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C ONTENTS

Krystyna Szarzyńska, THE URUKEAN ARCHPRIEST E N IN THE ARCHAIC PERIOD.


A FEW REMARKS ON HIS FUNCTIONS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
Małgorzata Sandowicz, ‘FEAR THE OATH!’ STEPPING BACK FROM OATH TAKING
IN FIRST MILLENNIUM B.C. BABYLONIA . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
Benedetto Bravo, TRE LETTERE DI MERCANTI DEL MAR NERO SETTENTRIONALE
RIVISITATE. SUI MODI DI ORGANIZZAZIONE E GLI ATTORI DEL COMMERCIO
E SULLA ‘GIUSTIZIA PRIVATA’ IN PÓLEIS ED EMPÓRIA . . . . . . . . . . . . . 37
Katarzyna Balbuza, LA CONCEPTION D’AETERNITAS DANS LE MONNAYAGE DE
CONSÉCRATION ROMAIN DE L’ÉPOQUE DU PRINCIPAT . . . . . . . . . . . . 93
Krzysztof Rzepkowski, JEROME, PALLIATAE, AND VETERES COMICI. A NOTE TO
HIER. EP. 57.5.5 (DE OPTIMO GENERE INTERPRETANDI) . . . . . . . . . . . . 109
Paweł Janiszewski, THE ENIGMATIC HISTORIAN PARTHENIOS OF PHOKAIA,
THE ETHNIKA OF STEPHANUS OF BYZANTIUM AND THE HISTORIOGRAPHY OF
THE TURN OF THE 5TH AND 6TH CENTURIES . . . . . . . . . . . . . . . . . 115

Varia
Marek Stępień, THE FOUNDATION INSCRIPTION OF KING AMAR-SUENA OF THE
THIRD DYNASTY OF UR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
Steven Ross Murray, William A. Sands, Douglas A. O’Roark, THROWING
THE ANCIENT GREEK DORY: HOW EFFECTIVE IS THE ATTACHED ANKYLE AT
INCREASING THE DISTANCE OF THE THROW? . . . . . . . . . . . . . . . . 137

PALAMEDES 6 (2011) 3
Contents

Reviews
Rafał Rosół, Wschodnie korzenie kultu Apollona. Studium lingwistyczno-historyczne
[The Oriental Roots of the Cult of Apollo: A Linguistic-Historical Study],
Kraków: Nomos 2010 (Mikołaj Szymański). . . . . . . . . . . . . . 153
Roger S. Bagnall, Early Christian Books in Egypt, Princeton – Oxford:
Princeton University Press 2009; Roger S. Bagnall, Livres chrétiens
antiques d’Égypte, Genève: Librairie Droz 2009 (École Pratique des
Hautes Études, Sciences Historiques et Philologiques. Hautes Études
du monde gréco-romain 44) (Ewa Wipszycka-Bravo) . . . . . . . . 157
BOOKS OF INTEREST (eds Piotr Berdowski et al.) . . . . . . . . . . . . . . . . 169

4 PALAMEDES 6 (2011)
Katarzyna Balbuza

L A CONCEPTION D’AETERNITAS DANS


LE MONNAYAGE DE CONSÉCRATION
ROMAIN DE L’ÉPOQUE DU PRINCIPAT*

C omme l’a écrit Franz Cumont « La notion de l’éternité des Césars est en
effet étroitement unie à celle de leur divinité ».1 L’acte de consécration de l’empereur
romain (consecratio) avait lieu à la suite de la décision du Sénat et était un rite
funéraire le plus honorifique attribué à l’empereur défunt pour ses obligations bien
remplies durant sa vie.2 En conséquence de la consécration, le souverain défunt
était élevé au rang des dieux et transporté dans le monde extraterrestre où il
continuait son « séjour céleste des dieux ».3 Les émissions de consécration étaient
l’un des moyens d’« éterniser » la mémoire du souverain consacré. L’iconographie
et les légendes des monnaies dites « de consécration » sont riches en divers symboles

* Cet article est une version légèrement raccourcie de l’article qui a été publié en fin de 2011 dans
un ouvrage collectif sous la rédaction de L. Mrozewicz et K. Balbuza, intitulé « L’antiquité, ses
chercheurs polonais et le culte du souverain », Poznań 2011, 297–312.
1
F. Cumont, ‘L’éternité des empereurs Romains’, RHL 5 (1896), 439–440.
2
Au sujet de la consécration cf. E.J. Bickermann, Consecratio, Le culte des souverains dans l’Empire
Romain, Vandœuvres-Genève 1973, 1–37; W. Kierdorf, ‘« Funus » und « consecratio ». Zu
Terminologie und Ablauf der römischen Kaiserapotheose’, Chiron 16 (1986), 43–69; S. Price,
Rituals and power. The Roman imperial cult in Asia Minor, Cambridge 1986; P.J.E. Davies, Death
and the emperor: Roman imperial funerary monuments from Augustus to Marcus Aurelius, Cambridge
2000; G. Bonamente, ‘Il ruolo del senato nella divinizzazione degli imperatori’, in J.-M. Carrié,
R. Lizzi Testa (eds), « Humana sapit »: études d’Antiquité tardive offertes à Lellia Cracco Ruggini,
Turnhout 2002, 359–381; P. Zanker, Die Apotheose der römischer Kaiser: Ritual und städtische
Bühne, München 2004.
3
Au sujet de la thèse sur la préexistence des empereurs romains S. Eitrem, ‘Zur Apotheose’, SO
11 (1932), 23–34; L. Berlinger, Beiträge zur inoffiziellen Titulatur der römischen Kaiser. Eine
Untersuchung ihres ideengeschichtlichen Gehalten und ihrer Entwicklung, Diss. Breslau 1935, 38.

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Katarzyna Balbuza

et devises. Parmi eux, apparaît le thème d’Aeternitas,4 et bien qu’il soit rare, il véhicule
une forte charge idéologique et celle de propagande. L’analyse d’un groupe relativement
restreint de monnaies frappées sous le principat après la mort des empereurs romains et
de leurs parents a pour but de montrer une éventuelle évolution et le processus de
maturation du mode d’expression de l’idée d’Aeternitas dans le contexte du défunt.
L’exemple le plus ancien des monnaies de consécration munies de conception
d’Aeternitas sont des monnaies provinciales, frappées sous Tibère, probablement
après 15 de notre ère,5 dans les capitales des provinces romaines de Tarraconaise et
de Lusitanie: Tarraco et Emerita. Elles constituent une réminiscence de la
consécration du premier Princeps, ce qui eut lieu par la volonté du Sénat, à peine
un mois après la mort d’Auguste c’est-à-dire le 17 septembre 14 ap. J.-C.6 À Tarraco
ont été frapées six séries de cuivre et de laiton dédiées au divin Auguste.7 Trois
d’entre elles sur l’avers portent l’inscription DIVVS AVGVSTVS PATER,8 les trois
autres, celle de DEO AVGVSTO.9 Une série de chaque groupe a été consacrée à la
conception d’Aeternitas.10 La série avec la légende DIVVS AVGVSTVS PATER,
frappée en cuivre, représente sur l’avers la tête d’Auguste défunt à la couronne
radiale (à gauche), ce qui met en relief encore plus son statut divin,11 par contre
sur le revers, se trouvent un temple à huit colonnes et l’inscription suivante:
C(olonia) V(ictrix) T(ogata) T(arraco) AETERNITATIS AVGVSTAE.12 La deuxième
série, munie sur l’avers d’une dédicace DEO AVGVSTO, représente Auguste sur le
trône, tenant dans la main droite une petite statue de Victoire sur le globe et dans
la main gauche un sceptre.13 Le revers contenant une dédicace identique, comme

4
B.V. Koehne, ‘Über die Darstellung der Vorsehung und der Ewigkeit (Providentia und Aeternitas)
auf römischen Münzen’, Zeitschrift für Münz-, Siegel-und Wappenkunde 4 (1844), 161–194; W.
Koehler, Personifikationen abstrakter Begriffe auf römischer Münzen, Diss. Königsberg 1910, 23–43;
M. Bernhart, Handbuch zur Münzkunde der römischen Kaiserzeit, Halle 1926, 81–84; L. Berlinger,
Beiträge zur inoffiziellen Titulatur, 25–42; P.N. Schulten, Die Typologie der Römischen Konsekrations-
prägungen, Frankfurt 1979, 32–33.
5
Au sujet de la datation cf. D. Fishwick, ‘Coinage and cult: the provincial monuments at
Lugdunum, Tarraco and Emerita’, in G.M. Paul, M. Ierardi (eds), Roman coins and public life under
the Empire (E. Togo Salmon Papers II), Ann Arbor 1999, 104.
6
Cass. Dio 56. 3–4; Suet. Aug. 100.
7
Toutes les séries: RPC I, 218–223.
8
RPC I, 218–220.
9
RPC I, 221–223.
10
RPC I, 219 (aw.: DIVVS AVGVSTVS PATER); RPC I, 222 (DEO AVGVSTO).
11
Au sujet de la corona radialis voir L. Stephani, Nimbus und Strahlenkranz in den Werken der alten
Kunst, St. Petersburg 1859; M. Bergmann, Die Strahlen der Herrscher: theomorphes Herrscherbild
und politische Symbolik im Hellenismus und in der römischen Kaiserzeit, Mainz 1998.
12
RPC I, 219.
13
Selon D. Fishwick, ‘Coinage and cult’, 105, le projeteur de l’iconographie de l’avers avec Auguste
sur le trône devait s’inspirer des statues connues ou sur les bas-reliefs représentant Auguste
comme divinité.

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La conception d’Aeternitas dans le monnayage

dans le cas précédent, à Aeternitas, mais dépourvu de son image, montre un temple
à huit colonnes. Les autres monnaies sur les revers desquelles a été omise
l’invocation à Aeternitas, mais qui sont sans aucun doute dédiées à Auguste défunt,
ont sur les revers un autel ou une couronne. Après 21–22 de notre ère, encore une
série de consécration a été émise (en cuivre), dont les iconographies du revers, de
la légende de l’avers et du revers ne sont pas différentes de deux séries mentionnées
plus haut avec Aeternitas. Une différence se trouve seulement dans l’iconographie
de l’avers. DEVS AVGVSTVS trône ici sur une sella curulis, tenant un plateau et
un sceptre.14 À Emerita, la capitale de la Lusitanie, ont été frappées des séries de
monnaies semblables, mais le nombre de toutes les séries de consécration est
supérieur à celui de Tarraco; dix-huit en étaient émises aussi bien en cuivre qu’en
bronze,15 mais il y a uniquement une série avec Aeternitas qui nous intéresse.
Frappée en bronze, elle a été dédiée à AETERNITATI AVGVSTAE (C(olonia)
A(ugusta) E(merita)). Cette inscription se trouve à côté de l’image d’un temple
appuyé sur quatre colonnes. Sur l’avers signé DIVVS AVGVSTVS PATER, se trouve
une représentation de la tête d’Auguste à la couronne radiale (à gauche).16
En ce qui concerne les monnaies venant de deux villes espagnoles, décrites
ci-dessus, liées au thème d’Aeternitas deux problèmes apparaissent pour les
chercheurs. L’un d’entre eux est lié à l’identification des temples se trouvant sur les
revers, le deuxième par contre, à la légende c’est-à-dire à l’établissement du
caractère de cette dédicace à l’éternité impériale peu commune.
Le temple dont l’image se trouve sur les revers de Tarraco17 est une
construction à huit colonnes dans le style corinthien (composite?), élevé sur un
haut podium. Son toit est orné de trois acrotères de palmier, par contre au centre
du tympan se trouve un clipeus (un disque, une phalère?). Il s’agit probablement
du temple dédié à divus Augustus, la construction duquel demandèrent au Sénat
romain en 15 ap. J.-C. les habitants de Tarraco (Colonia Iulia Triumphalis Tarraco).
L’auteur de cette information est Tacite qui nous informe aussi de l’avis positif
donné par le Sénat dans cette affaire-là.18 Il dit en même temps qu’un exemple
a ainsi été montré à toutes les provinces (« datumque in omnes provincias
exemplum »).19 Le temple faisait partie d’un énorme cercle religieux et était

14
RPC I, 224.
15
Toutes les séries: RPC I, 20–37.
16
RPC I, 29.
17
La description du temple de Tarraco: D. Fishwick, The Imperial cult in the Latin West, vol. 1.1,
152; idem, ‘Coinage and cult’, 103; idem, The Imperial cult in the Latin West, vol. 3.3, Leiden 2004,
7–40 (ici aussi de vastes informations sur le culte de Tarraco).
18
Tac. Ann. I 78.1.
19
Nous ne savons pas si Tacite pensait à toutes les provinces de l’Imperium Romanum (ainsi, D.
Fishwick, ‘The Development of provincial ruler worship in the Western Roman Empire’, ANRW

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Katarzyna Balbuza

probablement le centre du culte provincial d’Auguste,20 bien que nous ne puissions


pas exclure qu’il était aussi dédié à Aeternitatis Augustae. Le temple représenté sur
les monnaies frappées à Emerita est beaucoup plus petit par rapport à celui de
Tarraco, bien qu’il lui ressemble. C’est une construction de quatre colonnes à peine,
aussi dans le style corinthien et un clipeus se trouve sur le tympan. Dans ce cas-là,
nous sommes aussi impuissants dans la question de l’établissement de la date de la
construction, de la fonction du temple ou de sa localisation.21
Problématique est aussi la question des légendes qui ornent les revers des
monnaies de Tarraco et Emerita. Leur contenu est le suivant respectivement: CVTT
AETERNITATIS AVGVSTAE et AETERNITATI AVGVSTAE CAE est semblable et
la différence se trouve uniquement dans le nom du centre provincial. Si l’inscription
sur la monnaie devait se rapporter directement aux temples de Tarraco et
d’Emerita, nous pourrions admettre qu’ils étaient dédiés justement à Aeternitati
Augustae.22 Pourtant, si nous considérons que la copie de l’inscription DEO
AVGVSTO retrouvée au XVIIIe siècle venait du temple de Tarraco, alors nous
devons mettre un point d’interrogation à nos suppositions.23 Il est difficile de
constater definitivement si ce sont les images des temples d’Auguste qui étaient

II, 16.2 [1978], 1211–1213; idem, The Imperial cult in the Latin West, vol. 1.1, 155; M.
Jaczynowska, ‘Religion of loyalty under Augustus and Tiberius’, Antiquitas 18 [1993], 78),
toutes les provinces hispaniques (ainsi, R. Étienne, Le culte impérial municipal dans la pénisule
Ibérique d’Auguste à Dioclétien, Paris 1958, 406), ou bien tous les centres de la province de
Tarraconaise (ainsi, F.R.D. Goodyear, The Annals of Tacitus. Books 1–6, vol. 2: Annals 1.55–81
and Annals 2, Cambridge 1981, 176–177).
20
Cf. D. Fishwick, ‘Four temples at Tarraco’, in A. Small (ed.), Subject and ruler: the cult of the
ruling power in classical antiquity. Papers presented at a conference held in the University of Alberta
on April 13–15, 1994, to celebrate the 65th anniversary of Duncan Fishwick, (Journal of Archaeology.
Supplementary Papers 17) Ann Arbor 1996, 178. L’établissement de la date de la construction
du temple pose toujours des problèmes. G.F. Hill, (Notes on the Ancient coinage of Hispania
Citerior, [Numismatic Notes and Monographs, 50] New York 1931, 49) considère que le temple
a été construit sous Tibère. Fishwick (The Imperial cult in the Latin West, vol. 1.1, 152, note 17;
idem, ‘Four temples at Taracco’, 181; idem, ‘Coinage and cult’, 105; idem, The Imperial cult in the
Latin West, vol. 3.3, 22–30) est par contre d’avis que le temple a été élevé plus tard et les
émissions annoncent seulement ce fait informant en même temps de l’autorisation de
construction donnée par le Sénat et présentant le projet architéctonique du temple. Il est
difficile de trancher court combien l’iconographie des temples sur les revers des monnaies
hispaniques correspond à leur réelle apparition. Cf. P.-P. Ripollès, ‘Coinage and identity in the
Roman Provinces: Spain’, in C. Howgego, V. Heuchert, A. Burnett (eds), Coinage and identity in
the Roman provinces, Oxford 2005, 89–90.
21
Au sujet du temple: H. Hänlein-Schäfer, Veneratio Augusti. Eine Studie zu den Tempeln des ersten
römischen Kaisers, Roma 1985, 231–232; Fishwick, ‘Coinage and cult’, 112–115; idem, The Imperial
cult in the Latin West, vol. 1.1, 157, n. 46; vol. 3.3, 41–69 (ici aussi largement sur le culte d’Emerita).
22
Cf. Hill, Notes on the Ancient coinage, 49; D. Mannsperger, ‘ROM. ET AVG. Die Selbstdarstellung
des Kaisertums in der römischen Reichsprägung’, ANRW II.1 (1974), 946.
23
CIL II. 4093. La discussion à ce sujet: Fishwick, The Imperial cult in the Latin West, vol. 1.1, 153–154.

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La conception d’Aeternitas dans le monnayage

érigés dans les deux villes mentionnées ci-dessus,24 ou bien, si c’est une manifestation
précoce d’un éventuel culte d’Aiôn.25
L’expression Aeternitati Augustae sur les monnaies d’Hispanie était adressée
à un empereur consacré qui siègeait déjà au panthéon de dieux et pour cette raison
la vie éternelle lui était due comme à chaque autre divinité.26 Les monnaies
montrent le temple consacré au divin Auguste et le culte était renforcé par
l’attribution d’Auguste à l’éternité impériale.27 Il ne s’agit pas ici d’Aeternitas de la
dynastie ou du régime dont Auguste était créateur comme le constate avec justesse
Charlesworth.28
Une autre explication des légendes suppose que les temples étaient consacrés
au divin Auguste, par contre les légendes AETERNITATI AVGVSTAE devaient être
la preuve de désorientation dans la question de la terminologie liée à l’évocation de
l’empereur divinisé dans la phase précoce du développement du culte impérial. Les
émissions hispaniques ont apparu en même temps que ce phénomène. Définir
l’empereur défunt consacré comme éternel, ou bien nommer l’état dans lequel il
s’est trouvé comme éternité, n’ont pas été acceptés dans la terminologie du culte
impérial. Est-ce que les monnaies d’Hispanie étaient donc la preuve de la
désorientation et du chaos terminologiques dans la question de la formule de
l’évocation de l’empereur divinisé? Ce raisonnement semble être confirmé par les
émissions au nom de l’empereur en vie, Tibère. À part la série de consécration
dédiée directement au divin Auguste mentionnée plus haut, à Tarraco ont été
frappées des monnaies au divin Auguste au nom de Tibère. Les revers étaient dédiés
au divin Auguste29 et contenaient la tête d’Auguste à la couronne radiale, par
contre, l’iconographie des avers représentait la tête de Tibère à la couronne de
laurier. Sur ces monnaies, le mot AETERNITAS n’était pas écrit. Ce qui est
étonnant, ce mot se trouvait sur les monnaies frappées en bronze ou en cuivre au
nom de Tibère. À Tarraco, une telle série a été émise. Ses revers étaient ornés de
l’image déjà connue du temple à huit colonnes et de l’inscription suivante CVTT
AETERNITATIS AVGVSTAE.30 De même, à Emerita, des monnaies d’un contenu
presque identique ont apparu. Frappées au nom de Tibère et munies de sa
représentation à la couronne de laurier, elles ont sur le revers une dédicace bien

24
Cumont, ‘L’éternité des empereurs Romains’, 437.
25
R. Reitzenstein, Das iranische Erlösungsmysterium, Bonn 1921, 220. Berlinger (Beiträge zur
inoffiziellen Titulatur, 30–31) est de l’avis opposé.
26
Fishwick, ‘Coinage and cult’, 104.
27
Fishwick, The Imperial cult in the Latin West, vol. 3.3, 43.
28
M.P. Charlesworth, ‘Providentia and Aeternitas’, HThR 29 (1936), 124.
29
RPC I, 228–231. C’étaient quatre séries; sur l’avers, la légende: TI CAESAR DIVI AVG
F AVGVSTVS. Sur le revers: DIVVS AVGVSTVS PATER CTT.
30
RPC I, 226. L’avers: la tête de Tibère à la couronne de laurier; la légende: TI CAESAR DIVI AVG
F AVGVSTVS.

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Katarzyna Balbuza

connue: AETERNITATI AVGVSTAE CAE ainsi que le temple qui s’appuie sur
quatre colonnes.31 Ces deux émissions, frappées en bronze et en cuivre font partie
de neuf séries frappées au total au nom de Tibère.32 Le thème de l’éternité dans les
émissions provinciales en Hispanie est présent alors dans le contexte de l’empereur
vivant, Tibère, ce qui est surprenant. Il est frappant que ce thème n’était plus traité
sous Tibère, ni dans le monnayage des autres provinces ni à Rome elle-même. En
plus, la conception d’Aeternitas à l’égard de l’empereur consacré, apparaîtra seulement
sous les Flaviens. Titus a décidé de la sorte d’éterniser la mémoire de Vespasien; il
est intéressant de voir qu’il a décidé de le faire non pas l’année de la mort de son
père, en 79, mais avant sa mort, dans les années 80–81. La série en l’honneur de
divus Vespasianus ne concernait que des as. Sur l’avers se trouvait la légende
suivante: DIVVS VESPASIANVS AVG qui entourait la tête de l’empereur bien-aimé
à la couronne de laurier. Le revers muni d’une inscription AETERNIT AVG SC
représentait Aeternitas debout (à droite) et tenant dans les mains une lance et une
corne d’abondance.33 Le choix de ces attributs fait réfléchir d’autant plus que c’est
justement sous Vespasien que dans le monnayage romain a été présentée la
personnification d’Aeternitas. Alors, dans ses mains étaient mises les têtes du soleil
et de la lune comme ses attributs. Le remplacement par Titus des têtes du soleil et
de la lune par une corne d’abondance et une lance peut s’expliquer par le fait que
les monnaies de consécration d’alors devaient témoigner du statut divin du défunt,
d’où cette symbolique différente d’un côté, et de l’autre, peut avoir raison Jean
Beaujeu qui explique cette modification par l’intention de Titus de rompre avec les
ressentiments égyptiens de Vespasien.34 Telle est la genèse de l’iconographie
d’Aeternitas, présentée sous Vespasien avec le soleil et la lune. En général, les deux

31
RPC I, 47–48. La légende de l’avers: TI CAESAR DIVI AVG F AVGVSTVS.
32
Toutes les monnaies: RPC I, 41–49. La légende de l’avers: TI CAESAR DIVI AVG F AVGVSTVS.
33
BMC II, Titus, 251§, 277 (Rome). Comp. RIC II.12, Titus 380 (As); 381 (As). Harold Mattingly
(lxxvi), et après lui K. Scott (The imperial cult under the Flavians, Stuttgart-Berlin 1936, 42)
inclusent aux monnaies de consécration trois autres as. Elles portent comme celles ci-dessus,
l’invocation à Aeternitas, leur frappe eut lieu au même moment et est presque conforme
à l’iconographie du revers. L’unique élément qui ne s’accorde pas avec la série de divus Vespasianus
est le globe sur lequel Aeternitas appuie le pied. La légende de l’avers IMP T CAES VESP AVG
P M TR P COS VIII, et selon la classification du catalogue de Mattingly, ces monnaies ont été
frappées plutôt sans une occasion particulière. Est étonnant alors le commentaire de l’auteur qui
une fois les inclut à la série de consécration (dans le préambule), une autre fois, ne les y inclut
pas (catalogue, 265–266, n° 206–208). Scott répète l’avis de Mattingly du préambule du catalogue
que dans le cas de la déification de Vespasien, deux genres iconographiques différents ont été
frappés. Il est difficile de partager cette opinion. Les as décrits ont probablement été frappés
dans le contexte de propager l’idée de l’éternité, mais sans aucun doute à l’égard de Titus,
comme représentant de la dynastie. Le globe sous le pied d’Aeternitas suggère que ce genre, bien
qu’il soit unique qui nous est connu, avait une application d’État générale.
34
J. Beaujeu, La religion romaine à l’apogée de l’Empire. I. La politique religieuse des Antonins (96–192),
Paris 1955, 148 et la note 4.

98 PALAMEDES 6 (2011)
La conception d’Aeternitas dans le monnayage

nouveaux attributs d’Aeternitas signifient la majesté et la prospérité de l’État.


Harold Mattingly considère que l’iconographie de ce genre-là, devait se rapporter
plutôt au grand avenir de la ligne dynastique des Flaviens qu’au passé et devait en
même temps exprimer l’idée de continuité de la dynastie.35 Plaçant le motif
d’Aeternitas parmi d’autres thèmes sur la série consacrée au divin Vespasien, Titus
s’est référé à la religion d’État signalant qu’après la consécration et l’apothéose de
son père, lui aussi en tant que son successeur, participe à la majesté divine.36 Il n’est
pas exclu que la décision de Titus sur la verbalisation de l’état de l’éternité de l’âme
de Vespasien sur les monnaies décrites ci-dessus, résultait de l’intention de renouer
volontairement à une telle tradition de l’époque de Tibère, et par cela, à la série de
consécration en l’honneur d’Auguste, sur laquelle était lancée l’idée de l’éternité.
Titus s’est décidé pourtant à personnifier Aeternitas, ce qui ne se trouve pas sur les
monnaies de Tibère, et il l’a fait rendant ainsi l’honneur à son père, qui a comme
premier introduit à l’iconographie le modèle de la personnification d’Aeternitas.
Dans la deuxième moitié du IIe siècle,37 le thème de l’éternité de l’âme de
l’empereur apparaît avec une double force. Les émissions de consécration avec le
thème d’Aeternitas, rappelé intensivement ont été dédiées à Faustine l’Ancienne,
l’épouse de l’empereur Antonin le Pieux, morte à l’âge de 35 ans environ.38 Le Sénat
donna une décision sur la constitution du culte, sur la construction d’un temple et
sur la constitution des prêtresses.39 Les monnaies sur lesquelles a été propagée la
figure d’Aeternitas de la défunte ont été frappées surtout dès le moment de sa mort,
c’est-à-dire de 141 ap. J.-C. et successivement au cours de vingt années jusqu’à la
mort d’Antonin. Ces monnaies ont été émises par la Monnaie de Rome aussi bien
au nom de l’empereur que du Sénat, en toutes sortes de métaux et de valeurs
y compris des médaillons. Ces monnaies sont exceptionnelles à cause de la diversité
de la symbolique appliquée et de leur iconographie.

35
H. Mattingly, Coins of the Roman Empire in the British Museum, vol. 2, London 1966, lxxvi. Cf.
Scott, The imperial cult under the Flavians, 42.
36
Mattingly, Coins of the Roman Empire, vol. 2, lxxvii.
37
R.O. Fink, A.S. Hoey, W.F. Snyder, The Feriale Duranum, YCIS VII, 1940, 1–222, dans le
commentaire au calendrier Feriale Duranum propagent l’hypothèse que le contexte de consécration
pouvaient avoir aussi les émissions munies de la légende AET AVG des temps de Trajan (RIC
II, Trajan 91; 229; 241 – une allusion plausible à la consécration d’Ulpia Marciana) et de ceux
d’Hadrien (RIC II, Hadrian 38; 48; 114–115 – une allusion à la consécration de Salonina Matidia;
RIC II, Hadrian 597 – une allusion à la maladie et à la mort d’Hadrien), bien que sur leur avers
soient absentes des preuves du contexte de consécration.
38
HA, Ant. VI 7–8. La mort de Faustine eut lieu entre le 10 juillet 140 et le 9 juillet 141. À la base
des établissements exacts, elle survint d’octobre à novembre 140. Cf. S. Walentowski, Kommentar
zur Vita Antoninus Pius der Historia Augusta, Bonn 1998, 135, 204. D. Kienast, Römische
Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt 1996 (2e édition), 136, place
ce fait à la fin du mois d’octobre 140.
39
HA, Ant. VI 7–8; CIL VI 938; 1005.

PALAMEDES 6 (2011) 99
Katarzyna Balbuza

À la suite de l’analyse de cet énorme groupe de monnaies de consécration,


propageant la conception d’éternité de l’épouse de l’empereur, nous pouvons
distinguer plusieurs types de thèmes présents sur les revers. Un motif hors du
commun est présent sur les monnaies avec un temple élevé pour la divine Faustine
dans lequel se trouve une statue de l’impératrice défunte. Si nous regardons
attentivement l’iconographie sur le revers, nous voyons la triade capitoline sur le
tympan, par contre ses côtés sont ornés par deux Victoires (Aeternitas?) avec les
boucliers (globes?). À côté des bases de deux colonnes extérieures du temple, se
trouvent deux personnages dont l’un tient des cornucopiae. Le contenu de la légende
qui entoure la scène est bref mais significatif: AETERNITAS.40 Un autre groupe de
monnaies intéressant sont celles qui représentent sur le revers la défunte Faustine,
assise dans un carpentum, attelé de deux éléphants,41 ou de deux lions.42 Un grand
ensemble de monnaies ont été embellies de personnifications féminines des
représentations de dieux parmi lesquels nous reconnaissons Junon (avec la main levée
et un sceptre),43 Fortune (avec un globe et un gouvernail),44 Cérès (avec des épis de blé
et une torche,45 une torche,46 une torche et une charrue47), Vénus (en voile qu’elle
rajuste et un sceptre),48 ou enfin Vesta (avec un sceptre ou une lance)49 et Concorde.50
Sur les autres revers, nous reconnaissons toute une gamme de person-
nifications féminines des vertues impériales, comme l’incarnation de la providence,
Providentia (debout,51 assise52 avec un globe et un sceptre; levant la main droite,
à gauche avec un globe;53 avec la main gauche enlevant le voile, tenant dans la main
droite un globe, étendant un manteau au-dessus de la tête [?]54), ou encore
l’incarnation de la piété Pietas (debout auprès de l’autel, levant la main droite,
tenant dans la main gauche un brûleur à encens55).

40
RIC III, Ant. 354. Avers: DIVA FAVSTINA (Au). Cf. aussi RIC III, Ant. 1115 (S) et RIC III,
Ant. 1168 (Dp/ As). Cf. P. Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung des zweiten
Jahrhunderts. Die Reichsprägung zur Zeit des Antoninus Pius, vol. 3, Stuttgart 1937, 93, qui
a reconnu dans les deux acrotères les statuettes d’Aeternitas tenant des globes.
41
RIC III, Ant. 352 (Au); RIC III, Ant. 1112 (S); RIC III, Ant. 1113 (S); RIC III, Ant. 1166 (Dp/ As).
42
RIC III, Ant. 1114 (S); RIC III, Ant. 1167 (Dp/ As).
43
RIC III, Ant. 344 (Au); 345 (D); 1102 (S); 1155 (Dp/ As).
44
RIC III, Ant. 348 (Au); 349a (Au); 349b (Au); 1107 (S/ Dp/ As); 1160 (Dp/ As).
45
RIC III, Ant. 1099 (S); 1154 (Dp/ As).
46
RIC III, Ant. 1100 (S).
47
RIC III, Ant. 1101 (S).
48
RIC III, Ant. 346a (D); 346b (D).
49
RIC III, Ant. 1103 (S).
50
Coh. 48 (D).
51
RIC III, Ant. 350a (Au); 350b (Au); 1108 (S); 1109 (S); 1163a (Dp/ As); 1163b (Dp/ As).
52
RIC III, Ant. 1110 (S).
53
RIC III, Ant. 1164 (Dp/ As).
54
RIC III, Ant. 351 (D).
55
RIC III, Ant. 1161 (Dp/ As); 1162 (Dp/ As).

100 PALAMEDES 6 (2011)


La conception d’Aeternitas dans le monnayage

Les personnifications ci-dessus ne sont pourtant pas représentées aussi


fréquemment comme celle qui symbolise Aeternitas. La diversité de représentations,
la multitude de symboles et d’attributs que nous rencontrons ici sont tellement
grandes qu’il est dificile de formuler d’une manière univoque et précise un modèle
d’iconographie typique d’Aeternitas. Sur l’une des monnaies, elle a été représentée
debout en face, avec la tête dirigée à gauche. Dans sa main droite repose un globe,
avec la main gauche, elle relève le rebord de sa robe. Au-dessus de sa tête, s’étend
un manteau étoilé (de deux côtés de la tête, se trouvent quatre étoiles).56 Ce motif
a été répété sur une série de dupondius et d’as signés avec la légende AVGVSTA
S(enatus) C(onsulto), où Aeternitas tient une torche,57 ou bien sans aucun attribut
(à part le manteau) est dirigée à gauche.58 Un autre insigne d’Aeternitas est un
phénix; une silhouette féminine debout tient sur la main droite l’oiseau mythique
entouré d’une auréole; sa main gauche fait un geste de relèvement du rebord de la
robe traditionnel.59 Dans une autre prise, le phénix est assis sur le globe et Aeternitas
assise, le tient dans la main droite, par contre, dans la main gauche, elle tient un
sceptre,60 ou bien encore, debout, elle relève avec la main gauche le rebord de sa
robe.61 Dans une autre scène, Aeternitas, debout, tenant dans la main droite le globe
avec le phénix entouré d’une auréole, relève de nouveau avec la main gauche le
rebord de sa robe.62 Dans une manière intéressante, Aeternitas est montrée sur l’un
des médaillons,63 où de profil gauche, elle tient dans la main droite le globe avec le
phénix et avec le coude gauche, elle s’appuie sur une basse colonne. Le globe cette
fois-ci, parsemé d’étoiles est représenté dans une plus grande échelle sur des
dupondius et des as modestes; ici pourtant est assise sur lui Aeternitas dont la main
droite a été dirigée vers la gauche dans la même direction dans laquelle elle regarde,
par contre sa main gauche tient un sceptre64. Parfois, le sceptre est l’unique attribut
d’Aeternitas.65 Dans le groupe de monnaies consacrées à l’éternité, il y en a aussi
celles qui ont été dépourvues de personnifications de dieux ou de vertus. L’unique
motif reste sur elles une étoile (l’inscription AETERNITAS – autour ou à travers la
monnaie, sous l’étoile) ou un trône vide sur lequel est appuyé un sceptre (à travers
le trône), devant le trône, se trouve un paon (à droite ou à gauche).66 Sur les

56
RIC III, Ant. 1106 (S); 1158 (Dp/ As).
57
RIC III, Ant. 1183 (Dp/ As).
58
RIC III, Ant. 1182 (Dp/ As).
59
RIC III, Ant. 347 (D).
60
RIC III, Ant. 1103a (S); 1103b (S); 1104 (S); 1156 (Dp/ As).
61
RIC III, Ant. 1105 (S).
62
RIC III, Ant. 1157 (Dp/ As).
63
Coh. 10 = F. Gnecchi, I medaglioni romani, vol. II, Milano 1912, 24, n° 1, tabl. 56, n° 5 (médaillon
de bronze).
64
RIC III, Ant. 1159 (Dp/ As).
65
BMC IV, Ant. 487 (D).
66
RIC III, Ant. 353 (D).

PALAMEDES 6 (2011) 101


Katarzyna Balbuza

sesterces, les dupondius et les as a été présentée une femme inconnue debout en
face, avec des fleurs et un sceptre.67 Sur l’une des monnaies, une silhouette
féminine non précisée (Aeternitas, Ceres, Diana?) est debout dans un char attelé de
deux chevaux au galop, tenant dans les mains une torche (?).68 Notre attention
attire aussi un médaillon très intéressant qui représente la bataille des Romains
contre les Sabins sur le revers.69 Les revers de toutes les monnaies ci-dessus décrites
ont été munis d’une légende AETERNITAS. Un groupe de monnaies à part sont
des monnaies dont les revers représentent divers personnages (en général des
divinités ou des vertus féminines) et des symboles dont la plupart sont présents
aussi sur les monnaies avec l’inscription AETERNITAS. L’iconographie de ces
monnaies échappe aux tentatives d’une interprétation claire et à l’établissement de
leur connotation concrète à l’éternité bien que leur contexte religieux et de
consécration soit évident.70 Leurs revers ont obtenu les légendes suivantes:
AVGVSTA et CONSECRATIO. Les avers des monnaies, aussi bien celles avec la
légende AETERNITAS que celles du deuxième groupe sont embellis d’un buste de
Faustine, parfois voilé (parfois à la couronne de laurier) et signés: DIVA FAVSTINA,
DIVA AVG(usta) FAVSTINA ou DIVA AVGVSTA FAVSTINA (dans un cas:
DIVAE FAVSTINAE).71
L’analyse de l’iconographie d’Aeternitas qui orne les monnaies de consécration
de Faustine est compliquée à cause des représentations sur les revers ayant plus d’une
signification.72 Le message idéologique des monnaies présentées est en principe
évident. Du fait qu’elles appartiennent au groupe de monnaies posthumes, nous
devrions les analyser dans le contexte de consécration, d’apothéose et du culte de
l’impératrice. La nouveauté consiste pourtant à lancer d’une manière exceptionnelle-
ment intensive Aeternitas, ce qui était fait dans le monnayage de consécration
sporadiquement jusqu’alors. L’emploi du langage symbolique créé sous Antonin
a provoqué un trouble dans la réception universelle des contenus idéologique et
religieux. La personnification d’Aeternitas a été représentée sur les revers de manières

67
RIC III, Ant. 1111 (S); 1165 (Dp/ As).
68
RIC III, Ant. 1131 (S).
69
Coh. 60 = Gnecchi II, 24, n° 2, tabl. 56, n° 6 (médaillon de bronze).
70
Cf. RIC III, Ant. 1131–1134 (S); 1188 (Dp/ As); Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung,
n° 1237 (S); RIC III, Ant. 367 (Au); Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung, n° 477
(D); RIC III, Ant. 1127 (S); 361 (D/ Au); 1121 (S); 1175 (Dp/ As); 382a (D); 365 (Au); 1177
(Dp/ As); 360 (D); 1116, 1117 (S); 1169 (Dp/ As); 357 (Au); 1120 (S); 1174 (Dp/ As); 403 (Au);
356 (Au/ D); 1173 (Dp/ As); 366 (Au/ D); 1130 (S); 1187 (Dp/ As); 372 (Au); Strack,
Untersuchungen zur römischen Reichsprägung, n° 473 (D); Strack, Untersuchungen zur römischen
Reichsprägung, n° 1275 (As); 1120 (S); RIC III, Ant. 404c (Au); 362 (D); 405 (Au).
71
RIC, Ant. 1104.
72
Koehler, Personifikationen abstrakter Begriffe, 23–43; Mattingly, Coins of the Roman Empire, vol. 4,
London 1968, lviii-lxiii et le catalogue.

102 PALAMEDES 6 (2011)


La conception d’Aeternitas dans le monnayage

différentes et une multitude d’attributs souvent nouveaux lui ont été attachés,
comme par exemple le phénix,73 un manteau étoilé étendu au-dessus de la tête, la
torche ou le globe, souvent parsemé d’étoiles symbolisant l’infinité des astres.74 Le
motif de la déesse debout tenant le globe dans la main droite et un manteau étoilé
étendu au-dessus de la tête, peut constituer une comparaison à la sphère céleste
dans laquelle l’impératrice s’est transférée après sa mort. La torche qu’Aeternitas
tient dans la main fait penser aux mystères, par contre le geste de la main levée
vers le ciel peut être interprété comme le symbole de la réconciliation et de la
communauté avec le monde divin.75 À la divinisation sont liés aussi: le trône vide,
l’étoile, le temple ou le carpentum, attelé d’éléphants, les animaux associés à l’éternité.76
Le trône vide77 devait peut-être se référer au culte impérial.78 Le sellisternium était
réservé principalement aux déesses, par contre le paon, l’oiseau sacré de Junon qui
était représenté devant la sella suggère la comparaison du culte de Faustine à Junon
Regina.79 Depuis l’époque de Faustine l’Ancienne cet oiseau devient le symbole de la
consecratio, de l’apothéose et de l’immortalité. Il assume la fonction de psychopompe80
qui conduit l’âme de Faustine à la sphère céleste.81 Dans l’art de cette période-là
sa fonction pouvait être assumée aussi par d’autres créatures,82 un aigle83 ou

73
Le symbole du phénix dans l’art romain, cf. Schulten, Die Typologie der Römischen Konsekration-
sprägungen, 33–34; R. Van den Broek, The myth of phoenix, Leiden 1972, passim.
74
RIC, Ant. 1159.
75
Selon Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung, 100–103, ce geste devrait être considéré
comme le geste le plus caractéristique des représentations d’Aeternitas de cette période-là.
Là aussi, de la symbolique un peu différente de ce geste sur les monnaies d’autres empereurs.
76
Les éléphants dans l’art romain, cf. J. Toynbee, Animals in Roman life and art, London 1973,
24–47. La symbolique du char attelé d’éléphants: Schulten, 40; Strack, Untersuchungen zur
römischen Reichsprägung, 94.
77
De la symbolique du trône sur les monnaies de consécration: Schulten, Die Typologie der
Römischen Konsekrationsprägungen, 41–42.
78
Cf. Tac. Ann. XV 23.
79
La suggestion de Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung, 96. Cet oiseau est représenté
sur les monnaies de consécration de deux Faustines et de Julia Domna (Cf. H. Temporini, Die
Frauen am Hofe Trajans. Ein Beitrag zur Stellung der Augustae im Prinzipat, Berlin 1978, 202, n.
93). Le paon en tant que le symbole de la consécration sur les monnaies: Schulten, 25. De la
symbolique du paon dans le contexte de l’apothéose des femmes, cf. H. Lother, Der Pfau in der
altchristlichen Kunst, Leipzig 1929, 47–50.
80
RIC III, Ant. 353, Strack, Untersuchungen zur römischen Reichsprägung, n° 1237.
81
Des formes de transposition de l’âme du mort dans le monde des dieux: Schulten, Die Typologie
der Römischen Konsekrationsprägungen, 25–30.
82
Cf. U. Geyer, Der Adlerflug im Römischer Konsekrationszeremoniell, Bonn 1967, 32–33.
83
Cf. RIC III, Ant. 1133; 1134; 1188. Schulten, Die Typologie der Römischen Konsekrationsprägungen,
25. L’image de l’aigle (dans diverses prises visuelles) avec l’inscription CONSECRATIO est
présente sur les monnaies de consécration de nombreuses femmes consacrées de la maison
impériale à partir d’Ulpia Marciana (l’ensemble de monnaies de consécration des impératrices
chez Temporini, Die Frauen am Hofe Trajans, 202, note 92) à Julia Maesa (à l’exception de Plotine
et Julia Domna) et de nombreux empereurs consacrés, à partir d’Hadrien jusqu’à Constance

PALAMEDES 6 (2011) 103


Katarzyna Balbuza

Aeternitas84 qui conduisait l’âme de Faustine dans le monde des dieux et la torche
qu’elle tenait symbolisait la vie éteinte. Dans le dernier des cas, le motif de la
représentation a été puisé du bas-relief de l’Arc dit du Portugal (le Palais des
Conservateurs aux Musées du Capitole) représentant l’apothéose de Sabine, l’épouse
d’Hadrien, décédée en 136.85 Par contre, dans le bas-relief que Marc Aurèle a fait
sculpter sur la base de la colonne d’Antonin le Pieux, les âmes des époux défunts
(Antonin et Faustine) sont élevées dans le ciel par un jeune homme aîlé – peut-être
Aiôn (les Musées du Vatican).86
Divers personnages féminins représentés dans le monnayage de consécration
de Faustine l’Ancienne, Junon, Fortune, Vesta, Vénus, et même divine Faustine, ont
été rappelés dans le contexte d’Aeternitas. Ils appartiennent à sa sphère d’une
manière naturelle correspondant à la tradition d’identification des impératrices aux
différentes vertus et déesses que l’impératrice représentait87 (attire notre attention
une inclination particulière à l’égard de Junon,88 Vénus,89 Cérès90 et Cybèle91).
L’ordre de grandeur de l’émission avec le motif d’Aeternitas que nous
rencontrons dans ce cas-là ne résultait forcément pas du changement de la
propagande de la conception d’éternité dans cette période concrète mais elle
pouvait résulter d’une attention particulière d’Antonin le Pieux portée à son épouse
défunte. Le monnayage de consécration de Faustine l’Ancienne avait donc sans
aucun doute un caractère personnel et émotionnel, ce qui est souligné fortement
par Mattingly.92

Chlore (l’ensemble de monnaies de consécration des empereurs cités chez Temporini, Die Frauen
am Hofe Trajans, 201, n. 90). Au sujet de la symbolique et de l’image de l’aigle sur les monnaies
de consécration et l’acte de consécration: F. Cumont, Études syriennes, Paris 1917, 35–118; idem,
Lux perpetua, Paris 1949, 293–296; Geyer, Der Adlerflug im Römischer Konsekrationszeremoniell,
passim; Schulten, Die Typologie der Römischen Konsekrationsprägungen, 22–25.
84
Cf. RIC III, Ant. 1132.
85
Au sujet du bas-relief voir L. Richardson, A new topographical dictionary of ancient Rome, Baltimore
1992, 21–22; S. Stucchi, ‘L’arco detto “di Portogallo” sulla via Flaminia’, BCAR 73 (1949–50),
101–122.
86
Ce motif était déjà représenté sur le Grand Camée de France (Bibliothèque Nationale de France,
Département des Monnaies, Médailles et Antiques, Paris), où un jeune homme aîlé élève sur les
bras l’âme d’Auguste. Cf. A. Furtwängler, Die antiken Gemmen, vol. I, Leipzig-Berlin 1900, 60.
87
Cf. P. Riewald, De imperatorum Romanorum cum certis dis et comparatione et aequatione, Halle 1912,
308 (au sujet de Faustine l’Ancienne), n° 73–75; J. Aymard, ‘Vénus et les impératrices sous les
derniers Antonins’, MEFRA 51 (1934), 178–196.
88
Temporini, Die Frauen am Hofe Trajans, 72, n. 351.
89
Aymard, ‘Vénus et les impératrices’, 178–196; Temporini, Die Frauen am Hofe Trajans, 73, n. 352.
90
Temporini, Die Frauen am Hofe Trajans, 74–76, n. 353.
91
Au sujet des représentations de Kybele sur les monnaies de Faustine: Strack, Untersuchungen zur
römischen Reichsprägung, 82–83, 107.
92
H. Mattingly, ‘The consecration of Faustina the Elder and her daughter’, HThR 41 (1948),
150–151.

104 PALAMEDES 6 (2011)


La conception d’Aeternitas dans le monnayage

Des monnaies semblables en ce qui concerne le contenu et l’intention, ont


été frappées pour la fille d’Antonin le Pieux et de Faustine l’Ancienne – Faustine la
Jeune93 qui bien que fiancée à Lucius Verus (en 138), finalement quelques années
plus trad (en 145), devint l’épouse de Marc Aurèle.94 Après un long règne à ses
côtés, elle décéda en 176 et son corps a été déposé au Mausolée d’Hadrien. Après
la consécration, elle reçut le prénom de Faustina Pia/ Diva Augusta Faustina.
Comme Antonin le Pieux, aussi Marc Aurèle ordonna de frapper des monnaies en
son honneur, jusqu’à sa mort c’est-à-dire jusqu’en 180.
Au cours de quatre ans, de 176 à 180, la mémoire de l’impératrice défunte était
systématiquement rappelée. Parmi dix-sept différents motifs qui ont été frappés en or
et en argent, seulement trois d’entre eux ont été consacrés à Aeternitas, aussi bien
sous forme de légende que de personnage personnifié. Les avers de tous les types
représentant Aeternitas portent la dédicace DIVA FAVSTINA PIA et ont été ornés
d’images de Faustine morte (voilée et95 et sans voile96). Les autres types d’émission
posthume ont été munis de la légende CONSECRATIO ou de la dédicace MATRI
CASTRORUM. Le premier type possède une iconographie de Pietas, déposant une
offrande97 composée d’un paon,98 d’un trône avec un sceptre et un paon debout
devant le trône,99 d’un autel,100 d’un bûcher funéraire avec un char attelé de deux
chevaux à son sommet101 et d’une lune aux sept étoiles.102 Le deuxième type consacré
à MATRI CASTRORVM montre Faustine sur le trône (à gauche), tenant un sceptre
et un globe avec un phénix. Sur un groupe de monnaies, devant l’impératrice
divinisée ont été mis trois,103 sur l’autre, deux étendards militaires.104 L’autre type de
monnaies montre seulement un sceptre et un trône.105 Ce dernier groupe de
monnaies est muni sur l’avers d’une légende: DIVAE FAVSTINAE PIAE ou DIVA
AVG(usta) FAVSTINA avec l’image de Faustine en voile.
Parmi des monnaies de consécration qui étaient plus nombreuses parce qu’il
y en avait vingt-huit types, frappées à l’ordre du Sénat en bronze et en cuivre, la

93
PIR2 A 716.
94
K. Fittschen, Die Bildnisstypen der Faustina minor und die Fecunditas Augustae, Göttingen 1982;
S. Priwitzer, Faustina Minor-Ehefrau eines Idealkaisers und Mutter eines Tyrannen: quellenkritische
Untersuchungen zum dynastischen Potential, zur Darstellung und zu Handlungsspielraümen von
Kaiserfrauen im Prinzipat, Bonn 2009. Cf. aussi Temporini, Die Frauen am Hofe Trajans, passim.
95
RIC III, M. Aurelius 738 (D).
96
RIC III, M. Aurelius 739 (D) et 740 (D).
97
RIC III, M. Aurelius 741 (D); 742 (D).
98
RIC III, M. Aurelius 743 (D); 744 (D).
99
RIC III, M. Aurelius 745 (D).
100
RIC III, M. Aurelius 746 (D).
101
RIC III, M. Aurelius 747 (D); 748 (Au); 749 (D).
102
RIC III, M. Aurelius 750 (D).
103
RIC III, M. Aurelius 751 (Au); 752 160 (D).
104
RIC III, M. Aurelius 753 (D).
105
RIC III, M. Aurelius 754 (Qu).

PALAMEDES 6 (2011) 105


Katarzyna Balbuza

légende et la personnification d’Aeternitas apparaissent sur neuf d’entre eux. Les


autres, comme dans le cas de celles en or et en argent portent la légende
CONSECRATIO S.C. ou MATRI CASTRORUM, mais de nouvelles légendes
apparaissent aussi: DIANA LUCIFERA, simples: S.C., SIDERIBVS RECEPTA S.C.
ou VENVS FELIX S.C.
Regardons de plus près les neuf types avec Aeternitas.106 Sept d’entre eux portent
sur l’avers l’inscription DIVA FAVSTINA PIA et l’image de Faustine en voile ou sans
voile, avec des boucles. Les revers des sesterces ont la même légende: AETERNITAS
S.C. mais l’iconographie est un peu différente. Nous voyons une personnification
d’Aeternitas debout, en face rajustant le voile et tenant une torche.107 Dans une autre
prise, Aeternitas tient un phénix sur le globe et s’appuie sur une colonne,108 ou bien elle
se tient debout avec une main levée.109 Parfois, elle tient le globe et relève sa robe,110 ou
elle est assise sur le globe et tient le globe avec un phénix et un sceptre.111 Encore un
autre type de monnaies représentent Faustine assise parmi deux fillettes dansantes112
ou bien Faustine assise sur un char décoré, attelé de deux éléphants – l’impératrice
tient un sceptre, le symbole de son pouvoir.113 Le dernier type, enfin montre la déesse
de la victoire, Victoire (Aeternitas?), tenant une torche et Faustine élevée au ciel.114
Il est interéssant que les légendes avec Aeternitas ont été frappées sous
Antonin le Pieux et sous Marc Aurèle seulement pour les impératrices. Marc Aurèle
a renoncé à l’évocation à la personnification de l’éternité aussi bien dans la série de
consécration pour Antonin le Pieux115 que sur les monnaies posthumes pour le
divin Lucius Verus.116 Par contre, comme son père adoptif, il a fait munir du mot
d’AETERNITAS les monnaies de consécration de son épouse, la fille d’Antonin,
Faustine la Jeune, lesquelles paraissaient dans les années 176–180 ap. J.-C.117
Commode continuait l’habitude de son prédécesseur et dans les émissions de
consécration frappées en l’honneur du divin Marc Aurèle décédé en 180 à Bononia,
il s’est limité à la simple CONSECRATIO.118

106
Cf. Mattingly, Coins of the Roman Empire, vol. 4, cxliv-cxlv.
107
RIC III, M. Aurelius 738 et 739 (D); 1691 et 1692 (S).
108
RIC III, M. Aurelius 740 (D); 1692 (S).
109
RIC III, M. Aurelius 1694 (As).
110
RIC III, M. Aurelius 1695 (S).
111
RIC III, M. Aurelius 1696 (S).
112
RIC III, M. Aurelius 1697 (S).
113
RIC III, M. Aurelius 1698 (S).
114
RIC III, M. Aurelius 1699 (S).
115
Cf. RIC III, M. Aurelius 429–442 (Au/ D); 1262–1274 (S).
116
Cf. RIC III, M. Aurelius 596a i b (Au/ D); 1236; 1507–1512 (S).
117
L’émission de consécration: RIC III, M. Aurelius 738–754 (Au/ D); 1691–1718 (S/ As).
118
RIC III, Commodus 264–275 (Au/ D); 654–664 (S/ As). Cf. aussi les monnaies frappées après la
mort de Commode, en son honneur RIC III, Commodus 263a et b (D).

106 PALAMEDES 6 (2011)


La conception d’Aeternitas dans le monnayage

Nous observons une perpétuation de la tradition commencée par Antonin le


Pieux et Marc Aurèle dans le monnayage de Septime Sévère qui dans l’émission de
consécration en l’honneur du divin Pertinax ordonna de frapper à la Monnaie de
Rome un médaillon muni sur le revers d’une inscription AETERNITAS. À cette
légende a été attribuée l’iconographie représentant le divin Pertinax dans un
quadrige attelé d’éléphants (à droite).119
L’analyse des exemples de monnayage de consécration du principat muni
d’une charge idéologique de la conception d’Aeternitas mène à quelques conclusions.
La multitude de thèmes et l’irrégularité de l’apparition de ce genre d’émissions
n’exclut pas la possibilité de saisir l’évolution dans la compréhension et dans la
forme de la transmission de l’idée Aeternitas relatives à la personne consacrée. Dans
le monnayage de consécration de l’époque de Tibère, des Flaviens, des Antonins et
des Sévères, deux sous-périodes peuvent être distinguées. La première sous-période
est indiquée par le monnayage « hispanique » de Tibère se rapportant à Auguste
défunt, lequel montre une désorientation terminologique dans le mode de s’adresser
à l’empereur divinisé dans la phase précoce du développement du culte impérial,
ainsi que par le monnayage des Flaviens dans lequel à l’aide d’Aeternitas personnifiée,
tenant dans les mains une lance et une corne d’abondance, étaient mis en relief
non pas seulement le statut divin de Vespasien défunt mais aussi la majesté de
l’État et l’idée de la continuité du pouvoir au sein de la dynastie-même. Par rapport
aux exemples ci-dessus provenant des temps de Tibère et de Titus, la conception
d’éternité du défunt a été exprimée d’une manière lisible. Cela vaut pourtant la
peine de remarquer que pendant que sous Tibère, l’éternité d’Auguste était signalée
uniquement par la légende, sous les Flaviens, la présence du thème d’éternité était
renforcée par l’emplacement sur les revers de la personnification d’Aeternitas. La
personnification d’Aeternitas a été introduite pour la première fois dans le monnayage
romain justement sous les Flaviens. Pourtant, sur les monnaies de consécration, les
attributs d’Aeternitas sont différents de ceux qui représentent le souverain vivant.
En comparaison avec des monnaies de consécration frappées par Vespasien, sur les
monnaies de consécration apparaît un deuxième modèle iconographique d’Aeternitas,
dans lequel ses attributs d’alors, sous forme de têtes du soleil et de la lune, ont été
remplacés par une lance et une corne d’abondance. La deuxième sous-période sont
les temps des Antonins et des Sévères. Dans le cas des monnaies de consécration
de Faustine l’Ancienne et de Faustine la Jeune attire notre attention une fréquence
exceptionnelle de leur frappe, unie à une grande diversité de symboles utilisés et
à un grand éventail de personnifications de dieux et de vertus représentés. Dans la
multitude de modèles iconographiques représentés sur les revers, il est difficile de
formuler avec précision un seul modèle d’iconographie d’Aeternitas. Le manque de

119
Gnecchi II, 72, n° 1.

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Katarzyna Balbuza

conséquence dans l’iconographie d’Aeternitas composée de plusieurs thèmes et


souches, présente dans différentes variantes de monnaies de consécration du type
d’Aeternitas et dans celles qui à travers leur iconographie constituent une allusion
à Aeternitas, est probablement la cause des doutes d’interprétation, qui peut
s’expliquer par la « mode » d’alors, par le « climat » intellectuel caractéristique du
IIe siècle. Un vaste catalogue de monnaies de consécration de Faustine l’Ancienne
et de Faustine la Jeune prouve la recherche des formes d’illustration de l’idée de
l’éternité.
La présence de la conception d’Aeternitas dans le monnayage de consécration
romain de l’époque du principat était aléatoire. Les émissions de Tibère d’Hispanie,
les monnaies frappées par Titus, par les Antonins ou par Septime Sévère se
référaient à la sphère de divinité et de l’immortalité de l’âme, reflétant les
conceptions religieuses de ces temps-là. La limitation de la thématique de l’éternité
aux impératrices consacrées sous les Antonins pouvait résulter de la conviction
d’alors que c’étaient justement les femmes qui transmettaient du sang divin, du
sang du père consacré de l’empereur Trajan lequel était nécessaire à la légitimation
du pouvoir. Bien qu’au cours du IIIe siècle entier la consécration des femmes et des
épouses des empereurs fût continuée, on ne parlait pas d’elles dans les catégories
d’éternité. Le caractère éphémère du sujet de l’éternité dans les émissions de
consécration pouvait être lié à la pratique de la vie religieuse et aux mœurs. La
mémoire des empereurs consacrés était vénérée, des fêtes en leur honneur étaient
organisées, des temples étaient élevés mais l’état de l’éternité dans lequel ils se
trouvaient après la consécration était mentionné rarement. C’était peut-être le
résultat du fait qu’il était plutôt évident pour tous qu’un souverain consacré,
comme les autres dieux, participait à l’éternité.120

Katarzyna Balbuza
balbuza@amu.edu.pl

Institut d’Histoire
Université Adam Mickiewicz
Św. Marcin 78
Poznań 61-809, Pologne

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Traduit par Bernadeta Pyśk.

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