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MANON LESCAUT ABBE PREVOST (1731)

I/ LA GENESE DE L’OEUVRE

Manon Lescaut est une histoire emboîtée (tome 7) dans Les Mémoires d’un homme
de qualité qui s’est retiré du monde. Cet homme de qualité est le marquis de
Renoncourt que Des Grieux va rencontrer par deux fois au début du roman ; la
première avant le départ de DG au Nouvel-Orléans et la seconde à son retour à
Calais.
Oeuvre scandaleuse saisie lors de sa réimpression à Rouen en 1733 ; est considérée
« abominable » car les héros sont un escroc et une catin.

II/LES PERSONNAGES

A/ Des Grieux

Enfant innocent à la sortie du collège, sincère et insouciant. Son coup de foudre


le transforme trop vite en homme malhonnête.
Il agit avant de prendre conscience de ses actes car poussé par une passion
extrême: enlèvement de M. , jeux clandestins, se déguise et ment pour paraître
le jeune frère de Manon devant le vieux GM…
Sa culpabilité est atténuée par l’innocence de ses intentions et par la fatalité
dont il ne peut s’affranchir : « Mes malheurs sont au comble ; il ne me reste
plus qu’à m’y soumettre...Adieu, je vais aider mon mauvais sort à consommer
ma ruine, en y courant moi-même volontairement. »

B/ Manon

Comme le dit Montesquieu, Manon est une catin menée à la Salpêtrière. Il faut
attendre le XX ème siècle pour avoir une lecture sociale du personnage : Manon
est une fille du peuple en lutte contre les oppressions sociales.
Elle incarne la fatalité et l’amoralité qui entraînent DG vers la pente ; elle a une
emprise totale sur lui.
Elle a un goût pour la liberté et le luxe ; elle vit dans le présent et ne pense à
l’avenir que lorsque celui-ci est menaçant.
Sa légèreté ne l’empêche pas d’éprouver pour DG un amour sincère : « Votre
coeur sans lequel il est impossible que je vive. » Capable à la fois d’être tendre
et dévouée, elle n’en reste pas moins égoïste si une occasion de satisfaire une
fantaisie se présente.
Elle ne parviendra à comprendre la passion de DG que lorsqu’elle découvrira
son dévouement et son sacrifice ; son dernier adieu traduit la vénération qu’elle
a pour lui.
C/ Tiberge

Ami fidèle, symbolise la vertu. Présent dès la rencontre des amants à Amiens, il
retrouve DG au Nouvel-Orléans après la mort de Manon et le ramène en France.
Il est pour DG la voix de sa conscience et de sa raison oubliée , un confesseur.

D/ Le père de DG

A un rôle important ; bafoué dans son honneur par son fils, il ordonne la
déportation de Manon et devient l’instrument indirect de sa mort. Il est la voix
de la loi sociale qui jette l’anathème sur le désordre d’une société nobiliaire.

E/ Le frère de Manon

Il incarne le double négatif de Tiberge. Apparemment favorable au bonheur des


amants, il est dans les faits, l’instrument de leur perte.

III/ LE ROLE DE L’ARGENT

L’argent apparaît comme l’élément corrupteur d’un amour innocent.


D’entrée, le roman impose ce thème dans toute sa violence : l’aventure
amoureuse est liée à une quête financière ; l’amant est un héros dégradé, réduit
à acheter les gardes d’une amante promise à la déportation.
L’argent a un double rôle : il apparaît à la fois comme un élément favorable à
la passion et comme un obstacle. Il est primordial pour la quête amoureuse :
Manon ne lui reste fidèle que s’il est riche : « Elle aimait trop l’abondance et le
luxe pour me les sacrifier » constate amèrement DG après le vol de leurs
économies à Chaillot. Chaque déconvenue financière (incendie de maison, vol)
relance le héros dans une quête frénétique d’argent qui le conduit de
compromissions en compromissions ; il joue, il triche, il trompe.
La déportation au Nouvel-Orléans permet aux amants d’échapper au cycle
infernal de l’argent mais ce renoncement à l’argent et au luxe aboutit à la
catastrophe finale : la mort de Manon.

IV/ LE TRAGIQUE

Le marquis de Renoncourt, dans l’avis de l’auteur, annonce l’histoire d’un


jeune homme « aveugle » qui se précipite dans les pires infortunes. Le ton de la
tragédie est ainsi donné ; voici un héros qui se laisse entraîner par son destin.
A/ Un héros tragique

DG peut être considéré comme un héros car il est confronté à un grand


nombre de malheurs qu’il surmonte avec grandeur d’âme au risque d’y trouver
la mort.
Les infortunes du personnage jalonnent le récit : 3 trahisons de Manon suivies
de 3 séquestrations. Ces coups du sort suscitent chez DG des réactions violentes
vis à vis de Manon : « infidèle », « inconstante », « cruelle ».
Les paroles du père ont parfois des accents raciniens : « va, cours à ta perte.
Adieu fils ingrat et rebelle ».
Mais DG sait montrer une grandeur d’âme et préfère la mort plutôt que d’être
trompé ; il entraîne Manon dans sa longue marche vers la pureté et la vertu

B/ Un destin tragique

Comme dans la tragédie, le récit de DG doit susciter la terreur et la pitié ; ainsi,


le personnage se tourne vers son passé et ne comprend pas pourquoi sa vie fut
bouleversée. Il éprouve les mêmes difficultés à analyser ses sentiments après la
mort de Manon et craint de ne pouvoir terminer son récit :« Je crains de manquer
de force pour achever le récit du plus funeste événement qui fût jamais ».

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