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Les valeurs

Des interrogations du philosophe


au défi du pédagogue

À
Les valeurs : une question philosophique, un défi
pédagogique. Nous présentons d’abord, dans ce texte,
les grandes interrogations qui retiennent aujourd’hui
propos des interrogations des philo- l’attention des philosophes, avant de faire le point sur
sophes, un état des lieux sous forme les grands débats en éducation. Enfin, nous montrons
de grands débats reflète assez fidèle- que la question de la valeur est un redoutable défi pour
ment la réalité. le pédagogue, car elle l’oblige à transmettre ce qui ne
peut être, de manière ultime, que librement choisi.

L ES INTERROGATIONS DES PHILOSOPHES


Définir la valeur valeur a été une manière d’en prolonger un autre : celui
Qu’est-ce qu’une valeur ? Les tentatives les qui, dans le champ de l’éthique normative, opposait et
plus récentes essaient de définir la valeur continue d’opposer les tenants d’une morale téléolo-
gique aux tenants d’une morale déontologique. La pre-
mière – appelée par Sidgwick « morale attractive » – en
  Eirick PRAIRAT appelle à l’horizon polarisant de la valeur, alors que la
seconde, « impérative », en appelle à la dimension obli-
geante du devoir et de la norme. Certains philosophes
en l’identifiant, ou en l’opposant, à l’idée de moraux ont bien tenté de montrer, afin de faire prévaloir
norme. La manière de procéder consiste à leur position, que l’on pouvait procéder à une opération
confronter un concept (valeur) à un concept de réduction : soit réduire la valeur à la norme, comme
voisin (norme) dont on pressent à la fois la l’a notamment suggéré Thomas Scanlon (1998), soit,
proximité et la distance. D’où toute une série à l’inverse, réduire la norme à la valeur, comme l’a
de points pour souligner cette « proximité proposé George Edward Moore dans ses Principia Ethica
distante ». La valeur serait plus intimement (1903-1998). Sans entrer ici dans le détail de débats
liée au monde des émotions que ne le serait éminemment techniques, il semble que ces opérations
la norme ; ou encore, contrairement à cette de réduction se heurtent à de redoutables apories et
dernière, la valeur admettrait des degrés que, finalement, il soit pertinent de maintenir distincts,
– on peut en effet être plus ou moins coura- sans trop les disjoindre, ces deux concepts de norme
geux, une situation peut être plus ou moins et de valeur.
intéressante ; ou bien encore, le domaine
d’application de la valeur serait beaucoup L’accès à la valeur
plus ample que celui de la norme qui ne Comment prenons-nous conscience des valeurs ?
concernerait, lui, que le registre de l’action. Comment celles-ci nous sont-elles révélées ? La phi-
Il faut bien comprendre que ce débat norme/ losophe canadienne Christine Tappolet défend l’idée

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que les émotions (l’admiration, le dégoût,
la surprise, la peur) sont les modes d’accès
privilégiés aux valeurs. Les émotions joue-
L A VALEUR ET L’ENGAGEMENT

raient à l’égard des valeurs le même rôle Le dernier débat explore le lien entre jugement et enga-
que les expériences perceptuelles à l’égard gement. On dit d’une position qu’elle est internaliste
des formes et des couleurs (Tappolet, 2000, lorsqu’elle affirme que nos jugements de valeur et, plus
p. 167). Les émotions et les expériences largement, nos jugements moraux nous inclinent à agir
perceptuelles partagent en effet un grand conformément à ce qu’ils nous indiquent. En d’autres
nombre de traits comme leurs propriétés termes, nos jugements moraux seraient intrinsèque-
phénoménales, le fait de ne pas être direc- ment motivants. La difficulté philosophique consiste à
tement soumises à la volonté, le fait d’être expliquer le lien interne entre le jugement et l’action.
appropriées ou encore celui d’être causées Sans entrer dans des commentaires trop longs, disons
par des réalités environnantes. Ces analo- que les explications se partagent entre David Hume, Pla-
gies donnent une grande plausibilité à la ton et Aristote. De leur côté, les externalistes prennent
thèse selon laquelle les émotions sont des appui sur ce qu’il est convenu d’appeler « la faiblesse
perceptions de valeurs. D’où cette concep- de la volonté » (on voit le bien à faire mais on s’abstient
tion originale de l’émotion, comme une sorte de le faire) pour récuser la force intrinsèquement moti-
de voie médiane entre les approches qui vante des jugements moraux. Comment affirmer que
assimilent l’émotion à une simple sensation nos jugements nous inclinent à agir si, dans certaines
(les conceptions dites phénoménalistes) et situations (les situations d’acrasie), nous agissons pré-
celles qui réduisent l’émotion à une forme de cisément à l’encontre de ce qu’ils nous indiquent de
croyance (les conceptions intellectualistes). faire ? Il faut alors concevoir, dit l’externaliste, les juge-
Expliquons-nous. Les émotions ont un ments moraux comme des représentations inertes qui
contenu mais ce contenu n’est pas d’ordre requièrent un élément externe pour incliner à l’action.
conceptuel puisqu’on peut, par exemple, D’où cette question : faut-il, en bon internaliste, recon-
très bien faire l’expérience de la peur tout naître à la valeur une dimension conative qui la rend
en ignorant le concept de danger. Si les émo- agissante, ou faut-il l’appréhender comme une croyance
tions ont un contenu et si celui-ci n’est pas qui, seule, ne nous incline guère à agir ? La conséquence
de nature propositionnelle, alors elles ne éducative est importante si on attend de tout homme
sont ni de simples attitudes réactives (sans éduqué, c’est-à-dire pénétré de valeurs, qu’il agisse
contenu), ni de simples croyances (toujours conformément à ce que celles-ci lui commandent.
identifiées à un contenu propositionnel),
mais des perceptions. Ces travaux, on le
voit, invitent les pédagogues à repenser la
place des émotions dans le procès éducatif,
L ES DÉBATS EN ÉDUCATION

et plus particulièrement dans le travail sur Pour le champ de l’éducation, nous pouvons repérer
les valeurs. N’a-t-on pas fait une place trop trois grands débats autour de la question de la valeur.
belle aux lectures rationalistes ? N’a-t-on
pas, en formation, accordé trop de place au La valeur de l’enseignement
raisonnement et à la délibération ? N’a-t-on La valeur de l’enseignement est, pourrions-nous dire,
pas, en somme, oublié de faire une place à la le premier débat, celui qui s’impose à toute personne
sensibilité ? Ces travaux nous invitent, plus qui enseigne ou qui reçoit un enseignement. Que vaut
fondamentalement, à ouvrir notre regard l’enseignement dispensé ? À quelle condition a-t-il de
à d’autres modalités pédagogiques. Quelle la valeur ? Nous devons en convenir : tout enseigne-
place, par exemple, faire au cinéma, à la ment a besoin d’être justifié. Il faut qu’il en « vaille la
littérature et plus largement aux arts pour peine », comme le dit Olivier Reboul (1992, p. 2). Quel
explorer le rôle des émotions dans l’accès critère justifie un enseignement de manière indis-
au monde des valeurs ? cutable ? On s’accorde généralement à reconnaître

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que tout enseignement, dans une société également soumis à l’exigence de neutralité axiolo-
donnée, obéit à une nécessité anthropolo- gique. Dès lors, l’école publique n’a pas à proposer
gique de perpétuation. Perpétuer la société, d’éducation morale, elle doit s’abstenir, un point c’est
perpétuer la communauté dans laquelle tout.
les nouveaux venus viendront à leur tour La deuxième position, procédurale, est défendue par des
s’inscrire pour y laisser leur marque. En courants très différents. Nous trouverions dans le camp
termes arendtiens, l’enseignement est des procéduraux, des libéraux soucieux de réduire l’in-
requis par le souci d’assurer « la continuité fluence de la puissance publique, des instructionnistes
de la civilisation constituée » (Arendt, 1995, qui souhaitent voir l’école s’en tenir à la seule tâche
p. 122). Or dans les démocraties libérales, d’instruction, et des disciples d’Habermas, toujours
où l’individu est reconnu pour lui-même, enclins à réfuter toute fondation transcendante de la
où il vaut comme sujet singulier – comme morale. Cette position-là consiste à dire que les seules
« fin en soi » dirait Kant –, la considération valeurs morales qui puissent être transmises sont celles
anthropologique de perpétuation ne saurait qui sont impliquées dans l’exercice d’une discussion,
suffire. C’est une condition certes néces- et un enseignement digne de ce nom prend toujours la
saire mais pas suffisante. L’enseignement forme d’une discussion (dans laquelle l’accord repose
ne vaut vraiment la peine que si, par-delà sur la libre et commune reconnaissance du meilleur
la clause de perpétuation, il est capable de argument). Dans la perspective procédurale, il n’y a
proposer au nouveau venu une catégorie donc pas de programmes particuliers à prévoir, même
d’activités intrinsèquement valables, c’est- si un inventaire est possible, car les valeurs morales à
à-dire le conduisant vers un degré supérieur transmettre sont celles impliquées par l’acte d’ensei-
d’accomplissement humain. Autrement dit : gner, si celui-ci reste fidèle à la logique argumentative
l’enseignement ne vaut vraiment la peine de la discussion et aux présupposés moraux qu’elle
que si, par-delà la garantie de continua- implique (probité, sincérité, reconnaissance d’autrui
tion de la société, il sait offrir au nouveau comme d’un alter ego, etc.).
venu les conditions d’une libre autodéter- Enfin la troisième position est justement la position
mination. Voilà le critère, voilà la valeur qui républicaine. Elle reconnaît un ensemble de valeurs
confère de la valeur à l’enseignement et, morales précises à transmettre : la liberté, l’égale
conséquemment, à l’école. dignité, la solidarité, la tolérance, le respect, l’esprit
de justice… Le raisonnement qui préside à l’établis-
Les valeurs à promouvoir sement de cette position – qui est notamment celle
Le deuxième débat regarde les valeurs que du rapport sur l’enseignement laïque de la morale
l’école républicaine doit promouvoir. À l’évi- de 2013 – est le suivant. Tout d’abord, il reconnaît que
dence, des valeurs intellectuelles comme la l’école républicaine a une mission d’éducation morale
rigueur, le souci de la preuve ou encore la car l’idéal républicain ne saurait découler mécanique-
cohérence logique. Mais doit-elle également ment d’un projet d’instruction, aussi complet soit-il.
transmettre des valeurs morales ? Est-ce La question majeure est d’inventorier les valeurs à
bien sa mission ? Et si oui, lesquelles ? Sur promouvoir car nos sociétés démocratiques et plura-
ce point, le débat est loin d’être consensuel. listes sont marquées par ce que l’on appelle, à la suite
On peut, me semble-t-il, distinguer trois de John Rawls, « le fait du pluralisme », c’est-à-dire
positions, que j’appellerais respectivement l’idée que nos sociétés admettent en leur sein plusieurs
abstentionniste, procédurale et républicaine. conceptions de la vie bonne. Ce pluralisme à propos des
Explicitons chacune de ces positions. conceptions du bonheur n’engage pas seulement chez
La première, abstentionniste, est celle du nos concitoyens des choix existentiels mais également
libéralisme radical. Elle consiste à dire qu’en des choix de valeurs ou, tout au moins, une priorisation
régime libéral, il n’y a ni religion d’État, ni de certaines valeurs par rapport à d’autres. On peut très
morale d’État. L’État est non seulement bien préférer la prospérité individuelle à l’entraide, les
tenu à la neutralité religieuse, mais il est libres rencontres à la fidélité, la sécurité au courage… Il

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importe alors de délimiter les contours de la la discipline, de l’autorité, voire de la sanction, pour-
morale scolaire pour qu’elle soit compatible tant tenue par nombre de novateurs comme le point
avec l’irréductible pluralisme qui caractérise de basculement qui nous ferait échapper à la sphère
nos sociétés contemporaines. « La morale de de l’éducation.
l’école » ne saurait donc être une morale du Pour ce second courant, si on peut légitimement adres-
Bien, comme elle a pu l’être sous la IIIe Répu- ser des critiques à l’axiologie et aux usages qui orga-
blique, car toute morale du Bien promeut nisent les pédagogies traditionnelles (qui, en passant,
un style de vie particulier auquel nul n’est sont tout aussi plurielles que les pédagogies nouvelles),
tenu de souscrire dans une société ouverte on doit tout aussi légitimement leur reconnaître une
et pluraliste. D’où il résulte que « la morale part de vérité. Et cette part de vérité est que toute édu-
de l’école » ne peut être qu’une morale du cation est une conquête de soi, un effort pour s’arra-
juste (ou morale du vivre-ensemble), se pro- cher à sa condition première. Tout ne saurait donc se
posant de transmettre les seules valeurs qui dénouer dans l’immédiateté du désir ou dans les libres
engagent notre rapport à autrui au sein d’un jeux de l’intérêt.
espace public, pensé et défini comme lieu de
la coexistence des libertés.

Les valeurs requises


L E DÉFI DES PÉDAGOGUES

Nous venons d’évoquer les valeurs à pro- La transmission des valeurs


mouvoir, il faut maintenant parler des La question pédagogique est toujours une question
valeurs requises, de celles qui doivent être pratique : comment transmettre des valeurs ? Compre-
convoquées. C’est une banalité de dire que nons bien que lorsque le professeur enseigne la justice
deux grandes conceptions se sont opposées à Paul, ce n’est pas seulement pour lui donner quelques
tout au long du xxe siècle sur la manière de lumières sur l’idée de justice, mais c’est pour qu’il
penser l’acte d’enseigner : une conception devienne juste. Enseigner les valeurs n’est donc pas un
traditionnelle, qui en appelle à l’autorité, enseignement comme les autres. On ne peut esquisser
à l’effort, au travail et à l’esprit de disci- de solution à ce redoutable problème qu’à partir d’une
pline ; et une conception appelée nouvelle précompréhension de ce que l’on appelle une valeur.
ou moderne, pour la démarquer de celle qui On peut raisonnablement souscrire à l’idée internaliste
la précédait, et qui préfère insister sur les que la valeur renferme trois caractéristiques : cogni-
valeurs d’initiative, d’autonomie et de libre tive, affective et conative. Explicitons chacune de ces
engagement caractéristiques.
Ces deux conceptions ont dessiné deux posi- La dimension cognitive de la valeur consiste avant tout
tions dans le champ de la philosophie de en une idée, un contenu pourrions-nous dire. Si j’expli-
l’éducation. La première, longtemps majo- cite la valeur justice, je serai attentif à montrer qu’elle
ritaire, se retrouve dans les pas de l’édu- renferme une forme d’égalité ; que, être juste, c’est
cation nouvelle. Son argument majeur est savoir donner à chacun la part légitime qui lui revient.
celui de la cohérence ; il consiste à dire que Mais une valeur n’est pas un concept, elle ne saurait se
les valeurs exigées par l’acte d’enseigner réduire à l’idée qui la définit, elle a aussi une dimension
doivent être en harmonie avec les valeurs affective. Elle est, comme le mot « valeur » l’indique, ce
visées. La fin est en somme déjà inscrite, qui vaut pour moi, ce que je souhaite librement valori-
comme en pointillés, dans les moyens que ser dans le champ des possibles symboliques. La valeur
l’on met en œuvre. La seconde position, que renferme enfin une dimension conative, elle irrigue nos
l’on peut qualifier de critique, s’attache à comportements en nous donnant une raison d’agir.
exhumer la part de vérité que renferme cha- Le paradoxe de la transmission des valeurs réside en
cune des deux grandes conceptions, affir- ce point : il faut enseigner la valeur de justice – et bien
mant notamment que l’on ne peut révoquer d’autres encore – aux nouveaux venus mais toutes
sans autre forme de procès les questions de ces valeurs ne peuvent, en raison de leur dimension

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affective, qu’être librement choisies. La seule Au-delà du professeur, l’école
manière de sortir de ce cercle (qui consiste Les valeurs « passent » aussi par les contenus d’en-
à transmettre ce qui ne peut être que libre- seignement ; elles « passent » enfin et surtout par les
ment choisi) est de rendre la valeur désirable. situations scolaires, par les formes d’organisation et
La valeur ne s’impose pas, elle se propose. de régulation institutionnelles, par ce que l’on appelle
aujourd’hui « la forme scolaire ». Rendre les valeurs
L’exemplarité du professeur désirables, c’est aussi les rendre préférables à d’autres
Il appartient ainsi déjà au professeur de car elles sont, par définition, plurielles. Weber parlait, il
rendre la valeur désirable. Il n’y a pas de y a près d’un siècle déjà (1919), de « guerre des dieux »
transmission de valeurs sans exemplarité pour souligner la pluralité conflictuelle des valeurs dans
magistrale. Or celle-ci n’est pas à cher- le monde moderne (Weber, 2002). S’il y a une incom-
cher du côté de la perfection, mais tout au mensurabilité des valeurs, aucun conflit de valeurs ne
contraire du côté d’une fidélité silencieuse peut alors être résolu de manière froide et rationnelle.
à quelques grands principes. Relisons Rous- Le choix de certaines valeurs, au détriment d’autres,
seau, qui est sur ce point éclairant : suppose donc une forme d’intervention spécifique, plus
permanente, qui en un mot appelle une forme de vie.
Une autre erreur que j’ai combattue, mais Penser la forme scolaire comme une forme de vie laïque
qui ne sortira jamais des petits esprits, c’est qui rend les valeurs républicaines désirables, tel est le
d’affecter toujours la dignité magistrale et de défi de l’école d’aujourd’hui.
vouloir passer pour un homme parfait dans
l’esprit de votre disciple […] Montrez vos fai- EIRICK PRAIRAT
blesses à votre élève si vous voulez le guérir Université de Lorraine,
des siennes ; qu’il voie en vous les mêmes Institut universitaire de France
combats qu’il éprouve, qu’il apprenne à se
vaincre à votre exemple […].
(Émile ou De l’éducation, Livre IV.)
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
C’est sans doute cette fidélité, cet engage- ARENDT H. [1972], La Crise de la culture, Paris, Gallimard.
ment obstiné et sans emphase qui rend
BERGOUNIOUX A., LOEFFEL L., SCHWARTZ R. (2013),
le professeur respectable aux yeux de ses « Pour un enseignement laïque de la morale », Rapport
élèves. L’exemplarité professorale – et ce remis à Vincent Peillon, ministre de l’Éducation natio-
n’est pas un paradoxe de dire cela – est une nale, lundi 22 avril 2013, Ministère de l’Éducation natio-
exemplarité ordinaire. Mais l’éthique profes- nale (consultable sur www.education.gouv.fr).
sorale est toujours vacillante, toujours fra- REBOUL Ol. (1992), Les Valeurs de l’éducation, Paris, PUF
(2e éd. 1999).
gile, si elle ne peut s’appuyer sur une déon-
tologie clairement explicitée – car dans toute ROUSSEAU J.-J., Émile ou De l’éducation, Livre IV.
profession, il y a des choses à faire et à ne TAPPOLET C. (2000), Émotions et Valeurs, Paris, PUF.
pas faire. On peut raisonnablement penser WEBER M. (2002, nouv. éd.), Le Savant et le Politique [1919],
Paris, 10/18.
que la moralité d’un professionnel, pour être
constante, prend appui non seulement sur le
comportement respectable d’une majorité de
collègues, mais également sur la promotion,
par la profession elle-même, de standards
moraux. La sociologie des professions anglo-
saxonne réserve d’ailleurs le terme de pro-
fession (qu’elle oppose à celui d’occupation)
aux activités professionnelles capables de
formaliser leurs propres normes morales.

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