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I.

SÉMANTIQUE LEXICALE DU FRANÇAIS

Thème 1.

I - La sémantique lexicale ou lexicologie. Généralités.


II - Les méthodes.
I. LA SÉMANTIQUE LEXICALE OU LEXICOLOGIE. GÉNÉRALITÉS.
I. 1. Lexicologie et lexicographie.
Il est nécessaire d’établir une distinction entre ces domaines de la linguistique :
- La lexicographie : ce domaine doit être considéré en même temps comme une
pratique et comme une science.
Comme pratique, on peut la définir comme l’ensemble des techniques utilisées pour la
confection des dictionnaires, qui sont des répertoires de mots d’une langue.
Comme science, la lexicographie est la discipline qui analyse les méthodes et les
techniques qu’exigent l’élaboration et la rédaction des dictionnaires, tout en proposant
une réflexion sur celles-ci.
Un dictionnaire est un objet empirique, le résultat d’une activité pratique, et il est
conçu à des fins utilitaires. C’est pour cette raison que les dictionnaires sont soumis à de
nombreuses contraintes en rapport avec leur destination :
- une présentation conventionnelle
- une adaptation à un ou plusieurs publics
- la recherche de l’exhaustivité et de la simplicité
- le souci didactique.

- La lexicologie : domaine de la linguistique qui a pour objet d’établir la liste des


unités lexicales qui constituent le lexique d’une langue, de structurer ce lexique en
microsystèmes et de décrire les relations entre ces unités lexicales.
On peut distinguer deux branches en lexicologie :
- La sémantique lexicale ou lexicologie sémantique : elle est en rapport avec la
sémantique, surtout la sémantique structurale.
- La morphologie lexicale ou morphosémantique : elle est en rapport avec la
morphologie, puisqu’elle étudie l’organisation formelle du lexique
La lexicologie sémantique et la morphologie lexicale mettent en évidence que le
lexique d’une langue présente une certaine structuration du point de vue formel et du
point de vue du sens, bien qu’il s’agisse d’un ensemble ouvert.
D’autre part, les mots se combinent entre eux pour constituer des phrases, c’est-
à-dire ils présentent des propriétés combinatoires. Cela veut dire que le lexique n’est pas
un domaine autonome, il maintient des rapports avec la morphologie flexionnelle et
avec la syntaxe.
De cette double caractéristique du lexique, ensemble ouvert et non-autonome, il
en résulte que les descriptions lexicales seront toujours partielles et complémentaires.

II. LES MÉTHODES.

Actuellement, la lexicologie systématise le lexique d’une façon rigoureuse, en


s’inspirant des concepts de la logique et de la phonologie.

II. 1. Le modèle logique.


La lexicologie définit le concept de champ (lexical, sémantique, notionnel,
morphologique, etc.) à partir du concept logique de classe : une classe est un ensemble
d’objets définis par le fait qu’ils possèdent tous et possèdent seuls un ou plusieurs
caractères communs et qui correspondent à un concept ou une notion.
D’un point de vue logique, l’ensemble de caractères communs que possèdent
tous ces objets s’appelle compréhension du concept.
L’extension du concept est l’ensemble des objets réels ou imaginaires, concrets
ou abstraits auxquels se réfère ce concept, l’ensemble de ses référents.
Lorsqu’une classe A et une classe B sont dans un rapport tel que l’extension de
la première est une partie de la seconde ( A< B) (rapport d’inclusion), on dit que A est
une espèce de B, et que B est un genre de A.
L’espèce a donc une plus grande compréhension que le genre, mais une plus
petite extension, c’est-à-dire du point de vue de l’extension, le genre inclut l’espèce,
mais du point de vue de la compréhension, l’espèce inclut le genre.
Les genres et les espèces s’organisent en séries hiérarchisées, de sorte que le
genre d’une série donnée peut figurer à titre d’espèce dans une série plus abstraite :
chauffeuse < chaise < siège < meuble < objet fabriqué < objet.
Le genre le plus faible en extension de tous les genres qui comprennent une
espèce donnée est le genre prochain : meuble est le genre prochain de siège. Les autres
sont appelés genres éloignés.
On appelle champ générique [ou lexical] l’ensemble des classes qui ont en
commun un même genre.
II. 2. Le modèle phonologique.
La phonologie et les concepts qu’elle a établis ont pris valeur d’exemple pour la
lexicologie. Les concepts les plus importants sont :

II. 2. 1. La commutation
Si l’on applique l’épreuve de la commutation à l’étude du lexique, on peut
constater qu’elle est très féconde. Par exemple, si l’on reprend l’exemple des sièges et
que l’on considère la phrase : Pour pouvoir s’asseoir, l’homme a fabriqué... toutes les
unités lexicales désignant un siège peuvent commuter.
Le test de la commutation permet donc, selon les contextes significatifs choisis,
d’établir des listes de mots substituables, car ils présentent des traits sémantiques en
commun, c’est-à-dire une même compréhension. On établit ainsi des classes (ou des
champs).

II. 2. 2. La notion de trait pertinent


Si l’on reprend le champ lexical des sièges, ceux-ci présentent en commun le fait
d’être des substantifs qui dénotent des objets matériels fabriqués pour s’asseoir : ce sont
là des traits non pertinents. Ce qui les oppose sont les traits pertinents . Ces traits
pertinents ont reçu des noms très variés : figures de contenu (Hjelmslev), composants
sémantiques (linguistique américaine) ou sèmes (Greimas, Pottier, sémantique
structurale).
On définit le sème comme l’unité sémantique minimale de différenciation, et
donc toujours réalisée à l’intérieur d’une configuration sémantique ou sémème. Il faut
insister sur le fait qu’un sème est un trait pertinent : il est issu de la comparaison de la
signification des unités lexicales du champ étudié et il entre dans une série
d’oppositions : un sème est un concept relatif, il est différentiel.
Le sémème est l’unité sémantique qui a pour correspondant formel le lexème. Il
s’agit de l’ensemble de traits sémantiques qui constituent la dénotation d’une unité
lexicale, c’est-à-dire « l’ensemble stable, non subjectif et analysable hors du discours du
signifié d’une unité lexicale. » (Dubois et alii, Dictionnaire de linguistique, Larousse,
1978 : 139). La dénotation s’oppose à la connotation, qui est constituée par les éléments
subjectifs ou variables selon les contextes.
On peut considérer qu’il existe un langage de la connotation, qui résulte de
l’association d’un signifiant constitué par le langage de la dénotation et d’un signifié
dérivé ou second

(signifiant + signifié)
Langage de la dénotation
SIGNIFIANT + SIGNIFIÉ

langage de la connotation

II. 2. 3. La notion de marque


On peut appliquer la notion de marque de la phonologie au domaine de la
lexicologie, surtout pour certains couples de mots, comme
- Les parasynonymes : étalon (+) / cheval (-) ; circonspection (+) / attention (-) ; caste
(+) / classe (-).
- Les antonymes : femme (+) / homme (-) ; nuit (+) / jour (-) ; court (+) / long (-) ; bas
(+) / haut (-) ; mou (+) / dur (-) ; étroit (+) / large (-).
D’une façon générale, on constate que le terme marqué est moins fréquent que le
terme non marqué.

II. 2. 4. La notion de neutralisation


La notion de neutralisation peut être utilisée en lexicologie, du moins
analogiquement. Par exemple, nous pouvons établir l’opposition plaisir / joie, et
constater que, dans certains cotextes, l’opposition est tout à fait pertinente, surtout
quand plaisir désigne une sensation. Dans d’autres contextes, l’opposition est
neutralisée, et il existe deux cas :
- les contextes où les deux lexèmes sont possibles : « je fais telle chose avec plaisir /
joie ». On peut affirmer que dans ces contextes ils sont en variation libre.
- les contextes où seul le lexème plaisir est possible : « faire quelque chose pour le
plaisir », « faire plaisir à quelqu’un », « à plaisir » .
II. 2. 5. La notion d’archiphonème
En lexicologie structurale, on crée la notion d’archisémème à partir de la notion
phonologique d’archiphonème : il s’agit de l’ensemble des traits sémantiques qui
subsistent en cas de neutralisation de deux unités lexicales.
Quand l’archisémème a un correspondant formel, c’est-à-dire un signifiant, on
l’appelle archilexème. L’unité lexicale siège sera l’archilexème de [chaise, fauteuil,
pouf, tabouret, canapé, ...].
Parfois, quand pour un champ lexical donné il n’existe pas d’archilexème, on
peut le créer de façon néologique ou par emprunt. C’est le cas de deux-roues, gaz,
agrume.

***

L’application à la lexicologie des concepts et notions élaborés par la phonologie


ne relève pas d’une correspondance rigoureuse entre ces deux domaines de la
linguistique. Il s’agit plutôt d’une analogie, puisqu’il existe beaucoup de différences.

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