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Cours master S1

WISD, MQL
Matière : Communication
Pr. Zerrad Najib

Chapitre 1 : L’argumentation (suite)

I. Définition
1 Qu’est-ce qu’argumenter ?
L’objectif du discours argumentatif consiste à propos d’un thème (un sujet) de soutenir une
thèse (un point de vue, une opinion) qui réponde à une problématique1. Il faut convaincre un
adversaire, soit pour modifier son opinion ou son jugement, soit pour l’inciter à agir.

Quelques exemples pour mieux faire comprendre ces notions :


Un thème est un sujet de discussion plus ou moins précis, délimité : le tabac, les usages du
tabac, les usages sociaux du tabac, les méfaits du tabac, tabac et drogue, …
Une problématique est formulée sous forme d’une question à propos du thème : le tabac est-
il dangereux ? Pourquoi les jeunes gens fument-ils ? Quels sont les usages du tabac ?…
Une thèse est une réponse à cette problématique, une prise de position ou nuancée : oui,
fumer est dangereux… Fumer est dangereux, toutefois la quantité, le type de pratique et
l’attachement au produit nuancent le pronostic…

Argumenter, c’est donc définir la stratégie la plus efficace pour


• faire connaître sa position, sa thèse,
• la faire admettre à un lecteur ou à un auditoire,
• contredire une thèse opposée, critiquer une position contraire ou éloignée,
• démontrer avec rigueur, ordre et progression,
• se mettre en valeur…
Tous ces objectifs isolées ou combinées donnent naissance à une variété de formes et de
tonalités qui rendent chaque tentative d’argumentation très originale et parfois difficile à
discerner.

1
Les arguments servent d’habitude à étayer plusieurs types de thèses, que l’on pourrait
formuler ainsi:

1) une thèse – à caractère universel – de la science et des scientifiques, à savoir celle


conformément à laquelle la recherche scientifique est justifiée / conduit à des découvertes
utiles / fonctionnelles / bénéfiques au progrès de l’humanité;

2) une thèse – à caractère général – des scientifiques, à savoir celle conformément à


laquelle toute recherche particulière est au profit de la science / de l’humanité en son
ensemble / d’une communauté identifiée comme telle;

3) une thèse – à caractère particulier – des scientifiques engagés dans une recherche, à
savoir celle conformément à laquelle la recherche présentée est de nature à faire progresser la
science / la discipline dans les cadres desquels ils travaillent;

4) une thèse – à caractère individuel - des scientifiques engagés dans une recherche, à
savoir celle conformément à laquelle la recherche entreprise et les conclusions obtenues font
effectivement avancer leur domaine – de par leur originalité, méthode de recherche, etc.

À de telles thèses, implicites dans le discours scientifique, s’ajoutent les points de vue
particuliers formulés par les scientifiques dans les cadres de leurs recherches diverses, qui
pourront, à leur tour, être soutenus par des arguments du même type que ceux présentés ci-
dessous et d’autres divers types.

II. Discours scientifique et argumentation

Le discours scientifique est considéré, dans tout ce qui suit, une instance du discours public
parce qu'il est de nature dialogale et qu’il suppose un auditoire représenté par un ensemble
d'auditeurs qui peuvent devenir parfois des interlocuteurs. En outre, il est “médiatisé” par le
biais des publications scientifiques et par le biais de réunions, colloques, conférences, congrès
au sein desquels se font entendre des débats entre les spécialistes d’un domaine scientifique
plus ou moins circonscrit.

Les divers types de discours public, à intentions et structures très variées et différentes,
ont tous en commun le caractère du destinataire / interlocuteur, qui est public, collectif. Je fais
la distinction entre destinataire et interlocuteur dans le sens que le premier est censé pouvoir,
souhaiter, et dans certains cas, devoir réagir, tandis que le deuxième est censé pouvoir,
souhaiter, et devoir réagir sous forme discursive. La communication scientifique est
essentiellement discursive, c'est-à-dire elle se fait essentiellement par le biais du discours,
c'est une forme de communication verbale et verbalisante (elle exige l'appel à la parole, à la
langue, au discours).

Dans le cas du discours scientifique, le public est restreint à une communauté de spécialistes
qui ont en commun avec l'énonciateur un certain nombre de croyances et de savoirs. Les
instances de communication scientifique – accomplie à travers un “canal” de communication
scientifique

À la différence d'autres types de discours, on peut supposer que le propre de tout


discours scientifique serait que l’ensemble du savoir est partagé par le destinataire, c'est-à-
dire, ici, pris en charge comme vrai par au moins une partie du groupe auquel le discours

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s'adresse sous la forme des citations, références, bibliographies, etc qui jouent également le
rôle d'arguments.

Le discours scientifique ne représente (presque) jamais une prise de parole sans rapport
avec d'autres échanges., mais aussi chez l’énonciateur. Le discours scientifique, est préparé à
l'avance, il a donc une organisation rigoureuse, étudiée au point de vue de l'énonciation et de
la structuration linguistique. Pour chaque domaine, science ou discipline, on dispose d'un
inventaire de concept, de termes spécifiques auxquels on intègre ici principalement les
théorèmes, les lois, les définitions. Ces opérations discursives peuvent être représentées
comme des actes de langage complexes organisés méthodiquement.

Il ne faut pas oublier dans ce type de communication: qui parle, à qui, et dans quel
contexte précis? À l'opposé du discours ordinaire pratiqué dans la communication usuelle, le
discours scientifique est le «véhicule” de la communication scientifique, qui suppose une
explicitation des contenus véhiculés. Des points de vue normatif et descriptif à la fois, dans la
communication scientifique la part de l'implicite est réduite au minimum.

Le rôle que joue l'argumentation dans le discours scientifique n'est pas à négliger: “Quoi
que la science puisse être d'autre, elle est aussi argumentation concernant des problèmes situés
auxquels se confrontent des publics spécifiques qui doivent se prononcer sur la rationalité des
thèses qui portent sur cette problématique. Cette assertion propose en réalité plusieurs pistes
de réflexion auxquelles il faut s'intéresser dans la discussion sur l'argumentation scientifique:
la rationalité de la démarche, l'objet du discours scientifique – les problèmes scientifiques -, et
les acteurs qui participent à l'échange.

On considère que l'un des principes de base sur lequel repose l'argumentation
scientifique consiste à soutenir une thèse de manière rationnelle. C'est de cette manière qu'on
peut donner des réponses aux problèmes scientifiques. La rationalité de la démarche sera à la
mesure des moyens mis en œuvre pour l'éclairement de la problématique et pour la recherche
des solutions. Une argumentation scientifique se construit toujours afin d'appuyer et de
défendre une conclusion scientifique. Ainsi, le discours des sciences peut-il être vu comme la
meilleure illustration de ce que doit être un discours raisonné. Pour que l'argumentation soit
bien construite et donc efficace, ses bases doivent être représentées par arguments pertinents
selon qu’il s’agisse de convaincre ou de persuader ; soit les deux

2.1 Convaincre, persuader, délibérer

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Argumenter, c’est vouloir convaincre, persuader, ou délibérer.
Si argumenter consiste à soutenir ou à contester une opinion, cette tentative vise aussi dans le
même temps à agir sur le destinataire en cherchant à le convaincre ou à le persuader.
Argumenter, c’est donc justifier une opinion que l’on veut faire adopter, partager en tout ou
partie. On cherche alors à convaincre par l’usage de la raison et à persuader en faisant
appel aux sentiments et à l’affectivité.
Convaincre sera : amener quelqu’un à croire en une idée, un principe ou une opinion, et
persuader sera : amener quelqu’un à faire quelque chose.
Argumenter, c’est aussi tenir compte de thèses différentes des nôtres, c’est le cas de la
réfutation.

Convaincre
Pour convaincre, celui qui argumente fait appel à la raison, aux facultés d’analyse et de
raisonnement, à l’esprit critique du destinataire pour obtenir son accord après mûre réflexion.
Il formule une thèse2.
Il s’aide d’arguments, c’est-à-dire des éléments de preuve destinés à l’étayer ou à la réfuter.
Ces arguments sont eux-mêmes illustrés par des exemples variés : tirés de l’expérience
personnelle, des lectures, des divers domaines de la connaissance : sciences, histoire,
philosophie… Ce peut être des références à d’autres penseurs ou écrivains (citation).

Ces arguments sont présentés de manière ordonnée dans le cadre d’un raisonnement
(inductif, déductif, dialectique : thèse, antithèse, synthèse, causal , par analogie, par
l’exemple, par la qualité, par la quantité, par autorité …) et d’une progression argumentative
(le plus souvent selon la loi d’intérêt : du moins important au plus important4) où ils sont
souvent reliés entre eux par des connecteurs logiques : voir le TD, qui jouent le rôle
d’indicateurs. Les connecteurs les plus importants sont ceux qui soulignent la causalité. On
peut citer ensuite ceux qui ordonnent la présentation. On conseille à l’orateur ou à celui qui
présente un discours de les utiliser pour capter l’attention de son auditoire.
Il s’inscrit dans une stratégie argumentative : développer ou réfuter une thèse, concéder,
débattre. Le schéma argumentatif peut varier : le locuteur peut choisir de défendre sa propre
thèse et de passer sous silence celle de ses adversaires; il peut aussi commencer par réfuter la
thèse adverse ou, à l’inverse, il peut se montrer conciliant en acceptant quelques points
(mineurs) de la thèse adverse afin de mieux disposer le destinataire à accepter la
sienne ( réfutation partielle.. Tout dépend du rapport de forces réel ou supposé.

Délibérer
Délibérer, c’est examiner les différents aspects d’une question, en débattre, y réfléchir afin
de prendre une décision, de choisir une solution. C’est donc se confronter à ses propres
objections ou à celles d’autrui, avant de construire sa propre opinion. Cette nécessaire étape
de la réflexion personnelle permet de considérer l’avis d’autrui et de peser la vérité (ou

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l’accord au réel) de différentes positions avant de décider.
La délibération est également essentielle au débat public dans une démocratie. Au cours d’un
procès avant la sentence, les jurés sont amenés à délibérer.
L’essai, le dialogue ou l’apologue sont des genres littéraires particulièrement adaptés à
l’expression d’une délibération.

Persuader
Quand le discours argumentatif fait appel aux sentiments ou aux émotions du destinataire, il
cherche à persuader.
Il s’agit pour l’émetteur de jouer sur des valeurs et des repères culturels communs.
En effet une argumentation met en jeu, de manière explicite ou implicite, un système de
pensée. Ainsi la défense d’une thèse s’appuiera sur des principes universels ou du moins en
principe partagés par la majorité : la Vérité, le droit au bonheur, l’équité, la sincérité…, ou sur
les valeurs admises par un groupe social déterminé : l’honneur, le courage, la probité, le
travail, le patriotisme…

III. Les types d'arguments

Pour convaincre un interlocuteur que l'opinion qu'il exprime est bonne, c’est-à-dire que sa
thèse est juste, l’argumentateur développe une argumentation il présente des justifications, des
preuves. Il choisit un type d'argument.

Argument par la cause


Il s'appuie sur la ou les causes d'un phénomène. Parmi les causes possibles, l'argumentateur
sélectionne celles qui s'accordent avec sa thèse.
Thèse défendue :
TOINETTE — Voilà un bras que je me ferais couper tout à l'heure si j'étais de vous.
ARGAN — Et pourquoi ?
Deux arguments par la cause :
TOINETTE — Ne voyez-vous pas qu'il tire à soi toute la nourriture, et qu'il empêche ce
côté-là de profiter ?

Argument par la conséquence


Il s'appuie sur les effets d'un phénomène pour en montrer les avantages ou les inconvénients.
Il peut aussi partir d'une hypothèse et en envisager les conséquences pour en montrer
l'absurdité. L'auteur envisage un fait et ses conséquences :
Ce serait une grande absurdité de mettre tout à coup les hommes opulents dans la nécessité de
diminuer leur luxe ; ce serait fermer les canaux . Les richesses peuvent revenir du riche au
pauvre ; et vous réduiriez au désespoir une multitude innombrable de citoyens que le luxe fait
vivre.

Argument par la comparaison


Il établit un parallèle entre deux situations. Il montre leurs points communs pour qu'elles
soient considérées et traitées de la même façon.
mot de l'analogie :
Les agriculteurs en difficulté ont été indemnisés.
Mise en parallèle :
Il faut donc indemniser aussi les éleveurs qui ont des problèmes.

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Argument d'autorité
Il s'appuie sur le prestige ou la compétence de son auteur pour se faire admettre. On peut citer
les propos d'un grand écrivain, d'un expert, d'un scientifique. Ces citations et la mention du
nom imposent le respect.
Référence à une personnalité célèbre :
Le commandant Cousteau l'a dit, les océans et les mers sont en danger.

• L’argument d’autorité : on fait référence à une autorité politique, morale, scientifique


reconnue et experte. Par exemple : Fumer est dangereux pour la santé, c’est ce que
nous démontre le rapport sur la santé des Français rédigé par les professeurs…
• L’analogie qui consiste à comparer deux faits, deux situations pour en déduire une valeur
explicative, pour donner en exemple. "L’usage du tabac est voisin de celui des drogues
ou de l’alcool : il crée une dépendance physique et psychologique dont le patient aura
bien du mal à se débarrasser".
• Les rapports de cause à effet. Tel phénomène entraîne tel autre phénomène selon le
postulat du déterminisme. "Fumer entraîne des troubles gastriques, donne mauvaise
haleine et perturbe l’odorat comme le goût".

• Les avantages ou les inconvénients. Recherche des effets sur différents plans. "Arrêter de
fumer augmente l’espérance de vie, permet de réduire les dépenses de santé…"

• Utilisation de données scientifiques, historiques, numériques. En principe elles sont


irréfutables. "L’usage du tabac est la première cause des cancers du poumon et de la
gorge".
• Par analyse et élimination des autres solutions. Valable pour une argumentation longue
ou la réponse à de prévisibles objections. "Recourir à des cigarettes sans tabac
n’élimine pas les risques représentés par les goudrons, la toxicité des produits résultant
de la combustion…"
• L’alternative : blanc ou noir, la bourse ou la vie, la valise ou le cercueil. "Les femmes
doivent choisir : soit l’arrêt du tabac, soit des risques accrus de cancer, un
vieillissement des tissus accéléré, une peau terne, un affaiblissement marqué de leur
pouvoir de séduction"…

La déduction.
Cette montre est suisse, or les montres suisses sont de bonne qualité, donc cette montre est de
bonne qualité.
Des deux prémisses (arguments) on déduit une conclusion, le raisonnement part du général
pour traiter un cas particulier. Le syllogisme se compose de trois propositions : deux
prémisses et une conséquence ou conclusion. L'une des prémisses s'appelle la majeure parce
qu'elle renferme l'idée générale; l'autre porte le nom de mineure parce qu'elle énonce la

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proposition particulière. (structure logique)
Développement : établir le syllogisme selon les règles.
Réfutation : lorsque le syllogisme est exprimé de façon abrégée, (Ce comprimé effervescent
agit efficacement tout de suite.) formuler la proposition présupposée; ensuite dénoncer l'erreur
de raisonnement.

Le raisonnement dialectique
La peine de mort détruit la personne du criminel.
La peine de mort exalte le criminel jusqu'à en faire un héros.
Supprimer la peine de mort permet d'humaniser le criminel sans l'idéaliser.
Comme dans la déduction, le raisonnement dialectique part de deux propositions contraires,
voire contradictoires (Thèse / Antithèse). Mais alors que la déduction ne fait qu'exprimer ce
qui est impliqué dans les prémisses, la conclusion du raisonnement dialectique apporte
quelque chose de neuf; elle manifeste une pensée en mouvement. Le raisonnement
dialectique, en effet, produit des idées nouvelles à partir de propositions de départ qui
s'opposent (Synthèse). (structure logique)

L'induction
Raisonnement qui part du particulier pour arriver à une loi générale. La généralisation peut
conduire à une vérification, une illustration grâce aux exemples. (Attention aux
généralisations hâtives). Dans l'induction par généralisation, on part de faits particuliers pour
arriver à une affirmation générale, une hypothèse synthétisante. (structure logique)

Développement : on propose l'affirmation générale et on l'illustre par des faits, des cas
concrets.
Réfutation : invoquer des contre-exemples qui infirment la généralisation, montrer qu'elle
n'est qu'un cas particulier.

III.La réfutation

Citer d'autres faits qui conduisent à une conclusion inverse; montrer que la généralisation n'est
pas valide.
Dans l'induction par illustration, le raisonnement est identique mais l'ordre du discours est
inversé. EXP :

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Les jeunes ne respectent pas les personnes âgées, j'ai encore vu ce matin dans le métro une
vieille dame rester debout alors qu'un étudiant, assis, continuait à lire.
La réfutation consiste à examiner chacun des arguments avancés par une thèse pour en
contester le bien-fondé.
Au terme de cette réfutation, l'auteur propose une thèse nouvelle qui formule son propre point
de vue sur la question.
Il existe deux types de réfutation : totale et partielle : voir le TD

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