitance éducative, a des effets positifs avérés sur le


psychisme par la neurobiologie du jeune. Les études de M. Meaney (Univ. Mc Gill,
Montréal) ont montré que le soin apporté à un enfant /adolescent, les interactions
harmonieuses, chaleureuses, les conversations agréables, le plaisir partagé
entraînent la sécrétion de l’ocytocine :

➢ qui agit sur les gènes et sur le développement du cerveau, de la mémoire


➢ qui facilite l’empathie, la confiance, la coopération, l’altruisme, l’attachement
➢ qui diminue l’activité de l’amygdale et donc l’anxiété, la peur et le stress
➢ qui provoque la sécrétion d’endorphine (hormone du bien-être) de dopamine (hormone
de la motivation, de la créativité) et de sérotonine (stabilisation de l’humeur)

31 Allan Schore est un des fondateurs de neurosciences affectives et sociales; directeur du département de psychiatrie
de l’Université de Los Angeles. Il est psychiatre, psychanalyste, biologiste et biochimiste.
53
L’enfant /adolescent traité avec bienveillance renforce la confiance en lui, développe
son cortex orbitofrontal, éprouve du plaisir à créer et apprendre, devient capable de
se comporter avec bienveillance aujourd’hui et plus tard.

III.3.2.3. Bientraitance éducative et construction de l’estime de soi.

Nature de l’estime de soi.

L’estime de soi est un des besoins fondamentaux de l’adulte, et aussi de l’élève de


tout âge (Pourtois et Desmet, 2004). Il se construit dès le plus jeune âge, selon les
expériences vécues, et au gré des interactions avec l’entourage, par l’entretien des
capacités du jeune dans cinq domaines distincts et les interactions autour de 3 pôles
principaux

Les 5 domaines d’estime de soi Les trois pôles principaux de l’action positive sur
: l’estime de soi

Source : Marsollier

Comment renforcer ou entretenir l’estime de soi des élèves ?

La relation pédagogique sera axée sur un renforcement de l’encrage émotionnel du


changement de comportement de l’élève (CNV) :

STIMULUS lié à la ÉMOTION BESOIN SENTIMENT Nouveau


situation spontanée concerné persistant comportement
généré
Renforcement Joie Reconnaissance Epanouissements Implication
positif
Jugement de Tristesse Confiance Humiliation Renoncement
valeur
Evaluation Colère Justice Rejet Agressivité
négative
Chantage Peur Sécurité Insécurité Repli
À court terme ; pour l’élève, la qualité de la relation éducative agit sur les rapports :

➢ d’intérêt et de motivation au « savoir »,


➢ de confiance et d’ouverture au professeur,
➢ de plaisir et de sécurité à « l’apprendre »,

54
➢ de confiance et de plaisir à « l’école ».

À long terme, chez l’élève, elle a des effets sur la construction ou restauration de
l’ESTIME DE SOI, l’épanouissement et le développement personnels ; la capacité de
donner un sens à sa vie.

Obstacles, contraintes, résistances

L’enseignant : L’élève :
• “sur-stress” de l’adulte /ses • Epreuve émotionnelle pour
besoins, ses attentes l’élève
• Mise à l’épreuve émotionnelle • Génératrice des sentiments
• Bascule du « relationnel » au « négatifs
réactionnel » ; • Et de changement d’attitudes
• Dérives comportementales : et de comportement de l’élève
verbales, voire non verbal ou para- (peur, etc.)
verbal.

Pistes pour une éthique professionnelle relationnelle de l’enseignant

1) Prendre en considération les besoins de chaque élève en adaptant son


enseignement et son action éducative à la diversité des élèves, à la singularité de
chacun.

2) Agir en éducateur responsable et selon des principes éthiques :

➢ Accorder à tous les élèves l'attention et l'accompagnement appropriés.


➢ Éviter toute forme de dévalorisation à l'égard des élèves, des collègues et des chefs.
➢ Se mobiliser et mobiliser les élèves contre les stéréotypes et les discriminations de tout
ordre, promouvoir l'égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes.
➢ Contribuer à assurer le bien-être, la sécurité et la sûreté des élèves ; à prévenir et gérer
les violences scolaires, à identifier toute forme d'exclusion ou de discrimination, ainsi
que tout signe pouvant traduire des situations de grande difficulté sociale ou de
maltraitance.
➢ Contribuer à identifier tout signe de comportement à risque et contribuer à sa
résolution.
➢ Respecter la confidentialité des informations individuelles.

3) Préciser le sens de l’éthique relationnelle pour en faciliter la mise en œuvre.

➢ L’éthique est une disposition psychique (éthos), à s’interroger (seul ou en groupe) sur
la décision, le comportement le plus juste à adopter pour le Bien de l’autre. Ce qui
balise la vie éthique, c’est le souci de l’autre. (P. Ricoeur, 1990).
➢ Un registre de respect réciproque qui incline à respecter l’autre et (alors) à se respecter
soi-même comme sujet respectant. (Ph. Barrier 2012).

55
4) Adopter une posture éthique dans la relation pédagogique.

➢ S’interroger (volet cognitif de la posture) puis décider :

Est-ce qu’il est bon pour l’élève ou le groupe que j’intervienne ?


À quel moment dois-je intervenir ?
Dans quel but ? Pour quelles finalités ?
Que dois-je lui dire ? Comment dois-je intervenir ?

➢ Adopter une qualité de la communication (V, NV et PV) qui offre une réponse
appropriée aux besoins spécifiques de chaque élève.

Qu’est-il juste que je fasse pour l’élève ? Les grandes options normatives qui guident
l’éthique portée par la question « comment agir au mieux » (Erick Prairat, 2001) :

(1) mobiliser la raison :

(a) Le déontologisme qui consacre la notion de devoir (respect du


droit) ;
(b) Le conséquentialisme qui convoque la responsabilité morale.

(2) Mobiliser le meilleur de soi-même (“ démarche qualité”) :

(a) Le vertuisme nécessite une attention à soi-même quotidienne


(b) Le « Care » qui situe la priorité au niveau des besoins d’autrui (S.
Laugier, 2009) notamment à l’égard des élèves les plus
vulnérables.

Ces quatre options sont en rapports dialectiques ; elles sont adossées aux valeurs et
structurées par la morale.

L’éthique relationnelle s’observe dans :

56
Quant à l’éthique de l’inspecteur ?

➢ La recherche de l’attitude la plus JUSTE vis-à-vis de l’enseignant (ses besoins),


son regard tourné vers l’intérêt des élèves et les progrès du SE
➢ La conception de son action comme vecteur d’élévation du niveau de
compétence des enseignants, des agents et des élèves : son ENGAGEMENT
➢ L’indépendance de son appréciation, (sa distanciation intellectuelle et son
perfectionnement permanent)
➢ La pratique du dialogue interactif et le temps nécessaire accordé à l’écoute et
à la compréhension de son interlocuteur
➢ La réaffirmation des valeurs humanistes de tout projet éducatif
➢ Sa volonté de ne pas porter atteinte aux personnes

57
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Ricoeur, Paul. (1992). « Éthique et morale »

Ricot, Jacques. (2003). Repères éthiques et philosophiques

Nillès J-J. (2003). L'éthique est une compétence professionnelle.


Paimbault P. (2012). Ethique et relations professionnelles : raisons d’être et mis en place.
Portella A. (2008). L’éthique en organisation. Manuel à l’usage des responsables RH et des
managers.
Droz, Y. et al., (2006), Éthique et développement durable, Paris : Karthala
Mbonda E-M. (2013). "Aide au développement et responsabilité sociale des multinationales".
In Ethique publique.
Décret-Loi 017-2002 du 3 octobre 2002 portant Code de conduite de l'agent public de l'État.

Marsollier C. (2011). Investir la relation pédagogique. Lyon : Chronique Sociale.


Marsollier C. (2016). L’éthique relationnelle, une boussole pour l’enseignant. Lyon : Canopé.
Prairat, E. (2009a). De la déontologie enseignante, valeurs et bonnes pratiques. Paris : PUF.
Weiss Laura, Sandra Pellanda Dieci, Anne Monnier. (2015). Éthique et déontologie
professionnelle des enseignants. Formation et pratiques d’enseignement en question. Numéro
20, 2015.

58
ANNEXE 1 : PETIT LEXIQUE

Affabulation : Sens 1 Déformation fantaisiste des faits. Synonyme : récit. Sens 2


Mensonge, histoire inventée de toutes pièces.
Concussion (du latin "concussio" qui signifie extorsion) : C’est le fait pour un agent
public, soit de percevoir des montants indus ou d’exiger plus que prévu au titre
d’impôts ou taxes publiques ; soit d’accorder une exonération, une franchise, une
rémunération en violation des textes légaux et réglementaires.
Conflits d’intérêts : Une position où un intervenant peut user de sa position pour
orienter une décision à sa faveur. Il a intérêt dans la situation, ce qui le met en
conflit avec sa conscience et avec l’intérêt ou la mission de sa fonction ou sa
profession.
Consentement éclairé : Accord que le professionnel obtient auprès d’un demandeur
de service, d’un enquêté, d’un malade ou d’un tuteur en vue de l’exécution d’une
prestation, d’un acte de soins ou de diagnostic après lui avoir donné toutes les
informations y afférentes ainsi que toutes les implications.
Corruption : (du latin "corrumpere" : abimer complètement) agissement par lequel
une personne investie d'une fonction (publique ou privée), sollicite ou accepte un
don, une offre ou une promesse en vue d'accomplir, retarder ou omettre
d'accomplir un acte entrant, d'une façon directe ou indirecte, dans le cadre de ses
fonctions.
Délit d’initié : Une position où un intervenant oriente une décision en sa faveur grâce
à des informations auxquelles il a accédé du fait de sa fonction alors que toutes les
parties intéressées sont supposées avoir concouru en toute ignorance de ces
données.
Déontologie : Ensemble des devoirs, des obligations et des responsabilités qui
incombent à une personne lors de l'exercice de ses fonctions.
Devoir : Direction précise de la conduite commandée par des valeurs données.
Escroquerie : Délit, tromperie consistant en l'obtention d’un bien ou d'un service au
moyen de l'usage d'un faux nom, d'une fausse qualité, de l'abus d'une qualité ou
de manœuvres frauduleuses. Escroquer : tromper la confiance de quelqu’un.
Éthique : Art de diriger la conduite humaine en tenant compte, en conscience, des
valeurs en jeu. Elle se réfère aussi au produit d'une réflexion portant sur les
valeurs afin de les critiquer, de les renouveler, et ce à la mesure des changements
que la vie quotidienne fait émerger.
Etudes en "simple aveugle" : Etude où le sujet d’étude, en l’occurrence le patient
pour les études médicales, ignore s'il reçoit le vrai traitement ou un placebo; en
"double aveugle" : la répartition principe actif / placebo se fait de manière aléatoire
et ni la personne prenant le traitement, ni la personne l'administrant ne savent s'il
y a du principe actif (double insu). La levée du voile n'est faite qu'après le traitement
statistique.
Morale : Théorie relative à la conduite humaine en tant qu'elle a le bien pour objet.
Elle se réfère aussi aux mœurs, aux habitudes et aux règles de conduite admises
et pratiquées par la société comme relevant du bien. Elle se réfère également aux
institutions qui permettent à une société d'atteindre ses objectifs, plus
particulièrement aux institutions d'ordre juridique ou quasi-juridique12. Le
discours moral est le plus souvent prescriptible.
59
Obligation : Lien d'ordre éthique qui assujettit l'action de l'individu aux impératifs
du devoir.
Probité : Rigoureuse honnêteté ; qualité de quelqu'un qui observe parfaitement les
règles morales, qui respecte scrupuleusement ses devoirs, les règlements, etc.
Redevabilité : Est le devoir qu’a un agent public d’informer et expliquer aux
gouvernés et à la société, le fondement, les modalités d’exécution et les résultats
de ses actes au titre de ses fonctions ; c’est aussi l’exigibilité de ces explications
par la société. Selon l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen du 26 août 1789 "Tout agent public doit rendre compte à la société de son
administration ". Le principe de la redevabilité constitue donc pour les agents
publics l’un des principes fondateurs de la démocratie et de la bonne gouvernance.
Responsabilité : Obligation qui consiste d'une part à rendre compte de ses actes et
de ceux dont on a la charge, et d'autre part, à assumer les conséquences de ses
actes.
Transparence : Qualité de celui qui ne laisse pas planer des zones d’ombre dans ce
qu’il fait aux yeux des bénéficiaires, des collègues et de la hiérarchie, tant en ce
qui concerne les objectifs, que les moyens, leur utilisation et les performances
quels qu’ils soient. Dans ses prestations, tout est clair, sans détours. La raison et
la substance de chaque acte sont justifiées et compréhensibles.
Valeur : Ce qui est vrai, beau et bien, selon un jugement personnel plus ou moins en
accord avec celui de la société dans laquelle on vit. La valeur est donc liée à nos
aspirations individuelles ou collectives ; elle constitue une préférence et une
référence pour la conduite qui inspirent nos gestes et nos décisions.

60
ANNEXE 2 : DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE DES ENSEIGNANTS
(BURKINA-FASO) 2017

Sommaire
1. Le choix de la profession d’enseignant
2. Conscience professionnelle chez l’enseignant
3. Les droits et devoirs de l’enseignant
4. Exercices et questions de réflexion

Dans le domaine de l’enseignement, la déontologie professionnelle permet à chaque


enseignant :
- de bien accomplir sa tâche,
- de bien connaitre ses droits et ses obligations,
- de prendre conscience de la complexité et de la délicatesse du métier
d’enseignant
- de mener une vie privée digne,
- d’accorder sa conduite aux principes qu’il prône dans son enseignement,
- d’éviter l’abus de l’alcool et du tabac,
- de s’abstenir du langage grossier, des tenues vestimentaires extravagantes et
des relations coupables, surtout avec les élèves.

1- Le choix de la profession d’enseignant

Généralement, le choix d’un métier se fait par vocation, ou par orientation au regard
des compétences professionnelles découlant d’une formation ou de dispositions
naturelles constatées chez le sujet.

Quand ce choix du métier est volontaire, l’individu peut s’épanouir dans son exercice.
Lorsqu’il est fait en référence aux capacités de l’individu, celui-ci est efficace et fait
de bons rendements. La compétence est entendue comme la somme des capacités
physiques, intellectuelles et déontologie nécessaire pour l’exercice d’un métier donné.
La vocation quant à elle, est une prédisposition pour une profession. Elle est une
sorte d’attrait irrésistible, que le métier exerce sur l’individu, lui permettant ainsi de
voir les avantages qu’il peut en tirer, et de considérer les difficultés et autres
contraintes, non comme des sources de découragement, mais plutôt comme des défis
à relever. Elle suppose donc comme un idéal pour lequel l’on est prêt à se dévouer, à
faire don de sa personne, à se sacrifier.

L’enseignant ayant la vocation est alors celui-là qui possède des dispositions
naturelles pour la formation et l’éducation des enfants : l’amour des enfants,
l’enthousiasme dans l’exercice de la tâche, le don de soi, le sens du bien et du service
public, etc. Mais comment cela se traduit-il concrètement, ne critère que l’enseignant
doit remplir pour que son action soit efficace et bénéfique ?

Au nombre des qualités essentielles qu’il doit incarner, nous retiendrons que le bon
enseignant doit :

61
➢ Être juste dans le traitement des enfants, parce que ceux-ci sont
particulièrement sensibles à toutes les formes d’injustice ;
➢ Être assidu et ponctuel, pour stimuler les enfants et leur donner le bon
exemple ;
➢ Être patient, parce que tous les élèves n’ont pas la même vitesse de
compréhension ; il y a des esprits vifs et alertes et d’autres qui sont lents ; d’où
la nécessité de répéter fréquemment, de mettre à contribution les mémoires
visuelles, graphiques, etc. et de soutenir les plus faibles ;
➢ Prêcher par l’exemple. Sa conduite de tous les jours doit être conforme à son
enseignement.

En plus des qualités susmentionnées qui sont indispensables pour bien faire son
travail d’enseignant, il convient de relativiser la vocation qui, si elle est nécessaire,
s’avère insuffisante sans qu’on lui adjoigne la conscience professionnelle.

2- La conscience professionnelle chez l’enseignant

La conscience professionnelle est une sorte de tension permanente de la volonté vers


le meilleur accomplissement d’une tâche. Elle est indispensable et se traduit par une
recherche permanente de moyens propres à améliorer la qualité de son enseignement.

A la vocation, il faut donc ajouter la détermination de toujours bien faire et mieux


faire.

Cette conscience professionnelle va se manifester dans l’action quotidienne de


l’enseignant à sa manière de préparer et de conduire sa classe, de collaborer avec les
autres enseignants et les partenaires de l’éducation, au suivi et au soutien des
enfants en tenant compte de leurs forces et de leurs faiblesses.

Ainsi, l’enseignant consciencieux va :

➢ Elaborer et mettre en œuvre des affichages conformes aux Instructions


Officielles.
➢ Appliquer les consignes pédagogiques émanant de ses encadreurs.
➢ Préparer régulièrement sa classe et évaluer constamment le travail des élèves.
➢ Elaborer et mettre en œuvre un plan d’amélioration individuel.
➢ Collaborer à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan d’amélioration collectif.

De la conscience professionnelle, va découler certaines responsabilités que le bon


enseignant assume sans rechigner.

L’enseignant est libre comme tous les concitoyens. Il peut épanouir sa personnalité,
manifester son indépendance vis à vis des opinions philosophiques, religieuses,
idéologiques, etc.

Toutefois, il ne doit pas perdre de vue que sa manière d’être, son langage, ses
attitudes sont observées, commentés et appréciés. Il doit par conséquent, pour rester
62
crédible aux yeux des élèves et des parents d’élèves et autres partenaires locaux de
l’éducation, faire preuve d’honnêteté, de tempérance, de modération, d’objectivité,
d’impartialité, etc.

Il doit également savoir qu’il est personnellement responsable de ses actes et de leurs
conséquences directes ou indirectes :

➢ Châtiments corporels ;
➢ Enfants laissés sans surveillance pendant les cours ou la recréation ;
➢ Enfant punis, mis à la porte ;
➢ Enfants exposés à des objets pointus, tranchants, ou à des substances
dangereuses ;
➢ Courses faites par les élèves au compte de l’enseignant ;
➢ Enfants qui se blessent en jouant ou en se bagarrant à l’école ; Dans tous ces
cas, la responsabilité civile de l’enseignant est engagée.

La responsabilité pénale de l’enseignant peut être aussi engagée, dans les cas de
délits ou de crimes comme les châtiments corporels interdits par la loi, les coups et
blessures volontaires ou involontaires dont l’enseignant est l’auteur.

De ce que nous avons dit au sujet de la déontologie professionnelle, nous pouvons


retenir que cette discipline est nécessaire aux enseignants à plus d’un titre. Outre
qu’il leur fait prendre conscience des attentes des partenaires au sujet de leur
prestation, il les sensibilise à bien accomplir leurs tâches.

La vocation est une condition importante parce qu’elle peut engager l’enseignant dans
la voie du dévouement à la cause des enfants. Toutefois, la conscience professionnelle
viendra compléter cette vocation là où elle existe et la suppléer là où elle fait défaut,
afin que l’enseignant engagé remplisse au moins les termes de son contrat.

3- Les droits et devoirs de l’enseignant

En tant qu’agent public, l’enseignant a des droits, en même temps qu’il est soumis à
des obligations.

3.1- Les droits de l’enseignant

Outre les libertés publiques reconnues à tout citoyen par la constitution républicaine,
l’enseignant a des droits particuliers liés à sa qualité de fonctionnaire ou d’agent
contractuel de l’Etat.

Il a droit à la protection de l’Etat, contre les menaces, outrages, violences, voies de


faits, injures ou diffamations dont il peut être l’objet dans l’exercice où à l’occasion
de l’exercice de ses fonctions.

En cas de faute professionnelle ou personnelle commise dans l’exercice ou à


l’occasion de l’exercice de ses fonctions, l’Etat se substitue à l’Agent public pour la
63
réparation des préjudices causés. Il peut ensuite se retourner contre l’agent pour lui
infliger des sanctions disciplinaires.

Il a droit également :

➢ Aux recours gracieux ;


➢ A l’adhésion syndicale ;
➢ Au droit de grève dans le respect de la réglementation ;
➢ A la liberté d’expression et d’opinion idéologique, politique religieuse ;
➢ A la rémunération après service effectif ;
➢ A une visite médicale annuelle gratuite ;
➢ Aux divers congés et autorisations d’absences ;
➢ Au logement gratuit ou à une indemnité compensatrice ;
➢ A des indemnités spécifiques liées aux contraintes particulières de son métier
;
➢ A la pension de retraite.

3.2- Les devoirs de l’enseignant

L’enseignant doit du fait du contrat qui le lie à l’Etat, se soumettre à des obligations
spéciales qui diffèrent de celles du commun des citoyens.

3.2.1- Les obligations prescrites par les textes

Assurer le service : être présent à son poste de travail et assurer lui-même les
tâches qui lui sont confiées ; répondre devant ses supérieurs hiérarchiques de
l’autorité qui lui a été conférée et de l’exécution des ordres qu’il a reçus, de même
que du contrôle de l’exécution des ordres qu’il adonnés, il est responsable de
l’exécution des tâches de ses subordonnées, à l’exception toutefois de leurs
fautes personnelles. En somme servir l‘Etat avec loyauté et abnégation

Respecter la hiérarchie : du fait qu’il se trouve dans un organisme hiérarchisé,


il a au-dessus de lui une autorité qui a vocation pour le commander et lui donner
des ordres ; ainsi, au niveau des exécutants, l’obéissance hiérarchique se
manifeste dans l’exécution correcte et loyale des ordres reçus ; les directeurs et
chefs de service participent au pouvoir hiérarchique et doivent par conséquent
être obéis par leurs subordonnés.

Faire preuve de réserve et de discrétion professionnelle pour tout ce qui


concerne les faits et informations dont il a connaissance dans l’exercice ou à
l’occasion de l’exercice de ses fonctions. Dans le même sens, il ne doit ni
soustraire des pièces ou des documents du service, ni les communiquer ou les
reproduire pour les besoins des tiers.

S’abstenir d’exercer à titre professionnel une activité privée lucrative, en


dehors de la production littéraire, agricole et pastorale.

64
Refuser la corruption sous toutes ses formes.

3.2.2- Les obligations non écrites dans les textes

Certaines obligations ne sont pas écrites, mais leur respect conditionne tout dans la
fonction. Elles relèvent de la déontologie et porte sur :

Le désintéressement : On ne devient pas enseignant pour gagner de l’argent,


mais parce que l’on pense que cette fonction vous permettra d’être plus utile à
l’ensemble de la collectivité.

La réserve : elle est une sorte de prudence qui vous retient de dire ou de faire,
de garder par devers soi un certain nombre de faits ; elle s’applique donc au
comportement.

L’impartialité est la qualité de celui qui agit sans parti pris. En raison de la
fonction qu’il exerce, l’enseignant est tenu à l’impartialité, à l’indépendance, à la
sérénité de jugement. Dans le domaine de sa profession, il doit s’abstenir de
toute propagande pour ou contre un parti politique, une confession religieuse ;
le port d’un insigne politique, la distribution de tracts, l’apposition d’affiches
politiques sont proscrits dans les locaux du service.

L’intégrité est la qualité d’une personne qui ne se laisse nullement corrompue.

L’équité consiste à reconnaitre ce qui revient de droit à chacun sans


considération discriminante.

La justice, règle de ce qui est conforme au droit de chacun, est la volonté


constante, perpétuelle de donner à chacun ce qui lui appartient, ce qui lui
revient, sans tenir compte par exemple de l’appartenance ethnique, régionale,
etc. de l’usager du service public.

La probité, synonyme d’intégrité, d’honnêteté scrupuleuse, caractérise le fait


d’être droit dans sa conduite, observer rigoureusement les règles de la
déontologie sociale.

65
TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION GÉNÉRALE .................................................................................................................. 2


0.1. CONTEXTE DU COURS : L’ÉTHIQUE ET LE L’ÉLÉVATION D’UNE NATION................. 2
0.1.1. Le règne des antivaleurs ................................................................................................... 2
0.1.2. La punition des délinquants est-elle la solution idoine ? ............................................ 3
0.1.3. La nécessité de la double compétence technique et éthique. ..................................... 3
0.1.4. Qu’en est-il de ceux qui travaillent sur la personnalité de l’homme ?...................... 4
0.2. OBJECTIFS DU COURS ............................................................................................................ 4
0.2.1. But du cours ........................................................................................................................ 4
0.2.2. Visé du cours ....................................................................................................................... 4
0.2.3. Objectifs spécifiques du cours .......................................................................................... 4
0.3. PLAN ET DESCRIPTION DU COURS ...................................................................................... 5
0.4. ANNEXES : ................................................................................................................................... 5
0.5. BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................................... 5
0.6. PRÉREQUIS ................................................................................................................................. 5
0.7. EXIGENCES DU COURS ........................................................................................................... 6
0.8. MODES D’ÉVALUATION ........................................................................................................... 6
0.9. PRÉSENTATION DES TP ........................................................................................................... 6
CHAPITRE I ................................................................................................................................................. 7
GÉNÉRALITÉS SUR L’ÉTHIQUE ET LA DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE ...................... 7
I.1. DE LA MORALE, DE L’ÉTHIQUE ET DE LA DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE .......... 7
I.1.1. De la morale ............................................................................................................................... 8
I.1.2. De l’éthique................................................................................................................................. 9
I.1.3. De la déontologie ..................................................................................................................... 10
I.1.4. Liens entre morale, éthique et déontologie ......................................................................... 10
I.1.5. De la profession ....................................................................................................................... 11
I.1.5.1. Définition de la profession .............................................................................................................. 11
I.1.5.2. Critères d’une profession................................................................................................................ 12
I.1.6. À quoi sert une déontologie professionnelle ? ................................................................... 13
I.2. AUTRES CONCEPTS DE BASE ................................................................................................... 13
I.2.1. Valeur ........................................................................................................................................ 13
I.2.1.1. Approche définitionnelle ................................................................................................................. 13
I.2.1.2. Système de valeurs ......................................................................................................................... 14
I.2.2. Norme ........................................................................................................................................ 14
I.2.2.1. Précisassions .................................................................................................................................... 14
I.2.2.2. Valeur et norme ................................................................................................................................ 15
I.2.3. Devoir ........................................................................................................................................ 15
I.2.4. La responsabilité et la redevabilité...................................................................................... 16
I.2.4.1. La responsabilité .............................................................................................................................. 16
I.2.4.2. La redevabilité .................................................................................................................................. 17
I.3. LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES (RSE) ................................................. 20
I.3.1. Appréhension de la RSE ........................................................................................................ 20
I.3.2. Que gagne l’organisation à s’engager dans la RSE ? ...................................................... 20
I.3.3. Ethique : clé de développement durable ............................................................................. 21
CHAPITRE II.............................................................................................................................................. 22
STRATÉGIES DE PROMOTION DES VALEURS AU SEIN D’UNE ORGANISATION .............. 22
II.1. VALEURS FONDAMENTALES EN ÉTHIQUE PROFESSIONNELLE ................................... 22
II.1.1. L’intégrité ................................................................................................................................. 23
II.1.2. La transparence ..................................................................................................................... 24
II.1.3. L’équité et les questions de genre (gender) ....................................................................... 24
66
II.1.4. L’excellence et la compétence professionnelle.................................................................. 25
II.1.5. Le développement durable et le respect de l’environnement ........................................ 25
II.1.6. Le devoir de discrétion .......................................................................................................... 26
II.1.7. Le devoir de réserve .............................................................................................................. 26
II.1.8. Le respect des lois du pays ................................................................................................. 28
II.1.9. Conscience professionnelle et discipline au travail ......................................................... 29
II.2. MISE EN PLACE DES OUTILS DE PROMOTION DES VALEURS ....................................... 29
II.2.1. La mise en place d’un code de déontologie ...................................................................... 30
II.2.1.1. La charte des valeurs..................................................................................................................... 31
II.2.1.2. Le code de déontologie d’une profession ou d’une organisation ............................................ 31
II.2.2. Principes pour la formulation d’un code de déontologie ................................................. 32
II.2.2.1. Principes de base ............................................................................................................................ 32
II.2.2.2. La formulation d’un code d’éthique. ............................................................................................ 33
II.3. LA STRATÉGIE DE MISE EN ŒUVRE DES VALEURS ......................................................... 35
II.3.1. Les séminaires sur l’éthique ................................................................................................ 36
II.3.2. L’engagement personnel....................................................................................................... 36
II.3.3. Les affiches, les dépliants, les posters et autres documents ........................................ 37
II.3.4. L’instauration des structures de promotion de l’éthique ................................................ 38
II.4. L’EFFICACITÉ D’UNE POLITIQUE ÉTHIQUE D’ORGANISATION ...................................... 40
CHAPITRE III ............................................................................................................................................ 41
ETHIQUE ET DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNEMENT .................................................................. 41
III.1. DISPOSITIONS DE LA LÉGISLATION TOUCHANT À L’ÉTHIQUE DE
L’ENSEIGNEMENT ............................................................................................................................... 41
III.1.1. La constitution ....................................................................................................................... 42
III.1.2. La loi sur la protection de l’enfant ..................................................................................... 42
III.1.3. Le Code pénal : La lois sur les violences sexuelles........................................................ 43
III.1.4. La Loi-cadre sur l’enseignement. ....................................................................................... 43
III.1.5. Le Code de l’agent public de ’État ..................................................................................... 44
III.2. VERS UNE DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNEMENT ............................................................ 45
III.2.1. Intérêt pour les questions d’éthique et de déontologie de l’enseignement ................ 45
III.2.2. Arguments pour refuser l’orientation déontologique ...................................................... 48
III.3. ÉLÉMENTS ESSENTIELS D’UNE DÉONTOLOGIE DE L’ENSEIGNANT .......................... 49
III.3.1. Référents basiques d’un code de déontologie des enseignants .................................. 49
III.3.1.1. L’encrage du code de déontologie dans les finalités assignées à l’éducation nationale .. 49
III.3.1.2. La prise en compte des épreuves rencontrées par l’enseignant débutant .......................... 51
III.3.2. L’éthique relationnelle de l’enseignant ............................................................................. 51
III.3.2.1. De la relation pédagogique professionnelle .............................................................................. 51
III.3.2.2. La violence éducative ordinaire (VEO) ....................................................................................... 52
III.3.2.3. Bientraitance éducative et construction de l’estime de soi. ................................................... 54

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................. 58


ANNEXE 1 : PETIT LEXIQUE ............................................................................................................... 59
ANNEXE 2 : DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE DES ENSEIGNANTS (BURKINA-FASO)
2017............................................................................................................................................................. 61
TABLE DES MATIÈRES ......................................................................................................................... 66

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