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Français – Classe de 1ère

OE n°2 : Manon Lescaut – Parcours « Personnages en marge, plaisirs du romanesque »


Année scolaire 2022-2023 – Mme Maud Gonçalves

DISSERTATION ROMAN
Arguments et exemples

Sujets possibles de dissertations :


1) Dans l' « Avis de l'auteur », Renoncour s'adresse en ces termes au lecteur de l'Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut : « Outre
le plaisir d'une lecture agréable, on y trouvera peu d'éléments qui ne puissent servir à l'instruction des mœurs ; et c'est rendre, à mon avis, un
service considérable au public, que de l'instruire en l'amusant. » Dans quelle mesure cette affirmation correspond-elle à votre lecture du roman ?
2) Dans quelle mesure peut-on dire que Manon Lescaut est une tragédie qui, outre la crainte et la pitié, suscite le plaisir du lecteur ?
3) Le récit à la première personne permet-il d'impliquer le lecteur ou de le rendre circonspect à l'encontre des faits racontés ?
4) En quoi Manon Lescaut est-il un roman qui bouleverse l'ordre établi ?
5) « Le plus grand plaisir qui soit après Amour, c'est d'en parler » Cette affirmation de Louise Labé permet-elle d'éclairer votre lecture de Manon
Lescaut ?
6) Diriez-vous que l'abbé Prévost cherche à susciter, chez le lecteur, le plaisir d'aimer ses personnages ?
7) Un auteur contemporain dit : « Le public ne cherche pas seulement dans la lecture l’évasion et la distraction, la sensibilité individuelle, le
sentiment et la rêverie, il prend également conscience des grands problèmes du monde qui l’entoure. » Vous montrerez, à partir de vos lectures
et de Manon Lescaut comment ce jugement se vérifie.
8) Le plaisir de la lecture de Manon Lescaut tient-il à la marginalité de ses personnages ?
9) Le grand écrivain Gustave Flaubert affirme, au sujet de Manon Lescaut : « Ce qu'il y a de fort dans Manon Lescaut, c'est le souffle sentimental,
la naïveté de la passion qui rend les deux héros si vrais, si sympathiques, si honorables, quoi qu'ils soient des fripons ». Partagez-vous cette
opinion sur le roman ?
10) Dans quelle mesure les personnages en marge permettent-ils de mieux peindre l'âme humaine ?
11) Pensez-vous que la peinture des vices est un bon moyen pour élever l'âme du lecteur ?
12) Dans quelle mesure les personnages en marge renforcent-ils le plaisir du romanesque ?
13) Pensez-vous qu'un narrateur en marge, comme Des Grieux, permet d'édifier le lecteur ?
14) Dans l' « Avis de l'auteur », Prévost fait faire à Renoncour un portrait succinct de Des Grieux en « jeune aveugle qui préfère par choix une vie
obscure et vagabonde à tous les avantages de la fortune et de la nature ». Selon vous, en quoi cette description du caractère et du destin de Des
Grieux explique-t-elle l'intérêt et le plaisir qu'un lecteur peut ressentir à la lecture de Manon Lescaut ?
15) En quoi la marginalité des personnages du roman de Prévost est-elle au service d'une critique de la société ?
IDEE ARGUMENT EXEMPLES POSSIBLES
Les personnages L'abbé Prévost, observateur de son temps, dresse
de Manon un tableau réaliste des vices de son époque, qu'il
Lescaut et leurs met en lumière, tel un moraliste.
aventures Certains personnages incarnent une réelle sagesse - Tiberge est l'exemple même de l'ami sincère, mu par des valeurs nobles et qui
soulèvent des et délivrent, par leur exemplarité et leur vertu, une essaie à tout prix de persuader DG de s'extraire de sa passion pour Manon et
questions leçon de morale aux lecteurs. Ils sont ainsi érigés des vices que cette passion fait naître chez lui : il incarne la voix de la raison.
morales. Le au rang d'exemplum. Ses interventions sont longuement argumentées, et c'est alors l'occasion, pour
roman de Prévost l'auteur, de nous délivrer de véritables leçons de sagesse.
a ainsi une visée
édificatrice,
didactique. Toute entrave à la loi et tout manquement à la - Mort de Manon, au terme de toutes les péripéties vécues avec DG, et malgré
morale sont sévèrement condamnés : l'immoralité sa volonté de rédemption (mariage officiel et légal avec DG).
et la transgression des règles sociales ou morales - Procès et maladie de DG, après la mort de Manon. Il ne revoit pas son père,
se voient punies, châtiées dans ce roman. L'auteur mort sur ces entrefaites... Et son récit lui-même à Renoncour est la preuve que
nous met ainsi en garde contre le vice. sa souffrance et ses regrets sont durables.
Manon Lescaut peut être lue comme une tragédie - Comme dans la plupart des tragédies, Manon Lescaut s'achève sur la mort de
classique, capable d'opérer chez le lecteur une l'héroïne, décrite avec retenue, puisque le narrateur fait presque l'ellipse de
véritable catharsis (purgation des passions) : en ce l'agonie pour préférer s'appesantir sur la souffrance de DG. On peut y lire un
sens, ce roman pose la question du libre arbitre et possible écho à l'art de la litote classique, voire de la bienséance.
de la fatalité, en faisant ressentir au lecteur de la - Les personnages tentent d'échapper à une inéluctable fatalité : DG souligne
crainte et de la pitié pour les protagonistes. Cette notamment sans cesse le charme de Manon, un pouvoir envoûtant auquel nul
tragédie fait réfléchir à la destinée humaine. ne peut résister. Il invoque souvent le Ciel, comme s'il tentait de retenir
vainement la colère de Dieu face à ses agissements.
- La répétition des mêmes situations (entre la partie 1 et la partie 2 du roman),
qui connaissent en outre une issue de plus en plus terrible, montre un
engrenage tragique : les protagonistes ne parviennent pas à mettre un terme à
leurs mauvais agissements ni à leur penchant au plaisir, ce qui les condamne à
de terribles châtiments.
- La fin met en scène une ironie tragique : c'est au moment même où ils
désirent se soumettre aux lois du monde (en officialisant leur union par le
mariage) que les deux amants sont définitivement et irrémédiablement punis.
Le plaisir du Plusieurs aventures sont dénuées de toute - De nombreuses scènes du roman offrent une peinture complaisante et
romanesque préoccupation morale : Manon Lescaut peut être lu insistante de l'amour, décrit pour lui-même, dans toute la force et la beauté du
l'emporte bien comme un roman d'aventures, aux mille sentiment.
souvent sur la péripéties causées par la passion. C'est là la
perspective définition du romanesque, qui permet au lecteur de
morale du récit. s'évader de sa propre réalité.
Le roman est au Il est envisageable que le lecteur éprouve du - Le lecteur prend plaisir à voir Manon jouer de sa sensualité pour attirer les
service d'une plaisir pour les aventures racontées justement hommes, et au premier chef DG.
« lecture parce qu'elles sont scandaleuses, sulfureuses : un - Son ambiguïté l'élève / l'érige au rang de mythe : il y a une fascination à
agréable » des plaisirs du romanesque réside précisément observer, en tant que spectateur de ses manigances, l'art avec lequel elle réussit
(« Avis de dans la transgression des lois morales. Le à manier le mensonge et la manipulation, sur diverses victimes.
l'auteur »). lecteur devient alors, le temps de sa lecture, un
complice complaisant et fasciné des travers et des
vices des protagonistes.
Malgré la veine profondément tragique de ce - Si DG l'aristocrate adopte souvent la posture du héros tragique, il connaît
roman, Manon Lescaut offre aux lecteurs des aussi des situations ridicules qui le renvoient à une marginalité dégradante : il
passages hautement comiques, voire subit par exemple les moqueries familiales au sujet du statut social de Manon,
burlesques, qui les réjouissent. quand il est ramené de force chez lui.
- L'épisode du prince italien apparaît comme un morceau de bravoure d'un
comique savoureux reposant sur la complicité des deux protagonistes qui se
jouent d'un homme sûr d'avoir séduit Manon.
- Le comique de certains passages conduit à rire avec les amants, même quand
ceux-ci agissent contre la loi, comme lors de l'épisode du jeune G... M...
La marginalité Par son refus des convenances et d'un destin tout - DG s'oppose violemment à plusieurs formes d'autorités morales : DG se
des personnages tracé, DG est un personnage qui incarne une forme révolte face aux discours de l'autorité du père, de la religion, de son ami
est à la fois un de liberté, à rebours des injonctions de son Tiberge et de la voix intérieure de sa raison. Ainsi, les voix de la sagesse sont
puissant ressort entourage : en tant que protagoniste en marge, il rarement écoutées par DG, tant la passion l'emporte sur la raison. Pourtant, il
narratif et ouvre pour le lecteur la voie à une réflexion sur sait argumenter en faveur de son amour, ce qui suggère qu'il n'est peut-être pas
dramatique qui les conditions et les possibilités d'une réelle entièrement dans l'illusion...
maintient l'intérêt liberté pour un homme de son temps.
du lecteur, mais Nous pouvons affirmer que la marginalité dans - L'argent est le moteur de bien des actions de Manon, et de DG guidé par la
ouvre aussi à une laquelle se trouvent Manon et DG est produite par passion, et qui en vient à contrevenir à ses principes, à ses valeurs (jeu,
réflexion la société : Prévost cherche à critiquer le rôle manipulations).
politique, sociale prépondérant de l'argent, des préjugés et des - L'importance du pouvoir, qui assujettit les petites gens : quand Manon et DG
et morale. conservatismes au sein de la société, qui conduit projettent de se marier, le prêtre les trahit auprès du gouverneur, qui décide de
les individus à se marginaliser. donner Manon à son neveu Synnelet.

Le récit est émaillé de lieux symboliques de la - les salles de jeux


marginalité, décrits avec un grand réalisme : - la prison
Prévost vise à nous montrer de l'intérieur les - l'Amérique
marges de la société, et la critique devient sociale
et politique.
La narration elle- Le récit rétrospectif à la première personne fait par - Connivence entre les personnages et les lecteurs lors de l'épisode du piège
même, assumée Des Grieux à Renoncour permet d'impliquer tendu au fils G... M...
par le personnage complètement le lecteur dans l'histoire : le plaisir - Toutes les émotions de DG sont finement dépeintes par lui-même dans son
ambigu de Des de l'introspection réside dans le fait de vivre les propre récit de la passion : nous observons de nombreux monologues intérieurs
Grieux, est une aventures de l'intérieur. à chaque possible trahison de Manon. Dès lors, nous le suivons dans les
source méandres de la jalousie et de la justification.
fondamentale Face à la partialité du narrateur personnage, dont - Certains méfaits sont justifiés de manière gênante, comme le vol ou le
d'intérêt et de la mauvaise foi est ponctuellement, régulièrement meurtre du gardien. Le lecteur est amené à douter de la bonne foi de DG, dont
questionnement perceptible, le lecteur est conduit à douter de la sa lecture dépend pourtant, lorsque, par exemple, à deux reprises, il se défend
pour le lecteur. vraisemblance du récit et à être circonspect, de ne pas avoir voulu tuer le gardien alors qu'il avait décidé d'avoir le revolver
suspicieux quant à l'honnêteté du narrateur. de Lescaut...

Les ambiguïtés du récit et du narrateur revêtent - La mort de Manon semble une fin rédemptrice pour la jeune femme : toutes
des avantages non négligeables pour le lecteur : le ses fautes paraissent rachetées par cette mort pathétique. Cependant, sa mort ne
mystère qui entoure les personnages leur donne doit pas faire oublier tous les péchés qu'elle a commis pendant le récit. Au
de l'épaisseur et les rend fascinants, et le lecteur finale, le lecteur ne peut que s'interroger sur la valeur d'une telle femme,
est ainsi libre de porter son propre regard sur les devenue vertueuse seulement au terme de sa vie...
faits racontés et sur la moralité des personnages.
Le roman laisse le lecteur juge sans imposer
une leçon de morale catégorique : il pose des
questions plutôt qu'il n'impose une réponse.

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