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Cours de logique et argumentation juridique

Master 2/ Droit judiciaire

Par Pr. Dr Gacuko Léonard

AA: 2022- 2023


« Ce n’est rien de convaincre si on ne sait persuader »

J.J ROUSSEAU
Plan du cours

Le cours est organisé autour des chapitres suivants:


I. Notions théoriques fondamentales de logique et de théorie de
l'argumentation

II. Caractéristiques de l'argumentation

III. Typologie des arguments


IV. Les grandes familles de théories de l’argumentation

V. La réfutation

VI. Raisonnements spécifiques à l'argumentation judiciaire: le raisonnement


probatoire du magistrat
.

VIII. Dialectique et rhétorique: schèmes d'inférence fréquents


.

et sur leurs usages légitimes ou sophistiques

IX. Péroraison
Introduction

Dans les relations interhumaines, le dialogue occupe un rôle


central;

 Les gens discutent, débattent sur des questions


d’intérêt varié, discourent, ils « palabrent »

 A moins que ça ne soit une plaisanterie, les personnes cherchent


toujours à convaincre, à persuader;
Or, pour convaincre, il faut argumenter;

Mais, qu’est-ce que c’est « argumenter »?

« Argumenter, c’est chercher de bonne foi ce qui est vrai et


convaincre de ce qui est préférable par la réflexion, le
dialogue ou la confrontation des idées avec autrui »;
L’argumentation est l’ensemble des raisonnements par lesquels on déduit les
conséquences logiques d'un principe, d'une cause ou d'un fait, en vue de
prouver le bien-fondé d'une affirmation, et de convaincre;

L’argumentation est donc une technique orale de convaincre et ce


suivant un schéma logique;
Logique et argumentation pour les étudiants en droit et pour quel but?

Leur filière les prédispose à aux fonctions/ remplir des missions de


magistrat, avocat, chercheur, enseignant pour certains, conseiller
juridiques, consultant,…

Ces fonctions ou ces missions exigent que ceux qui les exercent soient
convaincants par une argumentation logique;
Contrairement à la persuasion, elle vise à être comprise de tous et ne
résiste pas à l'utilisation d'arguments fallacieux;

Dès lors, s’opposent deux notions que on a coutume de confondre:


conviction et persuasion

La conviction relèverait du pur raisonnement, reposerait sur des facultés


intellectuelles et serait tournée vers l’établissement de la vérité; il est du
domaine du logos
La persuasion relèverait des sentiments, de l’affect, reposerait sur des
mouvements émotionnels et serait tournée vers l’auditoire.
Entre en jeu dans la persuasion non seulement le pathos mais aussi l’ethos

Les arguments fondés sur le pathos ont pour but unique d'émouvoir ou de
susciter la pitié
Selon le philosophe Socrate, l’ethos est originairement liée à l’image persuasive,
vertueuse, que l’orateur doit construire dans son discours pour emporter
l’adhésion de ses auditeurs;

Pour le philosophe, cette image est une production du discours: Il ne s’agit donc
pas tant de l’image dont jouit le locuteur en dehors du discours, de sa
réputation mais bel et bien de ce qu’il dit de lui dans le discours;
Dans la rhétorique classique, le concept d’ethos était attaché à la personne de
l’orateur:
L’idée était qu’on accorde d’autant plus de crédibilité au discours que la personne
jouit d’une grande renommée ; et si cette renommée était fondée sur des vertus,
celles-ci étaient inévitablement transférées dans le discours;
Dans la rhétorique classique, le concept d’ethos était attaché à la personne de
l’orateur:
L’idée était qu’on accorde d’autant plus de crédibilité au discours que la
personne jouit d’une grande renommée ; et si cette renommée était fondée sur
des vertus, celles-ci étaient inévitablement transférées dans le discours;
De nos jours, la majorité d’auteurs considère que l’éthos concerne
l’image de celui qui parle et qui est également susceptible de toucher
l’auditoire;
L’argument fondé sur le logos lui s’appuie sur le raisonnement logique : les
arguments employés pour convaincre l’autre relèvent de la raison;

Nombre de discours surtout ceux de la sphère de la communication politique,


ne relèvent pas uniquement d’une argumentation logique, mais davantage d’une
mise en scène persuasive dans laquelle ethos et pathos sont prédominants,
laissant au logos la portion congrue;
L’objectif du discours est de « faire croire » quelque chose à l’autre de sorte
que celui-ci soit en position de « devoir croire »;

Les sujets parlants ont pour but d’inciter l’autre à faire, à dire ou à penser, sont
davantage préoccupés par l’impact de leur discours que par la rigueur de leur
raisonnement;
On trouve cet enjeu dans toutes les situations de communication
propagandistes où la stratégies discursives tend à rendre le sujet parlant
crédible, et à capter l’auditoire;
Il s’ensuit que le but de l’argumentation pure est donc à la fois de:
 Convaincre du bien fondé;
Le cas échéant, de provoquer tel ou tel type d’action;
I. Introduction aux notions théoriques fondamentales de
logique et de théorie de l'argumentation

Le cours de logique et de l'argumentation juridique est un cours nouveaux pour la


plupart d’étudiants;

Il est nécessaire donc qu’avant d’entrer dans le vif de la matière le clarifie certaines
notions – clés d’usage courant cette matière;
A. Notions – clés d’usage courant en logique

Notion d’auditoire et d'auditoire universel

 La notion d’auditoire est centrale en argumentation et surtout en rhétorique.


En effet, un discours ne peut être efficace que s’il est adapté à un auditoire qu’il
s’agit de persuader ou de convaincre;

 L'ensemble de ceux sur lesquels l'orateur veut influer par son argumentation
 L'auditoire est donc composé de tous ceux que vise l'argumentation
La définition de l’auditoire laisse apparaître qu’il existe plusieurs types d’
auditoires;

• Les auditoires peuvent varier de mille autres manières, selon l'âge, le sexe, le
tempérament, la compétence, et toute espèce de critères sociaux et politiques. Ils
peuvent surtout varier selon les fonctions exercées, et plus particulièrement selon
que le rôle des auditeurs est d'aboutir à une décision de quelque nature qu'elle soit,
ou simplement de se former une opinion, d'acquérir une disposition à une action
éventuelle et indéterminée » .
« Les cadres sociaux de l'argumentation », in C. Perelman, Le champs de
l’argumentation, Bruxelles, Presses universitaires, 1970, p. 25.
Sur le plan quantitatif, on distingue principalement:

• L’orateur lui-même;
• L’auditoire d’un auditeur unique;
• L’auditoire universelle
L’orateur lui-même

L’orateur argumente avec lui-même dans une délibération intime;


 L’individu se conçoit comme divisé au moins en deux interlocuteurs argumentant
en sens opposé;
Exemple: cas de certains justiciables du palais de justice qui, dans leur monologue,
simulent le déroulement du procès
 Pour certains auteurs, la délibération avec soi-même constitue le modèle du
raisonnement sincère et honnête;
 Mais la psychanalyse a montré que l'on peut se tromper soi-même:
la délibération avec soi-même ne peut donc faire fi de tous les procédés
visant à gagner autrui notamment l’objectivité des arguments;
L’auditoire d’un auditeur unique: le dialogue

Le dialogue, est une argumentation devant un seul auditeur;


 Dans l’auditoire d’un auditeur unique, la technique d'argumentation n'est pas
la même que devant un grand auditoire;
 Il faut connaître les opinions et les valeurs auxquelles adhère l'interlocuteur
et il faut, à chaque pas, obtenir son accord;
 L'orateur devant tenir compte des réactions de son auditeur, celui-ci acquiert
ainsi l'occasion de participer activement au débat;
Évidemment cette technique présente un danger:
 Elle peut donner l'illusion que l'on nage dans la vérité parce que chaque
chaînon de l'argumentation a été admis;
 De fait, accord et vérité sont des notions distinctes, qu'il ne faut pas
confondre.
L’auditoire universelle

Se compose de l'ensemble de ceux qui sont considérés comme des hommes


raisonnables (capables de raison)et compétents dans la matière qui fait
l’objet de l’argumentation;
L’auditoire universelle se caractérise par les traits suivants:

1. Le premier trait qui définit l'auditoire universel le met en rapport avec la


notion de raison mais la formulation varie selon les auteurs:
Selon la formulation la plus fréquente, l'auditoire universel se compose de tous
les êtres humains raisonnables, ou encore les hommes adultes et normaux;
D’autres considèrent que l'auditoire universel serait constitué par tous les êtres
raisonnables et compétents ou par tous les hommes normaux et compétents;
Dans l’un ou l’autre cas, il est question d'hommes raisonnables;

2. Le second caractère de l'auditoire universel est lié à son statut ontologique:


L’auditoire n'est jamais donné effectivement, il ne s'agit pas d'une réalité sociale
concrète, mais d'une construction mentale de l'orateur lui-même;

Mais par quel mécanisme?


Pour Charles PERELMAN, l'auditoire universel a un fondement réel et non
arbitraire:
 L'orateur part de son expérience, de ce qu'il sait lui-même et de ce qu'il pense
que les autres savent et admettent, et il s'efforce de transcender les
divergences d'opinions et les oppositions dont il a conscience;
 C'est à partir de cette expérience qu’il se fait une idée de ce que tous les êtres
raisonnables devraient admettre;
3. Le troisième trait de l'auditoire universel est étroitement lié à cette
préoccupation de s'assurer effectivement de l'accord de l'auditoire universel:
 Si, en tentant de vérifier son hypothèse, l'orateur devait découvrir que les
thèses qu'il croyait acceptables par tous ne le sont pas en fait,

 il peut, selon le contexte:


Reconnaître qu'il s'est trompé et modifier sa conception de l'auditoire universel;
 Maintenir sa conception de l'auditoire universel et, de celui-ci, exclure le
récalcitrant en prouvant qu'il est incompétent;
Si l'orateur accroît ses exigences, il pourra même modifier la nature de son
auditoire et le qualifier d’auditoire d’élite
L’auditoire universel se compose de tous les êtres humains raisonnables (ou de
tous les êtres humains raisonnables et compétents), et, comme il incarne la raison,
on ne doit utiliser, en s'adressant à lui, que des arguments raisonnables, c'est-à-dire
universalisables.
Les autres types d'auditoire

L’auditoire d'élite
Il s’agit d’un auditoire doué de moyens de connaissance exceptionnels

L’auditoire spécialisé

Il s’agit d’une forme d’ une variante d'auditoire universel.


Dans le cas de l'auditoire spécialisé, l'orateur connaît les prémisses qu'admettent
ses auditeurs;
« Certains auditoires spécialisés sont volontiers assimilés à l'auditoire universel, tel
l'auditoire du savant s'adressant à ses pairs. Le savant s'adresse à certains hommes
particulièrement compétents et qui admettent les données d'un système bien défini,
constitué par la science dans laquelle ils sont spécialisés. Pourtant, cet auditoire si limité est
généralement considéré par le savant non comme un auditoire particulier, mais comme
étant vraiment l'auditoire universel : il suppose que tous les hommes, avec le même
entraînement, la même compétence et la même information, adopteraient les mêmes
conclusions »
Exemple: Le discours juridique
Dans la mesure où il est fondé des textes bien déterminés en vigueur dans un
Etat donné, le droit positif constitue un domaine d'argumentation spécifique ,et
par conséquent, il relève d'un auditoire spécialisé.
L’auditoire composite

L’auditoire composite réunit « des personnes différenciées par leur caractère,


leurs attaches ou leurs fonctions »;
Dans ce cas, l’argumentateur, en s’adaptant à son auditoire, doit utiliser des
arguments multiples afin de convaincre les diverses composantes du public;
Ce dont l’orateur doit tenir compte dans les connaissances de son auditoire composite ,
c’est qu’il y a des affects, des valeurs sociales, familiales, un parcours culturel, éducatif,
personnel, mais aussi une langue, avec son interprétation d’une sémantique objective,
formant à la fois un lien d’entente et un motif de désaccord, susceptible de relancer la
discussion.
Enthymème

Il s’agit d’un syllogisme dialectique dans lequel on énonce pas toutes les
prémisses car on sous-entend celles qui sont connues ou acceptées par
l’auditoire ( Ch. PERELMAN, 1979, p. 2);

L’enthymème est une forme invalide et tronquée du syllogisme,


comprenant par exemple une seule prémisse : « Socrate est un homme,
donc il est mortel ». Le syllogisme aurait mentionné, en outre « Tous les animaux
sont mortels »;
Epichérème

L’ épichérème est un syllogisme dans lequel une ou plusieurs prémisses sont


renforcées par une explication, une preuve ou une définition;

Il s’agit d’un syllogisme « augmenté »:

La majeure et la mineure sont accompagnées de leurs preuves

Il s’ensuit que l’épichérème peut être composée de cinq ou quatre parties:


 Majeur + preuve, mineur + preuve, conclusion
Majeure + preuve, mineure, conclusion
Exemple:
Il est permis de se défendre contre quiconque attente à notre vie : la loi naturelle et le
droit positif l’admettent.. Or, X a tenté de tuer Y : le gourdin dont il s’est servi le
démontre. Donc il est permis à Y de se défendre contre X».
Logique

La logique, au sens large du terme, est l'étude du raisonnement en général, des


moyens de preuve, quels qu'ils soient;
La logique se décline en deux types de logique:
 La logique formelle;
La logique informelle;
La logique formelle est la logique de la démonstration;
 La démonstration est correcte ou incorrecte; elle est contraignante dans le
premier cas et sans valeur dans le second;

La logique informelle est celle de l'argumentation.

 Les arguments sont plus ou moins forts, plus ou moins pertinents, plus ou moins
convaincants;
 Il ne s'agit pas de montrer, comme dans la démonstration, qu'une qualité
objective, telle la vérité, passe des prémisses vers la conclusion, mais que l'on
peut faire admettre le caractère raisonnable, acceptable d'une décision, à partir
de ce que l'auditoire admet déjà, à partir de thèses auxquelles il adhère avec une
intensité suffisante;
Les marqueurs d’argumentation

Les marqueurs d’argumentation servent à passer d’une idée à une autre,


indiquer les rapports qui existent entre les idées et les éléments du texte ou
d’une manière générale, indiquer la progression du texte;

Deux sortes marqueurs d’argumentation:

Les marqueurs anti-orientés;

Les marqueurs co-orientés


.

Les marqueurs anti-orientés et co-orientés peuvent être plus forts ou plus faibles

Marqueurs argumentatifs

Plus faible Plus fort


Co-orienté d’ailleurs, au moins, du moins, à voire, même
tout le moins, ne fût- ce que
Anti-orientés quoique, malgré, même si, bien mais, sauf, créer ou ne pas
que créer un précédent
Inférence

Opération qui consiste à admettre une proposition en raison de son lien avec
une ou des propositions préalables tenue pour vraie;

Une inférence est constituée d’une ou de plusieurs prémisses et d’une


conclusion;

On dit que la conclusion est inférée (ou déduite, ou tirée) des prémisses.
Les principes d’inférence sont les règles qui permettent de déduire, de la valeur
de vérité d’un énoncé, la valeur de vérité d’autres énoncés;
Les deux principes principaux d’inférence sont : modus ponens et modus
tollens
Le modus ponens càd une règle de la logique qui veut que si une proposition p
implique une proposition q, alors si p est vraie, q est vraie,
Si p alors q ; or p, donc q
Exemple:
S’il a compris le cours, il a réussi ; or il a compris, donc il a réussi.
Si c’est un chien, c’est un animal ; or c’est un chien, donc c’est un animal;

NB : on ne peut pas déduire que si c’est un animal, c’est nécessairement un chien


Le modus tollens : règle logique qui affirme que si une proposition p
implique une proposition q, alors si p est fausse, q est fausse;
Si p alors q; or non-q, donc non-p
Exemple

S’il a compris le cours, il a réussi ; or il n’a pas a réussi, donc il n’a pas
compris;
Si c’est un chien, c’est un animal ; or ce n’est pas un animal, donc ce n’est pas un
chien;

NB : on ne peut pas déduire que si ce n’est pas un chien, il soit impossible que ce
soit un animal.
Syllogisme:

Le syllogisme est « un discours dans lequel, certaines choses étant posées,


quelque chose d'autre que ces données en découle nécessairement par le seul
fait de ces données »;
Un syllogisme comporte donc un point de départ, les prémisses et une
conclusion;

Le syllogisme obéit aux règles générales suivantes:

 Le syllogisme ne peut comporter que trois termes différents;

 Le moyen terme ne peut se trouver dans la conclusion;


Un terme non distribué dans une prémisse ne peut l'être dans la conclusion,
(car celle-ci affirmerait davantage que ne l'auraient fait les prémisses);

De deux prémisses affirmatives on ne peut tirer de conclusion négative;

De deux propositions négatives ne suit aucune conclusion valide;


Si une prémisse est négative, la conclusion l'est également et si une prémisse
est particulière, la conclusion l'est elle aussi;
 De deux propositions particulières on ne peut tirer aucune conclusion valide;

De toutes ces règles, deux paraissent plus pratiques:


.

Si les deux prémisses sont vraies, la conclusion est vraie;


Majeure: la violation d’une limite de vitesse est une faute = Droit
Mineure: X n’a pas respecté la limitation de vitesse= faits
Conclusion: X n’a pas respecté la limitation de la vitesse

Si l'une des prémisses est fausse, la conclusion peut être vraie ou fausse;

Majeure: les père et mère sont civilement responsables des fautes commises par leurs enfants mineurs= Droit
Mineure: X est un enfant mineur qui a commis une faute = faits
Conclusion: ses père et mère sont civilement responsables = fausse conclusion
Polysyllogisme

Un « polysyllogisme dans lequel l'attribut de la première proposition


devient le sujet d'une seconde proposition et ainsi de suite jusqu'à une
conclusion qui unit le sujet de la première proposition à l'attribut de la
dernière »;

Raisonnement composé de plusieurs syllogismes liés entre eux de manière que la


conclusion du premier devienne l’antécédent du second.

Une série de syllogismes enchaînés de telle manière que la conclusion de l'un


serve de prémisse au suivant
Polysyllogisme…

Exemple
L’effort intellectuel est une condition du progrès
Or, beaucoup d’étudiants ne font aucun effort intellectuel
Donc beaucoup d’étudiants ne progressent pas dans leurs études
Or ceux qui ne progressent pas dans leurs études risquent de manquer leur avenir
Donc beaucoup d’étudiants risquent de manquer leur avenir
La sorite

Syllogisme composé de plusieurs propositions tellement liées entre elles que


l’attribut de la précédente devient le sujet de la suivante, pour arriver à une
conclusion, le sujet est celui est celui de la première proposition et l’attribut de la
dernière (A. Robert, Leçon de logique, Laval, Fondation littéraire Fleur de lys, 2009,
p. 102.

Il s’agit d’un polysyllogisme


Le sophisme

Un sophisme est un raisonnement fallacieux, malgré une apparence de


vérité, qui est délibérément conçu pour tromper ou faire illusion;
Erreur de raisonnement , raisonnement défectueux en apparence logique mais
qui induit intentionnellement une fausse conclusion
Il peut cependant être utilisé intentionnellement pour montrer les limites des
règles logiques ou les difficultés à les manier en créant un illogisme ou une
antinomie;
En d’autres mots, le sophisme est un piège mental, une façon peu honorable de
convaincre

Exemples: Le chien est mortel, or Paul est mortel, donc Paul est un chien.
L’homme est rationnel, or aucune femme n’est un homme, Donc, aucune femme
n’est rationnelle.
Le sophisme a lieu quand:
Les prémisses ne supportent pas la conclusion;
Il manque des éléments qui si présents, ils changeraient la conclusion;
L’argument tire sa conclusion sur un nombre insuffisants de
prémisses.
• Le sophisme se distingue du paralogisme qui est une erreur involontaire dans un
raisonnement sans intention d'induire en erreur;
• Un raisonnement défectueux malgré une apparence logique;

• Le sophisme n’est pas non plus à confondre avec pétition de principe qui
est une faute de raisonnement appelée est une faute d'argumentation, car
elle suppose admise une thèse contestée;
Vérifonctionnalité

On appelle vérifonctionnalité le principe selon lequel la valeur de vérité d'un


énoncé complexe ne dépend que des valeurs de vérité de ses composantes;

 En conséquence, si, dans un énoncé complexe donné, on remplace un des


énoncés constituants par un énoncé de même valeur de vérité, alors le
nouvel énoncé complexe a la même valeur de vérité que l’énoncé complexe
initial;
 En logique, la théorie de la vérifonctionnalité renvoie à une table de vérité;
Et qui dit table de vérité dit « connecteurs propositionnels;

En logique propositionnelle, ces connecteurs sont:

∧: la conjonction; →: le conditionnel;
∨: la disjonction;
¬: la négation; ↔: le biconditionnel;
La conjonction ∧

Exemple: Je pleure et tu chantes


p= Je pleure q= tu chantes

p q p∧q

V V V
V F F
F V F
F F F

La conjonction est un connecteur binaire (alternatif)


La négation, ¬

Exemple: «je ne pleure pas »


P= je pleure
p ¬p
V F
F V
La disjonction, ∨

Exemple: Il réussit ou il échoue

p : Il réussit
q : il échoue

p q p∨q
V V F
V F V
F V V
F F F
L’interprétation de ∨ en fait une disjonction inclusive
Disjonction ∨ peut être inclusive mais elle peut exclusive

C’est ainsi que l’usage de « ou bien..., ou bien... » correspond à une disjonction


exclusive:

Dans ce contexte, “ou bien p, ou bien q ” est vrai ssi exactement l’une des
deux propositions p, q est vraie
L’opérateur OU Exclusif combine deux propositions formant leur “OU
exclusif” logique:
Exemple: Il réussit ou il échoue
p = « Il réussit »
q = il échoue
p q = Il réussit ou il échoue (mais pas les deux)
Disjonction « ou inclusif » pour des propositions p q signifie que p est VRAI,
ou q est vrai, ou les deux sont vraies. Elle induit la possibilité que p et q soient
VRAIES.
p q p∨q

V V V
V F V
F V V
F F F
Le conditionnel, ⇒ (si … alors) (implication)

Exemple: Si Je pleure alors tu chantes


P = je pleure
q : tu chantes
p q P⇒q
V V V
V F F
F V F
F F V
opérateur/ connecteur biconditionnel ⇔

Ex:
p=NEVER gagne les élections en 2020, q = NEVER sera président jusqu’en 2027

p⇔q = NEVER gagne les élections en 2020 ⇔ NEVER sera président


jusqu’en 2027
Table de vérité de la proposition biconditionnelle p q signifie que p et q ont la
même valeur de vérité
Table de vérité de p⇔q
p q p⇔q
V V V
V F F
F V F
F F V

p ⇔ q est vraie si et seulement si p et q ont la même valeur de vérité,V ou F


Synthèse

Etant données deux propositions p et q,


 p ∧ q est vraie si et seulement si p est vraie et q est vraie; C’est donc la
définition du sens que nous donnerons au connecteur « et »;
p ∨ q est vraie si et seulement si l’une des deux propositions, p ou q, est vraie;
 ¬ p est vraie quand p est fausse et qui est fausse quand p est vraie;
p ⇒ q est cette proposition qui n’est fausse que lorsque p est vraie alors que q
est fausse;
p ⇔ q est cette proposition qui est vraie si et seulement si p et q ont la même
valeur de vérité;
.

p q p ∧ q p ∨ q p⇒ q p ⇔q p ¬p
V V V F v V V F
V F F V F F F V
F V F V F F
F F F F V V
Table de vérité

Exemple;
Une proposition composée comme ((p ⇒ (q ∨ r)) ∧ (¬ (p ∨ r)));
Son sens est donné par les valeurs de vérité qu’elle prend en fonction des
diverses situations possibles c -à –d, toute manière de donner une valeur V ou F à
chaque proposition/ phrase (ici, p, q, r);
Si l’expression contient une seule phrase p, il y aura seulement deux situations
possibles:
p = V et p = F;
Si elle en contient 2, il y aura 4 situations possibles;
Si elle en contient 3, 8 situations possibles;
Si elle en contient n, 2n situations possibles;
On appelle table de vérité de la proposition la table qui associe à chaque
situation possible la valeur de vérité de la proposition quand cette situation
est réalisée.
p q r q∨r (p ⇒ (q ∨ r) p∨r ¬ (p ∨ r) ((p ⇒ (q ∨ r)) ∧ (¬ (p ∨ r)))
V V V V V V F F
V V F V V V F F
V F V F V V F F
V F F F F V F F
F V V V V V F F
F V F F V F V V
F F V F V V F F
F F F F V F V V
Tautologie et antilogie(contradiction)

Une proposition (phrase) est une tautologie si et seulement si sa table de


vérité ne contient que des « V ».

p ¬p p v ¬p

V F V
Ex. p v ¬p
F V V
 Une proposition (phrase) est une antilogie /contradiction si et
seulement si sa table de vérité ne contient que des « F ».
Ex. p ∧ ¬p
p ¬p p∧¬p
V F F
F V F
B. Notions fondamentales en logique

Il s’agit de jeter quelques lumières sur le sens des concepts :

 échelle argumentative;  raisonnements indéfaisables


 théorie bidimensionnelle
 marqueurs argumentatifs;
 raisonnements défaisables;
Echelle argumentative

Une argumentation consiste à présenter un certain nombre d’arguments en


faveur d’une conclusion;

Les énoncés argumentatifs ( arguments en faveur de conclusions) sont hiérarchisables


sur des échelles argumentatives;

Une échelle argumentative hiérarchise des arguments en faveur d’une même conclusion
(formant une classe argumentative);
M= moyens de preuve
• .

d’un acte juridique


Si l’on vise la conclusion M, P est un
P= Preuve parfaite ( littérale argument plus fort que p, ce qui signifie
par ex. acte authentique) que l’on pourrait admettre P comme
étant un argument en faveur de M, sans
p=preuve imparfaite nécessairement admettre p.
(testimoniale, présomptions,
aveu, serment
Marqueurs argumentatifs

Un marqueur est un mot ou une locution qui relie une partie du discours avec
une autre ou une partie du discours avec le contexte dans lequel ce discours a
été produit;

Deux paramètres permettent de classer ces marqueurs argumentatifs:

 La direction argumentative;

 La force argumentative.
La direction argumentative indique si l’argument poursuit la ligne précédemment
entamée ou bien s’il est dirigé en sens inverse;

La force peut être moindre, indifférente ou plus grande.


Si la loi budgétaire oblige tout propriétaire véhicules de payer une redevance, on a
affaire à deux situations:
Toute personne résident au Burundi et possédant un véhicule est tenue de payer
la redevance,
Les diplomates résident certes au Burundi et possèdent des véhicule mais ne
sont pas visés par la loi.
Le marqueur mais lie deux arguments de sens contraires. En outre, ces deux
exemples illustrent bien le fait que le mais introduit un argument qui l’emporte
sur l’argument qui précède;
Mais sera donc décrit ici en termes d’échelles argumentatives comme le
marqueur qui anti-orienté (au sens où il introduit un argument inversement
orienté) et qui introduit un argument plus fort que le précédent;
Raisonnements ou arguments défaisables

Les arguments sont dits défaisables lorsqu'on peut toujours les démonter, les
réfuter, auxquels ou lorsqu'on peut leur opposer un argument contraire;

Raisonnements ou arguments indéfaisables

Des arguments sont dits indéfaisables lorqu’ils ne se voient pas (facilement)


opposer d’arguments contraires, (que l’on ne peut invalider ou réfuter facilement)
non pas uniquement parce que l’argumentation est bonne, mais parce que,
structurellement, ils déploient des raisons logiques indéfaisables;
Exemples:

principe d’identité: Le principe d'identité affirme qu'une chose, considérée


sous un même rapport, est identique à elle-même A=A
principe de contradiction: Pierre ne pas être la fois coupable et innocent des
mêmes faits p et non p est toujours faux

principe du tiers exclu


En logique formelle, le principe du tiers exclu énonce qu'ou bien une
proposition est vraie, ou bien sa négation est vraie;

Le tiers-exclu souvent comparé au principe de non-contradiction qui affirme


que les propositions p et non-p ne peuvent être simultanément vraies;

La conjonction « p et non-p » est nécessairement fausse

Paul a réussi ou a échoué


Théorie bidimensionnelle

La théorie bidimensionnelle en argumentation veut qu’il y a deux types


d’arguments :
Défaisables;
Indéfaisables;
Réductionnisme logique

Le réductionnisme logique signifie que tous les arguments doivent être valides;
Dans un second temps, il peut déduire que les arguments, s’ils sont valides, sont
indéfaisables;

Cependant, la notion de validité ne doit en aucun cas être confondue avec


celle de vérité:
Un énoncé est vrai ou faux, mais un raisonnement, une argumentation, une
inférence, sont dits valides ou invalides;
La vérité porte sur la matière des énoncés, alors que la validité porte sur la
forme des énoncés.

Exemples
Les hommes sont mortels : énoncé vrai
 Les chiens sont des animaux : énoncé vrai
Les chiens sont des animaux, donc les hommes sont mortels :
argumentation invalide composée d’énoncés pourtant vrais

Les humains sont des animaux, donc mortels : argumentation valide


composée d’énoncés vrais
II. Notion et caractéristiques de l'argumentation

Notion d’argument

Les arguments sont les raisons fondamentales qui sont avancées pour justifier
sa thèse et convaincre le lecteur ou l’auditeur;

Un énoncé qui appuie ou étaie un autre énoncé qui, lui, a valeur soit de
conclusion, soit de thèse;

Par l’argumentation, l'argumentateur tend à montrer que sa position


personnelle adoptée par rapport à un sujet donné est valide;
En droit, l'argument est la proposition que les parties à un procès font valoir à
l'appui de la thèse qu'elles défendent et qui doit faire triompher leurs
prétentions;
L'ensemble des arguments constitue l'argumentation;
Très souvent les praticiens utilisent "argument" comme synonyme de « moyen »;
Dans la rigueur des principes, l'"argument" est une déclaration qui vient au
soutien d'un moyen;
L'argument s'énonce par l’expression "parce que... " ou par toute autre
expression qui fait état d’une raison de droit ou de fait susceptible d'étayer le
moyen;
Quant au moyen, c’est le motif de droit ou de fait dont le bien fondé justifie la
réponse du juge;
L’argumentation diffère de la démonstration :
Là où on peut démontrer, il est inutile d’argumenter:
On n’argumente pas ni pour, ni contre l’évidence;
Le domaine de l’argumentation est celui du vraisemblable, du
plausible, du probable, du plaidable;
Dans la démonstration, le raisonnement est rationnel et univoque;
« toutes les fois que deux hommes portent sur la même chose un jugement contraire, il
est certain que l’un des deux se trompe »;
La démonstration est le fruit du raisonnement et de la logique prise au sens de
la logique formelle qui se fonde sur des axiomes;

Le recours à la démonstration ne se justifierait donc pas en dehors des


domaines scientifiques;
Toutefois, par souci d’efficacité, l’argumentation juridique peut s’inspirer des
mécanismes de la démonstration pour tenter de mieux convaincre le juge ou
tout autre destinataire:
L’important, dans le cadre du procès est de construire une argumentation qui
emportera la conviction du juge; d’autant plus que le droit est un art de
l’argumentation, de convaicre
Devant les juges en effet, il faut convaincre du bien-fondé de sa cause:
l’argumentation est nécessaire à la légitimation d’un droit;
Exemple: cas de la qualification juridique des faits
La qualification est une opération essentielle du droit qui consiste à faire entrer
un fait ou un ensemble de faits dans une catégorie juridique afin de déclencher
l’application du régime correspondant;
L’inclusion d’une situation dans une qualification juridique donnée va permettre
de justifier qu’un certain régime juridique soit appliqué;
La qualification doit, pour être légitime, demeurer plausible;
Caractéristique de l’argumentation

Par principe, il n'y a pas d'arguments forts ou faibles, discursivement parlant, il n'y a
que des bons ou des mauvais arguments selon qu'ils étayent une (ou des)
conclusion en vertu de présupposés admis par le destinataire;
Sinon on ne pourrait expliquer comment un texte plein d'arguments fallacieux et
d'arguments émotifs (considérés comme faibles) convainquent alors que d'autres
construits sur des « arguments rationnels » (prétendument forts) n'y arrivent pas ?
Mise à part cette observation préliminaire, l’argumentation juridique doit être
marqué par:
La clarté (les arguments sont formulés dans un vocabulaire précis et non
équivoque);
 La rationalité (ils ne contiennent pas de propositions émotives ou de croyances);
La cohérence (les propositions sont unies par des liens logiques valides);
La pertinence (la signification des arguments est liée à la thèse à défendre);
 La suffisance (ils donnent à l’argumentation assez d’ampleur pour convaincre et
tiennent compte de la complexité de la problématique);
La logique (qui fait appel à la raison de l'interlocuteur) ;
Elle doit enfin être pragmatique;
La force de l’argumentation

La force d’un argument est, tout simplement, son aptitude à persuader;

Les facteurs qui commandent la force et l’amplitude de l’argumentation sont


divers et nombreux:
La qualité intrinsèque et des modalités de leur énonciation: il ne suffit pas d’être
sûr de ce que l’on veut dire, il faut le dire au bon moment et de façon
appropriée;
 Un argument tire d’abord sa force de sa validité;
Validité n’est pas vérité:
 L’étude de la validité concerne uniquement la forme de l’argument,
c’est-à-dire sa structure logique:

 Un argument peut être valide ou invalide peu importe la valeur de vérité des
prémisses et de la conclusion;
Une exception : un argument dont les prémisses sont vraies et la conclusion est
fausse est nécessairement invalide;
Dans les autres situations, l’argument peut être valide ou non.

• L'argument d'expérience (« l'expérience montre que… ») ;


• L'argument d'autorité qui s'appuie sur une personne célèbre ou reconnue (ex. : « Aristote dit que… », « le
journal Le Monde écrit que… », ;
• L'argument ad hominem qui met en cause la vie privée de l'interlocuteur.
III. Typologie des arguments

D'une façon générale, une typologie est une organisation structurée de


données regroupées en types;
Une typologie des arguments est un inventaire raisonné des types d'arguments;

Plusieurs typologies des arguments et typologies raisonnements des :

On distingue les arguments persuasifs ou rhétoriques, des arguments


démonstratifs ou logiques;
Principaux types de raisonnements

Qu’est qu’un raisonnement?

Selon Charles PERELMAN, «"Le mot raisonnement" désigne, à la fois une


activité de l’esprit et le produit de cette activité. »

Les types de raisonnements sont multiples et variés:

Le raisonnement analytique


Raisonnement causal;
Le raisonnement dialectique;
Le raisonnement concessif;
Le raisonnement déductif;
Le raisonnement inductif ou induction
.

Le raisonnement analytique

Le raisonnement analytique est celui qui, partant des prémisses indiscutablement


vraies, aboutissent, grâce à des inférences valides, à des conclusions vraies;

Le raisonnement analytique transfère la vérité de ses prémisses à la conclusion

Le type de raisonnement analytique renvoie au syllogisme selon le schéma


classique suivant:
Si tous les A= B et B = C, tous les A= C

La validité de l’inférence ne dépend en rien de la matière sur laquelle on


raisonne car elle peut être empruntée de tous les domaines les plus divers de
la pensée;

C’est la forme même du raisonnement qui garantit sa validité


Raisonnement causal qui est un raisonnement qui s'appuie sur le
principe que tout fait a une cause et qu'une cause produit des effets
(Principe de causalité);

S’appuie sur les causes d’une situation, d’un fait ou d’un phénomène;

L’auteur en tire des conséquences;


Le raisonnement dialectique repose sur la thèse, l’antithèse et la synthèse,
surtout employé lors d’un dialogue qui met en opposition deux opinions
différentes;

Consiste à examiner les arguments favorables ou défavorables à une thèse et à


une thèse contradictoire ou opposée (antithèse) pour aboutir à une
.

proposition (synthèse) qui essaie de dépasser la contradiction et apporte


quelque chose de nouveau par rapport aux deux points de vue initiaux;
Le raisonnement concessif commence par admettre les arguments adverses
pour ensuite développer et maintenir son propre point de vue

Plus concrètement, il consiste, dans un premier temps, à feindre d'admettre la


validité d'une partie des arguments ou des idées de la thèse adverse, pour pouvoir
mieux les réfuter par la suite en leur opposant d'autres arguments;
L’argumentateur revient finalement la thèse initiale et de maintenir son point de
vue.;
Cela permet de ne pas montrer trop explicitement à son interlocuteur qu'il se
trompe et l'amener à appréhender la question selon un autre point de vue;

Exemple : Certes, je concède que vous avez raison sur ce point, mais...
Le raisonnement déductif ou par déduction part d’une idée générale ou
universelle souvent accompagnée de propositions secondaires ou mineures,
formant les prémisses pour en tirer des propositions particulières;

Le raisonnement juridique est un type de raisonnement déductif, un


syllogisme selon lequel si les faits considérés correspondent à une
situation visée par une règle de droit, ils doivent automatiquement être
soumis à celle-ci
J. L. Bergel, Méthodologie juridique, Thémis et PUF, 2001, pp 141-142
Le raisonnement inductif ou induction est un mode de raisonnement, une
opération mentale, qui consiste à remonter du particulier au général, des
effets à la cause, des conséquences au principe dont elles découlent, de
l'expérience à la théorie;

Plus concrètement, le raisonnement par induction part de faits particuliers, des


phénomènes observés pour en induire des conséquences ou uneconclusion
générale;
. Raisonnement par analogie ou a pari

Il consiste à déduire d’une ressemblance entre deux ou plusieurs faits ou


situations une similitude de régime juridique;
Procède de l’idée qu’il serait illogique et incohérent de soumettre à des solutions
différentes à des hypothèses identiques;

Constamment utilisé par les juristes dans le cadre de l'argumentation judiciaire


et ce, notamment, lors de l'exploitation d'une ou de plusieurs jurisprudences
qui seraient favorables à la thèse développée;
Le raisonnement dilemmatique

Un dilemme est un raisonnement disjonctif dans lequel on part de


deux prémisses qui sont des propositions incompatibles (l'une est vraie si
l'autre est fausse et inversement);
Même incompatibles, ces propositions aboutissent toutes les deux à la même
conclusion qui s'impose donc comme vraie;
Quel que soit le choix effectué par ce dernier, il arrivera à la conclusion voulue
par l'initiateur du dilemme;
Ex. Le dilemme du prisonnier
« Deux hommes sont accusés d’avoir conjointement enfreint la loi. La police n’a en revanche aucune preuve tangible permettant de faire
condamner avec certitude les deux malfrats présumés. Ils sont placés en garde à vue et détenus séparément.
Lors de leur premier interrogatoire, chacun se retrouvant seul face à un policier, ils se voient tout deux notifié que :
• Si l’un des deux avoue et que l’autre non, le premier aura une remise de peine et ne passera pas par la case prison alors que le
second sera lourdement condamné et passera 5 ans en prison,
• Si les deux avouent, ils subiront tous les deux une peine légère de 3 ans. »
« Si les deux prisonniers se couvrent mutuellement, ils s'en sortiront globalement mieux que si l'un des deux dénonce l'autre. Cependant
l'un des deux prisonniers pourrait être tenté d'avoir une meilleure remise de peine en dénonçant son complice. Mais l'autre, mesurant ce
risque, peut être tenté de dénoncer son complice pour ne pas avoir la peine maximale. »
Typologie des arguments proprement dits

les arguments d’autorité ;  Argument a coherentia


l’argument ad hominem;  Argument ab exemplo
argument a contrario
 Argument naturaliste
argument a simili
Argument a fortiori  L’argument apagogique
Argument a completudine  L’argument téléologique
Les arguments d’autorité

L’argument d’autorité est un raisonnement qui s’appuie sur l’opinion ou


l’autorité d’une personne d’une grande réputation;
Consiste à invoquer une autorité lors d'une argumentation, en accordant de la
valeur à un propos en fonction de son origine plutôt que de son contenu;

Suppose un discours rapporté, clairement distingué du propos du locuteur et à


partir duquel ce dernier affirme la vérité d’une proposition;
Argument d’autorité peut être:
raisonnable
déraisonnable

L’argument d’autorité raisonnable présente l’autorité en question comme


étayant, renforçant la thèse;
L’autorité n’est pas présentée comme l’unique raison d’accepter une thèse, mais
comme appui;
L’argument d’autorité déraisonnable
• L’argument d’autorité déraisonnable fait entièrement dépendre la vérité d’une
thèse, de l’autorité invoquée;
L’argument d’autorité déraisonnable appuie entièrement sa thèse sur une autorité;
Sans cette autorité, cette thèse « tomberait », serait fausse ; la vérité ou la viabilité
de la thèse est toute suspendue à l’autorité;
L’argument ad hominem

L’argument ad hominem s’appuie sur la personnalité de l’adversaire pour le


condamner;
Il consiste à montrer une incompatibilité entre ce que la personne dit et ce qu’elle
est ou fait;
Tend à discréditer l’adversaire en l’attaquant non sur ses idées mais sur sa
personne;
Dès lors la conclusion en est la suspension de la thèse et des preuves avancées,
incompatibles avec ce que la personne est ou fait;
Détourne l’attention de la réflexion: il ne se penche pas sur les idées d’une
personne mais critique la personne elle- même

L’argument ad hominem est le rejet de ce que dit le locuteur pour appuyer


sa thèse (parce que c’est lui qui l’affirme et que son attitude est incompatible
avec ce qu’il dit), la thèse pouvant être parfaitement valide par ailleurs;
Argument a contrario

Selon Tarello, l’argument a contrario est


« un procédé discursif d’après lequel une proposition
juridique étant donnée, qui affirme une obligation (ou une
autre qualification normative) d’un sujet(…), faute d’une autre
disposition expresse, on doit exclure la validité d’une
proposition juridique différente qui affirme cette même
obligation (ou une autre qualification normative) à l’égard de
tout autre sujet (…) » cité par Ch. PERELMAN, op. cit., p. 55
.

Plus concrètement, l'argument a contrario peut se définir par le fait qu'une règle
étant subordonnée à des conditions particulières, on en déduit que la règle
inverse est applicable lorsque ces conditions ne sont pas remplies

Exemple:
Si une règle de procédure interdit la détention provisoire pour les contraventions, a contrario, la
détention pour crimes et délits est autorisée
Argument a simili (a pari, per analogiam)

Un argument a simili consiste à appliquer la règle en cas de réalisation d’une autre


condition similaire à celle énoncée par la règle;
Autrement dit, « une proposition juridique étant donnée, qui affirme une obligation
juridique relative à un sujet ou à classe de sujets , cette même obligation existe à
l’égard de tout autre sujet ou classe de sujets, ayant avec le premier sujet (ou classe
de sujets) une analogie suffisante pour que la raison qui a déterminé la règle à
l’égard du premier sujet (ou classe de sujets) soit valable à l’égard du deuxième
sujet (…) » Ch. PERELMAN, op. cit., p. 56
Exemple:
Le fait qu’un arrêt non motivé doit être cassé nous conduit à la règle qu’il faut
casser un arrêt contenant des motifs contradictoires

Argument a fortiori

Un argument a fortiori, consiste à appliquer la conséquence de la règle en cas de


réalisation d’une autre condition présentant des caractéristiques plus marquées
que celle énoncée par la règle;
L’ argument a fortiori est donc
« un procédé discursif d’après lequel, une proposition étant donnée, qui
affirme une obligation (ou une autre qualification normative) d’un sujet
(ou classe de sujet), on doit conclure à la validité et à l’existence comme
disposition juridique, d’une différente disposition juridique qui affirme
cette même obligation (ou une autre qualification normative) d’un autre
sujet (ou classe de sujet) qui soit ou soient en état de le mériter, à plus
forte raison que les premiers, la qualification normative que la première
disposition accordait à ceux-ci » Ch. PERELMAN, op. cit., p. 56
L’ argument a fortiori peut être ad majori ad minus c.-à-d. du plus grand au
plus petit applicable dans le cas d’une prescription positive, une permission ou
autorisation

Exemple: Article 648 CCLIII


« celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble, en prescrit la propriété par
quinze ans »
On peut dire grâce au raisonnement majori ad minus que de la même façon on pourra
devenir titulaire de tout autre droit réel moins important que celui de propriété
C’est l’application de l’adage « Qui peut le plus, peut le moins »
L’argument ad minori ad majus c.-à-d. du plus petit au plus grand surtout
interdictions. Cet argument s’applique en cas prescription négative
Ex: L’auteur des coups et blessures est passible d’un emprisonnement à plus forte
raison le meurtrier
Argument a completudine

Selon Tarello, l’argument a completudine ou de la complétude du système


juridique « est un procédé discursif d’après lequel, puisqu’on ne trouve pas de
proposition juridique attribuant une qualification juridique quelconque à chaque
sujet par rapport à chaque comportement matériellement possible, on doit
conclure à la validité et à l’existence d’une disposition juridique attribuant aux
comportements non réglés de chaque sujet une qualification normative,
particulière: ou toujours indifférents ou toujours obligatoires, ou
toujours interdits, ou toujours permis »
L'argument a completudine est fondé sur l'idée que le système juridique est
complet et doit donc contenir une règle générale concernant tous les cas qui ne
sont pas réglés par des dispositions particulières;
L’argument a completudine conclut que certaines personnes ou certains
comportements obéissent à une règle générale concernant tous les cas qui ne
sont pas réglés par des règles propres, spéciales, donc dans l’hypothèse où ils ne
sont pas déjà visés par des dispositions spécifiques;
Le droit est présumé complet et donc doit forcément comporter une règle
générale concernant tous les cas qui ne sont pas réglés par des dispositions
particulières;

« Tout ce qui n'est pas interdit est permis »


L’argument a coherentia

L’argument a coherentia (de cohérence) part du principe qu’un législateur


raisonnable et parfaitement prévoyant, ne peut régler une même situation de
deux façons incompatibles;

En cas d’incompatibilité de deux normes, il existe une autre règle qui permet
d’écarter l’une d’entre elles qui provoque l’antinomie. C’est un argument a
coherentia
Argument ab exemplo

L’argument ab exemplo permet d'interpréter la loi conformément à une


source infralégislative: les précédents ou la doctrine généralement admise;

Argument naturaliste ou de la nature des choses

Cet argument tend à conclure que dans une situation donnée un texte
donné est inapplicable , car la nature des choses s’y oppose;
Argument systématique

L’argument systématique part de l’hypothèse que le Droit est ordonné et


que ses diverses normes forment un système, dont les éléments peuvent être
interprétés en fonction du contexte où ils se trouvent insérés;
C’est l’idée que l’ordre juridique est un système cohérent, dont on ne peut
qu’interpréter chaque élément qu’en fonction de son contexte, du système dans
lequel il se trouve;
L’argument apagogique

L’argument apagogique, ou raisonnement par l’absurde , selon laquelle on suppose


que le législateur est raisonnable, et qu’il n’aurait pas pu admettre une
interprétation de la loi qui conduirait à des conséquences illogiques ou iniques;
L’argument apagogique tend à faire comprendre l’inexactitude d’une solution en
mettant en avant, en soulignant les conséquences absurdes qui en résulteraient;
L’argument téléologique

L’argument téléologique, concernant l’esprit et le but de la loi, que l’on ne


reconstitue pas, cette fois, à partir de l’étude concrète des travaux préparatoires,
mais à partir de considérations sur le texte même de la loi. Cette façon plus
abstraite d’argumenter s’impose quand l’étude historique ne permet pas d’éclairer
l’interprète, parce que les problèmes soulevés sont nouveaux et ne se posaient
pas à l’époque.
IV. Les grandes familles de théories de l’argumentation:
réductionnisme et bidimensionnalisme

A. Réductionnisme

En théorie de l’argumentation, un réductionnisme est une théorie qui considère


que tous les arguments sont d’un seul type, en l’occurrence:
 soit défaisable,
 soit indéfaisable;

Les deux réductionnismes considèrent qu’il n’y a qu’un seul type


d’argument, un seul type de structure:
Un argument est défaisable quand il peut être réfuté, invalidé
 Un argument est dit indéfaisable quand l’on ne peut pas l’invalider ou réfuter.

a. Réductionnisme logique
Selon la théorie du réductionnisme logique, tous les arguments doivent être
valides;
Dans un second temps, il peut déduire que les arguments, s’ils sont valides, sont
indéfaisables;
• La notion de validité ne doit en aucun cas être confondue avec celle de vérité:

 Un énoncé est vrai ou faux, mais un raisonnement, une argumentation, une


inférence, sont dits valides ou invalides;

 La vérité porte sur la matière des énoncés, alors que la validité porte sur la
forme des énoncés,
Exemples:
 Les enfants de moins de 15 ans sont pénalement irresponsables : énoncé vrai
 La peine de mort a été abolie dans la législation burundaise: énoncé vrai
 Les enfants de moins de 15 ans sont pénalement irresponsables donc la peine de mort a été abolie dans la
législation burundaise: argumentation invalide composée d’énoncés pourtant vrais
 Les enfants de moins de 15 ans sont pénalement irresponsables donc ne peuvent pas être punis pénalement :
argumentation valide composée d’énoncés vrais
 Les hommes sont des enfants, donc pénalement irresponsables argumentation valide composée d’énoncés
pourtant faux
L’argumentation procède d’un système hylémorphique:
L’ hylémorphisme est une doctrine selon laquelle tout (objet ou
individu) est indissociablement et complémentairement constitué, dans
sa nature, d'une matière et d'une forme, qui composant la substance;

Idéalement, la forme et la matière d’un argument doivent donc être


valide;
b. Réductionnisme topique
Le réductionnisme topique voit dans tous les arguments des arguments
défaisables;
 Selon cette doctrine, aucun argument ne résiste à la réfutation.

 Dès lors, tous les arguments sont susceptibles d’être renversés par un nouvel
argument;

Le caractère topique d’un argument permet de comprendre la notion de


sophistique:
Dans la Grèce ancienne, « sophiste » (de sophistès : « spécialiste du savoir », lui –
même dérivé de sophia qui signifie « savoir, sagesse ») désignait un orateur et un
professeur d'éloquence dont la culture et la maîtrise du discours en font un
personnage prestigieux;
Les sophistes ne s’embarrassaient pas de considérations quant à l'éthique, à la
justice ou à la vérité;
Allaient même à l’école de la rhétorique pro et contra: Autrement dit, les
sophistes passaient pour pouvoir défendre une thèse ou son contraire, contre
rétribution;

Au sens moderne, il désigne une « personne utilisant des sophismes, des


arguments ou des raisonnements spécieux pour tromper ou faire illusion;

Mais comment juger/ évaluer aujourd’hui cette technique consistant à prendre


position pour ou contre, selon la conjoncture?
En vérité, loin de coïncider avec un comportement malfaisant, il semble
que cette capacité soit requise pour quiconque souhaite argumenter, fût-
ce avec les meilleures intentions du monde
Théorie bidimensionnelle

Selon la théorie bidimensionnelle de l’argumentation, il existe deux types


d’arguments :
Défaisables;
 Indéfaisables;
La théorie bidimensionnelle de l’argumentation promeut l’idée qu’il existe des
arguments défaisables et des arguments indéfaisables;
L’argumentation est régie par deux paramètres :
L’orientation
La force;
Un argument est orienté vers une thèse ou contre elle;
En outre, un argument est co-orienté ou anti-orienté par rapport à un autre;
La force d’un argument est le poids qu’on lui donne : le poids peut être plus fort
ou plus faible;
Il y a donc quatre types d’arguments, introduits par quatre types de marqueurs
de l’argumentation:

 co-orienté fort ou moins fort


Voir leçon précédente, dia 45
 anti-orienté fort ou moins fort
V. L’exposé argumentatif et réfutation

1. L’exposé argumentatif
Toute argumentation, qu’elle soit orale ou écrite doit faire l’objet d’une
préparation;
Les arguments sont présentés à travers un exposé argumentatif qui:
Est la manière de présenter son projet ou ses solutions à son auditoire;
Doit faire l’objet d’une réflexion préalable comprenant:
L’analyse du contexte;
La préparation des arguments;
Des arguments documentés;
La recherche d’un plan structuré à partir d’un fil conducteur;
Le rasoir d’Ockham ou principe de simplicité, principe
d'économie ou principe de parcimonie
Selon le principe du rasoir d'Occam, la solution la plus simple est souvent la
meilleure;
Le père du principe du rasoir, Guillaume d'Ockham, est « inutile
d'accomplir par un plus grand nombre de moyens ce qu'un nombre
moindre de moyens suffit à produire. [...] Quand des choses doivent
rendre vraie une proposition, si deux choses suffisent à produire cet
effet, il est superflu d'en mettre trois »
Faire intervenir le plus petit nombre d'hypothèses ou d’arguments s’ils
suffisent à convaincre;
« C'est en vain que l'on fait avec plusieurs ce que l'on peut faire
avec un petit nombre »

 Aller à l'essentiel :
On ne peut pas parler de tout : des arguments les plus simples et suffisants;

Se limiter aux arguments essentiels, rien qu’aux arguments solides, pertinents;


L’exposé argumentatif nécessite également un comportement
adapté à la communication que l’on veut faire passer :

• Un ton convaincant;
• Un bonne élocution;
• Une empathie;
• Une flexibilité;
2. Réfutation

La réfutation est un procédé argumentatif visant à contester, à nier ou à


contredire une thèse opposée;

 Consiste à prouver la fausseté ou la faiblesse d'un argument de son


interlocuteur en faisant réfléchir la personne en tant que tel, le guider à
dire et à penser votre façon de penser;

 Le réfutateur présente la contre-thèse et du contrargument par l’utilisation


d'un argument supportant la thèse défendue ;
Après la réfutation de chacun des arguments avancés par une thèse, l'auteur
propose une thèse nouvelle qui formule son propre point de vue sur la question;

« L’art de persuader consiste autant en celui d’agréer qu’en celui


de convaincre »

B. Pascal
Les procédés de réfutation

Plusieurs procédés pour la réfutation:

Il peut s’agir, selon l’argument à réfuter,

Faire ressortir une ou des contradictions concernant la contrethèse ou les


contrarguments;
Concéder un élément pour faire accepter un argument ayant plus de poids;
Montrer que la contre-thèse est dépassée;
 Insister et mettre l'accent sur une faille importante de
l'argumentation adverse;

 Retourner un argument contre la personne qui l'a énoncé;

Trouver une exception à la thèse adverse;


.

Elaborer, à partir de la thèse adverse, des hypothèses dont les conclusions seront
négatives;

Montrer que l’argumentation du locuteur est marquée par une pétition de principe
ou est fallacieux;

La réfutation doit respecter une certaine structure:


.

Trois étapes

 L’identification de l’argument de la partie à critiquer;

Il s’agit ici de réfuter le cœur de l’argumentation comme par exemple l’intitulé -même de l’argument

 Critiquer l’argument adverse;


 Le réfutateur identifie les faiblesses de l’argument adverse;

 Déconstruction de l’argumentation adverse en fonction des faiblesses identifiées.


.

Expliquer la pertinence de la réfutation

Non seulement il faut démanteler la cohérence interne de l’argumentation adverse mais aussi il
faut:

 Expliquer pourquoi il faut s’opposer à l’argumentation de l’adversaire;


 Expliquer en quoi l’argument, non seulement démontre une incohérence interne mais est aussi
inacceptable du fait de ses conséquences néfastes sur la société;

 Expliquer pourquoi l'absence de cet argument particulier affaiblit l’ensemble de ligne argumentaire;
VI. Raisonnements spécifiques à l'argumentation judiciaire: le
raisonnement probatoire du magistrat

Le raisonnement judiciaire doit être présenté sous la forme d'un syllogisme,
mais cette forme ne garantit nullement la valeur de la conclusion;

 Si la conclusion est socialement inacceptable, c'est que les prémisses ont


été acceptées à la légère:

Or, l’essentiel dans le débat judiciaire et toute la logique juridique, ne concernent


que le choix des prémisses qui seront le mieux motivées et qui soulèvent le
moins d'objections;
.

Impérieux que la conclusion soit solidaire des prémisses: la logique


juridique doit donc vérifier et assurer l'acceptabilité des prémisses;

La conclusion résulte de la confrontation des moyens de preuve, des arguments


et des valeurs qui s'opposent dans le litige;

Dès lors, le juge doit délibérer sur la pertinence de ces moyens pour prendre
la décision appropriée et motiver son jugement;
Le juge ne peut pas se considérer satisfait s’il a pu motiver sa décision d’une façon
acceptable; il doit aussi apprécier la valeur de cette décision et juger si elle lui
parait juste ou du moins raisonnable;

Le raisonnement juridique est un instrument de justification indispensable dans


tout système de droit même si le primat est généralement accordé au dispositif;
.

Éviter la subjectivité et l’arbitraire;

Une question s’impose cependant:

Le juge, doit-il uniquement se conformer à la loi ou doit satisfaire également le


besoin de justice et de l’équité?

Le juge ne peut ignorer que:


Les notions de justice et d’équité sont vagues;
Dès lors,
 Le juge est libre de faire connaitre son appréciation subjective du juste et de
l’injuste;
 Motiver sa décision par des considérations morales, juridiques et même
politiques pour remplir d’une manière satisfaisante sa mission;
• Mais une question fondamentale se pose: il existe-t-il une spécificité des
raisonnements juridiques?
• Quelles sont les formes particulières de l’argumentation juridique?
Si le syllogisme est sans doute la forme la plus connue (à défaut d’être la seule) de
raisonnement juridique, en existent d’autres?
.

Une évidence cependant:

Les juges ne raisonnent pas seulement avec des règles de droit : une décision de
justice suppose aussi d’établir des faits, et pour cela raisonner avec les éléments
de preuve dont on dispose;
.
Raisonnements probatoires

Un ensemble des opérations intellectuelles qui sont impliquées dans


l’établissement des faits dans le procès au moyen des preuves disponibles
surtout lorsque la preuve est libre;

 Dans le système de la preuve légale, la loi fixe les conséquences qui doivent
être tirées d’un élément de preuve et le juge perd tout pouvoir
d’appréciation des faits relatés par ces éléments de preuve.
Il est évident que les juges ne sont pas les seuls à raisonner avec les preuves:
 Les parties et leurs avocats proposent des raisonnements afin de convaincre les
juges de l’existence de certains faits favorables à leur cause;
 Les juges peuvent:

 Imposer leur interprétation des règles de droit: c’est à eux qu’il revient de
décider si un fait est prouvé ou non;
 Les juges doivent déterminer l’existence des faits, évaluer leur crédibilité, les
combiner de manière cohérente et parvenir finalement à décider si un fait est
prouvé;

 Un bon raisonnement permet aux juges d’éviter les erreurs de raisonnement sur
les faits;
Objet des raisonnements probatoires

Le raisonnement porte sur les preuves apportées par les parties en vue
d’établir l’existence du fait contesté (objet de la preuve) : des témoignages, des
enregistrements, des écrits, etc..
Mais quelques précisions s’imposent:
1. Les raisonnements probatoires ne portent pas à proprement parler sur
l’élément de preuve (un témoignage, par exemple) mais sur le fait que relate cet
élément de preuve;
Le raisonnement probatoire suppose d’analyser les éléments de preuve et d’en
tirer des propositions de fait, positives ou négatives par le mécanisme de l’
inférence
L’inférence, nous l’avons vu, désigne le processus consistant à tirer des conclusions
à partir d’un élément de preuve;
 Les raisonnements probatoires n’impliquent pas seulement de réaliser une
inférence pour passer d’un élément de preuve à une proposition de fait, mais
aussi souvent, pour passer d’une proposition de fait à une autre;
Il s’ensuit que une proposition de fait donnée apparaît comme le résultat
d’une inférence, puis comme le point de départ d’une autre inférence, et ainsi de
suite jusqu’au fait à prouver;
C’est dire que d’un fait, le juge tire un autre fait, et ainsi de suite de de
sorte que les raisonnements probatoires sont constitués d’une pluralité
d’inférences, liées les unes aux autres de manière très diverse:
 s’enchaînent et se renforcent,
 se contredisent même,
2. Le raisonnement probatoire ne porte pas seulement sur des propositions de fait
tirées des éléments de preuve apportés par une partie pour établir le fait à
prouver d’autres éléments peuvent intervenir dans ces raisonnements:

Exemple
Devant le tribunal, le MP soutient qu’il ressort d’un témoignage que le prévenu a
été vu sortant d’un entrepôt où un vol venait d’être commis.
Partant de cet élément, il demande au juge d’inférer que ce prévenu est auteur
du vol commis dans l’entrepôt;
Une partie présente une proposition de fait tirée d’un témoignage et elle
demande au juge d’en inférer le fait à prouver;
Le raisonnement articule ici deux éléments :
la proposition de fait (le prévenu sortait de l’entrepôt en courant);
 l’inférence (il s’en déduit qu’il fuyait et donc qu’il a commis l’infraction);

Dans sa défense, le prévenu peut s’efforcer de contester/ réfuter:


 soit la proposition de fait en soutenant par ex. ne sortait pas de
l’entrepôt en courant;
 soit l’inférence qui en est tirée (le prévenu sortait bien en courant mais il n’y a
pas lieu d’en inférer qu’il fuyait car il existe d’autres explications à cette
précipitation,

 A son tour, le MP peut s’efforcer d’affaiblir ces objections et ainsi tenter de


renforcer l’inférence ainsi qu’il ressort des images prises par la camera de
surveillance, ce qui affaiblit l’explication proposée par le prévenu et sauvegarde
l’inférence réalisée;
 Enfin, le prévenu peut s’efforcer de rapporter la preuve d’un autre fait qui vient
directement contester le fait à prouver sans tenter d’affaiblir l’inférence proposée
par le MP:
• Il peut soutenir que:
Il se trouvait ailleurs au moment des faits, que les images sont anciennes;
Il gardait le lit en raison d’un méchant Covid 19;
Le prévenu ne discute pas l’inférence mais vient établir un fait incompatible
avec l’affirmation du MP
3. Le mécanisme même de l’inférence conduit à tirer des conclusions à partir
d’éléments de preuve ou de propositions de fait;
 Dès lors, le juge procède par généralisation :

• d’une proposition (un fait), il en tire une autre qui n’est pas connue mais ces
généralisations sont rarement explicitées. Dans l’exemple ci-dessus, si le MP
demande au juge de tirer du fait que le prévenu sortait en courant de l’entrepôt
où le vol a été commis, c’est parce qu’il estime que ce comportement est
suspect;
 Une remarque cependant!
La généralisation, tirée d’un bons sens, est certainement contestable ; mais elle
est néanmoins le soutien nécessaire de l’inférence;
Les raisonnements probatoires font intervenir des propositions qui ne
découlent pas des éléments de preuve disponibles mais qui sont issues
du sens commun et même de l’expérience personnelle du juge, de la logique, de
la science, etc..
.

En définitive, le raisonnement probatoire du juge porte sur un ensemble plus ou


moins large de propositions de fait, qui sont inférées des éléments de preuve
disponibles ou d’autres propositions de fait;
.

Dans son raisonnement, le juge est guidé par des règles juridiques combinées à la
volonté d’expliquer le processus de décision;
Ainsi, les règles juridiques sont présentées comme une obligation pour le juge,
qui doit, une fois sa décision arrêtée, la faire rentrer dans le moule du syllogisme

 Dans son raisonnement, le juge doit garder à l’esprit que le droit ne peut pas
négliger la sécurité juridique et ne doit se détacher de la réalité et ne peut
jamais la perdre de vue (v° J-L Bergel, op. cit., p. 142)
.

Par conséquent:

Le juge doit:
 Eviter la subjectivité et l’arbitraire;
 Garder à l’esprit de ne pas confondre ce qui est juste conformément au droit à
ce qui paraît juste à un individu;
Les opérations impliquées dans les raisonnements probatoires

Le raisonnement probatoire met en œuvre trois opérations intellectuelles bien


distinctes conceptuellement mais souvent confondues en pratique:
1. Déterminer ou évaluer la valeur des éléments du raisonnement;
2. Agencer les propositions/ récit des fait;
3. Déterminer si le fait contesté est prouvé.
1. Déterminer ou évaluer la valeur des éléments du
raisonnement

Le raisonnement probatoire suppose d’abord de déterminer le degré de


conviction qui est attaché à chacun des éléments pris en compte;
Cette analyse porte sur:
 l’appréciation des éléments de preuve;
 les inférences tirées des faits et des preuves;
Le degré de conviction attaché au raisonnement probatoire s’apprécie
également par rapport à chaque inférence;

On parle de force inférentielle qui traduit le niveau de confiance attaché à


chaque inférence.
 Le juge doit d’abord déterminer la crédibilité de l’élément de preuve dont une
proposition est inférée;
 La défense sera jugée plus ou moins convaincante en fonction d’un très grand
nombre de paramètres qu’il revient au juge d’apprécier : le mode de preuve dont
elle provient, les conditions dans lesquelles elle a été obtenue, les connaissances
qui la fondent, la nature de la preuve,…
Les théories du raisonnement probatoire offrent principalement deux
instruments pour apprécier la valeur des éléments du raisonnement:

Premier instrument: Le classement est ordinal des preuves


Il consiste à:
 attribuer à chaque élément de preuve un degré de conviction en suivant une
échelle graduée;
 Ranger les preuves dans une relation d’ordre selon qu’ils sont jugés non-
convaincants, convaincants, très convaincants;

Le second instrument d’analyse:


Attribuer à chacune des propositions de fait entrant dans les
raisonnements probatoires une valeur chiffrée
Cette valeur chiffrée (classement est cardinal) représente l’effet positif ou
négatif d’un élément de preuve sur la probabilité d’une hypothèse:

Ainsi, une preuve a une valeur d’autant plus grande qu’elle augmente
fortement la probabilité qu’une hypothèse donnée soit vraie, ou
encore que le rapport de vraisemblance a une valeur élevée
2. Agencer les propositions/ récit des fait

Les raisonnements probatoires impliquent que les juges mettent en


ordre les éléments constitutifs du raisonnement;
 Ces derniers sont analysés en tant qu’ils forment un ensemble;
 Les propositions de fait s’agencent les uns avec les autres, au moyen
d’inférences, pour parvenir à une conclusion : de telle proposition, on
tire telle autre, et ainsi de suite jusqu’au fait final (le fait à prouver);
.

 Tous les éléments qui entrent dans le raisonnement doivent pouvoir être pris en
compte et analysés ensemble;

Bémol:
L’opération décrite ci-avant peut s’avérer très difficile dans des affaires complexes
où il existe de nombreuses propositions de fait tirées d’un grand nombre
d’éléments de preuve;
 Pour surmonter cette difficulté, des méthodes d’analyse ont été
élaborées pour faciliter les raisonnements probatoires, éviter les
erreurs de raisonnement, et ainsi guider les juges;

Ces méthodes ont en commun de s’appuyer sur une liste de toutes les
propositions de fait qui entrent dans le raisonnement (dont on aura
préalablement déterminé la valeur, en termes qualitatifs ou quantitatifs);
Recours à la théorie de John H.Wigmore:
La principale représentation ordinale est due à J. H.Wigmore qui en 1913, propose
un instrument destiné à guider la décision des juges en représentant
graphiquement:
 les éléments de leur raisonnement, le crédit plus ou moins fort qu’ils y
accordent, et
les inférences qu’ils font pour passer d’un élément à un autre;
 Les méthodes qui viennent d’être évoquées supposent que tous les éléments du
raisonnement sont appréciés séparément et sont soigneusement mis en
relation les uns avec les autres;

 Envisagent les raisonnements probatoires de manière analytique, un à un,


chaque élément du raisonnement: on les qualifie d’atomistes
Ces théories sont fragilisées par des travaux de psychologie expérimentale qui
ont démontré que:
Les juges n’analysent pas les preuves une par une mais les intègrent
spontanément dans un récit qu’ils construisent;

Les preuves sont envisagées de manière globale c.-à-d. de façon holistique : c’est
la conception holiste du raisonnement probatoire;
Selon la conception holiste de l’analyse des raisonnements probatoires, les preuves
présentées:
 Ont une valeur d’autant plus grande qu’elles s’insèrent dans un récit cohérent, qui rend
compte du plus grand nombre de preuves disponibles;

Ces récits permettent de départager les parties, en retenant le récit jugé le plus
convaincant;
3. Déterminer si le fait contesté est prouvé

La mise en ordre des éléments du raisonnement doit permettre au juge de


déterminer quel est l’effet des preuves et finalement de décider, sur la base de
l’ensemble de ces éléments, si le fait contesté est prouvé;

 Selon les méthodes ordinales d’analyse des preuves, le juge doit:

 soupeser le crédit qu’il accorde aux éléments du raisonnement;

 passer en revue la manière dont ils s’ordonnent et finalement;


se forger une conviction sur la preuve du fait contesté;

 Pour parvenir à une conclusion, le juge doit décider s’il existe des
éléments suffisants en faveur de l’existence du fait contesté;

 si c’est le cas, il pourra juger que le fait est prouvé;

 si ce n’est pas le cas, il décidera que le fait n’est pas prouvé.


Mais un problème de pose :
 Que faut-il entendre par «suffisant »?
 A partir de quel moment le juge peut-il valablement (sur le plan juridique) décider
que les éléments de preuve sont suffisants pour décider que le fait contesté est
prouvé ?
La question soulève une grande complexité dans le système romano-
germanique:

 les juges apprécient les éléments de preuve suivant leur intime conviction et
laisse les juges libres d’apprécier les éléments qui leur sont soumis et la valeur à
y réserver;
 la loi ne leur dicte pas d’atteindre un degré de conviction qu’elle détermine
Inconvénients de l’intime conviction du juge:
 Arbitraire;

 Insécurité juridique

Ainsi, la manière dont les raisonnements probatoires aboutissent à une conviction


sur la preuve (le fait contesté est prouvé ou il ne l’est pas) ne fait pas l’objet
d’indications légales et est renvoyée au for intérieur des juges;
La situation différente dans les pays de common law où la loi prescrit aux juges
de franchir un certain seuil/ niveau de conviction, appelé standard de preuve,
pour pouvoir décider qu’un fait est prouvé;

 Les standards de preuve révèlent/ relèvent des choix de politique juridique:

 Etats-Unis, la loi exige un niveau de conviction élevé dans le procès pénal où la


preuve doit être rapportée au-delà de tout doute raisonnable (beyond a
reasonable doubt);
Dans le procès civil, le standard de preuve est moins exigeant :
le fait doit être considéré comme prouvé si les éléments rapportés par la
partie qui supporte la charge de la preuve rendent l’existence de ce fait plus
vraisemblable que son inexistence (preponderance of the evidence);
Dans les autres matières civiles qui mettent en jeu les libertés individuelles :
le standard civil est toutefois renforcé et la preuve doit être claire et
convaincante (clear and convincing evidence);
Avantage de la fixation de standards de preuve par la loi:
 Offrir aux juges un guide utile pour déterminer s’il faut conclure des éléments
de preuve que le fait est prouvé ou non;
Rendre théoriquement plus objective la délibération sur l’existence d’un fait

En conclusion, dans une approche probabiliste, si l’on dispose de la valeur totale


des preuves disponibles, il suffira de vérifier si elle excède ou non le standard de
preuve applicable;
.

L’analyse probabiliste des preuves est néanmoins au cœur de vives


critiques:

 des difficultés pratiques:


 le franchissement du standard de preuve applicable reste soumis à une
appréciation qualitative ce qui reste tout de même subjective;
 la compréhension de ce que signifient les standards de preuve et la manière
dont ils doivent être mis en œuvre est marquée par des incertitudes et parfois
des contradictions;

 Qu’il analyse les preuves une à une (examen analytique des preuves) ou
qu’ils les intègrent dans un récit global, le juge américain est confronté à:

• la difficulté de savoir à partir de quand le standard de preuve applicable est


franchi par la partie qui supporte la charge de la preuve;
.
• quand le fait contesté doit donc être considéré comme prouvé.
.

FIN
• La logique est une théorie normative du raisonnement, qui vise à caractériser la classe des arguments
déductifs valides en déterminant si la conclusion est la conséquence logique des prémisses;

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