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«Avec le cas Gérard Miller, la gauche morale
découvre la différence entre la parole et les
actes»
Par Pierre-Thomas Eckert
Publié il y a 3 heures
« Si même les alliés s’avèrent être des agresseurs potentiels, sur qui
s’appuyer ? On ne peut compter sur aucun homme. » Ce cri du cœur de
Sandrine Rousseau dans les colonnes du magazine Elle intervenait en
réaction à la gravité des accusations qui pèsent actuellement sur Gérard
Miller. Interrogée sur le plateau de « C à vous », Clémentine Autain admettait
partager ce sentiment d’indignation, et appelait à une réponse forte : « Ce
qu’on attend, c’est un discours politique. » En effet, le viol, pour la gauche
morale, est une mise en lumière de « notre propre rapport au pouvoir ».
Seule une politisation du phénomène peut créer un environnement sûr pour
les femmes.
Le problème de cette thèse est tout simplement qu’elle est fausse. Comme le
rappelle la grande philosophe G. E. M. Anscombe, l’intention (de faire le bien
ou le mal) n’est pas un discours tenu par l’agent : c’est un élément immanent
à l’action elle-même. Et l’action est elle-même la manifestation du caractère
êtres humains sur eux-mêmes, et la façon dont les sociétés s’y prennent
pour les y inciter. Dans toutes les sociétés, une minorité stable d’hommes
violent parce qu’ils n’arrivent pas à retenir leurs pulsions sexuelles dans des
situations où l’inhibition morale est basse et le stimulus physique élevé. Le
pouvoir ne corrompt pas en tant que tel : il sert plutôt de moyen à la minorité
d’hommes déjà vicieux, qui n’ont aucun pouvoir sur leurs pulsions.
On tourne en rond. On voit bien que la gauche morale n’est pas vraiment le
camp de la morale : c’est surtout le camp d’une vision morale périmée. Quoi
qu’en dise Clémentine Autain, l’affaire Gérard Miller n’interroge pas vraiment
notre « rapport au pouvoir » ou nos « représentations » : elle interroge plutôt
le caractère vicié de certains hommes moralisateurs, la faillite théorique de la
gauche morale pour en rendre compte et l’inadéquation de notre réponse
pénale.
Sujets
viol Sandrine Rousseau gauche