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17 e édition
Olivier Debat
Patrick Serlooten
des affaires
Droit fiscal
2018/ 2019
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Droit fiscal
des affaires
17e édition
2018
Patrick Serlooten
Professeur émérite de l’Université Toulouse Capitole
Olivier Debat
Professeur agrégé à l’Université Toulouse Capitole
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SOMMAIRE
(Une table des matières détaillée figure à la fin de l’ouvrage)
INTRODUCTION ................................................................................................ 1
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TITRE 3 LA DISPARITION DE L’ENTREPRISE .................. 299
SOUS-TITRE 2 Les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés ....... 383
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CHAPITRE 2 LE RACHAT DE L’ENTREPRISE
PAR L’INTERMÉDIAIRE D’UNE HOLDING
DE REPRISE ........................................................................ 575
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QUATRIÈME L’IMPOSITION DES MOYENS
PARTIE D’EXPLOITATION DE L’ENTREPRISE................ 729
Voici la 17e édition du Précis Dalloz de Droit fiscal des affaires. Si l’on se
rappelle que la première édition a été publiée en 2001, un décompte som-
maire démontre une édition annuelle. Il faut saluer ici la maison d’édition
qui a tout de suite accepté une édition annuelle avec les contraintes que
cela comporte. Les responsables qui se sont succédés ont eu l’intelligence
d’admettre que si la matière juridique se périme assez vite, cette réalité est
largement augmentée s’agissant du droit fiscal et plus précisément du droit
fiscal des affaires. Les entreprises ont besoin d’une information au Top.
Pendant seize années, Patrick Serlooten a œuvré pour un ouvrage rela-
tant les dernières évolutions des connaissances et des doctrines. Mais sa
contribution à la transmission des arcanes de la matière a été plus longue.
C’est dès 1988 qu’il publiait un Précis de droit fiscal de l’entreprise. Par
la suite, de 1990 à 1997, il rédigea à la demande du Doyen Roblot un
Tome III du célèbre Traité de droit des affaires, tout simplement connu par le
nom de ses auteurs : le « Ripert et Roblot ». Pendant cinq éditions, le nom
de Patrick Serlooten fut associé pour le tome de droit fiscal des affaires,
aux noms des deux éminents auteurs. L’actuel Précis est donc la continua-
tion de ces ouvrages.
Ainsi, outre ses autres contributions scientifiques, Patrick Serlooten a
publié vingt-trois éditions d’un ouvrage, Précis ou Traité, de Droit fiscal
des affaires.
Le lecteur comprendra que le moment est venu pour lui de passer la
main. La mise à jour du Précis pour l’actuelle édition est donc l’œuvre
du professeur Olivier Debat connu par tous ceux qui s’intéressent à la
matière. Patrick Serlooten l’avait découvert comme un brillant étudiant
avant d’apprécier ses immenses qualités de juriste et de pédagogue à
l’occasion de la rédaction de sa thèse consacrée à « La rétroactivité » en
droit fiscal des affaires. Aujourd’hui devenu un spécialiste reconnu, il
continue l’évolution du Précis.
Ce faisant, l’actuelle nouvelle édition s’inscrit dans la continuité des
précédentes. Elle reste fidèle à l’esprit qui les a animées, à savoir la compré-
hension des mécanismes au-delà de leur évidente technicité. Faisant état
des transformations de la matière, elle intègre les dispositions issues des
dernières réformes législatives. À travers la diminution programmée de
l’impôt sur les sociétés, l’introduction d’un système de prélèvement forfai-
taire unique ou la suppression de l’emblématique impôt de solidarité sur
la fortune au profit d’un impôt sur la fortune immobilière, ces évolutions
mettent en exergue que le droit fiscal est au cœur de la vie sociétale et
qu’il est empreint de considérations économiques et politiques de premier
X AVANT-PROPOS
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ordre. À s’attacher à considérer l’entreprise, elles révèlent aussi l’inter-
nationalisation croissante de la matière et son adaptation à la taille des
entreprises, avec une constante : la fiscalité omniprésente est au cœur des
préoccupations des décideurs.
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INTRODUCTION
1. Not. Y. Guyon, Droit des affaires, Economica. – Y. Chartier, Droit des affaires, PUF,
Thémis.
2. Y. Guyon, op. cit., Tome I, 12e éd., no 1.
3. Pour cette dernière, il faut cependant noter une évolution certaine rapprochant le droit
rural du droit des affaires (ex. la soumission des activités agricoles au droit des procédures
collectives). Ce rapprochement est d’autant plus remarquable qu’en droit fiscal, il était déjà
évident.
4. Et des collectivités publiques territoriales.
5. Le temps où le droit fiscal n’était que le moyen de permettre à l’État de se procurer les
ressources nécessaires à la couverture des dépenses publiques est depuis longtemps dépassé.
Aujourd’hui, la fiscalité participe aussi de la politique économique interventionniste du gou-
vernement et de sa politique de redistribution des richesses.
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découlant les incite à intégrer la variable fiscale dans toute décision de ges-
tion et dans toute relation avec les tiers. Par ce biais, la fiscalité fait partie
intégrante du droit des affaires.
3 Bibliographie ¸
M. COzian, Les grands principes de la fiscalité des entreprises, Litec.
M. COzian, F. debOissy et m. ChadeFaux, Précis de fiscalité des entreprises, LexisNexis.
O. debat, Droit fiscal des affaires, LGDJ.
J.-P. Fradin et J.-B. GeFFrOy, Traité du droit fiscal de l’entreprise, PUF, coll. Droit fonda-
mental, 2003.
D. Gutmann, Droit fiscal des affaires, LGDJ.
T. L ambert, « Le fiscaliste : un juriste comme les autres », Gestion et finances publiques
2014, n° 3/4, pp. 12-20.
C. et Th. L amOrLette, Fiscalité française, Economica.
P. Lamy, G. MOnseLLatO, M. Aujean, J. PeLLeFigue et G. de VOgüe, « Fiscalité des entre-
prises en 2025 : concurrence, conflits ou coopération », Dr. fisc. 2015, n° 41, actes
de colloque, 617.
J.-P. Le gaLL, Droit fiscal des entreprises commerciales, Dalloz.
J.-Y. merCier et B. PLagnet, Les impôts en France, éd. F. Lefebvre.
Ph. merLe et A. FauChOn, Droit commercial. Sociétés commerciales, Précis, Dalloz.
G. OrsOni (dir.), Finances publiques. Dictionnaire encyclopédique, 2e éd., Economica et
puam, 2017.
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la capitation fut rétablie par une déclaration du 12 mars 1701. Les corps
de marchands et d’artisans eurent le privilège de pouvoir répartir leur
part de capitation entre leurs membres. L’individualisation des revenus
commerciaux s’affirma avec une beaucoup plus grande netteté dans un
autre impôt sur le revenu, institué au mois d’octobre 1710, et dont le taux
(qui provoqua la dénomination de l’impôt) fut tantôt du dixième, tantôt
du vingtième. Il existait alors quatre cédules : l’une d’elles correspondait
aux revenus provenant du commerce et de l’industrie 1. L’impôt était assis
sur le revenu réel, que le contribuable devait déclarer 2. Pour le dixième
d’industrie, cependant, aucune déclaration n’était exigée, les corps de
métiers étant taxés en bloc et chargés, ensuite de la répartition.
Le système fiscal de l’Ancien Régime atteignit plus largement encore
l’activité commerciale par un système d’impôts indirects très étendu. Les
aides, levées de façon permanente à partir de 1435, étaient perçues sur la
vente des objets de consommation, et notamment sur les vins et les spiri-
tueux mais aussi sur les huiles et savons, les papiers et cartes à jouer 3. La
gabelle fut surtout perçue sur le commerce du sel 4. Les banalités étaient le
droit seigneurial par lequel certains seigneurs pouvaient prescrire l’usage
payant et obligatoire du moulin, du four ou du pressoir (dit banal). Les
traites ou droits de douane jouaient un rôle d’autant plus important dans
le régime fiscal de l’Ancien Régime qu’elles étaient perçues non seule-
ment dans les relations avec les pays étrangers, mais aussi à l’intérieur
du Royaume, de province à province, ou de ville à ville (traite foraine), et
que des droits à l’exportation prenaient place dans le système fiscal à côté
des droits à l’importation 5. Un droit de contrôle, qui est à l’origine de nos
droits d’enregistrement, fut institué en 1581. Une déclaration du mois de
mars 1653 créa l’impôt du timbre, en imposant d’employer un parchemin,
puis un papier timbré aux armes de l’État pour les actes judiciaires ou
extrajudiciaires. Certains monopoles furent institués pour les tabacs, les
poudres et salpêtres, les postes et messageries, les voitures de place et les
coches d’eau.
1. Les trois autres cédules portaient sur le foncier, le mobilier et les professions libérales.
2. L’ensemble des impôts directs représentait un peu plus du quart des recettes fiscales à la
fin de l’Ancien Régime.
3. Les premières taxes sur le chiffre d’affaires sous la forme d’une taxe sur toutes les ventes
ont été instaurées par Philippe le Bel en 1292 et 1313.
4. Le monopole du sel a été créé par Philippe VI de Valois alors que la gabelle sans monopole
aurait été instituée par Philippe V le Long.
5. À la fin de l’Ancien Régime, les impôts indirects représentaient plus de la moitié des
recettes fiscales totales.
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avaient suscité, pour cette raison, une vive hostilité, notamment la
gabelle, le plus détesté de tous ; ils furent généralement abolis 1.
Quant aux impôts directs, ils ne pouvaient faire une place importante à
l’exercice du commerce dans un droit qui ne voulait connaître que la condi-
tion civile de la personne. Quatre impôts furent créés par la Révolution :
la contribution foncière 2, la contribution personnelle mobilière 3, la
patente 4, l’impôt des portes et fenêtres 5. Seule la patente se rattachait
à l’exercice d’une activité professionnelle 6, une partie de la contribution
personnelle mobilière frappant en outre les revenus de l’industrie. Quant
aux autres, ils étaient assis sur la propriété foncière exclusivement.
Cependant les nécessités financières et les liens qui rattachent certains
impôts à des formalités utiles pour la vie civile firent conserver certains
impôts indirects. L’enregistrement fut substitué au contrôle des actes par
une loi du 5 décembre 1790. L’impôt du timbre fut maintenu dans la loi
des 7-18 février 1791. Les douanes intérieures furent abolies le 30 octobre
1790, mais la loi du 2 mars 1791 conserva le principe de droits perçus lors
de l’entrée en France ou de la sortie des marchandises. L’État se réserva
enfin le service des postes et le monopole des poudres et salpêtres.
L’évolution vers le rétablissement des impôts indirects se poursuivit
avec le rétablissement de ces douanes intérieures que constituaient les
octrois (an vii) et des impôts frappant le commerce de certains produits :
le tabac 7, le sel 8, les boissons 9. Néanmoins, les impôts indirects ne repré-
sentaient, au début du xixe siècle, qu’une faible part de l’ensemble des
recettes fiscales.
1. Le rejet des impôts indirects était également dû aux méthodes inquisitoriales, arbitraires
et expéditives des fermiers généraux chargés de leur recouvrement.
2. Loi des 23 nov.-1er déc. 1790.
3. Loi des 13 janv.-18 févr. 1791.
4. Loi des 2-17 mars 1791.
5. Loi du 4 frimaire an VII.
6. La patente était due par tous ceux qui voulaient exercer négoce, art ou métier.
7. Le monopole des tabacs est rétabli le 29 décembre 1810.
8. Loi du 24 avril 1806.
9. An XI et L. 24 avr. 1806.
INTRODUCTION 5
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reconstruction et de l’habitat ont considérablement accru les exigences
financières de l’État. Mais des seuils apparaissent, lorsque s’accroît le
volume des ressources fiscales. Tout impôt comporte des limites, au-
delà desquelles les fraudes ou les résistances ouvertes des contribuables
deviennent inévitables. L’État a dû diversifier le système de ses impôts,
afin de diffuser la charge fiscale et de rendre moins sensible le fardeau de
chaque impôt.
À côté de ces exigences financières, des préoccupations d’ordre écono-
mique et social se sont fait jour. Un régime fiscal permet d’encourager
l’économie nationale (tel veut être l’effet des droits de douane) ou de
développer certaines productions jugées utiles à l’économie du pays. Il
peut aider à la croissance de l’économie, en favorisant les investissements,
le développement régional, la construction immobilière ou en soute-
nant l’effort des exportateurs. À l’inverse, le système des impôts peut être
utilisé pour contenir des dépenses somptuaires en période d’inflation,
ou pour détourner les citoyens d’activités jugées nuisibles, telles que le
commerce des boissons. Certaines écoles économiques et notamment
celle de Keynes et de Beveridge, ont préconisé un recours systématique au
budget pour régulariser la vie économique, prévenir les crises et le chô-
mage qui les accompagne.
Enfin, l’hostilité des contribuables à l’égard de l’impôt a provoqué, par
un apparent paradoxe, un développement du système fiscal. L’État s’efforce
de découvrir des formes nouvelles d’impôt, auxquels les débiteurs ne
peuvent se soustraire et vis-à-vis desquels ils se montrent moins sensibles.
L’imposition de l’activité commerciale a permis de résoudre les pro-
blèmes nouveaux qui se posaient à l’État. L’évolution reflète sur ce point
celle qui s’est produite dans la composition des patrimoines et dans l’éco-
nomie de notre pays. Le système fiscal de la Révolution reposait surtout
sur la propriété foncière et sur l’activité artisanale. Mais la richesse fut
par la suite détenue par les grandes forces de l’industrie et du commerce.
La taxation des loyers et des fermages a contribué au déclin de la fortune
immobilière, tandis que la complaisance du pouvoir politique pour l’agri-
culture condamnait l’État à n’attendre que de médiocres ressources de
cette activité. L’importance des capitaux détenus par les commerçants, le
volume des affaires qu’ils réalisent, la multitude d’actes juridiques, liés à
l’exercice du commerce ou aux changements de structure des sociétés, les
profits commerciaux offrirent à l’État d’infinies occasions d’exercer son
pouvoir fiscal.
Les entreprises commerciales constituent d’ailleurs d’excellents débi-
teurs. Leurs établissements sont stables et leurs sièges connus, le droit
commercial leur impose la tenue d’une comptabilité et de livres de
commerce ; un contrôle peut aisément être organisé sur leur activité.
Pour certains impôts, elles se transforment en de véritables collecteurs
d’impôts, dont l’intervention allège la charge de l’administration fiscale.
Enfin, dans la mesure où les entreprises peuvent incorporer dans leurs
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prix les impôts qui leur incombent, l’imposition provoque des phéno-
mènes compliqués d’incidence, qui font supporter l’impôt à l’ensemble
du groupe social, sans que la charge définitive en soit clairement perçue.
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définition des bénéfices industriels et commerciaux tels qu’ils avaient été
définis à l’occasion de l’imposition des personnes physiques. Dès l’origine
l’impôt sur les sociétés fut un impôt proportionnel, même si son taux a
considérablement varié en fonction des préoccupations économiques des
gouvernements successifs 1.
Quant à l’impôt sur le revenu des personnes physiques, l’unité ainsi
établie n’était cependant qu’apparente car il était en fait composé de deux
éléments, la taxe proportionnelle et une surtaxe progressive. L’évolution
ultérieure démontra à la fois la complexité du système et la lourdeur de
l’imposition qu’il engendrait ; aussi, rapidement, une nouvelle réforme fis-
cale fut mise en chantier qui aboutit à une loi du 28 décembre 1959 qui a
substitué un unique impôt sur le revenu des personnes physiques aux deux
éléments anciens de cet impôt (taxe proportionnelle et surtaxe progres-
sive). Il demeura cependant, une séquelle transitoire de la taxe proportion-
nelle sous la forme d’une taxe complémentaire. Ce n’est qu’en 1970 que la
taxe complémentaire, dernière trace d’imposition cédulaire, disparut en
même temps que le principal prélèvement direct reprenait le nom d’impôt
sur le revenu.
Depuis lors, aucune réforme générale n’est intervenue et seules des
modifications conjoncturelles interviennent 2. Si l’évolution de la fiscalité
directe d’État s’est ainsi faite dans le sens de l’unité, il faut cependant
reconnaître que l’unicité de l’impôt est beaucoup plus apparente que
réelle. En effet, si les règles relatives à la liquidation du prélèvement sont
uniques, les règles d’assiette restent spécifiques pour les six catégories de
revenus imposables. Même en s’en tenant à la seule fiscalité des affaires,
l’unité ne paraît pas réelle en face de la dualité d’imposition des personnes
physiques et des personnes morales. Certes, l’assiette de l’impôt sur les
sociétés est calquée sur celle de l’imposition des bénéfices industriels et
commerciaux dans le régime de l’impôt sur le revenu, mais il demeure la
différence de la proportionnalité de l’un et de la progressivité de l’autre.
De la sorte, la neutralité fiscale de l’imposition des résultats des activités
d’affaires reste à réaliser de façon à ce que des choix aussi importants que,
par exemple, celui de la structure juridique de l’entreprise ne soient pas
effectués en fonction de seules considérations fiscales. Il faut cependant
noter que d’assez larges possibilités d’option, l’harmonisation des statuts
de l’entrepreneur 3 ainsi que la réduction de la double imposition des béné-
fices distribués atténuent la critique.
1. À l’origine de 24 %, le taux fut élevé par paliers successifs à 50 % en 1958, puis régulière-
ment baissé dans le souci d’alléger la fiscalité des entreprises.
2. Ces modifications ont entraîné une réduction de la base de l’impôt et une complication
progressive de sa structure et de son barème de telle sorte qu’une réforme est toujours envisa-
gée. Il s’agit d’alléger la tâche des membres de l’administration (télédéclaration, télépaiement
prélèvement à la source) ainsi que de parvenir dans le cadre européen à l’harmonisation du
poids de la fiscalité directe française avec celui des fiscalités des autres États membres.
3. À cet égard la généralisation de l’ancien abattement de 20 %, devenu non-majoration de
25 %, au profit de l’entrepreneur individuel et des dirigeants sociaux est fondamentale. Voir
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8 Évolution des impôts directs locaux ¸ Alors que jusqu'en 1917, la fis-
calité directe locale n'était que la juxtaposition de centimes additionnels
aux quatre contributions d'État (contribution foncière sur les immeubles
bâtis, ou non bâtis, contribution mobilière, contribution sur les portes et
les fenêtres et impôt de la patente), la suppression de ces contributions par
la loi du 31 juillet 1917 devait bouleverser l'organisation. En compensa-
tion de la création de l'impôt cédulaire et de l'impôt général sur le revenu,
l'État renonça à percevoir pour son compte la plupart des anciennes
contributions créées lors de la Révolution. Il ne les maintint qu'en faveur
des départements et des communes, pour alimenter les finances locales.
Il en fut ainsi pour la patente. L'impôt a été conservé fictivement au profit
de l'État, la détermination du principal servant uniquement à calculer les
centimes additionnels au profit des collectivités locales.
La patente était assez mal supportée car l’accroissement considérable des
dépenses locales l’alourdissait régulièrement alors que la contribution était
très inégalement répartie en raison de la diversité des budgets locaux, des
modalités d’évaluation de la base d’imposition et des différences de tarif.
Les « quatre vieilles » contributions devaient être remplacées par
l’ordonnance du 7 janvier 1959 au profit de nouvelles taxes assujettissant
les contribuables en leur qualité de propriétaire immobilier, d’habitant
ou d’entrepreneur.
Pour sa part, la patente concernait tous les commerçants, industriels et
professionnels et elle tâchait d’appréhender la productivité des professions
et entreprises. Pour ce faire, elle se référait à certains signes extérieurs de
« puissance économique » : la valeur cadastrale des immeubles de l’entre-
prise et l’importance de son personnel. L’impôt était calculé sur la base
d’un droit fixe et d’un droit proportionnel contenus dans un tarif d’envi-
ron 1 650 rubriques.
La complexité du système et surtout l’inégalité de la répartition du poids
de l’impôt devaient conduire à un rajeunissement de la dernière héri-
tière des « quatre vieilles » par la loi du 29 juillet 1975. Les conditions de
nécessaire rapidité de la réforme entreprise aboutirent au remplacement
de la patente par la taxe professionnelle, sans que celle-ci constitue un
véritable impôt nouveau, n’étant en fait qu’un ravalement de l’ancienne
taxe. Comme la patente, la taxe professionnelle imposait un potentiel
mis à la disposition de l’entreprise. Mais calculée sur la masse salariale
et la valeur locative des immobilisations corporelles, la taxe profession-
nelle contrariait l’emploi et les investissements. Une nouvelle réforme
intervenue en 2010 a remplacé la taxe professionnelle par la Contribution
économique territoriale. Pour ne pas pénaliser l’emploi, les contributions
taxant la capacité de production de l’entreprise sont assises sur les valeurs
locatives foncières et sur valeur ajoutée.
P. Serlooten, « Le statut fiscal de dirigeant salarié, panacée ou piège pour l’entrepreneur indivi-
duel ? », Mélanges C. Louit, éd. Bruylant, Bruxelles, 2016, p. 233.
INTRODUCTION 9
international.scholarvox.com:ENCG Marrakech:1022690898:88866206:196.113.29.75:1587236385
9 Évolution des impôts indirects ¸ Les impôts indirects qui dans la
conception révolutionnaire ne devaient jouer qu'un rôle secondaire dans
la fiscalité, ont pris une place prépondérante dans la pratique contempo-
raine, en raison de leur rendement et de la facilité de la perception. Il en
est souvent résulté des injustices sociales, les éléments les plus humbles de
la population et les familles nombreuses supportant, en ce cas, particuliè-
rement la charge de l'impôt. C'est pourquoi, en même temps qu'un effort
fut fait pour développer le système des impôts directs, de nombreuses
modifications furent apportées au régime des impôts indirects frappant
pour l'essentiel la consommation afin de ménager la situation des contri-
buables peu fortunés ou pour dégrever les denrées de première nécessité.
Parallèlement, de même que pour les impôts directs, l'unité et donc la
généralité de l'impôt étaient recherchées. Aussi, en 1917, une première
tentative d'imposition générale de la dépense aboutit à l'institution d'une
taxe générale sur les paiements qui laissait subsister de nombreux prélève-
ments sur des produits particuliers.
La faiblesse du rendement de cette taxe 1 amena à lui substituer, dès 1920
par une loi du 25 juin, la taxe sur le chiffre d’affaires qui constituait un
impôt de consommation frappant d’un taux relativement faible la presque
totalité des transactions commerciales. On reprocha très vite à cette taxe,
outre sa complexité, son absence de neutralité fiscale. Frappant toutes les
transactions effectuées, la taxe favorisait les circuits courts ; elle favorisait
les entreprises pratiquant la concentration verticale car elles n’étaient
assujetties à l’impôt que pour la vente finale du produit alors que si les
diverses phases de la production étaient assurées par des entreprises dif-
férentes, la taxe frappait le produit à chaque étape de production, lorsqu’il
changeait de propriétaire.
Pour remédier à ces inconvénients, la taxe sur le chiffre d’affaires fut,
pour certains produits 2, remplacée par une taxe spéciale dite « unique »,
perçue une seule fois, au stade de la production. Mais cette coexistence
d’une taxe générale et de nombreuses taxes uniques accroissait encore la
complexité du système de telle sorte qu’une réforme s’imposait.
La loi du 31 décembre 1936 supprima l’impôt sur le chiffre d’affaires
ainsi que la plupart des taxes uniques pour les remplacer par une taxe
unique globale à la production 3. Il s’agissait, par ce système, d’éviter les
effets cumulatifs puisqu’au lieu d’être perçue à chaque transaction sur
l’intégralité du prix, la taxe n’était perçue qu’une seule fois (au taux de 6 %
à l’origine) au stade du dernier fabricant.
La simplicité et la cohérence de ce système ne devaient pas résis-
ter aux besoins budgétaires liés aux nécessités de l’armement de telle
sorte qu’en 1939 fut créée une taxe d’armement (devenue taxe sur
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les transactions en 1940) qui ressuscita l’ancienne taxe cumulative. La
taxe sur les transactions était en effet perçue sur toutes les transactions.
Même si son taux était modéré (1 %), son aspect cumulatif s’ajoutait à la
double imposition due à la coexistence de la taxe à la production et de la
taxe sur les transactions.
Ce système devait cependant évoluer avec l’institution en 1948 du frac-
tionnement du paiement de la taxe à la production : la taxe était perçue à
chaque stade de la production, mais chaque producteur ne payait au fisc
la taxe encaissée lors de la vente que sous déduction de celle qu’il avait lui-
même acquittée. La déduction n’était cependant possible que pour la taxe
qui avait grevé les achats et qui figurait sur les factures de ses fournisseurs.
Ainsi, la taxe ayant grevé les achats d’équipement n’était pas déductible.
Ce système avait l’inconvénient de pénaliser l’investissement puisque les
achats de biens d’équipement étaient imposés deux fois ; une fois à l’achat
et une seconde fois à la vente puisque par la technique de l’amortissement
une partie de leur valeur était incorporée dans les prix du produit fini.
Il en était de même, d’une façon générale pour toutes les dépenses de
recherche, publicité… utiles à la modernisation et à l’expansion de l’entre-
prise. Ainsi, la double taxation des investissements s’ajoutait à l’inconvé-
nient de l’absence de neutralité due à l’existence de taxes à cascade.
Une nouvelle réforme des taxes sur le chiffre d’affaires fut donc entre-
prise qui aboutit à la réforme fondamentale de 1954-1955 (loi du 10 avril
1954 et décrets du 30 avril 1955). L’idée essentielle fut de généraliser le
système des paiements fractionnés et des déductions de telle sorte qu’il
soit applicable non seulement aux incorporations physiques (produits
physiquement incorporés dans le produit vendu), mais aussi, aux incorpo-
rations financières (produits et services ayant concouru à l’élaboration du
produit). Ainsi, à la déduction physique de la taxe à la production s’ajoute
la déduction financière de façon à faire disparaître le reproche fait à
l’ancienne taxe, celui de pénaliser les investissements productifs.
De la sorte, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) instituée ne frappait les
biens et les services qu’une seule fois, en imposant à l’occasion de chaque
opération économique ou de chaque transaction la seule valeur ajoutée,
c’est-à-dire la différence entre le prix de revient au sens large du mot et le
prix de vente.
Le système issu de la réforme reposait sur trois taxes : la TVA, frappant
la production et le commerce de gros, la taxe sur les prestations de service,
frappant les services et enfin la taxe locale, perçue au profit des collectivi-
tés locales et s’appliquant au commerce de détail.
Ce système révéla très vite des difficultés d’application dues essentiel-
lement à la coexistence de trois taxes et donc à la nécessaire délimitation
de leurs champs d’application respectifs. De plus, pour des raisons budgé-
taires, de nouvelles taxes portant sur des produits et activités déterminées
furent créées. Aussi, une réforme importante fut entreprise en 1966 dans
le sens de la généralisation de la TVA et de l’élargissement de son champ
INTRODUCTION 11
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d’application. En effet, la TVA de 1954-1955 avait vu son domaine d’appli-
cation restreint de façon à ne pas imposer de trop lourdes charges comp-
tables aux petites et moyennes entreprises. De plus, la réforme avait laissé
subsister de nombreuses taxes dont la superposition donnait naissance
à des distorsions économiques. Aussi, la plupart de ces taxes furent sup-
primées dont la taxe sur les prestations de service et la taxe locale sur le
chiffre d’affaires. En conséquence, la TVA fut étendue à l’ensemble des
affaires de production, de distribution et des services. Cette généralisa-
tion laissait tout de même hors du domaine de la TVA les professions non
commerciales et pour une large part les agriculteurs. Si bien que l’évolution
postérieure a consisté essentiellement à parfaire encore la généralité de la
TVA. Ainsi, la loi de finances pour 1978 a étendu le champ d’application
de l’impôt aux opérations des professions indépendantes, à l’exception de
certaines activités de nature libérale. De même, le champ d’application de
la taxe fut étendu dans le domaine agricole et dans celui des spectacles.
Plus récemment, l’évolution de la TVA a, surtout, été marquée par les
nécessités de l’harmonisation européenne.
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l’une aux fusions, scissions, apports d’actifs et échanges d’actions, l’autre
aux relations entre sociétés mères et filiales 1.
En revanche, en matière de TVA, l’effort d’harmonisation a été beau-
coup plus efficace ; ceci est certainement dû à la technicité de cet impôt et
au fait qu’il peut, plus facilement, être isolé de son contexte économique et
social. À cet égard les textes essentiels furent les deux directives du 11 avril
1967 adoptées par le Conseil des ministres de la Communauté sur la base
des articles 99 et 100 du Traité de Rome.
Par ces textes, il s’agit, pour la première directive, de remplacer les divers
systèmes de taxes sur le chiffre d’affaires par un système commun, celui
de la TVA dont l’essentiel des règles techniques ont été fixées par la deu-
xième directive, tout en laissant une certaine latitude aux États membres,
notamment en matière de taux, d’application de la taxe aux petites entre-
prises et d’exonérations 2.
La réforme de 1966 a, pour une large part, consisté en une mise en confor-
mité, par anticipation, de la législation française à la deuxième directive.
Mais l’harmonisation européenne en matière de TVA doit aller plus loin
puisque la première directive de 1967 contenait en germe la suppression
des frontières fiscales (suppression de la taxation à l’importation et des
détaxations à l’exportation pour les échanges entre les États membres).
Cet objectif se réalise dans le cadre du « marché intérieur » européen 3.
Il suppose qu’au préalable, les taux de TVA nationales soient harmonisés.
Sans atteindre un tel résultat, le droit de l’Union européenne s’est tra-
duit par des directives ultérieures qui sont venues moderniser le système,
en particulier la directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006, parfois
dénommée « la directive TVA », et tenir compte du développement de
l’économie numérique, l’évolution n’étant toutefois pas parachevée 4.
11 Bibliographie ¸
E. ALLix et M. LeCerCLe, Les droits d’enregistrement. Traité théorique et pratique, 1933.
E. ALLix et M. LeCerCLe, Les contributions indirectes, 3e éd., 1929.
1. Dir. n° 90/434 et 90/435 du 23 juil. 1990, Dr. fisc. 1990, n° 40, comm. 1807, obs.
P. Dibout. Cf. désormais, Dir. no 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le
régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents,
JOUE L 345, 29 déc. 2011, p. 8 – Dir. no 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009 concer-
nant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports
d’actifs et échanges d’actions intéressant des sociétés d’États membres différents, ainsi qu’au
transfert du siège statutaire d’une SE ou d’une SCE d’un État membre à un autre, JOUE L 310,
25 nov. 2009, p. 34.
2. La sixième directive en date du 17 mai 1977 (Dr. fisc. 1978, n° 10, p. 270) s’est efforcée
d’unifier les législations applicables dans les différents États membres. Elle a été refondée par
une nouvelle directive en date du 28 novembre 2006, no 2006/112/CE. Celle-ci a été modifiée
notamment par la directive 2008/8/CE du 12 février 2008 s’agissant des règles de territorialité
applicables aux prestations de service à compter du 1er janvier 2010.
3. Voir Dir. CEE du 16 décembre 1991, Dr. fisc. 1992, n° 9, comm. 448 et Dir. n° 2008/8/
CE du 12 février 2008 relative au lieu des prestations de services.
4. V. ss 818, 916.
INTRODUCTION 13
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du 4 octobre 1958 décide, dans son article 34, que la loi pose les règles
concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impo-
sitions de toute nature 1. L’abondante législation fiscale a été rassemblée
dans un Code général des impôts (Décret du 9 décembre 1948) qui s’est
substitué aux anciennes codifications (malgré son intérêt, la première
codification fiscale n’est intervenue qu’en 1928).
Le Code général des impôts, promulgué en 1950, contenait princi-
palement les textes législatifs concernant les impôts directs, les droits
d’enregistrement, les taxes sur le chiffre d’affaires, les droits de timbre et
les contributions indirectes. Outre les dispositions législatives, le Code
général des impôts comportait quatre annexes consacrées aux textes régle-
mentaires pris pour l’application des textes législatifs.
Chaque année, un décret incorpore dans le Code et ses annexes les dis-
positions législatives et réglementaires nouvelles 2. Cependant, malgré ces
mises à jour, la multiplication des textes fiscaux a non seulement alourdi
le Code général des impôts, mais encore rendu son utilisation délicate, ne
serait-ce qu’en raison de la multiplication des articles portant le même
numéro. Aussi, depuis 1960, les projets de réforme se sont succédé qui ont
ces dernières années abouti à une mise à jour du Code général des impôts
ainsi qu’à la promulgation du « Livre des procédures fiscales » qui est le pre-
mier élément du nouveau Code des impôts devant être réalisé dans l’avenir.
Le Livre des procédures fiscales qui contient les procédures suivies pour
calculer, contrôler et recouvrer l’impôt ainsi que les garanties et voies
de recours des contribuables est présenté en deux parties. La première
regroupe les dispositions qui relèvent du domaine de la loi, la deuxième
celles qui appartiennent au domaine réglementaire.
1. Le contrôle de la constitutionnalité des lois est possible par saisine du Conseil constitu-
tionnel au moment de leur adoption. Par la suite un justiciable peut, lors d’une instance en
cours, invoquer une question prioritaire de constitutionnalité pouvant être portée devant le
Conseil constitutionnel.
2. Dans la mesure où le texte de la codification réglementaire serait, au fond, différent du
texte législatif, le texte codifié doit être écarté afin d’appliquer le texte législatif d’origine (CE
13 sept. 1995, no 126830, Dr. fisc. 1995, no 47, comm. 2204, concl. Arrighi de Casanova ;
AJDA 1996. 65, note V. Haïm).
3. La petite rétroactivité qui applique aux revenus de l’année imposés à l’IR ou à l’IS, les
règles découlant des lois de finances votées en fin d’année ne constitue pas juridiquement
une rétroactivité car le fait générateur de l’impôt se produit en matière d’IR le 31 décembre et
en matière d’IS à la clôture de l’exercice qui intervient souvent en fin d’année. Le juge veille
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valeur constitutionnelle de telle sorte que rien n’interdit au législateur
d’adopter des dispositions rétroactives 1. Le principe de non-rétroactivité
ne s’impose qu’à l’autorité réglementaire, et seulement à défaut d’une
disposition législative expresse ne l’autorisant pas à y déroger. Aussi de
nombreuses lois fiscales sont expressément rétroactives. Une telle rétroac-
tivité est d’ailleurs souvent édictée dans l’intérêt du contribuable afin de
le faire bénéficier d’un avantage instauré par une loi postérieure. C’est
ainsi, souvent le cas en matière d’enregistrement. Ce n’est cependant
pas le cas de la plupart des lois de validation qui pour être en confor-
mité avec la Constitution doivent être justifiées par un motif impérieux
d’intérêt général 2. Outre leur conformité à la Constitution la validité
de telles lois doit également être appréciée par rapport aux conventions
internationales 3.
Le même intérêt du contribuable exige que le droit fiscal comme le droit
pénal admette la rétroactivité in mitius. Le Conseil d’État admet le prin-
cipe qu’en cas de modification d’un texte répressif dans un sens moins
sévère, les dispositions nouvelles doivent être appliquées aux faits commis
avant leur intervention 4. La rétroactivité des lois pénales plus douces
s’applique donc aux sanctions fiscales 5.
cependant à la protection de l’intérêt privé (CE 9 mai 2012, plén. fisc., no 308996, Min. c/ Sté
Epy, Dr. fisc. 2012, no 26, comm. 355, note S. Vailhen).
1. V. not., Cons. const. 30 déc. 1980, no 80-126 DC, Loi de finances pour 1981, Dr. fisc. 1981,
no 2-3, comm. 85. Cons. const. 7 nov. 1997, Dr. fisc. 1997, no 48, comm. 1220. Le Conseil
constitutionnel exige cependant que la rétroactivité de la loi fiscale soit justifiée par des raisons
d’intérêt général (Cons. const. 29 déc. 1986, no 86-223 DC, Loi de finances pour 1986, Dr. fisc.
1987, comm. 50 ; RJF 1987, no 1187. – Cons. const. 18 déc. 1998, no 98-404, RJF 3/99, 348. –
Cons. const. 7 déc. 2002, no 2002-458 DC, RJF 5/2002, no 552. – Cons. const. 23 sept. 2011,
no 2011-166 QPC, RJF 2011, no 1350). Ce qui peut être le cas lorsque la loi rétroactive a pour
objet la lutte contre la fraude fiscale (V. E. Meier et G.-H. Boucheron, « La lutte contre la fraude
fiscale peut-elle justifier une loi rétroactive ? », Dr. fisc. 2011, no 40, Act. 289).
2. Par ailleurs, le législateur doit respecter tant les décisions de justice ayant force de chose
jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions. L’acte modifié ou validé
ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que
le motif impérieux d’intérêt général soit lui-même de valeur constitutionnelle. Enfin, la portée
de la modification ou de la validation doit être strictement définie. Cf. Cons. const. 14 févr.
2014, n° 2013-366 QPC, SELARL PJA, ès qualités de liquidateur de la société Maflow France (Vali-
dation législative des délibérations des syndicats mixtes instituant le « versement transport »), JORF
du 16 févr. 2014, n° 40, p. 2724 ; Rec. Cons. const. 2014. 130 ; Juris-Data n° 2014-002892 ; JCP
2014. Doctr. 548, n° 37, obs. B. Mathieu – Cons. const. 2 mars 2016, n° 2015-525 QPC, SCI
PB 12, Dr. fisc. 2016, n° 10, act. 141. Le juge constitutionnel a ainsi aligné sa jurisprudence sur celle
de la Cour EDH. Jadis, le juge se contentait d’un motif d’intérêt général suffisant, cf. not. Cons.
const., 14 oct. 2010 n° 2010-53 QPC, Sté Plombinoise de Casino, RJF 01/2011, comm. 81 –
Cons. const. 10 déc. 2010, no 2010-78 QPC, Sté Imnoma, Dr. fisc. 2010, no 51, comm. 481, note
E. Meier et G.-H. Boucheron.
3. CE 21 oct. 2011, 9e et 10e ss-sect., no 314767, Min. c/ SNC Peugeot Citroën Mulhouse,
Dr. fisc. 2011, no 50, comm. 630, concl. C. Legras, note O. Fouquet.
4. CE 5 avr. 1996, sect. avis, Dr. fisc. 1996, no 25, comm. 838, concl. Arrighi de Casanova. –
CE 27 mai 2009, no 307957, SNC Saint-Honoré Dr. fisc. 2009, no 28, comm. 412, concl. C. Legras.
5. CE 20 nov. 1996, no 156534, Dr. fisc. 1997, no 25, comm. 700. – Paris 17 sept. 2007,
5e ch. B, no 07PA01396, Sté Murr Elektronik, Dr. fisc. 2008, no 4, comm. 87, obs. J.-L. Pierre.
16 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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Par ailleurs, le droit fiscal, à l’instar des autres branches du droit,
connaît la rétroactivité des lois interprétatives. Une telle rétroactivité est
naturelle compte tenu du fait que la loi interprétative ne vient pas modi-
fier la situation juridique découlant de la loi interprétée 1. C’est pourquoi,
le Conseil d’État juge constamment que l’application rétroactive d’une loi
résultant d’une disposition législative revêtant un caractère interprétatif
ne peut être utilement critiquée devant la juridiction administrative 2. Il
faut cependant noter une certaine tendance du législateur moderne à user
(pour ne pas dire abuser) des lois interprétatives. Par le passé, il n’était pas
rare que des lois de finances et lois de finances rectificatives contiennent
des dispositions déclarées interprétatives. La situation se rencontre bien
plus rarement aujourd’hui, ce qui doit beaucoup à l’évolution de la juris-
prudence ayant encadré le recours à la rétroactivité. En soi, un tel usage
n’est pas critiquable si la disposition rétroactive résulte d’une véritable
loi interprétative. La loi interprétative est celle qui, sans rien ajouter ou
retrancher à une disposition ambiguë vient en éclairer le sens et notam-
ment clarifier des difficultés d’application.
Les lois interprétatives sont le plus souvent justifiées en droit fiscal
compte tenu de la difficulté de la tâche du législateur. La loi fiscale est
par hypothèse générale et d’autre part, le travail législatif se fait dans des
conditions telles que l’erreur ou l’oubli sont fréquents. De plus l’appli-
cation de la loi et les questions des parlementaires peuvent révéler des
interprétations ou difficultés non prévues par les auteurs de la loi. La
loi interprétative vient donc rendre au texte l’exacte portée qui a été
voulue par ses auteurs. La loi interprétative n’est pas cependant exempte
de critique car en remettant, le plus souvent, en cause la situation des
contribuables, elle est source d’une grave insécurité juridique. Une telle
critique est aggravée lorsque, comme c’était souvent le cas jadis, la préten-
due loi interprétative a pour seul objet de contrecarrer la jurisprudence
du Conseil d’État en donnant à des textes imparfaits une interprétation
rétroactive favorable à l’administration, qui ajoute en réalité au texte
initial. Du point de vue logique, une telle loi est par essence faussement
interprétative, dès lors du moins que l’interprétation donnée par le juge
est juridiquement censée représenter le véritable sens du texte, en raison
de la fiction que constitue l’autorité de la chose jugée. Malgré tout par le
passé, le Conseil constitutionnel s’est refusé à condamner cette pratique 3
et le Conseil d’État ne s’est pas reconnu le pouvoir de contrôler le carac-
tère vraiment interprétatif d’une disposition que la loi qualifie d’inter-
prétative 4. Mais il n’est pas certain que ces solutions demeurent vraies
aujourd’hui, compte tenu des progrès de l’encadrement du recours aux lois
1. Cette rétroactivité est dite renforcée (Civ. 3e, 22 juin 1983, Bull. civ. 1983, III, no 145. –
Civ. 3e, 1er févr. 1984, Bull. civ. 1984, III, no 25).
2. CE 24 mai 1982, ass. plén., no 35190, RJF 1982. 292 et chron. Racine, p. 272.
3. Décis. no 91-298 DC du 24 juill. 1991.
4. CE 7 juill. 1989, ass. avis, n° 106902, Cale, RJF 10/89, no 1170.
INTRODUCTION 17
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rétroactives et de la création de la procédure de QPC. La loi interprétative
étant rétroactive, il apparaît nécessaire pour le législateur de la fonder
sur un motif impérieux d’intérêt général. Par ailleurs, le juge, tenu par le
devoir d’interprétation qui lui incombe, doit l’exercer au service du droit
à une protection juridictionnelle effective 1. La question pourrait évoluer,
le Conseil constitutionnel étant saisi d’une QPC à propos d’une loi inter-
prétative ayant validé une doctrine administrative en matière de droit au
report en avant des déficits 2.
Le caractère condamnable de cette pratique des lois faussement inter-
prétatives explique tout de même que le Conseil d’État cherche à limiter
la rétroactivité des lois. Ainsi, partant de la constatation que l’on ne peut
rétroactivement reprocher à quelqu’un d’avoir méconnu une obligation
qui n’était pas encore instituée à la date à laquelle il est censé l’avoir exer-
cée, le Conseil d’État refuse de sanctionner un comportement en vertu
d’une loi postérieure 3. De même, les dispositions fondées sur une loi à
caractère interprétatif ne peuvent être assorties d’intérêts de retard pour
la période antérieure à la publication de cette loi 4. De la même façon, la
Cour de cassation considère que, dès lors que l’interprétation du texte
en cause ne pouvait être susceptible de controverses, l’interprétation,
contraire à la doctrine administrative, qu’elle avait adoptée antérieure-
ment continuait de prévaloir pour les litiges intervenus avant l’entre en
vigueur de la nouvelle loi, dont l’objet était en fait de valider la doctrine
administrative 5. Par ailleurs, la Cour de cassation contrôle le caractère
interprétatif d’une loi, même dans le cas où le texte se présentait expressé-
ment comme interprétatif 6.
Ce problème de la rétroactivité des lois interprétatives n’a pas échappé
à la Commission pour l’amélioration des rapports entre les citoyens et les
administrations fiscale et douanière (Commission Aicardi) qui dans son
rapport au ministre des Finances proposait une modification législative
de manière à exclure la rétroactivité de la loi fiscale en tant qu’elle édicte
des obligations. Cette proposition n’a cependant eu d’écho favorable
auprès de l’administration 7 et du législateur. Une réflexion existe depuis
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longtemps en faveur d’un « code moral de la rétroactivité fiscale » 1.
Peuvent toutefois être notées des avancées.
En 2014, le ministre des Finances a signé et rendu public une charte
de non-rétroactivité fiscale, dans le but essentiellement de rassurer les
acteurs économiques, mais qui s’avère peu contraignante compte tenu
de sa portée normative limitée 2. Elle reste néanmoins un acte politique
fort dans la mesure où elle engage la crédibilité de l’État. Au fil du temps,
diverses propositions de lois constitutionnelles et organiques ont été faites
mais aucune n’a abouti. Une proposition de loi constitutionnelle visant
à affirmer le principe de stabilité fiscale dans la Constitution a été enre-
gistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 décembre 2017 3.
Elle prévoit l’inscription à l’article 34 de la Constitution d’un principe de
non-rétroactivité des lois fiscales qui serait formulé de la façon suivante :
« Les dispositions relatives à l’assiette et au taux des impositions de toute
nature ne peuvent avoir un caractère rétroactif ni remettre en cause une
situation considérée comme acquise par le contribuable, sauf en cas de
nécessité impérieuse d’intérêt général ou dans le cas où elles visent à
réduire l’assiette ou à diminuer le taux de ces impositions. »
14 Bibliographie ¸
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tion ? », Dr. fisc. 2012, no 49, ét. 542.
O. negrin, L’application dans le temps des textes fiscaux, Thèse Aix-Marseille III, 1997.
Varii AuCtOres, « Premier anniversaire de la QPC », Dr. fisc. 2011, no 14, 290.
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conduirait à des incohérences ou à des solutions contraires à l’équité 1.
La théorie du texte clair paraît essentiellement utilisée pour rejeter les
interprétations constructives visant à donner aux dispositions d’un texte
une interprétation contraire à leur lettre 2. Comme l’objet ou la portée du
texte ressort de ses dispositions mêmes, le juge refuse de se livrer à une
démarche interprétative fondée sur l’examen des débats parlementaires ou
par l’appel à une directive de l’Union européenne 3.
Lorsqu’un texte ambigu ou insuffisant a besoin d’interprétation, cette
interprétation se fait à l’aide de l’ensemble du texte et, à titre subsidiaire, s’il y
a lieu, en recourant aux travaux préparatoires 4. Ainsi, le juge a pu faire réfé-
rence aux travaux parlementaires pour considérer que les rémunérations de
certains dirigeants de sociétés qui, bien que n’étant pas salariés mais man-
dataires sociaux, sont malgré tout soumis au régime général de la sécurité
sociale, doivent être intégrées dans l’assiette de la taxe sur les salaires 5. De
même, le juge de l’excès de pouvoir peut avoir recours aux travaux parlemen-
taires, en vue d’annuler une doctrine administrative illégale 6.
1. Concl. Lobry sur CE 10 déc. 1980, no 20380, Dr. fisc. 1981, no 40, comm. 1713. Concl.
Racine sur CE 16 avr. 1984, no 38027, RJF 1984. 347.
2. V. par ex., censurant la position de l’administration et des CAA de Bordeaux, Paris et
Marseille violant un texte pourtant clair en matière de prescription du délai de reprise, CE 30
déc. 2014, 10e et 9e ss-sect., n° 371652, Rigail, RJF 3/2015, comm 234 ; Dr. fisc. 2015, n° 18,
comm. 298, note O. Debat ; Juris-Data n° 2014-032950 ; BDCF 3/215, comm. 35, concl.
A. Bretonneau (à propos de la notion d’instance devant les tribunaux).
3. CE 28 juin 2002, ass., n° 232276, Sté Schneider Electric, Dr. fisc. 2002, n° 36, comm. 657 ;
Juris-Data n° 2002-080182 – CE 30 janv. 2013, 9e et 10e ss-sect., n° 346683, Sté Ambulances
de France, Dr. fisc. 2013, n° 6, act. 74 ; Dr. fisc. 2013, n° 10, comm. 185, concl. C. Legras, note
O. Fouquet : Juris-Data n° 2013-001536 (à propos de la directive fusion) – CE 15 déc. 2014,
10e et 9 e ss-sect., n° 380942, SA Technicolor, Dr. fisc. 2015, n° 11, comm. 203 concl. É. Crépey,
note O. Fouquet ; Juris-Data n° 2014-031791 (à propos de la directive mère et filiale). Adde
D. Gutmann, « Le “test de clarté” : réflexions de méthode sur la lecture du droit français “à la
lumière” de la directive mère-fille », Droit fiscal 2014, n° 41, comm. 571.
4. CE 21 juin 1985, RJF 8,9/85, 633 et 593 concl. Chahid-Nouraï. – CE 17 mai 1989,
no 62678, RJF 7/89, 840. – CE 29 juill. 1994, no 125947, RJF 10/94, 1027. Le juge est également
conduit à analyser les travaux parlementaires pour rechercher les objectifs poursuivis par le
législateur, dans les hypothèses d’abus de droit. Sur ce point, v. ss 41. Pour un exemple, CE 15
févr. 2016, 8e et 3e ss-sect., n° 374071, SNC Distribution Leader Price, RFP 2016, n° 4, comm. 7
(à propos du régime de la semi-transparence fiscale).
5. CE 21 janv. 2016, 8e et 3e ss-sect., n° 388676, SAS Sovaro et n° 388989, Société Juliane, Dr. fisc.
2016, n° 11, comm. 223, note J. Cuber ; RJF 4/16, n° 332 (cas des présidents et dirigeants des
sociétés par actions simplifiées). Pour une réflexion critique au regard de la notion de texte clair et
de la sécurité juridique, G. Duchange, « Taxe sur les salaires et rémunération des mandataires
sociaux : les travaux parlementaires priment sur la lettre du texte », JCP 2016, ed. E, n° 16-17,
comm. 1249. Adde CE QPC, 19 juin 2017, 3e et 8e ch., n° 406064, SAS ICMI, RJF 10/2017, comm.
934, concl. E. Cortot-Boucher ; Dr. fisc. 2017, n° 51-52, comm. 595, concl. E. Cortot-Boucher ;
Juris-Data n° 2017-013385 (cas des membres du directoire de sociétés anonymes).
6. CE 14 juin 2017, 8e et 3e ch., n° 400855, Sté Orange Participations, Dr. fisc. 2017, n° 39,
comm. 480 concl. B. Bohnert ; Dr. des sociétés 2017, n° 10, comm. 179, note J.-L. Pierre ;
Dr. fisc. 2017, n° 39, comm. 478, n° 15, note C. Acard ; RJF 10/2017, comm. 906 (à propos de
la réintégration, dans le bénéfice imposable d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés, de
la quote-part de frais et charges de 12 % du montant brut de la plus-value à long terme de ces-
sion de titres de participation).
INTRODUCTION 21
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L’interprétation nécessaire d’un texte ambigu ou insuffisant se fait géné-
ralement en respectant un autre principe fondamental d’interprétation,
celui de l’interprétation restrictive des lois fiscales. Ce principe, d’expres-
sion très ancienne, trouve son fondement dans la règle de la légalité des
impôts. L’obligation fiscale ne peut résulter que de la loi et il serait dange-
reux d’abandonner au juge le pouvoir d’étendre le domaine de l’impôt. La
consécration de ce principe est aussi bien le fait de la Cour de cassation
que du Conseil d’État. Ainsi, la Cour de cassation affirme le principe selon
lequel « les dérogations fiscales sont de droit étroit » 1. De même, pour
le Conseil d’État, il est de principe et de jurisprudence constante que les
lois fiscales, et notamment celles qui portent exonération ou atténuation
d’impôts, sont d’application stricte 2. En droit de l’Union européenne, il
ressort de la jurisprudence constante de la CJUE que les termes employés
pour désigner les exonérations de TVA visées à la directive 2006/112
doivent être interprétés strictement puisque ces exonérations constituent
des exceptions au principe général selon lequel les opérations fournies à
titre onéreux par un assujetti sont soumises à cette taxe 3.
Malgré son affirmation traditionnelle, le principe de l’interprétation
restrictive du droit fiscal a une portée relativement réduite. Ainsi, l’appli-
cation stricte ne prévaut que lorsque le texte à interpréter porte exonéra-
tion ou atténuation d’impôt 4. Au contraire, pour d’autres textes, le juge
adopte une interprétation extensive. L’interprétation large est alors justi-
fiée par le fait qu’elle permet de retenir un sens favorable au contribuable 5
ou bien par le silence de la loi de telle sorte que le législateur doit être
réputé n’avoir voulu apporter aucune dérogation à un principe général du
droit, tel que celui de l’égalité des citoyens devant les charges publiques 6.
D’autre part, même pour les textes portant exonération ou atténuation
d’impôts, le Conseil d’État se réfère parfois aux travaux préparatoires pour
admettre les contribuables au bénéfice d’une exonération 7.
16 Constitutionnalité des lois fiscales ¸ Le juge administratif ne dis-
pose pas de la faculté de contrôler la conformité des lois à la Constitu-
tion 8. Cette conformité est donc contrôlée avant la promulgation sur
saisine des plus hautes autorités de l’État ou d’un groupe conséquent
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de parlementaires. Le Conseil constitutionnel a alors l’occasion de veil-
ler au respect des principes inclus dans le bloc de constitutionnalité 1.
Ainsi est jugé contraire au principe de la nécessité de l’impôt, l’impôt qui
revêtirait un caractère confiscatoire ou ferait peser sur une catégorie de
contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contribu-
tives 2. De même, le Conseil constitutionnel est amené à censurer des
dispositions législatives pour cause de rupture du principe d’égalité devant
les charges publiques 3.
Aujourd’hui le contrôle de la constitutionnalité des lois est renforcé
par la possibilité d’un contrôle a posteriori. Par une question prioritaire de
constitutionnalité, les justiciables peuvent lors d’une instance en cours
invoquer qu’une disposition légale porte atteinte à leurs droits ou libertés
garantis pas la Constitution. La QPC donne au Conseil constitutionnel
l’occasion de veiller au respect des droits et libertés que garantit la consti-
tution, concernant par exemple l’encadrement des lois rétroactives 4 ou le
principe d’équilibre des droits des parties 5, et permet ce faisant de faire
évoluer utilement les textes 6.
17 Bibliographie ¸
S. Austry, « Contrôle de constitutionnalité des lois fiscales – De la diversité des inter-
prètes de la loi », FR Lefebvre 43/13, p. 5.
G. BLanLuet, « L’entreprise et la jurisprudence fiscale du Conseil constitutionnel »,
Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, 2015, n° 49, p. 29 s.
A. de BrOsses et N. JaCquOt, « Le contrôle de constitutionnalité des lois de finances de
fin d’année », FR Fr. Lefebvre 2/17, inf. 13, p. 21.
CEFEP (colloque du), « Jurisprudence du Conseil Constitutionnel et fiscalité des entre-
prises », Dr. fisc. 2015, n° 39, Actes de colloque, 580.
M. COLLet, « La question prioritaire de constitutionnalité en matière fiscale », RJEP
2011. Étude 5.
V. Daumas, « La question prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil d’État »,
Dr. fisc. 2016, n° 38, comm. 505.
a. de bissy, « Le PEA dans tous ses états », in Mélanges Ph. Neau-Leduc, LGDJ, 2018.
1. Si le juge de l’impôt ne peut pas décider qu’une loi est contraire à la Constitution, il lui
appartient de tirer toutes les conséquences de l’autorité attachée aux décisions du Conseil
constitutionnel. Ainsi, les effets d’une déclaration d’inconstitutionnalité doivent être étendus
aux dispositions identiques à celles déclarées inconstitutionnelles (CE 16 janv. 2015, 9e et
10e ss-sect., n° 386031, Sté. Métropole Télévision, Dr. fisc. 2015, n° 28, comm. 469 ; concl.
M.-A. Nicolazo de Barmon, note S. Austry).
2. Cons. const. déc. 29 déc. 2005, no 2005-530 DC, Dr. fisc. 2006, no 1, comm. 2 ; RJF 2006,
no 290.
3. Cons. const. 29 déc. 2012, déc. no 2013-662 DC, Loi de finances pour 2013, D. 2013,
act. 19, obs. A. Mangiavillano.
4. Cons. const. 23 sept. 2011, no 2011-166 QPC, RJF 2011, no 1350.
5. Cons. const. 10 déc. 2010, no 2010-78 QPC, Sté. Imnona, Dr. fisc. 2010, no 44, comm. 410.
6. Il est utile de noter que la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée pour la
première fois devant le juge de cassation lorsqu’elle a été déclarée applicable aux instances en
cours. Cf. CE 28 nov. 2016, 10e et 9e ch., n° 390638, Min. c/ Autoguadeloupe Développement, RJF
2017, n° 2, comm. 162.
INTRODUCTION 23
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G. dedeurwaerder, Théorie de l’interprétation et droit fiscal, coll. Nouvelle bibliothèque
de thèses, Dalloz, 2010.
O. FOuquet, « Les lois de validation à l’épreuve du réalisme constitutionnel », Dr. fisc.
2016, n° 1, Act. 147.
D. Gutmann, « L’entreprise et le droit constitutionnel : la fiscalité », RLDA 12/2010,
suppl. no 55, p. 67.
Ph. MOLLard, « La question prioritaire de constitutionnalité en matière fiscale devant
la chambre commerciale de la Cour de cassation », Dr. fisc. 2016, n° 38, Coll. 508.
M. PeLLetier, « La spécificité du Contrôle de constitutionnalité des lois fiscales »,
Dr. fisc. 2015, n° 13, Dossier, n° 230.
J.-P. PastOreL, « Qu’est-ce qu’un impôt confiscatoire? », RD publ. 2016, no 2, p. 685.
F. Pezet, « Le caractère confiscatoire de l’impôt et les exigences constitutionnelles fran-
çaises », Dr. fisc. 2013, no 22, ét. 300.
L. PhiLiP, « Le contrôle par le Conseil constitutionnel de l’incompétence négative du
législateur », Mélanges C. Louit, éd. Bruylant, 2016, p. 291.
C. Raquin, « Quel contrôle des validations législatives en matière fiscale ? », RJF 1/12,
p. 3
C. rOuLhaC, « L’apport de la question prioritaire de constitutionnalité en matière fis-
cale », Dr. fisc. 2017, n° 51-52, comm. 586.
C. testard, « Pour une meilleure définition des effets contentieux d’une réserve
d’interprétation », AJDA 2017. 1177.
§ 2. Les règlements
18 Rapports loi — règlements ¸ Le Gouvernement joue un rôle impor-
tant dans l'aménagement du droit fiscal des affaires. Certes, la déci-
sion budgétaire est de la compétence du Parlement et dès le début du
xixe siècle, la Cour de cassation avait affirmé avec netteté le principe de la
compétence exclusive du législateur en matière fiscale 1, mais il appartient
au gouvernement d’assurer l’exécution du budget. Il sera ainsi amené à
émettre des règlements en application de la loi. De plus, puisqu’en vertu
de l’article 37 de la Constitution, « les matières autres que celles qui sont
du domaine de la loi ont un caractère réglementaire », le Gouvernement
pourra émettre, même en matière fiscale, des règlements autonomes. Un
tel pouvoir est cependant assez limité vu le caractère général des termes
définissant le domaine législatif en matière fiscale 2. Il concerne cepen-
dant essentiellement, l’administration fiscale, la juridiction fiscale et la
procédure fiscale.
Le Gouvernement exerce en matière fiscale son pouvoir réglementaire,
soit par des règlements d’administration publique, sur l’invitation du
législateur et après consultation du Conseil d’État, soit par des décrets pris
en Conseil d’État, par des décrets simples et par des arrêtés ministériels.
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Ces différentes sortes de règlements forment respectivement les annexes I,
II, III et IV au Code général des impôts.
La coexistence de ces deux sources du droit fiscal que constituent la
loi et le règlement pose la question de leurs rapports. Cette question
est dominée par le principe de la subordination du règlement à la loi
qui est la conséquence du principe de la légalité de l’impôt consacré par
l’article 34 de la Constitution. Ainsi, hors le domaine propre que l’on
a rappelé, le pouvoir réglementaire doit se borner à édicter les mesures
d’application qui sont nécessaires à la mise en œuvre des règles fixées par
le législateur. L’illégalité d’un décret qui contredirait la loi serait sanc-
tionnée par le juge de l’excès de pouvoir (annulation) et le juge de l’impôt
(exception d’illégalité) 1. La jurisprudence abonde d’exemples que l’on
peut schématiser en quelques règles.
Le Gouvernement ne peut d’abord prendre des dispositions qui seraient
plus rigoureuses que celles prévues par la loi. Ainsi, est illégal le règlement
qui étend le champ d’application de la loi en englobant dans l’assiette de
l’impôt des éléments qui n’y sont pas compris par la loi 2. Il en est de même
pour le texte réglementaire qui restreint le champ d’application d’une
disposition favorable au contribuable 3 ou celui qui subordonne l’octroi
d’un avantage à une condition non prévue par la loi et qui exclut ainsi, du
bénéfice de celle-ci, une catégorie d’intéressés 4.
Le Gouvernement ne peut non plus instituer un délai de forclusion à
l’expiration duquel les intéressés se trouvent privés du bénéfice des avan-
tages qui leur sont reconnus par la loi, alors qu’aucun délai n’est prévu
dans celle-ci et que le législateur n’a pas donné de délégation expresse au
Gouvernement sur ce point 5. Il ne peut pas plus instituer une prescription
particulière d’un droit reconnu par la loi au contribuable 6.
La sanction de l’illégalité est également encourue par une disposition
réglementaire à caractère rétroactif dès lors que la rétroactivité n’est pas
formellement autorisée par le législateur 7 ou, au moins, n’est pas « rendue
nécessaire » par l’application de la loi nouvelle 8.
Par ailleurs, l’illégalité est également sanctionnée, mais moins souvent,
pour des mesures réglementaires qui seraient plus favorables aux contri-
buables que celles découlant de la loi.
1. Par ailleurs, l’autorité administrative compétente saisie d’une demande tendant à l’abro-
gation d’un règlement illégal est tenue d’y déférer (CE 3 févr. 1989, ass., no 74502, Alitalia,
Dr. fisc. 1989, no 10, comm. 492).
2. CE 11 mai 1973, no 82367, Dr. fisc. 1974, no 17, comm. 507.
3. CE 21 mars 1960, Lebon 210. – CE 31 oct. 1975, Lebon 334.
4. CE 1er déc. 1971, Lebon 731.
5. CE 14 déc. 1960, Lebon 699.
6. CE 23 mai 1984, no 50.773, RJF 7/84, 439.
7. CE 5 janv. 1971, no 6.706, RJF 1979. 182. CE 9 oct. 1990, RJF 12/92, 1635.
8. CE 23 juill. 1976, no 93066, RJF 10/76, 306 ; Lebon 369.
INTRODUCTION 25
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Ainsi, un décret ne peut établir une exonération en contradiction avec
les termes de la loi 1 ou non prévue par la loi 2 de même qu’il ne peut
étendre le champ d’application d’un avantage prévu par la loi 3.
Il est à noter que parfois le juge refuse de déclarer illégales des disposi-
tions réglementaires et préfère en réduire la portée afin de leur donner un
sens conforme à la loi 4. Pour ce faire, le juge est alors obligé d’adopter une
interprétation contraire au règlement.
19 Bibliographie ¸
J. gaeremynCk, « Répartition des compétences dans la fixation de l’assiette et du taux
de l’impôt. Rôle respectif de la loi, du décret et des circulaires », RJF 1985, no 8/9,
p. 583.
L. PhiLiP, « Le partage de la loi et du règlement en matière fiscale », Dr. fisc. 1981, no 6,
p. 161.
§ 3. La jurisprudence
20 La jurisprudence, source du droit fiscal des affaires ? ¸ Le partage
du contentieux fiscal entre les juridictions judiciaires et les juridictions
administratives a eu pour résultat la formation en matière fiscale de deux
jurisprudences, l'une émanant des tribunaux administratifs et du Conseil
d'État pour les impôts directs et la taxe sur la valeur ajoutée, l'autre des
tribunaux judiciaires et de la Cour de cassation pour les droits d'enregis-
trement et certains autres impôts indirects 5. La jurisprudence a, en effet,
en droit fiscal des affaires, la même portée que dans les autres branches
du droit. Certes, la loi fiscale est souvent précise et même méticuleuse
de telle sorte que la place laissée à l’interprète est réduite ; d’autant que
l’interprétation doit se faire en principe restrictivement. Aussi il apparaît
qu’il n’y a en droit fiscal de place que pour des décisions d’espèce char-
gées de mettre en application concrètement la loi abstraite et générale.
Cependant, même si le nombre des grands arrêts est réduit en droit fiscal,
il n’en reste pas moins que l’histoire démontre la fonction créatrice de
la jurisprudence fiscale. Ainsi le Conseil d’État a pu élaborer un certain
nombre de théories générales dont les applications, modestes à l’origine,
se révèlent aujourd’hui innombrables. C’est le cas par exemple de la
théorie du bilan ou de la théorie de l’acte anormal de gestion. De même,
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la distinction des décisions de gestion et des erreurs comptables trouve
son origine dans la jurisprudence. C’est encore la pratique judiciaire qui a
posé des principes comme celui de la liberté d’inscription au bilan 1 ou a
précisé des notions comme celle de revenus qui n’avait jamais été définie
par le législateur. Ainsi, la jurisprudence a joué et joue un rôle important
dans l’évolution de la fiscalité des affaires.
Cette importance de la jurisprudence dans la création du droit fiscal des
affaires peut être démontrée, de façon tout à fait indirecte, en remarquant
que, bien souvent, les tribunaux ont été les précurseurs du législateur qui
est venu confirmer des solutions jurisprudentielles 2.
Il faut cependant reconnaître que dans de très nombreuses hypothèses,
c’est la solution inverse qui a prévalu ; en ce sens que le législateur est
venu (et vient) infirmer les solutions jurisprudentielles. La pratique n’en
manque pas d’exemples. Une telle attitude ne peut cependant être utili-
sée pour contester le caractère créateur de droit de la pratique judiciaire
en matière fiscale. Au contraire, le fait que l’administration éprouve le
besoin de combattre la jurisprudence avec l’aide du législateur, démontre
son existence.
21 Bibliographie ¸
A. AngOtti et F. Martinet, « Conseil d’État et Cour de cassation, juges de l’impôt :
Étude comparative », Dr. fisc. 2013, no 39, p. 435.
R. ChOtin, Le fisc, la petite entreprise et l’expert-comptable : jeux d’acteurs et stratégies
judicieuses, Bibl. sc. financière, t. 32, LGDJ 1994, p. 61 s.
C. david, O. FOuquet, B. PLagnet et P.-F. r aCine, Les grands arrêts de la jurisprudence
fiscale, Dalloz.
B. HatOux, « La règle de droit en matière fiscale devant l’ordre judiciaire », Dr. fisc.
2013, no 24325, p. 99.
C. de La mardiere, « Le pouvoir créateur du juge de l’impôt », in La création du droit par
le juge, Archives Phil. dr., t. 50, Dalloz 2007, p. 229.
X. vaLLi, Le juge fiscal judiciaire et le droit privé, thèse Aix-Marseille, 2014.
§ 4. La doctrine administrative
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appelée à interpréter les textes fiscaux à l'aide de divers moyens : Ins-
tructions, réponses ministérielles, notes, circulaires etc. La prolifération
de ces textes ainsi que la position « inférieure » du contribuable par rap-
port à l'administration incite à les considérer comme partie intégrante
du droit fiscal 1. Cependant, compte tenu de la hiérarchie des normes,
ce pseudo-pouvoir réglementaire n’a aucune autorité 2. La seule autorité
qu’il peut avoir provient du fait qu’appliqué autoritairement par l’une
des parties à la situation fiscale, l’autre, le contribuable, se trouve en fait
obligé par la doctrine administrative. Ainsi, dans les principes, la doctrine
administrative est-elle soumise à un contrôle de légalité qui doit amener
les juges à écarter toute interprétation administrative non seulement
contraire à la loi, mais encore qui ajouterait à celle-ci. De cette façon,
lorsque l’interprétation administrative est contraire à la loi, le contri-
buable peut la contester et opposer à l’administration le droit découlant
de la loi 3. De même, la doctrine administrative, contraire à la loi, ne peut
donner une base légale à une décision administrative elle-même contraire
à la loi 4.
Il faut tout de même reconnaître qu’en pratique, ce contrôle de légalité
est généralement inefficace. La doctrine administrative trouve en effet sa
force dans ce qui devrait être sa faiblesse. Les instructions et autres textes
l’exprimant n’ayant qu’une portée interne à l’administration ne peuvent
généralement pas être considérés comme circulaires réglementaires sus-
ceptibles d’être censurées pour illégalité ; d’autant qu’en se bornant à être
interprétative, la doctrine administrative ne peut être considérée comme
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contraire à la loi 1. La jurisprudence récente reconnaît, cependant, de plus
en plus fréquemment le caractère réglementaire et donc l’illégalité d’ins-
tructions ou de circulaires fiscales 2.
Ainsi, en tant que pratique, la doctrine administrative s’impose en fait au
contribuable, sans être pour autant l’expression d’un véritable pouvoir régle-
mentaire. Aussi, si le contrôle de légalité est peu efficace pour la protection
du contribuable, cette protection a été recherchée dans une autre voie, en
permettant au contribuable d’opposer à l’administration sa propre doctrine.
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directive européenne 1 ou à un traité international 2. Il est à noter que la
garantie de l’article L. 80 A s’applique même lorsque l’administration pré-
tend avoir recours à la procédure de l’abus de droit 3.
L’application de l’article L. 80 A, 2e al. LPF suppose cependant que cer-
taines conditions soient remplies. Il convient d’abord qu’il y ait inter-
prétation au sens de ce texte 4. Ainsi, le fait pour l’administration de
recommander à ses agents de faire preuve de bienveillance ne constitue
pas une interprétation ; il en est de même de la liberté qui serait laissée
aux services pour l’application ou non d’un texte. En fait, pour qu’il y ait
interprétation, il faut que la doctrine administrative contienne des pres-
criptions contraignantes à l’égard des agents du service 5 et que l’adminis-
tration analyse le texte fiscal pour en dégager des conséquences.
De la sorte, ne constituent pas des interprétations opposables à l’admi-
nistration les formulaires administratifs 6 ainsi que des recommandations
adressées par l’administration à ses services 7.
Il convient ensuite, que lors de la souscription de la déclaration, le
contribuable se soit prévalu de la doctrine administrative 8. Cependant,
si lors de sa déclaration, le contribuable avait appliqué la loi fiscale, il est
admis à se prévaloir, dans le délai de réclamation d’une doctrine plus favo-
rable pour faire échec à toute imposition primitive ou supplémentaire 9.
Enfin, par application du principe de l’antériorité de la doctrine, il
convient que les dispositions de portée générale prise par l’administra-
tion et portant interprétation des textes fiscaux aient été publiées avant
que le contribuable n’en ait fait application 10. Depuis peu, s’est instaurée
1. Paris 17 déc. 1991, ass. plén., no 90-357, Dr. fisc. 1992, no 18, comm. 944, concl. Ber-
nault. – Paris 25 mars 2010, ass. plén., no 08PA03658, SARL À la Frégate, Dr. fisc. 2010, no 36,
comm. 465, concl. S. Gouès, note M. Guichard et R. Grau. – Contra CAA Douai 26 avr. 2005,
ass. plén., no 02DA00736, SA Zanetti France, Dr. fisc. 2005, no 36, comm. 581, concl. J. Michel ;
RJF 2005, no 1175.
2. CE 17 déc. 1984, no 47.293, Dr. fisc. 1985, no 11, comm. 553, concl. Fouquet.
3. CE 8 avr. 1998, avis, no 192539, Dr. fisc. 1998, no 18, comm. 398, concl. G. Goulard.
4. Une réponse ministérielle qui ne comporte aucune interprétation formelle de la loi ne
peut être invoquée par un contribuable (CE 30 déc. 1998, 9e et 8e ss-sect., no 136430, Dr. fisc.
1999, no 41, comm. 755). Pour sa part, le Précis de fiscalité publié par la DGFIP facilite l’accès aux
documentations administratives officielles auxquelles il se réfère et ne s’y substitue pas. Il ne
constitue donc pas une interprétation administrative (CE 12 janv. 1987, 8e et 9e ss-sect.,
no 40686, Dr. fisc. 1987, no 20, comm. 955. – CE 16 oct. 1989, 9e et 7e ss-sect., no 77528, Dr. fisc.
1990, no 45, comm. 2114).
5. CE 20 janv. 1992, no 61584, RJF 1992, no 374. – Paris, 3e ch., 27 avr. 1995, no 94-614,
Dr. fisc. 1995, no 30, comm. 1622.
6. CE 21 janv. 1987, no 40.686, Dr. fisc. 1987, no 19/20, comm. 955.
7. CE 5 mars 1993, 8e et 9e ss-sect., no 72.709, Dr. fisc. 1993, no 47/48, comm. 2289. CAA
Bordeaux, 1re ch., 20 oct. 1992, no 91-89, Dr. fisc. 1993, no 49, comm. 2370.
8. Le contribuable doit se prévaloir expressément de l’article L. 80 A. Le juge ne peut soule-
ver d’office l’opposabilité d’une doctrine administrative qu’il connaît (CE 1er févr. 1995,
o
n 137633, RJF 3/1995, 300).
9. BOI-SJ-RES-10-10-10, no 460.
10. Depuis 2012, la doctrine administrative est publiée au Bulletin officiel des finances
publiques (BOFIP). Toute publication antérieure est abrogée de telle sorte que ne peut être
30 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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la pratique d’une publication des principaux projets d’instructions fiscales
ainsi que de certains rescrits individuels 1.
On remarquera que selon des études effectuées, la doctrine administra-
tive ne serait reconnue opposable à l’administration que dans 5 % des cas
où elle est invoquée devant le juge fiscal 2. Ce chiffre témoigne du carac-
tère le plus souvent illusoire de la garantie apportée au contribuable par
l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
La restriction de cette garantie est également due à la pratique de
l’administration qui a de plus en plus tendance, lorsqu’elle commente des
dispositions légales ou leur application pratique, à faire des réserves du
type : ceci n’est donné qu’à titre indicatif, seuls les textes ont force de loi.
Or, en face de telles réserves, le Conseil d’État juge que l’article L. 80 A
n’est pas applicable 3. Ainsi, en abusant de ce genre de réserves, l’adminis-
tration pourrait priver l’article L. 80 A LPF de toute portée pratique.
La garantie tirée de ce texte n’est pas non plus applicable en matière
procédurale, qu’il s’agisse de la procédure d’imposition ou de la procé-
dure contentieuse. En revanche, la charte des droits et obligations du
contribuable vérifié est opposable à l’administration en vertu d’une dis-
position expresse de la loi (LPF, art. L. 10). La charte indique qu’elle est
« un résumé des dispositions les plus couramment mises en œuvre en
matière de contrôle fiscal. Pour une information complète, vous devez
vous référer notamment au Code général des impôts et au Livre des pro-
cédures fiscales ». Ce document ne doit pas être confondu avec la charte
du contribuable relative à la procédure d’imposition et aux relations entre
les contribuables et l’administration fiscale, dite « charte Copé », qui,
faute de disposition légale, n’est pas opposable à l’administration selon
la jurisprudence 4.
24 Garantie apportée par une prise de position formelle sur l’inter-
prétation d’un texte fiscal ¸ Cette garantie prévue par le premier
alinéa de l'article L. 80 A LPF entre dans la catégorie des rescrits fiscaux.
formée une demande en annulation contre une instruction non reprise dans le BOFIP (CE 27
févr. 2013, 8° et 6° ss-sect., n° 357537, Dr. fisc. 2013, n° 15, comm 241, note T. Jacquement ;
RJF 5/2013, n° 520).
1. Lorsque la réponse à un rescrit individuel peut avoir une portée beaucoup plus large,
l’administration peut rédiger un rescrit général. Publié au BOFIP, il entre dans le champ
d’application de l’opposabilité de la doctrine administrative.
2. Ex. d’application : opposabilité de la documentation administrative : CE 10 déc. 1990,
9e et 8e ss-sect., no 73770, Dr. fisc. 1991, no 43, comm. 2033. – opposabilité d’une vérification
fiscale antérieure : CE 10 avr. 1991, 9e et 7e ss-sect., no 75696, Dr. fisc. 1991, no 43, comm. 2036.
3. Ex. : CE 3 févr. 1988, 8e et 7e ss-sect., no 61466, Dr. fisc. 1988, no 28, 1502.
4. V. not. CAA Paris 29 mai 2012, 10e ch., n° 10PA05558, M. Boiry, Juris-Data n° 2012-
026146 ; Dr. fisc. 2012, n° 48, comm. 532, note J.-M. Vié, au n° 11 ; RJF 10/2012, comm. 937
– TA Versailles 13 déc. 2010, 5e ch., n° 07-8854 et 07-8855, Guilbaud, RJF 07/2011, comm.
846 – TA Montreuil 21 janv. 2011, 10e ch., n° 0909290, RJF 10/2011, comm. 1073 – CAA Mar-
seille 25 nov. 2014, 4e ch., n° 11MA02180, Société GKM Import-export Ltd c/ Direction du
contrôle fiscal Sud-Est – TA Versailles 15 déc. 2015, 5e ch., n° 1206291.
INTRODUCTION 31
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Même si les deux alinéas de l'article L. 80 A du Livre des procédures
fiscales poursuivent le même objectif de l'opposabilité de la doctrine
administrative, ils ont un domaine d'application un peu différent. Le pre-
mier alinéa de l'article ne concerne que les rehaussements d'imposition
primitive. Il est nécessaire qu'une première décision ait été prise pour
qu'il puisse jouer, soit que l'administration ait émis un rôle primitif 1,
soit que la déclaration ou le paiement aient été effectués spontanément 2.
Par ailleurs, même s’il n’est pas exclu qu’elle ait été publiée, il n’est pas
nécessaire que la doctrine manifestée par une prise de positon formelle de
l’administration ait été publiée. Ainsi, une réponse particulière, à carac-
tère individuel pourra être opposée 3.
À la différence de l’article L. 80 B qui porte sur l’appréciation d’une
situation de fait, l’objet de l’article L. 80 A, 1er al. est limité à l’interpré-
tation d’un texte fiscal 4. Ainsi, ne constituent pas des interprétations
opposables à l’administration les assurances verbales ou renseignements
verbaux donnés par les services fiscaux 5, le simple fait que le vérificateur
se soit abstenu de procéder à certaines rectifications lors d’une précé-
dente vérification 6.
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Les conditions d’application du texte ont été précisées par un commen-
taire administratif 1.
La principale condition de la garantie qui réside dans l’existence d’une
prise de position formelle de l’administration se subdivise en l’exigence de
multiples conditions.
La prise de position doit, tout d’abord, être formelle, c’est-à-dire qu’elle
ne peut résulter que d’une décision en principe écrite 2, signée par un
fonctionnaire qualifié pour engager l’administration (en pratique, un
agent ayant au moins le grade de contrôleur) et non d’une attitude passive
du service ou de réponses verbales. Ainsi, l’absence de critique, c’est-à-dire
de proposition de rectification à l’issue d’un contrôle ne paraît pas pouvoir
être analysée en une prise de position formelle 3. Il en est de même de
l’absence de réserve à la suite du dépôt d’une déclaration de succession 4.
La prise de position doit, par ailleurs, être antérieure à la date de dépôt de
la déclaration ou, en l’absence d’obligation déclarative, à celle du paiement 5.
Enfin, la prise de position doit concerner le contribuable lui-même 6
même si elle est exprimée dans un document adressé à un autre contri-
buable 7. Ainsi, un contribuable ne peut se prévaloir pour son cas per-
sonnel, de l’appréciation d’une situation de fait concernant d’autres
contribuables 8. Selon le Conseil d’État, peuvent seuls se prévaloir des dis-
positions de l’article L. 80 B du LPF, les contribuables qui se trouvent dans
la situation de fait sur laquelle l’appréciation invoquée a été portée ainsi
que les contribuables qui ont participé à l’acte ou à l’opération qui a donné
naissance à cette situation sans que les autres contribuables puissent
utilement invoquer une rupture à leur détriment du principe d’égalité 9.
Cependant, l’appréciation formelle portée par les services fiscaux sur la
situation de fait d’un contribuable au regard d’un impôt est opposable à
l’administration pour l’établissement d’un autre impôt faisant appel aux
mêmes critères et reposant sur la même base 10.
1. BOI-SJ-RES-10-10-20.
2. Il est cependant admis que le redevable puisse se prévaloir d’une prise de position pure-
ment verbale sur sa situation, mais à la condition évidente que la réalité de cette prise de posi-
tion soit établie (TA Dijon 23 juin 1998, 1re ch., no 96-6953, Dr. fisc. 1998, no 8, comm. 160).
3. En ce sens, CE 5 déc. 1983, no 32180, Dr. fisc. 1984, no 10, comm. 505. – CAA Bordeaux
19 mai 1993, 2e ch., no 92-74, Dr. fisc. 1994, no 12, comm. 575.
4. Com. 7 janv. 1997, Bull. civ. IV, no 7, p. 5 ; BOI 13 L-3-98.
5. Ex. : CAA Nancy 16 mars 1995, 2e ch., no 92-512, Dr. fisc. 1995, no 38, comm. 1780.
6. CE 17 juin 1996, no 145594, Dr. fisc. 1996, comm. 1192 ; RJF 7/96, 902. Il peut s’agir, par
exemple, d’un dégrèvement accordé pour les années antérieures : CAA Bordeaux 11 mars 1993,
2e ch., no 91-95, Dr. fisc. 1994, no 8, comm. 362, concl. Laborde.
7. CAA Nancy 27 nov. 2003, 2e ch., no 99-844, Dr. fisc. 2004, no 11, comm. 335.
8. CE 15 janv. 1982, no 22.923, Dr. fisc. 1982, no 16, comm. 896. – CAA Bordeaux 28 juin
1994, 1re ch., no 93-1473, Dr. fisc. 1994, no 51, comm. 2266.
9. CE 17 juin 1996, 9e et 8e ss-sect., no 145 94, Dr. fisc. 1996, no 40, comm. 192 et concl.
Ph. Martin, Dr. fisc. 1996, no 49, comm. 1476 ; RJF 7/96, 902.
10. CE 3 juin 2013, 8e et 3e ss-sect., no 346987, SAS Intercoop, RJF 8-9/13, no 851 ; concl.
B. Bohnert, BDCF 8-9/13, no 96.
INTRODUCTION 33
international.scholarvox.com:ENCG Marrakech:1022690898:88866206:196.113.29.75:1587236385
Mais pour que la prise de position formelle de l’administration lui
soit opposable, encore faut-il qu’elle consiste en une appréciation d’une
situation de fait au regard d’un texte fiscal. Il faut donc que, dans sa prise
de position, l’administration ait tiré les conséquences juridiques d’une
situation donnée. Ainsi, l’appréciation peut porter, par exemple, sur la
taxation selon le régime des BIC ou celui des BNC, ou sur l’admission
d’une déduction supplémentaire pour frais professionnels 1 ou encore sur
l’acceptation formelle d’un taux d’amortissement ou du mode de calcul
d’une provision 2. En revanche, une prise de position formelle relative au
report en arrière de déficits n’est pas opposable 3.
Lorsque le contribuable a saisi l’administration d’une demande écrite
sollicitant de sa part une prise de position formelle sur sa situation
fiscale, celle-ci a l’obligation de répondre dans un délai de trois mois.
Le manquement à cette obligation n’est pas, cependant, spécialement
sanctionné. Le défaut de réponse de l’administration ne fait pas naître
une décision implicite d’acceptation 4. En effet, selon la jurisprudence du
Conseil d’État, un délai n’a qu’un caractère indicatif s’il n’est pas assorti
d’une sanction expresse 5.
La prise de position de l’administration ne peut pas, en principe, faire
l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Néanmoins, il en va autrement
si, à supposer que le contribuable s’y conforme, elle entraîne des effets
notables autres que fiscaux et qu’ainsi, la voie du recours de plein conten-
tieux devant le juge de l’impôt ne lui permettrait pas d’obtenir un résultat
équivalent 6. Tel est le cas lorsque le fait de se conformer à la prise de
position de l’administration aurait pour effet, en pratique, de faire peser
sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement
sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet impor-
tant pour lui ou de l’amener à modifier substantiellement un tel projet 7.
Au préalable, le contribuable doit saisir l’administration, dans un délai
de deux mois, pour solliciter un second examen de cette demande, sans
invoquer d’éléments nouveaux 8.
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Ce devrait être le cas s’agissant de la procédure de rescrit introduite par
la 2e loi de finances rectificative pour 2017 1 qui permet à un contribuable
d’interroger l’administration pour avoir la confirmation que l’opération
de restructuration (fusion, de scission ou d’apport partiel d’actif) qu’il
projette bénéficiera des régimes de faveur, en n’ayant pas comme objectif
principal ou comme un de ses objectifs principaux la fraude ou l’évasion
fiscale 2. L’administration a six mois pour se prononcer, ce qui paraît
exagérément long.
26 Bibliographie ¸
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2015, n° 130, p. 171.
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Dr. fisc. 2010, no 24, act. 211.
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Dr. fisc. 2010, no 21, act. 182.
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mais ne bée pas », Dr. fisc. 2017, n° 8, comm. 172.
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par un traité dont les dispositions sont contraires à ce texte et le juge admi-
nistratif ou judiciaire est compétent pour constater cette « abrogation » 1.
L’administration interprète, cependant, le principe de la supériorité
des conventions internationales sur le droit interne comme ne pouvant
aboutir à une aggravation de la situation du contribuable par rapport au
droit interne. Ce principe de non-aggravation est, en effet, un principe de
droit fiscal international qui est consacré par la jurisprudence de certains
pays. En France, la jurisprudence du Conseil d’État ne l’a jamais consacré
directement, même si la Haute Juridiction paraît y être favorable 2. On
notera cependant que la Haute Juridiction alors qu’elle y était invitée n’a
pas consacré ce principe en faisant prévaloir la convention 3.
Quant aux lois postérieures à la convention, la prééminence de la
convention internationale était diversement appréciée par la jurispru-
dence. Alors que la Cour de cassation avait consacré la prééminence de la
norme internationale sur la norme interne 4, le Conseil d’État refusait de
reconnaître cette prééminence au motif que le juge administratif français
ne contrôle pas la conformité des lois aux engagements internationaux 5.
Cependant, à l’occasion de l’application du Traité de Rome, la Haute
Juridiction administrative a harmonisé (implicitement) sa jurisprudence
avec celle des juridictions judiciaires. Le Conseil d’État juge, désormais,
que la primauté du droit international positif doit être assurée en écar-
tant, en cas d’incompatibilité, l’application de la loi interne postérieure 6.
Bien qu’intervenue en matière de droit électoral, cette jurisprudence pré-
sente une portée générale, de telle sorte qu’elle trouve, également, applica-
tion en matière fiscale.
La supériorité des conventions fiscales est bien assise. Le Conseil d’État
estime que la méconnaissance par le juge du fond du champ d’application
d’une convention fiscale internationale doit être relevée d’office, s’agis-
sant d’un motif d’ordre public 7. Ainsi en est-il lorsque le juge du fond a
appliqué à une société une convention fiscale internationale signée par
la France alors qu’elle ne pouvait être regardée comme résidente du pays
étranger en vertu de ladite convention 8.
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28 Le droit de l’Union européenne ¸ Par rapport aux autres conventions
internationales, l'application du droit de l'Union européenne soulève
essentiellement la question de l'applicabilité en France des normes déri-
vées des traités, autrement dit des dispositions édictées par les organes de
l'Union. S'il est certain que les règlements sont directement applicables
dans les États membres 1, la question est plus discutée pour les directives.
La France, comme tout pays signataire a l’obligation d’intégrer les direc-
tives européennes dans sa législation 2. En conséquence, la Cour de justice
des communautés, après avoir rappelé que les États sont tenus, en vertu
de la directive, d’une obligation de résultat qui doit être exécutée, a ajouté
qu’en cas d’exécution incorrecte ou d’inexécution, les dispositions de la
directive pouvaient être invoquées par le contribuable à défaut de mesures
d’application prises dans les délais à l’encontre de toute disposition natio-
nale non conforme à cette directive 3. Cependant, le Conseil d’État avait
jugé que seules les autorités politiques sont compétentes pour décider de
la forme à donner à l’exécution des directives et qu’en conséquence une
directive ne peut être invoquée directement par un contribuable à l’appui
d’une requête dirigée contre un acte individuel d’imposition 4.
Depuis cette première jurisprudence, le Conseil d’État avait assoupli sa
position par diverses dispositions favorables aux justiciables 5. Aujourd’hui,
le Conseil d’État admet l’invocabilité directe des dispositions incondition-
nelles et précises d’une directive européenne que la France n’a pas trans-
posée dans les délais 6.
29 Application nationale du droit de l’Union européenne ¸ Le droit de
l'Union européenne ne s'applique pas aux situations purement internes,
mais en principe aux seules situations transfrontalières. Les États qui
entendent établir ou maintenir des restrictions à l'encontre de l'exercice
des « grandes libertés communautaires » 7 par leurs propres ressortissants
sur leur propre territoire en ont la possibilité 8. C’est ce qu’il est convenu
1. CE 5 janv. 1973, 4e et 1re ch., no 81690, Rec. 1973, p. 10. – CE 24 sept. 1990, 4e et 1re ch.,
no 58657, Boisdet, Rec. 1990, p. 250.
2. Cons. const. 10 juin 2004, n° 2000-496 DC, Loi pour la confiance dans l’économie numé-
rique, D. 2004. 739 ; JCP 2004. II. 10116.
3. CJCE 23 avr. 1991, Dr. fisc. 1991, no 49, comm. 2411 ; RJF 7/91, no 1031.
4. Not., CE 22 déc. 1978, ass., no 11604, Cohn-Bendit, RJF 3/79, 166. – CE 25 mars 1987,
8e et 7e ss-sect., no 59394, Dr. fisc. 1987, no 40, comm. 1756 ; RJF 6/87, no 618.
5. CE 3 févr. 1989, ass., Alitalia, RJF 3/89, 299, concl. Chahid Nouraï. – CE, ass., 6 févr.
1998, no 138777, Lebon 30. – CE, 1re et 2e sect. 3 déc. 2001, no 226514, Dr. fisc. 2002, no 41,
comm. 806.
6. CE, ass., 30 oct. 2009, no 298348, Mme Perreux, Dr. fisc. 2010, no 10, comm. 219, note
M. Guichard et R. Grau.
7. Notamment la liberté de circulation des personnes ou la liberté d’établissement des
entreprises.
8. CJCE, plén., 26 janv. 1993, aff. C-112/91, Werner, Dr. fisc. 1993, n° 19, comm. 1000, obs.
X. Rohmer ; Rec. CJCE, I, p. 429.
38 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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d’appeler les discriminations à rebours 1. Mais si le droit de l’Union euro-
péenne autorise certaines discriminations à rebours, il laisse les États
membres traiter aussi libéralement leurs propres ressortissants que ceux
des autres États membres exerçant les mêmes activités sur leur territoire 2.
C’est pourquoi, lors de la transposition d’une directive applicable aux
situations transfrontalières, le législateur national peut décider d’aligner
la législation interne sur le droit de l’Union européenne. Il choisit alors de
réserver aux situations nationales le même sort qu’aux situations trans-
frontalières et le juge national doit donner au texte appliqué aux situa-
tions purement internes la même interprétation que celle que la CJUE
donnerait à ce texte appliqué aux situations transfrontalières. Est de la
sorte consacré un principe selon lequel en présence d’un texte unique il
ne peut y avoir qu’une interprétation unique 3. Ainsi, les contribuables
peuvent utilement invoquer les dispositions de la directive et la Cour de
justice peut être appelée à les interpréter.
30 Aides d’État non conformes aux traités de l’Union euro-
péenne ¸ Si le droit de l'Union européenne est invoqué de plus en plus
par les contribuables pour critiquer les législations nationales incon-
ventionnelles, il l'est également par la Commission européenne pour
remettre en cause certaines aides attribuées par les États membres 4.
En effet, l’article 107 du TFUE pose un principe d’interdiction assorti
de dérogations. Il prévoit que, sauf dérogations prévues par les traités,
sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles
affectent les échanges entre les États membres, les aides accordées par
les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit
qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant
certaines entreprises ou certaines productions 5. Les États membres ont
l’obligation de récupérer les aides non conformes, sauf cas d’impossibilité
absolue 6. Le contribuable peut-il alors obtenir réparation sur le terrain
indemnitaire ? Le Conseil d’État fournit une réponse négative. Il estime
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que la restitution de l’aide par le contribuable en ayant bénéficié ne
peut constituer un préjudice indemnisable dès lors que l’État est tenu
de procéder à la récupération de l’aide en mettant à la charge du béné-
ficiaire une somme correspondant au montant de l’exonération d’impôt
illégalement accordée 1.
31 Bibliographie ¸
O. ALLOnard, F. Berred et B. TresCher, Les frontières fiscales dans l’Union Européenne
appliquées à la fiscalité des entreprises, L’Harmattan, 2016.
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Dr. fisc. 2016, n° 18-19, Et. 309.
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aides d’État : pas d’échappatoire par la voie indemnitaire », AJDA 2017. 1445.
40 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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colloque du 11 mai 2012, université Paris Descartes / université Paris I-Panthéon-
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C. viessant, La pénétration du droit communautaire en droit fiscal français, Thèse dactyl.
Aix-Marseille III, 1999.
1. Ainsi le principe « Les lois spéciales dérogent aux lois générales » condamne devant
l’ordre judiciaire la doctrine de l’autonomie du droit fiscal (Com. 24 mars 1998, no 761, D,
Hoffer, RJF 7/98, no 886).
2. CE 26 juill. 1985, RJF 1985 plén., no 41798 et 41799, RJF 10/85, 1268. – Cons. const.
3 juill. 1986, RJF 11/86, 613.
3. En cela les véritables principes généraux du droit tel que par exemple le principe de neu-
tralité, se distinguent des principes généraux qui découlent de la Constitution tels que le prin-
cipe de légalité de l’impôt, le principe de nécessité de l’impôt ou le principe d’égalité devant
l’impôt.
4. Bien qu’il faille plutôt parler de conditions et de limites de la rétroactivité de la loi fiscale.
Le législateur doit respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le prin-
cipe de non-rétroactivité des peines et des sanctions. Par ailleurs, les dispositions rétroactives
doivent être justifiées par un motif impérieux d’intérêt général. Cf. Cons. const. 29 déc. 1986,
no 86-223 DC, Loi de finances pour 1986, Dr. fisc. 1987, comm. 50 ; RJF 1987, no 1187 – Cons.
const. no 2010-78 QPC, 10 déc. 2010, Sté Imnoma, Dr. fisc. 2010, no 51, comm. 481, note
E. Meier et G.-H. Boucheron – Cons. const., 14 févr. 2014, n° 2013-366 QPC, SELARL PJA, ès
qualités de liquidateur de la société Maflow France (Validation législative des délibérations des syndi-
cats mixtes instituant le « versement transport »), JO du 16 févr. 2014, n° 40, p. 2724 ; Rec. Cons.
const. 2014. 130 ; Juris-Data n° 2014-002892 ; JCP 2014. Doctr. 548, n° 37, obs. B. Mathieu –
Cons. const., 2 mars 2016, n° 2015-525 QPC, SCI PB 12, Dr. fisc. 2016, n° 10, act. 141.
5. CJCE 23 avr. 2009, aff. 460/07, Sandra Puffer, RJF 2009, no 713. 53.
6. Ex. : CE 4 juin 1980, no 14913, RJF 10/80, 426. – Crim. 4 déc. 1978, D. 1979. 90, note
J. C. ; JCP 1977. II. 19124, note Tixier et Robert. – Cons. const. 29 déc. 1984, RJF 3/85, 250 ;
INTRODUCTION 41
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principe du caractère contradictoire de la procédure en matière fiscale 1.
Peut encore être mentionnée la garantie des droits résultant de l’objectif à
valeur constitutionnelle de clarté et d’intelligibilité de la loi, reconnu en
matière fiscale 2. Au-delà d’autres principes sont plus couramment uti-
lisés. En revanche l’interdiction des impôts confiscatoires ne s’introduit
dans le système fiscal que subrepticement par l’intermédiaire de la notion
d’impôt excessif par rapport aux facultés contributives 3.
33 Le principe de l’égalité devant l’impôt ¸ Le principe le plus souvent
utilisé par le juge fiscal est celui de l'égalité devant l'impôt. Ce principe,
variété de celui de l'égalité devant les charges publiques 4 exige, selon la
formulation du Conseil d’État, que le même régime juridique soit appli-
qué à toutes les personnes qui se trouvent dans des situations identiques
mais il ne s’oppose pas à ce que des dispositions différentes soient appli-
quées à des personnes qui se trouvent dans des situations différentes 5. Ce
principe de l’égalité devant l’impôt a été consacré par le Conseil consti-
tutionnel qui juge que des contribuables qui se trouvent placés dans des
conditions quasiment identiques ne peuvent être traités différemment
au regard de la loi fiscale 6. Selon la formule désormais traditionnelle du
Conseil constitutionnel, « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le
législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il
déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un
et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport
Dr. fisc. 1985. 117. On note que le juge pénal peut s’appuyer sur des décisions des juridictions
administratives pour former sa conviction ; il justifie sa décision sans que cela aboutisse à
méconnaître les principes de la plénitude de juridiction du juge répressif. Cf. Crim. 4 nov. 2010,
n° 10-81233, n° 6323 F-D, RJF 04/2011, comm. 513 (prise en compte de décisions rendues par
les juridictions administratives ayant déchargé certaines des sociétés en cause des impositions
auxquelles elles avaient été assujetties). Adde D. Gaillardot, « Les conséquences de l’indépen-
dance des contentieux pénal et fiscal pour l’autorité judiciaire », Dr. fisc. 2016, n° 38, comm.
504 – L. Ayrault, « L’indépendance des contentieux pénal et fiscal », Dr. fisc. 2016, n° 38,
comm. 503.
1. Ex. : CE 25 oct. 1985, no 29116, Lebon 300 ; RJF 12/85, 832 et 797, concl. Chahid Nou-
raï. – CE 7 déc. 2001, no 206145, Dr. fisc. 2002, no 15, comm. 332.
2. « Considérant qu’en matière fiscale, la loi, lorsqu’elle atteint un niveau de complexité tel
qu’elle devient inintelligible pour le citoyen, méconnaît en outre l’article 14 de la Déclaration
de 1789 » (Cons. const. 29 déc. 2005, no 2005-530 DC, RJF 3/2006, no 290 ; D. 2006. 826, obs.
V. Ogier-Bernaud et C. Severino).
3. Cons. const. 29 déc. 2005, no 2005-530 DC, préc. – Cons. const. 29 déc. 2012, no 2012-
661 DC, JO 30 déc. 2012, p. 21007.
4. Cons. const. 29 déc. 2012, no 2012-662 DC, RFDA 2013, no 1, étude B. Genevois. –
Cons. const. 11 avr. 2013, no 2013-666 DC.
5. CE 4 févr. 1944, Lebon 45 ; RD publ. 1944. 158, note Jeze, concl. Chenot ; JCP 1946.
II. 3115, note Charlier. – CE 28 mars 1997, RJF 5/97, 508.
6. Pour l’affirmation du principe d’égalité devant l’impôt ou devant la loi fiscale, v. pour les
décisions les plus anciennes 133 DC, 136 DC, 140 DC, 164 DC, 184 DC, 186 DC, 209 DC,
268 DC ou encore, déc. 2009-599, Dr. fisc. 2010, no 4, comm. 98, note L. Vallée ; RJF 2010. 273.
42 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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avec l’objet de la loi qui l’établit » 1. Ainsi une dérogation à l’égalité peut
être justifiée par le souci de lutter contre la fraude fiscale 2 ou par la pré-
occupation économique d’assurer la continuité des entreprises 3. S’agis-
sant du premier motif, le législateur est fondé à poursuivre l’objectif à
valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales 4.
34 Le principe de nécessité de l’impôt ¸ Le principe de la nécessité de
l'impôt trouve son fondement dans la Déclaration des droits de l'homme
et du citoyen de 1789 sous la forme de la nécessité de la contribution
publique et du consentement à l'impôt 5. Consacré de façon indirecte par
le Conseil constitutionnel 6, puis confirmé 7, le principe emporte que seul
un impôt nécessaire ou indispensable à la vie collective et au besoin de
l’organisation sociale peut justifier une atteinte aux droits et libertés. Si
le principe de nécessité de l’impôt constitue une garantie 8, il comporte
une autre face en ce qu’il fonde la lutte contre la fraude fiscale. Parce que
l’impôt est indispensable il doit peser sur tous les contribuables et une
atteinte aux droits et libertés est justifiée 9.
35 Le droit à la sécurité fiscale ¸ L'évolution de la jurisprudence amène à
considérer qu'est consacré un droit à la sécurité fiscale, droit qui consiste
à garantir aux contribuables le montant des impositions mises à leur
charge de telle manière que chacun puisse prévoir sa situation fiscale et
1. Cons. const. no 95-369, 28 déc. 1995, considérant 5, Dr. fisc. 1996, no 1/2, comm. 3.
Dans le même sens, Cons. const. no 2009-577, 3 mars 2009, Dr. fisc. 2009, no 16, comm. 280.
2. Cons. const. no 83-164 DC, 20 déc. 1989, Dr. fisc. 1984, no 2-3, comm. 49. – Cons. const.
26 nov. 2010, no 2010-70, QPC, Dr. fisc. 2011, no 6, comm. 209, note F. Dieu ; RJF 2/11, no 210.
3. Cons. const. no 2003-477 DC, 31 juill. 2003, Loi pour l’initiative économique, Dr. fisc.
2003, no 39, comm. 661. Selon le juge constitutionnel, le principe d’égalité ne fait pas obstacle
à ce que, pour des motifs d’intérêt général, le législateur édicte, par l’octroi d’avantages fiscaux,
des mesures d’incitation au développement d’activités économiques en appliquant des critères
objectifs et rationnels en fonction des buts recherchés.
4. Du point de vue normatif, la qualification d’objectif à valeur constitutionnelle donnée à
la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales est constante dans la jurisprudence du juge consti-
tutionnel. Cf. par ex. Cons. const., 27 oct. 2017, n° 2017-667 QPC, Cormorèche, Dr. fisc. 2017,
n° 45, act. 598 (inconstitutionnalité d’une sanction manifestement disproportionnée à la
gravité des faits que le législateur a entendu réprimer).
5. Art. 14. Le principe du consentement à l’impôt emporte un droit de contrôle sur les
finances publiques pour constater la nécessité de l’impôt et pour en suivre l’emploi. Sur
l’impossibilité d’invoquer le consentement à l’impôt en matière de QPC, E. Mouriesse, « QPC
et droit au consentement à l’impôt », RF fin. publ. 2017, no 137, p. 241.
6. Cons. const. 29 déc. 1993, déc. n° 93-330 DC, Dr. fisc. 1994, comm. 3.
7. Cons. const. 28 déc. 1995, déc. n° 95-369 DC, Dr. fisc. 1996, comm. 3 ; RJF 1996, n° 209. –
Cons. const. 29 déc. 2005, déc. n° 2005-530 DC, Dr. fisc. 2006, n° 1-2 ; RJF 3/2006, n° 290.
8. La garantie apportée par le principe de nécessité de l’impôt est cependant limitée
car tout impôt participant à l’équilibre budgétaire est en principe considéré comme
nécessaire.
9. Cons. const. 29 déc. 1999, Déc. n° 99-424 DC, Loi de finances pour 2000, cons. 52, AJDA
2000. 37, note J.-E. Schoettl.
INTRODUCTION 43
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agir en considération 1. Ce droit à la sécurité fiscale s’oppose notamment
aux volte-face de l’administration dans son application de la loi ainsi
qu’aux lois fiscales rétroactives 2. Ce droit est consacré par le Conseil
d’État sous la forme d’un principe de sécurité juridique 3 avec en complé-
ment l’émergence européenne d’un principe de confiance légitime 4.
Pour sa part, le Conseil constitutionnel est plus prudent en jugeant
qu’aucune norme de valeur constitutionnelle ne garantit un principe dit
de confiance légitime 5 bien que, de façon implicite, il paraît reconnaître
le principe de sécurité juridique et de confiance légitime en droit fiscal 6.
36 Le principe de neutralité fiscale ¸ L'affirmation d'un principe de
neutralité fiscale est soumise à interrogation 7. La référence à la neutra-
lité fiscale n’a, en effet, pratiquement plus cours dans la doctrine fiscale
actuelle 8. Une telle indifférence de la doctrine contemporaine a une
explication historique.
Le principe de la neutralité fiscale, dans une acception traditionnelle,
est fondé sur la thèse du libéralisme classique selon laquelle l’impôt doit
avoir pour unique fonction de financer les dépenses publiques. La puis-
sance publique n’a donc pas à s’ingérer dans les affaires des particuliers.
Le concept de neutralité fiscale est alors absolu. La neutralité fiscale étant
ainsi liée au libéralisme et à une fonction uniquement budgétaire de
l’impôt, il est compréhensible que l’affirmation de la neutralité de l’impôt
ait été abandonnée au fur et à mesure que le rôle de l’impôt en tant
qu’instrument d’interventionnisme économique et social s’est progressi-
vement affirmé. Cependant, malgré les apparences, l’interventionnisme
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fiscal actuel ne s’oppose pas à l’affirmation d’un principe 1 de neutralité de
l’impôt, l’essentiel étant d’en déterminer la signification précise 2.
Il ne faut pas donner à la neutralité fiscale une signification absolue
qui l’amènerait à se trouver en contradiction avec toute politique fiscale.
« Il est essentiel de distinguer deux catégories de défaut de neutralité de
l’impôt suivant que le droit fiscal influence les décisions des contribuables
de façon ordonnée (incitation fiscale) ou de façon désordonnée (distor-
sion fiscale) » 3. Si l’incitation fiscale est contraire à la neutralité en ce
sens que le droit fiscal incite à prendre ou à ne pas prendre telles décisions,
elle poursuit un objectif qui, s’il est étranger au droit fiscal, n’en mérite
pas moins la considération. Au contraire, la neutralité fiscale doit justifier
toute condamnation des distorsions, c’est-à-dire des défauts de neutralité
qui ne réalisent aucun objectif extérieur au droit fiscal.
Ainsi entendue la neutralité fiscale ne s’oppose pas à toute politique fis-
cale, mais elle entraîne la recherche de la suppression des distorsions qui
enlèvent à la fiscalité sa cohérence 4.
37 Bibliographie ¸
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1. Indépendamment de toute référence juridique, un principe peut être défini comme une
règle d’action s’appuyant sur un jugement de valeur et constituant un modèle ou un but.
2. En ce sens, v. J.-P. Jarnevic, « Interventionnisme et neutralité en matière fiscale »,
Mélanges Péquignot, Centre d’études et de recherches administratives Montpellier, 1984, p. 381.
3. J.-F. Poumerol, Neutralité de l’impôt à l’égard des structures juridiques des entreprises, thèse
Paris 1, 1991, p. 11.
4. Le principe de neutralité fiscale se rencontre également en droit européen, par exemple,
sous la forme du principe de non-discrimination fiscale applicable en matière de fiscalité
directe (V., Th. Georgeopoulos, « Le rôle créatif du juge communautaire en matière de fiscalité
directe », RTD eur. 2005/1).
INTRODUCTION 45
international.scholarvox.com:ENCG Marrakech:1022690898:88866206:196.113.29.75:1587236385
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46 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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bénéficiaires. Mais si le droit fiscal « intéresse » la gestion de l’entreprise,
c’est surtout en raison de ses répercussions sur les diverses décisions de
gestion. Ainsi, il n’est pas indifférent que l’entreprise soit exploitée sous
la forme individuelle ou sous la forme sociale encore que sur ce point
la fiscalité n’ait pas, en réalité, l’importance qu’on s’accorde à lui recon-
naître. De même, si l’entreprise veut procéder à des investissements,
elle peut utiliser ses fonds propres ou emprunter. Son choix ne sera pas
indifférent puisque si l’entreprise emprunte, les intérêts qu’elle versera au
prêteur constitueront des charges d’exploitation déductibles du bénéfice
imposable alors que l’utilisation de fonds propres n’aurait entraîné aucune
déduction supplémentaire.
Il existe ainsi une gestion fiscale de l’entreprise que l’on peut définir
comme l’action de l’entreprise pour réduire sa charge fiscale en réalisant
une économie supérieure aux risques qu’elle peut être amenée à prendre.
Mais si le droit fiscal intéresse la gestion de l’entreprise, il ne doit pas
influer directement sur cette gestion. Le principe de la liberté de ges-
tion ou de la non-immixtion dans la gestion interdit à l’administration
de critiquer la décision de l’entreprise 1. Ainsi, dans l’exemple indiqué,
l’administration ne peut pas reprocher à l’entreprise d’avoir eu recours à
l’emprunt alors que les fonds propres auraient été suffisants 2. De même,
une banque est libre de financer sa succursale française soit par du capital,
soit par un prêt 3. D’une façon générale, il n’appartient pas à l’adminis-
tration de se prononcer sur l’opportunité des choix arrêtés par l’entreprise
pour sa gestion 4. En effet, si selon le Constitution de 1793, payer l’impôt
est un devoir, une « honorable obligation », le « bon père de famille » et le
bon gestionnaire ont aussi le devoir de payer le moins d’impôt possible 5.
En vertu de la liberté de gestion reconnue à l’entreprise, celle-ci a d’abord
le droit de diminuer sa charge fiscale en évitant de créer la matière impo-
sable, c’est-à-dire que l’entreprise a la possibilité de choisir de réaliser ou
de ne pas réaliser de bénéfices. Selon le Conseil d’État, le contribuable n’est
jamais tenu de tirer des affaires qu’il traite le maximum de profit que les
circonstances lui auraient permis de réaliser 6.
1. CE 3 déc. 1975, no 89.412, Dr. fisc. 1976, no 13/14, comm. 467. Ce principe a été solennel-
lement rappelé par le Conseil d’État dans sa décision mettant fin à la jurisprudence relative à la
théorie du risque excessif (CE 13 juill. 2016, sect., n° 375801, SA Banque, Dr. fisc. 2016, n° 36,
comm. 464, concl. E. Bogdam-Tognetti, note O. Fouquet ; RJF 11/16, n° 937).
2. CE 20 déc. 1963, Dr. fisc. 1964, no 13, Doctr., concl. Martin.
3. CE 11 avr. 2014, no 344990, 346687 et 349015, 359640, BF Lefebvre 7/2014 inf. 602. – CE
17 juin 2015, 10e et 9e ss-sect., n° 369722, 369724 et 369725, Min. c/ Sté. AIG Management
France SA, RJF 10/15, n° 759.
4. CE 23 janv. 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 369214, SAS Rottapharm, RJF 4/2015, n° 300 ;
concl. M. A. Nicolazo de Barmon, BDCF, 4/2015, n° 42.
5. V., T. Delaye, « Le choix de la voie la moins imposée – Étude de droit comparé », Bruxelles,
1977.
6. V., par ex. : CE 7 juill. 1958, 8e ss-sect., no 35.977, Dr. fisc. 1958, no 44, comm. 938.
INTRODUCTION 47
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La liberté de gestion de l’entreprise emporte aussi le droit d’opter pour
la solution la moins imposée 1. Ce droit permet d’abord à l’entreprise
d’exploiter son activité dans le cadre juridique de son choix 2, mais d’une
façon plus générale lui permet d’opposer à l’administration toute décision
de gestion (par exemple, relative au financement). L’administration n’est
pas en effet la mieux placée pour porter une appréciation sur la gestion des
entreprises. Ainsi, au cas d’augmentation de capital réservée aux associés,
l’administration ne pourrait contester l’absence de prévision de prime
d’émission malgré la présence de réserves importantes bien que la décision
des associés ait permis d’augmenter le nombre de titres créés et donc les
possibilités de déductibilité des dividendes servis aux actions de numéraire
prévue par l’article 214 A du CGI 3.
Le droit de choisir la voie la moins imposée emporte également le droit
de choisir librement la dépense que l’entreprise entend engager. Personne
ne peut reprocher à l’entreprise d’avoir, pour l’obtention d’un même
résultat, dépensé plus qu’elle n’aurait pu le faire en choisissant un autre
moyen 4. Tout contribuable est libre de choisir la voie la plus onéreuse et
donc, en augmentant ses dépenses, de diminuer le bénéfice imposable :
c’est encore le droit de choisir la voie la moins imposée qui permet de choi-
sir l’ordre des opérations. Une donation de titres avant leur cession par les
donataires n’est pas constitutive d’un abus de droit même si cette façon
de procéder permet de purger les plus-values 5. D’une façon générale,
une donation-cession n’est pas constitutive d’un abus de droit si la dona-
tion n’est pas fictive 6. A été jugée fictive la donation de la nue-propriété
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de titres sociaux, lorsque celle-ci avait été suivie de la conclusion d’une
convention de quasi-usufruit postérieurement à la cession des titres alors
que le donateur avait perçu une fraction du prix excédant ses droits d’usu-
fruitier, ce qui révélait l’absence d’intention de ce dernier de mettre les
donataires en possession de la nue-propriété des titres, mais seulement de
constituer à leur profit une simple créance de restitution 1. En dehors de
ce cas, le juge estime que n’est pas abusive la donation de la nue-propriété
de titres sociaux avec clause de remploi et report de l’usufruit non assorti
d’une sûreté 2.
Le principe de la non-immixtion dans la gestion doit être complété par
la notion d’erreur de gestion. Si l’administration n’a pas à s’immiscer dans
la gestion interne de l’entreprise, elle n’a pas non plus à donner de leçon
au contribuable. C’est donc reconnaître à l’entreprise un droit à l’erreur.
Chacun a le droit imprescriptible de faire de mauvaises affaires 3.
Le principe de la liberté de gestion n’est cependant pas absolu, et l’admi-
nistration dispose parfois du droit de critiquer un acte de gestion.
39 Bibliographie ¸
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1. CE 14 oct. 2015, 3e et 8e ss-sect., n° 374440, Mme Barrier, Dr. fisc. 2015, n° 51-52, comm.
742. concl. E. Cortot-Boucher, note F. Deboissy et G. Wicker.
2. CE 10 févr. 2017, 9e et 10e ch., n° 387960, Fillet, RFP 2017, n° 5, comm. 8, note S. Torri-
celli-Chrifi ; Dr. fisc. 2017, n° 14, comm. 239, concl. M.-A. Nicolazo de Barmon, note R. Mor-
tier ; JCP N 2017, n° 18, comm. 1172, note J.-J. Lubin ; Juris-Data n° 2017-002348 – CE
31 mars 2017, 8e ch., n° 395550, RFP 2017, n° 7-8, comm. 11, note S. Le Normand-Caillère ;
Juris-Data n° 2017-009231. Adde F. Luzu, « Donation pré-cession de titres démembrés – Une
technique éprouvée confrontée à quelques décisions récentes », RFP 2017, n° 11, ét. 24. Sur
l’abus de droit, v. ss 40 s.
3. Ex. CE 1er déc. 1976, Dr. fisc. 1977, no 5, comm. 123, concl. Martin-Laprade.
INTRODUCTION 49
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J. turOt, « La liberté de gestion des entreprises entre enfer et paradis (et plus près de
l’enfer) », Dr. fisc. 2017, n° 27, comm. n° 378.
international.scholarvox.com:ENCG Marrakech:1022690898:88866206:196.113.29.75:1587236385
le Conseil d’État juge que la contestation par l’administration, de l’utili-
sation d’un avoir fiscal comme moyen de paiement de l’impôt n’entre pas
dans le champ de la répression prévue par l’article L 64 du LPF 1.
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l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement suppor-
tées eu égard à sa situation et à ses activités réelles » 1.
S’agissant de cette deuxième variété d’actes abusifs, le législateur reprend
le critère de l’application littérale des textes (loi ou décisions 2) qui était
déjà partiellement utilisé par la jurisprudence en sanctionnant la fraude à
l’esprit de la loi 3. Le deuxième cas d’abus de droit suppose réunis cumula-
tivement un critère objectif (application littérale de la règle contraire aux
objectifs poursuivis par le législateur) et un critère subjectif (poursuite
d’un but exclusivement fiscal). Cependant, le Conseil d’État refuse de
prendre en compte un motif autre que fiscal lorsqu’il présente un carac-
tère négligeable et sans commune mesure avec l’avantage fiscal retiré de
l’opération 4. Sans aller jusqu’aux réformes extrêmes qui proposaient de
substituer à l’adverbe « exclusivement » les adverbes « essentiellement »
ou « principalement », la jurisprudence précise donc le critère du but
exclusivement fiscal qui, combiné avec la contrariété à l’objectif de la règle
abusée, constitue la fraude à la loi réprimée. L’exigence de l’exclusivité du
but fiscal signifie que la fraude à la loi ne peut être reprochée lorsque le
montage fiscal a, également, une justification prépondérante, détermi-
nante autre que d’écarter la règle fiscale. Au contraire la recherche d’un
avantage extra-fiscal ne présentant qu’un caractère minime ou négli-
geable, pour ainsi dire accessoire, ne permet pas d’être à l’abri de la sanc-
tion de l’abus de droit. Même si elle renforce l’efficacité de la sanction, une
telle distinction, pas toujours aisée à faire en pratique, ne va pas dans le
sens de la sécurité juridique.
La poursuite d’un but exclusivement fiscal n’est pas suffisante pour
qu’il y ait abus de droit si l’opération frauduleuse n’était pas contraire aux
objectifs poursuivis par le législateur 5.
Que ce soit le Conseil d’État ou la Cour de cassation, les deux hautes
juridictions posent nettement le principe du caractère alternatif et non-
cumulatif des conditions requises pour l’application de l’article L. 64 LPF.
L’administration est donc tenue de démontrer soit la fictivité des actes, soit
1. CE 10 juin 1981, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 19.079, Dr. fisc. 1981, no 48/49, comm. 2187, concl.
Lobry. – Com. 19 avr. 1988, Dr. fisc. 1988, no 32/38, comm. 1733, RJF 2/89, p. 429. Le but
exclusivement fiscal d’un abus de droit s’apprécie au niveau de la société soumise à l’impôt et
non au niveau de ses associés (CE 16 mars 2016, 9e et 10e ss-sect., n° 374909, SAS Cannes Évo-
lution, Dr. fisc. 2016, n° 40, comm. 535, note R. Torlet et M. Valeteau).
2. Selon l’administration, les décisions susceptibles d’être prises en compte pour établir une
fraude à la loi sont celles qui sont de portée générale et comportent une interprétation favo-
rable de la loi. Ce serait le cas d’une réponse ministérielle, mais pas des instructions adminis-
tratives (BOI-CF-IOR-30, no 80 et s.).
3. CE 3 févr. 1984, ass. plén., no 38.230, Dr. fisc. 1984, no 26, comm. 1278, concl.
Latournerie.
4. CE 17 juill. 2013, 9e et 10e ss-sect., no 352989, Min. c/ SARL Garnier Choiseul Holding,
Dr. fisc. 2013, no 41, comm. 477, concl. F. Aladjidi, note F. Deboissy et G. Wicker.
5. CE 7 sept. 2009, 8e et 3e ss-sect., no 305586, SA Axa, Bull. Joly 2/2010, p. 184, note P. Ser-
looten ; Dr. fisc. 2009, no 39, comm. 484, concl. L. Olléon, note E. Meier et R. Torlet.
52 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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la fraude à la loi. Bien entendu, lorsqu’elle dispose d’éléments suffisants,
l’administration s’efforce de prouver l’existence des deux critères 1.
En revanche, si l’administration ne prouve ni le caractère fictif de
l’opération, ni la fraude à la loi, le montage juridique habile ne pourra
être sanctionné par la procédure de l’abus de droit, même s’il permet une
évasion fiscale 2. La preuve du caractère exclusivement fiscal des motiva-
tions résulte le plus souvent d’un faisceau de présomption (Exemple, dates
rapprochées des diverses opérations et a fortiori leur simultanéité 3. C’est
également le cas lorsque la transformation d’une société ne précède que de
10 jours, la vente de l’essentiel de son actif 4).
Au-delà de l’existence de deux types d’actes abusifs, la synthèse de l’abus
de droit réside dans l’absence de réalité 5. Il y a abus de droit par acte fictif
lorsque l’acte n’a pas de réalité juridique : absence de mise en œuvre de
l’acte, absence de fonctionnement de la société, absence de comptabi-
lité… Il y a abus de droit par fraude à la loi lorsque l’acte ne correspond à
aucune réalité économique : l’acte conclu, l’entité créée, le montage réalisé
ne présente aucun motif commercial ou financier 6. L’absence de réalité
(juridique ou économique), le caractère artificiel redonne ainsi à la notion
l’unité que lui confère son unique fondement légal par-delà l’application
diversifiée qu’en fait la jurisprudence.
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répression des abus de droit lorsque le contribuable se prévaut d’un contrat
verbal dont il ne démontre pas l’existence 1. Il en est de même lorsqu’en
présence d’une convention, l’administration se borne à contester l’exis-
tence de tout lien entre la somme litigieuse et la convention 2.
Une deuxième condition d’application de la théorie de l’abus de droit
réside en la nécessité de l’existence d’un montage intentionnellement
effectué par le contribuable pour éluder l’impôt, ce qui suppose des
manœuvres frauduleuses 3. Ainsi, échappe au domaine de l’abus de droit
tout ce qui recouvre l’interprétation des contrats si ceux-ci ne sont pas
considérés comme fictifs 4. Il en est de même pour la qualification des
sommes sans remise en cause des contrats 5.
Une dernière condition de l’application de la procédure de l’abus de droit
est que l’acte incriminé ait pour conséquence de faire échapper un béné-
fice ou une opération à l’impôt, ou, au moins, qu’il ait pour conséquence
une réduction de l’impôt exigible 6. Autrement dit, l’administration devra
établir que les charges fiscales supportées au titre du montage juridique
sont notablement atténuées par rapport à celles qui auraient été norma-
lement supportées 7.
S’agissant du domaine d’application, le Conseil d’État reconnaît la pos-
sibilité pour l’administration d’avoir recours à la procédure de l’abus de
droit à l’encontre d’une opération permettant de bénéficier d’un report
d’imposition, notamment au cas de plus-values 8. Ainsi, au cas d’apport-
cession, il y a abus de droit lorsque le montage a pour seule finalité de
permettre au contribuable, par l’interposition d’une société, de dispo-
ser effectivement des liquidités obtenues lors de la cession des titres
tout en restant détenteur des titres de la société reçus en échange lors
de l’apport 9. En revanche, l’opération n’est pas constitutive d’un abus
lorsque le produit de la cession a été réinvesti dans une activité écono-
mique ; elle est alors conforme à l’objectif du législateur de favoriser les
restructurations économiques 10.
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43 Les applications ¸ En face des termes relativement généraux de
l'article L. 64 LPF et surtout de l'interprétation jurisprudentielle qui
en est donnée, la plupart des opérations effectuées ou des conventions
conclues par les entreprises sont susceptibles de donner lieu à application
de la théorie de l'abus de droit 1. Ainsi, un contrat aussi anodin et fré-
quent que le contrat de crédit-bail est susceptible d’encourir les foudres
de l’administration si le contrat est conclu pour une durée anormalement
brève et si la levée d’option s’effectue moyennant un prix anormalement
bas. L’administration se réserve, en effet, le droit d’estimer que l’opération
déguise, en réalité, une vente à tempérament ou que les redevances repré-
sentent, pour partie, un acompte sur le prix d’achat ultérieur et ne sont
donc pas déductibles 2. Mais encore faut-il que l’administration établisse
que le contrat de location-vente n’avait pas été inspiré par un autre motif
que celui d’éluder ou d’atténuer l’impôt 3.
On peut, cependant, essayer de schématiser les applications jurispru-
dentielles en faisant ressortir les principaux cas d’application.
C’est en premier lieu conformément à la jurisprudence traditionnelle
que la théorie de l’abus de droit trouve application lorsqu’il y a un acte
fictif ou réputé l’être 4.
La simulation peut d’abord être la conséquence de la combinaison de
plusieurs contrats simultanés ou successifs. Ainsi, le contrat de location-
gérance suivi peu après de la cession du matériel au locataire, dissimule le
transfert du fonds de commerce 5. Il y a de même cession globale du fonds
de commerce lorsque la cession des éléments incorporels s’accompagne
d’une location de longue durée du matériel moyennant des loyers élevés
correspondant au financement du prix du matériel 6.
Constitue également un abus de droit l’apport d’une branche d’activité
à une filiale nouvellement créée suivie de la totalité des actions reçues en
J.-L. Pierre. – CE 24 août 2011, 10e et 9e sect., no 314579, M. Moreau et Mme Girault, et
no 316928, Mme Ciavatta, Dr. fisc. 2011, no 42-43, comm. 566, concl. J. Boucher, note R. Poi-
rier ; RJF 11/2011.
1. La pratique cependant rencontre rarement la procédure de l’abus de droit de telle sorte
que l’on a pu écrire : « La procédure de l’abus de droit se révèle être plus l’Arlésienne de Bizet, ou
l’épouvantail qu’on agite pour faire peur qu’un réel moyen d’action pour vérifier le contri-
buable » (R. Chotin, Le fisc, la petite entreprise et l’expert-comptable, Bibl. sc. fin. no 32, LGDJ,
p. 115).
2. V. diverses réponses ministérielles, dont : Rép. no 12304, JOAN CR 30 avr. 1965 ; Dr. fisc.
1965, no 23, comm. 634. – Rép. no 9649, JO Sénat CR, 30 oct. 1970 ; Dr. fisc. 1970, no 43, comm.
1229 ; – Rép. no 4233, JOAN Débats, 8 janv. 1979 ; Dr. fisc. 1979, no 31, comm. 1636. – Rép.
no 56434, JOAN CR 14 janv. 1985 ; Dr. fisc. 1985, no 11, comm. 561. BOI-CF-IOR-30-20120912.
3. Ce ne fut pas le cas dans l’affaire jugée par : CE 3 févr. 1989, 7e et 8e ss-sect., no 45.094,
Dr. fisc. 1989, no 16/17, com. 853.
4. L’exemple classique est celui de la donation déguisée (Com. 23 juin 2015, n° 14-11.185,
RJF 10/15, n° 855). Pour un bail fictif, v. affaire n° 2016-43, Dr. fisc. 2017 n° 5-6, comm. 150.
Sur la question de la donation-cession, v. ss 38.
5. Com. 2 juill. 1979, Dr. fisc. 1980, no 20, comm. 1125. – Com. 7 nov. 1989, RJF 2/90, 216.
6. Com. 10 juin 1997, no 95-13799, Dr. fisc. 1997, no 38, comm. 983.
INTRODUCTION 55
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rémunération de cet apport. L’opération dissimule une cession de droits
sociaux 1. De la même façon, la donation-partage de titres suivie de leur
cession immédiate à une société contrôlée par les donateurs constitue un
abus de droit, l’opération ayant été effectuée afin de purger la plus-value
de cession 2.
La simulation peut aussi être la conséquence d’une dénaturation
conventionnelle du contrat. Ainsi, ne constitue pas un contrat de cré-
dit-bail, mais une vente à terme, le contrat de crédit-bail qui prévoit que
la majeure partie des redevances sera payée au jour de la conclusion du
contrat. Il est en effet de la nature du contrat de constituer une opération
de crédit. En conséquence, le preneur ne peut déduire les redevances lors
de l’exercice de leur versement mais selon le rythme de l’amortissement
correspondant au bien acheté.
La théorie de l’abus de droit trouve ensuite application au cas de fraude
à la loi, c’est-à-dire lorsque l’acte reproché a des fins exclusivement fis-
cales. Ainsi, c’est l’exclusivité de l’intérêt fiscal qui avait permis au comité
consultatif pour la répression des abus de droit – devenu le Comité de l’abus
de droit fiscal – de retenir l’abus de droit en présence d’un associé ayant
vendu ses droits dans une société X à une tierce société (dont il détenait
100 % du capital) laquelle avait, très rapidement, revendu à la société X
(sans plus-value) ses propres titres. L’opération n’était destinée qu’à éviter
l’impôt sur le revenu au titre du boni de cession prévu par l’article 161-2 du
CGI qui aurait été applicable selon le droit positif de l’époque si la cession
était intervenue directement au profit de la société X 3. Il y a, de même,
abus de droit pour fraude à la loi lorsque l’acquisition par une société IS
d’une société liquide a eu pour seul objectif de dégager un déficit à la suite
d’une provision pour dépréciation des titres consécutive à la distribution
de l’essentiel des liquidités dans le cadre d’une application du régime des
sociétés mères et filiales 4. Pour sanctionner ce montage dit « coquillards »,
le Conseil d’État remonte à la finalité du régime des sociétés-mères 5.
L’abus de droit peut concerner une situation internationale. Par exemple
il a été conclu à l’abus de droit dans le cas d’une société ayant réalisé
concomitamment deux opérations d’un montant proche, à savoir une
distribution de son report à nouveau sous forme de dividendes au profit
1. Rapport du CCRAD 2007, aff. 2007-23, Dr. fisc. 2008, no 22, ét. 348.
2. CAA Douai, 16 juin 2009, 2e ch., no 08DA00548, M. et Mme Motte-Sauvaige, Dr. fisc.
2009, no 28, comm. 411, concl. P. Minne.
3. Rapport 1990, Dr. fisc. 1991, no 23/24, p. 922. En effet, jadis l’opération de rachat par une
société de ses propres titres était susceptible de faire apparaître une plus-value et un revenu
distribué. Le système ayant été déclaré inconstitutionnel, il a été modifié. Pour les rachats à
compter du 1er janvier 2015, seul le régime des plus-values de cession de titres s’applique. V.,
A de Bissy, « Aménagement du régime d’imposition des sommes ou valeurs attribuées en cas de
rachat par une société de ses propres titres », Droit fiscal 2015, n° 1-2, comm. n° 12.
4. Aff. no 2012-39, Rapport annuel 2012 du Comité de l’abus de droit, Droit fisc. 2013, no 27,
Rapp. no 357, p. 41, no 35.
5. CE 17 juill. 2013, 9e et 10e ss-sect., no 352989, Min. c/ SARL Garnier Choiseul Holding, RJF
11/2016, no 1064, concl. F. Aladjidi, BDCF 11/2013, no 119.
56 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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de son actionnaire unique et une émission d’obligations remboursables en
actions (ORA), souscrites par ce même actionnaire. Le juge a estimé qu’eu
égard à leur caractère contradictoire, ces deux opérations synchrones, qui
ne s’étaient traduites par aucun flux financier mais avaient donné lieu
à un simple jeu d’écritures comptables, révélaient l’intention du contri-
buable d’atténuer ses charges fiscales normales, en déduisant artificielle-
ment de son résultat les intérêts afférents aux ORA émises alors même, au
demeurant, que ces intérêts n’étaient pas imposés dans l’État étranger 1.
Plus généralement, l’abus de droit peut s’appliquer à un montage met-
tant en œuvre une convention fiscale internationale destinée à éviter ou
limiter les doubles impositions. En effet, les États parties à la convention
fiscale ne sauraient être regardés comme ayant entendu, pour répartir le
pouvoir d’imposer, appliquer ses stipulations à des situations procédant de
montages artificiels dépourvus de toute substance économique 2. Par ail-
leurs, la caractérisation d’un abus de droit peut aussi dépendre de l’inter-
prétation d’une convention fiscale internationale 3.
Si l’objet fiscal de l’acte incriminé justifie le recours à l’abus de droit, encore
faut-il que ces fins fiscales soient exclusives de toute autre motivation 4.
La nécessité de l’exclusivité fiscale des motivations des parties est parfai-
tement démontrée par l’exemple de la réévaluation libre des bilans. Nous
verrons que la réévaluation libre des bilans peut être le moyen d’utiliser
un report déficitaire qui sans cela serait perdu. Ce qui pour l’entreprise
peut apparaître comme un excellent principe d’une bonne gestion fis-
cale peut en revanche être considéré par l’administration comme un cas
d’abus de droit. En tout cas, elle se réserve la possibilité de l’invoquer 5.
Cependant la même réévaluation des bilans n’est plus critiquable dès lors
qu’elle est également justifiée par des motifs autres que fiscaux. Ainsi,
pour une compagnie d’assurances qui, afin de réévaluer les valeurs mobi-
lières servant de garantie aux provisions techniques avait vendu des titres
d’une société, réalisant une plus-value taxable à taux réduit. Quelque
temps après, la compagnie d’assurances avait racheté le même nombre
de titres de la même société. L’administration prétendait qu’il y avait eu
1. CE 13 janv. 2017, 10e et 9e ch., n° 391196, SAS Ingram Micro, Dr. fisc. 2017, n° 15, comm.
254, concl. E. Crépey ; Juris-Data n° 2017-000568. L’État en question était le Delaware (États-
Unis d’Amérique).
2. CE 25 oct. 2017, 3e, 8 e, 9 e et 10 e ch. réun., n° 396954, Juris-Data n° 2017-020912 ; Pro-
cédures 2017, n° 12, comm. 327, note O. Négrin ; RFP 2017, n° 12, act. 237 ; Dr. fisc. 2017,
n° 45, act. 600. Sur l’arrêt d’appel, v. CAA Versailles, plén., 17 déc. 2015, n° 13VE01281, Cts F.,
Dr. fisc. 2016, n° 10, comm. 216, concl. Ph. Delage, note C. de la Mardière ; Juris-Data
n° 2015-030422.
3. Sur une telle discussion, à propos de la convention fiscale franco-américaine, CE 21 juill.
2017, 9e et 10e ch., n° 392908, SAS Thermo Electron Holdings, Dr. fisc. 2017, n° 30-35, act. 443 ;
Dr. fisc. 2017, n° 49, comm. 577, concl. M.-A. Nicolazo de Barmon ; Juris-Data n° 2017-
014586 ; Dr. fisc. 2018, n° 5, comm. 153, n° 5, note C. Acard.
4. Le but principal d’atténuation de la charge fiscale ne suffit pas pour caractériser un abus
de droit (ex. CE 17 janv. 1994, no 120157, Dr. fisc. 1994, comm. 746).
5. Rép. min. no 2059, JO Sénat CR, 1982, p. 1897 ; Dr. fisc. 1982, no 29, I.D., 7396.
INTRODUCTION 57
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une réévaluation libre du bilan de telle sorte qu’elle avait dégagé un profit
imposable au taux normal de l’impôt par application de l’article 38-2 du
CGI (augmentation de l’actif net). Le Conseil d’État a cependant relevé
que l’opération avait été réalisée dans le but de réévaluer les valeurs mobi-
lières servant de garantie aux provisions techniques et que, si la compa-
gnie avait recherché la voie fiscale la moins imposée, la vente suivie du
rachat des titres n’obéissait pas à des motivations exclusivement fiscales 1.
La prise en compte de l’exclusivité des buts fiscaux est la même pour la
fraude aux droits d’enregistrement. Ainsi, au cas d’apport-cession d’une
branche d’activité. Une société apporte à une autre société, souvent créée
dans ce but, une branche d’activité, puis peu de temps après, cède les
titres reçus en échange de l’apport. Les droits d’enregistrement sont moins
élevés sur un apport partiel d’actif suivi d’une cession de titres que sur la
vente d’une branche d’activité qui est assimilée à une cession de fonds de
commerce. Mais le défaut de logique économique de l’opération démontre
l’exclusivité fiscale du but recherché et donc l’existence d’un abus de droit
par fraude à la loi 2.
44 La preuve de l’abus de droit ¸ Puisqu'au cas d'abus de droit, l'admi-
nistration entend restituer à l'opération son véritable caractère, se pose la
question de la preuve de ce véritable caractère. Par principe cette preuve
incombe à l'administration 3 ; cependant la charge de la preuve peut être
renversée. Si l’administration a consulté le Comité de l’abus de droit fiscal
et qu’elle s’est rangée à son avis, elle n’a pas à prouver le bien-fondé du
rehaussement 4. Si, au contraire, elle n’a pas consulté le Comité ou si,
l’ayant fait, elle n’a pas suivi son avis, il lui appartient alors d’apporter la
preuve de l’abus de droit qu’elle invoque.
Mais l’administration ne consulte pas toujours le Comité de l’abus de
droit malgré l’intérêt qu’une telle consultation pourrait présenter pour le
contribuable 5. Aussi, le contribuable peut-il demander que le Comité soit
saisi pour avis 6. Cette possibilité est offerte au contribuable chaque fois
1. CE 22 juin 1983, 7e et 8e ss-sect., no 32956, Dr. fisc. 1983, no 50, comm. 2380 ; RJF 8-9/83,
p. 423, chron. P.F. Racine.
2. Com. 20 mars 2007, no 05-20599, SAS Distribution Casino France, RJF 8-9/2007, no 993.
3. CE 17 nov. 2010, 3e et 8e ss-sect., no 314291, Min. c/ SCI Ram, Dr. fisc. 2011, no 10,
comm. 250, concl. E. Geffray, note Ch. de la Mardière. – CE 23 janv. 2015, 9 e et 10 e ss-sect.,
n° 369214, SAS Rottapharm, RJF 4/15, n° 300.
4. Com. 10 févr. 1998, no 96-12941, Dr. fisc. 1998, no 41, comm. 888 et Dr. fisc. 1998, no 43,
Instr. no 10086. – CE 12 mai 2003, 3e et 8e ss-sect., no 234811, Dr. fisc. 2003, no 39, comm. 685.
5. Le comité des abus de droit n’est compétent que pour les questions de droit et non de fait.
Il n’est donc pas, par exemple, compétent au cas d’appréciation par l’administration du carac-
tère exagéré des rémunérations des dirigeants de société. Le litige ne porte pas, en effet, sur la
qualification du contrat mais sur le caractère normal ou non de la rémunération (CE 21 avr.
1989, 7e et 8e ss-sect., no 59.731, Dr. fisc. 1989, no 32/38, 1612).
6. En cas de procédure engagée à l’encontre d’une société de personne, le gérant a qualité
pour demander que le litige soit soumis à l’avis du Comité consultatif (CE 29 avr. 2002, 3e et
8e ss-sect., no 220759, 220760 et 220761, Dr. fisc. 2002, no 39, comm. 737, concl. F. Seners).
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que lui sont notifiées des rectifications fondées sur un abus de droit tel que
défini à l’article L. 64 du LPF. Si l’administration ne s’est pas conformée
à l’avis du Comité, que celui-ci ait été saisi à son initiative ou à celle du
contribuable, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du rehaussement.
Les avis rendus par le Comité, fort précieux pour le gestionnaire, font
l’objet d’un rapport annuel 1.
45 Le rescrit fiscal ¸ Par l'instauration du rescrit fiscal (LPF, art. L. 64 B),
il s'agit, afin d'éviter le recours postérieur par l'administration à l'abus
de droit, de permettre au contribuable d'obtenir, par avance, l'accord
de l'administration des impôts sur une situation fiscale dont les consé-
quences, une fois acceptées, ne peuvent plus être remises en cause 2.
Lorsqu’un contribuable ou une entreprise envisage un montage juri-
dique et financier pouvant avoir des conséquences fiscales (soit échapper
à l’impôt, soit profiter de mesures incitatives), il peut, avant la conclusion
de la convention, consulter l’administration pour savoir si elle appliquera,
au cas où le contrat serait signé, la procédure de l’article L. 64 du Livre des
procédures fiscales. Si l’administration n’a pas répondu dans les six mois,
la procédure de sanction de l’abus de droit n’est pas applicable 3. On notera
que l’article L. 64 B du LPF n’envisage que l’absence de réponse dans le
délai de six mois pour écarter le recours à l’abus de droit. Cependant,
l’esprit du texte doit amener à faire produire le même effet à une réponse
de renonciation expresse. L’administration serait alors engagée par sa
position dans les conditions prévues aux articles L. 80 A et L. 80 B du LPF.
Cinq conditions sont cependant requises.
– La consultation de l’administration doit concerner la portée d’une
convention susceptible d’être mise en cause au moyen de la procédure
de répression des abus de droit. En conséquence, la demande doit viser
expressément l’article L. 64 B du LPF et le contribuable doit exposer sa
propre analyse et demander si elle recueille l’accord de l’administration.
– La consultation doit être préalable à la conclusion des contrats, c’est-
à-dire avant la signature par les parties 4.
– La demande de consultation doit être écrite et signée au moins par
une des parties au contrat.
– Elle doit être accompagnée de tous les éléments utiles pour permettre
à l’administration d’apprécier la portée véritable de l’opération. Selon
l’administration, cette exigence implique, notamment, un exposé clair,
1. Ex. Rapport annuel du Comité de l’abus de droit fiscal 2017, RFP 2018, no 4, act. 66.
2. Le recours au rescrit fiscal peut également avoir des effets indirects néfastes dans la
mesure où l’attention de l’administration peut être attirée sur une opération que sans cela elle
n’aurait peut-être pas songé à contester.
3. À la condition cependant que l’opération réalisée soit identique à celle soumise à
l’administration.
4. Si un contribuable interrogeait l’administration sur la portée d’un contrat déjà conclu,
l’on serait hors du domaine de la procédure du rescrit de telle sorte que le silence de l’adminis-
tration au terme du délai de six mois n’aurait aucune portée.
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complet et sincère de l’opération envisagée ; la désignation exacte de
toutes les parties au projet de convention ; la description des liens exis-
tant déjà entre ces parties ; la production d’une copie de tous les projets
de documents (actes, contrats, conventions, protocoles d’accord, statuts)
utiles pour apprécier la portée véritable de l’opération.
– La demande de consultation doit être adressée à l’administration cen-
trale afin d’assurer l’unité d’application des textes (à la Direction générale
des finances publiques, service juridique de la fiscalité, Bureau des agré-
ments et rescrits).
Il faut cependant noter que si le but du texte est d’apporter la sécurité
au contribuable, cet objectif n’est pas totalement atteint. En effet, l’admi-
nistration peut avoir gardé le silence pendant six mois et considérer que
le contribuable n’a pas fourni tous les éléments utiles pour apprécier la
portée véritable de l’opération. Dans une telle hypothèse, malgré le silence
administratif, le recours à la procédure sanctionnant l’abus de droit reste
possible. Où est alors la sécurité ? L’administration ne sera-t-elle pas por-
tée à prétendre n’avoir pas reçu tous les éléments utiles afin de conserver
ses prérogatives ? N’y a-t-il pas risque, qu’à son tour, l’administration
n’abuse de son droit d’invoquer l’abus de droit ? 1
46 Les sanctions ¸ L'abus de droit entraîne l'application de l'intérêt de
retard prévu par l'article 1727 du CGI ainsi qu'une majoration de 80 %
des impôts et droits éludés. La majoration, n'est que de 40 % lorsqu'il
n'est pas établi que le contribuable a été le principal instigateur ou le prin-
cipal bénéficiaire de l'abus de droit.
L’intérêt de retard et la majoration sont dus solidairement avec le rede-
vable par toutes les parties à l’acte ou à la convention.
47 L’abus de droit « rampant » ¸ Pour contester la qualification d'une
opération retenue par le contribuable, l'administration dispose soit du
pouvoir général de rectification fondée sur l'article 55 du LPF, soit d'un
pouvoir spécifique à travers la mise en œuvre de la procédure spéciale de
l'abus de droit. Cette procédure est destinée à apporter des garanties au
contribuable. De telle sorte que si l'administration procède à une rectifi-
cation sur le fondement de son pouvoir général lorsqu'elle sanctionne en
réalité un abus de droit, elle commet un abus de droit rampant 2 préjudi-
ciable au contribuable. Ainsi, lorsque l’administration se place implicite-
ment mais nécessairement sur le terrain de l’abus de droit, le non-respect
1. Est-ce l’explication du fait que le rescrit « abus de droit » est assez peu utilisé (30 à 50 par
an) ? (V. Étude du Conseil d’État sur le rescrit, Dr. fisc. 2014, no 20, Ét. 317, p. 12).
2. Selon l’expression devenue traditionnelle, il y a abus de droit rampant lorsque l’adminis-
tration écarte des actes juridiques régulièrement passés par le contribuable, sans se placer sur le
terrain de la répression des abus de droit (J. Turot, « Réalisme fiscal, abus de droit et opposabi-
lité à l’administration des actes juridiques, ou de l’abus de droit rampant », RJF 8-9/1989,
p. 458).
60 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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des contraintes procédurales de l’article L 64 du LPF emporte décharge
des droits et pénalités faute qu’aient été respectées les garanties attachées
à cette procédure 1.
De la jurisprudence exposée ci-dessus 2, il ressort qu’il n’y a pas abus
de droit rampant lorsque l’administration conteste l’existence d’un acte 3,
lorsqu’elle interprète les stipulations d’un contrat 4 ou lorsqu’elle se borne
à requalifier une situation de fait au regard de la loi fiscale 5. De même
le Conseil d’État juge qu’un redressement fondé sur une pratique anor-
male dans l’exécution d’un contrat et non pas sur le caractère fictif de ce
contrat, ne peut être assorti de pénalité pour abus de droit 6.
En revanche tout redressement fondé sur une requalification des faits 7
ou du contrat démontrant une simulation 8 ou une fraude suppose que
soit respectée la procédure de l’abus de droit 9.
48 Bibliographie ¸
C. aCard, N. genestier et G. exerjean, « La ligne de démarcation entre risque fiscal et
risque pénal (1er volet). – Les enjeux de la pénalisation en matière fiscale », Dr. fisc.
2016, n° 7-8, comm. 172.
C. aCard, N. genestier et G. exerjean, « La ligne de démarcation entre risque fiscal
et risque pénal (2e volet). – Un abus de droit peut-il être constitutif d’une fraude
fiscale ? », Dr. fisc. 2016, n° 10, comm. 207.
C. aCard, N. genestier et G. exerjean, « La ligne de démarcation entre risque fiscal
et risque pénal (3e volet). – Étude de structures en matière de fiscalité financière »,
Dr. fisc. 2016, n° 13, comm. 249.
Y. AguiLa, G. Friger, J. GayrL, Y. RutsChmann, « La réforme de l’abus de droit au
prisme de la Constitution », FR Lefebvre 50/2013, no 5, p. 13.
1. Com. 23 juin 2015, n° 13-19.486, DGFIP c/ Mme Gihr-Chitarini, Dr. fisc. 2015, n° 42,
comm. 643, note F. Deboissy.
2. V. ss 42.
3. CE 20 avr. 1984, no 20.904, RJF 6/84, 734.
4. CE 26 juill. 1982, ass. plén., no 26.131, Dr. fisc. 1982, no 46/47, comm. 2187, concl.
Rivière ; RJF 10/82, 933.
5. CE 10 nov. 1982, n° 25.017, RJF 1/83, n° 12. – CE 17 déc. 2010, 3e et 8e ss-sect.,
n° 318048, SARL Concept sport, Dr. fisc. 2011, n° 10, comm. 249, concl. E. Cortot-Boucher,
note F. Deboissy ; RJF 3/2011, n° 355.
6. CE 9 déc. 1987, n° 55.554, RJF 2/88, n° 78.
7. Ex pour la requalification des loyers d’un contrat de location-gérance en acomptes sur le
prix de vente de ce fonds (CE 19 nov. 1986, n° 30.465 et 32.295, RJF 1/87, n° 78).
8. La procédure prévue par l’article L. 64 du LPF n’est pas applicable lorsque l’administra-
tion ne fonde pas son redressement sur une dissimulation d’un acte par un autre, mais entend
seulement donner leur effet légal aux actes et conventions tels qu’ils lui ont été soumis (Com.
16 déc. 2008, n° 08-11.419, F-D, Sté Forocéan, Dr. fisc. 2009, n° 37, comm. 464, note O. Debat ;
RJF 2009, n° 408). Au contraire, le déguisement d’une cession de fonds de commerce sous le
couvert d’une concession de licence d’exploitation, constitue un abus de droit (Com. 9 juin
2004, n° 01-11 964, SA Prominox, Dr. fisc. 2004, n° 37, comm. 682. – Dans le même sens, CE
21 juill. 1989, plén., n° 59970, Min. c/M. Bendjador, Dr. fisc. 1990, n° 1-2, comm. 28, concl.
M. Liébert-Champagne ; RJF 8-9/1989, n° 998).
9. Ex. la requalification d’une vente en donation fondée sur l’intention de déguisement du
contribuable (Com. 23 juin 2015, n° 13-19.486, DGFIP c/ Mme Gihr-Chitarini, préc.).
INTRODUCTION 61
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G. baCheLier, « Le rescrit fiscal », RFFP 2015, n° 130, p. 57.
P. Cassan, « Du bon usage de la roulette russe dans le contrat de société : tontine, aléa
et abus de droit », Dr. fisc. 2016, n° 28, Ét. 408.
P. Cassan, « De l’optimisation à l’abus de droit, la ligne de partage des mots : l’exemple
des usufruits temporaires », Dr. fisc. 2017, n° 7, Ét. 154.
F. debOissy, « Abus de droit : quel est le risque pénal ? », Dr. fisc. 2014, no 46, Actes de
colloque, no 623.
F. debOissy, « Articulation de la procédure d’abus de droit et des clauses anti-abus »,
Dr. fisc. 2016, n° 49, coll. 632.
P. FernOux, « Abus de droit : revisitons le passé à l’aune de la nouvelle définition »,
Dr. fisc. 2010, no 49, ét. no 584.
P. FernOux, « La substance d’une société dans la mécanique de l’abus de droit »,
Dr. fisc. 2017, n° 47, Ét. 155.
O. FOuquet, « Apport-cession et apport d’entreprise individuelle en société », FR
Lefebvre 44/2010, p. 21.
O. FOuquet, « Apport-cession de titres et abus de droit : la continuité », Dr. fisc. 2012,
no 20, Act. 216.
O. FOuquet, « La réforme de l’abus de droit : pour quoi faire ? », FR Lefebvre 39/2013,
p. 23.
O. FOuquet, « Abus de droit : la sécurité juridique rédactionnelle », Dr. fisc. 2014,
no 1-2, Act. 3.
O. FOuquet, « L’abus de droit et la sécurité juridique », RFFP 2015, n° 130, p. 101.
O. FOuquet, « Dispositif anti-abus et poursuite d’un but principalement fiscal »,
Dr. fisc. 2016, no 4, Act. 50.
H. Kruger, « Haro sur les ORA : la liberté de financement des entreprises est-elle
soluble dans l’abus de droit ? », Dr. fisc. 2015, n° 46, ét. 670.
C. De La mardiere, « La notion d’abus de droit, arme de répression fiscale », Dr. fisc.
2014, no 51-52, 700.
J.-L. Medus, « Apport-cession de droits sociaux et abus de droit », Bull. Joly 2012, no 1,
§ 13, p. 82.
J.-L. Medus, « Apport-cession, abus de droit et investissement économique », JCP E
2012, 1544.
E. Meier et R. TOrLet, « Report d’imposition des plus-values : dans quels cas l’abus de
droit est-il caractérisé ? », Dr. fisc. 2010, no 45, Act. 424.
Ch. NOueL, « La nouvelle définition de l’abus de droit », Bull. Joly 5/2011, no 219,
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P.-F. RaCine, « Existe-t-il des décisions dont on puisse abuser ? », Dr. fisc. 2010, no 23,
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J.-M. Tirard, « L’abus de droit en droit comparé », in Mélanges M. Cozian, Litec. 2009,
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J. TurOt, « Demain, serons-nous tous des Al Capone ? À propos d’une éventuelle prohi-
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62 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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§ 2. La théorie de l’acte anormal de gestion
1. La théorie de l’acte anormal de gestion n’est pas applicable en matière de TVA. V. par ex.
CE 21 oct. 2011, n° 323656, Société Mijomo, Nouvelles fiscales 2012, n° 1084, p. 16. Compte
tenu de son caractère réel, la TVA ne peut être assise que sur la contrepartie de l’opération
taxable, ce qui exclut la prise en considération d’une sorte de juste prix ou de prix normal. Ainsi
des rabais consentis par une entreprise ne rentrent pas dans l’assiette de la TVA, même si ces
rabais sont anormaux. Toutefois, la directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006 (dite
« directive TVA ») autorise les États membres à prendre des mesures dans certaines hypothèses
afin que la base d’imposition à la TVA soit constituée par la valeur normale de l’opération, celle-
ci étant définie par référence aux transactions comparables. Adde Y. serandOur, « Contre-
partie inférieure au prix de revient et TVA », Dr. fisc. 2016, n° 38, comm. 458.
INTRODUCTION 63
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la justification de l'exercice des affaires, le critère de l'acte anormal de
gestion réside selon l'opinion commune dans l'intérêt de l'entreprise.
Ainsi, il existe un acte anormal dès lors que l'acte est accompli dans le
seul intérêt d'un tiers par rapport à l'entreprise 1. Selon le commissaire du
gouvernement Rivière, « doivent être réputés normaux tout acte et toute
opération concourant à la réalisation de l’objet économique en vue duquel
l’entreprise a été créée » 2. De la sorte, la gestion de l’entreprise est consi-
dérée comme normale lorsque son activité lui assure une contrepartie des
services qu’elle fournit ou des produits qu’elle livre. Cette contrepartie
sera généralement constituée par un prix, mais il n’y a cependant pas de
limite quant à la nature de l’avantage procuré à l’entreprise étant entendu
qu’il doit être tout de même de nature économique ou financière.
L’avantage économique peut résider par exemple dans le souci de s’assu-
rer le contrôle d’un marché 3, de maintenir un certain niveau d’activité 4,
de se procurer des débouchés normaux 5. Quant à l’avantage financier, il
pourra consister à venir en aide à une filiale en difficulté 6, à une société
dont l’entreprise a décidé de prendre le contrôle 7 ou à une entreprise à
laquelle l’entreprise en cause est étroitement associée 8.
Si l’acte anormal se définit par rapport au but étranger à l’intérêt de
l’entreprise, il doit aussi être défini par rapport à la technique utilisée
de telle sorte qu’il existe deux variétés d’actes anormaux de gestion.
L’acte anormal de gestion le plus courant est celui par lequel l’entreprise
a supporté des charges étrangères à son intérêt que ce soit en raison de
la nature de ces charges ou tout simplement en raison de leur montant
excessif. Mais il y a également acte anormal de gestion lorsque l’entreprise
a renoncé à un profit ou au moins a accepté une minoration de celui-ci.
En résumé, constitue un acte anormal de gestion « celui qui met une
dépense ou une perte à la charge de l’entreprise, ou qui prive cette der-
nière d’une recette, sans que l’acte soit justifié par les intérêts de l’exploi-
tation commerciale » 9. L’acte anormal de gestion n’a donc d’autre but
que de vérifier que l’opération ou la dépense en cause avait bien un lien
avec le bénéfice ; si elle était nécessaire (ou au moins utile) pour acquérir
1. Concl. Delmas-Marsalet sur CE 10 janv. 1973, 7e et 8e ss-sect., no 79312, Dr. fisc. 1974,
no 8, comm. 223 ; Lebon 23. Certaines décisions sont plus exigeantes et considèrent l’acte
comme anormal même lorsqu’il est dans l’intérêt de l’entreprise dès lors qu’il a été réalisé afin
de satisfaire « prioritairement » l’intérêt des tiers (CAA Nantes 30 juin 1994, 2e ch., no 92-819,
Dr. fisc. 1995, no 8, comm. 32. – Dans le même sens, concl. O. Fouquet, sous CE 10 juill. 1992,
no 110213 et no 110214, Dr. fisc. 1993, no 27, comm. 1392 ; RJF 8-9/1992, p. 673).
2. Concl. sur CE 1er juill. 1983, no 28315, Dr. fisc. no 5, comm. 149.
3. CE 16 juin 1947, no 72560, Lebon 269.
4. CE 29 janv. 1965, no 62.788, Dupont 15, p. 230.
5. CE 3 déc. 1975, no 89412, Dr. fisc. 1976, no 13/14, comm. 467, concl. Fabre ; Lebon 620.
6. CE 14 juin 1963, no 57457, Dr. fisc. 1964, no 48 bis, p. 161, concl. Ducamin ; Lebon 371.
7. CE 10 janv. 1973, no 79312, Lebon 23.
8. CE 25 juill. 1975, no 96008, Dr. fisc. 1975, no 45, comm. 1456, concl. Fabre ; Lebon 465.
9. Concl. Poussière sur CE 5 janv. 1965, 9e ss-sect., no 62099, Dr. fisc. 1970, no 3 bis, p. 23.
64 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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ou conserver le bénéfice. Si la dépense n’est pas causée par cet objectif, elle
n’est pas déductible car elle n’a pas de lien avec le bénéfice.
Dans cette perspective traditionnelle l’acte de gestion anormal se défi-
nit par unique référence à la recherche d’un bénéfice. Cependant au fur et
à mesure du temps, et surtout en raison de l’utilisation du terme de ges-
tion pour définir l’acte anormal, l’acte anormal est aujourd’hui considéré
comme celui qui n’est pas dans l’intérêt de l’entreprise. L’acte anormal de
gestion est alors défini comme « un acte ou une opération qui se traduit
par une écriture comptable affectant le bénéfice imposable que l’Admi-
nistration entend écarter comme étrangère ou contraire aux intérêts de
l’entreprise » 1. La référence à une gestion commerciale normale 2 et non
plus à la simple recherche du bénéfice étend considérablement la variété
des actes anormaux de gestion qui ont quitté la sphère comptable pour
concerner l’ensemble du « management » de l’entreprise.
1. P.-F. Racine, concl. sous CE, plén. 27 juill. 1984, n° 34588, RJF 10/1984, n° 1233, concl.
ibid., p. 562.
2. CE 6 mars 2006, no 281034, RJF 5/2006, no 502. – CE 30 juin 2008, no 291710, Sté Civile
du Groupe Comte, Dr. fisc. 2008, no 42, comm. 541, concl. E. Glaser, note A. Bonnet.
3. Ex. : cession d’un bail commercial (Paris, 2e ch., 20 nov. 1990, no 89-1142, Dr. fisc. 1992,
no 8, comm. 370) ou cession d’éléments du stock (CE 10 oct. 1984, no 25.144, Dr. fisc. 1985
no 20/21, comm. 1006).
4. Ex. CE 4 déc. 1981, 7e et 9e ss-sect., n° 19133 et 19135, Dr. fisc. 1982, n° 2, comm. 1158,
concl. O. Schrameck. – CE, ass. plén., 13 mars 1967, n° 65126 et 65128, Dr. fisc. 1967, n° 17,
comm. 552.
INTRODUCTION 65
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libéralité. La conséquence en serait pour la société un rappel de l’impôt
sur les sociétés correspondant au montant de l’indemnité qu’elle aurait dû
exiger. Mais en réalité, dans une telle affaire, le Conseil d’État a relevé que
le dirigeant n’était pas le maître de l’affaire et que l’administration n’éta-
blissait pas que les dépenses qui étaient utiles à la marche de l’entreprise
avaient un caractère disproportionné par rapport au loyer que la société
aurait dû verser si elle avait pris en location un terrain comportant les
locaux nécessaires à son exploitation 1. Ainsi, cet exemple montre parfai-
tement combien le critère de l’acte anormal est l’intérêt de l’entreprise.
L’acte anormal peut également profiter aux associés. Il en est ainsi
lorsque la société prend en charge les intérêts d’un emprunt contracté
par un associé 2. Cependant même dans de telles hypothèses, l’acte qui
pourrait paraître comme objectivement anormal retrouve sa normalité
dès lors qu’il est justifié par l’intérêt de l’entreprise. Ainsi, dans le but de
la réalisation d’une opération plus large de transformation juridique, une
société souhaitait pouvoir racheter les actions des associés minoritaires.
Ne disposant pas d’une trésorerie suffisante, elle avait donné mandat à
deux associés d’acheter ces actions en attendant qu’elle puisse intervenir.
Pour ce faire, les deux actionnaires avaient eu recours à un emprunt.
L’administration a alors considéré que la société ne pouvait rembour-
ser aux actionnaires les intérêts car l’emprunt avait été souscrit pour le
compte personnel des associés. Mais, le Conseil d’État n’accueillit pas ses
prétentions en considérant que le rachat des actions avait été effectué
dans l’intérêt de l’entreprise 3. L’acte est donc normal malgré les appa-
rences lorsqu’il est fait dans l’intérêt de l’entreprise 4.
C’est également au profit du personnel de l’entreprise que l’acte anor-
mal de gestion est fréquemment effectué. Il s’agit alors bien souvent d’une
rémunération excessive versée au personnel ou d’une indemnité trop
importante ou indue versée à la suite de la rupture d’un contrat 5.
52 Charges exposées au profit de tiers par rapport à l’entreprise ¸
Il est a priori tout à fait anormal et donc impensable qu’une entre-
prise puisse prétendre prendre en charge des frais exposés dans l’inté-
rêt de tiers 6. Cependant la situation se rencontre fréquemment pour
1. CE 2 oct. 1985, Dr. fisc. 1985, no 52, 2310. Dans le même sens : CE 24 juin 1987, 7e et
8e ss-sect., no 48475, Dr. fisc. 1987, no 49, 2195.
2. TA Lyon 15 nov. 1989, Dr. fisc. 1990, no 19, comm. 947.
3. CE 29 juill. 1983, Dupont, 1983, p. 527.
4. Dans le même sens, pour des faits identiques : CE 6 févr. 1984, 7e et 9e ss-sect., no 20.325,
concl. Fouquet, Dr. fisc. 1984, no 26, comm. 1252.
5. Ex. pour une indemnité de rupture de contrat au profit d’un représentant de commerce,
CE 25 mai 1985, no 46.004, Dr. fisc. 1985, no 51, comm. 2245. De même, pour une indemnité
de licenciement économique, CE 10 juill. 1989, 8e et 9e ss-sect., no 64.977, Dr. fisc. 1989, no 42,
comm. 1902.
6. La situation se rencontre tout de même. Ex. caution par un entrepreneur individuel au
profit d’une société dont il est dirigeant (CE 14 nov. 1970, 7e et 8e ss-sect., n° 77214, Dr. fisc.
1972, n° 22-23, comm. 849, concl. L. Mehl).
66 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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des charges exposées au profit d’entreprises juridiquement liées. L’acte
anormal prend alors la forme d’achats pour un prix excessif entre sociétés
d’un même groupe, de subventions à des filiales, d’avances consenties
sans intérêts 1 ou encore de règlement de passif de filiales 2 ou de sous-
cription d’une caution d’un montant disproportionné par rapport au
montant de la participation dans la société cautionnée 3. Mais ici encore,
quel que soit le caractère objectivement anormal de l’opération, elle peut
être justifiée par l’intérêt de l’entreprise 4. Ainsi constitue un acte normal
de gestion le fait pour une société exportatrice de prendre en charge une
partie des dépenses de publicité sur un marché étranger exposé par un
distributeur étranger dès lors qu’il s’agit de faciliter la vente de ses pro-
duits par ce distributeur 5. De même constitue un acte de gestion normal,
le fait pour une société de participer, à concurrence de ses droits, au
règlement du passif d’une filiale étrangère afin de maintenir son renom
commercial 6. Le Conseil d’État prend en compte dans son appréciation
les contraintes économiques et juridiques qui pèsent sur les entreprises à
raison des relations nouées avec leurs partenaires 7. Il admet ainsi que les
avantages qu’une entreprise retire de son appartenance à un réseau justi-
fient la réalisation de versements pour le financement d’actions générales
au sein de ce réseau, même s’ils ne découlent pas d’engagements contrac-
tuels formels et n’ont pas de contrepartie directe 8. D’une façon générale,
mises à part certaines décisions prenant en compte le souci de renflouer
une filiale en difficulté 9, la jurisprudence considère que le seul intérêt
du groupe dans lequel une société est intégrée ne peut légitimer un acte
anormal de gestion 10.
S’il y a souvent acte anormal de gestion lorsque les charges sont expo-
sées au profit d’entreprises juridiquement liées, a fortiori en est-il ainsi
1. CE 23 janv. 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 365525, Sté. Ferrari et Cie., RJF 4/2015, n° 299,
concl. M. A. Nicolazo de Barmon, BDCF 4/2015, n° 41.
2. Ex. CE 4 mars 1985, no 35.066, Dr. fisc. 1986, no 6, comm. 173.
3. Paris 21 févr. 1997, 2e ch., no 94-1095, Dr. fisc. 1998, no 12, comm. 216.
4. Le caractère normal des aides consenties au sein d’un groupe soumis au régime de l’inté-
gration fiscale doit être apprécié dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire compte tenu
de l’intérêt propre de la société qui les octroie (CE 10 mars 2006, no 263183, RJF 6/06, no 678. –
CE 28 avr. 2006, no 278738, RJF 7/2006, no 837).
5. CE 18 nov. 1983, no 32.817, Dupont 1983, p. 14, comm. 17.
6. CE 1er juin 1983, 8e et 9e ss-sect., no 24.427, Dr. fisc. 1983, no 40, comm. 1811. – Dans le
même sens, pour des ristournes à une société holding en contrepartie d’avantages permettant
de développer les exportations de l’entreprise : CE 24 mai 1989, 9e et 8e ss-sect., no 72.038,
Dr. fisc. 1989, no 40, comm. 1731.
7. CE 26 sept. 2001, no 219825, RJF 12/01, no 1491.
8. CE 6 mars 2006, no 281034, RJF 5/06, no 502.
9. CE 30 juin 2008, 3e et 8e ss-sect., no 291710, Sté civile du groupe Comte, RJF 10/08,
no 1048.
10. CE 28 avr. 2006, 3e et 8e ss-sect., no 278378, Min. c/ Sté Atys France, Dr. fisc. 2006,
no 44-45, comm. 706 ; RJF 7/2006, no 837. – CE 28 avr. 2006, 3e et 8e ss-sect., no 277572, Min.
c/ Sté SEEEE, Dr. fisc. 2006, no 42, comm. 670 ; RJF 7/2006, no 836. – CE 10 mars 2006, Dr. fisc.
2006, no 21-22, comm. 414, concl. F. Séners, note J.-L. Pierre.
INTRODUCTION 67
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lorsqu’elles sont exposées au profit d’entreprises indépendantes ou de
personnes physiques. Dans de telles hypothèses, on peut même considérer
que l’administration bénéficie d’une présomption d’anormalité. Il s’agira
par exemple de cadeaux à la clientèle ou de subventions. Mais cette pré-
somption peut être renversée en établissant l’intérêt de l’entreprise. Ainsi,
le Conseil d’État a pu estimer que la prise en charge, par une société fran-
çaise, d’une perte de change subie par une société monégasque était jus-
tifiée par l’intérêt commercial propre de la société française en raison de
la nécessité où elle se trouvait, en vue de faire face, dans les délais prévus,
aux commandes de sa clientèle, de maintenir l’approvisionnement régu-
lier des produits chimiques importés qu’elle achetait dans des conditions
avantageuses à la société monégasque 1.
2. La renonciation à un profit
53 Renonciation au profit des membres de l’entreprise ¸ La renon-
ciation à un bénéfice au profit d'un membre de l'entreprise se rencontre
le plus souvent sous la forme d'une vente par la société d'un bien de
l'entreprise pour un prix inférieur à la valeur vénale 2, d’un loyer insuf-
fisant reçu par la société 3, d’une avance sans intérêt 4 ou de la renoncia-
tion à des redevances 5 ou à des indemnités. Cette dernière situation se
présente fréquemment en matière de location. Ainsi, un dirigeant loue
divers immeubles à sa société de même qu’un terrain loué depuis trois
ans sur lequel la société a édifié un bâtiment métallique. À la suite de la
résiliation anticipée des contrats, le président loue ces mêmes immeubles
à un tiers après perception d’un pas-de-porte. Quant à la société, elle
prend en location de nouveaux locaux pour lesquels elle verse un pas-de-
porte. Dans une telle hypothèse, constitue un acte normal, et donc non
critiquable, le fait que la société verse un pas-de-porte pour une telle loca-
tion. En revanche, en quittant les lieux sans demander aucune indemnité
d’éviction, la société a procédé à un acte anormal de gestion en faisant
1. CE 2 nov. 1987, 7e et 9e ss-sect., no 55.543, Dr. fisc. 1988, no 51, comm. 2325.
2. Ex. : CE 24 juin 1994, no 128420, Dr. fisc. 1995, no 10, com. 422. – Paris, 13 févr. 2001,
2e ch. B, no 97-1308, Dr. fisc. 2002, no 6, comm. 98 (cession de titres non cotés).
3. CE 25 nov. 1981, no 11.383, Dr. fisc. 1982, no 13, comm. 680. – Ainsi, le fait pour une
société concessionnaire d’un parc de stationnement pour automobiles, de mettre gratuitement
à la disposition de ses actionnaires des places de stationnement pour la durée de la concession
constitue une renonciation anormale à des recettes, dès lors qu’elle n’en retire aucune contre-
partie (CAA Nantes, 31 août 1993, 3e ch., Dr. fisc. 1994, no 44, comm. 1889).
4. Ex. CAA Nancy 6 mars 1996, no 93-1073, Dr. fisc. 1996, no 37, comm. 1060. Lorsque
l’avance sans intérêt est conforme à une pratique courante de la profession (auteur-composi-
teur), elle ne constitue pas un acte de gestion anormal malgré l’existence de liens étroits entre
la société et le bénéficiaire (CE 13 mai 1992, 9e et 8e ss-sect., no 65238, Dr. fisc. 1994, no 23,
comm. 1088).
5. Cependant, renoncer à des redevances sur une marque afin de préserver l’existence
même d’actifs n’est pas anormal (CE 10 févr. 2016, 10e et 9e ss-sect., n° 371258, SA Hôtels et
casino de Deauville, RJF 5/2016, n° 403, concl. A. Bretonneau).
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une libéralité à son président. L’administration est donc en droit d’inté-
grer dans les bénéfices de la société le montant de cette libéralité qui
peut être évaluée au montant du pas-de-porte reçu par le dirigeant. Par
ailleurs, elle peut également réintégrer dans les bénéfices sociaux une
somme correspondante à la perte du bâtiment métallique qu’elle avait
édifié sur le terrain loué depuis seulement trois ans et qui aurait été utili-
sable encore pendant une certaine période 1.
54 Renonciation au profit de tiers par rapport à l’entreprise ¸ De
même que pour la prise en charge de dépenses étrangères à l'intérêt de
l'entreprise, la renonciation à un bénéfice au profit de tiers par rapport
à l'entreprise si elle est possible à l'égard de tiers totalement étrangers à
l'entreprise 2, se conçoit plus facilement lorsque l’étranger à l’entreprise
est une entreprise qui lui est juridiquement liée. L’entreprise effectuera
alors une opération anormale en renonçant aux intérêts d’une créance 3,
en renonçant à réclamer le solde du prix de vente 4, en abandonnant une
créance 5, en ne faisant pas rémunérer certaines prestations ou encore en
ne vendant pas pour un prix suffisant 6, en louant contre un loyer insuf-
fisant, voire inexistant 7 ou en échangeant contre un bien de moindre
valeur 8. L’administration contrôle étroitement de telles opérations car
elles peuvent être utilisées pour transférer des bénéfices soit dans un
pays à régime fiscalement privilégié, soit au profit d’entreprise en déficit
de façon à « éponger » une partie de celui-ci. Au-delà, l’article 39, 13 du
CGI prévoit que les aides consenties à une autre entreprise, y compris
appartenant à un même groupe, ne sont pas déductibles dès lors qu’elles
n’ont pas de caractère commercial ou qu’elles ne sont pas consenties à
1. Concl. du commissaire du gouvernement Rivière sur CE 1er juin 1983, no 34.957, Dr. fisc.
1983, no 49, comm. 2253.
2. Ainsi, l’acte anormal de gestion peut être au profit d’un associé (ex. cession pour un prix
symbolique, CE 10 févr. 1993, 8e et 9e ss-sect., n° 96430, Mme Contamine, Dr. fisc. 1993, n° 27,
comm. 1388 ; RJF 4/1993, p. 324) ou d’un dirigeant (ex. prêt sans intérêt, CE 20 mai 1985, 7e et
9e ss-sect., n° 45829 et 46700, Dr. fisc. 1987, n° 28, comm. 1300).
3. CE 6 mai 1996, 9e et 8e ss-sect., no 148572, Dr. fisc. 1996, no 41, comm. 1210. – CE
26 févr. 2003, 9e et 10e ss-sect., no 223092 et 223093, Dr. fisc. 2003, no 24, comm. 436. –
CAA Marseille 30 avr. 2001, 3e ch., no 97-934, 97-1797 et 97-5280, Dr. fisc. 2002, no 6,
comm. 100.
4. CE 12 févr. 1992, 8e et 7e ss-sect., n° 67385, Sté. Sarpa, Dr. fisc. 1992, n° 21-22, comm.
1033 ; RJF 4/1992, n° 435.
5. CE 6 mai 1996, 9e et 8e ss-sect., no 148572, préc. – CE 26 févr. 2003, 9e et 10e ss-sect.,
no 223092 et 223093, préc. L’abandon de créances à caractère commercial consenti dans le
cadre d’un plan de sauvegarde ou de redressement est cependant déductible (CGI, art. 39-1, 8o).
6. Ex. Ventes à un prix inférieur au prix d’achat majoré des frais annexes consenties à une
société ayant le même associé et gérant (CE 28 juill. 2011, 9e et 10e ss-sect., n° 319029, SARL
Imexrep, Dr. fisc. 2011 n° 47, comm. 602).
7. Absence de rémunération d’une concession de licence (CE 26 sept. 2011, 8e et 3e ss-sect.,
Min. c/ SARL Holding financière Séguy, Dr. fisc. 2011, no 46, comm. Note P. Fumenier).
8. CE 26 févr. 1990, 8e et 9e ss-sect., no 76.860, Dr. fisc. 1990, no 25/26, comm. 1225.
INTRODUCTION 69
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une entreprise soumise à une procédure de conciliation, de sauvegarde, de
redressement ou de liquidation judiciaire 1.
Il est à noter que dans l’hypothèse d’un groupe de sociétés, le Conseil
d’État ne paraît pas considérer que l’intérêt du groupe peut justifier un acte
objectivement anormal 2. « S’il apparaît souhaitable de prendre davantage
en considération la réalité économique que constituent les groupes de
sociétés, c’est au législateur qu’il appartient de le faire… En attendant
pareil changement, le juge doit constater que les solidarités économiques
existant entre des sociétés trouvent leur limite dans l’autonomie juridique
de chacune d’elles » 3. Cependant, en présence d’un groupe, la jurispru-
dence et l’administration font preuve d’une plus grande souplesse dans
l’application de la théorie générale de l’acte anormal de gestion 4. Ainsi
l’aide financière sous la forme d’une avance sans intérêt 5, d’une cession à
prix coûtant 6, d’une subvention à une filiale en difficulté 7 peut être jugée
normale. Il demeure aujourd’hui que la déductibilité de l’aide suppose un
intérêt commercial et non simplement financier 8. La notion d’intérêt du
groupe ne peut cependant justifier le soutien d’une société d’un groupe
en difficulté que lorsqu’il est le fait de la société mère. L’intérêt du groupe
ne peut être invoqué par une société sœur car les avantages consentis ne
peuvent être compensés par des retombées financières faute de participa-
tion au capital et donc faute de participation aux bénéfices 9.
Bien que plus rare, l’acte anormal de gestion se rencontre encore sous
la forme de la renonciation à un bénéfice au profit d’entreprises juridi-
quement indépendantes ou de personnes physiques 10. À cet égard, le cas
du prêt sans intérêt est particulièrement net 11. Constitue ainsi un acte
1. S’agissant de cette deuxième série d’hypothèses, la loi précise que les aides qui ne revêtent
pas un caractère commercial sont déductibles à hauteur de la situation nette négative de
l’entreprise qui en bénéficie et, pour le montant excédant cette situation nette négative, à pro-
portion des participations détenues par d’autres personnes que l’entreprise qui consent les
aides (CGI, art. 39, 13 dernier alinéa).
2. CE 21 juin 1995, 9e et 8e ss-sect., no 132530, Dr. fisc. 1995, no 52, comm. 2393 – CE
28 avr. 2006, no 278378 et no 277572, préc. – CE 10 mars 2006, préc.
3. Concl. Rivière sur CE 26 juill. 1982, Dr. fisc. 1983, no 10, comm. 378.
4. Contra, cependant : CE 3 juin 1992, 9e et 7e ss-sect., no 85.067, Dr. fisc. 1992, no 43,
comm. 1946.
5. CE 2 juin 1982, no 23.342, Dr. fisc. 1983, no 6, comm. 191, concl. Schricke ; RJF 7/82,
p. 328.
6. CE 24 févr. 1978, no 2372, RJF 1978. 122.
7. CE 27 juin 1984, no 35.030, Dr. fisc. 1985. 763, comm. 1063.
8. Cf. supra, CGI, art. 39, 13, avec la réserve prévue s’agissant des cas d’application du droit
des entreprises en difficulté.
9. CE 21 juin 1995, 9e et 8e ss-sect., no 132531, Dr. fisc. 1995, no 41, comm. 1902 ; RJF 1995.
574, concl. Martin, ibid. p. 559.
10. Ainsi, en renonçant à percevoir, sans aucune contrepartie, les intérêts qui lui sont dus
par son bailleur, en application de l’article 24 du décret du 30 sept. 1953, sur les sommes repré-
sentatives d’un dépôt de garantie excédant deux termes de loyer, une société commet un acte
anormal de gestion (TA Dijon, 23 juin 1988, 1re ch., no 96-6029, Dr. fisc. 1999, no 5, comm. 72).
11. La stipulation d’un intérêt ne suffit pas pour rendre le prêt normal. L’appréciation
du caractère normal de la rémunération des avances doit être évaluée par apport à la
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anormal de gestion le fait pour une société bailleresse de consentir une
avance gratuite à une société locataire alors que cette somme était des-
tinée à réaliser des équipements qui n’augmentaient pas la valeur du
local et ne présentaient pas d’intérêt pour elle. Le fait d’avoir un associé
commun ne change rien au fait qu’elles sont juridiquement étrangères.
De plus, aucune relation commerciale n’existait entre elles qui aurait
pu apporter une justification 1. Une telle analyse est encore plus vraie
lorsque le prêt n’est pas consenti au profit d’une entreprise mais d’une
personne physique 2.
Afin de fixer les limites du contrôle de l’administration, un dernier
exemple peut être cité pour montrer qu’il n’existe pas d’acte anormal
de gestion en soi. Un acte de gestion ne peut être considéré isolément
pour être qualifié d’anormal. L’ensemble des circonstances économiques,
commerciales, financières doit être examiné. Ainsi, une société coopéra-
tive d’achat vendait à des sociétés qui lui étaient étrangères du matériel
pour un prix inférieur à celui qu’elle consentait à ses adhérents. Malgré le
caractère objectivement anormal d’une telle opération, le Conseil d’État
a retenu comme justification de cette pratique le fait que la société ache-
tait plus qu’elle ne pouvait écouler auprès de ses adhérents afin de leur
permettre de profiter de prix avantageux 3. De même que les décisions
précédentes, celle-ci confirme que la théorie de l’acte anormal de gestion
repose sur un critère fort simple, l’intérêt de l’entreprise.
rémunération que le prêteur pourrait obtenir d’un établissement financier auprès duquel il
placerait dans des conditions analogues des sommes d’un montant équivalent (CE 31 juill.
2009, 10e et 9e ss-sect., no 301935, SARL Jean-Marc Brocard).
1. CE 16 nov. 1983, no 33.647, Dupont 1984, p. 12, comm. 12 (Pour un exemple concernant
des sociétés regroupées en association mais non liées juridiquement, voir CAA Nancy, 23 nov.
1992, no 92-303, Dr. fisc. 1994, no 40, comm. 1680).
2. Ex. prêt accordé à la petite fille du président du conseil d’administration de la société : CE
6 févr. 1981, no 14.390, Dupont 1981, p. 182, comm. 314.
3. CE 4 nov. 1985, no 43.042, Dr. fisc. 1986, no 7, comm. 231.
4. CE 8 août 1990, RJF 10/90, 1252, concl. Martin, p. 661 ; Dr. fisc. 1993, no 43, comm.
2033. – CE 23 janv. 2015, no 369214, SAS Rottapharm, RJF 4/2015, no 300. – CE 20 mai 2015,
9e et 10e ss-sect., n° 369373, Sté. Universal Aviation France, Dr. fisc. 2015, n° 47, comm. 687,
concl. M.-A. Nicolazo de Barmon, note P. Kouraleva-Cazals ; RJF 8-9/15, n° 681.
5. CE 22 juin 2011, 3e et 8e ss-sect., no 320746, Sté Mit Chartering, Dr. fisc. 2011, no 45,
cm. 584, concl. E. Geffray, note Ch. De la Mardière.
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un profit ou d’une dépense sans justification ou exagérée. L’entreprise doit
alors justifier l’intérêt commercial ou financier de son comportement. Si
elle parvient à justifier de cet intérêt, l’administration est regardée comme
n’apportant pas la preuve de l’acte anormal de gestion 1. Il convient
cependant de rappeler que la jurisprudence apprécie de façon tradition-
nellement plus libérale les opérations réalisées entre entreprises juridi-
quement dépendantes que celles qui sont effectuées entre entreprises
juridiquement indépendantes ou au profit des membres de l’entreprise.
On peut également rappeler que la jurisprudence voit dans certaines
circonstances une présomption d’anormalité. Ainsi en est-il lorsqu’il
n’existe aucun lien entre les entreprises en cause. Dans cette hypothèse,
« il suffit à l’administration, pour apporter la preuve dont elle a la charge,
d’établir qu’aucun lien juridique n’existe entre les deux entreprises ; si
tel est le cas, l’avantage consenti est présumé anormal. Mais cette pré-
somption n’est pas irréfragable… » 2. En revanche, pour les entreprises
juridiquement dépendantes, il n’existe pas une telle présomption, sauf les
cas particuliers où elle est expressément prévue par un texte. Ainsi, est-ce
le cas de l’article 57 et de l’article 238 A du CGI destinés à lutter contre
le transfert de bénéfices à l’étranger. Il en est de même pour l’article 39-4
du CGI qui, concernant les dépenses somptuaires présume leur absence
d’intérêt pour l’entreprise.
Lorsqu’une entreprise entend renverser la présomption d’anormalité,
il lui appartient de prouver un intérêt économique et financier en faisant
état « de circonstances ou de documents appropriés » 3.
Enfin, en dehors d’une présomption d’anormalité, la charge de la preuve
est également renversée lorsque la loi attribue au contribuable la charge
de la preuve. Ainsi, il appartient au contribuable d’établir l’exactitude des
écritures comptables portant sur des charges portées aux frais généraux 4,
des amortissements, des provisions ou encore une créance de tiers ou
l’existence d’un déficit provenant d’exercices antérieurs. Autrement dit, si
l’acte anormal de gestion met en jeu des charges visées aux articles 38-2
ou 39-1, la preuve de l’anormalité est rapportée dès lors que le contribuable
ne peut justifier la réalité des écritures correspondant à l’opération dont
l’administration conteste l’intérêt ou la nécessité 5. En revanche, dès lors
que la réalité de la dépense est justifiée, il appartient à l’administration de
démontrer que la charge n’a pas été exposée dans l’intérêt de l’entreprise 6.
1. CE 26 juin 1992, 8e et 9e ss-sect., no 68646, Dr. fisc. 1992, no 50, comm. 2324.
2. Concl. Rivière sur CE 7 nov. 1979, 7e et 9e ss-sect., no 6188, Dr. fisc. 1980, no 43, comm.
2227.
3. CE 26 juill. 1982, 9e ss-sect., no 27.823, Dupont 1982, no 10, p. 453.
4. Ex. CE 22 juin 1988, no 58.968, RJF no 8-9/88, no 1021.
5. C’est le cas, par exemple, de l’effectivité d’un travail : CE 27 juill. 1984, 7e, 8e et 9e ss-sect.,
RJF 10/84, p. 562, concl. Racine.
6. CE 30 déc. 2002, 3e et 8e ss-sect., no 230033, Dr. fisc. 2003, no 20, comm. 370.
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56 La rectification ¸ La conséquence pour l'entreprise de la preuve de
l'anormalité d'un acte sera un rappel de son impôt sur les bénéfices.
Si l'acte anormal consistait en charges étrangères à l'intérêt de l'entre-
prise ou en charges excessives, le rehaussement sera la conséquence
d'une réduction des charges déductibles. Si, au contraire l'anormalité
de l'acte résultait d'une renonciation à un profit ou de sa minoration, le
rehaussement sera dû à la réintégration, dans les bases d'imposition, du
profit litigieux 1.
Quant au bénéficiaire de l’acte anormal, il reçoit un profit sur lequel il
doit être imposé. Les conditions de cette imposition sont variables.
Si l’entreprise auteur de l’acte anormal de gestion relève de l’impôt
sur le revenu, le bénéficiaire sera, en principe, imposé dans la catégorie
des bénéfices non commerciaux à moins qu’il ne soit personnellement
soumis à l’impôt sur les sociétés. Le bénéficiaire pourra d’autre part
être imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux
s’il est associé de la société soumise à l’impôt sur le revenu ou s’il est
commerçant individuel.
Lorsque l’auteur de l’acte anormal de gestion relève de l’impôt sur les
sociétés, le bénéficiaire sera alors imposé dans la catégorie des revenus
mobiliers puisque la rectification aura fait apparaître un désinvestisse-
ment ou d’une façon plus précise une distribution camouflée de bénéfices.
1. Ainsi, au cas d’avances sans intérêt, les bénéfices de l’entreprise prêteuse seraient aug-
mentés du montant de l’intérêt qu’elle aurait pu obtenir d’un établissement financier ou d’un
organisme assimilé auprès duquel elle aurait placé dans des conditions analogues des sommes
d’un montant équivalent (CE 7 oct. 1988, no 50256, Dr. fisc. 1989, no 9, comm. 376 ; RJF 12/88,
1296. – CE 23 nov. 1992, no 74266, Dr. fisc. 1993, no 15, comm. 772. – Paris 8 juin 2000, 5e ch.,
no 98-2317, Dr. fisc. 2001, no 27, comm. 610).
2. CE 27 avr. 2001, 9e et 10e ss-sect., no 212680, Bull. Joly 2001, no 10, 225, obs. Parot.
3. CE 7 janv. 1977, 7e et 9e ss-sect., no 96999, RJF 3/77, 125. – CE 12 janv. 1990, 8e et 3e ss-
sect., no 57754 et 57 755, Dr. fisc. 1990, comm. no 1368, concl. Racine ; RJF 3/90, no 3, p. 181,
no 253.
INTRODUCTION 73
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pratiquée 1. De même, la moins-value qui pourrait apparaître à l’occasion
de la cession de l’actif immobilisé pourrait voir sa déduction refusée 2.
58 Acquisition d’immobilisation à prix minoré ¸ Lorsqu'un élément
de l'actif immobilisé est cédé pour un prix minoré, le vendeur peut
être redressé sur le fondement de l'acte anormal de gestion en raison
de la minoration de la plus-value sans contrepartie 3. Cette sanction
n’a pas de conséquence sur la situation de l’acquéreur. Il résulte, en
effet de l’article 38 quinquies de l’annexe III au CGI que les immobilisa-
tions doivent être inscrites à l’actif du bilan pour leur valeur d’origine,
laquelle s’entend, pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du
coût d’acquisition 4.
Il n’en demeure pas moins que l’avantage dont bénéficie l’acquéreur,
constitué par l’économie financière qu’il réalise, peut être considéré
comme revenu distribué et appréhendé auprès des sociétés sur le fonde-
ment des articles 109, 1 et 111 du CGI 5. S’il en est ainsi, afin d’éviter une
double imposition, le Conseil d’État autorise à substituer au prix d’acqui-
sition, la valeur vénale du bien 6.
59 Bibliographie ¸
C. BOismain, « L’acte anormal de gestion et la jurisprudence récente du Conseil
d’État », BF Lefebvre 6/2014, p. 341.
P.-Y. BOurtOurauLt et M. Benard, « Relations intragroupe, prix de transfert et acte
anormal de gestion : vers une convergence des règles de preuve applicables aux opé-
rations nationales et internationales ? », Dr. fisc. 2009, no 50, ét. 576.
M. COttini, Contribution à l’étude de l’anormalité en matière de preuve fiscale, Thèse Aix-
Marseille III, 1998.
V. Daumas, « Sociétés de capitaux constituées en vue d’organiser la coopération entre
ses associés : la jurisprudence sur l’acte anormal de gestion se raffine », RJF 3/2010,
p. 165.
C. David, « L’acte anormal de gestion (comparaison fiscale Allemagne, France et
Royaume-Uni) », in Mélanges M. Cozian, Litec. 2009, p. 239.
A. FauChOn, « La preuve de l’acte anormal de gestion », in La preuve, dir. C. Puigelier,
Études juridiques n° 19, Litec, 2004, p. 141.
O. FOuquet, « Acte anormal de gestion et mauvaise gestion », Rev. adm. 2008. 36.
P. serLOOten, « Liberté de gestion et droit fiscal : la réalité et le renouvellement de
l’encadrement de la liberté », Dr. fisc. 2007, no 12, ét. 301.
R. vabres, « Compensation et acte anormal de gestion », Revue des procédures collectives
2017, n° 5, comm. 117.
1. CE 26 juill. 1982, no 2533, RJF 10/82, p. 493, no 903. – CE 21 juin 1995, 9e et 8e ss-sect.,
no 132530, RJF 8-9/95, p. 569, no 954.
2. CE 10 mars 1971, 8e et 9e ss-sect., no 78838, Dupont 1971. 225.
3. CE 27 juill. 1984, no 41959, 41960 et 41961, Dr. fisc. 1984, no 50, comm. 2242.
4. CE 17 nov. 2000, no 179429, Dr. fisc. 2001, no 15, comm. 399, concl. G. Bachelier.
5. CE 13 déc. 2002, no 224975, Dr. fisc. 2003, no 11, comm. 201. – CE 28 févr. 2001, sect.,
no 199295, Dr. fisc. 2001, no 26, comm. 592, concl. G. Bachelier.
6. CE 5 janv. 2005, 3e et 8e ss-sect., no 254556, Dr. fisc. 2005, no 13, comm. 318, concl.
E. Glaser, obs. A. Bricet et M. Gautier.
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§ 3. La théorie du risque excessif
60 Évolution ¸ Afin de contrôler la gestion de l'entreprise et ajouter ainsi
une nouvelle limite à sa liberté de gestion, la jurisprudence pendant un
certain temps paraissait ne plus exiger que l'acte de l'entreprise soit étran-
ger à son intérêt, se satisfaisant d'une prise de risque excessive 1. Bien
que le critère du risque soit distinct du critère de l’intérêt de l’entreprise,
la théorie du risque excessif était en général rattachée à l’acte anormal
de gestion 2. Le domaine de la théorie était donc celui des actes qui
comportent un aléa. Le risque pris par l’entreprise est-il dans son prin-
cipe comme dans son montant normal ou excessif ? L’appréciation de ce
caractère normal ou non excessif doit être faite au moment de l’acte 3.
Il ne s’agissait pour l’administration que d’apprécier l’existence d’une
contrepartie à venir. Par là la théorie du risque excessif pouvait ne pas
être détachée de celle de l’acte anormal de gestion. Le critère d’application
était cependant différent. Selon le Conseil d’État, l’intérêt de l’entreprise
est satisfait lorsque les placements financiers réalisés par l’entreprise pré-
sentent pour elle un caractère avantageux, mais il en est autrement si
« compte tenu des circonstances dans lesquelles il intervient, de l’objet
qu’il poursuit, un placement financier excède manifestement les risques
qu’un chef d’entreprise peut, eu égard aux informations dont il dispose,
être conduit à prendre, dans une situation normale, pour améliorer les
résultats de son entreprise » 4. Cette formule fut reprise à propos du
soutien d’une filiale en difficulté. L’intérêt de l’entreprise est méconnu
lorsqu’elle « prend un risque qui, au regard de l’intérêt que présente pour
elle l’accès de sa filiale à des facilités de trésorerie, excède manifestement
les risques qu’un chef d’entreprise peut eu égard aux informations dont il
dispose, être conduit à prendre, dans une situation normale, pour amé-
liorer les résultats de son entreprise » 5.
Pour l’application de ces principes, le Conseil d’État avait considéré
qu’une disproportion entre le montant du placement financier et le mon-
tant du chiffre d’affaires de la société ne saurait établir par elle-même que
le placement ferait courir un risque manifestement exagéré à la société 6.
1. CE 30 mai 2007, 3e et 8e ss-sect., no 285573 et 285575, SA Peronnet, Dr. fisc. 2007, no 46,
comm. 958, concl. F. Séners, note A. Bonnet. – CE 17 oct. 1990, 7e et 8e ss-sect., Loiseau,
no 83310, Dr. fisc. 1991, no 48, comm. 2281, concl. O. Fouquet ; RJF 11/1990, no 1317. – CE
28 sept. 1983, 8e et 9e ss-sect., no 34626, Dr. fisc. 1984, no 4, comm. 75 ; RJF 11/1983, no 1284.
2. Ainsi, le risque ne serait qu’un « sous-critère » de l’acte anormal de gestion. V. A. de Bissy
et G. Dedeurwaerder, « Le critère du risque dans la jurisprudence fiscale », Cahiers de droit de
l’entreprise no 3, mai 2012, dossier 14.
3. CE 3 nov. 1989, 8e et 9e ss-sect., no 92860, RJF 14/90, conclu. P.-F. Racine.
4. CE 27 avr. 2011, 8e et 3e ss-sect., Sté Legeps, no 327764, Dr. fisc. 2011, comm. 399, no 25,
concl. L. Olléon, note O. Fouquet.
5. CE 16 nov. 2011, 3e ss-sect., no 326913, Sté Fralsen Holding, RJF 8-9/2012, no 799. Adde sur
la même affaire, CE 11 juin 2014, 3e et 8e ss-sect., n° 363168, Sté Fralsen Holding, RJF 10/2014,
comm. 872 ; BDCF 10/2014, comm. 90 pour les concls. de M.-A. Nicolazo de Barmon.
6. CE 27 avr. 2011, 8e et 3e ss-sect., Sté Legeps, no 327764, préc.
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Il demeurait cependant que le critère du risque excessif était insuffisam-
ment précisé de telle sorte que pouvait être crainte une immixtion de
l’administration dans la gestion de l’entreprise, d’autant que son contrôle
se fait a posteriori pouvant l’amener à prendre en compte des éléments que
le chef d’entreprise ne pouvait connaître au moment de l’acte.
Dans son dernier état, le Conseil d’État a abandonné la théorie du risque
excessif : « Il n’appartient pas à l’Administration… de se prononcer sur
l’opportunité des choix de gestion opérés par l’entreprise et notamment
pas sur l’ampleur des risques pris par elle pour améliorer ses résultats » 1. La
Haute juridiction en revient ainsi à juste titre à une réaffirmation du prin-
cipe de liberté de gestion et indirectement conforte l’idée que la théorie du
risque ne pouvait être rattachée à l’acte anormal de gestion.
61 Bibliographie ¸
A.-C. Bezzina, « Acte anormal de gestion : de quelques considérations sur l’abandon du
critère du “risque excessif” », Dr. fisc. 2016, n° 47, ét. 598.
A. de Bissy et G. Dedeurwaerder, « Le critère du risque dans la jurisprudence fiscale »,
Cahiers de droit de l’entreprise no 3, mai 2012, dossier 14.
F. de BOissy, « Prise de risque excessif et acte anormal de gestion », Dr. fisc. 2015, n° 23,
comm. 386.
Ph. Durand et M. SeraiLLe, « La théorie du risque manifestement excessif : le glas a
sonné ! », Dr. fisc. 2016, n° 36, act. 489.
F. LaCrOix, « Risque manifestement excessif : un abandon presque total d’une théorie
défavorable aux entreprises », FR Lefebvre 35/2016. inf. 3, p. 6.
E. Le DOLLey, « Le risque fiscal excessif » in Risques d’entreprise : quelle stratégie juri-
dique ?, LGDJ 2012, p. 249.
O. FOuquet, « Acte anormal de gestion résultant de la prise d’un risque manifestement
excessif : quelles limites ? », FR Lefebvre 31/2012. inf. 19.
L. OLLéOn, « Théorie du risque manifestement excessif : une synthèse sur les raisons et
la portée de son abandon », FR Lefebvre 41/2016, comm. 1.
C. Raquin, « L’évaluation du risque pris par les entreprises conduit-elle l’Administra-
tion à s’immiscer dans leur gestion ? », RJF 7/2011, p. 699.
P. Le rOux, « Le risque manifestement excessif : quelle portée attribuer à l’arrêt
Fralsen ? », Fr. Lefebvre 35/2014, no 21, p. 21.
Y. RutsChmann et J. GayraL, « Le risque manifestement excessif : immixtion rampante
dans la gestion de l’entreprise ou simple garde-fou ? », Dr. fisc. 2012, no 45, ét. 500.
1. CE 13 juill. 2016, sect., n° 375801, SA Monte Paschi Banque, Dr. fisc. 2016, n° 36, comm.
464, concl. E. Bogdam-Tognetti, note O. Fouquet ; RJF 11/2016, n° 937. Une exception est
cependant réservée pour l’application de la théorie, celle des détournements de fonds rendus
possibles par une carence grave du contrôle interne de l’entreprise au point de pouvoir appa-
raître comme une faute des dirigeants de celle-ci.
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de l'intangibilité des écritures comptables. Ce principe trouve sa force
dans les lois aussi bien commerciales (C. com., art. L. 123-12 s.) que fis-
cales (CGI, art. 54 notamment) qui fixent les obligations comptables des
entreprises. Ce principe est cependant limité par le pouvoir donné à
l'administration de rectifier les impositions et donc les écritures comp-
tables en remontant dans le passé jusqu'à la date de prescription. Un tel
pouvoir reconnu unilatéralement instaurerait une inégalité au profit de
l'administration dans ses relations avec le contribuable. Aussi, très tôt,
la jurisprudence a reconnu au contribuable un droit à l'erreur par lequel
il peut réclamer la correction de ses propres erreurs 1 à la condition d’en
justifier la matérialité et le montant 2. Il se peut cependant que la solution
retenue par l’entreprise, bien qu’elle lui soit préjudiciable, ne soit pas le
produit d’une erreur, mais le résultat d’un choix voulu, délibéré. Le droit
à l’erreur, ainsi justement reconnu à l’entreprise, ne doit pas alors lui
permettre de contester toutes les opérations effectuées par l’entreprise dès
lors qu’elles se révèlent préjudiciables. C’est pourquoi, la notion d’erreur
comptable est complétée par celle de décision de gestion 3.
63 Distinction des erreurs comptables et des décisions de ges-
tion ¸ L'erreur comptable « s'analyse en une défaillance involontaire
dans le récolement ou dans la traduction comptable de données de fait
dont l'enregistrement comptable ne laisse place à aucune option » 4. Au
contraire, « la décision de gestion est la décision de procéder à une écri-
ture ou à un ensemble d’écritures comptables dont la passation est facul-
tative, ou de fixer le quantum de ces écritures en utilisant une marge de
choix que les prescriptions légales laissent ouvertes » 5.
Ainsi, le critère entre la décision de gestion et l’erreur comptable est que
la première suppose une faculté juridique d’option pour le contribuable
alors qu’il y a erreur lorsqu’il n’y a pas une telle possibilité de choix, c’est-
à-dire que l’écriture erronée est prise en contravention avec les textes.
À titre d’exemples, l’entreprise qui omettrait en comptabilité des frais
déductibles, qui comptabiliserait une immobilisation pour une valeur
inférieure à son prix de revient ou qui comptabiliserait une plus-value
sur un exercice différent de celui de sa réalisation 6, commettrait des
1. CE 7 févr. 1930, Gaz. Pal. 1930. 1, 628. – CE 23 janv. 1931, Gaz. Pal. 1931. 1, 376 – CE
24 janv. 1949, no 99.424, Lebon 33 – CE 17 déc. 1956, no 33.377, Lebon 483.
2. CE 10 mars 1999, 8e et 9e ss-sect., no 154859, Dr. fisc. 1999, no 44, comm. 797.
3. Bien qu’essentiellement utilisée par la fiscalité de l’entreprise, la décision de gestion
paraît avoir un champ d’application plus large (En ce sens, G. Dedeurwaerder, « La distinction
des erreurs et des décisions de gestion. Essai de présentation renouvelée d’une théorie géné-
rale », Dr. fisc. 2014, no 28, Ét. 427). Adde P. Serlooten, « La décision, instrument de gestion
fiscale ? » Coll. Histoire, gestion, organisations, no 7, Presses de l’Université des Sciences
Sociales de Toulouse, 1999, p. 335.
4. Concl. Fabre sur CE 4 juill. 1979, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 5511, Dr. fisc. 1980, no 16, comm.
890.
5. Concl. Fabre, préc. sur CE 4 juill. 1979, 7e, 8e et 9e ss-sect.
6. CE 6 mai 1996, 9e et 8e ss-sect., no 135283, Dr. fisc. 1996, no 42, comm. 1245.
INTRODUCTION 77
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erreurs pouvant être rectifiées. De telles décisions sont en effet contraires
à l’article 39-1, 1o du CGI selon lequel le bénéfice net est établi sous déduc-
tion des frais généraux de toute nature et à la règle qui veut qu’une immo-
bilisation doive figurer au bilan pour sa valeur réelle. Cette règle permet à
l’administration de vérifier la valeur d’inscription du bien au bilan 1. Dans
le même sens, lorsqu’une société réalise un apport partiel d’actif soumis
aux règles du droit commun, c’est-à-dire sans appliquer le régime spécial
des fusions, scissions et apports partiels d’actifs 2, la société bénéficiaire
de l’apport doit inscrire à son bilan, conformément au droit commun, la
valeur nette de l’actif apporté 3. Elle ne peut régulièrement inscrire à son
bilan, conformément au régime spécial, la valeur brute de l’actif et les pro-
visions correspondantes qui figuraient au bilan de la société apporteuse.
Une telle écriture serait erronée et ne traduirait pas l’exercice d’une faculté
juridique d’option. Partant, elle devrait être regardée comme une erreur
comptable dont la société est fondée à demander la correction. Autrement
dit, dans une telle hypothèse, l’inscription de la provision ne constitue par
une décision de gestion opposable au contribuable, puisqu’il n’existe pas
de choix possible.
Au contraire, l’entreprise qui omettrait d’inscrire une partie de ses
amortissements en comptabilité 4, qui comptabiliserait une annuité
d’amortissement inférieure à l’amortissement dégressif pour un bien y
ouvrant droit 5 ou qui augmenterait la valeur d’une immobilisation par
rapport au bilan précédent 6 prendrait une décision de gestion qui lui
serait opposable. Ainsi, cette dernière décision entraînerait les consé-
quences de la réévaluation libre des bilans.
La distinction des erreurs comptables et des décisions de gestion est
fondamentale puisque la décision de gestion ne peut pas être critiquée par
l’administration 7, ni modifiée par l’entreprise après l’expiration, du délai
légal de déclaration alors que l’erreur peut faire l’objet d’une rectification à
l’initiative de l’administration 8 comme à celle de l’entreprise 9.
64 Les erreurs comptables délibérées (ou décisions de gestion irré-
gulières) ¸ Par son objectivité, la notion d'erreur comptable se prête
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à une fraude facile et en tout cas sans risque. Il suffit au contribuable
de commettre délibérément une erreur comptable avantageuse ; puis en
cas de découverte de la fraude, en alléguant que les textes ne donnaient
aucune option, de revendiquer la rectification de l'erreur et d'atténuer
ainsi les rigueurs du rehaussement. Ainsi en cas de découverte de l'ins-
cription de frais en éléments amortissables et non en charges déductibles,
le fraudeur découvert serait en droit, en invoquant l'erreur comptable, de
demander sa correction et donc de déduire immédiatement la dépense
indûment amortie 1.
C’est pourquoi, la jurisprudence a créé, à mi-chemin entre la notion de
décision de gestion et celle d’erreur comptable, la notion d’erreur comp-
table délibérée 2 ou de décision de gestion irrégulière 3. Cette notion se
rapproche de la décision de gestion en ce qu’il y a une décision délibérée,
une volonté. Mais elle se rapproche de l’erreur en ce qu’il n’y avait pas de
choix. Il y a eu violation volontaire de la règle fiscale 4.
S’agissant d’une erreur comptable, elle n’est pas opposable à l’adminis-
tration qui peut rectifier l’erreur. En revanche, s’agissant d’une décision
délibérée par le contribuable, cette décision lui est opposable 5. Il s’agit en
fait de sanctionner celui qui s’est livré volontairement à des erreurs dans le
but d’éviter ou de retarder l’impôt. L’erreur comptable délibérée est oppo-
sable au contribuable, même si elle a été commise à des fins non fiscales et
a conduit à une majoration indue de l’imposition 6.
La difficulté consiste pour l’administration à prouver le caractère volon-
taire de l’erreur. Tout dépend des circonstances de fait. Ainsi, lorsqu’un
entrepreneur avait omis de faire figurer dans sa comptabilité une dette
envers une SCI, le Conseil d’État a constaté l’erreur puisqu’une dette liée
à l’exploitation doit nécessairement être rattachée aux résultats de l’entre-
prise. L’entrepreneur n’a donc aucun choix. Mais le Conseil d’État a tout
de même refusé la prise en compte de cette erreur en relevant son carac-
tère volontaire. Ceci en tenant compte du fait que l’entrepreneur contrô-
lait la SCI ; il en détenait 197 parts sur 201 7. Dans d’autres hypothèses,
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la preuve de l’erreur volontaire pourra, par exemple, résulter des relations
qui existaient entre deux sociétés et qui se caractérisaient par des opéra-
tions de complaisance mutuellement consenties 1.
Compte tenu du nécessaire élément intentionnel qui définit la décision
de gestion irrégulière, des difficultés de preuve qui en découlent et du
souci de ne pas contrarier la liberté de gestion, la notion de décision de
gestion irrégulière est aujourd’hui peu utilisée étant réservée aux seuls cas
véritables de fraude 2.
65 Bibliographie ¸
A. de CarLan, « Nouvel éclairage sur la notion d’erreur comptable délibérée : la carence
n’est pas un acte de volonté », Dr. fisc. 2016, n° 17, Act. 264.
M. COzian, « Les erreurs comptables : l’entreprise peut-elle toujours les réparer ? »,
LPA 1998, no 57, p. 10.
M. COzian, « On ne badine pas avec les écritures comptables : la théorie des erreurs
comptables délibérées », Dr. fisc. 1999, no 20, p. 734.
G. Dedeurwaerder, « La distinction des erreurs et des décisions de gestion. Essai de
présentation renouvelée d’une théorie générale », Dr. fisc. 2014, no 28, Ét. 427.
1. CE 20 avr. 1977, 7e et 8e ss-sect., no 98.853, Dr. fisc. 1977, no 26, comm. 1021 ; RJF 16/77,
p. 216.
2. En ce sens avec les références citées : Ch. Robbez Masson, La notion d’évasion fiscale en
droit français, LGDJ, 1990, no 541, p. 402. Des décisions d’application sont cependant régulière-
ment publiées. Ex. CE 12 mai 1997, 8e et 9e ss-sect., no 160777, Ministre c/ SARL Intraco, RJF
6/97, 535. – CAA Bordeaux 17 juin 1997, 3e ch., no 95-549, Dr. fisc. 1998, no 12, comm. 215.
3. Les organismes de gestion agréés (OGA) ont l’obligation de procéder chaque année aux
contrôles de concordance, de cohérence et de vraisemblance des déclarations de résultats et de
taxe sur le chiffre d’affaires de leurs adhérents. – BOI-DJC-OA-20-10-10.
4. CGI, art. 1649 quater C s. Pour un commentaire administratif, BOI-DJC-OA.
80 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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Leur comptabilité est nécessairement tenue ou surveillée par un expert-
comptable 1 et par ailleurs, ils reçoivent l’assistance technique d’un ou
plusieurs agents de l’administration fiscale.
Ils doivent recevoir l’agrément de l’administration, accordé par le
Directeur régional des finances publiques 2. L’agrément est subordonné
notamment à la réunion d’un nombre minimum d’adhérents et à la
conclusion d’une convention avec l’administration qui précise dans quelles
conditions interviennent les agents de l’administration. L’agrément peut
être retiré au cas où le centre de gestion ne respecterait pas ses obliga-
tions 3. Le renouvellement de l’agrément intervient tous les six ans, à
l’exception du premier qui doit être renouvelé au bout de trois ans 4.
1. L’expert-comptable vise les documents fiscaux après s’être assuré de leur régularité et
avoir demandé tous renseignements utiles de nature à établir la concordance entre les résultats
fiscaux et la comptabilité.
2. – BOI-DJC-OA-20-10-10.
3. Il est également possible de subordonner le maintien de l’agrément à la condition que le
centre procède au changement de son équipe dirigeante.
4. Ainsi, l’agrément initial et le premier renouvellement sont toujours accordés pour une
durée de trois ans et à compter du second renouvellement, la durée de l’agrément est portée à
six ans. Cf. CGI, annexe II, art. 371 J. BOI-DJC-OA-10-20-20, n° 170 et n° 250.
5. Il importe peu que l’activité du contribuable relève de l’article 34 ou de l’article 35 du CGI
(CE 17 nov. 1997, no 140797, BDCF 1998, no 1, 4, concl. G. Goulard).
6. Toutefois, les avantages fiscaux liés à l’adhésion sont réservés aux contribuables qui
relèvent de l’impôt sur le revenu et sont soumis à un régime réel d’imposition.
7. Les membres des professions libérales et les titulaires de charges et offices relevant des
bénéfices non commerciaux peuvent adhérer à des associations de gestion agréées en ayant les
mêmes avantages fiscaux. Peuvent également adhérer à ces associations agréées tous les contri-
buables qui disposent de revenus non professionnels imposés dans la catégorie des bénéfices
non commerciaux, soumis au régime de la déclaration contrôlée de droit ou sur option, et qui
auront souscrit un engagement d’amélioration de la connaissance des revenus, selon un
modèle fixé par arrêté ministériel. Cf. CGI, art. 1649 quater F.
8. Rép. min. JOAN Débats 9 déc. 1985, p. 5630 ; Dr. fisc. 1986, no 9, comm. 346.
INTRODUCTION 81
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Il est à noter que le bénéfice de l’adhésion à un centre de gestion agréé
est acquis à la seule condition que le contribuable exerce une profes-
sion commerciale ou artisanale ; aussi, il est admis par l’administration,
qu’une personne puisse adhérer à un centre de gestion agréé nonobstant
l’impossibilité d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au
répertoire des métiers 1.
68 Les avantages de l’adhésion au niveau de la gestion ¸ La pre-
mière mission des centres est de fournir tous services en matière de
gestion notamment dans les domaines de l'assistance technique et de
la formation ayant trait au droit, à la fiscalité, à la comptabilité ou à la
gestion ainsi qu'une analyse des informations économiques, comptables
et financières en matière de prévention des difficultés économiques et
financières 2. Après que la déclaration de résultat de l’exercice a été
effectuée, ils doivent fournir à leurs membres adhérents imposés d’après
leur bénéfice réel un dossier comprenant divers éléments, notamment
les ratios et les autres éléments caractérisant la situation financière et
économique de l’entreprise, un commentaire sur cette situation et un
document de synthèse 3.
69 Les avantages fiscaux ¸ C'est d'abord au regard de la gestion fiscale
de l'entreprise que l'adhésion à un centre de gestion est intéressante.
Ainsi, les centres peuvent organiser à l'usage de leurs adhérents, avec le
concours des agents de l'administration, des réunions d'information sur
la réglementation fiscale et les modifications qui lui sont apportées. Ils
proposent des formations ayant trait au droit, à la fiscalité, à la comp-
tabilité ou à la gestion 4. Également, les centres peuvent, pour les adhé-
rents qui le souhaitent, élaborer les déclarations fiscales afférentes à leur
exploitation 5. Par ailleurs, lorsqu’ils reçoivent un mandat de l’adhérent,
ils dématérialisent et télétransmettent aux services fiscaux, selon la pro-
cédure prévue par le système de transfert des données fiscales et comp-
tables, ses déclarations de résultats, leurs annexes et les autres documents
les accompagnant 6. Ils doivent de plus procéder, sous leur responsabilité,
à un examen en la forme des déclarations de résultats et de leurs annexes
puis à l’examen de leur cohérence et de leur vraisemblance. Une telle obli-
gation des centres de gestion vise davantage à aider l’administration dans
sa mission de contrôle que les entreprises dans leur gestion. À l’issue des
opérations, le centre doit adresser à l’adhérent un compte rendu de mis-
sion dont une copie est adressée à l’administration fiscale.
1. BOI-DJC-OA-20-30-10-10, n° 30.
2. CGI, art. 1649 quater C et CGI, annexe II, art. 371 A.
3. CGI, annexe II, art. 371 E.
4. CGI, annexe II, art. 371 A.
5. CGI, annexe II, art. 371 E.
6. CGI, art. 1649 quater E.
82 DROIT FISCAL DES AFFAIRES
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Mais surtout, l’adhésion à un centre de gestion agréé procure un certain
nombre d’avantages fiscaux. Compte tenu des exigences indiquées concer-
nant la comptabilité de l’entreprise et la vérification de leurs déclarations, il
a paru possible de les faire bénéficier des mêmes avantages que les salariés.
C’est pourquoi les entreprises adhérentes bénéficiaient du même abatte-
ment de 20 % sur le bénéfice imposable que les salariés. Aujourd’hui depuis
que cet abattement a été intégré dans le barème de l’impôt sur le revenu,
l’avantage de l’adhésion à un centre de gestion agréé réside dans le fait que
l’entreprise adhérente ne se voit pas appliquer la majoration de 25 % de la
base d’imposition prévue pour les entreprises non adhérentes imposées
selon un régime réel 1. Le bénéfice de la dispense de majoration de 25 %
a été étendu aux entreprises qui font appel aux services d’un d’un expert-
comptable, d’une société membre de l’ordre, d’une association de gestion
et de comptabilité ou d’une succursale d’expertise comptable, autorisé à ce
titre par l’administration fiscale et ayant conclu avec cette dernière une
convention 2. Ce dispositif est jugé en conformité avec les dispositions de la
Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) 3.
Un deuxième avantage de l’adhésion à un centre de gestion concerne
le plafond de déduction du salaire du conjoint de l’exploitant. Son salaire
peut être intégralement déduit des résultats de l’entreprise, avec comme
seule limite l’acte anormal de gestion, alors qu’en l’absence d’adhésion il
n’est déductible que dans la limite de 17 500 euros.
Un autre avantage, contrepartie de la mission des centres de gestion
de procéder à un examen des déclarations de résultats et de taxes sur le
chiffre d’affaires, était la réduction du délai de reprise de l’administration
de trois à deux ans, sauf en cas de manquements délibérés. Initialement
réservé aux contribuables personnes physiques, le bénéfice du délai de
reprise réduit avait été étendu au cas d’option pour l’impôt sur les sociétés
aux SARL dont l’associé unique est une personne physique ainsi qu’aux
EIRL. En revanche les SASU ne bénéficiaient pas de cet avantage 4. La loi
de finances pour 2015 a décidé sur ce point un retour au droit commun de
telle sorte que le délai de reprise de droit commun de trois ans s’applique
aux délais de reprise venus à expiration après le 31 décembre 2014 5.
1. Alors que, malgré tout, l’administration appliquait la majoration aux revenus provenant
d’un autre État de l’Union européenne même si le contribuable est adhérent d’un centre de
gestion agréé, ce qui était critiqué par la jurisprudence (CAA Paris 9 mai 2014, no 11A03316, FR
Lefebvre 43/2014, 8) comme par la Commission européenne (Comm. UE 20 févr. 2014), elle
est revenue, dans sa mise à jour du 25 janvier 2015, sur sa position en admettant que la dis-
pense de majoration peut s’appliquer aux revenus de source européenne (BOI-BIC-
BASE-10-10-20, no 135).
2. CGI, art. 158, 7-1°.
3. CE 9 nov. 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 366457, M. Waldner, Dr. fisc. 2016, n° 6, comm. 166,
concl. M.-A. Nicolazo de Barmon.
4. Rép. Lasbordes, AN 6 déc. 2011, p. 12811, no 103054. – Lettre DGFiP du 26 mai 2014 aux
Fédérations d’organismes agréés, BF Lefebvre 10/2014 inf. 802.
5. BOI-CF-PGR-10-20, no 55.
INTRODUCTION 83
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Enfin, un dernier avantage est réservé à l’entreprise dont le chiffre
d’affaires ne dépasse pas les limites du régime des micro-entreprises, mais
qui opte pour un régime réel et qui adhère à un centre de gestion. Elle
bénéfice d’une réduction d’impôt égale aux deux tiers des dépenses expo-
sées pour la tenue de la comptabilité et pour l’adhésion à l’organisme de
gestion sans que cette réduction puisse excéder 915 euros par an 1. Il s’agit
d’une réduction de la cotisation d’impôt et non pas d’une simple réduc-
tion de la base imposable. Cependant, aucune restitution n’est opérée si la
cotisation d’impôt est inférieure à 915 euros.
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L’ENTREPRISE
INDIVIDUELLE
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TITRE PRÉLIMINAIRE
L’EXISTENCE
DE L’ENTREPRISE
INDIVIDUELLE
EN DROIT FISCAL
1. Concl. sur CE 1er juill. 1964, no 50.236, Dr. fisc. 1968, no 17 bis, 136.
88 L’EXISTENCE DE L’ENTREPRISE INDIVIDUELLE EN DROIT FISCAL
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commercial, le surplus sera reporté sur l’année suivante ; mais là aussi,
sur le bénéfice global et non sur les seuls BIC.
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À l’origine, la Haute Juridiction considérait comme faisant partie du
patrimoine professionnel, deux catégories de biens. D’abord, les éléments
qui figuraient à l’actif du bilan ; qu’il s’agisse d’immeubles, de marchan-
dises, d’outillages, de valeurs mobilières etc. Ce critère d’inscription au
bilan était tout à fait indépendant de l’utilisation du bien inscrit au profit
de l’entreprise. Les éléments figurant à l’actif faisaient, en effet, partie du
patrimoine professionnel même s’ils étaient utilisés dans un but privé. La
détermination de cette première catégorie de biens composant le patri-
moine professionnel était donc facile. Ensuite, selon la position originaire
du Conseil d’État, faisaient aussi partie du patrimoine professionnel les
éléments immobilisés considérés comme affectés à l’exploitation bien
qu’ils ne soient pas inscrits au bilan 1. La détermination de cette deu-
xième catégorie de biens était en revanche beaucoup plus difficile puisqu’il
convenait de définir l’affectation. C’était là une question de fait qui sup-
posait de toujours délicates appréciations.
C’est pourquoi, la jurisprudence du Conseil d’État devait évoluer et,
en 1967, il renonçait à rechercher si l’immeuble affecté à un commerce
de grains, devait être regardé comme un élément spécifique d’une telle
exploitation. La Haute Juridiction reconnaissait ainsi à l’exploitant une
totale liberté sur le fondement de la décision de gestion 2. Depuis lors, le
Conseil d’État 3 adopte comme critère de distinction la décision que prend
l’exploitant d’inscrire ou de ne pas inscrire un bien à l’actif de son bilan
commercial 4, position entérinée par l’administration 5.
Il existe cependant une exception concernant le fonds de commerce.
Étant donné son lien essentiel avec l’activité, le fonds de commerce doit
toujours être considéré comme un des éléments de l’actif immobilisé,
même s’il ne figure pas au bilan 6. De la même façon le droit au bail fait
s’entend d’un élément identifiable du patrimoine ayant une valeur économique positive pour
l’entreprise, c’est-à-dire un élément générant une ressource que l’entreprise contrôle du fait
d’événements passés et dont elle attend des avantages économiques futurs. L’article 212-1 du
PCG précise par ailleurs que le coût ou la valeur d’un actif doit pouvoir être évalué avec une
fiabilité suffisante.
1. CE 13 juill. 1955, no 17.908, préc.
2. CE 24 mai 1967, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 65.436, Dr. fisc. 1967, no 27, doctr. concl. Schmeltz ;
Dupont 1967. 366, note M.P.
3. Ex. CE 5 déc. 1973, no 86.198, Lebon 693. – CE 8 sept. 1999, 8e et 9e ss-sect., no 179832,
Dr. fisc. 2000, no 6, comm. 73.
4. La même solution est admise aujourd’hui en matière de BNC puisque le seul critère de
l’entrée dans le patrimoine professionnel est l’inscription au registre des immobilisations,
indépendamment de toute affectation à l’exercice de la profession (CE 29 avr. 1985, 7e et 9e ss-
sect., no 43.759, Dr. fisc. 1985, no 40, comm. 1617, concl. Bissara ; RJF 6/85, p. 462). Encore que
la liberté d’affectation ne soit pas totale car, selon l’article 99 du CGI, peuvent seuls figurer sur
le registre des immobilisations les éléments qui sont affectés à l’exercice de la profession (Ex.
CAA Bordeaux 20 juin 1989, Dr. fisc. 1989, no 52, comm. 2485).
5. BOI-BIC-BASE-10-10, no 160 et BOI-BIC-BASE-40-10, no 120.
6. CE 10 juin 1970, 7e et 9e ss-sect., no 75.161, Dr. fisc. 1971, no 8, comm. 245, concl. Del-
mas-Marsalet ; Dupont 1970. 380. Lorsqu’un fonds acquis n’a pas été comptabilisé, le rétablis-
sement de cet élément à l’actif de l’entreprise augmente, normalement, à concurrence de sa
90 L’EXISTENCE DE L’ENTREPRISE INDIVIDUELLE EN DROIT FISCAL
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partie de l’actif immobilisé même en l’absence d’inscription au bilan 1. Il
doit en effet être considéré comme affecté par nature à l’exploitation étant
donné l’impossibilité d’utiliser ce bien à d’autres fins que l’exercice de la
profession 2. La même raison justifie que soit également considérée comme
affectée par nature une licence de plein exercice de débit de boisson 3. Pour
l’ensemble de ces biens, le fait de ne pas les comptabiliser à l’actif ne consti-
tue pas une décision de gestion 4. Constituent également des éléments
incorporels de l’actif immobilisé, affectés par nature à l’exercice de la pro-
fession, les droits attachés à l’usufruit de biens professionnels par nature 5.
Il faut remarquer que certaines entreprises ne sont pas tenues d’établir un
bilan. Pour les entreprises soumises au régime du bénéfice réel simplifié
qui sont dispensées de présenter un bilan, c’est grâce à l’inscription sur
le relevé des immobilisations que l’on détermine leur actif professionnel.
Quant aux entreprises relevant du régime des micro-entreprises, le critère
d’affectation comptable ne peut pas jouer. Aussi, à leur égard, sont consi-
dérées comme professionnelles, toutes les immobilisations affectées par
nature ou par destination à l’exercice de la profession.
valeur d’inscription, les résultats imposables de l’exercice dont les comptes sont rectifiés (Rép.
min. JOAN CR 1985, p. 4468 ; Dr. fisc. 1985, no 47/48, comm. 2041).
1. CE 17 oct. 1990, no 56.991, Dr. fisc. 1991, no 48, concl. O. Fouquet ; RJF 12/90, 1434.
2. En matière de BNC, la même notion de biens affectés par nature se retrouve. Elle
concerne essentiellement le droit de présentation de la clientèle, la finance d’une charge ou
d’un office et les parts de sociétés imposées à l’IR (en revanche, les parts de sociétés soumises à
l’IS ne constituent pas des biens professionnels par nature : CE 21 avr. 1989, 7e et 8e ss-sect.,
no 60.502, Dr. fisc. 1989, no 39, comm. 1670, concl. Martin-Laprade).
3. CE 28 déc. 2007, 3e et 8e ss-sect., no 27 1895, Vuarand, RJF 3/2008, no 266.
4. CE 5 déc. 2005, 8e et 3e ss-sect., no 263505, Min. c/ Aubin, Dr. fisc. 2006, comm. 652,
concl. E. Glaser ; RJF 3/2006, no 238.
5. CE 19 févr. 2003, 3e et 8e ss-sect., no 229373, Tornay, RJF 5/2003, no 573, concl. S. Austry,
BDCF 5/2003, no 65.
6. Encore faut-il que le bien appartienne à l’exploitant (Rép. min. budget no 7057 à M. Her-
ment, Dr. fisc. 1995, no 6, comm. 213 ; JO Sénat Q, 24 nov. 1994, p. 2778. – TA Strasbourg
26 mai 1998, no 93-2714, Dr. fisc. 1998, no 43, comm. 925).
7. Concl. Lobry sur CE 17 mars 1976, no 91.621, Dr. fisc. 1976, no 29, p. 722. Ainsi, peut être
inscrit un navire appartenant à l’exploitant (CE 8 sept. 1999, 8e et 9e ss-sect., no 179832,
Dr. fisc. 2000, no 6, comm. 73).
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peuvent être inscrits les droits constituant une source régulière de profits
dotés d’une pérennité suffisante et susceptibles de faire l’objet d’une ces-
sion 1. Il n’est pas nécessaire que le contrat contienne une clause d’exclu-
sivité de clientèle 2. Cependant, pour les exercices ouverts à compter du
1er janvier 2012, l’article 155-II du CGI met fin aux effets catégoriques de
la théorie du bilan. Il prévoit un dispositif de neutralisation partielle de
ses effets. Les entrepreneurs individuels titulaires de bénéfices industriels
et commerciaux à l’instar de ce qui était déjà admis pour les titulaires
de BNC 3 ne peuvent pour la détermination du résultat professionnel
que tenir compte des produits et des charges relatifs aux actifs affectés à
l’exploitation, qu’ils soient nécessaires à celle-ci ou simplement utilisés à
son profit. Certes, le contribuable conserve la liberté d’inscrire à son bilan
un bien non affecté à l’exploitation, mais, fiscalement, les produits et
charges afférents à ce bien non affecté à l’exploitation, autrement dit les
produits et les charges sans lien avec l’activité professionnelle, ne seront
plus pris en compte pour le calcul du bénéfice professionnel 4. Les produits
et charges extournés du bénéfice professionnel imposable sont retenus
dans la catégorie de revenu correspondant à leur nature, comme si l’actif
non professionnel ne figurait pas au bilan de l’entreprise individuelle.
Sont ainsi concernés les produits et les charges de propriété relatives à
la détention d’un immeuble de rapport ou à un portefeuille de valeurs
mobilières acquis dans un but purement patrimonial. Est ainsi instituée
une discordance entre la règle comptable et la règle fiscale 5. Par mesure
de simplification, l’article 155, II-3 du CGI prévoit que cette neutralisation
partielle des effets de la théorie du bilan ne s’applique pas, sous réserve
d’une option expresse en ce sens, lorsque les produits qui ne proviennent
pas de l’exercice de l’activité professionnelle sont réputés accessoires par
rapport à l’activité de l’entreprise, c’est-à-dire qu’ils n’excèdent pas :
– 5 % de l’ensemble des produits de l’exercice, y compris ceux relatifs
aux activités accessoires imposables dans la catégorie des BIC ou des BA en
vertu de l’article 155, I, à l’exception des plus-values ;
– ou 10 % de ces mêmes produits de l’exercice, si la condition de 5 %
susvisée était satisfaite au titre de l’exercice précédent.
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Il peut ensuite, ne pas inscrire à son bilan un bien, corporel ou incorpo-
rel, bien qu’il soit nécessaire au fonctionnement de son entreprise 1.
Enfin, la liberté d’inscription se manifeste aussi au niveau du passif
puisque l’exploitant est libre d’inscrire ou non ses dettes au passif de son
entreprise 2. Il convient de tenir compte des dettes contractées à l’occasion
de l’exercice de l’activité professionnelle et que l’exploitant a inscrites au
passif du bilan. Les dettes qui ne sont pas inscrites au bilan font partie du
patrimoine privé de l’exploitant et n’ont pas d’influence sur les bénéfices
imposables de l’entreprise. Ainsi, un exploitant ne peut déduire de son
bénéfice imposable les frais financiers afférents à un emprunt contracté
pour acquérir son fonds de commerce dès lors que cet emprunt n’est pas
inscrit au passif de son entreprise alors même qu’il a été souscrit dans
l’intérêt de l’exploitation 3.
Concernant le fonds de commerce et le droit au bail, la liberté de ges-
tion de principe n’a que peu de conséquences en face leur affectation par
nature à l’entreprise 4. Le fait qu’un fonds de commerce ne soit pas inscrit
au bilan n’empêche pas que sa cession soit soumise au régime des plus-
values professionnelles, ni que les intérêts des emprunts contractés pour
son acquisition soient déductibles.
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marques, procédés…). Le Conseil d’État a par ailleurs jugé qu’un contrat
conférant le droit exclusif d’exploiter une marque pour cinq ans constitue
une source régulière de profits dotés d’une pérennité suffisante 1. Peuvent
aussi correspondre à la définition de l’immobilisation incorporelle certains
éléments en lien avec l’informatique, comme le droit d’usage d’un nom de
domaine sur Internet 2 ou des droits d’utilisation et de commercialisation
de logiciels 3.
76 Le patrimoine de l’entreprise individuelle à responsabilité limi-
tée ¸ Pour définir le patrimoine de l'EIRL, y compris celle ayant une acti-
vité commerciale ou industrielle, l'article L. 526-6 du Code de commerce
renvoie à la définition de l'actif professionnel des titulaires de bénéfices
non commerciaux. Le patrimoine affecté se compose donc obligatoire-
ment de l'ensemble des biens nécessaires à l'exercice de l'activité profes-
sionnelle auxquels l'entrepreneur peut ajouter les biens utilisés pour les
besoins de l'activité 4. Ainsi, pour une EIRL, les biens non utilisés pour
l’exercice de la profession (par exemple, immeubles de rapport donnés
en location ou maison d’habitation de l’entrepreneur) ne peuvent jamais
faire partie du patrimoine professionnel.
77 La valeur d’inscription au bilan ¸ Les immobilisations doivent être
inscrites à l'actif du bilan pour leur valeur d'origine. Lorsque les immo-
bilisations ont été acquises à titre onéreux, l'inscription se fait au coût
d'acquisition qui s'entend du prix d'achat hors TVA, minoré des remises,
rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des
coûts directement engagés pour la mise en état d'utilisation du bien 5. Le
prix de revient d’un immeuble (que l’entreprise a construit ou acquis) doit
être ventilé entre le prix du terrain et celui des constructions. Lorsqu’un
bien décomposé est acquis par l’entreprise il doit être inscrit séparément
à l’actif. La valeur affectée à chacun des composants correspond en prin-
cipe au prix facturé pour cet élément.
1. CE 23 déc. 2011, 8e et 3e ss-sect., no 341217, SARL Cambé Sport, RJF 3/2012, no 213 ;
concl. L. Olléon, BDCF 3/2012, no 27.
2. CE 7 déc. 2016, 9e et 10e ch., n° 369814, Sté eBay France, Droit fiscal 2017, n° 8, comm.
165, concl. É. Bokdam-Tognetti, note J.-L. Pierre ; JCP 2017, éd. E, n° 12, comm. 1179, note
J.-L. Pierre ; Juris-Data n° 2016-026913 ; RJF 3/2017, comm. 212 ; Communication Commerce
électronique 2017, n° 12, chron. 13, comm. N. Dreyfus ; Communication Commerce électro-
nique 2018, n° 2, chron. 3, comm. A. Périn-Dureau ; Propriété industrielle 2017, n° 6, chron. 6,
comm. M.-E. Haas.
3. CE 19 juill. 2016, 9e et 10e ch., n° 368473, FR Lefebvre 39/2016, comm. 1 ; RJF 11/2016,
comm. 934 (à propos de logiciels de paye, de comptabilité et de gestion)
4. Selon l’article R. 526-3-1 du Code de commerce, les biens nécessaires à l’exercice de l’acti-
vité professionnelle s’entendent de ceux qui par nature ne peuvent être utilisés que dans le
cadre de cette activité. Pratiquement, il s’agit du fonds de commerce et du droit au bail.
5. CGI, annexe III, art. 38 quinquies. Les immobilisations reçues à titre d’apport sont portées
à l’actif pour leur valeur d’apport.
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Les immobilisations acquises à titre gratuit (succession, donation, legs)
sont inscrites au bilan pour leur valeur vénale 1, c’est-à-dire, en pratique,
d’après l’estimation retenue pour le paiement des droits de mutation
par décès 2.
Quant aux immobilisations créées par l’entreprise la valeur d’origine
pour laquelle elles doivent être inscrites à l’actif s’entend du coût d’acqui-
sition des matières ou fournitures consommées, augmenté de toutes les
charges directes ou indirectes de production 3.
1. Ex. à propos d’une société, CAA Nancy, 30 mars 2006, 2e ch., n° 01-94, SA chocolats
Klaus, Bull. fiscal 11/2006, comm° 1159 ; RJF 11/2006, comm. 1313. L’espèce concerne l’acqui-
sition à titre gratuit par une société d’une marque de chocolats pour laquelle elle disposait
antérieurement d’un droit d’usage moyennant le versement d’une redevance annuelle. L’ins-
cription du bien au bilan pour sa valeur vénale entraîne une variation positive d’actif net, ce
qui conduit à la constatation d’un produit exceptionnel imposable.
2. BOI-BIC-AMT-10-30-30-20, no 20.
3. CGI, ann. III, art. 38 quinquies, 1-d.
4. Ex. : CE 16 avr. 1980, no 10828, Dr. fisc. 1980, no 29, p. 878, concl. Rivière.
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79 Conséquences en cas de changement d’affectation ¸ La décision
d'inscription au bilan n'a pas que des conséquences favorables en rai-
son du fait que la dualité de patrimoine permet le passage d'un bien
d'un patrimoine à l'autre. Un tel transfert peut intervenir dans les deux
sens : du patrimoine privé au patrimoine professionnel, et l'on parle alors
d'apport ; ou bien du patrimoine professionnel au patrimoine privé et
c'est l'expression de retrait d'actif qui est utilisée. Selon une jurisprudence
constante 1, un tel retrait d’actif dégage une plus-value soumise à taxa-
tion quelle que soit la nature du bien transféré : immeuble et fonds de
commerce 2, brevet 3, portefeuille de valeurs mobilières 4…
La soumission à l’imposition des plus-values en cas de retrait d’actif est
d’autant plus lourde que cette conséquence se produit même en cas de
simple cessation d’activité y compris lorsque celle-ci résulte du décès du
contribuable 5. Il n’y a plus alors, en effet, de patrimoine professionnel de
telle sorte que le bien regagne obligatoirement le patrimoine privé 6. Dans
toutes ces hypothèses, l’imposition est due sur la différence entre la valeur
réelle de l’élément d’actif ainsi transféré et sa valeur comptable nette 7.
Il est à noter que le passage d’un patrimoine à l’autre n’a de conséquences
au niveau de l’imposition des plus-values qu’en cas de retrait d’actif. Au
contraire, l’apport, c’est-à-dire la décision d’inscription au bilan ne consti-
tue pas le fait générateur de l’impôt sur la plus-value 8. Le passage du patri-
moine privé au patrimoine professionnel est tout de même partiellement
pris en compte puisque lorsque le bien sera cédé par l’entreprise, l’article 151
sexies du CGI prévoit une application cumulative du régime des plus-values
des particuliers et de celui des plus-values professionnelles en fonction du
temps passé dans chacun des deux patrimoines. En pratique, ces biens qui
figurent successivement dans les patrimoines privés et professionnels de
l’exploitant avant d’être cédés sont dénommés « biens migrants ».
1. Ex. : CE 4 mars 1991, no 65.185, Dr. fisc. 1991, no 18, comm. 971.
2. Ex. : CE 6 juill. 1990, 7e et 9e ss-sect., no 63.812 et 66.143, Dr. fisc. 1992, no 43, comm. 1962.
3. CE 20 oct. 1971, no 79.553, Dr. fisc. 1972, no 50, comm. 1804.
4. CE 5 déc. 1973, no 86.928, Dr. fisc. 1974, no 14/15, comm. 396, concl. Latournerie. La
valeur vénale d’actions non cotées en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée
compte tenu de tous les éléments dont l’ensemble permet d’obtenir un chiffre aussi voisin que
possible de celui qu’aurait entraîné le jeu normal de l’offre et de la demande à la date où la cession
est intervenue (CE 29 déc. 1999, 9e et 8e ss-sect., no 171859, Dr. fisc. 2000, no 21, comm. 427).
5. CE 4 mars 1991, 8e et 7e ss-sect., no 65.185, Dr. fisc. 1991, no 18, comm. 971.
6. Ex. CE 22 nov. 1967, 8e ss-sect., no 71.667, Dupont 1968, p. 34, 10.277.
7. Ex. CE 21 nov. 1973, no 83.106, Dr. fisc. 1974, no 26, comm. 787, concl. Mandelkern.
8. Rép. min. JOAN 20 janv. 1973, p. 168 et par a contrario, BOI-BIC-PVMV-40-10-10-
10-20130109, no 370.
96 L’EXISTENCE DE L’ENTREPRISE INDIVIDUELLE EN DROIT FISCAL
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à l'exploitation doivent donner lieu à la détermination d'un résultat séparé
imposable dans la catégorie de revenu correspondant à la nature des biens
(revenus fonciers, revenus de capitaux mobiliers). Leur traitement est
donc celui qui serait applicable si le bien non professionnel ne figurait pas
au bilan de l'entreprise individuelle. Appliquée aux charges, la neutralisa-
tion partielle des effets de la théorie du bilan a pour effet essentiel d'éviter
l'abus, consistant en un détournement de la règle de la « tunnelisation »
des déficits. Ce principe veut que l'on ne puisse imputer des déficits ou
des bénéfices que sur la même catégorie de revenus. Or en inscrivant un
immeuble de rapport ou une exploitation agricole au bilan d'une entre-
prise commerciale ou industrielle, le déficit foncier ou le déficit rural se
transformerait en déficit commercial ou industriel professionnel.
Par mesure de simplification, il est cependant prévu que la suppression
des effets de la théorie du bilan ne s’applique pas lorsque les produits qui
ne proviennent pas de l’exercice de l’activité professionnelle sont répu-
tés accessoires par rapport à l’activité de l’entreprise, c’est-à-dire qu’ils
n’excèdent pas 5 % de l’ensemble des produits de l’exercice ou 10 % de ces
mêmes produits de l’exercice si la condition précédente de 5 % était satis-
faite au titre de l’exercice précédent. Cependant, même si ces seuils sont
respectés, les charges relatives à un actif non professionnel ne peuvent
être déduites du résultat professionnel qu’à concurrence du montant des
produits afférents à cet actif.
Cette tolérance de 5 % est facultative 1. Malgré son intérêt, le contri-
buable peut y renoncer afin d’éviter la complexité qui résulterait de la
variation d’un exercice à l’autre du pourcentage d’activités profession-
nelles marginales qui aboutirait à ce que certaines sources de revenus
soient imposées selon un régime différent d’un exercice à l’autre. À défaut
d’option expresse, les produits marginaux afférents à un bien sans lien
avec l’activité professionnelle ainsi que les charges correspondantes sont
exclus pour la détermination du bénéfice professionnel, exactement
comme si le bien n’était pas inscrit au bilan.
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des plus-values professionnelles si des amortissements ont été déduits
avant l'entrée en vigueur de la réforme ou bien si des amortissements
ont été admis en déduction du bénéfice professionnel en application de la
tolérance légale de 5 % 1.
Lorsque l’immobilisation a été successivement utilisée à titre profes-
sionnel et à titre privé, la plus-value réalisée doit être répartie entre le
régime des plus-values professionnelles et celui des plus-values des parti-
culiers en fonction de la durée de chacune des utilisations. En pratique,
le calcul de la plus-value professionnelle se fera en tenant compte du prix
de cession multiplié par le rapport existant entre la durée d’utilisation
professionnelle du bien et la durée totale de l’inscription au bilan alors
que le prix d’origine sera lui multiplié par le rapport existant entre la
durée d’utilisation non professionnelle du bien et la durée totale de l’ins-
cription au bilan. Si l’immobilisation cédée était amortissable, la valeur
nette comptable doit être majorée des amortissements correspondant à
la période d’utilisation privative du bien qui ont été réintégrés dans le
résultat imposable.
82 Bibliographie ¸
F. DOuet, « Propos désobligeants sur certains aspects fiscaux du principe de liberté
d’affectation comptable », in Mélanges M. Cozian, Litec 2009, p. 329.
B. maiLLOt-vaiLLant, La notion d’entreprise en droit fiscal des affaires, Thèse Toulouse I,
1996.
M. miCheL, « Disparition de la théorie du bilan – Conséquences fiscales et prévisibles
difficultés d’application d’une réforme marquée par la discrétion », RFP 2012, n° 3,
étude 3.
Y. SerandOur, « Quelques réflexions autour de la suppression de la théorie du bilan »,
Dr. fisc. 2012, no 21, 303, p. 15.
P. serLOOten, « Pour une structure juridique autonome et enfin réaliste pour l’entre-
prise », in Mélanges Ph. Neau-Leduc, LGDJ, 2018.
1. L’exclusion de l’imposition des plus-values d’actif reposait sur le motif qu’elles prove-
naient d’opérations exceptionnelles ne relevant pas de l’activité courante de l’entreprise.
2. La théorie du bilan ne va cependant pas jusqu’au bout de sa logique puisque, afin d’éviter
l’imposition de plus-values nominales engendrées par l’inflation, certaines plus-values ne sont
pas intégrées dans l’assiette du bénéfice imposable selon le barème ordinaire.
3. V. Daumas, conclusions sur CE 5 déc. 2016, plén. fisc., n° 398859, Sté Orange, RJF 2/17,
comm 155 ; Dr. fisc. 2017, n° 28, comm. 394, note M. Masclet de Barbarin.
104 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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SECTION 1. LE RATTACHEMENT
DES OPÉRATIONS DE L’ENTREPRISE
84 Présentation ¸ Le bénéfice d'exploitation se déterminant à partir des
ventes réalisées au cours de l'exercice et des prestations de services effec-
tuées pendant cet exercice, il convient de rattacher une vente ou une
prestation de service à un exercice donné.
Ainsi, on peut supposer une vente conclue fin novembre 2016. La livrai-
son a lieu le 20 décembre 2017. L’entreprise venderesse rédige la facture le
5 janvier 2018 et l’acquéreur de la marchandise, après beaucoup de retard,
règle cette facture le 25 janvier 2019. La vente ainsi réalisée doit-elle être
rattachée à l’exercice 2017 (livraison de la chose), à l’exercice 2018 (éta-
blissement de la facture) ou à l’exercice 2019 (règlement) ?
Cette question est réglée par l’article 38-2 bis du CGI qui prévoit que
l’exercice de rattachement doit être celui au cours duquel a lieu la livrai-
son du bien pour les ventes et opérations assimilées et l’achèvement des
prestations pour les fournitures de service. À l’image de la comptabilité, la
fiscalité de l’entreprise prend donc en considération les créances acquises
et non les produits encaissés. C’est le principe de la comptabilité d’engage-
ment par opposition à la comptabilité de caisse. Les engagements sont les
produits et les charges (d’où le principe de la comptabilisation des créances
acquises et des dépenses engagées). Ainsi, le bénéfice se définit par les fac-
turations et non par les encaissements ou les décaissements 1.
Ces règles de rattachement sont impératives 2 de telle sorte que si elles
n’étaient pas respectées, l’administration pourrait opérer une rectifica-
tion. Ainsi, le fait que le recouvrement d’une créance paraisse compromis
dès l’exercice de sa naissance n’écarte pas l’obligation de rattachement
intégral à cet exercice du moment que la créance est certaine dans son
principe et son montant 3. La seule possibilité consiste à constituer,
dès la fin de l’exercice, une provision égale au montant de la créance
jugée irrécouvrable 4.
Puisque la créance doit être comptabilisée dès que l’entreprise a exécuté
ses obligations, il est important de préciser cette notion d’une façon géné-
rale. Des précisions complémentaires seront données pour la situation
particulière des travaux en cours.
1. Jurisprudence constante : les créances nées au cours d’un exercice doivent entrer en
compte pour la détermination du bénéfice imposable de l’exercice alors même qu’elles n’au-
raient pu encore être recouvrées au moment de la clôture des opérations de cet exercice (ex. :
CE 22 juin 1984, no 38108 et 37368, Dr. fisc. 1985, no 8, comm. 383, concl. Racine).
2. Elles s’appliquent même si, par exception, le paiement précède la livraison. Ainsi, dans le
cadre d’une « liste de mariage » (TA Paris 4 juill. 1988, Dr. fisc. 1988, no 51, comm. 2329).
3. CE 6 juill. 1994, no 116079, RJF 8-9/94, 885.
4. CE 10 juill. 1985, 8e et 9e ss-sect., no 44.638, Dr. fisc. 1986, no 12, 556.
LA THÉORIE DU BILAN 105
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Les sommes inscrites au crédit d’un compte bancaire constituent des
créances acquises 1.
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à l'exercice au cours duquel intervient l'achèvement des prestations 1.
C’est donc encore l’exécution de l’obligation qui constitue le critère de la
créance acquise. Si ce principe a des conséquences très claires en matière
de contrat à exécution instantanée (il s’oppose par exemple à ce que soit
prise en compte la date de la facturation), son application est plus déli-
cate dès lors que le contrat est à exécution successive ainsi que pour les
travaux d’entreprise.
On peut distinguer deux catégories de contrats à exécution successive.
D’une part, les contrats où les prestations sont continues et sont rémuné-
rées notamment par des intérêts ou des loyers. D’autre part, les contrats
où les prestations sont à échéances successives échelonnées sur plusieurs
exercices (ex. : les contrats d’assurance, les contrats d’entretien, les presta-
tions fournies sur abonnement 2) 3. Dans l’un ou l’autre cas, les produits
sont pris en compte au fur et à mesure de l’exécution de la prestation.
Ainsi, rentrent dans le bénéfice de l’exercice, les intérêts ou les loyers qui
ont couru jusqu’à la date de la clôture de l’exercice même si l’échéance ou
le paiement sont postérieurs 4. Ou encore, en cas de contrat d’entretien
par lequel un fournisseur s’engagerait à vérifier périodiquement le maté-
riel livré et à effectuer toute intervention de réparation et d’entretien, il
conviendrait de rattacher à l’exercice les produits correspondants aux tra-
vaux effectués pendant cet exercice. De même, au cas de contrat d’appro-
visionnement exclusif, la somme perçue par un débitant de boissons en
contrepartie d’un engagement d’approvisionnement exclusif auprès d’un
brasseur pendant dix ans doit être rattachée chaque année à ses produits
d’exploitation au prorata des achats de bière effectués au cours de la
même période 5.
Le fait que la prestation fournie soit continue n’implique pas, par elle-
même, qu’elle soit effectuée avec une intensité constante tout au long de
la durée de son exécution. Lorsque l’intensité de la prestation varie, sa
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rémunération est elle aussi amenée à varier, de sorte que celle-ci ne va pas
être rattachée de manière linéaire et prorata temporis aux exercices durant
lesquels l’exécution se poursuit. Ainsi, lorsque les loyers stipulés dans un
contrat de location sont inégaux de période en période, il faut considérer
que cette inégalité des loyers stipulés correspond à une inégalité dans la
valeur de la prestation fournie, sauf s’il résulte de l’instruction que cette
répartition contractuelle ne rend pas compte correctement de la valeur de
la prestation, laquelle est fonction de l’obligation qui pèse sur le prestataire
et de l’avantage économique retiré par le preneur 1.
La détermination de l’exécution des obligations du prestataire demande
à être examinée spécialement pour les travaux d’entreprise (exemple :
construction de bâtiments et travaux publics, vente d’usine clés en mains).
La date à retenir pour la prise en compte des produits est celle de la
réception provisoire, ou de la mise à la disposition du maître de l’ouvrage
si elle est antérieure à la réception des travaux. Si le contrat a prévu
des réceptions partielles, les créances correspondantes sont considérées
comme acquises à la date des réceptions partielles 2.
En cas de retenue de garantie, la créance correspondante doit être entiè-
rement rattachée à l’exercice en cours à la date de la réception des travaux
ou de la mise à disposition de l’ouvrage. Si l’entrepreneur considère la
perte de la créance comme probable (en raison des malfaçons commises),
il peut éventuellement constituer une provision 3.
1. CE 29 févr. 2008, 10e ss-sect., n° 271799, Caisse fédérale du Crédit mutuel Centre Est
Europe, RJF 8-9/2008, n° 929.
2. CE 17 oct. 1984, 7e et 9e ss-sect., no 40.917, RJF 12/84, p. 719.
3. CE 8 juill. 1988, 7e et 9e ss-sect., no 65.659, Dr. fisc. 1988, no 46/47, 2115.
4. CE 11 janv. 1985, no 36783, Dr. fisc. 1985, no 28, comm. 1282. – CE 16 janv. 1995,
no 112746, Dr. fisc. 1995, no 22, comm. 1187.
108 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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une image fidèle en rendant compte de la valeur économique des travaux
déjà réalisés, même s’ils ne sont pas encore achevés. Il ne s’agit, cepen-
dant, pas d’intégrer dans les résultats d’un exercice une partie du bénéfice
qui sera réalisé lors d’un exercice ultérieur, c’est pourquoi, si les travaux
en cours doivent être pris en compte, ils ne peuvent être évalués qu’à leur
prix de revient. S’agissant des stocks, l’article 38-3 traduit parfaitement
cette prise en compte des travaux en cours en prévoyant que les travaux
en cours sont évalués au prix de revient 1.
Les travaux en cours doivent figurer au bilan même lorsque la rémuné-
ration des prestations est conditionnelle en ce qu’elle dépend du succès
de l’opération 2.
88 Le cas des prestations intellectuelles ¸ Pour les prestations de services,
la question est plus délicate. Faute d'un texte analogue à l'article 38-3 du
CGI, devrait trouver application le principe général de rattachement des
prestations de services tel qu'il est posé par l'article 38-2 bis : rattache-
ment à l’exercice de l’achèvement des prestations. Malgré tout, la solution
pratique paraît différente en présence d’une décision du Conseil d’État en
date du 18 novembre 1983 qui a permis la comptabilisation de travaux en
cours pour les prestations rendues par un cabinet d’expertise comptable 3.
Cette solution reprise par ailleurs 4 a l’avantage de maintenir l’harmonie
nécessaire du droit fiscal et du droit comptable, ainsi que d’unifier le
régime applicable aux biens matériels et aux services immatériels.
Elle constitue le droit positif tel qu’il est reçu en jurisprudence.
L’article 38-3 du CGI s’applique y compris aux entreprises de prestations
de service 5.
1. CE 27 juill. 1988, no 57687, Dr. fisc. 1989, no 14, comm. 692, concl. Ph. Martin. CE
16 janv. 1995, préc.
2. CE 26 juill. 2011, 10e et 9e ss-sect., no 316081, Min. c/ SA Coface Scrl Participations,
Dr. fisc. 2012, no 2, comm. 51, concl. J. Boucher, note F. Deboissy.
3. CE 18 nov. 1983, 8e et 9e ss-sect., n° 29395, Dr. fisc. 1984, no 12, comm. 610, concl.
Racine ; RJF 1/84, p. 11.
4. Paris, 16 févr. 1999, 2e ch. B, no 96-1046, Dr. fisc. 2000, no 6, comm. 74.
5. CE 26 juill. 2011, 10e et 9e ss-sect., no 316081, préc.
LA THÉORIE DU BILAN 109
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définition du bénéfice imposable suppose l'intégration de l'évolution des
apports ou des désinvestissements réalisés par l'entrepreneur.
Ainsi, il est important de définir les critères du droit fiscal pour détermi-
ner si tel ou tel bien est considéré comme faisant partie du patrimoine de
l’entreprise. Après avoir longtemps hésité entre le critère de l’affectation et
celui de l’utilisation, nous avons vu que la jurisprudence est aujourd’hui
fixée et qu’on peut la résumer dans le principe de la liberté d’affectation :
Le contribuable est libre d’affecter un bien nécessaire à l’exercice de la pro-
fession soit à son patrimoine privé, soit à son patrimoine professionnel.
La décision d’affectation qu’il prend est une décision de gestion opposable
à l’administration comme à lui-même. Ce principe ayant déjà été rencon-
tré on se reportera plus haut. Il peut être cependant utile de préciser les
limites de cette liberté d’affectation.
1. Y compris le droit au bail. De même, les dépenses visant à acquérir des droits supplémen-
taires au droit au bail doivent être immobilisées (CE 27 janv. 2017, 3e et 8e ch., n° 391817,
Groupe Lactalis venant aux droits de la SAS CEMA, FR Lefebvre 10/17, inf. n° 6 ; RJF 4/2017,
comm. 298).
2. Ex. CAA Lyon, 19 déc. 2003, 2e ch., no 00-1566 et 01-2016, Dr. fisc. 2005, no 26, comm.
500.
3. Ex. CE 10 juin 1970, 7e et 9e ss-sect., no 75.161, Dr. fisc. 1971, no 8, comm. 249, concl.
Delmas-Marsalet ; Dupont 1970, no 11, p. 380.
4. À la condition qu’il s’agisse d’une dette certaine et non d’un simple passif éventuel (CE
1er juin 2016, 8e ch., n° 385113, SA Oppidum, RJF 11/2016, n° 939, concl. B. Bohnert).
110 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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ou plus exactement une erreur comptable délibérée. Ainsi, le Conseil
d’État refuse-t-il la prise en compte des dettes omises lorsqu’elles sont liées
à l’exploitation courante 1.
S’agissant des limites à la liberté d’affectation concernant certains
biens, il convient de rappeler que si peuvent être inscrits au bilan des biens
inscrits au bilan mais qui sont sans rapport avec l’exercice de l’activité
professionnelle en revanche, les produits et les charges qui se rapportent à
ces biens sont écartés pour déterminer le résultat fiscal professionnel des
exploitants individuels 2.
Dans le cas où un élément d’actif est à usage mixte, c’est-à-dire utilisé
à la fois à des fins professionnelles et à des fins non professionnelles, les
produits et charges y afférents doivent être ventilés de manière à ce que
leur fraction correspondant à l’usage non professionnel soit extournée du
résultat professionnel imposable 3.
91 Bibliographie ¸
A. de bissy, « La sanction de la comptabilité par la fiscalité », Dr. fisc. 2007, no 44-46,
ét. 938.
G. Gest, « Théorie du bilan et sociétés de personnes », Mélanges Serlooten, Dalloz, 2015,
p. 297.
D. Gutmann, « La date de naissance des créances en droit fiscal », LPA 2004, no 224,
p. 35.
J. rOsenbaum, « Exercice de rattachement des travaux d’expertise comptable », RF
compt. 2004, no 362, p. 7.
1. CE 18 mars 1983, 7e et 9e ss-sect., no 33.032, Dr. fisc. 1983, no 39, comm. 1726 ; RJF 5/83,
p. 281.
2. CGI, art. 155, II.
3. BOI-BIC-BASE-90, no 220.
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CHAPITRE 2
LE PRINCIPE DE L’ANNUALITÉ
ET DE L’INDÉPENDANCE
DES EXERCICES
92 Définition ¸ L'impôt sur le revenu, comme tous les impôts directs frappe
un contribuable en raison de sa situation « réputée stable ou périodique-
ment renouvelable » 1. Il est donc nécessaire pour le Trésor de lever pério-
diquement l’impôt sur le revenu à raison des gains que le contribuable
a réalisé pendant une période de temps donnée. Aussi, l’article 36 du
Code général des impôts prévoit que les revenus soumis à l’impôt sont
les bénéfices obtenus pendant l’année d’imposition. Ce texte complété
par l’article 12 du CGI selon lequel l’impôt est dû chaque année à raison
des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au
cours de la même année fonde le principe de l’annualité. Ce principe,
considéré comme une règle fondamentale du droit fiscal 2, veut que le
contribuable soit imposé sur l’ensemble des gains nets dont le fait généra-
teur est survenu au cours d’une année déterminée.
L’obligation de découper le temps en années ou en exercices de douze
mois consécutifs induit le principe de l’indépendance des exercices. Ainsi
les bénéfices d’un exercice ne peuvent être affectés que par les produits et
charges de cet exercice.
SECTION 1. LA DÉTERMINATION
DE LA PÉRIODE D’IMPOSITION
93 Présentation ¸ Le principe de l'annualité oblige l'administration à
n'imposer pour une année donnée que les bénéfices dont le fait généra-
teur est survenu au cours de cette année et impose à l'entreprise d'établir
que la charge qu'elle prétend déduire au titre de l'année en cause y trouve
bien son origine.
Mais l’article 36 du CGI en même temps qu’il prévoit que la période d’impo-
sition est constituée par l’année civile, prévoit également que la période
d’imposition peut ne pas coïncider avec l’année civile. Dans ce cas, elle est
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constituée par la période de douze mois dont les résultats ont servi à l’établis-
sement du dernier bilan. C’est la règle de la période d’imposition par exercice.
La détermination de la période d’imposition suppose donc la détermina-
tion de l’exercice. Mais, on verra que les entreprises ont une totale liberté
quant à la détermination de leur exercice. Aussi, à partir du moment où
la période d’imposition est en principe constituée par l’année civile ou par
une période de douze mois consécutifs, il convient d’accorder cette liberté
de choix laissée à l’entreprise avec les exigences de la règle d’annualité.
§ 1. La détermination de l’exercice
94 Présentation ¸ Le résultat à retenir pour l'assiette de l'impôt sur le
revenu est le résultat fiscal de l'exercice clos à la fin ou au cours de l'année
d'imposition. Il n'y a donc pas coïncidence entre la clôture de l'exercice et
la fin de l'année civile de la même façon qu'il n'y a pas obligatoirement
correspondance entre la durée de l'exercice et celle de l'année. Le droit
fiscal reconnaît, ainsi, la liberté laissée à l'entreprise par le droit comp-
table relativement au choix de l'exercice. La liberté des entreprises quant
à la fixation de leur exercice porte tant sur la durée de l'exercice que sur la
date de clôture de cet exercice.
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La liberté reconnue à l’entreprise quant à la date de clôture de l’exercice
a l’avantage de lui permettre une adaptation à sa situation particulière.
Ainsi, toute entreprise, sans parler des activités saisonnières, n’a pas obli-
gatoirement le même niveau d’activité pendant toute l’année. Elle peut
choisir la date de clôture de l’exercice pour l’adapter à l’évolution de son
activité en clôturant le bilan à un moment où son activité économique est
plus calme.
La règle de la liberté de choix de la date de clôture conçue comme corol-
laire de la règle de la liberté de choix de la durée de l’exercice est d’autant
plus importante que le choix de l’entreprise n’est pas définitif de telle sorte
qu’une modification du choix peut, compte tenu de la progressivité de
l’impôt, avoir une influence sur le montant de l’imposition. Il est évident
que la fixation exceptionnelle de la date de clôture au 30 juin réduit la
période d’imposition de moitié et donc évite d’atteindre une tranche
marginale élevée.
La liberté de l’entreprise quant au choix de la date de clôture de l’exer-
cice (et donc de sa durée) n’est cependant pas absolue. Le droit fiscal
cherche à éviter les abus les plus importants. Ainsi, lorsqu’une entreprise
n’a pas établi de bilan pendant plusieurs années consécutives et n’a donc
pas manifesté de volonté contraire de choix, elle est réputée avoir exercé
son activité dans le cadre d’exercices correspondant à l’année civile. De
cette façon, le bénéfice sera reconstitué année par année 1.
D’autre part, le principe du choix de la date de clôture de l’exercice ne
bénéficie qu’aux entreprises qui tiennent une comptabilité. Aussi, en sont
exclues les entreprises soumises au régime micro-BIC qui sont, comme de
simples particuliers, imposées par année civile.
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31 décembre de l’année d’imposition 1. Si l’entreprise a commencé ses
activités au cours de l’année d’imposition, elle est imposable sur le résultat
de la période écoulée entre le début de ses activités et le 31 décembre. Le
bénéfice ainsi imposé sera ensuite déduit du résultat fiscal de l’exercice
dans lequel la période d’imposition est comprise (CGI, art. 37).
Dans l’hypothèse inverse où l’entreprise aurait clôturé plusieurs exer-
cices au cours de l’année, la solution consiste très simplement à totaliser
les résultats des deux ou plusieurs exercices clôturés.
1. CE 24 oct. 1980, no 15.568, RJF 12/80, 511. – CE 21 oct. 1981, RJF 12/81, p. 567.
2. CE 16 févr. 1972, 8e et 9e ss-sect., no 81.760, Dr. fisc. 1973, no 11, 396, concl.
Delmas-Marsalet.
3. CE 29 nov. 1982, 7e et 8e ss-sect., no 31.921, RJF 1/83, 21.
4. Ex. : CE 18 mai 1983, no 29.524, RJF 7/83, 862.
5. CE 20 nov. 1981, 7e et 8e ss-sect., no 17.741, Dr. fisc. 1982, no 22, 619 ; RJF 1/82, 36. Il a
été, de même, jugé qu’une remise de dette décidée par une délibération des associés avec effet
rétroactif à la date de clôture de l’exercice antérieur doit rester sans influence sur les résultats
de cet exercice (CE 14 mars 1979, no 7360, Lebon 117 ; RJF 5/79, p. 162).
6. CE 19 mai 1972, 7e et 8e ss-sect., no 81.621, Dupont, 1972, 301.
LE PRINCIPE DE L’ANNUALITÉ ET DE L’INDÉPENDANCE DES EXERCICES 115
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effet, si lors d’un exercice, à la suite d’une erreur, une entreprise a suré-
valué son bénéfice, elle ne peut corriger cette erreur à l’exercice suivant
par déduction. Il lui est simplement possible de présenter une réclamation
pour l’exercice litigieux 1. Inversement, lorsqu’une entreprise constate, à
l’occasion du contrôle des écritures comptables d’un exercice, le défaut de
prise en compte d’un profit afférent à l’exercice antérieur, elle doit adresser
au service des impôts une déclaration rectificative 2.
D’une façon plus précise, l’application de la règle de l’indépendance
des exercices a pour conséquence l’impossibilité de prise en compte d’évé-
nements postérieurs à l’exercice ainsi que l’interdiction d’admettre la
rétroactivité de certains actes pourtant admise en droit privé.
1. CE 17 mai 1982, 7e et 9e ss-sect., no 23.889, Dr. fisc. 1982, no 40, comm. 1842.
2. Rép. min. JOAN CR 1983, p. 4086.
3. Ex. : CE 14 mars 1979, 8e et 9e ss-sect., no 7360, Dr. fisc. 1979, no 27, comm. 1424 ; RJF
5/79, p. 162.
4. CE 17 oct. 1973, 7e et 9e ss-sect., no 86.009, Dr. fisc. 1974, no 21, comm. 626, concl. Man-
delkern ; Dupont 1973, no 12, p. 387.
116 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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que le dépôt de bilan du débiteur est intervenu lors de cet exercice quand
bien même le créancier n’en aurait connaissance qu’après la clôture de
l’exercice. En effet, pour qu’une provision soit déductible il faut que la
perte ou la charge résulte d’événements en cours à la clôture de l’exercice.
Il importe peu que l’entreprise n’en ait eu connaissance qu’entre la date de
clôture et l’arrêté des comptes 1.
Lorsque la détermination des résultats de l’entreprise est fonction de ses
propres décisions comptables, la règle de la spécialité des exercices a des
conséquences moins strictes. Il est vrai qu’il s’agit uniquement de tenir
compte de la réalité quotidienne des entreprises. Il n’est pas pensable d’exi-
ger de l’entreprise qu’elle arrête sa comptabilité en vingt-quatre heures ;
d’autant que certaines écritures ne peuvent être passées qu’après la date
de clôture de l’exercice. Aussi, la simple survenance du jour de clôture de
l’exercice n’empêche pas l’entreprise d’effectuer, jusqu’au jour de la décla-
ration à l’administration des impôts, des écritures comptables telles que
les dotations de l’exercice aux comptes d’amortissement ou de provisions 2.
100 L’inefficacité de la rétroactivité ¸ Tant la règle de l'annualité de
l'impôt que celle de l'indépendance des exercices impliquent un cloison-
nement étanche des diverses périodes d'imposition. Ainsi, lorsqu'une
entreprise a acquis un bénéfice lors d'un exercice donné, elle est imposée
sur ce bénéfice à l'occasion de l'imposition des résultats de cet exercice.
Si l'année suivante, un événement vient faire disparaître ce bénéfice (Ex.
annulation rétroactive d'un contrat), il ne peut être question de revenir
sur l'imposition qui a été établie car elle était parfaitement fondée au
moment de son établissement. C'est la conséquence directe de la règle de
l'annualité de l'impôt et de celle de l'indépendance des exercices 3.
Pour éviter l’injustice qui consiste à imposer l’entreprise sur un bénéfice
dont on sait qu’il n’est pas réel, celle-ci a la possibilité lors de l’exercice où
se produit l’anéantissement du revenu de constituer une perte déductible
d’un montant équivalent à celui du bénéfice qui avait été imposé ou du
moins du bénéfice qui est annulé 4.
S’agissant plus spécialement de l’annulation ou de la résolution d’une
vente d’un élément de l’actif immobilisé, l’article 39 duodecies 9 du CGI
prévoit d’une part la reprise du bien au bilan pour sa valeur avant la
1. Ex. CAA Lyon 24 mai 2000, 2e ch., n° 96-682, SARL l’Orangeraie, RJF 11/2000, comm.
1229 ; BDCF 11/2000, concl. C. Millet ; Dr. fisc. 2001, n° 17, comm. 398 – CAA Paris 16 oct.
2008, 9e ch., n° 07-2745, Sté Abstract Medecine, RJF 5/2009, comm. 432.
2. CE 14 mars 1979, 8e et 9e ss-sect., no 7360, Dr. fisc. 1979, no 27, comm. 1244 ; RJF 5/79,
p. 162.
3. CE 26 mai 1976, 8e et 9e ss-sect., no 755, Dr. fisc. 1977, no 38, comm. 1300 ; RJF 7,8/76,
p. 233. – CE 6 mai 2015, 8e et 3e ss-sect., n° 375880, SAS Optique de précision Jean Fichou, RJF
7/15, n° 160. La même solution s’applique à la rétroactivité de la liquidation d’une société
(CAA Marseille 9 nov. 1998, 3e ch., no 96-1292, Dr. fisc. 1999, no 15/16, comm. 317).
4. CE 3 déc. 1975, 7e et 9e ss-sect., no 98.888, Dr. fisc. 1976, no 13/14, 470 ; RJF 2/76, 61.
LE PRINCIPE DE L’ANNUALITÉ ET DE L’INDÉPENDANCE DES EXERCICES 117
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cession annulée 1 et, d’autre part, la déduction de la perte de la plus-value
initialement taxée au taux réduit des plus-values à long terme selon le
régime des moins-values à long terme.
1. Le cédant inscrit à son bilan l’élément de l’actif immobilisé ainsi que les amortissements
et provisions de toute nature y afférents tels qu’ils figuraient dans ses comptes annuels à la date
de la cession.
2. J.-C. Parot : « L’imposition de la plus-value : que reste-t-il du principe de l’annualité de
l’impôt ? », Dr. fisc. 2000, no 24, p. 867.
3. Encore que l’importance de l’impôt étant due à l’importance des revenus, des difficultés
de trésorerie ne devraient pas se présenter.
4. V. ss 169.
118 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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103 Les conditions d’application du système du quotient ¸ Pour qu'un
revenu puisse bénéficier du système du quotient, il faut tout d'abord
qu'il soit exceptionnel. Le caractère exceptionnel d'un revenu ne pro-
vient pas de l'importance de son montant, mais de sa nature. Le carac-
tère exceptionnel est reconnu à tous les profits qui, par nature, ne sont
pas susceptibles d'être recueillis annuellement. De la sorte, le système
du quotient s'applique aux revenus produits par des opérations d'une
autre nature que celles qui font l'objet de la profession du contribuable
et ne sont donc pas le résultat normal de son activité habituelle 1. Ainsi,
une distribution de réserve peut, pour le bénéficiaire de cette distribu-
tion, être considérée comme un revenu exceptionnel susceptible d’éta-
lement 2. Mais le caractère exceptionnel peut aussi, être reconnu à la
part des revenus de l’activité professionnelle du contribuable qui résulte
d’un événement exceptionnel 3.
Le système du quotient de l’article 163-0-A ne s’applique pas aux gains
qui sont taxés à un taux proportionnel, comme c’est le cas des plus-values
à long terme.
Outre le caractère exceptionnel du revenu, une autre condition de
l’application du régime des revenus exceptionnels est que leur montant
dépasse la moyenne des revenus des trois années précédentes.
Enfin, puisque le système du quotient est une simple faculté pour le
contribuable. La mise en œuvre de l’article 163-0-A est subordonnée à une
demande de sa part qui peut être formulée dans la déclaration annuelle
de revenu ou sur papier libre, ou ultérieurement par voie de réclamation.
En fait, le contribuable aura toujours intérêt à demander l’application du
système du quotient qui ne peut avoir de conséquence désavantageuse.
1. CE 17 mai 1989, 7e et 9e ss-sect., no 75.710, Dr. fisc. 1989, no 39, comm. 1657, concl.
Martin-Laprade.
2. CE 14 nov. 1990, 7e et 9e ss-sect., no 64.822, Dr. fisc. 1992, no 46, comm. 2147.
3. CE 28 oct. 1983, no 33533, Dr. fisc. 1984, no 7, comm. 249, concl. O. Fouquet. – CE
12 oct. 1994, no 128402, Dr. fisc. 1995, no 12, comm. 541. Cette solution trouve essentielle-
ment application au cas particulier des droits d’auteur découlant de l’attribution d’un prix lit-
téraire à un écrivain (CE 11 juill. 1988, no 58.687, Dr. fisc. 1989, no 5, Comm. 133, concl. Le
Roy ; Lebon 286. – CE 31 oct. 1990, no 67321, Dr. fisc. 1992, no 48/49, comm. 2248).
4. CGI, art. 163-0 A II. Ex. un contribuable perçoit des arriérés d’intérêts, de pension, de
salaires, de loyers.
LE PRINCIPE DE L’ANNUALITÉ ET DE L’INDÉPENDANCE DES EXERCICES 119
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ajoutant le quart de ce revenu au revenu net global ordinaire de l’année
de sa réalisation et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire
ainsi obtenue. De cette façon, l’effet marginal du barème progressif ne
joue que sur une fraction du revenu exceptionnel.
Le régime spécial de taxation des revenus exceptionnels ne fait pas
obstacle aux règles normales d’imputation des déficits 1. En présence d’un
déficit global, le juge applique les principes comme suit. Il découle de la
lettre même des dispositions de l’article 156 du CGI qu’un déficit global
constaté au titre d’une année, avant prise en compte d’un éventuel revenu
exceptionnel ou différé, ne peut être reporté sur les années suivantes que
si le contribuable ne dispose pas, au titre de cette même année, de revenus,
y compris exceptionnels ou différés, suffisants pour compenser ce déficit,
de sorte qu’un déficit global « ordinaire » ne saurait donner lieu à report
lorsque le contribuable a disposé de revenus exceptionnels ou différés d’un
montant suffisant pour l’absorber 2. Il ne s’en déduit nullement que, pour
le calcul de l’impôt dû au titre de l’année de perception du revenu excep-
tionnel ou différé, il faille, en cas de revenu net global « ordinaire » néga-
tif, déroger à la règle de calcul prévue par les dispositions de l’article 163-0
A du CGI, en appliquant le système du quotient non au revenu exception-
nel ou différé net mais à ce même revenu réduit du montant du déficit glo-
bal « ordinaire » ; procéder de la sorte conduirait à une erreur de droit 3.
1. À propos des déficits catégoriels, CAA Nantes 30 déc. 1998, 1re ch., no 96-60, Mme Lepes-
teur, Dr. fisc. 1999, no 39, comm. 702. Jugé que le revenu net global auquel doit être ajouté le
quart du revenu exceptionnel net ne saurait comprendre le déficit ordinaire réalisé dans la
catégorie dont dépend le revenu exceptionnel, dès lors que ce déficit a déjà été absorbé au
niveau de la détermination du revenu catégoriel net. Autrement dit, le montant du revenu
exceptionnel auquel va s’appliquer le système du quotient est celui qui reste après imputation
du déficit d’exploitation.
2. CE 28 sept. 2016, 10e et 9e ch., n° 384465, RJF 12/2016, comm. 1054, concl. A. Breton-
neau p. 1488.
3. Même décision. En l’espèce, l’administration avait à tort appliqué le système du quotient
non au revenu exceptionnel ou différé net (à savoir des rappels de pension) mais à ce même
revenu réduit du montant du déficit global « ordinaire ».
120 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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106 Les provisions ¸ En permettant la prise en charge par un exercice d'un
événement qui se produira lors d'un exercice postérieur, la technique de
la provision constitue déjà une atténuation à la règle de l'annualité. Mais
cette atténuation est encore plus importante en ce que la décision de
constitution d'une provision est, pour l'entreprise, une décision de ges-
tion. Le Conseil d'État admet, en effet, que les entreprises puissent n'user
que partiellement de la faculté de provisionner des charges probables ou
des créances au recouvrement improbables 1.
Ainsi, en permettant le choix de l’exercice d’imputation de l’événement
ou du risque provisionné, il est porté atteinte à la règle de la spécialité des
exercices 2 de même que les règles de la prescription des déficits reportables
à six ans peuvent s’en trouver tournées car cette solution peut permettre
un « rajeunissement » des déficits 3.
1. CE, ass., 13 mars 1981, 12508, Dr. fisc. 1981, no 31/32, comm. 1572 ; RJF 1981, no 4,
p. 161, concl. Schricke. – CE 16 nov. 1992, no 84848, Dr. fisc. 1933, no 44, comm. 2094, concl.
Ph. Martin ; RJF 1993, no 1, 49. – CE 27 avr. 2001, 9e et 10e ss-sect., no 200659, Dr. fisc. 2001,
comm. 987, concl. J. Courtial.
2. Ex. : En cas de correction du stock : CAA Lyon 10 juill. 1996, 4e ch., no 94-1521, Dr. fisc.
1996, no 38, comm. 1092.
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SECTION 1. DOMAINE DE LA THÉORIE
DE LA CORRECTION SYMÉTRIQUE
DES BILANS
1. Concl. Verny sur CE 5 juin 1981, Dr. fisc. 11, no 50, comm. 2226.
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Ainsi, seules les erreurs comptables sont susceptibles d'être rectifiées, tant
par le contribuable que par l'administration de telle sorte qu'elles sont
seules susceptibles de se voir appliquer la théorie de la correction symé-
trique des bilans.
Le point de vue du Conseil d’État ne paraît pas cependant aussi net.
1. CE 8 oct. 1975, 8e et 9e ss-sect., no 80.676, Dr. fisc. 1975, no 52, comm. 1667 ; RJF 11/75,
364.
2. CE 27 juill. 1979, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 11.717, Dr. fisc. 1980, no 27, 1495, concl. Fabre ;
RJF 11/79, 382.– CE 7 juill. 2004, no 230169, RJF 10/04, concl. P. Collin.
3. CE 28 mars 1979, no 1772, Dr. fisc. 1980, no 6, 271, concl. Fabre.
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SECTION 2. APPLICATIONS
DE LA CORRECTION SYMÉTRIQUE
DES BILANS
111 Le « butoir » du bilan d’ouverture du premier exercice non
prescrit ¸ Appliquée jusque dans ses conséquences extrêmes, la théorie
de la correction symétrique des bilans pourrait entraîner la violation du
principe de prescription. En effet, le jeu normal de la correction symé-
trique des bilans peut, par la remontée d'exercice en exercice qu'elle
entraîne, conduire dans certains cas, à une modification du résultat d'un
exercice prescrit. Cette solution présente l'inconvénient, lorsque la rec-
tification provient d'une insuffisance d'imposition, de faire échapper à
l'impôt le résultat de la rectification. C'est pourquoi, pendant longtemps,
le Conseil d'État a jugé que l'application de la correction symétrique des
bilans ne peut avoir pour effet de modifier le résultat d'un exercice pres-
crit 1. C’était le principe de l’intangibilité du bilan d’ouverture du premier
exercice non prescrit soumis à vérification.
Devant les critiques adressées à ce principe et notamment le fait que
la règle de la correction symétrique méconnaît le principe de l’indépen-
dance des exercices puisque l’on rattache des produits et des charges à un
exercice qui n’est pas celui de leur naissance 2, le Conseil d’État a modifié
sa jurisprudence 3.
Cependant, l’abandon de la règle d’intangibilité du bilan d’ouverture du
premier exercice soumis à vérification non prescrit est en général favorable
à l’entreprise. C’est pourquoi le législateur est intervenu pour légaliser le
principe d’intangibilité du bilan d’ouverture du premier exercice non pres-
crit 4. Le fondement juridique de ce principe est que la valeur d’actif net
du bilan d’ouverture du plus ancien exercice non prescrit est intangible
car elle est identique à la valeur d’actif net résultant du bilan de clôture
du dernier exercice prescrit. Or cette valeur doit être considérée comme
définitive car elle a servi à asseoir une imposition devenue définitive.
L’application de la règle de l’intangibilité, lorsqu’elle joue en faveur du
contribuable n’est pas subordonnée à la bonne foi de l’intéressé 5.
La loi prévoit cependant certaines exceptions au principe d’intangibilité.
Ainsi, l’application de ce principe est exclue pour les erreurs ou omissions
1. CE 31 oct. 1973, ass. plén., no 88207, Dupont 1974, p. 20. – CE 13 mars 1981, ass., RJF
4/81, no 367.
2. Sur ces critiques, v. concl. Schricke, sur CE 13 mars 1981, no 12.508, RJF 4/81, 161.
3. CE 7 juill. 2004, no 230169, RJF 10/04, concl. P. Collin.
4. « L’actif net d’ouverture du premier exercice non prescrit ne peut être corrigé des omis-
sions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci » (CGI, art. 38,
4 bis).
5. CE 5 déc. 2016, plén. fisc., n° 398859, Sté Orange, Dr. fisc. 2017, n° 28, comm. 394, concl.
V. Daumas, note M. Masclet de Barbarin ; Juris-Data n° 2016-026287.
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commises depuis plus de dix ans 1. Ce délai de dix ans correspond à la
durée de conservation des documents comptables imposée aux entreprises
par l’article L. 123-22 du Code de commerce 2.
Par ailleurs, le principe est exclu pour les erreurs résultant d’amortisse-
ments trop rapides ou de l’inscription en charges du prix de revient d’élé-
ments d’actif, commises au cours d’exercices prescrits.
Ces exceptions permettent la rectification de l’actif net du bilan
d’ouverture du premier exercice non prescrit. Pour autant, le produit
comptable dégagé ne sera pas imposé dès lors qu’il a été réalisé lors d’un
exercice prescrit.
1. L’exception au principe ne concerne que les erreurs commises ponctuellement et non les
erreurs répétées d’exercice en exercice (CE, 17 mai 2006, 3e et 8e ss-sect, Dr. fisc. 2007, no 11,
comm. 275, concl. E. Glaser). Ainsi, pour une inscription non justifiée d’une provision pen-
dant des exercices successifs (CE 11 mai 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 370533, Sté. Stok Promotion,
Dr. fisc. 2015, n° 41, comm. 621, concl. E. Bokdam-Tognetti, note P. Fumenier).
2. Dix ans au total puisque selon l’alinéa 4 bis de l’article 38 du CGI, le principe d’intangi-
bilité ne s’applique pas lorsque l’entreprise apporte la preuve que les omissions ou erreurs sont
intervenues plus de sept ans avant l’ouverture du premier exercice non prescrit.
3. La règle de l’intangibilité du bilan d’ouverture du premier exercice non prescrit rend sans
effet la taxation de la reprise de provisions non déduites fiscalement au cours de la période
prescrite, même si l’omission de déduction fiscale est délibérée (CE 5 déc. 2016, plén.,
n° 398859, Sté Orange, RJF 2/17, n° 155, Concl. V. Daumas).
4. Ainsi, l’erreur résultant de ce que le contribuable n’a pas sorti de son bilan des immeubles
expropriés pour y inscrire la créance née du jugement fixant l’indemnité d’expropriation peut
être corrigée par l’administration dans le bilan de clôture du premier exercice non prescrit (CE
16 juin 2003, 10e et 9e ss-sect., no 212134, Dr. fisc. 2003, no 51, comm. 912).
5. Ex. CE 22 avr. 1992, 8e et 7e ss-sect., no 75.644, Dr. fisc. 1992, no 40, comm. 1776.
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le bilan de sortie du premier exercice non prescrit, mais le bilan d’entrée
de ce même exercice étant intangible, il en résulte une augmentation de
résultat de cet exercice. De même peuvent être réintégrées au titre du pre-
mier exercice non prescrit les dotations aux amortissements non déduc-
tibles du résultat fiscal, alors même qu’elles auraient été comptabilisées
aux titres d’exercices prescrits 1.
La règle de l’intangibilité du bilan d’ouverture du premier exercice non
prescrit est également applicable lorsque son application est favorable au
contribuable, c’est-à-dire lorsqu’il a omis des charges. Le contribuable peut
en ce cas obtenir la prise en compte lors du premier exercice non prescrit
de charges qu’il n’a pas déduites à temps 2.
On notera que la règle de l’intangibilité du bilan d’ouverture du premier
exercice non prescrit s’applique à l’ensemble des valeurs d’actif et de passif
qui doivent être déterminées lorsqu’elles diffèrent des règles comptables
par les règles fiscales. Autrement dit, elle s’applique non seulement aux
écritures comptables, mais aussi au « bilan fiscal » 3.
Il s’agit d’une règle objective, en ce sens qu’il n’est pas tenu compte du
comportement du contribuable. Ainsi, elle peut bénéficier au contribuable
dont la surestimation de l’actif du bilan d’ouverture procède de l’omission
de déduire fiscalement des provisions régulièrement comptabilisées 4. Il
faut distinguer la mise en œuvre du droit à la correction symétrique et
le butoir constitué par le bilan d’ouverture du premier exercice non pres-
crit. Comme l’a mis en exergue à juste titre le rapporteur public Vincent
Daumas 5, « en cas d’erreur délibérée entachant un bilan, l’administration
est en droit de la corriger, sans pour autant être tenue de procéder à la
correction symétrique. Le droit à la correction symétrique se trouve donc
cantonné ratione materiae aux erreurs commises de bonne foi », tandis
que la règle de l’intangibilité du bilan peut être « fondée, d’un point de
vue théorique, sur les effets de la prescription ». Il importe peu qu’elle ait
aujourd’hui un fondement légal. Sous réserve des limites figurant dans la
loi, il s’agit en définitive d’une « règle objective et absolue, s’imposant en
toutes circonstances à toutes les parties au litige ». Le lien entre les deux
est que « le droit à la correction symétrique se trouve donc cantonné
ratione temporis en deçà de l’horizon de la prescription, ainsi transformé
en muraille infranchissable ».
1. CE 17 juin 1996, no 140510, Dr. fisc. 1996, no 48, comm. 1439 (à propos d’amortisse-
ments de caducité). Voir toutefois l’art. 38-4 bis du CGI s’agissant des dotations aux amortisse-
ments excessives au regard des usagers.
2. Ex. CE 2 déc. 1977, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 4087, Dr. fisc. 1978, no 26, comm. 1070, concl.
Martin-Laprade ; RJF 1/78, p. 9. – CE 25 janv. 1984, no 34642, Dr. fisc. 1984, comm. 1116,
concl. Verny.
3. CE 30 juin 2008, 3e et 8e ss-sect., M. Lemoine, no 288314, Dr. fisc. 2008, no 39, comm.
506, concl. E. Glaser.
4. CE 5 déc. 2016, plén. fisc., n° 398859, Sté Orange, préc.
5. V. Daumas, conclusions sur CE 5 déc. 2016, plén. fisc., n° 398859, Sté Orange, préc.
LA THÉORIE DE LA CORRECTION SYMÉTRIqUE DES BILANS 127
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113 Bibliographie ¸
O. FOuquet, « L’intangibilité du bilan d’ouverture du premier exercice non prescrit : la
fin d’un tabou ? », Rev. adm. 2004, no 341, p. 380.
E. gerbinO, L’intangibilité du bilan d’ouverture : une théorie inéquitable ?, Thèse droit, Aix-
Marseille III, 1999 ; Presses Universitaires du Septentrion, 1999.
N. Labrune, « Corrections symétriques, intangibilité et droit à l’oubli : un premier
bilan », RJF 8-9/15, p. 635.
m. masCLet de barbarin, « De l’objectivité de la règle de l’intangibilité du bilan
d’ouverture du premier exercice non prescrit », Dr. fisc. 2017, n° 28, comm. 394.
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CHAPITRE 4
COMPTABILITÉ ET FISCALITÉ
115 Le bilan ¸ Le bilan peut être défini comme une représentation chiffrée
des ressources et des emplois dont dispose l'entreprise. Il décrit le patri-
moine de l'entreprise avec ses biens et ses dettes, ses éléments d'actif et de
passif. Le bilan donne ainsi une idée de la puissance financière de l'entre-
prise, de son crédit et de ses moyens d'action.
Pour son activité générale de production ou de commercialisation,
l’entreprise a besoin de moyens. Le bilan propose la liste de ces moyens et
leur évaluation. Mais pour se procurer ces moyens, l’entreprise a dû faire
face à un certain nombre de dépenses. Ainsi le bilan fait ressortir d’une
part les ressources qui correspondent au financement mis à la disposition
de l’entreprise et les emplois de ces ressources qui consistent en l’acquisi-
tion des moyens de production.
L’ensemble des ressources appelé « passif » se décompose en capitaux
propres (apports des associés ou de l’entrepreneur individuel) 1 et capitaux
empruntés (dettes de l’entreprise envers les tiers). L’entreprise peut elle-
même engendrer de nouvelles ressources qui sont les profits qu’elle réalise.
Quant à l’« actif », qui correspond aux emplois des ressources, on dis-
tingue les emplois permanents ou actif immobilisé (terrains, immeubles,
titres de participation, brevets, etc.), et les emplois temporaires ou
actif circulant (créances, valeurs mobilières de placement, disponibili-
tés). De même, par opposition aux profits qui sont au passif, les pertes
figurent au bilan car elles constituent elles aussi un mode d’emploi des
ressources financières.
Par nature, l’actif et le passif sont du même montant car ils traduisent
l’équilibre des emplois et des ressources.
1. D’autres éléments peuvent y figurer. Ainsi, pour une société, les capitaux propres vont
également être composés de primes (ex. prime d’émission), de réserves (ex. réserve légale, sta-
tutaire, facultative), du report à nouveau et du résultat de l’exercice.
COMPTABILITÉ ET FISCALITÉ 129
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116 Le compte de résultat ¸ Le compte de résultat fait ressortir pour une
période donnée, les recettes procurées par les biens ou les services offerts
à la clientèle. Ces recettes rapprochées des dépenses nécessaires à leur
production, font apparaître le résultat de l'entreprise pour l'exercice.
Si le bilan fait état du résultat de l’entreprise, il ne donne pas les opéra-
tions qui ont permis de le constituer. Il est donc nécessaire d’utiliser un
autre instrument qui récapitule les opérations ayant influencé le résultat
final : le compte de résultat. Par le compte de résultat, on voit combien
l’entreprise a fait d’affaires, et si elle en a tiré un bénéfice ou une perte.
Parmi les opérations réalisées par une entreprise, certaines n’ont pas
d’influence sur le résultat. Ainsi l’encaissement d’une créance sur un
client laisse inchangé le résultat de l’entreprise puisque la diminution
d’une créance entraîne une augmentation des disponibilités. Il en est
de même s’agissant du règlement d’une dette envers un fournisseur qui
entraîne à la fois une diminution d’une dette et une diminution du même
montant d’une créance sur la banque.
D’autres opérations au contraire, ont une incidence sur le résultat de
l’entreprise. C’est le cas lorsque l’entreprise fournit des biens et des ser-
vices alors que pour les fournir, elle consomme d’autres biens et services.
Les biens fournis constituent les produits alors que les biens consommés
sont des « charges ». C’est le solde des biens et des charges de l’entreprise
qui constitue son résultat.
Le résultat d’un exercice est donc constitué par l’ensemble des opé-
rations de l’entreprise, qu’elles soient effectuées au titre de son activité
normale ou d’opérations exceptionnelles n’entrant pas directement dans
le champ de l’activité normale comme par exemple la cession d’une
immobilisation. Mais le résultat intègre également les éléments favorables
ou défavorables d’origine antérieure qui viennent le modifier comme des
pertes et profits sur exercices antérieurs.
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SECTION 2. LES RAPPORTS DU DROIT FISCAL
DES AFFAIRES ET DE LA COMPTABILITÉ
118 Les divergences ¸ Les rapports juridiques entre le droit comptable et le
droit fiscal des affaires sont complexes. S'agissant pour l'essentiel d'impo-
ser le résultat de l'entreprise, une convergence des concepts, des tech-
niques et des contraintes paraît évidente, le résultat fiscal étant calculé à
partir du résultat comptable. Selon le Plan comptable général, « le résultat
de l'exercice est égal tant à la différence entre les produits et les charges
qu'à la variation des capitaux propres entre le début et la fin de l'exercice
sauf s'il s'agit d'opérations affectant directement le montant des capi-
taux propres » 1. Cette définition est à rapprocher de celle donnée par
l’article 38-2 du Code général des impôts. « Le bénéfice net est constitué
par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture
de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée
des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au
cours de cette période par l’exploitant ou par les associés. L’actif net
s’entend de l’excédent des valeurs d’actif sur le total formé au passif par
les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées. »
Ces deux définitions sont donc similaires et l’on doit constater que la
définition du bénéfice fiscal est en parfaite harmonie avec la théorie comp-
table du bilan qui voit un bénéfice dans toute augmentation de l’actif net.
Malgré cette coïncidence au niveau des principes, le résultat de l’entre-
prise diffère selon qu’il se définit en vertu des règles comptables ou des
règles fiscales 2.
La plupart des différences entre la comptabilité et la fiscalité sont
« techniques » en ce que leur justification ne réside dans aucune politique
fiscale ou économique mais ne sont que les conséquences d’une nécessaire
prise en compte de la réalité. L’exemple type peut être celui des plus-values
à long terme. Si la plus-value réalisée sur le long terme révèle bien pour
partie un gain en capital réel, elle est également la simple conséquence
d’une dépréciation monétaire ce qui justifie une taxation à taux réduit.
Taxation à taux réduit qui emporte la nécessité de soustraire la plus-value
à long terme du bénéfice comptable de l’entreprise afin de la faire bénéfi-
cier du régime spécial d’imposition.
Au-delà ce sont les nécessités d’une politique fiscale ou économique qui
brisent la convergence naturelle de la comptabilité et de la fiscalité. Il suffit
pour en rendre compte de faire allusion aux nombreux cas d’exonération
prévus par le Code général des impôts. Dans certains cas l’exonération
ne traduit pas la renonciation de l’État à imposer le produit exonéré car
celui-ci peut avoir déjà été imposé. Il ne s’agit alors que d’éviter une double
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imposition. On peut ici songer aux conséquences des règles d’application
territoriale de l’impôt. Pour d’autres hypothèses, l’exonération traduit le
souci de faire échapper le profit à l’imposition, même si l’exonération n’est
que partielle prenant alors la forme d’un abattement.
Des dernières manifestations des distorsions entre la comptabilité et
la fiscalité trouvent leur origine dans le souci de lutter contre la fraude
fiscale. Ainsi, il ne suffit pas d’inscrire en comptabilité certains frais
effectivement supportés par l’entreprise pour qu’ils soient déductibles
du bénéfice imposable. Encore faut-il que cette dépense ait été faite dans
l’intérêt de l’entreprise, c’est-à-dire pour l’acquisition ou la conservation
du bénéfice. Dans le cas contraire le droit fiscal refuse totalité ou partie
de la dépense.
Ainsi, si le résultat comptable est en principe la base du résultat fiscal,
la définition fiscale spécifique du résultat oblige à une correction du résul-
tat comptable sous les formes opposées de réintégrations ou au contraire
de déductions 1.
119 La subsidiarité des règles fiscales ¸ Les divergences évidentes mal-
gré un principe général de convergence amènent à poser la question de
l'éventuelle prééminence d'une discipline sur l'autre. Les notions comp-
tables ou les résultats de la comptabilité s'imposent-ils au droit fiscal, ou
bien celui-ci peut-il s'en éloigner afin d'appliquer ses propres préceptes ?
Une première réponse consiste à remarquer que toute loi, donc la loi
comptable, s’impose à l’entreprise. Or la principale source du droit comp-
table se trouve dans le droit commercial qui, principalement dans les
articles L. 123-12 et suivants du Code de commerce, précise les obligations
comptables incombant aux commerçants. Il est d’ailleurs intéressant de
noter que la loi a repris certaines dispositions du Plan comptable en leur
donnant ainsi valeur législative. C’est le cas par exemple pour la consécra-
tion de la notion d’image fidèle qui doit être fournie par les comptes de
l’entreprise 2.
Ensuite, concernant plus directement le résultat de l’entreprise, c’est le
Plan comptable général qui fixe les principes directeurs de la tenue de la
comptabilité des entreprises. Or l’article 38 quater de l’annexe III au Code
général des impôts édicte que « les entreprises doivent respecter les défi-
nitions édictées par le Plan comptable général, sous réserve que celles-ci
ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de
l’impôt ». De cette disposition, il découle que dans le silence de la loi fis-
cale sur le mode d’inscription comptable, la solution fiscale doit s’aligner
sur la solution comptable 3, mais il en résulte également qu’une entreprise
ne peut se prévaloir d’une disposition du Plan comptable général pour
1. V. ss 288.
2. C. com., art. L 123-14.
3. CE 14 mars 1984, n° 46.770, Dr. fisc. 1984, n° 40, 1652, concl. Mme Latournerie.
132 LES PRINCIPES DE DÉTERMINATION DU RÉSULTAT FISCAL
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faire échec à une disposition fiscale 1. C’est le principe de la subsidiarité de
la loi fiscale qui confère au droit fiscal une certaine forme d’autonomie en
lui permettant de porter exception au droit comptable lorsqu’il trouve la
règle comptable inadaptée aux objectifs particuliers de la fiscalité 2.
120 Bibliographie ¸
O. Barbe et L. DideLOt, « Pour une nouvelle approche des relations entre la comptabi-
lité et la fiscalité », RFFP 2016, n° 135, p. 267.
J.-Ph. Baur, Les principes comptables à l’épreuve de la fiscalité française, Thèse Dijon, 1993.
J. BertOut, Les règles fiscales permettent-elles aujourd’hui l’établissement d’un bilan sincère
et véritable ?, Thèse Lyon III, 1986.
A. de Bissy, Comptabilité et fiscalité. Du résultat comptable au résultat fiscal, LexisNexis,
2e éd. 2016, préf. P. Serlooten.
M.-A. Deysine, A.-L. BLandin et A. Nithart, « Changements de méthode comptable :
pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? », FR. Lefebvre 49/16, inf. 2.
C. LOPater « La connexion comptabilité-fiscalité dans tous ses états ! », RFFP 2016,
n° 133, p. 171.
C. LOPater et O. FOuquet, « Connexion comptabilité-fiscalité : quatre actions priori-
taires pour assurer la sécurité juridique », FR. Lefebvre 50/16, inf. 26, p. 45.
M. Hinard et A.– CH. Mittaine-Chenevier, Comptabilité et fiscalité, PUF.
H. PaiLLissier, Les relations entre la fiscalité des entreprises et la comptabilité commerciale,
Thèse Paris IX, 1990.
B. Prisse, La définition des bénéfices industriels et commerciaux. Les divergences entre le
droit fiscal et le droit commun, Thèse Bordeaux 1974.
L. Rives, Obsession fiscale et administration des entreprises – Essai sur le rapt de la compta-
bilité par le fisc, Thèse Bordeaux 1959.
§ 1. L’imposition obligatoire
122 Les personnes physiques et sociétés à risque illimité ¸ Sont sou-
mises à la taxation des BIC toutes les personnes physiques qui exploitent
en leur nom personnel et pour leur propre compte une entreprise de
caractère industriel, commercial ou artisanal 1.
Lorsque l’entreprise est exploitée dans le cadre d’une indivision, notam-
ment successorale, les co-indivisaires ont la qualité de co-exploitant 2,
mais ils ne sont imposables qu’en raison de la société de fait s’établissant
entre les co-indivisaires qui participent effectivement à l’exploitation.
Quant aux co-indivisaires qui ne participent pas à l’exploitation et qui
donc ne font pas partie de la société de fait, ils ne sont imposables qu’à
raison des bénéfices mis à leur disposition et non de la quote-part des
bénéfices correspondant à la quote-part de leurs droits dans l’indivision 3.
Sont également considérés comme des co-exploitants les époux mariés
sous le régime de la séparation des biens assorti de la création, par voie
conventionnelle, d’une société d’acquêts à laquelle une activité profession-
nelle est apportée 4.
Au-delà de l’imposition des personnes physiques, le domaine de
l’imposition des BIC est plus étendu puisqu’elle s’applique également à
certains groupements.
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C’est ainsi que sont imposées de cette façon les sociétés de fait (CGI,
art. 238 bis L) 1, les sociétés en participation 2 et les groupements d’intérêt
économique ainsi que les groupements européens d’intérêt économique
(CGI, art. 239 quater C) 3.
De même les sociétés de personne sont soumises à l’impôt sur le
revenu 4, tout au moins lorsque la responsabilité des associés est illimitée
comme c’est le cas pour les sociétés civiles, les sociétés en nom collectif
et les sociétés en commandite simple pour la part des bénéfices revenant
aux commandités 5.
Sont également soumises à l’impôt sur le revenu, les sociétés à respon-
sabilité limitée unipersonnelle (EURL) lorsque l’associé unique est une
personne physique. La limitation de responsabilité dont bénéficie l’associé
unique d’une EURL aurait dû conduire à soumettre l’EURL à l’impôt sur
les sociétés. Mais c’était alors condamner cette forme d’exploitation de
l’entreprise individuelle, ne serait-ce qu’en raison de la perte des avantages
de l’adhésion à un centre de gestion agréé. Il est à noter que bien que
traitée comme l’entreprise individuelle, l’EURL est une société à laquelle
s’applique le droit des sociétés et à laquelle le droit privé reconnaît la
personnalité morale. Il existe donc des charges spécifiques qui tiennent
au fait que la société peut conclure des conventions avec ses membres.
Ainsi, le fait qu’au-delà de son apport en capital, l’associé puisse mettre à
la disposition de la société d’autres fonds à titre de prêt permet à celle-ci
de déduire les intérêts des sommes versées en compte courant d’associés
dès lors bien sûr qu’ils ne sont pas excessifs selon la référence légale au
taux moyen des prêts 6. De même, si un associé donne en location un
bien (meuble ou immeuble) à la société, elle peut déduire de son bénéfice
imposable les loyers versés à l’associé.
1. Une société de fait suppose que soient réunies les trois caractéristiques traditionnelles du
contrat de société : participation aux apports, participation à la gestion et aux résultats de la
société. Sur les critères d’existence des sociétés de fait : CE 23 nov. 1988, 8e et 7e ss-sect.,
no 57.535, Dr. fisc. 1989, no 11, 561. – CE 28 avr. 2006, 8e et 3e ss-sect., no 278857, Min. c/ Cousin
et Soulard, Juris-Data no 2006-080925 ; Dr. fisc. 2006, no 40, comm. 634.
2. Du moins lorsque les associés sont indéfiniment responsables du passif (Paris 16 nov.
2005, 2e ch. A, no 04-1684, Dr. fisc. 2006, no 20, comm. 398).
3. Les GIE dont l’activité n’est pas dans le prolongement de celle de leurs membres et auxi-
liaire à celle-ci enfreignent la législation commerciale et sont passibles de l’IS (CE 29 août
2008, 8e et 3e ss-sect., no 299557, Joseph Kadouch et no 299558, Gabriel Kadouch, RJF 12/08,
no 1353. – CE 18 mai 2009, 8e et 3e ss-sect., no 298037, M. Beladina, Dr. fisc. 2009, no 37, comm.
457 ; RJF 8-9/09, no 759. – Dans le même sens, CE 9 mai 2011, 3e ss-sect., no 320094, De Ribes,
RJF 12/11, no 1347).
4. Il est raisonné ici sur un associé personne physique.
5. Les sociétés de personnes qui entendent que leurs bénéfices soient imposés au nom des
associés doivent faire connaître ceux-ci à l’administration dans le délai de déclaration (Paris
17 avr. 2001, 2e ch. B, no 97-1515, Dr. fisc. 2002, no 8, comm. 141).
6. CAA Paris 21 mai 2007, 5e ch. B, no 04PA04065, M. et Mme Lequen, Dr. fisc. 2008, no 4,
comm. 80.
LE DOMAINE DE L’IMPOSITION DES BIC 137
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123 Certaines sociétés particulières ¸ À côté des sociétés où le risque est
illimité, figurent parmi les sociétés assujetties à l'impôt sur le revenu, un
certain nombre de sociétés particulières. Ainsi, est-ce le cas des sociétés de
copropriété pour lesquelles l'article 1655 ter du CGI déclare qu’au regard
des impôts directs, ces sociétés sont réputées, quelle que soit leur forme
juridique, ne pas avoir de personnalité distincte de celle de leurs membres.
La même situation est faite aux sociétés d’investissement par l’article 208
du CGI. La société d’investissement a pour objet l’acquisition d’un porte-
feuille de valeurs mobilières et la répartition des revenus entre les associés
au prorata de leur apport au capital social. Cette société est intéressante
pour les associés car, au lieu d’acquérir les droits sociaux en leur nom
personnel et donc de courir les risques de la société dont ils détiennent
les titres, la société d’investissement acquiert des titres de sociétés pour
tous ses associés ; elle encaisse les revenus, subit les pertes et verse à ses
associés, sur ses propres titres, un dividende déterminé d’après les profits
et les pertes des actions qu’elle a acquises. Les risques sont ainsi répartis
sur l’ensemble des associés.
Normalement, ces sociétés, ayant une personnalité distincte de celle
des associés, devraient être soumises à l’impôt sur les sociétés. Mais cela
impliquerait que les bénéfices recueillis soient imposés deux fois ; lors de
leur réalisation et lors de leur distribution. Or ce cumul d’impôt pourrait
écarter la constitution de telles sociétés. C’est pourquoi le législateur
n’impose pas la société à l’impôt sur les sociétés, mais il impose simple-
ment l’associé de la société d’investissement comme s’il percevait son
dividende directement de la société qui a versé le dividende à la société
d’investissement ; comme s’il était, en somme, associé personnel de la
société dont la société d’investissement possède des titres.
§ 2. L’imposition facultative
124 Les SARL de famille ¸ L'article 239 bis AA du CGI permet aux SARL
dites de famille, exerçant une activité industrielle, commerciale, arti-
sanale ou agricole d’opter pour l’imposition à l’impôt sur le revenu 1. Il
s’agit des sociétés constituées uniquement entre personnes parentes en
ligne directe 2 ou entre frères et sœurs ainsi que les conjoints 3. Le régime
1. Les conditions d’option doivent être respectées pendant toute la vie de la société (CE
5 févr. 2014, 10e et 9e ss-sect., Mme. Bocobsa, Dr. fisc. 2014, no 23, comm. 368, Concl. D. Hedary,
note Th. Lamulle).
2. Une société constituée entre deux époux et un enfant du premier lit de l’un des époux
peut valablement opter pour le régime fiscal des SARL de famille (Rép. min. éco. no 31500 à
M. Dumoulin, JOAN Q 27 sept. 1999, p. 5606 ; Dr. fisc. 1999, no 40, p. 1225).
3. Le régime fiscal des SARL de famille n’est cependant pas remis en cause lorsque toutes
les parts sont transmises par succession aux enfants de l’un des associés (BOI-BIC-
CHAMP-70-20-30). Il en est différemment en cas de cession de la nue-propriété d’une partie
des parts à un étranger à la famille (Paris 15 oct. 2003, 2e ch. A, no 01-1423, Dr. fisc. 2004,
no 14, comm. 386).
138 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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fiscal des SARL de famille profite également aux personnes liées par un
PACS quelle qu’en soit la durée. Cette option ne peut être exercée qu’avec
l’accord de tous les associés 1 et elle cesserait de produire ses effets au cas
où la société viendrait à perdre son caractère familial strictement défini
ou sur renonciation de la société auprès des services des impôts 2. La
société n’a plus alors la possibilité d’opter à nouveau pour le régime des
sociétés de personnes.
L’option doit être notifiée avant la date d’ouverture de l’exercice pour
lequel elle est faite 3. Cependant l’option tardive est admise lorsque la
société a clairement manifesté son intention d’opter à compter du début
de l’exercice et que les déclarations fiscales correspondantes ont été sous-
crites 4. En ce qui concerne les sociétés nouvelles, l’option produit immé-
diatement ses effets si elle est formulée dans l’acte constatant la création.
Le même effet immédiat profite aux sociétés existantes si l’option est for-
mulée dans l’acte qui constate soit la transformation de la société, soit la
cession de parts par l’associé unique. Enfin si la SARL de famille est consti-
tuée par les héritiers de l’ancien associé unique décédé d’une EURL l’option
prend effet au lendemain du décès à condition qu’elle ait été exercée dans
les six mois du décès et au plus tard lors du dépôt de la déclaration des
résultats de l’exercice en cours lors du décès 5.
125 Les sociétés de capitaux exploitant une PME ¸ L'article 239 bis AB
du CGI prévoit la possibilité pour les sociétés anonymes, les sociétés par
actions simplifiées et les sociétés à responsabilité limitée dont les titres ne
sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers
d’opter pour l’impôt sur le revenu.
Le bénéfice de l’option est expressément réservé aux sociétés dont le
capital et les droits de vote sont détenus à hauteur de 50 % au moins par
une ou des personnes physiques, 34 % au moins devant être détenus par
des dirigeants de la société (président, directeur général, président du
conseil de surveillance, membre du directoire ou gérant).
Pour pouvoir opter, tous les associés doivent donner leur accord. La
société doit exercer à titre principal une activité industrielle, commerciale,
artisanale, agricole ou libérale, à l’exclusion de la gestion de son propre
1. Une option irrégulière du fait quelle n’a pas été signée par tous les associés est inoppo-
sable, y compris à l’associé signataire (CE 12 févr. 2014, 8e et 3e ss-sect., no 358356, Min. c/ B.,
RJF, 5/14, no 468, concl. N. Escaut, BDCF 5/14, no 59).
2. Ainsi, une société composée entre les parents et leur enfant commun perd la qualité
de Sarl de famille en cas de divorce des parents car chacun des associés doit être directement
uni aux autres soit par des liens de parenté, soit par le mariage ou par un Pacs (CAA Versailles
18 déc. 2014, 7e ch., n° 13VE02220, RJF 4/15, n° 333).
3. CAA Marseille 31 mai 1999, 3e ch., no 96-12443, RJF 2/00, 216. Elle ne peut être rempla-
cée par le dépôt du PV de l’assemblée générale extraordinaire au CFE (TA Nice 12 oct. 2004,
1re ch., no 00-2361 et 00-2362, Dr. fisc. 2004, no 47, comm. 842).
4. CE 5 nov. 2014, 3e et 8e ss-sect., no 367371, Min. c/ Perez P., Dr. fisc. 2015, n° 12, comm.
221, concl. V. Daumas, note L. Chatain-Autajon ; RJF 2/15, no 127.
5. CE 5 nov. 2014, 3e et 8e ss-sect., n° 367371, Min. c/ Perez P., préc.
LE DOMAINE DE L’IMPOSITION DES BIC 139
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patrimoine mobilier ou immobilier. Elle doit employer moins de cin-
quante salariés 1 et réaliser un chiffre d’affaires annuel ou avoir un total
de bilan inférieur à 10 millions d’euros au cours de l’exercice.
L’option est réservée aux nouvelles sociétés puisque pour pouvoir opter,
la société doit avoir été créée depuis moins de cinq ans.
Elle est valable pour une période de cinq exercices, sauf renonciation
notifiée dans les trois premiers mois. Aucune possibilité de prorogation
n’est prévue.
À l’issue de la période d’option, comme dans toutes les hypothèses de
sortie anticipée du régime des sociétés de personnes (non-respect des
conditions d’application, renonciation à l’option), la société est replacée
dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés avec les consé-
quences habituelles du changement de régime fiscal. Cependant, puisqu’il
n’existe pas en ce cas de création d’une personne morale nouvelle, et à la
double condition qu’aucune modification ne soit apportée aux écritures
comptables et que l’imposition des bénéfices en sursis d’imposition, des
plus-values latentes et des profits sur les stocks demeure possible sous le
nouveau régime fiscal applicable à la société, celle-ci pourra bénéficier du
sursis d’imposition prévu à l’article 202 ter du CGI.
126 L’intérêt de l’option ¸ L'intérêt d'une telle option pour l'impôt sur le
revenu réside principalement dans la possibilité pour la société d'adhé-
rer à un centre de gestion agréé et donc de profiter de la réduction de
l'assiette d'imposition procurée par cette adhésion.
L’assujettissement volontaire à l’impôt sur le revenu permet également
lorsque l’activité de l’entreprise est déficitaire, de faire remonter le déficit
immédiatement jusqu’aux associés puisqu’il sera déductible de leur revenu
global. Cet intérêt est le principal avantage de l’option offerte aux sociétés
de capitaux exploitant une PME puisque leur nouveauté risque d’engen-
drer un déficit provisoire jusqu’au retour sur investissement.
Au regard des autres impôts, l’option pour l’impôt sur le revenu permet
de bénéficier du droit d’apport de fonds de commerce réduit au droit fixe
(375 ou 500 euros, éventuellement exonéré) sans avoir à prendre l’enga-
gement de conserver les titres pendant trois ans. Toutefois, au moment
du basculement à l’impôt sur les sociétés, un tel engagement paraît devoir
être souscrit. En effet, lorsqu’une personne morale dont les résultats ne
sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés devient passible de cet impôt,
le changement de son régime fiscal rend les droits et taxes de mutation
à titre onéreux exigibles sur les apports purs et simples qui lui ont été
faits par des personnes non soumises audit impôt 2. Les droits sont alors
perçus sur la valeur vénale des biens à la date du changement de régime
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fiscal. L’engagement de conserver les titres pendant trois ans permettra
d’éviter l’application du droit d’apport majoré, seul le droit fixe précité
étant applicable 1.
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ce qui suppose le caractère habituel 1 des opérations effectuées par des per-
sonnes agissant pour leur propre compte 2 et poursuivant un but lucratif 3.
L’exigence d’un but lucratif permet essentiellement d’écarter de la caté-
gorie des BIC celui qui s’est borné à gérer son patrimoine personnel 4.
Quant à l’exigence d’un comportement professionnel, il n’est pas néces-
saire que l’intéressé retire de l’activité exercée l’essentiel de ses ressources
ni qu’il y ait permanence sans discontinuité ni même qu’il y ait répétition
fréquente des mêmes opérations 5, il suffit que l’exécution des actes de
commerce soit périodique ou échelonnée sur une longue période 6. Si le
contribuable à un doute sur la qualification de ses revenus en tant que BIC,
il dispose d’une possibilité de rescrit pour interroger l’administration 7.
Au-delà de la définition restrictive du droit commercial, le droit fiscal
étend la définition du bénéfice commercial aux artisans. Ce faisant, il
est conforme à la tendance du droit privé qui assimile de plus en plus
les artisans aux commerçants. Il s’agit de prendre en compte le fait que
les artisans réalisent leur bénéfice de la même façon que les commer-
çants puisqu’ils achètent les marchandises et les façonnent avant de
les revendre.
Aux opérations commerciales par nature, le droit fiscal ajoute les opé-
rations commerciales par accessoire. L’article 155 du CGI dispose que
lorsqu’une entreprise industrielle ou commerciale étend son activité à
des opérations dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices
de l’exploitation agricole ou dans celle des bénéfices des professions non
commerciales, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination
des BIC à comprendre dans les bases de l’impôt sur le revenu.
Cette règle est une exception à la règle qui veut que chaque catégorie
de bénéfices soit traitée séparément pour le calcul du revenu net catégo-
riel imposable. Aussi, le Conseil d’État interprète l’article 155 de façon
restrictive. Ainsi, pour que le texte trouve application, il convient que les
opérations agricoles ou non commerciales soient l’accessoire de l’activité
6. Ex. : CE 21 mars 1983, Dr. fisc. 1983, no 48, comm. 2204, concl. Bissara.
7. LPF, art. 80 B, 8°.
142 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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industrielle ou commerciale, ce qui suppose que l’activité industrielle
ou commerciale soit prépondérante par rapport à l’activité agricole ou à
l’activité non commerciale. Cette prépondérance s’apprécie, notamment,
en fonction des recettes produites respectivement par les deux activités, de
l’importance des capitaux mis en œuvre et de la main-d’œuvre utilisée 1.
Le critère principal de référence est l’importance des produits procurés
par chaque activité et non celle des bénéfices réalisés puisque ceux-ci sont
déterminés selon des règles différentes et ne peuvent donc fournir un
critère fiable 2.
Une autre condition de l’application de la théorie de l’accessoire est qu’il
existe un lien étroit entre les différentes activités : qu’elles soient intégrées
ou du moins liées 3.
En revanche, il n’est pas nécessaire que l’activité industrielle ou commer-
ciale soit antérieure à celle à laquelle s’applique la règle du rattachement 4.
1. Ex. : CE 9 déc. 1992, no 78406, Dr. fisc. 1993, no 17/18, comm. 879.
2. CE 11 janv. 1984, no 33656 et 33657, Dr. fisc. 1984, no 18, comm. 932, concl.
P.F. Racine.
3. Ex. : CE 23 juin 1993, 9e et 8e ss-sect., no 88238, Dr. fisc. 1994, no 14, comm. 652.
4. CE 18 déc. 1991, no 65850, Dr. fisc. 1992, no 14, comm. 708. – CAA Nantes 17 févr. 1998,
1re ch., no 95-772, Dr. fisc. 1999, no 2, comm. 12.
5. J.-B. Heinrich, « La notion d’immeuble aménagé en droit fiscal », Dr. fisc. 1985,
no 29, 933.
6. CGI, art. 35, I, 5° bis. Même si les meubles n’appartiennent pas au bailleur (CE 10 juill.
1985, 9e et 8e ss-sect., no 40.789, Dr. fisc. 1986, no 8, p. 252).
LE DOMAINE DE L’IMPOSITION DES BIC 143
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nécessaire à l’exploitation 1. Ces diverses locations sont alors soumises
à l’imposition dans la catégorie des BIC 2.
– Les propriétaires de fonds de commerce qui donnent en location leur fonds.
Bien qu’en droit privé, le propriétaire du fonds qui donne celui-ci en loca-
tion-gérance perde la qualité de commerçant, le droit fiscal l’impose sur le
produit de la location dans la catégorie des BIC.
– Les adjudicataires et les concessionnaires de droit communaux (CGI,
art. 35-I-6o).
– Les membres des copropriétés de navires (CGI, art. 35-I-7o).
– Les personnes qui, habituellement, achètent, en leur nom, en vue de les
revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés
immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des
actions ou parts créées ou émises par ces mêmes sociétés. Sont aussi concer-
nés les agents d’affaires qui interviennent comme intermédiaire pour les
mêmes opérations.
S’agissant non des intermédiaires, mais des propriétaires, sont seuls
imposés dans la catégorie des BIC, les professionnels puisque les opéra-
tions doivent présenter un caractère habituel. Il s’agit donc de considérer
comme commerçants les « marchands de biens ». Mais cette qualité,
due à l’habitude, s’acquiert-elle dès la première opération ? Il s’agit d’une
question de fait pour laquelle il n’existe pas de réponse de principe. Il a,
en effet, pu être jugé que n’a pas de caractère habituel l’activité d’une per-
sonne qui a cédé deux immeubles construits sur des parcelles qu’elle avait
acquises 15 et 10 ans auparavant 3. Au contraire, le caractère habituel a pu
être retenu en raison du court délai séparant les dates d’acquisition et de
cession 4. En revanche, il n’y a pas habitude lorsqu’une personne a acheté,
en une seule fois, un ensemble d’immeubles qu’elle a revendus l’année
suivante à une société immobilière à l’exclusion de deux maisons qui ont
été vendues, à la demande de cette société, au directeur de celle-ci 5.
En sens inverse, selon l’administration, le caractère habituel doit
être retenu pour la personne qui a fait construire un immeuble en
vue de sa revente. De même, en cas de vente par appartements d’un
immeuble à usage d’hôtel acquis « en bloc » en vue de sa cession par lots
après transformation 6.
1. Il importe peu que la location ne porte que sur une partie du matériel nécessaire (CE
1er oct. 1986, no 22.846, Dr. fisc. 1986, no 47/48, comm. 2068 ; RJF 1986, no 960). La loi précise
qu’il est indifférent que la location comprenne, ou non, tout ou partie des éléments incorporels
du fonds de commerce ou d’industrie (CGI, art. 35, I, 5°).
2. CE 27 févr. 1985, no 43.158, Dr. fisc. 1985, no 44, comm. 1889, concl. Fouquet ; RJF 1985,
no 546. – CE 1er oct. 1986, no 22.846, préc.
3. CE 2 févr. 1972, no 75.716.
4. CE 11 janv. 1984, no 19.520, RJF 3/84, 142.
5. CE 28 mai 1980, no 16.695.
6. Rép. min. M. Chapelain, JOAN 25 juin 1971, p. 3416, n° 16136. – BOI-BIC-CHAMP-20-
10-20-10.
144 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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– Les lotisseurs. L’article 35-I-3o du CGI ne vise que les marchands de
biens procédant à une opération de lotissement, de telle sorte que le par-
ticulier qui se bornerait à gérer son patrimoine immobilier ne relèverait
pas de l’imposition sur le revenu dans la catégorie des BIC ; mais, le cas
échéant, du régime général de taxation des plus-values des particuliers.
130 Bibliographie ¸
s. anOuChian, L. benOudiz et Lesbre, « Régime fiscal de la location immobilière »,
RFP 2016, n° 9, comm. 8.
e. bOkdam-tOgnetti, « Sociétés en participation et fiscalité : troubles de la personna-
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P. FernOux, « Location meublée : l’adoption de la “commercialité fiscale”, une réforme
nécessaire », Dr. fisc. 2016, n° 26, Et. 387.
T. Le sCOuëzeC, « La nouvelle option à l’IR de certaines sociétés de capitaux : une
modernisation limitée et dangereuse », Dr. fisc. 2008, no 38, Act. 265.
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CHAPITRE 2
LA DÉFINITION
DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS
ET COMMERCIAUX
§ 1. Bénéfice annuel
133 Renvoi ¸ Le principe général de l'annualité de l'impôt soulève quelques
difficultés en matière de BIC car il doit se combiner avec la notion d'exer-
cice. Or l'exercice n'est pas forcément lié à l'année civile. D'autre part, le
découpage du temps en exercices suppose que les opérations de l'entre-
prise soient rattachées à un exercice donné.
Le bénéfice imposable étant défini comme la différence entre les valeurs
de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période d’imposition, le béné-
fice est calculé compte tenu de la situation existant à la clôture de l’exer-
cice. Puisqu’il s’agit d’imputer à chaque exercice le bénéfice qui lui revient
146 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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(et uniquement celui-là), se trouve posé le principe de l’indépendance
des exercices. En application de ce principe, peuvent seules être prises en
compte les opérations faites par l’entreprise avant la clôture de l’exercice.
Le principe de l’annualité de l’impôt et celui de l’indépendance des
exercices sont étudiés avec les développements sur les principes de déter-
mination du résultat fiscal.
§ 2. Bénéfice disponible
134 Absence de prise en compte des réserves ¸ Le bénéfice imposable
étant le bénéfice réalisé ou dont dispose le contribuable, l'entrepreneur
individuel va être imposé sur la totalité du bénéfice réalisé au cours de la
période d'imposition. En effet, compte tenu de l'absence de reconnais-
sance de la personnalité fiscale de l'entreprise individuelle, tout bénéfice
réalisé est considéré comme appréhendé par l'entrepreneur, indépendam-
ment de tout prélèvement effectif dans les caisses de l'entreprise. Aussi,
un exploitant individuel est réputé avoir la disposition du bénéfice réalisé
par l'entreprise « à la clôture de chaque exercice ou, en cas de cessation
d'activité, à la date d'effet de celle-ci » 1.
La même solution est applicable aux sociétés soumises à l’impôt sur le
revenu, compte tenu de leur semi-transparence fiscale. Ainsi, une société
soumise à l’impôt sur le revenu ne peut pas constituer de réserves en
franchise d’impôt. Les associés sont imposables sur leur part de bénéfices
sociaux, même s’ils n’ont pas effectivement appréhendé ces revenus 2 ou
même si les bénéfices ont été détournés par les autres associés 3. De même,
lorsqu’une personne morale soumise à l’impôt sur les sociétés cesse d’y
être assujettie, ses bénéfices et réserves sont réputés distribués aux associés
en proportion de leurs droits (CGI, art. 111 bis).
Il est à noter que lorsqu’une entreprise individuelle est en indivision,
tous les propriétaires indivis ont la qualité d’exploitant au regard de la loi
fiscale 4, mais (sauf l’hypothèse d’une société de fait entre indivisaires)
chaque indivisaire n’est imposé sur les bénéfices réalisés par l’indivision
que dans la mesure où une fraction des bénéfices de l’exploitation a été
effectivement mise à sa disposition 5. Il s’agit par cette solution d’éviter
que soit imposé le co-indivisaire qui ne participe pas à l’exploitation et qui
n’en tire aucun bénéfice.
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SECTION 2. LE BÉNÉFICE BRUT
135 Les définitions du bénéfice brut ¸ Dans ses deux premiers alinéas,
l'article 38 du CGI donne deux définitions du bénéfice imposable puis-
qu'il prévoit que le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé
d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées
par l'entreprise et qu'il ajoute que le bénéfice net est constitué par la
différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de
la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt. Ainsi, la
première définition est basée sur l'ensemble des opérations de l'entreprise
et la seconde sur la comparaison de deux bilans successifs. L'addition de
ces deux définitions permet d'atteindre l'ensemble des bénéfices réalisés
par l'entreprise, même si le plus souvent le profit réalisé par l'entreprise
correspond aux deux définitions. En effet, l'enrichissement de l'entreprise
révélé par la comparaison de deux bilans successifs proviendra le plus
souvent des « opérations » réalisées par l'entreprise. Mais le recours à
l'« actif net » est cependant plus large en permettant d'atteindre un gain
quelconque réalisé par l'entreprise, même s'il ne résulte pas d'une opéra-
tion réalisée par celle-ci. Ainsi, l'extinction d'une dette doit être comprise
dans le résultat imposable bien qu'elle ne corresponde pas, à propre-
ment parler, à une opération de l'entreprise, car elle augmente l'actif net
de l'entreprise 1. De même, une augmentation de l’actif net résultant
d’un changement de méthode comptable est un gain imposable 2. Il est
important de se rappeler que depuis 2012, les produits et revenus d’actifs
étrangers à l’activité professionnelle (ex. loyer d’un immeuble de rapport
ou dividendes d’un portefeuille-titres acquis dans un but purement patri-
monial) doivent être extournés du bénéfice imposable dans la catégorie
des BIC pour être imposés selon la nature immobilière ou mobilière de
l’actif concerné.
Une telle définition large du bénéfice imposable permet d’atteindre non
seulement le bénéfice d’exploitation, mais encore les bénéfices accessoires
ainsi que les bénéfices exceptionnels réalisés par l’entreprise.
1. CE 13 déc. 1982, RJF 2/83, p. 87. – V., Ch. Gosserez, « La gestion fiscale du passif externe
de l’entreprise au regard de “la théorie du bilan” », RF compt. 1992, no 236, p. 43.
2. CE 24 juin 2013, 8e et 3e ss-sect., no 350451, Caron : RJF 10/13 no 905.
148 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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de cet exercice et d'autre part, le total formé par les achats de cet exercice
et le stock existant au jour de l'ouverture de cet exercice.
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§ 2. Les stocks
139 La définition des stocks ¸ Bien que les stocks ne traduisent pas une
recette, ils sont pris en considération pour la détermination du béné-
fice d'exploitation car leur évolution reflète un enrichissement ou un
appauvrissement de l'entreprise. Les stocks sont formés de l'ensemble
des biens et des services qui interviennent dans le cycle d'exploitation de
l'entreprise pour être vendus en l'état ou après transformation ou pour
être consommés par le premier usage. Les stocks comprennent donc
l'ensemble des marchandises, des matières ou fournitures, des déchets 1,
des produits finis, des produits ou travaux en cours 2 et des emballages
perdus que possède l’entreprise à la date de clôture des exercices.
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du stock d’un marchand de biens 1 dès lors qu’il a été acheté en vue de la
revente 2 ; de même, si une entreprise qui a édifié un immeuble à usage de
garage pour l’exploiter par la voie de la location vient ultérieurement à le
vendre par lots, l’immeuble, précédemment élément de l’actif immobilisé,
devient stock 3.
141 L’évaluation des stocks ¸ La question essentielle soulevée par les stocks
est celle de leur évaluation. À ce sujet, l'article 38-3 du CGI prévoit que
« les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la
clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient » 4. Toute
autre méthode d’évaluation est irrégulière 5. Ce texte pose donc à la fois
le principe de l’évaluation au coût de revient 6 et une exception en cas de
dépréciation des stocks.
Concernant le principe de l’évaluation au prix de revient, il faut, avec
l’article 38 nonies de l’annexe III, distinguer les matières premières et les
produits achetés d’une part et, d’autre part les produits finis et les travaux
en cours.
Les stocks de matière première sont évalués à leur prix d’achat augmenté
des frais accessoires d’achat tels que les frais de transport ou d’assurance 7.
En revanche les « marges arrières » sont exclues de la détermination du
prix de revient des stocks. En effet, les sommes perçues par une société
au titre des marges arrière sont la contrepartie de prestations de services
réalisées par elle au profit de ses fournisseurs et ont pour objet d’assurer la
promotion des produits acquis auprès de ceux-ci en exécution de contrats
dits de coopération commerciale. Elles font partie du prix d’achat effectif,
mis pas du prix de revient 8.
Il est souvent difficile d’identifier les stocks en fonction de leur date
d’achat. L’évaluation des stocks se fera alors forfaitairement d’après l’une
des deux méthodes admises ; soit la méthode du prix moyen pondéré, soit
la règle PEPS (premier entré, premier sorti) ou FIFO (first in, first out).
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La première méthode se réfère au prix de revient unitaire moyen de la
période de rotation des stocks. La règle PEPS, au contraire, considère que
les biens restant en stock sont ceux entrés en dernier lieu, aussi l’évalua-
tion se fait en fonction du coût d’achat le plus récent.
Quant aux produits finis et productions en cours, ils sont également
évalués au prix de revient, c’est-à-dire qu’il convient de tenir compte
du coût d’achat des matières premières utilisées augmenté de toutes les
charges directes et indirectes de production. Il pourra s’agir, par exemple,
des frais de personnel, des amortissements et provisions se rapportant aux
éléments qui concourent à la fabrication, des frais de recherche, etc. Le
coût de ces charges est donné par la comptabilité analytique, ou à défaut,
il est déterminé par calculs ou évaluations statistiques.
L’évaluation de principe au prix de revient se trouve cependant écartée
en cas de dépréciation de stocks. L’évaluation doit alors se faire au cours
du jour à la date de l’inventaire 1 en faisant abstraction des circonstances
intervenues postérieurement à la clôture 2. Elle se fait au prix de vente pro-
bable 3. Dans ce cas, l’entreprise constate une dépréciation qui doit faire
l’objet d’une provision pour dépréciation.
1. Le cours du jour est obligatoire dès lors qu’il est inférieur au prix de revient (CE 23 févr.
1977, no 98252 et 23 mars 1977, no 3.597, RJF 4/77, 148).
2. Paris 31 janv. 1991, Dr. fisc. 1991, no 40, comm. 1759.
3. En l’absence de prix du marché, les stocks sont évalués par référence au prix de vente des
produits finis (CE 20 déc. 2009, no 304516, RJF 3/10, no 208).
152 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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pas de lien direct avec l'entreprise 1. Dans un tel cas, avant 2012, lorsque
l’immeuble procurait un bénéfice à l’entrepreneur, il était imposé sur ce
bénéfice dans la catégorie des BIC. Ainsi lorsque l’immeuble était donné
en location les loyers étaient ajoutés au bénéfice d’exploitation propre-
ment dit. En contrepartie, les amortissements, les intérêts des emprunts
et la taxe foncière étaient déductibles des bénéfices de l’entreprise.
Il résulte cependant de l’article 155-II du CGI, que depuis 2012, les reve-
nus fonciers provenant d’actifs immobiliers non affectés à l’exploitation
ne sont pas imposés en tant que revenus professionnels, mais extournés
des BIC pour être imposés en tant que revenus fonciers de l’entrepreneur 2.
Il n’en est autrement, en raison d’une mesure de tolérance que si les pro-
duits qui ne proviennent pas de l’activité professionnelle sont considérés
comme accessoires par rapport à l’activité de l’entreprise. L’application de
l’ensemble de ces règles aux sociétés de personnes suppose leur combinai-
son avec celles de l’article 238 bis K du CGI 3.
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sont imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers 1. De ce
fait, il s’en déduit qu’ils sont soumis au système du prélèvement forfaitaire
unique (PFU) 2.
145 Les revenus de valeurs mobilières ¸ En principe, les revenus de
valeurs et capitaux mobiliers devraient également être imposés comme
bénéfices accessoires dans la catégorie des BIC puisqu'ils contribuent
à la détermination du résultat comptable de l'entreprise. Cependant,
avant 2012, selon la règle de l'extourne admise par l'administration,
les produits des actions, obligations ou bons de caisse n'étaient pas
inclus dans les BIC, mais leur montant devait être déclaré au titre des
revenus mobiliers. Il s'agissait de permettre au contribuable de bénéfi-
cier du régime spécifique des distributions de dividendes. Pour ce faire,
ces produits étaient déduits de manière extra-comptable du bénéfice
industriel et commercial de l'entreprise pour être imposés, au nom de
l'exploitant, dans la catégorie des revenus mobiliers, au même titre que
les autres revenus mobiliers provenant des valeurs mobilières restées
dans le patrimoine privé. Depuis 2012, cette solution est acquise non
en vertu d'une tolérance administrative, mais du fait de l'article 115-II
du CGI puisque les dividendes perçus par les entrepreneurs individuels
imposés dans la catégorie des BIC ne concourant pas à l'exercice de
l'activité professionnelle sont imposés dans la catégorie des revenus de
capitaux mobiliers.
§ 3. Les indemnités
146 Présentation ¸ Toutes les indemnités, quelle que soit leur nature, qui
peuvent être perçues par l'entreprise sont imposables dans la catégorie
des BIC. L'indemnité est alors fiscalement traitée de la même façon que le
préjudice qu'elle vient réparer. Cette règle vaut tant pour la qualification
de l'indemnité que pour son imposition.
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d'une indemnité d'éviction en cas de défaut de renouvellement d'un bail
commercial (C. com., art. L. 145-14) 1.
Le critère de répartition des indemnités entre les deux catégories réside
dans la nature d’élément de l’actif immobilisé du droit contrepartie de
l’indemnité 2. Sur ce point, la jurisprudence prend essentiellement en
cause la pérennité de ce droit 3.
Certaines indemnités peuvent cependant se rattacher à chacune des
deux catégories. Elles peuvent compenser aussi bien la perte d’un revenu
que la perte d’un bien. Elles sont donc selon les circonstances suscep-
tibles d’être imposées soit comme un revenu, soit comme une plus-value.
L’exemple pourrait être celui des indemnités d’assurance ou celui des
indemnités d’expropriation 4.
148 Les indemnités d’assurance ¸ Le critère de répartition entre un revenu
ou une plus-value dépend du caractère immobilisé ou non du bien dont
l'indemnité vient compenser la disparition.
Si une indemnité d’assurance vient compenser la disparition de stock,
elle doit être rattachée aux résultats de l’exercice au cours duquel elle
apparaît comme certaine dans son principe et déterminée dans son mon-
tant 5. Si au contraire l’indemnité compense la disparition d’un élément
de l’actif immobilisé, elle est imposée selon le régime des plus-values 6.
Un régime d’imposition particulier est réservé au capital versé en vertu
d’un contrat d’assurance-vie souscrit sur la tête de l’emprunteur en garan-
tie d’un emprunt contracté pour les besoins de l’exploitation. L’annulation
de la dette de l’exploitant emprunteur consécutive à l’indemnisation de
son créancier constitue un profit imposable 7. Mais l’imposition de ce pro-
fit peut être répartie, par parts égales, sur l’exercice de sa réalisation et sur
les quatre exercices suivants (CGI, art. 38 quater).
149 Les indemnités d’expropriation ¸ S'agissant généralement d'expro-
priation immobilière, les indemnités d'expropriation viennent compenser
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la « sortie » d'un élément de l'actif immobilisé, aussi le profit dégagé par
la perception d'une telle indemnité est imposable selon le régime des
plus-values 1. Cependant, si une indemnité autre que celle destinée à
compenser la perte de la valeur du bien était allouée à l’entreprise (ex.
une indemnité pour transfert ou remontage des installations ou une
indemnité destinée à compenser une perte de recette), cette indemnité
devrait être rattachée au bénéfice d’exploitation.
§ 4. Les subventions
151 Le principe d’imposition ¸ Toutes les subventions reçues par l'entre-
prise sont imposables puisque conformément à l'article 38-2 du CGI, elles
entraînent une augmentation de l'actif net.
L’imposition est indépendante de l’auteur de la subvention. Il est indif-
férent que la subvention soit servie par une personne privée ou par une
personne publique. L’imposition est également indépendante de la qua-
lification de l’aide financière. Ainsi, les « avances à fonds perdus » que
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les compagnies pétrolières versent parfois au nouvel exploitant d’une sta-
tion-service sont imposables puisqu’elles constituent, en réalité, une aide
financière définitive représentative d’une subvention.
Le seul critère de l’imposition est donc le caractère définitif de la
subvention. Si la subvention n’est, en réalité, qu’une simple avance rem-
boursable ultérieurement, elle doit s’analyser en prêt de telle sorte que
l’entreprise n’est pas imposée sur son montant. En effet, à l’inscription
de la recette à l’actif correspond l’inscription au passif d’une dette d’un
montant équivalent.
Malgré tout, si le remboursement ultérieur n’est pas immédiatement
acquis, mais dépend, par exemple, des perspectives de bénéfices à venir, le
profit correspondant à la subvention serait immédiatement taxable. Ainsi
serait-ce le cas d’un abandon de créance assorti d’une clause de retour à
meilleure fortune.
Quant aux subventions assorties d’une condition, leur imposition
dépend de la nature de la condition.
Si la subvention est accordée sous condition suspensive, c’est-à-dire que
l’entreprise bénéficiaire doit satisfaire à certaines conditions pour l’obtenir,
la subvention ne peut être considérée comme une créance acquise ; elle n’est
dès lors imposable qu’à la date où les conditions requises auront été réalisées.
Si le versement de la subvention est assorti d’une clause résolutoire qui
prévoirait, par exemple, son remboursement en cas de non-respect de cer-
tains engagements, la subvention est considérée comme immédiatement
acquise de telle sorte que son montant doit être compris dans le résultat
de l’exercice en cours à la date du versement.
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ne sont pas imposées comme le bénéfice d’exploitation proprement dit.
Elles bénéficient d’un échelonnement de l’imposition ; sauf évidem-
ment, la faculté pour l’entreprise de préférer une imposition immé-
diate (par exemple, pour utiliser des déficits antérieurs qui ne seraient
plus reportables).
Le régime de l’article 42 septies du CGI prévoit que si la subvention est
destinée au financement de biens amortissables, elle peut au choix de
l’entreprise être imposée immédiatement ou être rapportée aux résultats
des exercices suivants celui du versement de la subvention, à concurrence
du montant des amortissements pratiqués sur les biens acquis à l’aide de
ces subventions.
Si la subvention a financé l’acquisition de biens non amortissables, elle
doit être rapportée par parts égales aux résultats des années durant les-
quelles ces biens sont inaliénables ou, à défaut de clause d’inaliénabilité,
aux résultats des dix années suivant celle de l’attribution de la subvention.
En cas de cession des immobilisations subventionnées, avant la fin de
la période d’échelonnement, la fraction de la subvention non encore rap-
portée aux bases de l’impôt est comprise dans les résultats de l’exercice au
cours duquel les biens concernés sont cédés.
1. Il convient de rappeler que les biens inscrits au bilan mais non affectés à l’exploitation
généreront depuis 2012 une plus-value imposable non selon le régime des plus-values profes-
sionnelles, mais par application du régime des plus-values de particuliers. Cependant, les plus-
values réalisées du fait de la cession d’un bien inscrit au bilan mais non affecté à l’exploitation
pourront être imposées selon le régime des plus-values professionnelles à hauteur des amortis-
sements qui ont pu être déduits du résultat professionnel. À l’inverse, l’application du régime
des plus et moins-values professionnelles n’exige pas l’inscription du bien cédé au bilan (CE
23 déc. 2016, 9e et 10e ch., n° 375746, Sté Gap Gemini, Dr. fisc. 2017, n° 2, act. 22, à propos des
titres d’une SCI non inscrits au bilan de la société holding).
158 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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Mais une telle justification ne peut concerner que les biens amortis-
sables et d’autre part, elle n’est valable qu’autant que les prix et la monnaie
restent stables. En période de dépréciation monétaire, le profit révélé par la
cession d’un élément de l’actif immobilisé n’est ni un gain, ni un amortis-
sement exagéré, il provient simplement de la dévaluation de la monnaie.
Son imposition est alors anormale.
Ces considérations contradictoires expliquent le régime actuel du prin-
cipe de l’imposition des plus-values corrigé par son aménagement en
fonction de la durée de détention du bien qui amène à distinguer les plus-
values à long terme et les plus-values à court terme 1.
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professionnel la transfère par là dans son patrimoine privé 1. La réalisa-
tion de la plus-value est effective dès l’accord sur la chose et sur le prix 2. Il
est alors susceptible d’être imposé sur la plus-value constatée au moment
de ce retrait d’actif 3.
156 Les plus-values latentes ¸ Le fait générateur étant la cession de l'immo-
bilisation, il en résulte que les plus-values latentes ne sont pas impo-
sées. Lorsque la valeur réelle d'une immobilisation est supérieure à sa
valeur comptable, conformément aux exigences de prudence de la comp-
tabilité, l'entreprise s'abstient de constater cette augmentation de valeur.
L'absence de modification comptable explique l'absence d'imposition. Il
en serait autrement si l'entreprise constatait en comptabilité cette modi-
fication de valeur. La réévaluation du bilan constaterait alors une plus-
value taxable qui jusqu'alors était latente.
a. La valeur de cession
157 Cession à titre onéreux ¸ Lorsque la cession est faite à titre onéreux, la
valeur de cession est exprimée dans l'acte sous la forme généralement du
prix pour la vente 4 ou de la valeur du bien remis en contrepartie (droits
sociaux au cas d’apport 5, autres biens en cas d’échange 6). Mais la valeur
de cession peut aussi être exprimée par l’indemnité perçue en cas d’expro-
priation de l’immobilisation ou de résiliation d’un bail 7. L’administration
n’est pas tenue par la valeur de cession indiquée par les parties de telle
sorte que si le « prix » est anormalement bas, elle peut retenir la valeur
1. Il y a retrait d’actif dès lors que l’immobilisation ne figure plus au bilan de l’entreprise
(CE 31 janv. 2001, 8e et 3e ss-sect., no 209840, SARL Polygone, Dr. fisc. 2001, no 29, comm. 687).
2. CE 7 juill. 2000, 3e et 8e ss-sect., M. Fernandez, no 208-508, Dr. fisc. 2001, no 11, comm.
220. – CE 26 janv. 2010 no 312470, BF Lefebvre 4/2011, inf. 377.
3. Les plus-values constatées à l’occasion de la sortie de l’actif professionnel de ces éléments
d’actif sont imposables au titre de l’exercice clos (CE 28 déc. 2007, 3e et 8e ss-sect., Vuarand,
n 271895, RJF 3/2008, no 270).
o
4. Lorsqu’une entreprise cède les parts d’une société de personnes déficitaire et, ce faisant,
se trouve libérée des dettes sociales correspondant aux déficits antérieurement déduits par elle,
le montant des dettes constitue un complément de prix de cession soumis au régime des plus-
values (CE 17 avr. 1991, 7e et 9e ss-sect., no 62.001, RJF 6/91, no 740).
5. CE 10 janv. 2007, 10e et 9e ss-sect., no 267012, Bon, RJF 4/07, no 434.
6. CE 3 déc. 1975, 7e et 8e ss-sect., no 89412, Dr. fisc. 1976, no 13-14, comm. 467, concl.
D. Fabre.
7. CE 23 févr. 2000, 9e et 10e ss-sect., no 162659, SA Seine-et-Oise Auto, Dr. fisc. 2000, no 26,
comm. 529. – CE 8 juill. 2009, 10e et 9e ss-sect., no 279018, M. Dufis, Dr. fisc. 2009, no 37,
comm. 456, concl. J. Burguburu.
160 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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réelle 1. Les frais inhérents à la cession, comme les commissions d’inter-
médiaire ou les honoraires versés à des intermédiaires intervenant dans
la conclusion de la vente viennent en diminution du prix de cession 2. Au
contraire, les charges préparatoires à la cession, telles que des honoraires
d’expertise et d’évaluation des éléments cédés, constituent des charges
d’exploitation 3.
En cas de cession d’un élément de l’actif immobilisé dont le prix est
payable à terme, la plus-value de cession imposable doit être déterminée
en fonction de la valeur nominale assignée à l’élément cédé dans l’acte
de cession lorsque la créance correspondant à la partie du prix de ces-
sion dont le paiement est différé est productive d’intérêts. En revanche,
lorsqu’il n’est pas stipulé d’intérêt au profit du vendeur, la créance née en
contrepartie de l’élément cédé peut être estimée à sa valeur actuelle à la
date de clôture de l’exercice au cours duquel la cession a été réalisée 4.
158 Cession à titre gratuit ¸ Lorsque le fait générateur de la plus-value est
une cession à titre gratuit, la valeur de cession est également la valeur
réelle de l'immobilisation cédée. Cette valeur est, en principe, déterminée
par les parties dans l'acte (ne serait-ce que pour les nécessités de l'enre-
gistrement) sinon, ainsi que dans le cas où la valeur déclarée est extrême-
ment faible, la valeur réelle retenue sera la valeur vénale, c'est-à-dire le
prix qui serait obtenu à l'occasion de cessions qui interviendraient dans
des conditions de jeu normal de l'offre et de la demande.
b. La valeur comptable
160 Les principes ¸ La valeur comptable est en principe la valeur pour
laquelle le bien a été inscrit au bilan, c'est-à-dire le prix de revient.
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La valeur d'origine peut être égale à zéro et donc la plus-value est de
l'intégralité du prix de cession lorsque le bien (une clientèle, par exemple)
a été créé et non acquis 1. Le prix de revient est égal au coût réel d’achat
ou de production (pour les biens produits par l’entreprise) auquel sont
ajoutés les frais accessoires. Selon l’article 38 quinquies de l’annexe III, il
s’agit notamment des frais de transport, des droits de douane ainsi que
des frais d’installation et de montage. Les immobilisations acquises à titre
gratuit sont inscrites au bilan pour leur valeur vénale 2. En l’absence de
contrepartie au passif, un profit imposable doit être constaté.
Lorsque le bien est amortissable, le deuxième élément de compa-
raison pour le calcul de la plus-value est la valeur comptable nette,
c’est-à-dire le prix de revient diminué du montant des amortissements
(valeur résiduelle) 3.
Lorsque l’amortissement a été irrégulièrement différé ou lorsque, excep-
tionnellement, il n’est pas fiscalement déductible (biens somptuaires par
exemple), il convient, pour le calcul des plus-values à court terme, de
rajouter à la plus-value résultant de la comptabilité, le montant des amor-
tissements irrégulièrement différés ou exclus du droit à déduction. Cette
disposition s’explique par le souci d’éviter que l’entreprise ne rattrape au
moment de la cession l’avantage qu’elle avait perdu ou qui lui avait été
refusé au niveau de l’amortissement.
La valeur comptable nette peut être influencée par les règles relatives
à la régularisation de TVA. Dans ce cas, la valeur comptable nette est
augmentée de la TVA initialement déduite et reversée, ce qui a pour consé-
quence de diminuer le montant de la plus-value.
C’est toujours la valeur comptable nette qui doit être retenue pour le
calcul de la plus ou moins values ; même dans l’hypothèse où une provi-
sion pour dépréciation aurait été constituée concernant l’immobilisation
cédée. En effet, il convient alors de réintégrer, au moment de la cession, la
provision pour dépréciation, devenue sans objet. En contrepartie, le calcul
de la plus ou moins value se fait à partir de la valeur comptable, de telle
sorte que la cession dégagera, en l’espèce, une moins-value. Cette façon de
procéder permet d’éviter qu’une moins-value à long terme soit indirecte-
ment déduite du bénéfice imposable au taux normal.
1. CE 16 mai 1990, no 88782 et 95932, Dr. fisc. 1990, no 48, comm. 2209 ; RJF 1990, no 825.
2. CGI, ann. III, art. 38 quinquies.
3. Il convient de tenir compte de la totalité des amortissements pratiqués par l’entreprise,
même ceux qui ont été pratiqués au cours d’exercices pour lesquels l’entreprise n’a pas été
imposée (CE 30 mars 2007, 10e et 9e ss-sect., no 277718, Sté Angle Vert, Dr. fisc. no 28, 12 juill.
2007, comm. 728 ; RJF 6/07, no 659).
162 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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professionnel ou de le laisser dans le patrimoine privé, l'article 151 sep-
ties B du CGI organise un abattement pour durée de détention.
L’ensemble des entreprises assujetties à l’IR, y compris les sociétés de
personnes soumises à cet impôt, ayant une activité commerciale, indus-
trielle, artisanale, libérale ou agricole peuvent bénéficier de cette mesure.
Toute plus-value ouvre droit à l’abattement, qu’elle soit réalisée pendant
l’exploitation ou lors de la transmission de l’entreprise. Il en est de même
de la plus-value réalisée à l’occasion d’un retrait d’actif. La seule condi-
tion est que l’immeuble soit affecté à l’activité, ce qui suppose pour les
entreprises commerciales ou industrielles son inscription au bilan et que
l’immeuble constitue un moyen permanent d’exploitation 1. Sont ainsi
exclus du bénéfice de la mesure les immeubles de placement ainsi que les
immeubles que l’acquéreur destine à la démolition 2.
Compte tenu de son mécanisme, l’abattement ne s’applique qu’aux
plus-values immobilières à long terme 3. Les plus-values sont en effet,
imposées après application d’un abattement de 10 % par année de déten-
tion, au-delà de la cinquième. Ainsi, au terme de quinze années de déten-
tion, la plus-value est totalement exonérée.
Une fois l’abattement appliqué, la plus-value ne se distingue pas des
autres plus-values à long terme réalisées par l’entreprise. Ainsi, le montant
net de la plus-value peut être compensé, le cas échéant, avec les moins-
values à long terme réalisées par l’entreprise.
Le bénéfice de l’abattement peut se cumuler avec d’autres régimes de
faveur qu’il s’agisse d’exonération partielle des plus-values ou de régime
d’étalement ou de report.
1. L’abattement s’applique même lorsque le fonds est donné en location-gérance (TA Rouen
12 avr. 2002, 2e ch., no 1002785 et 1003464, Seguin, no 894, RJF 10/12).
2. CE 4 mai 2016, 10e et 9e ss-sect., n° 386773, Mme Ducruet, Dr. fisc. 2016, n° 26, comm.
389, concl. A. Bretonneau ; RJF 7/16, n° 599.
3. Bien que réalisées sur une longue période de temps, les plus-values à court terme sur
biens amortissables, dans la limite de l’amortissement pratiqué ne bénéficient pas de cette
mesure.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 163
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des plus-values des particuliers et de celui des plus-values professionnelles
en fonction du temps passé dans chacun des deux patrimoines 1.
163 Cession d’un élément d’actif ayant figuré dans le patrimoine
privé ¸ En application de l'article 151 sexies du CGI, la cession d’un élé-
ment d’actif d’une entreprise ayant préalablement fait partie du patri-
moine privé de l’exploitant conduit à déterminer une plus-value privée et
une plus-value professionnelle. L’imposition des plus-values n’intervient
qu’au moment de la cession effective du bien et non lors du passage du
patrimoine privé au patrimoine professionel.
La plus-value correspondant à la période de détention dans le patri-
moine privé est imposée selon les règles des plus-values des particuliers.
Elle est déterminée par différence entre la valeur réelle du bien au jour de
son entrée dans le patrimoine professionnel et le prix d’acquisition ou en
cas d’acquisition à titre gratuit, la valeur retenue pour la détermination
des droits de mutation. Quant à la plus-value correspondant à la période
courant du moment de l’inscription au bilan jusqu’à la date de la cession
ou du retrait d’actif qui suit le sort des bénéfices professionnels, elle est
égale à la différence entre le prix de cession du bien (ou sa valeur réelle au
jour du retrait de l’actif) et sa valeur d’inscription au bilan.
164 Cession d’un bien du patrimoine privé ayant préalablement
figuré à l’actif d’une entreprise ¸ La cession d'un bien du patrimoine
privé de l'exploitant ayant préalablement figuré dans le patrimoine pro-
fessionnel conduit comme dans l'hypothèse inverse à déterminer deux
plus-values distinctes : une plus-value professionnelle à la date du retrait
du patrimoine professionnel et une plus-value « privée » à la date de la
cession du bien.
La plus ou moins-value relative à la période pendant laquelle le bien
a figuré dans le patrimoine professionnel est imposée lors du retrait du
patrimoine professionnel selon les règles propres aux plus-values profes-
sionnelles 2. Par la suite, pour la partie de la plus-value relevant du régime
des particuliers, le prix d’acquisition permettant le calcul de la plus-value
s’entend de la valeur réelle du bien au jour du retrait de l’actif. En effet,
le transfert d’un bien figurant à l’actif d’une entreprise individuelle dans
le patrimoine privé de l’exploitant ne constitue pas une acquisition à titre
onéreux, au sens des dispositions relatives à l’imposition des plus-values
privées. Dès lors, la plus-value réalisée à l’occasion de la cession ultérieure
à titre onéreux de ce bien est calculée sur la base de sa valeur vénale au
jour de son transfert dans le patrimoine privé et non d’après sa valeur
comptable à cette date 3.
1. BOI-RFPI-PVI-10-20 no 120.
2. Bien évidemment les régimes de faveur des articles 151 septies, 151 septies A ou 238 quin-
decies du CGI peuvent trouver application.
3. Paris 14 déc. 1993, 2e ch., no 91-417, Zejma, RJF 4/94, no 426.
164 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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B. Le régime fiscal des plus et moins-values
1. Le régime général
165 Présentation ¸ Selon l'article 39 duodecies du CGI les plus-values prove-
nant de la cession d’éléments de l’actif immobilisé sont soumises à des
régimes distincts suivant qu’elles sont réalisées à court ou à long terme.
Il convient donc de répartir les plus-values entre des deux catégories afin
d’en dégager le régime d’imposition.
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résiduelle) soit 14 000 – 13 000 = 1 000 euros. Cette plus-value est consi-
dérée en totalité comme une plus-value à court terme, malgré la durée
de détention du bien supérieure à deux ans, car elle correspond à des
amortissements antérieurs.
Si l’immobilisation est vendue 16 000 euros, la plus-value réalisée est
alors de 3 000 euros (16 000 – 13 000). Cette plus-value est considérée
à concurrence de 2 000 euros (amortissements antérieurs) comme une
plus-value à court terme et pour le surplus, soit 1 000 euros, comme une
plus-value à long terme.
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et les moins-values de même durée 1. La compensation avec des défi-
cits constitue une décision de gestion. Elle procure un avantage de
trésorerie immédiat et présente principalement un intérêt lorsque le
contribuable risque de ne pouvoir imputer ses déficits sur son revenu
global avant l’expiration du délai de report déficitaire, faute de reve-
nus suffisants. Lorsque l’entreprise a pratiqué une telle compensation,
l’administration peut imputer d’office sur le déficit le rehaussement
de la plus-value 2. Ainsi la compensation entre plus et moins-values de
même catégorie permet de dégager un solde positif ou négatif qui fait
apparaître une plus-value nette ou une moins-value nette. C’est cette
plus ou moins-value nette qui est prise en considération pour la taxa-
tion des plus-values.
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d’apport de réintégrer dans ses résultats imposables les plus-values à court
terme en cause comme aurait dû le faire l’entreprise apporteuse 1.
170 La moins-value nette à court terme ¸ Lorsque la compensation fait
apparaître une moins-value nette à court terme, elle s'imputera égale-
ment sur les résultats de l'exercice de telle sorte qu'elle sera déductible du
bénéfice imposable.
S’il n’y a pas de bénéfice ou si le bénéfice réalisé est insuffisant pour
l’imputation de la totalité de la moins-value, cette moins-value constitue
un déficit qui est reportable dans les conditions de droit commun.
1. À l’inverse de l’étalement sur trois ans, le bénéfice de l’étalement particulier sur une plus
longue période est maintenu même lorsque la société bénéficiaire de l’apport est soumise à
l’impôt sur les sociétés.
2. CGI, art. 39 quindecies. Compte tenu de la contribution sociale généralisée et des divers
prélèvements sociaux, soit un total de 17,2 %, le taux global d’imposition s’établit à 30 %. Anté-
rieurement à 2017, le taux d’imposition de la plus-value à long terme était de 16 %, auxquels
s’ajoutait les prélèvements sociaux (15,5 %) soit un total de 31,50 %.
3. L’imputation de plus-values à long terme sur un déficit ordinaire constitue une décision
de gestion relevant du seul contribuable (CE 25 févr. 2011, 8e et 3e ss-sect., no 338715, Sté Euro-
gim, RJF 5/11, no 550, concl. N. Escaut, BDCF 5/11, no 55).
168 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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moins-value n'est pas déductible des résultats imposables au taux nor-
mal ; elle peut simplement être déduite des plus-values à long terme de
même catégorie qui apparaîtront au cours des dix exercices suivants (CGI,
art. 39 quindecies).
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constitutives d’un montage artificiel dont le but serait de contourner la
législation fiscale française et, d’autre part, créent une valeur ajoutée du
chef de cette entreprise sur l’ensemble de la période d’exploitation de la
licence concédée. Cette preuve est établie dans le cadre d’une documen-
tation présentant l’économie générale de l’exploitation de la licence, dans
des conditions définies par décret ;
– ou s’ils ont été acquis à titre onéreux depuis moins de deux ans.
Pour que le régime de faveur puisse s’appliquer, la concession doit
mettre le concessionnaire à même d’exploiter utilement, pour son propre
compte, le brevet, les procédés ou les techniques concédés 1. En revanche,
il n’est pas subordonné à la condition que le bénéficiaire de la concession
soit à même de vendre les produits issus de ces droits, procédés et tech-
niques concédés 2.
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La plus-value est totalement exonérée lorsque la moyenne des recettes
de l’entreprise n’excède pas au cours des deux années civiles qui pré-
cèdent la date de clôture de l’exercice de réalisation, 250 000 euros pour
les entreprises de vente et 90 000 euros pour les entreprises prestataires
de services.
En revanche, elle est totalement imposée lorsque le chiffre d’affaires de
référence est supérieur à 350 000 euros pour les entreprises de vente et à
126 000 euros pour les prestataires de services.
Quant aux entreprises dont le chiffre d’affaires est situé entre les deux
limites, le montant imposable de la plus-value est déterminé par un taux
variable selon l’activité de l’entreprise. Pour les entreprises de vente le
taux est égal au rapport entre d’une part la différence entre le montant
des recettes de référence et 250 000 euros et d’autre part le montant
de 100 000 euros. Pour les entreprises de services, le taux est égal au
rapport entre d’une part la différence entre le montant des recettes et
90 000 euros et d’autre part le montant de 36 000 euros.
Ainsi pour une entreprise de vente dont le chiffre d’affaires de référence est
de 310 000 euros, le taux applicable est de (310 000 — 250 000)/100 000,
soit 60 %. Si la plus-value réalisée est de 80 000 euros, le montant de la
plus-value imposable sera de 80 000 × 60 % = 48 000 euros.
De même, pour une entreprise de services dont le chiffre d’affaires
de référence serait de 100 800 euros, le taux légal est de (100 800 —
90 000)/36 000, soit 30 %. Pour une plus-value de 80 000 euros, la plus-
value imposable serait donc de 24 000 euros.
Ainsi, plus l’entreprise est importante, plus la part de la plus-value
imposable est grande. L’avantage procuré par le régime légal est, en effet,
justifié par le désir de faciliter la transmission des petites entreprises 1.
Il est à noter que les limites d’exonération sont exprimées hors taxes et
que le régime fiscal de l’entreprise est indifférent (micro, réel sur option ou
réel obligatoire) 2. Lorsqu’une plus-value est réalisée par une société de per-
sonne, le respect des seuils d’exonération s’apprécie au niveau de la société 3.
175 Les conditions de l’exonération ¸ Le bénéfice de l'exonération est sou-
mis à certaines conditions. Le cédant doit avoir personnellement par-
ticipé de façon directe et continue à l'exploitation. Ainsi, sont exclues
1. Selon le ministre des Finances qui s’exprimait alors que les seuils d’exonération étaient
plus bas, plus de la moitié des artisans et des commerçants étaient déjà susceptibles de bénéfi-
cier du régime d’exonération des plus-values (Rép. min. éco. no 33159 à M. Myard, JOAN Q
no 47, 22 nov. 1999, p. 6701).
2. En cas de pluralité d’activités, il y a lieu pour le calcul des plafonds de chiffre d’affaires de
faire masse des chiffres d’affaires des diverses activités exploitées lorsqu’elles constituent en
fait une entreprise unique (CAA Bordeaux, 3e ch., 28 déc. 1995, no 94-64, Dr. fisc. 1996, no 38,
comm. 1097). La globalisation des recettes est effectuée par catégories de revenus (CGI,
art. 151 septies-IV). Il n’y a cependant pas lieu d’ajouter aux recettes du contribuable, celles de
la société anonyme qu’il dirige (CAA Bordeaux, 4e ch., 16 mai 2002, no 98-350, Dr. fisc. 2003,
no 21, comm. 397).
3. CGI art. 151 septies, IV, dernier al.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 171
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du dispositif les plus-values réalisées en cas de cession d'un fonds de
commerce donné en location-gérance 1. De même, le nu-propriétaire
indivis d’un fonds de commerce qui n’a pas la qualité d’exploitant ne peut
pas bénéficier de l’exonération de la plus-value réalisée à l’occasion de la
cession d’un bien affecté à l’exploitation du fonds 2. L’activité profession-
nelle doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans. Mais l’exonération
s’applique sans qu’il y ait lieu de rechercher si l’élément cédé a lui-même
été acquis ou créé depuis plus ou moins de cinq ans 3. La condition d’exer-
cice pendant cinq ans est écartée lorsque les plus-values sont réalisées à la
suite d’une expropriation ou de la perception d’indemnité d’assurance.
Si cette condition tenant à la durée de l’exploitation n’est pas remplie,
la plus-value sera imposable selon le droit commun des plus-values profes-
sionnelles. Il est à noter que l’activité peut avoir été successivement exercée
en société de personnes et à titre individuel 4 ou avoir été commencée en
qualité de locataire gérant et poursuivie en tant que propriétaire 5. De la
même façon, l’activité peut avoir été exercée dans des localités différentes 6.
Une autre condition de l’exonération est qu’il ne doit pas s’agir de
plus-values afférentes à des biens entrant dans le champ d’application de
l’article 1594-0-G, A du CGI. Sont visées les cessions d’immeubles entrant
dans le champ d’application de la TVA et exonérées de droit d’enregis-
trement en raison d’un engagement de construire pris par l’acquéreur
assujetti à la TVA. Dans un tel cas, la plus-value est imposable selon
le droit commun des plus-values professionnelles. L’hypothèse concerne
les terrains à bâtir, les immeubles destinés à être remis à neuf ou les
immeubles non achevés, lorsque l’acquéreur assujetti prend l’engagement
de construire ci-dessus. Par suite, ce n’est pas la totalité des cessions de
terrains à bâtir qui est visée. Par exemple, la cession d’un terrain à bâtir à
un particulier bénéficiera du dispositif d’exonération.
1. Paris 9 nov. 2011, 2e ch., Min. c/ Martin, no 18PA055595, RJF 5/12, no 444.
2. CE 28 avr. 2006, Min. c/ Mmes Cousin et Soulad, no 278857, Dr. fisc. 2006, no 40, comm.
632 ; RJF 7/06, no 887 ; concl. F. Séners, BDCF 7/06, no 91. – CAA Bordeaux 27 févr. 2006,
5e ch., no 02-2098, Crampe, RJF 7/06, no 888.
3. Rép. min. JOAN CR 1980, p. 4322. BOI-BIC-PVMV-40-10-10-20.
4. CE 17 mai 1995, 9e et 8e ss-sect., no 136878, Dr. fisc. 1995, no 42, comm. 1964. Elle peut de
même avoir été exercée successivement dans plusieurs sociétés de personnes (CE 13 janv. 2010,
8e et 3e ss-sect., no 301985, M. Bouclon, Dr. fisc. 2010, no 13, comm. 259, RJF 4/10, no 350).
5. TA Grenoble 1er févr. 1996, no 94-411 et 95-2975, RJF 5/96, 537.
6. CE 17 mai 1995 no 136878, RJF 7/95, 819.
172 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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(apport d’une entreprise individuelle à une société) et 151 octies B
(apports de titres) du CGI. L’option pour l’un de ces régimes est donc
exclusive de la présente exonération.
En revanche, le régime de l’article 151 septies du CGI peut se cumuler
avec le régime de l’article 151 septies A qui permet d’exonérer les plus-
values réalisées à l’occasion du départ à la retraite de l’exploitant ainsi
qu’avec le régime de l’article 151 septies B qui aménage un abattement
pour durée de détention sur les plus-values à long terme afférentes à des
immeubles d’exploitation 1.
1. BOI-BIC-PVMV-40-10-10 no 10.
2. La réévaluation libre des bilans est une décision de gestion opposable à l’entreprise qui ne
pourrait en écarter les conséquences en invoquant la circonstance qu’elle les aurait ignorées
(CE 23 janv. 1985, 8e et 9e ss-sect., no 52.349, Dr. fisc. 16, no 28, comm. 1319. – CE SCI 10 rue de
l’église, 8e et 3e ss-sect., 4 juin 2008, no 277560, Dr. fisc. 2008, no 28, comm. 406, concl.
N. Escaut ; RJF 10/2008, no 1046).
3. C. com., art. L. 123-18.
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178 L’intérêt de la réévaluation libre ¸ Malgré cette imposition, les entre-
prises peuvent avoir intérêt à pratiquer la réévaluation libre car elle leur
permet ultérieurement de procéder à des amortissements plus importants
qui viendront diminuer les résultats des exercices postérieurs. En effet,
les amortissements sont alors calculés sur les valeurs réévaluées. Ainsi,
en choisissant l'exercice de réévaluation, l'entreprise pourra même jouer
de la progressivité de l'impôt. Si elle prévoit un accroissement de son
bénéfice, elle pourra réévaluer lors d'un exercice faiblement bénéficiaire
de façon à ce que la plus-value soit imposée à un taux réduit ; ensuite, elle
pourra pratiquer des amortissements supplémentaires lors d'exercices à
importants bénéfices qui seraient imposés aux tranches supérieures de
l'impôt sur le revenu. D'autant qu'en cas de cession, les plus et moins-
values se calculent sur les bases réévaluées 1.
On remarquera, malgré tout, que très peu d’entreprises choisissent de
recourir à cette faculté 2. C’est pourquoi, la réévaluation des bilans dans
la neutralité fiscale est une revendication sans cesse reprise. Elle fut par-
tiellement satisfaite en 1977 et 1978, mais ce ne furent que des lois excep-
tionnelles et le principe reste celui de la réévaluation libre des bilans avec
toutes ses conséquences fiscales.
179 Bibliographie ¸
M. COzian, « Les méandres de la logique fiscale ou comment jongler avec la fiscalité
des indemnités », Dr. fisc. 2001, no 17, p. 705.
V. Daumas, « Conséquences fiscales de la réévaluation libre d’un élément d’actif : les
infortunes fiscales de la vertu comptable », RJF 3/2009, p. 187.
Ch. PradayrOL et Ph. thiriOt, « Les incidences fiscales des subventions », JCP N
2001. 558.
1. BOI-BIC-PVMV-40-10-60-20 no 40.
2. Mis à part le cas de l’entreprise déficitaire lorsque c’est la seule façon d’utiliser un déficit
périssable.
3. À compter de 2012, l’article 155-II du CGI tire toutes les conséquences de ce principe en
décidant que l’ensemble des charges afférentes à un actif inscrit au bilan mais non affecté à
l’exploitation ne sont pas déductibles du résultat professionnel sauf si les produits qui ne pro-
viennent pas de l’exercice de l’activité professionnelle sont accessoires par rapport à l’activité
de l’entreprise.
174 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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les frais et charges engagés déduits par l’entreprise et d’éliminer ceux
qui n’ont pas été faits pour sa gestion et même pour sa gestion normale,
ajoute la jurisprudence du Conseil d’État.
En application de ces principes, l’article 39 donne une énumération des
frais déductibles. Ce n’est qu’une énumération indicative et non limitative
devant l’impossibilité de prévoir la variété des frais et charges que peut
avoir à supporter une entreprise. Il est cependant certain, qu’en aucun cas,
le déficit d’un exercice précédent ne peut être considéré comme une charge
de l’exercice actuel et donc être déductible au titre de cet exercice. Ceci
tient au fait que l’imposition des personnes physiques se fait globalement
sans qu’il y ait lieu de considérer séparément chaque catégorie de revenus.
Si bien qu’en cas de déficit d’une entreprise industrielle ou commerciale
individuelle, il y a lieu d’imputer le déficit sur les résultats bénéficiaires des
autres catégories de revenus 1.
Certes, si les résultats bénéficiaires ne sont pas suffisants, l’excédent
de déficit pourra être reporté sur le revenu global des années suivantes
jusqu’à la sixième inclusivement ; mais il s’agit d’une imputation sur
le revenu « global » des années suivantes et donc en aucun cas, le défi-
cit d’un exercice ne vient en déduction des BIC réalisés au cours d’un
exercice postérieur 2.
181 La variété des frais déductibles ¸ Les frais et charges venant en déduc-
tion du bénéfice imposable peuvent être regroupés en quatre rubriques :
– les frais courants exposés au cours de l’exercice ; ce sont les frais
généraux ;
– la dépréciation des éléments d’actif qui est due à leur utilisation ; ce
sont les amortissements ;
– les autres dépréciations des éléments d’actif ;
– les pertes et charges qui seront supportées ultérieurement, mais qui
sont prises en charge dès cet exercice ; ce sont les provisions.
1. La même règle est applicable aux associés des sociétés soumises à l’IR (CE 9 nov. 1981,
no 15186, RJF 1982, no 1, 63).
2. Par exception, lorsque le déficit est généré par une activité non professionnelle, il n’est
pas imputable sur le revenu global, mais ne pourrait être déduit que des bénéfices de même
nature réalisés au titre de la même année ou des six années suivantes (BOI-BIC-DEF-10
no 1).
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soumises au même régime fiscal, il convient de bien les répartir entre
les diverses catégories de charges déductibles. À cet égard la distinction
des frais généraux et des amortissements est fondamentale car les frais
généraux sont immédiatement et intégralement déductibles alors que
les amortissements ne donnent lieu qu'à une déduction répartie sur
plusieurs exercices.
La distinction de ces deux catégories de dépenses repose sur un principe
extrêmement net : une dépense faite pour l’achat d’une immobilisation et
contribuant donc à l’accroissement du patrimoine de l’entreprise n’est pas
immédiatement déductible, mais peut être, dans certains cas, amortie 1.
La dépense faite pour l’acquisition d’une immobilisation doit donc être
amortie alors que celle faite pour l’acquisition d’une valeur d’exploitation
peut être immédiatement déduite 2.
En conséquence, les biens ou droits corporels 3 ou incorporels 4 acquis
pour une utilisation d’une durée supérieure à un an, constituent des
immobilisations amortissables et non des charges déductibles 5. Il est
admis que le petit outillage de faible valeur (500 € hors taxes) qui s’use
rapidement, peut être entièrement amorti dès l’année de son acquisi-
tion, ce qui revient à le porter en frais généraux 6. Le seuil de déduction
immédiate est apprécié d’après la valeur unitaire des éléments concernés
de telle sorte qu’une entreprise peut passer en charges l’acquisition d’un
lot de biens identiques à la seule condition que la valeur de chacun d’eux
respecte la limite de 500 €.
En pratique, il est souvent difficile d’apprécier si une charge traduit ou
non une augmentation de l’actif. Sauf dans les cas manifestement abusifs
(notamment lors de manquements exclusifs de bonne foi, erreurs répé-
tées ou graves), l’administration admet de ne pas opposer les dispositions
de l’article 39 B du CGI lorsque l’entreprise a inscrit à tort des éléments
d’actif amortissables en frais généraux 7. Les difficultés se présentent
principalement en ce qui concerne les dépenses concernant un élément
1. CE 30 mai 2012, no 340485, Min. c/ Sté. Tipiak, Dr. fisc. 2012, no 37, comm. 433, concl.
V. Daumas, note P. Fumenier.
2. Les frais liés à l’opération d’acquisition d’une immobilisation (droits de mutation, hono-
raires, commissions, frais d’acte) peuvent au choix de l’entreprise être déduits immédiatement
ou incorporés au prix de revient de l’immobilisation.
3. CE 9 nov. 1990, no 88.226, Dr. fisc. 1991, no 11, comm. 573, concl. J. Arrighi
de Casanova.
4. CE 10 déc. 1982, no 15381, Dr. fisc. 1983, no 23, comm. 1222, concl. J.-F. Verny. – Paris
22 oct. 1992, 3e ch., no 91-895, Dr. fisc. 1994, no 6, comm. 201, concl. M. de Segonzac.
5. La durée d’utilisation supérieure à un an n’est pas en soi un critère de l’amortissement. Il
ne peut y être fait référence que dans la mesure où cette durée démontre l’augmentation de
l’actif. Ainsi, bien que pouvant avoir une durée d’exploitation supérieure à un an les films
publicitaires n’ont aucune valeur patrimoniale et leurs frais de réalisation sont immédiate-
ment déductibles (CE, 8e et 9e ss-sect., 5 juin 1996, no 143819, RJF 1996, no 7).
6. BOI-BIC-CHG-20-30-10 no 10.
7. BOI-BIC-CHG-20-10-10 no 160.
176 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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qui figure déjà dans l’actif immobilisé. Leur solution suppose que soient
posées quelques règles générales amenant à faire des distinctions 1.
• Les dépenses d’entretien et de réparation. Ce sont les dépenses qui
ont pour objet de maintenir les éléments de l’actif en bon état (réfection
des peintures, par exemple) ou de les maintenir en état d’utilisation. Ces
dépenses sont immédiatement déductibles dès lors qu’elles ne consistent
pas dans le remplacement d’un composant. Ainsi, les dépenses de fonc-
tionnement qui n’ont pas pour effet l’acquisition, la construction ou
l’amélioration d’une immobilisation ouvrent droit à déduction immédiate
sans qu’importe le fait qu’elles augmentent la valeur de l’actif sur lequel
elles sont réalisées 2. Traditionnellement, les dépenses d’entretien et de
réparation sont déductibles même si elles entraînent le remplacement
d’un élément ancien par un élément nouveau (échange standard d’un
moteur, par exemple 3). Cependant, il convient de tenir compte des nou-
velles normes comptables qui prévoient l’amortissement par composants
de telle sorte que, dans cette hypothèse, la dépense devra être immobilisée
et l’élément nouveau sera amorti selon son propre plan d’amortissement.
En contrepartie la valeur nette de l’élément remplacé sera comptabilisée
en charges.
• Les dépenses de mise en conformité. L’utilisation d’importants
moyens techniques ou bien l’accueil du public obligent les entreprises à
être en conformité avec les nombreuses normes de sécurité. La mise en
conformité des installations avec ces normes génère bien souvent des
dépenses importantes. Il est admis que les dépenses de travaux de mise
aux normes constituent des charges déductibles dès lors que ces travaux
n’ont pas eu d’effet sur la durée de vie physique des équipements et n’ont
pas prolongé de manière notable leur durée probable d’utilisation, appré-
ciée à la date de leur acquisition 4.
• Les dépenses d’investissement. Il s’agit des dépenses qui modifient
la consistance des immobilisations : agrandissement, rénovation, amé-
nagement, installation, mais aussi consolidation 5. Ces dépenses qui
augmentent la valeur des éléments d’actif, ne sont pas immédiatement
déductibles, mais doivent être amorties. Il en est de même des dépenses de
mise aux normes 6.
1. Sur les principes, voir : CE 6 mai 1985, 7e et 8e ss-sect., no 4.391, Dr. fisc. 1985, no 52,
2313.
2. CE 10 juin 2010, no 312377, RJF 10/10, no 878.
3. CAA Nantes 9 févr. 1994, no 92.784, RJF 10-94, no 1036.
4. CE 23 déc. 2011, 3e et 8e ss-sect., no 327077, Sté Secre Asteel Electronics, Dr. fisc. 2012,
no 11, comm. 189, concl. V. Daumas, note C. Cassan et J. Moisy. – CE 7 mai 2009, 9e ss-sect.,
no 312058, SA Eurotungstène Poudres, Dr. fisc. 2009, no 25, comm. 375, note C. Cassan. –
Contra, Intr. 30 déc. 2005, BOI 4A-13-05. – BOI-BIC-CHG-20-20-20, no 220.
5. Ex. : Paris 22 nov. 1994, 2e ch., no 92-736 et 92-1315, Dr. fisc. 1995, no 37, comm. 1690.
6. Rép. min. éco. et fin. no 43987, JOAN Q, 30 déc. 1996, p. 6874 s. ; Dr. fisc. 1997, no 38,
comm. 958. BOI-BIC-CHG-20-20-20.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 177
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Si l’on perçoit le critère général, l’application pratique n’est pas pour
autant simple. Dans un souci pratique de simplification, l’administration
admet que, quelle que soit la nature de la dépense, les entreprises, puissent
comprendre parmi leurs charges immédiatement déductibles, les maté-
riels et outillages d’une valeur unitaire, hors taxes, inférieure à 500 euros
et les accessoires et mobiliers de bureau d’un prix également inférieur
à 500 euros hors taxes 1. La même tolérance bénéficie aux acquisitions
de logiciels 2.
Depuis la mise en service des nouvelles règles comptables relatives à la
dépréciation et à l’amortissement des actifs prévoyant notamment l’amor-
tissement par composants le critère traditionnel ne concerne plus que les
frais d’entretien.
Les dépenses de remplacement doivent obligatoirement être inscrites
à l’actif indépendamment du point de savoir si le remplacement d’un
composant augmente la valeur ou la durée de vie du bien considéré dans
son ensemble. Ainsi, en cas de frais de réfection d’une toiture, il convient
de les immobiliser distinctement en tant que composant de l’immeuble et
de les amortir sur la durée d’utilisation de la toiture.
• Les dépenses d’accroissement des actifs incorporels. D’une façon
générale, des charges normalement déductibles sont considérées comme
génératrices d’éléments incorporels d’actif, lorsqu’elles permettent à
l’entreprise d’acquérir des droits constituant une source régulière de
profits, dotés d’une pérennité suffisante et susceptible de faire l’objet
d’une cession 3. Ainsi, les redevances versées pour la concession de
droits de la propriété industrielle (licences de brevets, de marques ou de
procédés de fabrication) doivent être immobilisées lorsque le contrat de
concession accorde l’exclusivité, une pérennité suffisante et la cessibilité
des droits concédés 4. Par ailleurs, les droits attachés à certains contrats
(de distribution, de fourniture, de concession, etc.) peuvent également
être assimilés à des éléments de l’actif incorporel s’ils représentent
une source régulière de profits et si l’entreprise peut, dès l’origine,
escompter la poursuite des relations contractuelles pendant une assez
longue période.
183 La date de déduction ¸ Puisque, selon l'article 39-1 du CGI, le béné-
fice net est établi sous déduction de toutes charges, il en résulte, en
combinaison avec le principe de la spécialité des exercices, que les frais
généraux doivent être déduits au moment de la réalisation effective de la
charge 5. Ils doivent donc être déduits des résultats de l’exercice au cours
1. BOI-BIC-CHG-20-30-10.
2. BOI-BIC-CHG-20-30-10, no 40.
3. CE 21 août 1996, no 154488, RJF 10/96, no 1137.
4. Ex. CE 12 févr. 1988, no 62547, RJF 4/88, no 383.
5. CE 29 juill. 1998, no 149517, RJF 10/1998, comm. 1083, concl. Loloum, p. 746.
178 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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duquel la prestation ou le bien correspondant ont été rendus ou livrés.
Ainsi, la charge est immédiatement déductible même si le bénéfice généré
ou escompté de cette dépense ne se réalise et ne sera imposé qu’au cours
d’un exercice ultérieur.
De ces principes, il découle que si une dépense a été effectuée lors d’un
exercice alors que le bien ou le service ne sera fourni que lors de l’exercice
suivant (exemple un loyer payable d’avance), la charge ne pourra être
déduite que du résultat de ce dernier exercice et non des résultats de l’exer-
cice au cours duquel elle a été exposée 1.
Les frais et charges ne peuvent être déduits que des résultats de l’exer-
cice auquel ils sont imputables, c’est-à-dire de l’exercice du fait générateur.
Ils ne peuvent être déduits des résultats d’un exercice autre. Par suite, les
dépenses ne peuvent être admises dans les charges déductibles d’un exer-
cice donné si elles se rapportent à l’exploitation des exercices antérieurs 2.
Aussi, lorsqu’un contribuable a omis, par erreur, de comptabiliser une
charge au titre d’un exercice donné, il ne peut corriger cette erreur en
effectuant la déduction au cours d’un exercice ultérieur. La correction
d’une telle erreur ne peut être obtenue en principe qu’au moyen d’une
réclamation afférente à l’exercice normal de rattachement dans la mesure
où le délai de réclamation n’est pas expiré à la date à laquelle l’entreprise
constate son erreur 3.
1. CE 30 déc. 1998, no 170110, Dr. fisc. 1999, comm. 762, concl. F. Loloum.
2. BOI-BIC-CHG-10-30-10 no 10.
3. CE 25 janv. 1984, 8e et 9e ss-sect., no 34642 et 34643, RJF 3/84 no 274.
4. CE 16 mars 1990, no 68479, Dr. fisc. 1991, no 8, comm. 293, concl. Liebert Champagne.
5. TA Grenoble, 9 mars 1995, no 90-3596, Dr. fisc. 1995, no 29, comm. 158.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 179
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scission, transformation). Les frais d’établissement peuvent être déduits
intégralement des résultats de l’exercice au cours duquel ils sont exposés 1
ou bien être comptabilisés au poste « Frais d’établissement » ; ils doivent
alors être amortis de manière échelonnée sur une période maximum de
cinq ans 2.
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du personnel a été instauré le crédit d’impôt pour la compétitivité et
l’emploi 1. Ce dispositif est supprimé pour les rémunérations versées à
compter du 1er janvier 2019 2.
187 Le salaire de l’exploitant ¸ L'exploitant d'une entreprise individuelle
ne peut s'allouer un salaire en rémunération de son travail, salaire qui
serait déductible du bénéfice imposable. En effet, l'entrepreneur réunirait
sur sa tête les deux qualités d'employeur et de salarié. Or le salariat sup-
pose un lien de subordination 3. D’autant que le bénéfice commercial est
le résultat indissociable du capital et du travail de telle sorte que l’imposi-
tion des BIC taxe à la fois le produit du travail et celui du capital.
S’il est impossible à l’exploitant d’une entreprise individuelle de
comprendre parmi ses charges déductibles un salaire, en revanche, consti-
tuent des charges déductibles les cotisations qu’il verse au titre du régime
de la sécurité sociale. Il en est de même pour les cotisations versées au
titre du régime d’allocations familiales ainsi que des régimes obligatoires
et complémentaires d’allocation-vieillesse (CGI, art. 154 bis). Sont égale-
ment déductibles les cotisations versées pour les assurances complémen-
taires facultatives 4. En contrepartie, les indemnités journalières et les
rentes perçues sont imposables.
La même impossibilité pour l’exploitant de s’accorder un salaire déduc-
tible fiscalement pèse également sur les associés des sociétés qui sont
soumises à l’impôt sur le revenu 5. Le versement des rémunérations aux
dirigeants des sociétés assujetties à l’IR est assimilé à une répartition
du bénéfice.
1. CGI, art. 244 quater C. Tout employeur bénéficie d’un crédit d’impôt de 6 % des rémuné-
rations versées. Le CICE s’impute en priorité sur l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés
dû au titre de l’année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul
du CICE ont été versées. Il peut ensuite être imputé sur les 3 années suivantes. Il est restitué
au-delà de ce délai.
2. L. n° 2017-1837 du 30 déc. 2018 de finances pour 2018, art. 86, JORF n° 305 du 31 déc.
2018 ; FR Lefebvre 1/18, inf. 19, p. 75. La créance issue du CICE pouvant, le cas échéant, être
imputée sur les trois exercices suivants, il en résulte que celle de 2018 subsistant après imputa-
tion sur l’impôt de l’année pourra être utilisée pour le paiement de l’impôt des années 2019,
2020 et 2021.
3. L’absence de dualité de personnes emporte également que la connaissance des revenus
des exploitants individuels est beaucoup plus approximative que celle des traitements et
salaires. Le régime des salariés serait donc inadapté.
4. Seules sont déductibles les cotisations versées pour les assurances mises en place par les
organismes de sécurité sociale ou par des contrats d’assurance groupe. En revanche les contrats
à souscription individuelle ne donnent pas droit à déduction.
5. CE 9 nov. 1996, no 62900, Lebon 597. – CE 28 oct. 1981, no 22280, Dr. fisc. 1982, no 8,
comm. 322, concl. Rivière et no 26, comm. 1369 ; RJF 12/1981, comm. 1033.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 181
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S’il est collaborateur, et en tant que tel mentionné au registre du
commerce et des sociétés, le conjoint se trouve exercer le commerce en
collaboration avec le commerçant, sur un pied d’égalité avec lui, de telle
sorte que, comme pour le commerçant, il ne peut être question de lui
octroyer un salaire fiscalement déductible. D’ailleurs, le propre du conjoint
collaborateur est de n’être pas rémunéré. En revanche, l’article 154 bis du
CGI permet la déduction du bénéfice imposable des cotisations sociales
versées pour le conjoint collaborateur effectif qui n’exerce aucune autre
activité professionnelle.
Quant au conjoint salarié, le salaire qui lui est versé ne peut être déduit
que pour un maximum de 17 500 euros par an. À la condition évidente
que ce salaire ait donné lieu au versement des cotisations prévues pour la
sécurité sociale, des allocations familiales et autres prélèvements sociaux
en vigueur 1.
Cependant, l’administration n’applique cette restriction que dans le
cas où l’on peut craindre véritablement que le salaire versé au conjoint
ne dissimule en fait un salaire versé à l’exploitant. Aussi, n’applique-t-
elle cette restriction que lorsque les époux sont mariés sous un régime
communautaire. Le Conseil d’État a estimé que le texte ne faisant pas de
différence, la limitation légale devait être applicable quel que soit le régime
matrimonial des époux 2. Cependant, l’administration continue à appli-
quer cette tolérance 3.
On notera qu’en raison de l’assujettissement des sociétés de personnes
à l’impôt sur le revenu, il y a ici un parallélisme avec les entreprises indi-
viduelles. En effet, les salaires versés au conjoint d’un associé sont déduc-
tibles dans les mêmes limites que la rémunération versée au conjoint de
l’entrepreneur individuel. En conséquence, la fraction non déductible de
cette rémunération doit être réintégrée pour la détermination du résultat
imposable de la société. Toutefois, cette réintégration n’influence que la
quote-part de résultat des associés dont le conjoint est employé dans la
société ; la part de bénéfice qui revient aux autres associés n’est pas modi-
fiée du fait de cette mesure 4.
189 Le salaire des enfants ¸ La rigueur du droit fiscal envers les membres
de la famille de l'exploitant ne s'étend pas à ses enfants. Le salaire
versé aux enfants qui travaillent dans l'entreprise ne subit aucune res-
triction. Il est déductible dans son intégralité, tout au moins lorsqu'il
correspond à un travail effectif et qu'il n'est pas exagéré 5. Sinon, la
partie excessive de la rémunération serait réintégrée dans les bénéfices
1. On rappellera que pour les adhérents à un centre de gestion agréé, la déduction est
illimitée.
2. CE 6 déc. 1972, no 82792, Dr. fisc. 1973, no 16, comm. 631, concl. Mandelkern.
3. BOI-BIC-CHG-40-50-10, no 220.
4. BOI-BIC-CHG-40-50-10, no 290.
5. CE 8 déc. 1965, no 62686, Dupont 1966. 69.
182 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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de l’entreprise, ce qui ne l’empêcherait pas d’être imposée entre les
mains de l’enfant salarié en cas d’imposition distincte 1.
1. CE 9 janv. 1974, 7e et 9e ss-sect., no 88.069, Dr. fisc. 1974, no 19/20, comm. 577.
2. Depuis 2012, les charges financières liées à la propriété d’un bien inscrit au bilan mais
non affectés à l’exploitation ne sont plus déductibles.
3. CE 10 déc. 1999, 8e et 9e ss-sect., no 164982, Min. c/ Freulon, RJF 2/2000 no 167, concl.
J. Arrighi de Casanova ; BDCF 2/00 no 19.
4. CE 26 nov. 1984 no 29846, 8e et 9e ss-sect. : RJF 1/85 no 69.
5. Ex. CE 28 nov. 1973, no 8791, Dr. fisc. 1974, no 5, comm. 131.
6. À la condition, à partir de 2012, que l’actif soit affecté à l’exercice de l’activité
professionnelle.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 183
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Les intérêts d’emprunt constituent une charge de l’exercice au cours
duquel ils ont couru ou sont échus 1.
Quant au montant de la déduction, sont admis non seulement les
intérêts proprement dits, mais également les frais accessoires tels que les
frais de dossiers, les primes d’assurance décès 2, les frais fiscaux, les frais
de poste, les frais d’escompte d’effets de commerce 3… Lorsque l’entreprise
emprunteur a souscrit une clause d’indexation qui augmente les charges
de l’emprunt, il est admis par le Conseil d’État que les charges résultant du
jeu de la clause peuvent venir en déduction du bénéfice imposable 4 sous
réserve que soient remplies certaines conditions 5.
191 La situation débitrice du compte de l’exploitant ¸ Si la déductibi-
lité des intérêts est la règle générale, l'emprunt doit être dans l'intérêt de
l'entreprise et non du contribuable. Or l'exploitant peut, par un excès de
prélèvements, rendre le solde de son compte personnel débiteur. Si, par
suite, l'entreprise doit, en raison de sa situation de trésorerie, recourir à
des emprunts, les frais et charges de ces emprunts ne peuvent être regar-
dés comme supportés dans l'intérêt de l'entreprise, mais seulement dans
l'intérêt de l'exploitant qui constitue sa trésorerie privée au détriment de
celle de son entreprise. Dès lors, les frais financiers supportés 6 ne sont
pas déductibles des bénéfices imposables 7.
1. CE 9 oct. 1981, 7e et 9e ss-sect., no 15553, Dr. fisc. 1982, no 4, comm. 109, concl. Verny. Il
existe cependant un régime particulier pour les petites entreprises soumises au régime super-
simplifié. Pour elles, dans un souci de simplification, les charges financières sont déduites au
titre de l’exercice de leurs paiements (Cette règle concerne en réalité toutes les dépenses rela-
tives aux frais généraux qui sont payées à échéances régulières et dont la périodicité n’excède
pas un an). Cf. CGI, art. 302 septies A ter A.
2. Elles sont déduites au fur et à mesure des échéances lorsque le contrat d’assurance est
une condition du contrat de prêt. Sinon elles sont déduites au décès ou à la date d’expiration du
contrat.
3. Les frais d’escompte constituent des charges déductibles des résultats de l’exercice au
cours duquel ils ont couru (CE 1er juin 2001, 9e et 10e ss-sect., no 194699 et 157650, Dr. fisc.
2001, no 47, comm. 1076).
4. CE 8 mai 1981, plén., no 8294, Dr. fisc. 1981, no 29, comm. 1477, concl. Verny. – CE
12 mars 1982, 7e et 9e ss-sect., no 20373, Dr. fisc. 1982, no 23, comm. 1322.
5. Licéité de l’indexation – prêt d’une durée supérieure à un an – application de l’indexation
seulement à l’échéance du prêt – caractère non anormal de la rémunération totale.
6. La réintégration est limitée aux frais financiers ; elle ne concerne pas les redevances de
crédit-bail qui ne constituent pas des charges financières (Rép. min. JO Sénat CR 21 déc. 1989,
p. 2125 ; Dr. fisc. 1990, no 50, comm. 2339. BOI-BIC-CHG-50-40).
7. La même solution est applicable aux sociétés de personnes. Ne sont pas déductibles les
intérêts des emprunts contractés par la société alors que le solde des comptes courants des
associés était débiteur (CE 4 nov. 1985, no 49941, Dr. fisc. 1986, no 6, comm. 171. –Paris
25 juill. 1997, 2e ch., no 95-2927, Dr. fisc. 1998, no 29, comm. 659). Alors que le Conseil d’État,
en cas de pluralité de comptes courants d’associés refuse de faire masse des comptes courants
débiteurs et créditeurs (CE 25 janv. 1985, no 37653, no 37653, Dr. fisc. 1985, no 16, comm.
O. Fouquet. – CE 29 nov. 1989, no 67291, RJF 1/90, no 11), les juridictions de fond considèrent
que doit être pris en compte le solde algébrique de l’ensemble des comptes courants d’associés
(CAA Lyon 27 juin 1990, no 89-230 et 89-321, Dr. fisc. 1992, no 31/32, comm. 1565. – CAA
Marseille 1er juill. 2003, no 99-2020, Dr. fisc. 2004, no 22/23, comm. 520).
184 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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Si le principe demeure que la non-déductibilité suppose que les
frais financiers soient la conséquence des prélèvements, son appli-
cation peut faire l’objet d’interprétations. On peut considérer que la
non-déductibilité doit être subordonnée à l’antériorité de la situation
débitrice du compte de l’exploitant par rapport au prêt. Dans ce cas,
en effet, est démontrée la causalité de l’excès de prélèvement sur
l’endettement de l’entreprise. Dans l’hypothèse inverse où l’emprunt
est contracté alors que le solde du compte personnel est créditeur, les
frais financiers devraient être intégralement déductibles des résultats
des exercices ultérieurs, même si, au cours de ces exercices, des pré-
lèvements de l’exploitant ont pu rendre son compte personnel débi-
teur 1. On peut aussi, rejetant cette conception historique s’en tenir à
une approche mathématique et dès lors refuser toute déductibilité des
intérêts dès lors qu’au moment de leur versement le compte personnel
de l’exploitant était débiteur. Cette solution est celle de l’administra-
tion 2 comme du Conseil d’État 3. Tout solde débiteur du compte de
l’exploitant en période d’endettement de l’entreprise, qu’il existe au
moment où l’emprunt ou le découvert bancaire est négocié ou qu’il
apparaisse pendant les exercices au cours desquels l’entreprise acquitte
les frais financiers, implique une limitation à due concurrence du droit
à déduction des frais financiers 4.
192 Les sociétés de personnes ¸ Il est évident que les dividendes qui sont
versés aux associés en fonction de leurs apports ne sont pas déductibles
pour la même raison que pour l'exploitant individuel. Mais les associés
peuvent, en plus de leur apport à la société, lui faire des prêts.
Cette pratique est d’ailleurs courante, notamment pour les petites
sociétés, afin de suppléer un crédit bancaire défaillant. D’autant plus que
l’emprunt aux associés est plus souple qu’une augmentation de capital
puisque l’on peut faire varier le volume des sommes mises à la disposition
de la société en fonction de l’intensité de ses affaires.
En un tel cas, les prêts, avances ou dépôts consentis par les associés
des sociétés de personnes, en supplément de leur apport en capital,
peuvent être rémunérés. Afin d’éviter que des abus interviennent par
gonflement des comptes d’associés au détriment du capital, la déduction
1. En ce sens, CAA Nancy 10 févr. 1994, 2e ch., no 92-547, Dr. fisc. 1994, no 40, comm. 1684.
2. BOI-BIC-CHG-50-40 no 10.
3. CE 13 nov. 1998, 9e et 8e ss-sect., no 143728, no 144602, n° 147233 et no 181521, Dr. fisc.
1999, no 43, comm. 780 ; RJF 01/1999, comm. 11. – CE 28 juill. 2000, 9e et 10e ss-sect.,
no 186415, Dr. fisc. 2001, no 12, comm. 253. – CE 9 mai 2001, 10e et 9e ss-sect., no 214036,
Dr. fisc. 2001, no 42, comm. 942.
4. La fraction des frais financiers à réintégrer dès lors que le compte de l’exploitant est débi-
teur est déterminée d’après le rapport qui existe entre le solde moyen annuel du compte de
l’exploitant et le montant moyen des prêts.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 185
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des intérêts payés aux associés pour la rémunération des fonds déposés
en compte est enfermée dans certaines limites 1.
– Le montant de l’intérêt ne peut excéder un taux égal à la moyenne
annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de
crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d’une durée initiale
supérieure à deux ans (TMP à taux variable) 2.
– Le capital doit être entièrement libéré. Sinon, au lieu d’emprunter, la
société pouvait se procurer les fonds correspondant en appelant le mon-
tant non encore libéré 3. Cependant, l’administration admet que cette
condition ne s’applique pas quand des circonstances de fait permettent
d’établir que le recours simultané à une augmentation de capital non
entièrement libérée et à des avances financées par certains associés ne
recouvre pas, en fait, des abus. Par exemple, certains associés ne peuvent
pas suivre l’augmentation de capital autrement que par un étalement de
la souscription. On leur laisse ainsi un délai pour réunir les fonds néces-
saires à l’augmentation de leur participation dans la société. Mais en
attendant, la société pourra s’adresser aux autres associés pour emprunter.
Cette tolérance administrative ne s’applique cependant que si l’acte qui
constate l’augmentation de capital prévoit que le délai pour la libération
est au maximum de trois ans.
Il n’y a plus aujourd’hui de difficulté pour considérer comme déductibles
les produits des clauses d’indexation afférentes aux sommes mises à la dispo-
sition d’une société par ses associés. Ils sont désormais assimilés à des inté-
rêts et donc soumis aux mêmes limitations que ceux-ci (CGI, art. 39-1-3o).
Il faut tout de même noter que les diverses limitations de l’article 39-1-
3o CGI ne sont appelées à jouer que vis-à-vis des intérêts des sommes que
les associés ont laissées ou mises à la disposition de la société ès qualités
et donc pas au regard des sommes à la disposition de la société à un autre
titre et en particulier à titre commercial lorsque l’associé et la société sont
clients ou fournisseurs, l’un de l’autre 4.
Lorsque les intérêts versés aux associés ne sont pas déductibles, ils ne sont
pas considérés comme des distributions irrégulières de bénéfices, mais ils sont
imposés comme des suppléments de bénéfices industriels et commerciaux.
193 Intérêts des emprunts contractés pour l’acquisition ou la sous-
cription de parts sociales ¸ Les intérêts d'emprunts contractés pour
1. La limitation de la déductibilité des intérêts servis aux associés ne s’applique pas aux
intérêts d’un prêt contracté par un dirigeant, dès lors que les fonds empruntés ont été mis
intégralement à la disposition de la société qui en assume en totalité le remboursement (CE
28 mars 2008, 10e et 9e ss-sect., Min. c/ Lescure, no 295735, RJF 6/2008, no 642, concl.
C. Landais BDCF 6/2008, no 73).
2. Au titre de l’année civile 2017, le TMP à taux variable a été de 1,67 %.
3. Les intérêts sont déductibles même s’ils n’ont pas été payés à l’intéressé, ni inscrits à son
compte courant d’associé dès lors qu’ils ont été constatés dans un compte de frais à payer (CE
28 nov. 1986, 8e et 7e ss-sect., no 43586, Dr. fisc. 1987, no 22, 1055).
4. CE 2 oct. 1985, no 39857, Dr. fisc. 1986, no 16/17, 843, concl. Racine.
186 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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l'acquisition de droits ou parts dans les sociétés de personnes et assi-
milées ne sont pas, évidemment, déductibles des résultats sociaux. La
question est tout de même posée de savoir s'ils sont imputables sur la
quote-part des résultats revenant à l'associé lorsqu'il exerce sa profession
au sein de la société. Pendant longtemps la doctrine administrative et la
jurisprudence refusaient de considérer comme des charges déductibles du
bénéfice les intérêts des emprunts contractés par un associé d'une société
de personnes pour l'acquisition des parts ou la réalisation d'un apport.
Puis un revirement de la jurisprudence du Conseil d'État était intervenu
par une décision du 11 octobre 1978 1.
Depuis, l’article 151 nonies du CGI assimile à des éléments d’actif affec-
tés à l’exercice de l’exploitation les droits ou parts des associés des sociétés
soumises à l’impôt sur le revenu. Pour cela, il convient cependant que les
intéressés exercent leur profession via la société, ce qui suppose des actes
précis ou des diligences réelles caractérisant l’exercice d’une profession 2
bien que, parfois, les exigences soient réduites à la détention d’un mandat
social 3 dès lors qu’il est exercé directement dans la société concernée et
non dans une société interposée 4.
Grâce à cette assimilation, les associés peuvent déduire des bénéfices
sociaux imposables entre leurs mains, les dépenses exposées pour l’acqui-
sition ou la souscription des droits sociaux et notamment les frais et inté-
rêts des emprunts contractés à cet effet 5.
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modalités de paiement peut entraîner par rapport à la valeur de l'élément
d'actif acquis, le versement d'un supplément de prix. Ce supplément de
prix correspond à l'aléa conventionnel. Dans la vente moyennant une
rente viagère, le montant de chaque versement est connu mais le nombre
de versements annuels est inconnu alors que dans la vente moyennant un
paiement différé et indexé, le nombre des versements est fixé à l'avance,
mais le montant de chaque versement est inconnu.
Le supplément de prix conséquence de ces modalités particulières de
sa détermination a, pendant longtemps, été considéré non comme un
emprunt, mais comme une modalité du paiement de l’élément d’actif 1.
En conséquence l’augmentation du prix résultant de la variation des
indices ou de la durée de vie du bénéficiaire n’était pas regardée comme
une charge déductible. Aujourd’hui, cette jurisprudence a été abandonnée
de telle sorte qu’au-delà de la règle qui impose l’inscription au bilan d’un
élément d’actif pour sa valeur exacte, les modalités de paiement du prix
puissent être prises en considération.
Dans le cas d’acquisition d’un bien moyennant le paiement d’une rente
viagère, la déduction de la fraction des arrérages qui excède le capital
représentatif de la rente est admise 2.
Dans le cas d’acquisition d’un élément d’actif moyennant un paiement
partiellement différé et indexé, le supplément de prix correspondant à
l’indexation a le caractère de charge déductible 3.
1. Ex. : CE 17 déc. 1984, no 41762, Dr. fisc. 1985, no 9, comm. 438 ; RJF 1985, no 197.
2. CE 23 nov. 1983, no 41631, Dr. fisc. 1984, no 4, comm. 78, concl. M.-A. Latournerie ; RJF
1984, no 8.
3. CE 28 juin 1991, ass. plén., no 47656, Dr. fisc. 1991, no 46/47, comm. no 2221, concl.
Chahid-Nourai.
4. La déduction selon le régime des frais d’établissement n’est plus possible (Instr. 21 déc.
1994, BOI 4 C-7-94 ; Dr. fisc. 1995, no 3, 11260).
188 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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sur la durée des emprunts. Cette possibilité d’option présente l’avantage
de rétablir l’identité entre le traitement comptable et le traitement fiscal
des frais d’émission d’emprunt. Lorsque l’option pour l’étalement a été
faite, la déduction peut être opérée de manière linéaire ou au prorata de la
rémunération courue 1.
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de sociétés n’est pas déductible selon le texte, « pour l’établissement de
l’impôt sur les sociétés », aussi en conclut-on qu’elle est déductible pour
les sociétés relevant de l’impôt sur le revenu.
S’agissant de la fiscalité internationale, il convient de noter que l’impôt
acquitté à l’étranger conformément à une convention fiscale n’est pas
déductible, pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2017 1.
197 Les amendes et pénalités ¸ En application de l'article 39-2 du CGI, à
l'instar des autres pénalités pour contravention à des obligations légales,
ne sont pas déductibles l'ensemble des amendes et pénalités pour infrac-
tion aux règles relatives à l'assiette et au recouvrement de l'impôt.
Les pénalités d’assiette sanctionnent les défauts ou retards de déclara-
tions ainsi que les insuffisances ou inexactitudes dans ces déclarations,
alors que les pénalités de recouvrement sanctionnent les retards dans les
paiements. Ainsi, même si l’impôt auquel elles se rapportent est lui-même
déductible, l’ensemble des pénalités fiscales est exclu de la déduction. Il est
à noter que les intérêts de retard 2 bien qu’ils aient la nature de réparation
pécuniaire et soient indépendants du comportement du contribuable ont
la nature de pénalités au sens de l’article 39-2 du CGI 3.
E. Les assurances
198 Les conditions de déductibilité ¸ Depuis que le Conseil d'État a rat-
taché l'« auto-assurance » aux provisions et donc en refuse la déduction,
l'entreprise ne peut plus être son propre assureur. En revanche toutes les
assurances qu'elle contracte pour ses besoins sont déductibles. Il est de
bonne gestion pour l'entreprise de se garantir contre les risques d'incen-
die, de vol, de responsabilité civile, d'insolvabilité des débiteurs, de licen-
ciement du personnel 4…
Lorsque l’assurance est contractée par l’entreprise dans l’intérêt de ses
employés, elle constitue un supplément de salaire et est donc déductible au
même titre que tous les avantages en nature.
Les primes d’assurance ne sont cependant déductibles que lorsqu’elles
couvrent la perte d’un élément de l’actif immobilisé ou une charge
d’exploitation 5. Au contraire, elles ne sont pas déductibles lorsque le
1. CGI, art. 39, 1-4°. Cet article est issu de la Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de
finances rectificative pour 2017, JORF du 29 déc. 2017 ; Dr. fisc. 2018, n° 1, comm. 49 ; FR
Lefebvre 2/2018, inf. 4, p. 11.
2. CGI, art. 1727. L’intérêt de retard est de 0,20 % par mois (0,40 % par mois pour les inté-
rêts courus avant 2018).
3. CE 14 juin 1989, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 66180, Compagnie française Philips, Dr. fisc. 1990,
n° 43, comm. 1969.
4. CE 6 nov. 1991, 8e et 9e ss-sect., no 68.654, Dr. fisc. 1991, no 52, comm. 2532, concl. Arri-
ghi de Casanova.
5. Sont ainsi déductibles les primes d’assurance invalidité ou décès contractées pour
garantir le remboursement des emprunts inscrits au bilan de l’entreprise dès lors que
190 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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risque est un simple manque à gagner qui ne serait pas susceptible de
s’inscrire en perte ou en frais dans la comptabilité.
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de telle sorte qu’elles ne peuvent pas donner lieu à la constitution d’une
provision 1. Les dépenses de publicité doivent être exposées dans l’intérêt
de l’entreprise, mais l’ampleur des dépenses de promotion ne peut être
contestée sur le terrain de l’acte anormal de gestion 2.
201 Le mécénat d’entreprise et le parrainage ¸ Analogues aux dépenses
de publicité, bien qu'il n'y ait pas de véritable coïncidence, les dépenses
de mécénat et de parrainage publicitaire (ou sponsoring) sont assimi-
lées à des frais généraux et donc déductibles 3. Les dépenses engagées par
les entreprises pour des manifestations de caractère philanthropique,
éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou
concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de
l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des
connaissances scientifiques françaises, sont déductibles lorsqu’elles sont
exposées dans l’intérêt direct de l’exploitation 4. Ainsi, peut être déduit
au titre des dépenses de parrainage le reversement par une entreprise
d’une fraction du prix de vente de ses produits à des associations huma-
nitaires 5. Les dépenses engagées dans le cadre d’opérations de parrainage
sont destinées à promouvoir l’image de marque de l’entreprise. L’exigence
de l’intérêt de l’entreprise, suppose que l’identification de l’entreprise soit
possible et que le montant versé ne soit pas disproportionné par rapport
aux moyens financiers de l’entreprise et à l’effet attendu sur son image de
marque 6. De la sorte, les dépenses engagées par une société de transports
en vue de participer financièrement à l’engagement d’un véhicule, piloté
par son dirigeant, au rallye « Paris-Le Cap » sont déductibles dès lors que
le nom de la société était distinctement apposé sur le véhicule concerné 7.
Au contraire, les charges d’un garagiste afférentes à la participation de
l’exploitant à des compétitions automobiles, ne sont pas déductibles dès
lors que le véhicule utilisé n’était le support d’aucune publicité en faveur
de l’entreprise 8.
1. BOI-BIC-CHG-40-20-40, n° 130.
2. CE 23 janv. 2015, n° 369214, BF Lefebvre 4/15, inf. 285.
3. Outre la déductibilité des charges, les dons effectués par les entreprises au profit des
organismes mentionnés à l’article 238 bis du CGI (ex. œuvres ou organismes d’intérêt général
ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, fami-
lial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’envi-
ronnement naturel où à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scienti-
fiques françaises) ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 60 % des versements pris dans
la limite unique de 5 pour mille du chiffre d’affaires des entreprises donatrices (BOI-BIC-
RICI-20-30-10).
4. CGI, art. 39-1-7°.
5. CE 15 févr. 2012, no 340855, Min. c/ SARL Les Sources, RJF 5/12, no 446, concl. F. Aladjidi,
BDCF 5/12, no 52.
6. BOI-BIC-CHG-40-20-40, n° 190.
7. CAA Douai 28 mai 2003, 3e ch., n° 99-20073, Min. c/ SA Transports Couque Maurice, RJF
4/04, n° 347.
8. CAA Bordeaux 7 févr. 1995, 3e ch., n° 93-1497, Delage, RJF 5/95, n° 579.
192 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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G. Les frais de recherche et de développement
202 Principes ¸ Aux termes de l'article 236-I du CGI, les dépenses de fonc-
tionnement exposées dans les opérations de recherche scientifique ou
technique peuvent être déduites des résultats de l'année ou de l'exercice
au cours duquel elles ont été exposées 1. L’entreprise peut cependant
préférer les immobiliser de telle sorte que la déduction se fera par
l’amortissement dans un délai maximal de cinq ans 2. La possibilité
d’amortissement est ouverte aux dépenses de recherche appliquée se
rapportant à des projets nettement individualisés, ayant de sérieuses
chances de rentabilité commerciale. Le choix entre la déduction immé-
diate et l’amortissement qui constitue une décision de gestion oppo-
sable à l’entreprise s’effectue essentiellement en fonction du résultat
bénéficiaire ou déficitaire dégagé par ailleurs 3. La recherche doit être
entendue comme recouvrant les travaux de création entrepris de façon
systématique en vue d’accroître la somme des connaissances, ainsi que
l’utilisation de ces connaissances pour de nouvelles applications, les
opérations de développement expérimental représentant le stade final
de la recherche 4.
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sont déductibles dans la mesure où ils ne sont pas exagérés et présentent
un lien direct avec l'intérêt de l'entreprise 1. Selon l’administration,
constituent normalement des charges déductibles pour le calcul des béné-
fices imposables les cadeaux d’affaires que les entreprises offrent en fin
d’année à des clients nommément désignés, lorsqu’il s’agit de cadeaux
dont la distribution n’est pas prohibée par une disposition légale ou
réglementaire et sous réserve, bien entendu, qu’ils ne présentent pas une
valeur exagérée 2. De même, les dépenses qu’entraîne la distribution par
les entreprises à des tiers d’échantillons et de menus objets à caractère
publicitaire constituent normalement des charges déductibles pour la
détermination du résultat fiscal 3.
1. CE 11 févr. 2011, 3e et 8e ss-sect., no 316500, Sté Philips France, Dr. fisc. 2011, no 18-19,
comm. 335, concl. E. Cortot-Boucher, note L. Faulcon et A. Fournier. – Paris 1er févr. 1994,
3e ch., no 93-343, Dr. fisc. 1994, no 27, comm. 1309.
2. BOI-BIC-CHG-40-20-40, n° 260. – CE 25 avr. 2003, n° 236923, 8e et 3e ss-sect., Min. c/
Sté Laboratoire Merck Clévenot, RJF 7/03, n° 822.
3. BOI-BIC-CHG-40-20-40, n° 250.
4. En cas de location-vente, la somme versée peut n’être pas déductible si, en raison du
caractère dérisoire du prix de vente fixé, elle constitue le prix d’achat des biens (TA Paris 12 mai
1987, Dr. fisc. 1987, no 43, 1911).
5. BOI-BIC-CHG-40-20-10, no 120.
6. CE 8 juill. 1998, 8e et 9e ss-sect., no 164457, Meissonnier, RJF 1998, no 8/9, 703.
7. BOI-BIC-CHG-40-20-10, no 180.
8. Les dépenses exposées pour assurer la sécurité des locaux professionnels sont déductibles
(Rép. Bourdouleix, AN 11 août 2015 p. 6167 n° 68064).
194 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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On notera que la déduction des dépenses d’entretien et de répara-
tion des locaux s’applique même lorsque c’est l’exploitant qui en est
le propriétaire 1.
– Sont également déductibles les frais de bureau, de correspondance, de
téléphone, de voyage 2, de représentation, de publicité etc. sous réserve des
justifications correspondantes.
A. Non-déductibilité
207 Interdictions légales et jurisprudentielles ¸ La non-déductibilité de
certains frais exposés par l'entreprise est généralement décidée par le
législateur car ces frais sont considérés comme n'étant pas nécessités par
l'intérêt de l'entreprise. Ainsi, est-ce le cas de l'importante catégorie des
frais qualifiés de « somptuaires ». Mais, parfois, c'est la jurisprudence qui
à travers le contrôle de l'utilité de la dépense pour l'entreprise interdit la
déduction de certaines dépenses.
1. V. ss 968.
2. Y compris les voyages de stimulation offerts par les entreprises à leurs meilleurs vendeurs
(CE 31 juill. 1992, no 82802 et 114 895, RJF 1992, no 8/9, 1124 et 1127).
3. Ex. : exclusion des dépenses d’une société viticole relatives à un château : CE 28 déc.
2007, 9e et 10e ss-sect., no 284899 et 285506, SA Domaine Clarence Dillon, RJF 3/08, no 269. – CE
5 mars 1999, 8e et 9e ss-sect., no 135287, Dr. fisc. 2000, no 8, comm. 125.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 195
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– l’amortissement des voitures de tourisme pour la fraction de leur
prix d’acquisition qui dépasse le seuil légal selon le degré plus ou moins
polluant du véhicule, le plafond « standard » d’amortissement étant de
18 300 euros 1 ;
– les charges d’acquisition et d’entretien de yachts ou de bateaux de plai-
sance à voile ou à moteur 2.
Cette énumération légale démontre qu’en réalité, si les dépenses somp-
tuaires ne sont pas déductibles, ce n’est pas parce qu’elles sont de luxe,
mais parce qu’elles ne correspondent pas à la gestion de l’entreprise et
qu’elles ne sont pas exposées dans l’intérêt de l’exploitation. En effet,
en quoi l’acquisition d’une voiture de tourisme est-elle une dépense plus
« somptuaire » que celle d’un avion privé 3 ; de même, l’acquisition d’une
maison balnéaire de quelques dizaines de milliers d’euros est-elle plus
« somptuaire » que la construction d’un siège social de prestige de plu-
sieurs centaines de milliers d’euros ?
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mais constituait des bureaux professionnels 1. Il en est de même pour les
dépenses et frais de chasse, du moins dans la proportion où ils ont été
engagés dans l’intérêt de l’entreprise 2.
La dépense somptuaire peut également figurer parmi les charges déduc-
tibles lorsque le bien en ayant fait l’objet procure à l’entreprise des reve-
nus imposables. Si l’entreprise, propriétaire d’une résidence de plaisance,
la donne en location et est imposée sur les loyers perçus, les dépenses
relatives à cette résidence redeviennent déductibles en vertu du droit
commun. Il en serait de même si l’exploitant se réservait la jouissance
d’une telle résidence et réintégrait l’avantage en nature ainsi procuré dans
les résultats de l’entreprise 3. Le cas échéant, il paraît logique de mettre en
œuvre le dispositif de neutralisation partielle des effets de la théorie du
bilan lorsque le bien ne concourt pas à l’activité 4.
211 Les dépenses excessives ¸ Une dépense par nature déductible peut
perdre ce caractère, du moins partiellement, lorsque son montant exagéré
démontre qu'elle n'est plus dans l'intérêt de l'exploitation. Ainsi est-ce
le cas des rémunérations, notamment aux dirigeants ; ou encore, le cas
d'une redevance exagérée versée à un associé qui concède à la société une
licence d'exploitation sur un brevet 5.
Lorsqu’une dépense ne se rattache pas à la gestion normale de l’entre-
prise, la partie de cette dépense estimée inutile est réintégrée dans le
bénéfice imposable. C’est à l’administration qu’il appartient d’établir le
caractère excessif de la dépense, même si l’entreprise peut ensuite se
justifier. Cependant, pour certaines dépenses, celles pour lesquelles des
conditions de forme sont exigées, la charge de la preuve est renversée dans
1. CE 8 nov. 1978, 7e et 8e ss-sect., no 4233 et 4995, Dr. fisc. 1979, no 5, comm. 154 ; RJF
12/78, p. 354.
2. CE 26 juill. 1985, 7e ss-sect., no 33132, Dr. fisc. 1985, no 52, comm. 2319.
3. CE 25 nov. 1981, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 11383, Dr. fisc. 1982, no 13, comm. 680, concl.
Verny ; RJF 1/82, p. 3, chron. Léger. À propos d’une société mettant la résidence à disposition
d’un associé avec un loyer inférieur au loyer normal, CE 27 mai 1988, 8e et 9e ss-sect., n° 62764,
RJF 7/1988, comm. 859 (jugé que la différence entre le loyer que la société aurait pu normale-
ment percevoir et la valeur déclarée de l’avantage en nature constitue un avantage occulte qui
est imposable entre les mains du bénéficiaire dans la catégorie des revenus de capitaux
mobiliers).
4. V. ss 80.
5. CE 19 févr. 1975, Dr. fisc. 1975, no 14/15, comm. 527.
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deux cas de telle sorte que c’est l’entreprise qui doit faire la preuve que les
dépenses engagées ont été nécessitées par sa gestion (CGI, art. 39-5) :
– Lorsque les frais généraux déclarés dépassent le montant des bénéfices
imposables de l’exercice, en faisant abstraction des plus ou moins-values
ainsi que des déficits antérieurs.
– Lorsque les frais généraux déclarés ont augmenté par rapport à l’exer-
cice précédent dans une proportion supérieure à celle des bénéfices.
212 Les dépenses illicites ¸ Le refus du droit fiscal de prendre en compte les
dépenses illicites se traduit dans un certain nombre de dispositions légales.
Ainsi ne sont pas déductibles l’ensemble des amendes et pénalités aux-
quelles l’entreprise peut être condamnée. Le fait pour un entrepreneur
d’encourir une pénalité ou une amende démontre que sa gestion est anor-
male. En application de l’article 39-2 du CGI, les sanctions pécuniaires
et pénalités de toute nature mises à la charge des entreprises qui contre-
viennent à des obligations légales ne sont pas admises en déduction des
bénéfices imposables. Avant la consécration légale d’un tel principe géné-
ral, la jurisprudence était plus nuancée afin de tenir compte du fait que
même répréhensible, le comportement fautif du chef d’entreprise pouvait
être à l’origine de son bénéfice et donc être selon l’expression consacrée
dans l’intérêt de l’entreprise.
On notera que des pénalités contractuelles, comme par exemple celles
dues en cas de retard de paiement, sont déductibles puisqu’elles ne sanc-
tionnent pas des manquements à des obligations légales.
Ne peuvent être déduites les sommes versées à un agent public en vue
d’obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu dans des
transactions commerciales internationales (CGI, art. 39-2 bis) 1.
Quant à la jurisprudence, malgré certaines décisions anciennes qui
refusent la déduction des dépenses illicites 2, elle pose aujourd’hui le prin-
cipe selon lequel tout acte illicite n’est pas nécessairement constitutif d’un
acte anormal de gestion 3. Sont ainsi déductibles les commissions versées
par les entreprises françaises pour l’obtention de marchés à l’étranger 4.
De même, le Conseil d’État a admis la déduction de cadeaux d’entreprise
faits dans des conditions illicites car contraires à l’interdiction des ventes
1. CE 4 févr. 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 364708, Sté Alcatel Lucent France, Dr. fisc. 2015,
n° 15, comm. 255, concl. F. Aladjidi ; RJF 5/15, n° 387 ; concl. F. Aladjidi, BDCF 5/15, n° 55 ;
Revue Internationale de la Compliance et de l’Éthique des affaires 2015, comm. 68, note O. Debat
et T. Postif. – CAA Nantes 26 févr. 2015, 1re ch., n° 13NT02541, Min. c/ Dirickx Groupe, RJF
6/15, n° 468.
2. CE 24 févr. 1964, 7e ss-sect., no 58941, Dr. fisc. 1967, no 18, p. 46, concl. M. Martin ;
Dupont, 1964, no 4, p. 349. – CE 10 déc. 1969, 7e et 9e ss-sect., no 7.973, Dr. fisc. 1970, no 50,
comm. 1429, concl. Schmeltz ; Dupont 1970, no 3, p. 113.
3. CE 7 janv. 2000, no 186108, Dr. fisc. 2000, no 11, comm. 204, concl. G. Bachelier. – CE
30 déc. 2002, no 230033, Dr. fisc. 2003, no 20, comm. 370. – CAA Nancy 3 avr. 2003, 2e ch.,
no 97-596, Dr. fisc. 2004, no 3, comm. 89 – CE 24 mai 2006, 8e et 3e ss-sect., no 274471, Dr. fisc.
2006, no 43, 1850.
4. Ex. CE 5 déc. 1983, 7e et 9e ss-sect., no 35697, Dr. fisc. 1984, no 14, comm. 695 ; RJF 2/84, p. 62.
198 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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avec primes en nature 1. Dans le même sens, constitue une charge déduc-
tible, le montant de la condamnation civile prononcée contre un chef
d’entreprise à la suite de son activité de recel de marchandises 2. Quant
à l’administration, elle admet parfaitement la déduction de dépenses de
publicité mensongère 3.
Ces solutions sont justifiées par le principe selon lequel le critère de la
déductibilité doit être le seul intérêt de l’entreprise ; le caractère licite ou
non de la dépense devant dès lors être sans incidence. Il n’appartient pas à
l’administration fiscale et au juge de l’impôt de s’immiscer dans la gestion
de l’entreprise et de sanctionner la moralité des actes commis par l’exploi-
tant. Si le Conseil d’État veut faire œuvre de moralisateur, il doit se placer
sur un autre terrain. Par exemple en refusant la déduction de la dépense
illicite faute de justification de la réalité de la dépense 4.
Il demeure, cependant, qu’une approche renouvelée de l’acte anormal
de gestion pourrait, en dehors de toute volonté moralisatrice, favoriser
l’exclusion de la déductibilité des dépenses illicites. Il suffirait, pour définir
l’anormalité d’un acte, de ne plus se référer à l’intérêt de l’entreprise, mais
à son rôle causal par rapport au bénéfice 5. C’est ce qui se fait pour une
astreinte prononcée par le juge pénal. L’astreinte n’entre pas dans les frais
généraux déductibles non parce qu’elle affecte une amende pénale, mais
parce qu’elle ne confère aucun droit qui en serait la contrepartie 6.
B. Déductibilité limitée
213 Exemples ¸ Plutôt que d'obliger l'administration à contrôler le caractère
exagéré ou non de la dépense, parfois, le législateur enferme la déduc-
tibilité dans certaines limites. Ainsi a-t-on rencontré l'article 39-I-3o du
CGI qui n’admet la déductibilité des intérêts servis aux associés, à raison
des sommes qu’ils laissent ou mettent à la disposition de la société, que
dans une certaine limite. Une limite supplémentaire existe, dans la même
situation, pour les intérêts alloués au versement en compte courant des
associés d’une société passible de l’impôt sur les sociétés. Également pour
ces mêmes sociétés, les jetons de présence ne peuvent être déduits que
dans une certaine limite par rapport aux rémunérations perçues par
les salariés les mieux rémunérés. Dans le même ordre d’idée, pourrait
être rappelée la limite à la déductibilité du salaire versé au conjoint
de l’exploitant.
1. CE 11 juill. 1983, no 33942, Dr. fisc. 1984, no 16, comm. 813, concl. Léger ; RJF 1983,
no 10, p. 519 ; JCP CI 1983. II, no 14.091.
2. CE 7 janv. 2000, 8e et 9e ss-sect., no 186108, Dr. fisc. 2000, no 11, comm. 204.
3. Rép. min. JOAN CR 1978, p. 8464. Non reprise dans la base BOFIP.
4. CE 26 juill. 1982, Dr. fisc. 1983, no 10, comm. 384, concl. Schricke.
5. En ce sens, P. Serlooten, « Liberté de gestion et droit fiscal : la réalité et le renouvellement
de l’encadrement de la liberté », RD fisc. 2007, no 12, ét. 301.
6. CE 20 juin 2012, 3e et 8e ss-sect., no 342714, Sté Sosaca, Dr. fisc. 2012, no 38, comm. 440,
concl. E. Cortot-Boucher.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 199
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C. Conditions de forme
214 Les exigences probatoires ¸ Une perte ou une charge ne peut être
déduite du résultat imposable que dans la mesure où elle est prouvée
dans sa réalité et son montant 1. Cependant, lorsqu’une entreprise justifie
d’une charge comptabilisée par une facture, il incombe à l’administration
d’établir le caractère fictif de l’opération 2. Aussi, des conditions de forme
sont d’abord exigées dans un but probatoire 3. En effet, les entreprises
sont obligées de fournir, à l’appui de la déclaration de leurs résultats, le
relevé détaillé de diverses catégories de frais généraux lorsque leur mon-
tant excède les chiffres fixés par un arrêté du ministre des Finances (CGI,
art. 4 J ann. IV).
1. Ex. Paris 28 févr. 1995, 2e ch., no 93563, Dr. fisc. 1995, no 52, comm. 2401.
2. CE 13 janv. 2006, 9e et 10e ss-sect., no 267864, Dr. fisc. 2006, no 20, comm. 397.
3. L’absence de justification écrite de certaines dépenses n’empêche pas leur prise en compte
lorsque, par nature, une telle justification est impossible et que les dépenses sont en rapport
avec la nature et l’importance de l’activité professionnelle (Ex. dépenses de stationnement de
véhicules : Rép. min. à M. Martin, JOAN CR 1980, p. 3699 ; Dr. fisc. 1980, no 47, comm. 2346 ;
BOI-BIC-CHG-10-20-20).
4. CGI, art. 54 quater et CGI, annexe IV, art. 4 J à 4 L.
5. CGI, art. 87.
6. Il s’agit, selon que l’effectif du personnel excède ou non 200 salariés, des dix ou des cinq
personnes dont les rémunérations directes et indirectes ont été les plus importantes au cours
de l’exercice, si les frais excèdent respectivement 300 000 € ou 150 000 € pour l’ensemble des
rémunérations directes ou indirectes versées à ces personnes les mieux rémunérées, ou
50 000 € pour l’une d’entre elles prise individuellement.
200 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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rémunérées de l’entreprise ainsi que les dépenses et charges de toute
nature afférentes aux immeubles qui ne sont pas affectés à l’exploitation.
Ces diverses dépenses doivent être justifiées lorsque leur total excède
30 000 euros.
– Les frais de réception. Ajoutés aux frais de restaurant et de spectacle,
ils doivent être justifiés lorsqu’ils sont supérieurs à 6 100 euros.
– Les cadeaux d’entreprise. Les cadeaux de toute nature faits par l’entre-
prise, à l’exception des objets publicitaires de faible valeur qui ne dépassent
pas 69 euros toutes taxes comprises par bénéficiaire 1, doivent faire l’objet
d’un relevé détaillé lorsque leur montant global excède 3 000 euros 2.
Tous ces chiffres ne sont pas des limites ni des conditions à la déductibi-
lité, mais des plafonds à partir desquels une déclaration spéciale doit être
faite pour permettre à l’administration d’assurer son contrôle sans avoir à
venir sur place (CGI, art. 54 quater).
Ainsi la sanction de l’absence de déclaration spéciale n’est pas la
réintégration de la dépense dans le bénéfice imposable de l’entreprise
mais une amende forfaitaire de 5 % du montant des charges omises.
Ce taux est cependant ramené à 1 % lorsque les sommes en cause sont
réellement déductibles 3.
Malgré tout, ces conditions de forme ne sont imposées qu’aux sociétés,
qu’elles relèvent de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu.
Quant aux entreprises individuelles, elles ne sont tenues de déclarer que
les cadeaux d’entreprise et les frais de réception (CGI, art. 4 L. ann. IV).
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217 Bibliographie ¸
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d’amoralisme du droit fiscal », RJF 11/2012, p. 883.
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ét. 544.
M. MasCLet de Barbarin, « Libres propos sur la notion de charges somptuaires »,
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damentales », Dr. fisc. 2015, n° 51-52, Et. 735.
F. VeuiLLOt, « Les prélèvements sociaux (CSG/CRDS) pourraient-ils être déductibles du
revenu imposable ? », Dr. fisc. 215, n° 18, Act. 262.
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de la dépréciation normale subie au cours d’un exercice par un élément
qui se détériore par l’usage ou par le temps 1.
En matière fiscale, l’amortissement pourrait répondre à un objectif
différent. Il convient, fiscalement, de déduire du bénéfice brut, les charges
d’exploitation afin de parvenir au bénéfice net qui est le bénéfice impo-
sable. Mais lorsqu’une immobilisation est utilisée par l’entreprise pendant
plusieurs exercices, cette immobilisation contribue à la réalisation des
bénéfices de l’ensemble des exercices. Il serait donc normal de considérer
le coût d’acquisition de cette immobilisation comme une charge d’exploi-
tation pour chacun des exercices pendant lesquels elle permet l’acquisition
d’un bénéfice. Fiscalement, l’amortissement se définirait donc comme la
prise en charge par un exercice d’une dépense qui a été faite antérieure-
ment et qui se répartit sur un certain nombre d’exercices ; ceux auxquels
elle profite.
Bien que l’amortissement figure parmi les charges d’exploitation, la
conception fiscale de l’amortissement n’est cependant pas celle-ci ; elle
ne diffère pas en réalité de la conception comptable. En effet, lorsqu’une
entreprise acquiert une immobilisation, la dépense a une contrepartie
dans l’enrichissement d’actif qui s’ensuit. De la sorte, la dépense ne peut
être déductible à quelque moment que ce soit puisque l’équilibre financier
de l’entreprise est conservé. Seule peut-être traduite en comptabilité et
donc influencer le bénéfice net la perte d’actif provenant de la dépréciation
de l’immobilisation au fur et à mesure de son utilisation. L’amortissement
ne concerne donc jamais une dépense, mais un bien dont la valeur se
déprécie progressivement. L’amortissement est donc la technique permet-
tant de traduire la dépréciation prévisible d’un élément d’actif. L’usure et
le temps produisent ici leurs effets habituels 2.
Puisque la fiscalité se réfère à la comptabilité quant à la notion d’amor-
tissement, le principe est que tout amortissement pratiqué en comptabilité
selon les règles du droit comptable est fiscalement déductible. Cependant,
afin de ne pas trop alourdir la fiscalité des entreprises en raison de la
modification des normes comptables en 2005 par l’adoption des normes
IFRS, des règles fiscales dérogatoires ont été admises. De même alors
que l’amortissement est une notion comptable, il peut être utilisé par la
fiscalité à des fins extra-comptables, pour encourager l’investissement
par exemple.
Aussi après avoir exposé la notion commune, c’est-à-dire les condi-
tions dans lesquelles un amortissement peut être pratiqué en comp-
tabilité et donc déduit fiscalement, conviendra-t-il d’exposer la notion
d’amortissement dérogatoire.
1. L’usage entraîne l’usure physique alors que le temps génère l’obsolescence technique ou le
dépérissement juridique tel que celui d’un droit d’exclusivité qui « tombe dans le domaine public ».
2. Le fait que le coût d’acquisition soit retenu comme base d’amortissement ne démontre
pas que ce serait la dépense d’acquisition qui serait amortie mais traduit simplement le maxi-
mum de dépréciation pouvant être subie par le bien acquis.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 203
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§ 1. Les conditions de l’amortissement
1. Un actif est un élément identifiable du patrimoine ayant une valeur économique positive
pour l’entité, c’est-à-dire un élément générant une ressource que l’entité contrôle du fait d’évé-
nements passés et dont elle attend des avantages économiques futurs (PCG, art. 211-1).
L’immobilisation peut être incorporelle (PCG, art. 211-5) ou corporelle (PCG, art. 211-6).
2. Paris 2 nov. 1994, no 92-571, Dr. fisc. 1995, no 17, comm. 959, concl. de Segonzac.
3. Ex. Paris 7 mai 1992, no 91-258, Dr. fisc. 1994, no 21/22, comm. 997, concl. de Segonzac.
4. CE 27 nov. 1981, ass. plén., no 16814, RJF 1982, no 1, 7, concl. Verny.
5. CE 13 mai 1992, no 71496, RJF 1992, no 7, 944.
204 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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fin nécessairement à une date déterminée 1. Le critère mis en œuvre par la
jurisprudence pour permettre l’amortissement des éléments incorporels
de l’actif immobilisé s’attache au terme déterminé des effets bénéfiques
de ces éléments sur l’exploitation et non à la durée de leur existence 2. Il
en est ainsi, par exemple pour les brevets d’invention, une marque 3, les
droits d’exploitation d’un film 4 ou encore les dépenses d’acquisition de
l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament alors même qu’elle
est susceptible d’être renouvelée 5. Pour être amortissables, les droits
incorporels de l’actif immobilisé doivent cependant constituer une source
régulière de profits, être dotés d’une pérennité suffisante 6 et être suscep-
tibles de faire l’objet d’une cession 7. Sur ce dernier point cependant, le
Conseil d’État n’exige pas toujours le critère de la cessibilité 8 même si la
nécessité de ce critère a été réaffirmée 9.
La question de l’amortissement du fonds de commerce est, tout de
même, discutée. Bien que l’article 38 sexies de l’annexe III au CGI écarte
l’amortissement s’agissant des fonds de commerce, on peut, cependant,
soutenir que le Code général des impôts n’interdit l’amortissement que
pour les éléments du fonds de commerce qui ne se déprécient pas de
façon irréversible. Or, la clientèle d’un fonds de commerce est en constant
renouvellement de telle sorte qu’à la clientèle initialement achetée se
substitue progressivement une clientèle créée par l’entreprise. Dès lors il
conviendrait d’amortir la clientèle achetée 10. En sens inverse, la clientèle
peut être considérée abstraitement. Se renouvelant en permanence, elle
est alors indépendante des personnes qui la constituent et donc non
1. CE 4 avr. 1979, no 8153, Dr. fisc. 1979, no 39, comm. 1809 ; RJF 1979, no 6, 339. – CE
3 févr. 1989, no 58260, RJF 3/89, no 263. – CE 6 mai 2015, 8e et 3e ss-sect., n° 376989, SAS Isa-
bella, RJF 7/15, n° 558.
2. CE 18 mars 2015, 9e et 10e ss-sect., n° 366006, Sté d’édition des artistes peignant de la
bouche et du pied, RJF 6/15, n° 471 ; concl. F. Aladjidi, BDCF 6/15, n° 64.
3. CE 28 déc. 2007, no 284899 et 285506, RJF 3/08, no 269. – CE, 3e et 8e ss-sect., 28 déc.
2012, Sté civile fermière du Château Lafon Rochet, no 345841, RJF 3/13 no 267.
4. CE 3 févr. 1989, no 58260, Dr. fisc. 1990, no 52, comm. 2443, concl. N. Chahid-Nouraï ;
RJF 1989, no 3, 263. – Paris, 2e ch. B, 20 sept. 2001, no 98-947, Dr. fisc. 2002, no 11, comm. 212.
5. CE 14 oct. 2005, no 260511, RJF 1/06, no 4.
6. CE 23 juin 2000, 8e et 3e ss-sect., no 188297, Dr. fisc. 2000, no 52, comm. 1059, concl.
G. Bachelier. – CE 10 févr. 1989, no 96431, Dr. fisc. 1989, no 18, comm. 901, concl. B. Martin-
Laprade. – CE 24 sept. 2014, 10e et 9e ss-sect., no 348214, Min. c/ SAS Beauté Créateurs, Dr. fisc.
2015, no 10, comm. 185, concl. Hedary.
7. CE 21 août 1996, SA SIFE, no 154488, Dr. fisc. 1996, no 50, comm. 1482, concl. J. Arrighi
de Casanova. CE 16 oct. 2009, no 308494, RJF 1/10, no 4. – CE 19 juill. 2016, 9e et 10e ch.,
n° 368473, M. Matheus, liquidateur amiable de la société Centre Informatique Arcachonnais,
Dr. fisc. 2016, n° 46, comm. 584, concl. R. Victor, note J.-L. Pierre.
8. Ex. CE 19 déc. 2008, Bettinger, no 296312, RJF 3/09, no 215. – CE 31 juill. 2009, SAS Car-
rières Bonin, no 307305, RJF 11/2009, no 907.
9. CE 23 déc. 2011, 8e et 3e ss-sect., n° 341217, SARL Cambé Sport, Dr. fisc. 2012, n° 7-8,
comm. 145, concl. L. Olléon, note J.-L. Pierre. – CE 15 juin 2016, 9e et 10e ch., n° 375446, SARL
D Distribution, Dr. fisc. 2016, n° 48, comm. 611.
10. En ce sens, J. Turot, « Les incorporels ne sont plus immortels », Dr. fisc. 1996, no 5, p. 170.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 205
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susceptible de se déprécier par le temps 1. Le Conseil d’État a sur ce point
une position traditionnelle. La clientèle n’est pas susceptible d’un amor-
tissement systématique mais peuvent donner lieu à un amortissement les
éléments incorporels du fonds qui, en raison de l’ensemble de leurs carac-
téristiques, sont dissociables de la clientèle qui y est attachée. Toutefois.
La Haute Juridiction juge que pour être amortissables, les immobilisations
incorporelles doivent remplir trois conditions cumulatives :
– l’élément incorporel doit être identifiable ;
– il est dissociable des autres éléments représentatifs de la clientèle 2 ;
– ses effets bénéfiques sur l’exploitation prendront fin à une date
déterminée 3.
222 Contrôle de l’exploitant ¸ L'amortissement ne peut être pratiqué que
pour des biens contrôlés par l'exploitant. Le critère comptable du contrôle
remplace le critère de propriété. La substitution de critère n'a pas forcé-
ment de conséquences fiscales dans la mesure où en général le proprié-
taire a le contrôle. Celui-ci pouvant être défini comme la maîtrise de
l'utilisation, la prise en charge des coûts d'entretien et de la responsabilité
en cas de dommage à autrui. Dans certains cas cependant, la propriété
peut ne pas être suffisante, notamment en présence d'autres contrats tels
qu'un contrat de sous-traitance.
Pour les biens dont l’entreprise a la jouissance à la suite d’un contrat de
location ou de crédit-bail, le critère de la propriété reste seul compétent.
L’entreprise locataire ne peut que déduire les loyers ou les redevances au
titre des frais généraux. L’amortissement sera pratiqué par le propriétaire 4.
Cependant, si le preneur ne peut pas amortir les éléments pris en loca-
tion (immeuble, matériel…), il peut, tout de même, amortir les construc-
tions et les aménagements qu’il effectue sur les immeubles pris à bail. Il
est en effet conforme à l’intérêt de l’entreprise de réaliser dans les locaux
dont elle est locataire les travaux qui lui permettent de mieux s’adapter
1. En ce sens, Rép. min. éco. et fin. no 36870 à M. R. Blum, JOAN Q 30 sept. 1996, p. 5169 ;
Dr. fisc. 1996, no 51, comm. 1508.
2. Le caractère dissociable de l’élément, tel que des fichiers de clientèle, ne saurait résulter
de la seule circonstance qu’il a été individualisé en comptabilité (CE 17 mai 2000, 8e et 3e ss-
sect., no 188975, Sté Les Fils Charvet, Dr. fisc. 2000, no 50, comm. no 995, concl. G. Bachelier).
3. CE 1er oct. 1999, Sté Foncia Particimo, no 177809, Dr. fisc. 1999, no 45, comm. 824 ; RJF
199911/99, no 1324, concl. G. Goulard. – CE 17 mai 2000, 8e et 3e ss-sect., no 188975, Sté Les
Fils Charvet, préc. – CE 7 nov. 2013, 9e et 10e ss-sect., no 348777, Sté Laboratoire Legras, RJF
2/2014, no 119. S’agissant des droits d’utilisation d’un nom de domaine sur Internet, ne
doivent suivre le régime fiscal des éléments incorporels de l’actif immobilisé de l’entreprise que
les droits constituant une source régulière de profits, dotés d’une pérennité suffisante et sus-
ceptibles de faire l’objet d’une cession (CE 7 déc. 2016, 9e et 10e ch., n° 369814, Sté eBay France,
Dr. fisc. 2017, n° 8, comm. 165, concl. É. Bokdam-Tonetti, note J.-L. Pierre).
4. Le montant de l’amortissement ne peut alors excéder le montant du loyer perçu pendant
l’exercice, diminué du montant des autres charges afférentes au bien loué (Art. 31 ann. II CGI).
Les sociétés de crédit-bail peuvent cependant préférer pratiquer l’amortissement financier,
fonction de la durée du contrat (CGI, art. 39 C, 4e al.).
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à ses besoins et qui sont, dès lors, utiles à son exploitation 1. Les conditions
de cet amortissement varient selon que l’on peut considérer que l’entre-
prise locataire est « propriétaire » ou non des travaux et installations.
Lorsque l’entreprise locataire est considérée comme propriétaire des
travaux et installations effectuées, elle peut les amortir selon le mode
approprié à leur nature (linéaire ou dégressif), l’amortissement devant
être réparti sur la durée normale d’utilisation de chaque élément. Cette
situation se rencontre lorsque les installations peuvent être retirées de
l’immeuble sans grave détérioration et que la convention prévoit la faculté
ou même l’obligation pour le preneur de procéder, en fin de bail, au retrait
ou à la démolition des travaux. En revanche, lorsque l’entreprise locataire
ne peut être considérée comme propriétaire des agencements et instal-
lations qui deviennent la propriété du bailleur dès leur réalisation par le
locataire, celui-ci ne peut pratiquer qu’un amortissement financier selon
le mode linéaire, sur la durée normale d’utilisation de chaque élément, du
droit incorporel de jouissance dont la valeur est égale au prix de revient des
aménagements ou installations effectuées.
Cette faculté d’amortir le montant des travaux (et de déduire les inté-
rêts des emprunts consentis pour les financer) n’est, cependant, reconnue
au locataire que dans les limites résultant de la théorie de l’acte normal
de gestion. Il convient donc que les travaux soient utiles à l’exploitation,
qu’ils soient destinés à adapter l’immeuble aux besoins de l’entreprise et
que le montant des travaux, ramené à une valeur annuelle tenant compte
de la durée prévisible du bail, ne porte pas le loyer à un montant anormal
par rapport à celui qui pourrit être exigé du locataire pour un immeuble
aménagé aux frais du bailleur 2.
223 Inscription au bilan ¸ Pour qu'une dépense ou une dépréciation soit
déductible, il faut qu'elle soit liée à la réalisation du bénéfice et donc,
qu'elle concerne un bien affecté à l'exploitation. Or le lien d'affecta-
tion est comptable puisqu'il dépend de l'inscription du bien au bilan de
l'entreprise. C'est pourquoi, l'amortissement ne peut être pratiqué que
pour un bien inscrit au bilan. Aussi, si l'exploitant n'inscrit pas au bilan
une immobilisation affectée à l'exploitation dont il est propriétaire, il
ne pourra pas en pratiquer l'amortissement 3. Il ne pourra pas non plus
amortir les travaux relatifs à l’immobilisation non inscrite à moins que
1. CE 2 oct. 1985, 9e et 7e ss-sect., no 63966, Dr. fisc. 1985, no 52, comm. 2310, concl.
Racine ; RJF 11/85, no 1413.
2. CE 25 avr. 1990, 8e et 9e ss-sect., no 57386, Dr. fisc. 1990, no 22, comm. 1066.
3. Ex. CE 28 sept. 1988, no 45546, Dr. fisc. 1989, no 13, comm. 640. – CE 8 sept. 1999,
no 179832, Dr. fisc. 2000, no 6, comm. 73, concl. J. Arrighi de Casanova. – CAA Lyon 13 avr.
1993, 3e ch., no 91-1072, Dr. fisc. 1993, no 52, comm. 2508. – CAA Bordeaux 27 juin 2000,
3e ch., no 97-977, Dr. fisc. 2001, no 25, comm. 564. – CAA Lyon 27 juill. 2006, 5e ch., no 2 Ly
01297, Dr. fisc. 2007, no 14, comm. 371.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 207
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ces travaux se traduisent par la création d’une immobilisation distincte
de l’immeuble sur lequel ils ont porté et en soient ainsi dissociables 1.
Cependant, le fait d’inscrire une immobilisation au bilan ne permet
pas à lui seul à l’entreprise, d’amortir le coût d’acquisition. Ici, comme
ailleurs, il convient, en effet, d’appliquer la théorie de l’acte anormal
de gestion de telle sorte que l’administration, sous le contrôle des tribu-
naux, vérifie l’utilité de l’immobilisation amortissable pour l’exploita-
tion 2. Depuis 2012 l’article 155-II du CGI exclut la prise en compte de
l’amortissement des biens inscrits au bilan s’ils ne sont pas nécessaires ou
utilisés pour l’exploitation, à moins que puisse être invoquée la tolérance
légale de 5 % 3. Ainsi les amortissements constatés en comptabilité pour
une immobilisation inscrite au bilan mais non affectée à l’exploitation
devront fait l’objet d’une réintégration extracomptable.
1. CE 5 mai 2010, 8e et 3e ss-sect., Min. c/ Peltier, no 316677, RJF 7/10, no 657 ; Concl.
N. Escaut, BDCF 7/10, no 71
2. CE 21 févr. 1979, 7e et 8e ss-sect., no 9995, Dr. fisc. 1980, no 4, comm. 154, concl. Rivière ;
RJF 4/79, p. 125.
3. La neutralisation partielle des effets de la théorie du bilan ne s’applique pas, sous réserve
d’une option expresse en ce sens, lorsque les produits qui ne proviennent pas de l’exercice de
l’activité professionnelle n’excèdent pas 5 % de l’ensemble des produits de l’exercice.
4. Ex. : CE 2 août 2007, 3e et 8e ss-sect., Sté Deleplanque, no 288271, Dr. fisc. 2008, no 19-20,
comm. 313.
5. Les droits de construire ayant un caractère pérenne ne s’amortissent pas (CE 23 déc.
2010, 9e et 10e ss-sect., Min. c/ M. Thirode, no 308206, Dr. fisc. 2011, no 14, comm. 27, concl.
P. Collin, note J.-P. Maublanc).
6. Ex. : des fichiers de clientèle (CAA Lyon 14 mai 1997, 4e ch., no 95-368 et 95-369, Dr. fisc.
1997, no 26, comm. 727). En revanche, l’administration n’admet pas l’amortissement de man-
dats de commissariat aux comptes : Rép. min. JOAN CR 30 sept. 1996, p. 5169, no 36870. De
façon générale, v. BOI-BIC-AMT-10-20, no 320.
7. Pour favoriser l’acquisition de brevets par l’entreprise ainsi que pour tenir compte de
l’accélération du changement technologique, les brevets s’amortissent sur cinq ans alors que la
durée de la protection juridique est de 20 ans.
208 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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225 Amortissement et déficits antérieurs ¸ La jurisprudence du Conseil
d'État relativement à la question de savoir dans le cas où l'entreprise dis-
pose de déficits reportables d'exercices antérieurs, si l'amortissement doit
être pratiqué avant ou peut l'être après l'imputation des reports déficitaires.
Pendant longtemps, il était admis que l'imputation des reports déficitaires
pouvait intervenir avant la déduction des amortissements de l'exercice 1.
Cette solution permettait notamment à une société membre d’un groupe
fiscal d’imputer les déficits subis avant l’intégration 2. Aujourd’hui, en
considération du fait que les déficits antérieurs ne sont pas une charge
de l’exercice, le déficit d’un exercice antérieur ne peut s’imputer que sur
le bénéfice net de l’exercice, ce qui suppose que toutes les charges, parmi
lesquelles les amortissements, aient été préalablement déduites 3.
B. Condition de forme
226 L’inscription en comptabilité ¸ Pour qu'ils soient déductibles,
l'article 39-1-2o du CGI exige que les amortissements soient réellement
effectués par l’entreprise. Il convient donc que l’amortissement apparaisse
dans la comptabilité 4. Le législateur impose d’ailleurs aux entreprises de
comptabiliser un amortissement au moins égal à l’amortissement linéaire
(CGI, art. 39 B). Si cet amortissement minimum n’est pas comptabilisé,
l’entreprise ne pourra pas le reporter sur un exercice ultérieur ; elle perd
le droit de le déduire. Cet amortissement minimum doit être pratiqué
même si le résultat de l’exercice est déficitaire.
Cette condition de l’inscription en comptabilité produit des consé-
quences particulièrement défavorables pour l’entreprise lorsqu’elle a, à
tort, comptabilisé une dépense dans la catégorie des frais généraux au lieu
de l’amortir 5. Le Conseil d’État juge, en effet, qu’une entreprise n’est pas en
droit de demander la déduction du montant d’amortissement qu’elle aurait
eu la faculté de pratiquer si elle avait correctement comptabilisé les biens
correspondants. Par suite, la réintégration du montant des biens amortis-
sables comptabilisés à tort dans les frais généraux ne peut être, pour partie,
compensée par une déduction de l’annuité normale d’amortissement 6.
La perte du droit à amortissement ne joue pas cependant, dans ce
cas, pour l’avenir puisqu’il est admis que l’entreprise retrouve le droit de
1. CE 11 mars 1988, 8e et 9e ss-sect., n° 48646, Sté Sunstrand France, Dr. fisc. 1988, n° 42, comm.
1925, concl. M. de Saint Pulgent ; RJF 4/1988, n° 388, chron. M. Liébert-Champagne, p. 214.
2. Selon l’article 223 I, 1 a du CGI, les déficits qui restent reportables lors de l’entrée dans
un groupe fiscal ne sont pas imputables sur le résultat d’ensemble du groupe.
3. CE 10 avr. 2015, n° 369667, Plén., Société Fayat, Dr. fisc. 2015, n° 28, comm. 457, concl.
V. Daumas, note P. Fumenier – obs. O. Fouquet, ibid. Act. 407 ; RJF 7/2015.
4. Un amortissement dérogatoire est cependant possible pour tenir compte des différences
entre les règles comptables et les règles fiscales portant sur la base, la durée et le mode
d’amortissement.
5. Toutefois, à propos de la correction symétrique des bilans, v. ss 111.
6. CE 1er oct. 1986, 8e et 7e ss-sect., no 44245, Dr. fisc. 1986, no 51, comm. 2307.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 209
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pratiquer un amortissement dans les conditions de droit commun dès la
régularisation des écritures comptables par l’inscription à l’actif de l’élé-
ment en cause 1.
Si l’inscription en comptabilité est une condition nécessaire de la déduc-
tion des amortissements, en revanche, le défaut de récapitulation des
amortissements sur le relevé spécial devant être joint en annexe à la décla-
ration des résultats ne s’oppose pas à la déduction des amortissements qui
ont été réellement pratiqués.
§ 2. Le calcul de l’amortissement
227 Amortissement par composants ¸ La réglementation comptable
prescrit une méthode d'amortissement dite « par composants ». Ainsi,
lorsque des éléments constitutifs d'un actif sont exploités de façon indis-
sociable, un plan d'amortissement unique est établi pour l'ensemble de
ces éléments. En revanche, si dès l'origine un ou plusieurs de ces éléments
ont chacun des utilisations différentes ou procurent des avantages éco-
nomiques à l'entreprise selon un rythme différent, chaque élément est
comptabilisé séparément et un plan d'amortissement propre à chacun
d'eux est retenu. Il en est ainsi, notamment lorsque des éléments d'un
même bien devront être renouvelés avant l'expiration de sa durée de vie.
Ainsi pour un immeuble, la toiture, par exemple fera l'objet d'un plan
d'amortissement différent de celui du reste de l'immeuble. De même,
pour un véhicule, le moteur et les pneus seront traités différemment du
châssis. La partie non décomposée de l'immobilisation est appelée : « la
structure ». Ainsi, pour les immeubles le gros œuvre constitue la struc-
ture ; pour les véhicules routiers la structure est composée du châssis et la
coque des véhicules.
Pour être décomposé de l’élément principal ou structure, le composant
doit avoir une valeur significative 2 ainsi qu’une durée d’utilisation signi-
ficative 3. La décision de décomposer un bien et le nombre de composants
identifiés dépendent des caractéristiques techniques du bien et de l’utilisa-
tion prévue par l’entreprise.
Dans le respect de ces principes, la décomposition d’un même type de
bien peut varier d’une entreprise à l’autre. En revanche, une entreprise
doit décomposer de manière identique les biens de même nature qu’elle
utilise dans des conditions semblables 4.
1. Rép. min. JOAN CR 26 avr. 1982 ; Dr. fisc. 1982, no 24/25, comm. 1287. – V. BOI-
BIC-AMT-10-50-10.
2. Valeur supérieure à 500 euros hors taxes et représentant au moins 15 % du prix de
revient de l’immobilisation dans son ensemble pour les meubles et 1 % pour les immeubles
(BOI-BIC-CHG-20-10-10, no 90).
3. La décomposition n’est pas obligatoire lorsque la durée d’utilisation du composant est
égale à 80 % ou plus de la durée d’utilisation de l’immobilisation.
4. BOI-BIC-CHG-20-10-10, no 160. Pour une étude générale, v. BOI-BIC-AMT-10-30-20.
210 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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En pratique, l’amortissement par composants concerne essentiellement
les immeubles, le matériel roulant et les machines industrielles.
A. Le prix de revient
231 La complexité du prix de revient ¸ Mise à part l'importante exception
des voitures de tourisme dont la base d'amortissement est fiscalement
limitée 1, l’amortissement est fonction du prix de revient 2. Il faut entendre
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cette notion de façon large ; c’est-à-dire qu’au prix d’achat, il convient
d’ajouter un certain nombre de frais. Cependant, parmi les frais suppor-
tés par l’entreprise à l’occasion de l’acquisition de l’immobilisation, tous
ne connaissent pas le même régime. Les uns peuvent être déductibles
immédiatement au titre des frais généraux car ils génèrent une diminu-
tion de l’actif net de l’entreprise, les autres sont à amortir 1.
• La première catégorie concerne les frais généraux immédiatement
déductibles, les frais qui se rattachent à l’acquisition elle-même ; c’est-à-
dire à l’opération d’acquisition ou à l’acte d’achat. Il s’agit principalement
des frais d’acte, y compris les honoraires du rédacteur, les commissions
payées à l’intermédiaire à l’occasion de l’achat, les honoraires versés pour
une évaluation, etc. Ces frais peuvent soit être portés à l’actif du bilan
en majoration du coût d’acquisition de l’immobilisation à laquelle ils se
rapportent, soit être déduits immédiatement en charges. L’option retenue
est irrévocable et s’applique à toutes les immobilisations corporelles et
incorporelles acquises.
• En revanche, sont à amortir les frais qui se rapportent au bien même
acheté, c’est-à-dire, les frais nécessaires à la mise en état d’utilisation
du bien. Ainsi, on devra inclure dans le prix d’achat des frais tels que les
frais de transport et d’installation, les droits de douane, les honoraires
d’architecte 2, etc.
• Quant à la TVA, la question de savoir si elle est incluse dans le prix de
revient, base de calcul de l’amortissement, dépend de savoir si l’entreprise
est ou non soumise à la TVA.
– Si l’entreprise est soumise à la TVA, elle va pouvoir la déduire de la TVA
exigible pour les opérations effectuées au titre de son exploitation. Il n’y
a donc pas lieu d’en tenir compte pour l’amortissement, ce qui en somme
permettrait de la déduire deux fois.
– En revanche, si l’entreprise n’est pas soumise à la TVA ou si simple-
ment, l’immobilisation n’ouvre pas droit à déduction, alors, le prix de
revient comprend la TVA.
Il est à noter que lorsque le prix d’un élément d’actif est augmenté du
fait du jeu d’une clause d’indexation, en cas de prix payable par annuités,
le bien est inscrit au bilan pour le prix porté à l’acte 3 de telle sorte que
ce prix constitue la base d’amortissement. Les versements excédentaires
représentent une charge financière déductible et non une partie du prix 4.
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232 Prise en compte de la valeur résiduelle ¸ Lorsqu'il est certain que la
durée d'utilisation par l'entreprise sera nettement inférieure à la durée
probable d'utilisation, l'entreprise doit prendre en compte la valeur rési-
duelle du bien. Elle ne l'est toutefois que lorsqu'elle est à la fois significa-
tive et mesurable 1. Il en est ainsi, par exemple, si l’entreprise renouvelle
son parc automobile tous les trois ans. Le marché de l’occasion montre
que de tels véhicules ont malgré tout une cote non négligeable. La valeur
résiduelle correspond au prix que l’entreprise obtiendrait au moment de
la revente du bien à la fin de son cycle d’utilisation. L’amortissement doit
alors être calculé sur la valeur d’origine diminuée de la valeur résiduelle.
B. La durée d’utilisation
233 Référence à la durée réelle d’utilisation ¸ La durée d'utilisation rete-
nue pour le calcul de l'amortissement s'apprécie eu égard aux caracté-
ristiques techniques du bien mais également par rapport aux conditions
d'utilisation propres à chaque entreprise. Aussi, les entreprises doivent
déterminer concrètement la durée probable d'utilisation de chaque bien
ou de chaque composant. Cette durée dépend de l'exploitation plus ou
moins intensive des immobilisations ainsi que de la politique de l'entre-
prise relativement au renouvellement de ces immobilisations. La réfé-
rence à la durée réelle d'utilisation peut avoir pour conséquence que la
durée d'utilisation sera plus longue que celle communément admise par
les usages. L'entreprise pourra fiscalement tenir compte de cette diffé-
rence par l'intermédiaire d'un amortissement dérogatoire 2.
Le passage par un amortissement dérogatoire n’est pas forcément néces-
saire pour certaines PME 3. Ces entreprises peuvent amortir sur les durées
d’usage, c’est-à-dire calculées conformément aux usages professionnels.
Cette faculté n’est offerte que pour les biens qui ne peuvent être décompo-
sés ainsi que pour la structure des biens décomposés.
§ 3. L’amortissement linéaire
234 Présentation ¸ Étant donné le but de l'amortissement, le mode normal
est l'amortissement linéaire ou amortissement économique. La fiscalité
peut cependant proposer d'autres modes d'amortissement mais alors sous
forme dérogatoire.
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235 La durée probable d’utilisation ¸ Comptablement les entreprises
doivent amortir leurs immobilisations sur la durée prévisible d'utilisa-
tion qu'elles fixent librement, compte tenu de leurs conditions d'exploi-
tations et de leur politique de renouvellement des immobilisations. Ces
règles dues à l'introduction en 2005 des normes comptables IFRS sont, en
général, moins favorables que les règles antérieures, qui pour déterminer
la durée probable d'utilisation se référaient aux usages professionnels.
Aussi, la fiscalité n'a pas modifié ses solutions. L'entreprise peut calculer
ses amortissements en se référant à la durée d'utilisation conforme aux
usages de la profession.
L’article 39-1-2o du CGI admet les amortissements normalement prati-
qués dans l’industrie, le commerce ou les exploitations. Référence est donc
faite aux usages professionnels 1. En l’absence d’usages professionnels, la
durée d’amortissement doit être déterminée d’après leur durée normale
d’utilisation 2.
À titre indicatif, peuvent être données les durées normales d’utilisation
pour les biens les plus importants :
– pour les immeubles bâtis, de 20 à 50 ans de durée probable d’utilisation ;
– pour le matériel, de 7 à 10 ans ;
– pour le mobilier et les installations, 10 ans ;
– pour le matériel roulant, de 4 à 5 ans.
Ce sont là les durées couramment admises. Mais certaines branches
d’activité ont obtenu des avantages importants. Par exemple, l’aéronau-
tique ou l’automobile. On considère que les investissements utilisés par
ces branches s’usent plus vite ou deviennent plus rapidement obsolètes.
L’amortissement sera alors plus rapide.
Les taux d’amortissement découlant de cette durée probable d’utilisa-
tion ne sont que les taux usuels ou si l’on préfère, le renvoi aux usages en
matière de durée des amortissements n’est qu’une présomption simple.
L’administration peut donc les contester dans le cas où, pour une entre-
prise déterminée, elle les estime exagérés (c’est-à-dire que l’administration
prétend que l’immobilisation litigieuse aura une durée d’utilisation plus
longue que celle indiquée par l’entreprise). En fait, cependant, les amor-
tissements effectués par application des taux normaux pratiqués selon les
normes de la profession ne sont pas discutés.
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L’entreprise peut d’autre part pratiquer des taux plus élevés ; mais à
condition de prouver que tel matériel ou telles installations se déprécient
plus vite que normalement 1 parce que, par exemple, le matériel est uti-
lisé 24 heures sur 24 2. Il en serait, par exemple, ainsi en cas de matériel
utilisé à double ou triple équipe. Dans de tels cas, l’administration ne
remet pas en cause les durées d’amortissement justifiées par des circons-
tances particulières lorsqu’elles ne s’éloignent pas de plus de 20 % des
usages professionnels 3.
L’amortissement dérogatoire n’est qu’une faculté pour les entreprises
de telle sorte qu’elles peuvent préférer renoncer au surcroît de l’amortisse-
ment fiscal pour ne déduire que le montant de l’amortissement pratiqué
en comptabilité.
Pour l’amortissement des biens décomposés, l’amortissement fiscale-
ment déductible de la structure peut être calculé sur la durée d’usage
admise pour le bien considéré dans son ensemble tandis que celui des
composants doit en règle générale être calculé sur la même durée que
celle retenue dans les comptes, c’est-à-dire en fonction de la durée
réelle d’utilisation.
1. Ex. CE 18 mars 1992, no 80772, Dr. fisc. 1992, no 29, comm. 1435.
2. CE 10 janv. 1992, 9e et 8e ss-sect., no 62229, Dr. fisc. 1992, no 29, comm. 1454.
3. BOI-BIC-AMT-10-40-10, no 40. Solution consacrée par la jurisprudence : CE 24 nov.
2010, no 324205, Dr. fisc. 2011, no 4, comm. 127, concl. L. Olléon.
4. Même en invoquant des usages professionnels, il ne peut pas être dérogé à cette règle
(CE, 9e et 8e ss-sect., 6 nov. 1996, no 151686, Dr. fisc. 1997, no 3, comm. 16).
5. CE 15 janv. 1965, no 62099, Lebon 35.
6. CE 16 janv. 1985, no 40284, RJF 1985, no 355.
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tel calcul, l’année est divisée en douze mois de trente jours. Il convient de
tenir compte du jour exact de la date de mise en service ou d’acquisition.
En cas de cession en cours d’exercice, la dernière annuité devrait être
réduite prorata temporis. Mais, par simplification, il est admis par l’admi-
nistration que la dernière annuité ne soit pas comptabilisée car le résultat
fiscal sera le même, à savoir l’imposition au taux plein. L’entreprise a
cependant intérêt à pratiquer l’amortissement. Certes, en diminuant son
bénéfice d’exploitation, l’entreprise augmente d’autant la plus-value à
court terme, mais l’imposition de l’amortissement en cause devenu plus-
value à court terme, pourra être étalée sur trois ans 1.
§ 4. L’amortissement dégressif
238 Présentation ¸ Afin d'aider l'amortissement, le droit fiscal subventionne
l'entreprise qui investit. La technique de l'amortissement est alors utilisée
pour accorder un avantage de trésorerie à l'entreprise. Dans un premier
temps un amortissement massif réduit sa base d'imposition avant que par
le biais d'une réduction des annuités ultérieures l'entreprise rembourse
l'avantage consenti provisoirement 2.
239 Conditions de l’amortissement dégressif ¸ Étant donné son prin-
cipe, l'amortissement dégressif est destiné à favoriser l'investissement.
En effet, comme le nom l'indique, l'amortissement est très élevé au début
de la période d'exploitation puis va en décroissant. Ainsi, la réduction
d'impôt due à l'amortissement est-elle très importante au lendemain
de la mise en service alors que très rapidement, elle se trouvera réduite.
Aussi, pour profiter de cette réduction d'impôt importante, l'entreprise
sera incitée à renouveler plus rapidement son matériel, ses investisse-
ments. De toute façon, l'amortissement dégressif, en différant le paie-
ment de l'impôt, apporte à l'entreprise un avantage de trésorerie 3.
Puisque ce mode d’amortissement est destiné à aider l’entreprise à s’équi-
per de matériel moderne, il ne peut être utilisé que pour certains matériels.
S’agissant d’un amortissement dérogatoire au principe de l’amortis-
sement linéaire, l’amortissement dégressif n’est, pour l’entreprise, que
facultatif. Le choix d’amortir des biens selon le mode linéaire ou le mode
dégressif est une décision de gestion opposable à l’entreprise 4. Ce carac-
tère facultatif permet à l’entreprise, dès l’acquisition du bien, d’opter pour
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l’amortissement dégressif. La question est posée de savoir si une telle
faculté existe également en cours d’amortissement. Une entreprise ayant
opté pour le régime de l’amortissement dégressif peut-elle, après avoir
pratiqué des annuités d’amortissement dégressif, revenir à l’amortisse-
ment linéaire et inversement ? Une jurisprudence ancienne l’avait admis 1,
mais en liaison avec la comptabilité pour qui le mode d’amortissement
constitue une décision de gestion prise au moment de l’inscription du
bien au bilan 2, il est jugé qu’après avoir choisi un mode d’amortissement,
l’entreprise ne peut invoquer la possibilité qu’elle aurait eue de retenir un
autre mode pour demander a posteriori la substitution d’une méthode à
une autre 3.
Pour que l’entreprise puisse opter pour l’amortissement dégressif,
encore faut-il que les biens ainsi amortis présentent certains caractères.
Compte tenu de l’incitation recherchée au renouvellement rapide du
matériel, l’amortissement dégressif est réservé au matériel ayant une cer-
taine durée d’utilisation. Aussi, les biens qui relèvent de l’amortissement
dégressif doivent avoir une durée normale d’utilisation d’au moins trois
ans. D’autre part, s’agissant d’inciter l’entreprise à la modernisation de ses
équipements, les biens amortis de façon dégressive doivent avoir été acquis
à l’état neuf. Ainsi, sont exclus les biens d’occasion.
Enfin, l’entreprise ne peut recourir à l’amortissement dégressif que pour
certains équipements, limitativement énumérés par la loi (CGI, art. 22,
ann. II) :
– matériels et outillages utilisés pour les opérations industrielles de
fabrication, de transformation ou de transport ;
– matériels de manutention ;
– installations destinées à l’épuration des eaux et à l’assainissement de
l’atmosphère ;
– installations productrices de vapeur, chaleur ou énergie ;
– installations de sécurité et installations à caractère médico-social ;
– machines de bureau, à l’exclusion de machines à écrire ;
– matériels et outillages utilisés à des opérations de recherche scienti-
fique ou technique ;
– installations de magasinage et de stockage sans que puissent y être
compris les locaux servant à l’exercice de la profession.
L’article 39 A 2 CGI complète cette liste en ajoutant :
– les investissements hôteliers meubles et immeubles ;
1. CE 24 mars 1971, no 7963, Dupont 1971, p. 222. – Rép. min. JOAN CR 7 mai 1975,
p. 2428.
2. Par ailleurs, l’article L 123-17 du Code de commerce interdit la modification d’un exer-
cice à l’autre de la présentation des comptes annuels (principe de la permanence des méthodes
comptables).
3. CE 2 mars 1994, no 118710, RJF 05/94, no 519, concl. J. Arrighi de Casanova, BDCF 10/94
p. 5. – TA Paris 23 mai 2007 no 01-7544, 1re sect., 1re ch., Sté Dunlop France, RJF 11/07, no 1201.
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– les bâtiments industriels dont la durée normale d’utilisation n’excède
pas quinze années (seuls des bâtiments provisoires de construction légère
peuvent répondre à cette condition).
En cas de décomposition d’une immobilisation, l’amortissement dégres-
sif s’applique à tous ses composants. Il est également applicable à un
composant éligible à l’amortissement dégressif alors que le bien immobi-
lisé lui-même n’y ouvrirait pas droit.
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le reste de la période d’utilisation, l’entreprise a la faculté de revenir à
l’amortissement linéaire. Pour dire les choses autrement, on peut dire que
lorsque l’annuité devient inférieure à l’annuité correspondant au quotient
de la valeur résiduelle par le nombre d’années restant à courir à compter
de l’ouverture de l’exercice en question, l’entreprise peut procéder pour ces
années à un amortissement annuel égal à ce quotient.
1. BOI-BIC-AMT-10-40-10, no 50.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 219
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règles fiscales plus favorables. Les divergences entre la règle comptable et
la règle fiscale sont alors corrigées par des amortissements dérogatoires
qui permettent de traduire en comptabilité l’avantage procuré par la règle
fiscale. Ainsi l’amortissement normal, amortissement linéaire est comp-
tabilisé et vient en déduction du bénéfice imposable. Quant au surcroît
d’amortissement résultant de la règle fiscale plus favorable, il fait l’objet d’un
amortissement dérogatoire. Charge exceptionnelle il est comptabilisé au
passif du bilan à un compte de provision pour amortissement dérogatoire.
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peut alors déduire à la clôture de cet exercice, en sus de l'annuité nor-
male, un amortissement exceptionnel. Exceptionnel car ce sont des cir-
constances exceptionnelles qui ont abouti à ce que la valeur réelle de
l'actif soit inférieure à sa valeur comptable. Exceptionnel également car
la technique de l'amortissement n'est, dans cette hypothèse, possible que
lorsque l'entreprise cesse d'utiliser un bien amortissable à la suite d'une
dépréciation effective et définitive. En effet, il n'y a pas lieu de constater
un amortissement exceptionnel mais une dépréciation lorsque la baisse
de valeur d'un élément amortissable résulte de causes dont les effets
sont a priori jugés irréversibles mais que l’entreprise continue à utiliser le
bien concerné.
Lorsque la dépréciation d’un élément d’actif est effective et défini-
tive, l’entreprise peut déduire à la clôture de l’exercice un amortissement
exceptionnel qui vient s’ajouter à la dotation normale. Ainsi, la décision
ministérielle de retirer un médicament de la liste des spécialités rembour-
sables peut être à l’origine d’une dépréciation réelle de la valeur du dossier
scientifique détenu par un laboratoire, susceptible d’être constatée par le
biais d’un amortissement exceptionnel 1.
Chaque entreprise a la faculté de constituer des amortissements excep-
tionnels ou accélérés lorsque ceux-ci sont justifiés par des circonstances
particulières 2.
248 Amortissements légalement exceptionnels ¸ Pour des raisons poli-
tiques, économiques ou sociales, le législateur peut souhaiter avantager
fiscalement telles catégories d'entreprises ou tels secteurs économiques.
Aussi, donne-t-il la possibilité aux entreprises de pratiquer fiscalement
un amortissement exceptionnel pour certains biens limitativement énu-
mérés et pour les immobilisations utilisées par certaines professions.
Il s'agit de permettre à l'entreprise de pratiquer dès la première année
d'utilisation d'une immobilisation un amortissement massif sans qu'il
y ait besoin de constater une dépréciation extraordinaire équivalente.
L'amortissement exceptionnel constitue ainsi une subvention fiscale tem-
poraire qui sera « remboursée » par l'entreprise du fait que les annuités
d'amortissement suivantes s'en trouveront diminuées. Le choix du mode
d'amortissement constitue une décision de gestion de telle sorte que si
l'entreprise n'a pas pratiqué l'amortissement exceptionnel dans le délai
prévu, elle perd le droit de l'utiliser ultérieurement 3. Pour la plupart
des amortissements exceptionnels, la loi offre à l’entreprise la possibilité
d’interroger l’administration au moyen de la procédure de rescrit pour
savoir si elle peut en bénéficier 4.
1. CE, 9e et 10e ss-sect., 14 oct. 200, SCA Pfizer, no 260486, : RJF 1/06 no 5, concl. S. Ver-
clytte, BDCF 1/06, no 2.
2. BOI-BIC-AMT-10-40-30 no 50.
3. CE, 8e et 7e ss-sect., 23 mai 1990, no 44764 et 70180, RJF 1990, no 7.
4. LPF, art. L 80 B, 2° b.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 221
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Les principaux cas d’amortissement exceptionnel sont les suivants :
– Immeubles destinés à l’épuration des eaux industrielles (art. 39 quinquies
E). Les entreprises qui ont construit ou qui ont fait construire avant le
1er janvier 2011 des immeubles destinés à l’épuration des eaux indus-
trielles ont pu pratiquer, dès achèvement de ces constructions, un amor-
tissement exceptionnel sur douze mois 1.
– Immeubles favorisant la qualité de l’air et l’utilisation rationnelle de l’éner-
gie (art. 39 quinquies F). Les entreprises qui ont construit ou qui ont fait
construire avant le 1er janvier 2011 des immeubles destinés à satisfaire
aux obligations de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l’air et l’uti-
lisation rationnelle de l’énergie ainsi que diverses dispositions du Code de
l’environnement ont pu pratiquer, dès achèvement de ces constructions,
un amortissement exceptionnel sur douze mois.
– Immeubles construits dans certaines zones d’aménagement du terri-
toire (CGI, art. 39 quinquies D). Les entreprises qui ont construit ou fait
construire des immeubles à usage industriel ou commercial pour les
besoins de leur exploitation dans les zones de revitalisation rurale avant
le 1er janvier 2016 ont pu pratiquer, à l’achèvement de la construction, un
amortissement exceptionnel de 25 % du prix de revient, la valeur rési-
duelle étant amortissable sur la durée normale d’utilisation du bien.
– Immeubles affectés aux activités d’élevage et les matériels et installa-
tions destinés au stockage des effluents d’élevage (CGI, art 39 quinquies FB).
Ces biens, qu’ils aient été construits, acquis ou fabriqués à compter du
1er janvier 2016 et jusqu’au 31 décembre 2017, peuvent faire l’objet d’un
amortissement exceptionnel égal à 40 % de leur prix de revient réparti
linéairement sur cinq ans. Il en est de même des travaux de rénovation
immobilisés des bâtiments affectés aux activités d’élevage réalisés sur la
même période.
– Matériels destinés à lutter contre le bruit (CGI, art. 39 quinquies DA).
Les matériels industriels, acquis ou fabriqués avant le 1er janvier 2011 et
destinés à lutter contre le bruit ou permettant de réduire le niveau acous-
tique d’installations existantes, ont pu faire l’objet d’un amortissement
exceptionnel sur une durée de douze mois.
– Matériels destinés à économiser l’énergie (CGI, art. 39 AB). Les maté-
riels, acquis ou fabriqués avant le 1er janvier 2011 et destinés à économiser
l’énergie, ont pu faire l’objet d’un amortissement exceptionnel sur douze
mois à compter de leur mise en service.
– Logiciels acquis par les entreprises (CGI, art. 236-II ancien) 2. Pour les
exercices ouverts avant le 1er janvier 2017, les logiciels acquis par l’entre-
prise ont pu être amortis sur une période de douze mois. Cet amortis-
sement exceptionnel s’effectuait au prorata du nombre de mois restant
1. CE, 9e et 10e ss-sect., 7 avr. 2004, no 236823, Dr. fisc. 2004, no 40, comm. 727.
2. Un logiciel est un ensemble d’instructions, de programmes, procédés et règles ainsi que
de la documentation qui leur est éventuellement associée, relatifs au fonctionnement d’un
matériel de traitement de l’information (BOI-BIC-AMT-20-30-70, no 40).
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à courir entre le premier jour du mois de la date d’acquisition du logiciel et
la clôture de l’exercice ou la fin de l’année.
– Robots (CGI, art. 39 AH). Les PME au sens du droit de l’Union euro-
péenne ayant acquis ou créé entre le 1er octobre 2013 et le 31 décembre
2016 des manipulateurs multi-applications reprogrammables comman-
dés automatiquement, programmables dans trois axes ou plus, qui sont
fixés ou mobiles et destinés à une utilisation dans des applications indus-
trielles d’automation, ont pu procéder à un amortissement exceptionnel
de leur coût de revient sur vingt-quatre mois à compter de la date de leur
mise en service.
– Imprimantes 3D (CGI, art. 39 AI). Les équipements de fabrication addi-
tive acquis ou créés entre le 1er octobre 2015 et le 31 décembre 2017 par
des PME répondant à la définition du droit de l’Union européenne ont
pu faire l’objet d’un amortissement exceptionnel sur vingt-quatre mois à
compter de la date de leur mise en service.
Certains régimes d’amortissements exceptionnels sont par ailleurs
réservés aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, par exemple en
faveur de l’investissement dans des PME innovantes 1 ou de la souscrip-
tion de parts de sociétés d’épargne forestière 2.
249 Le suramortissement ¸ Pour favoriser l'investissement productif,
l'article 39 decies du CGI prévoit que les entreprises peuvent pratiquer
une déduction exceptionnelle de 40 % de la valeur d’origine de cer-
tains biens d’équipements acquis ou fabriqués entre le 15 avril 2015 et
le 14 avril 2017 3. Cette déduction s’applique également aux entreprises
qui prennent en location un bien éligible en application d’un contrat de
crédit-bail ou d’un contrat de location avec option d’achat. La déduction
est pratiquée linéairement sur la durée normale d’utilisation des biens.
L’article 39 decies A du CGI prévoit un dispositif similaire de suramortis-
sement exceptionnel des poids lourds peu polluants acquis à compter du
1er janvier 2016 et jusqu’au 31 décembre 2019 4.
§ 6. L’amortissement différé
250 Présentation ¸ Tant pour assurer la sincérité du bilan que pour éviter
que l'entreprise ne cherche à diminuer sa charge fiscale en choisissant
l'exercice de déduction (principalement, s'il s'agit d'une entreprise assujettie
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à l'impôt sur le revenu qui pourrait jouer de la progressivité de l'impôt), le
droit fiscal, à l'instar du droit comptable et du droit commercial, impose à
l'entreprise de pratiquer chaque année un amortissement minimal 1.
Si l’entreprise ne satisfait pas à cette obligation et que les amortis-
sements réellement comptabilisés soient inférieurs à l’amortissement
linéaire, il y a amortissement irrégulièrement différé qui est sanctionné.
Mais, si à la suite d’amortissements exceptionnels ou simplement d’amor-
tissements dégressifs, l’entreprise a amorti en comptabilité plus que ne le
prévoit l’amortissement linéaire, elle est autorisée à régulièrement différer
l’amortissement normal.
L’intérêt pour l’entreprise de différer un amortissement n’est pas immé-
diatement apparent tant est évident l’avantage de reculer le paiement de
l’impôt. Cet intérêt existe cependant si ce n’est au niveau fiscal, du moins
au plan financier. L’utilité de l’amortissement différé est évidente en
période déficitaire puisqu’il permet de ne pas aggraver le déficit de l’entre-
prise. En période bénéficiaire, le différé d’amortissement présente un inté-
rêt plus diffus. Il permet, cependant, à l’entreprise d’égaliser son résultat
d’une année à l’autre et donc en ayant un résultat quasi constant, de don-
ner d’elle une meilleure image économique. Le différé d’amortissement
présente encore l’avantage de dégager une meilleure rentabilité financière
de l’entreprise et donc de lui permettre, éventuellement, d’obtenir plus
facilement du crédit.
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Ainsi, la plus-value sera augmentée de l’amortissement qui aurait dû être
pratiqué et dans cette limite, elle sera considérée comme plus-value à
court terme.
§ 7. Régimes particuliers
253 Biens somptuaires ¸ Les dispositions concernant les biens somptuaires,
rencontrées à l'occasion de l'étude des frais généraux, produisent les
mêmes conséquences s'agissant de l'amortissement. Puisque l'article 39-4
du CGI exclut des charges déductibles les dépenses somptuaires, l'entre-
prise propriétaire de droit de chasse ou de pêche ainsi que de résidence de
plaisance ou de yacht ne peut pas déduire de ses bénéfices imposables les
amortissements se rapportant à ces biens.
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De la même façon, il convient de rappeler l’interdiction de la déduc-
tion des amortissements se rapportant aux véhicules de tourisme pour
la fraction de leur prix d’acquisition, TVA et frais inclus, qui dépasse un
certain montant qui est fonction du caractère plus ou moins polluant
du véhicule 1. Les dispositions de l’article 39-4 se limitent à plafonner
l’amortissement déductible. Elles sont en revanche sans effet sur la
situation comptable de l’entreprise. Aussi, si l’entreprise vient à céder
le véhicule, la plus-value de cession se calculera par rapport à la valeur
comptable ; de telle sorte que la fraction de l’amortissement qui a été
exclue des charges déductibles sera tout de même retenue pour le calcul
de la plus-value.
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une telle disposition de freiner la pratique des entreprises qui mettent à la
disposition de leurs cadres ou de leurs dirigeants, des biens gratuitement
ou contre un loyer réduit. Ainsi, l’entreprise ne sera-t-elle pas incitée à
évaluer l’avantage en nature pour un montant inférieur à la réalité.
256 Bibliographie ¸
P. Fumenier, « Amortissement de caducité pratiqué par les concessionnaires de service
public », LPA 19 mars 2008, p. 3.
J. Jeausserand, « Jurisprudence Sife : vingt ans après », Dr. fisc. 2015, n° 24, comm.
390.
F. MOrtimer, « L’ambiguïté de la notion d’usage en matière d’amortissement »,
Nouvelles fiscales 2002, no 872, p. 23.
M.-H. Pinard-FabrO et alii, « Amortir une concession de marque : la fiscalité peut-elle
prendre appui sur la comptabilité ? », FR Lefebvre 09/2018, comm. 1.
J.-L. ROssignOL, « L’amortissement des éléments incorporels à la lumière de la juris-
prudence du Conseil d’État sur les autorisations de mise sur le marché des spéciali-
tés pharmaceutiques », Dr. fisc. 2007, no 25, ét. 648, RF compt. 2000, no 322, p. 73.
D. viLLemOt, « Le régime fiscal des immobilisations incorporelles », Dr. fisc. 2008,
no 14, ét. 243.
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subies par les éléments de l'actif 1. La « provision » pour dépréciation
d’actif a ainsi pour objet la prise en compte immédiate des déprécia-
tions de valeur d’éléments de l’actif qui seront définitives lors d’un exer-
cice ultérieur. Ainsi, les provisions pour dépréciation partagent, avec les
provisions pour risques et charges, le but d’accorder à l’entreprise un
avantage de trésorerie par anticipation d’une mesure aux conséquences
fiscales avantageuses.
Afin de comparer la valeur nette comptable d’une immobilisation,
amortissable ou non, à sa valeur actuelle, les entreprises doivent réaliser
un test de dépréciation à chaque clôture des comptes lorsqu’un indice
interne ou externe laisse penser qu’un élément d’actif corporel ou incor-
porel a pu perdre notablement de sa valeur. Si cette comparaison confirme
la perte de valeur, l’entreprise constate dans ses comptes une dépréciation
du bien concerné.
1. Fiscalement sont opposées les provisions pour pertes et les provisions pour charges.
Comptablement on distingue les dépréciations et les provisions pour risques et charges. Mais la
divergence des classifications n’a pas de réelle portée puisque, pour être admises en déduction
des résultats imposables, les diverses provisions doivent toujours satisfaire aux conditions
légales de forme et de fond prévues par l’article 39, 1-5° du CGI.
2. La dépréciation ne doit pas être définitive. Si c’était le cas, il serait démontré que le bien
n’a plus d’utilité pour l’entreprise, la dépréciation serait alors constatée par un amortissement
exceptionnel en raison d’un raccourcissement exceptionnel de la durée d’utilisation.
3. L’exigence d’une approximation suffisante ne s’oppose pas, par principe, au recours à des
données statistiques et à une certaine forfaitisation (CE, 7e ss-sect., 15 janv. 1992, no 74.920,
Dr. fisc. 1992, no 24-25, comm. 1186).
4. CE, ass., 28 juin 1991, Société générale, no 77921 : RJF 8-9/91 no 1052 et concl. Ph. Bissara,
p. 423. – CE 9 févr. 2012, 3e et 8e ss-sect., Min. c/ Sté Traitements de surface et mécanique,
no 334154, RJF 5/2012, no 449, concl. S. Daumas, BDCF 5/2012, no 53.
228 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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amortissable de l’élément déprécié et réviser leur plan d’amortissement.
En cas de disparition ou de diminution de l’indice de perte de valeur, la
dépréciation est reprise à due concurrence et le plan d’amortissement est
également modifié de manière prospective.
S’agissant de révéler la valeur actuelle des éléments d’actif, alors que
cette valeur peut être fluctuante la constatation d’une dépréciation n’est
pas définitive. À la clôture des exercices ultérieurs, il faudra faire évoluer
la dépréciation constatée. La dépréciation sera augmentée si à la clôture
d’un exercice l’actif en cause se déprécie à nouveau. À l’inverse au cas
où l’élément d’actif regagnerait de la valeur, la dépréciation devrait être
réduite. Ces ajustements de la dépréciation produisent évidemment leurs
effets sur la base amortissable qui évoluera en même temps que la valeur
actuelle de l’élément d’actif. Dans l’hypothèse d’un ajustement dû à une
augmentation de valeur, l’opération dégage un produit imposable. Une
telle appréciation qui n’est que l’annulation totale ou partielle d’une
dépréciation constatée antérieurement ne constitue pas la réévaluation du
bilan organisée par l’article L. 123-18 du Code de commerce.
1. CAA Versailles, 1re ch., 8 févr. 2011, SA Gecina, no 09-1202, RJF 6/2011, no 683.
2. Ex. provision pour dépréciation en cas de baisse substantielle de chiffre d’affaires et de
bénéfice (CE, 9e et 10e ss-sect., 23 déc. 2011, SARL Hôtel Arriel Astrid, no 329282, Dr. fisc. 2012,
o
n 6, comm. 133, concl. F. Aladjidi). Une société qui a constitué une provision pour tenir
compte de la dépréciation de son fonds de commerce peut, si cette provision n’a pas perdu son
objet, maintenir ou modifier le montant de cette provision en cas de modification de la consis-
tance de son fonds et de survenance d’événements justifiant toujours une dépréciation, sans
procéder à une reprise de provision suivie d’une nouvelle dotation (CE, 9e et 10e ch., 30 juin
2016, n° 380916, Sté Transat, Dr. fisc. 2016, n° 40, comm. 527, concl. É. Bokdam-Tognetti,
note A. Morterol ; RJF 10/2016, n° 805).
3. CGI, art. 39, 1-5o. La provision pour dépréciation des titres de participation et des
immeubles de placement est cependant plafonnée.
4. BOI-BIC-PROV-40-10-10 no 40.
5. La dépréciation est définitivement réalisée au moment de la sortie d’actif de l’élément
correspondant.
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qui sera réalisée lors de la vente de l’élément, est parfaitement justifiée
car la moins-value n’est qu’éventuelle et car son montant n’est pas exac-
tement connu. En même temps, la provision permet de rendre compte
exactement de la situation de l’entreprise.
261 Créances douteuses ¸ Une créance est douteuse, non pas lorsqu'elle
est incertaine dans son principe ou son montant (auquel cas, elle est
litigieuse), mais lorsque son recouvrement est incertain 6. Si le recouvre-
ment n’est pas aléatoire, mais est d’ores et déjà impossible, la technique
1. Une provision pour dépréciation des stocks peut être évaluée par une méthode statis-
tique à condition que cette évaluation soit précise et suffisamment détaillée selon la nature des
catégories de produits en stock (CE 8 juill. 2009 no 305776, 10e et 9e ss-sect., Sté Métayer Aroma-
tique Industries, RJF 11/09 no 911. – CE, 9e et 10e ss-sect., 8 juill. 2015, n° 367767, Sté. Autodis,
RJF 11/2015, n° 935, concl. F. Aladjidi).
2. Ex. : CE 8 juill. 1982, Dr. fisc. 1983, no 10, comm. 380, concl. Léger. – La méthode statis-
tique fondée sur le critère de la durée écoulé est insuffisamment précise (CE, 9e et 10e ss-sect.,
8 juill. 2015 n° 367767, Sté Autodis RJF 11/15 n° 936, concl. F. Aladjidi).
3. Ex. : CE, 8e et 7e ss-sect., 25 sept. 1989, no 62934, Dr. fisc. 1990, no 15, comm. 732.
4. Rép. min. JO Sénat CR 1988, p. 108 ; Dr. fisc. 1988, no 46/47, comm. 2117. – BOI-BIC-
PDSTK-20-20-10-10.
5. CE, 8e et 7e ss-sect., 2 avr. 1990, no 88285 et 88763, Dr. fisc. 1990, no 44, comm. 2045.
6. Est également déductible une provision constituée en vue de faire face à un engage-
ment de caution si le montant de la perte probable est nettement précisé et si les événe-
ments intervenus au cours de l’exercice rendent probables la mise en jeu de la caution et
l’impossibilité de recouvrer la créance à laquelle l’entreprise sera subrogée (CE 5 déc.
1990, BF Lefebvre 1/91, inf. 32). Sur la déduction par les établissements de crédit des pro-
visions pour dépréciation des prêts qu’ils consentent, CE 10 mai 2017, 9e et 10e ch.,
no 385218, CRCAM du Centre Ouest, Dr. fisc. 2017, no 39, comm. 479, concl. M.-A. Nico-
lozo de Barmon.
230 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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de la dépréciation n’est pas justifiée ; il s’agit d’une perte de telle sorte
que la créance ne doit pas figurer au bilan 1. En revanche, lorsque le
recouvrement est vraiment aléatoire, la technique de la dépréciation
est parfaitement justifiée, car liée au fait que la créance imposable est la
créance acquise. En effet, s’il apparaît que la créance n’a pas été recou-
vrée, il est normal que la créance qui avait été imposée soit déduite. Le
même fondement explique qu’en cas de créances litigieuses, une dépré-
ciation puisse être constituée. Une créance est litigieuse lorsqu’il y a
désaccord entre l’entreprise et le débiteur sur le principe de la créance ou
sur sa quotité. Tel serait le cas en présence d’un client prétendant que la
marchandise reçue était avariée ou ne pas avoir reçu la quantité lui ayant
été facturée.
Une dépréciation pour créance douteuse ou litigieuse ne peut concerner
qu’une créance valablement inscrite au bilan de l’entreprise. Il faut d’autre
part que la dépréciation apparaisse comme probable, c’est-à-dire que le
recouvrement puisse être considéré comme compromis à la clôture de
l’exercice. Pour qu’il en soit ainsi, il n’est pas nécessaire que l’entreprise se
soit heurtée à un refus de paiement 2 ; la constatation de la dépréciation
est possible même en l’absence de poursuites à l’encontre du débiteur du
moment que ses difficultés financières démontrent que le recouvrement
est improbable 3.
Quant au calcul du montant de la dépréciation, celle-ci doit être cal-
culée avec une approximation suffisante pour apprécier la perte probable
de l’entreprise. La forfaitisation de cette perte est admise du moment
qu’elle permet une approximation suffisante 4.
Lorsque la créance impayée est soumise à la TVA, la dépréciation ne peut
être constituée que pour le montant de la créance hors taxe 5. En effet,
lorsqu’une créance apparaît irrécouvrable, le vendeur peut récupérer la
taxe versée indûment par imputation sur la taxe due pour les opérations
faites ultérieurement. Il pourrait même se la faire restituer s’il avait cessé
d’être assujetti à la TVA 6.
1. CE 18 juin 1975, 7e et 8e ss-sect., no 93.550, Dr. fisc. 1975, no 32/37, comm. 1116, concl.
Fabre ; RJF 9/75, p. 281.
2. Ex. : CE 25 mai 1983, 8e et 9e ss-sect., RJF 7/83, p. 397.
3. Une créance détenue sur une société civile immobilière ou une société en nom collectif
ne peut être regardée comme douteuse que si elle est reconnue telle à l’égard non seulement de
la personne morale, mais aussi de chacun de ses membres (CE 29 janv. 1992, no 75083, Dr. fisc.
1992, no 19/20, comm. 982, concl. Fouquet. – CAA Nancy 6 juill. 1995, no 93682, Dr. fisc.
1995, no 52, comm. 2411).
4. Ce ne serait pas le cas pour une provision pratiquée pour des montants déterminés de
façon globale et forfaitaire par application d’un ratio de 10 % au montant des créances non
payées à la clôture de chacun des exercices concernés (CE, 9e et 10e ss-sect., 26 mars 2008, SA
Tornier, no 296625, RJF 6/08, no 639, concl. P. Collin, BDCF 6/08 no 72).
5. CE, 8e et 9e ss-sect., 14 avr. 1982, no 26.386, Dr. fisc. 1982, no 31, comm. 1639, concl.
Verny ; RJF 6/82, p. 281.
6. CGI, art. 272.
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262 Dépréciation des titres en portefeuille ¸ Comme tout élément de
l'actif, si les titres détenus en portefeuille par l'entreprise subissent une
dépréciation, l'entreprise doit comptabiliser cette dépréciation, pour assu-
rer la sincérité du bilan.
Les conditions de constatation de la dépréciation obéissent aux règles
générales applicables à toutes dépréciations de telle sorte que la perte doit
être probable et évaluée avec une approximation suffisante. En vertu de
ces règles, les titres doivent être évalués à la clôture de chaque exercice.
Ils sont évalués par catégories de titres de même nature et non titre
par titre. Chaque catégorie est composée de titres émis par une même
collectivité et conférant à leur détenteur les mêmes droits au sein de la
collectivité émettrice 1. Ainsi, à l’intérieur d’une catégorie, il n’y a pas à
prendre en considération le fait que tous n’ont pas été acquis aux mêmes
dates, ni au même prix. Autrement dit, il n’est pas possible de constater
une dépréciation pour certains titres alors qu’on considérerait que d’autres
titres, de la même catégorie, mais acquis dans des conditions différentes
connaîtraient une plus-value.
Au-delà de ces règles générales, le droit fiscal prévoit des règles
particulières 2.
S’agissant des titres de participation, ils ne peuvent faire l’objet d’une
provision pour dépréciation (ou dépréciation selon la terminologie comp-
table) que s’il est justifié d’une dépréciation réelle par rapport au prix de
revient. Pratiquement, cela signifie, comme le rappelle la doctrine admi-
nistrative, que pour les titres cotés la constatation d’une décote boursière
par rapport au prix de revient d’une participation ne suffit pas à permettre
la constitution d’une provision pour dépréciation 3. L’entreprise doit être
en mesure d’établir que la valeur comptable est supérieure à la valeur
réelle 4. Par ailleurs un dispositif spécifique de plafonnement existe pour
les dépréciations afférentes à des titres de participation dans des sociétés à
prépondérance immobilière 5.
S’agissant des titres de placement, en vertu du droit commun, la dépré-
ciation doit correspondre à une dépréciation réelle. Il faut faire une dis-
tinction selon que les titres sont cotés ou non 6. Les titres cotés s’entendent
des valeurs inscrites admises aux négociations sur un marché réglementé ;
ils sont évalués au cours moyen du dernier mois de l’exercice. Quant aux
titres non cotés, ils sont évalués à leur valeur probable de négociation.
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Les plus-values ou moins-values résultant de ces estimations sont appré-
ciées, pour chaque catégorie de titres de même nature, par rapport à la
valeur d’origine globale de l’ensemble de ces titres. Les plus-values ne sont
pas comptabilisées, tandis que les moins-values sont inscrites au compte
de provisions. Toutefois, une disposition particulière est prévue en cas de
baisse anormale de certains titres cotés apparaissant comme momenta-
née. Dans un tel cas, l’entreprise a, sous sa responsabilité, la faculté de ne
pas comprendre dans la provision tout ou partie de la moins-value consta-
tée sur ces titres, mais seulement dans la mesure où il peut être établi une
compensation avec les plus-values normales constatées sur d’autres titres.
Il résulte de l’article 39-1, 5o du CGI que la dépréciation qui résulte
éventuellement de l’estimation du portefeuille, qu’il s’agisse de titres de
participation ou de titres de placement, est soumise au régime fiscal des
moins-values à long terme. Il en va ainsi même si les titres sont détenus
depuis moins de deux ans. Partant, la provision pour dépréciation n’est
pas déductible des résultats d’exploitation mais est seulement imputable
sur les plus-values à long terme de l’exercice ou des dix exercices suivants.
Lorsque la provision devient sans objet, sa reprise est soumise au régime
des plus-values à long terme. Le lien peut être fait avec le régime de l’impôt
sur les sociétés. Pour les sociétés qui y sont soumises, la cession de titres de
participation détenus depuis deux ans est exonérée sous réserve de la réin-
tégration d’une quote-part. Aussi, la dépréciation constatée pour de tels
titres de participation n’est pas déductible et sa reprise n’est pas taxable.
Depuis que sont entrées en vigueur les règles de neutralisation partielle
des effets de la théorie du bilan, la solution est inchangée pour les titres
de participation dont la définition même (titres dont la possession durable
est estimée utile à l’activité de l’entreprise) démontre le lien direct avec
l’exercice de l’activité professionnelle. En revanche, la dépréciation des
titres de placement étrangers à l’activité professionnelle ne peut pas don-
ner lieu à déduction c’est-à-dire est soumise à neutralisation.
1. Ex. CE, 10e ss-sect., 8 juill. 2011, no 316824, SARL Consorex, RJF 10/11, no 1032.
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« charges à payer » doit être créé lorsque existe une dette certaine dans
son principe et déterminée quant à son montant. Une dette peut être
tenue pour certaine dans son principe, lorsque la créance est acquise
pour le cocontractant de l’entreprise 1. Elle est déterminée quant à son
montant, lorsqu’elle est liquide, c’est-à-dire susceptible d’être chiffrée
avec précision 2.
264 La notion fiscale de provision ¸ La prise en considération, en comp-
tabilité, des provisions est une nécessité pour la mise en œuvre de la
théorie du bilan. Pour retracer, aussi fidèlement que possible, la situation
économique réelle de l'entreprise, on ne peut s'en tenir aux entrées et
aux sorties effectivement constatées, ni prendre en compte les seules
dépréciations d'un élément d'actif. Il faut encore évaluer les dépenses
qui restent à la charge de l'entreprise lors de la clôture de l'exercice, mais
qui n'auraient pas encore été constatées au passif du bilan, comme par
exemple, les dommages et intérêts que l'entreprise devra payer à l'issue
d'un procès en cours.
La constatation des provisions en comptabilité permet ainsi d’informer
de la situation patrimoniale réelle de l’entreprise en avertissant de la pro-
babilité d’un appauvrissement futur.
Un tel rôle des provisions explique, qu’au plan fiscal, les provisions
soient des charges déductibles. Selon l’article 39-1-5o du CGI, les provi-
sions sont constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nette-
ment précisées et que des événements en cours rendent probables.
La déduction des provisions est donc justifiée en ce qu’elles permettent
de prendre en considération des pertes et charges qui, de toute façon, sont
déductibles et en ce qu’elles contribuent à donner une vision exacte de
la situation économique de l’entreprise. La déductibilité immédiate des
pertes et charges à venir trouve donc sa justification dans le souci d’assu-
rer leur pleine efficacité aux exigences comptables concernant la sincérité
du bilan.
Cette coïncidence d’objectif explique que les notions comptables et fis-
cales des provisions soient voisines. En fonction de la nature légèrement
différente des provisions, on peut distinguer les provisions pour risques
et les provisions pour charges. Parmi les provisions pour risques, on peut
citer les provisions pour litiges, les provisions pour amendes et pénalités,
les provisions pour garanties données au client ou encore les provisions
pour pertes de change ou pour engagement de caution. Les provisions
pour risques anticipent la déductibilité de pertes. Parmi les provisions
pour charges on peut nommer la provision pour congés payés, la provi-
sion pour indemnités de départ à la retraite, la provision pour impôts ou
encore la provision pour gros entretien ou grandes révisions.
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Compte tenu du caractère nécessairement provisoire de ce mode de
déduction des dépenses de l’entreprise, le mécanisme des provisions
demande à être expliqué avant que puissent être indiquées les principales
provisions déductibles.
1. Conditions de fond
266 Liberté de constitution des provisions ¸ Au regard du droit fiscal, la
constitution de provisions, contrairement à l'amortissement, n'est jamais
obligatoire. C'est par une décision de gestion discrétionnaire que l'entre-
prise décide de constituer ou de ne pas constituer de provision 2. Cette
liberté va même jusqu’à autoriser l’entreprise qui n’a pas constitué comp-
tablement de provision au cours d’un exercice, à le faire au cours d’un
exercice ultérieur si le risque n’a pas disparu nonobstant le principe de
spécialité des exercices 3. Cette libre décision de gestion fait également
que l’entreprise peut ne constituer qu’une provision partielle, inférieure
au montant de la perte ou de la charge probable 4. S’il en est ainsi, l’entre-
prise pourra lors des exercices ultérieurs, même s’il n’y a eu aucun chan-
gement dans sa situation, augmenter la provision jusqu’à parvenir au
montant qui serait justifié 5.
Ainsi, cette liberté de décision de l’entreprise peut lui permettre de
pratiquer une « gestion fiscale » des provisions qui l’amènerait à ne pas
1. Le fait que le droit comptable recommande la constitution d’une provision ne suffit pas
pour admettre sa déductibilité en matière fiscale dès lors que les conditions spécifiques au droit
fiscal ne sont pas réunies (Ex. : CE, 7e, 8e et 9e ss-sect., 26 avr. 1985, no 30.077, RJF 6/85, p. 423,
concl. Bissara).
2. CE 21 oct. 1987, no 48261, RJF 1987, no 12, 1235.
3. CE 27 mai 1983, no 27412, RJF 1983, no 7, 861.
4. CE 15 nov. 1989, no 90844, RJF 1990, no 1, 16. – CE 24 juin 2013, no 350451, Caron,
Dr. fisc. 2013, no 37, comm. 142, concl. N. Escaut.
5. CE, 7e et 8e ss-sect., 27 mai 1983, no 27.412 à 27414, Dr. fisc. 1983, no 44, 2042 ; RJF 1983,
no 7, p. 395.
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constituer de provision lors d’un exercice déficitaire afin d’éviter les consé-
quences de la limitation dans le temps du report déficitaire ou qui l’amè-
nerait à repousser la constitution de la provision jusqu’à un exercice
largement bénéficiaire afin de jouer de la progressivité de l’impôt sur
le revenu.
Cette liberté de gestion est tout de même discutée lorsqu’une provision
a été constatée en comptabilité. La jurisprudence des juges du fond a été
divisée sur la possibilité pour l’entreprise de ne pas prendre en compte fis-
calement une provision comptabilisée 1. La disparité encore actuelle de la
comptabilité et de la fiscalité quant aux conditions de déductibilité des pro-
visions, disparité fondée sur leurs objectifs spécifiques 2, pouvait paraître
favorable au maintien d’un traitement différent de la provision sur le plan
fiscal et sur le plan comptable. Mais le Conseil d’État estime depuis une
importante décision SAS Foncière du Rond-Point du 23 décembre 2013 que,
sauf si les règles propres au droit fiscal s’y opposent, une provision consti-
tuée dans les comptes d’un exercice doit être déduite fiscalement 3. De la
sorte, l’abstention de la déduction fiscale de la provision ne permet pas
d’échapper à l’incorporation de sa reprise dans le résultat imposable. Il
demeure que le principe d’intangibilité du bilan du premier exercice non
prescrit peut aboutir à l’impossibilité pour l’administration fiscale de cor-
riger ce bilan fiscal pour y inscrire la provision non déduite fiscalement en
vue de tirer les conséquences de sa reprise 4.
267 Déductibilité des pertes et charges provisionnées ¸ La provision
n'étant que l'anticipation de la déduction d'une perte ou d'une charge à
venir, il est évident que ne peuvent être provisionnées que des pertes ou
des charges qui seront déductibles lorsqu'elles surviendront 5. Ainsi, si
l’entreprise prévoit un rappel de l’impôt sur le revenu, la provision qu’elle
constituerait pour ce rappel probable ne serait pas déductible puisque
1. Pour la CAA de Paris la déduction d’une provision pour la détermination de son résultat
fiscal constituait pour l’entreprise une faculté qu’elle peut décider de ne pas exercer (Paris,
9e ch., 18 nov. 2010, no 09-4821, Sté Foncière du Rond-Point, Dr. fisc. 2011, no 10, comm. 244,
note E. Meier et R. Torlet). Au contraire le tribunal administratif de Montreuil avait jugé
qu’une provision constatée en comptabilité doit être déduite sur le plan fiscal dès lors qu’elle
respectait les conditions générales de déductibilité (TA Montreuil 6 déc. 2012, no 1109486,
1re ch., Sté Dalkia, RJF 6/13, no 586 ; concl. V. Restino, BDCF 6/13, no 64).
2. V. BOI-BIC-PROV-10, no 260 s.
3. CE 23 déc. 2013, no 346018, plén., Min. c/ SAS Foncière du Rond-Point, Dr. fisc. 2014,
no 14, comm. 250, concl. E. Crepey, note G. Blanluet ; RJF 3/2014, concl. E. Crepey, BDCF
3/14. – CE, 10e ch., 17 juin 2016, n° 395315, SAS Foncière du Rond Point, RJF 10/16, n° 807 – CE
5 déc. 2016, plén. fisc., n° 398859, Sté Orange, RJF 2/17 n° 155, concl. V. Daumas (C 155) ;
Dr. fisc. 2017, n° 28, comm. 394, concl. V. Daumas, note M. Masclet de Barbarin ; Juris-Data
n° 2016-026287 – CE 19 juin 2017, 9e et 10e ch., n° 391770, Sté Spie Batignolles, RJF 10/2017,
comm. 912 ; Dr. fisc. 2017, n° 51-52, comm. 589 ; Juris-Data n° 2017-016023.
4. Sur le jeu du principe de l’intangibilité du bilan d’ouverture du plus ancien exercice non
prescrit, v. CE plén. 5 déc. 2016 n° 398859, Sté Orange, préc.
5. CE 11 avr. 186, no 40.646, Dr. fisc. 1986, no 45, comm. 1930 ; RJF 6/86, 376. – CE 12 juin
2013, no 351702, Sté. BNP Paribas, Dr. fisc. 2013, no 46, comm. 511, concl. E. Cortot-Boucher.
236 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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la dette d’impôt n’est pas elle-même déductible du bénéfice 1. Il en serait
de même pour une provision destinée à faire face à une pénalité fiscale 2.
268 Probabilité des risques et charges provisionnées ¸ Il ne peut y avoir
de provision si la perte ou la charge est certaine dans son principe et dans
son montant. Il convient alors de comptabiliser directement cette perte
ou cette charge 3. S’agissant des charges, les dettes certaines, liquides et
exigibles sont inscrites dans un compte de tiers alors que les dettes cer-
taine et liquides, mais non exigibles sont inscrites dans un compte de
frais à payer.
Doivent donc être directement rattachées à un exercice les charges
déductibles par nature qui ont pour l’entreprise le caractère d’une dette
certaine dans son principe et dans son montant. Une dette est certaine
dans son principe lorsqu’elle n’est pas contestée par l’autre partie. Il y a
accord des parties sur la chose (bien ou service) et sur le prix. La dette est
certaine dans son montant quand elle peut être liquidée, qu’elle est donc
susceptible d’être chiffrée avec précision.
Lorsque ni le principe, ni le montant ne sont certains, la charge n’est
que probable de telle sorte qu’elle ne peut être prise en compte dans la
comptabilité de l’entreprise que par la technique de la provision. La pro-
vision suppose ainsi un certain degré d’incertitude quant au principe ou
au montant de la perte ou de la charge 4. Mais l’incertitude nécessaire ne
doit pas se traduire par une totale liberté de l’entreprise qui lui permettrait
d’augmenter ou de diminuer à son gré son bénéfice imposable. Aussi, la
constitution de la provision suppose que la perte ou la charge pour laquelle
elle est constituée soit probable et non pas simplement éventuelle. Si au
contraire, la charge n’est qu’éventuelle, possible ; si donc il y a un caractère
aléatoire, la constitution d’une provision n’est pas possible 5. C’est le cas,
par exemple, pour presque toutes les provisions pour risque naturel 6.
« La probabilité doit être distinguée de la simple éventualité en ce sens
qu’elle est établie par des circonstances précises particulières, alors que
1. Une telle provision devrait, tout de même, être constatée en comptabilité, mais, pour
la détermination de sa situation fiscale, l’entreprise devra procéder à un réajustement
extracomptable.
2. CE 14 juin 1989, 7e, 8e et 9e ss-sect., no 66.180, Dr. fisc. 1990, no 43, comm. 1969. Paris
26 mars 1991, Dr. fisc. 1993, no 32/37, comm. 1635.
3. CE, ass. plén., 25 févr. 1985, no 37.362, RJF 1985, no 4, 275, concl. Fouquet ; Dr. fisc. 1985,
no 26, 1219. Jugé cependant que l’inscription dans un compte de provisions d’une dette cer-
taine est sans incidence fiscale (CE 3e et 8e ss-sect. 17 mars 2016, n° 381427, Société Sogetra,
Dr. fisc. 2016, n° 21, comm. 334, BF Lefebvre 6/2016, n° 499 ; RJF 6/2016, n° 512, concl.
V. Daumas).
4. CE 31 janv. 1979, no 3101, RJF 3/79, 81.
5. La jurisprudence a pu préciser que la simple probabilité statistique n’est pas suffisante
pour rendre le risque probable.
6. Ex. : Cyclone (CE 27 mars 1963, no 52259, Dr. fisc. 1963, no 21, doctr., concl. B. Duca-
min). – Grêle (CAA Nantes, 1re ch., 30 juin 1994, no 92-551, Dr. fisc. 1995, no 5, comm. 161).
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 237
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l’éventualité résulte d’un simple risque d’ordre général » 1. Ainsi, faute
d’événements précis intervenus au cours de l’exercice ou d’un exercice
précédent, une entreprise ne pourrait déduire une provision pour la dépré-
ciation des comptes de créances résultant des effets de l’inflation 2.
De même, la circonstance que son débiteur a demandé le renouvelle-
ment d’effets venant à échéance n’autorise pas une entreprise à regarder sa
créance comme irrécouvrable. En revanche, il est évident que l’ouverture
d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de son débiteur
rend la perte probable ; il en serait de même en cas de traite protestée ou
même simplement de situation notoirement difficile.
Également, la provision constituée à la clôture d’un exercice pour cou-
vrir des rappels de TVA pouvant éventuellement résulter d’un contrôle
fiscal prévu pour l’exercice suivant n’est pas déductible tant qu’un événe-
ment précis ne rend pas probable ce contrôle ; ne serait-ce qu’une simple
demande d’information.
269 Origine des risques et charges dans l’exercice en cours ¸ Pour être
déduite des résultats d'un exercice, la provision doit pouvoir être rattachée
à cet exercice 3 ; elle doit avoir sa source dans celui-ci. Ainsi, la perte ou
charge provisionnée doit avoir été constatée au moment de la clôture de
l’exercice alors qu’elle sera effectivement supportée et acquittée lors d’un
exercice ultérieur 4. Les charges qui ne se rattachent pas à des opérations
des exercices précédents, mais sont liées aux opérations d’un exercice à
venir, constituent une charge d’exploitation de cet exercice et ne peuvent
donner lieu à provision. On ne peut, par exemple, déduire une provision
pour travaux d’entretien et de réparation même si elle peut être justifiée
par l’état de certains équipements à la clôture de l’exercice 5. De même,
ne pourrait être déduite une provision pour faire face à la charge repré-
sentée par la cotisation de contribution économique territoriale. Une telle
provision n’est pas déductible car le fait générateur de la contribution
économique territoriale n’intervient qu’au 1er janvier de l’année d’imposi-
tion. La cotisation correspondante ne peut donc être regardée comme une
charge se rattachant à des opérations déjà effectuées par le contribuable à
la date de la clôture de l’exercice précédent ou à des événements en cours
qui la rendraient probable 6.
1. BOI-BIC-PROV-20-10-30, no 1.
2. CE 29 juill. 1983, no 39.012, RJF 11/83, 600 ; Dr. fisc. 1984, no 8, 331.
3. CE 17 févr. 2016, 10e et 9e ss-sect., n° 377415, Sté Éditions Atlas (EA), Dr. fisc. 2016, n° 22,
comm. 347, concl. E. Crépey ; RJF 5/2016, n° 411.
4. Les événements susceptibles de justifier une provision peuvent n’avoir été connus par le
contribuable que postérieurement à la date de clôture de l’exercice (CAA Lyon, 2e ch. 24 mai
2000, no 96-682, Dr. fisc. 2001, no 17, comm. 398).
5. Une provision pour grosses réparations est cependant déductible dès lors que les travaux
excèdent les charges annuelles et normales de l’entreprise (Ex. : CE, 9e et 8e ss-sect., 6 juill.
1990, no 73.078, Dr. fisc. 1991, no 18, comm. 965).
6. CE, 8e et 3e ss-sect., 30 juin 2004, no 253513, Dr. fisc. 2003, no 43, comm. 787.
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270 Évaluation des pertes et charges ¸ Ne serait-ce qu'en raison de la
probabilité de la perte ou de la charge provisionnée, le montant de la
perte ou de la charge ne peut généralement être connu avec précision
au moment de la constitution de la provision. S'il est souhaitable que le
montant de la provision soit calculé à partir d'éléments réels et précis,
bien souvent l'évaluation ne pourra être qu'approximative. Il convient
alors pour la déductibilité de la provision que cette approximation
soit « suffisante ».
Cette exigence d’une approximation suffisante a, pendant longtemps,
fait rejeter les provisions constituées forfaitairement 1. Aujourd’hui, une
évaluation forfaitaire de la provision est admise à condition que la marge
d’incertitude soit réduite au maximum 2. Le Conseil d’État a, par exemple,
autorisé la constitution d’une provision pour remplacement de spécialités
pharmaceutiques périmées, évaluées par voie statistique, en dégageant le
pourcentage moyen de reprises ou de remboursements par rapport aux
ventes 3. De même, s’agissant d’une provision pour garantie constituée
par un concessionnaire de poids lourds qui conclut pour la première fois,
avec sa clientèle, des contrats de réparation et d’entretien, le Conseil d’État
a admis la validité du calcul fondé sur les données statistiques commu-
niquées par le constructeur et adaptées par l’entreprise en fonction de sa
propre exploitation 4.
Ainsi, d’une façon générale, l’approximation suffisante pourra résulter
des données statistiques des exercices précédents de l’entreprise 5.
L’utilisation des statistiques pour la constitution des provisions peut
être délicate dans la mesure où la probabilité du risque ne peut résulter
des statistiques 6 alors que l’évaluation de la perte peut être faite avec l’aide
des statistiques. L’exemple de la provision pour créances douteuses montre
ces difficultés. Si l’on estime, pour les besoins de la démonstration, que
5 % des entreprises seront un jour en état de cessation des paiements,
cette connaissance statistique ne permet pas à l’entreprise de provision-
ner 5 % de ses créances car la perte n’est qu’éventuelle et pas probable. En
revanche, si un débiteur de l’entreprise est mis en redressement judiciaire,
l’entreprise peut, pour l’évaluation de la perte probable, utiliser les statis-
tiques et sachant qu’un créancier chirographaire ne touche en moyenne
dans une telle procédure, que 5 % de sa créance, elle pourra provisionner
95 % de sa créance.
1. Ex. une provision pour créances douteuses calculée sur la base de statistiques : CE, 8e ss-
sect., 18 mai 1966, no 58.344, Dr. fisc. 1966, no 47, doctr., concl. Dufour ; Dupont 1966, no 9,
p. 404.
2. CE 26 juill. 1985, no 45.663, RJF 11/85, 755 ; Dr. fisc. 15, no 50, 2205.
3. CE 24 juill. 1981, JCP CI 1982, no 13.787, concl. Verny.
4. CE 14 févr. 2001, no 189776, RJF 5/01, no 595.
5. CE 25 sept. 1989, no 62934, Dr. fisc. 1990, no 15, comm. 732.
6. CE 17 févr. 2016, 10e et 9e ss-sect., n° 377415, Sté Éditions Atlas (EA), Dr. fisc. 2016,
n° 22, comm. 347, concl. E. Crépey ; RJF 5/2016, n° 411.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 239
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Cette distinction dans le domaine d’application des statistiques peut,
cependant, se révéler plus délicate. Ainsi, si l’entreprise a constaté sta-
tistiquement que 5 % de ses créances étaient restées impayées lors des
exercices précédents, peut-elle provisionner, lors d’un exercice, 5 % de
ses créances ? Les statistiques lui servent, en effet, à la fois pour établir
la probabilité du risque et son évaluation. Il paraît cependant établi que
lorsqu’elles sont issues de la situation interne de l’entreprise, une telle
utilisation des statistiques est possible 1.
2. Conditions de forme
271 Inscription en comptabilité ¸ Si a pu être controversée la question
de savoir si l'entreprise est tenue de déduire pour la détermination de
son résultat fiscal une provision régulièrement comptabilisée 2, il n’en
demeure pas moins que l’inscription en comptabilité est une condition
de la déduction fiscale d’une provision. Si une entreprise n’a pas inscrit
en comptabilité une provision qu’elle était en droit, voire obligée, de prati-
quer, elle ne peut la déduire des bénéfices de l’exercice au cours duquel elle
aurait dû l’inscrire au bilan 3.
En revanche, du moment qu’elle a été constatée dans les écritures de
l’exercice, une provision peut être admise en déduction même si elle ne
figure pas sur le tableau des provisions produit à l’appui de la déclaration
des résultats de l’exercice en application de l’article 53 A du CGI. La seule
sanction de cette inobservation formelle réside dans une amende fiscale.
1. V. par ex. Paris 24 janv. 1991, no 89-2783, Dr. fisc. 1992, no 48/49, comm. 2271.
2. V. ss 266.
3. CE 4 mars 1983, no 33.788, RJF 5/83, 277.
4. Not. : CE 19 juin 1959, 7e et 8e ss-sect., no 39.388, Dr. fisc. 1959, no 28, comm. 600.
240 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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en comptabilité ou bien, si cet exercice est déjà prescrit, aux résultats du
plus ancien des exercices soumis à vérification 1. Cette façon de faire a, par
la suite, été à plusieurs reprises confirmée par le Conseil d’État 2.
1. BOI-BIC-PROV-50, n° 400.
2. Ex. : CE 28 mars 1979, no 1772, Lebon 136 – CE 28 sept. 1984, 8e et 9e ss-sect., n° 29346,
RJF 11/1984, comm. 1305.
3. CE 7 déc. 2016, 8e et 3e ch., n° 384309, EURL Cortansa, RJF 2/17, n° 172, concl. Bohnert.
4. CE 13 juill. 1961, 8e ss-sect., no 48.258, Dupont 1961, no 10, p. 40.
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 241
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droit de reprise, de telle sorte que si l’exercice de réintégration est atteint
par la prescription, l’administration ne peut effectuer de rectification.
La différence avec le cas où la provision est devenue sans objet s’explique
par le fait que, dans la première hypothèse, l’administration n’a aucun
moyen de découvrir la disparition du risque, du moins cette circonstance
n’apparaît pas dans les comptes de l’entreprise ; alors qu’une vérification
de ces comptes permet à l’administration de découvrir le détournement
de la provision.
1. CE, 3e et 8e ss-sect., 20 mars 2013, no 349636, Min. c/ M. et Mme Chauvin, Dr. fisc. 2013,
no 29, comm. 375, note L. Chatin-Autajon.
242 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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Une provision peut cependant être constituée pour un complément de
salaire à verser aux dirigeants ou au personnel après la clôture de l’exer-
cice. Mais ceci à condition que ce complément de salaire résulte d’enga-
gements formels (statutaires ou conventionnels) pris avant la clôture de
l’exercice ou que la gratification soit fondée sur des usages constants aux-
quels l’entreprise ne saurait se soustraire 1. D’autre part, il convient que
le montant de la gratification ne puisse pas être calculé avec exactitude
au moment de la clôture de l’exercice. Ce serait le cas, par exemple, d’une
prime de bonne gestion attribuée à un gérant ou à un directeur avec des
pourcentages variables ; le choix définitif appartenant au conseil d’admi-
nistration appelé à statuer sur les comptes.
Les provisions pour indemnité de licenciement obéissent au même
principe qu’en ce qui concerne les salaires. Une telle provision ne peut
être constituée pour des licenciements que l’entreprise envisage d’effec-
tuer au cours d’un exercice postérieur 2. À moins que le risque ait déjà
pris naissance au cours de l’exercice. Ainsi en est-il lorsque l’entreprise
a débuté la procédure de licenciement (information des divers organes
sociaux), même si à la clôture de l’exercice, les autorisations nécessaires
n’ont pas encore été obtenues. Toutefois, la loi prévoit que les provisions
pour indemnités de licenciement économiques ne sont pas déductibles 3.
Quant aux congés payés, ils n’ont pas à donner lieu à une provision.
La loi fiscale prévoit que constituent des charges déductibles du résultat
de l’exercice les droits à congé acquis par les salariés à la clôture de celui-
ci, ainsi que les charges sociales et fiscales afférentes 4. Par exception,
les entreprises ont pu exercer avant 1987 une option fiscale irrévocable
prévoyant la déduction des charges au titre de l’exercice au cours duquel
le salarié prend le congé, c’est-à-dire en définitive le moment où le congé
est payé. Dans cette hypothèse, il est nécessaire d’effectuer une correction
extra-comptable du résultat comptable pour déterminer le résultat fiscal.
S’agissant des provisions pour faire face par anticipation aux allocations
dues par l’entreprise à ses salariés en raison de leur départ à la retraite,
alors que le Conseil d’État avait admis la déductibilité de provisions pour
retraite complémentaire versée au personnel 5, l’article 39-1-5° du CGI
interdit leur déduction. La règle est générale, de sorte qu’elle s’applique
qu’il s’agisse d’indemnités de départ à la retraite, d’allocations de prére-
traite, de compléments de retraite ou même des charges sociales liées au
versement de ces sommes 6.
1. CE, 7e et 9e ss-sect., 28 avr. 1982, no 20.330, Dr. fisc. 1982, no 41, comm. 1876, concl.
Schricke ; RJF 6/82, p. 279.
2. BOI-BIC-PROV-30-20-10-20, no 80.
3. CGI, art. 39-1, 5o.
4. CGI, art. 39-1, 1° bis.
5. CE 2 févr. 1983, 8e et 9e ss-sect., no 29.069, Dr. fisc. 1983, no 28, comm. 1500 ; RJF 4/83,
p. 211, concl. Bissara.
6. CE 24 mars 2006, 9e et 10e ss-sect., no 257330, SA Martell et Co, RJF 6/2006, no 667 (jugé
que compte tenu de leur nature et du fait que leur exigibilité est liée au versement effectif d’une
LA DÉFINITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX 243
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Enfin, d’autres cas peuvent se présenter, comme celui dans lequel
l’entreprise a l’obligation, compte tenu de son affiliation à une Caisse
nationale au titre des risques invalidité, décès, accidents du travail et
maladies professionnelles, de contribuer annuellement à la couverture des
charges exposées à cette fin par cette caisse 1.
279 Provision pour impôts ¸ La constitution d'une provision pour faire
face au paiement de certains impôts est admise à la condition évidente
que l'impôt soit lui-même déductible. Ainsi une provision pour le paie-
ment de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés ne serait
pas déductible.
Malgré tout, l’administration admet la déduction des provisions pour
impôt destinées à faire face à la charge d’un impôt qui constitue au point
de vue fiscal une charge de l’entreprise mais ne deviendra exigible qu’au
cours de l’un des exercices suivants, à deux conditions. Il est nécessaire
que cet impôt présente un caractère permanent et qu’il soit dû à raison de
faits survenus au cours de l’exercice de déduction de la provision 2.
Dans ces conditions, l’entreprise pourra constituer une provision pour
paiement de la taxe d’apprentissage, à fixer compte tenu des exonérations
qui peuvent être demandées par l’entreprise 3. Il en est de même pour le
paiement de la taxe sur les salaires, si elle correspond à des salaires dus au
titre de l’exercice, mais non encore versés ; exemple une prime de bilan que
l’entreprise s’est formellement engagée à verser aux salariés au début de
l’exercice suivant 4. Une provision pourrait également être constituée pour
le paiement d’un rappel de droits d’enregistrement 5, d’un rappel de TVA 6
ou pour la participation des employeurs à l’effort de construction lorsque
l’entreprise a choisi, à la clôture de l’exercice de se libérer sous la forme
d’une subvention déductible des résultats imposables 7.
280 Provision pour litiges ¸ Une entreprise peut constituer une pro-
vision pour faire face à une condamnation pécuniaire devant résulter
allocation de départ à la retraite, les charges sociales afférentes à cette dernière présentent, du
point de vue fiscal, le même caractère que celle-ci et ne peuvent suivre un régime différent de
celui de l’allocation de départ à la retraite proprement dite).
1. À propos des employeurs affiliés à la Caisse nationale des industries électriques ou
gazières, CE 22 nov. 2017, 8e et 3e ch., n° 393619, Min. c/ Sté Électricité de Strasbourg (EDS) et
n° 400914, Min. c/ Sté Électricité de France (EDF), BF Lefebvre 2/2018, comm. 108 ; RJF 2/18,
comm. 145, concl. B. Bohnert.
2. BOI-BIC-PROV-30-20-20, n° 1.
3. CE 15 févr. 1978, 7e et 8e ss-sect., no 4413, Dr. fisc. 1978, no 25, comm. 1036 ; RJF 4/78,
p. 115 ; Lebon 76.
4. CE 25 oct. 1972, Dr. fisc. 1973, no 43, comm. 1468, concl. Delmas.
5. CE 18 mai 1983, no 29.254, Lebon 200.
6. CE 21 janv. 1991, 9e et 7e ss-sect., no 76.390, Dr. fisc. 1991, no 44, comm. 2082.
7. CE 27 nov. 1974, 7e et 8e ss-sect., no 88.113, Dr. fisc. 1975, no 3, comm. 68, concl. Fabre ;
RJF 2/75, p. 75 ; RF compt., p. 255, Obs. M. Cozian.
244 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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d'un procès en cours (litige commercial 1, salarial 2 ou fiscal 3). La condi-
tion de constitution d’une telle provision est que le risque se soit maté-
rialisé au plus tard à la clôture de l’exercice par l’engagement d’une
procédure administrative ou judiciaire 4, voire d’une procédure d’arbitrage
conventionnel 5. Par ailleurs, la dépense prévisible ne doit pas être exclue
des charges déductibles de telle sorte que tout risque de condamnation à
des amendes ou pénalités ne peut être provisionné. Le montant déduc-
tible de la provision correspond aux prétentions de la partie adverse 6.
281 Provision pour travaux ¸ En principe, il ne peut être constitué de pro-
vision pour les dépenses de travaux. S'il s'agit de travaux ayant la nature
d'immobilisations, le refus de la provision s'explique par le fait que les
travaux n'entraînent pas une diminution de l'actif net 7 ; ainsi, pour les
dépenses de remplacement d’un composant qui sont obligatoirement ins-
crites à l’actif en tant que composant. Concernant les travaux d’entretien
et de réparation, le rejet de la technique de la provision se justifie par le
fait que de telles dépenses constituent une charge normale de l’exercice
au cours duquel elles sont exposées. Dans l’hypothèse où les travaux
se traduisent par une augmentation de la valeur ou de la durée d’utili-
sation des biens concernés, les dépenses correspondantes doivent être
immobilisées et ne peuvent être déduites que par voie d’amortissement.
Cependant, une provision est déductible si les travaux à prévoir excèdent
par leur nature et leur importance, et sans pour autant procurer à l’entre-
prise une augmentation de ses valeurs d’actif 8, les travaux d’entretien et
de réparation dont le coût entre dans les charges annuelles et normales
de l’entreprise 9.
Il s’agit de provisions pour gros entretien ou grandes révisions 10. Ainsi
pourra constituer une provision pour travaux, une entreprise concession-
naire ou locataire qui doit restituer, en fin de contrat, les équipements
1. CE 5 sept. 2008, 3e et 8e ss-sect., no 286393, SNC Viver Promotion, Dr. fisc. 2008, no 44,
comm. 554, concl. E. Glaser ; RJF 12/08, no 1344.
2. CE 24 mai. 2000, 3e et 8e ss-sect., no 185647, CRCAM du Midi, Dr. fisc. 2000, no 48,
comm. 943, concl. L. Touvet ; RJF 7-8/00, no 901.
3. CE 21 janv. 1991, 9e et 7e ss-sect., no 76390, Sté Cabinet Henri Melhem, Dr. fisc. 1991,
no 44, comm. 2082 ; RJF 3/91, no 262.
4. CE 7 août 2008, 3e et 8e ss-sect. no 287712, Sté Voillet Frères, RJF 11/08, no 1165.
5. CE 4 déc. 2013, 3e et 8e ss-sect. no 354228, SC Groupe Valois, Dr. fisc. 2014, no 12, comm.
220, concl. V. Daumas.
6. CE 22 oct. 1980, 7e et 8e ss-sect., no 13474, Dr. fisc. 1981, no 7, comm. 288 ; RJF 12/80,
no 945.
7. CE 8 juin 1983, 7e et 8e ss-sect., no 29.494, RJF 8,9/83, p. 439.
8. Si les travaux ne sont pas de grosses réparations, mais de rénovation, ils ne peuvent faire
l’objet que d’amortissement (CE 25 mars 1983, 7e et 9e ss-sect., no 18298 et 29635, Dr. fisc.
1983, no 39, comm. 1732 ; RJF 6/83, p. 348).
9. CE 8 juill. 1987, 9e et 8e ss-sect., n° 49158, RJF 10/1987, comm. 970 (à propos d’un parc
de wagons ferroviaires) – CE 6 juill. 1990, 9e et 8e ss-sect., no 73078, Dr. fisc. 1991, no 18,
comm. 965.
10. Cf. notamment PCG, art. 214-10.
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loués ou concédés en bon état d’utilisation 1. De même, une entreprise
qui a programmé des travaux de grande importance pourra constituer
une provision en fonction du plan qu’elle a établi 2. Plus généralement,
l’administration admet que « des provisions puissent être constituées
en franchise d’impôt pour faire face à des dépenses correspondant à des
charges normales, lorsque l’importance et le caractère de ces charges
sont tels qu’elles doivent, en bonne administration, être réparties sur un
certain nombre d’exercices. Il en est ainsi, par exemple, pour les dépenses
nécessitées par le gros entretien ou les grandes révisions qu’exigent pério-
diquement, mais non annuellement, certains matériels – notamment le
matériel naval et ferroviaire – et dont le montant constituerait une charge
excessive pour les résultats d’un seul exercice » 3.
Toutefois, la provision ne peut être constituée que si les dépenses sont
nettement précisées à la clôture de l’exercice dont elles affectent les
résultats. Selon l’administration, il est nécessaire que l’entreprise justifie
d’une programmation détaillée des travaux à entreprendre assortie d’une
estimation précise de leur coût 4. D’autre part, l’entreprise devra justifier
de la réalisation des travaux programmés dans un délai raisonnable 5.
L’exigence posée par la doctrine administrative d’une programmation
détaillée des travaux est contraire à la position adoptée par la jurispru-
dence. Selon le juge de l’impôt, la seule circonstance que la programma-
tion ou le calendrier des travaux ne soient pas précisément arrêtés à la fin
de l’exercice au titre duquel est imputée la provision ne fait pas obstacle
à ce que celle-ci puisse être regardée comme correspondant à des charges
évaluées avec une approximation suffisante et apparaissant comme pro-
bables eu égard aux nécessités résultant des circonstances constatées à
la date de clôture de l’exercice 6. Ainsi, le Conseil d’État considère que
l’absence de programmation détaillée ne fait pas obstacle à la constatation
de la provision dès lors que l’état de dégradation de l’immeuble à la clôture
de l’exercice de constitution de la provision est tel qu’il rend nécessaire la
réalisation des travaux 7.
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282 Provision pour garantie après vente ¸ La jurisprudence a longtemps
refusé la déduction de telles provisions en se fondant sur le caractère de
charges normales des exercices au cours desquels étaient effectuées les
réparations. Aujourd'hui, le Conseil d'État en admet la déduction 1, à
condition que la provision soit déterminée avec une précision suffisante 2.
Si la garantie résulte le plus souvent d’un engagement contractuel 3, le
Conseil d’État admet également qu’elle puisse résulter d’un usage 4 même
propre à l’entreprise 5. Dans le même genre, les entreprises qui réalisent
des ventes assorties d’un engagement de reprise peuvent, dès la vente
initiale, constater une provision correspondant à la marge négative qui
risque d’être subie lors de la revente ultérieure des biens repris 6. Égale-
ment, il est permis à l’entreprise de passer une provision en raison de la
garantie de remboursement et d’échange des produits vendus 7.
1. CE 24 juill. 1981, 8e et 9e ss-sect., no 17.904, Dr. fisc. 1982, no 9, comm. 394, concl. Verny ;
RJF 10/1981 no 853. De même pour un contrat de garantie et d’entretien (CE 14 févr. 2001,
no 189776, RJF 5/2001, no 595).
2. CE 26 juill. 1985, 7e et 9e ss-sect., no 45.663, Dr. fisc. 1985, no 50, 2205. – CE 28 sept.
1990, no 88764, 8e et 7e ss-sect., Loire, RJF 11/1990, no 1320 (engagement par un maître-verrier
de réparer pendant dix ans les vitraux pouvant se détériorer, sans avoir pu faire assurer ce
risque).
3. CE 14 févr. 2001 no 189776, 9e et 10e ss-sect., SA Catalogne poids lourds, RJF 5/2001,
no 595, concl. J. Courtial ; BDCF 5/2001, no 62.
4. CE 28 mai 1980, 7e et 8e ss-sect., no 15912, RJF 7/1980, no 577.
5. CE 13 juill. 2007 no 289233 et 289261, 9e et 10e ss-sect., Sté Volkswagen France, RJF
11/2007 no 1217, chr. J. Burguburu p. 943
6. CE 13 juill. 2007, no 289233 et 289261, RJF 11/2007, no 1217. Une provision pour enga-
gement de reprise des produits vendus doit être déterminée par référence à l’ensemble des
contrats de vente assortis d’un tel engagement et non contrat par contrat (CAA Versailles
19 juill. 2016, n° 14VE01462, FR Lefebvre 40/16, n° 1, p. 2).
7. CE 28 mai 1980 no 15912, préc. (à propos d’une entreprise reprenant ou remboursant,
conformément à un usage de la profession, les médicaments périmés et par suite sans valeur,
retournés par ses clients, et ayant constitué des provisions destinées à faire face à la charge
représentée par ces remplacements ou remboursements).
8. Mais des subventions fiscales remboursables.
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politique d’expansion ou d’investissement de lui permettre de soustraire
une partie de son bénéfice à l’impôt. Mais la subvention n’est destinée
qu’à permettre à l’entreprise de passer un cap difficile, aussi l’aide fis-
cale n’est-elle que provisoire ; l’impôt n’est pas éludé, il n’est que différé.
C’est ce caractère provisoire qui explique le recours à la technique de
la provision.
Ne s’agissant pas de véritables provisions, les provisions réglementées
n’ont pas à satisfaire, pour leur déductibilité, les conditions de fond exi-
gées normalement des provisions. Cependant, puisque le législateur a eu
recours à la technique de la provision et afin de faciliter le contrôle de
l’administration fiscale, leur déduction du bénéfice imposable suppose
qu’elles soient pratiquées en comptabilité et qu’elles figurent ensuite sur le
relevé des provisions.
285 Provision pour hausse des prix ¸ L'évolution des prix se faisant géné-
ralement dans le sens de la hausse, le législateur a voulu faciliter le finan-
cement par l'entreprise du coût de réapprovisionnement de son stock.
Grâce à la technique de la provision, il permet de réduire le bénéfice
1. CGI, art. 39 bis A (dispositif prorogé jusqu’au 31 déc. 2020 par la Loi de finances pour
2018, art. 91, FR Lefebvre 1/2018, comm. 22) et CGI, art. 39 bis B (concernant les éditeurs de
presse en ligne et applicable pour les exercices 2018 à 2020).
2. CGI, art. 39 quinquies H.
248 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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provenant de la cession du stock acquis au cours ancien en anticipant
la réduction du bénéfice sur les cessions à venir due au coût plus élevé du
réapprovisionnement 1.
Si les prix d’une matière ou d’un produit existant en stock à la clôture de
l’exercice, augmentent de plus de 10 % au cours de deux exercices consé-
cutifs, l’entreprise peut constituer pour ce produit une provision pour
hausse des prix pour la partie d’augmentation qui excède 10 %.
La provision doit être calculée produit par produit 2. Elle a un caractère
facultatif et elle peut être opérée même lorsque les exercices sont défici-
taires que ce soit avant ou après la déduction.
La déduction n’est cependant pas définitive puisque la provision doit
être obligatoirement réincorporée au bénéfice imposable dans le délai de
six ans. Pour faciliter le contrôle de l’administration, tant que la provision
n’est pas réintégrée, elle doit rester inscrite au passif du bilan sous une
rubrique spéciale (Provisions réglementées relatives au stock).
Par ailleurs, la provision pour hausse des prix est plafonnée. Le mon-
tant annuel de la provision est plafonné à 15 millions d’euros, majoré le
cas échéant d’une fraction égale à 10 % de la provision théoriquement
déductible 3.
286 Bibliographie ¸
E. bOCkdam-tOgnetti, « Provisions et connexion fiscalo-comptable », RJF 3/2014,
p. 195.
A. de brOsses et M. verban, « Provision comptable/provision fiscale. Les entreprises
entre le marteau et l’enclume », BF Lefebvre 4/2014, p. 197.
O. FOuquet, « Provision comptable et provision fiscale : vrais ou faux jumeaux », Rev.
adm. 2012, no 385, p. 53.
O. FOuquet, « Provision comptable et provision fiscale : une saveur douce-amère »,
Dr. fisc. 2014, no 1-2, Act. 4.
C. LOPater, « Ne pas déduire ses provisions peut désormais coûter cher », FR Lefebvre
fiscal social, 03/2014, no 14.
C. LOPater et O. FOuquet, « Décalage fiscal de provisions : les pièges de la nouvelle
jurisprudence », FR Lefebvre, 10/2017, n° 5.
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comptables prévoient l’amortissement des immobilisations par compo-
sants ayant chacun son plan d’amortissement propre, l’amputation de
la base d’amortissement de la valeur résiduelle significative, la prise en
compte du, coût de démantèlement, la durée d’amortissement en fonc-
tion de l’utilisation réelle du bien. Au contraire, le droit fiscal continue
à prévoir un amortissement sur la base du prix de revient (CGI, ann.
III, art. 38 quinquies), une durée d’amortissement en fonction des usages
(CGI, art. 39-1-2o) et la possibilité de recourir à des amortissements déro-
gatoires, notamment dégressifs. C’est également la discordance entre
les règles comptables et fiscales qui explique que le bénéfice comptable
doit être majoré des charges afférentes à des biens inscrits à l’actif de
l’entreprise mais non utilisés pour l’exercice de l’activité professionnelle.
À l’inverse, il conviendra de déduire du résultat comptable les produits
afférents à des biens inscrits à l’actif mais non utilisés pour l’exercice de
l’activité professionnelle.
Le passage du résultat comptable au résultat fiscal se fait par un retrai-
tement « extracomptable » du résultat découlant de la comptabilité. Lors
de sa déclaration annuelle de résultat, l’entreprise reporte les informa-
tions comptables sur les imprimés fiscaux constituant la « liasse fiscale ».
Puis sur un feuillet particulier (no 2058 A), elle détermine son résultat
fiscal. Cette détermination consiste à opérer, à partir du résultat comp-
table certaines réintégrations ou à l’inverse déductions. Les réintégrations
concernent essentiellement les charges non déductibles et les impositions
différées. Les déductions sont essentiellement consécutives à des mesures
d’incitation fiscale ou de différé d’imposition.
Le résultat fiscal est ainsi composé de la somme du résultat comptable
et des réintégrations de laquelle sont déduites les diverses déductions telles
que les déficits fiscaux antérieurs pour les entreprises IS.
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le contribuable due à la nécessaire négociation du forfait. C’est pourquoi
en même temps que son domaine d’application a été étendu, le régime du
forfait a été abandonné au profit du régime des micro-entreprises.
§ 1. Domaine d’application
290 Application aux « grosses entreprises » et sur option ¸ Le régime
du bénéfice réel est en principe le régime de droit commun qui devrait
s'appliquer à la majorité des entreprises. Cependant, en fait, les entre-
prises sont, dans la majorité des cas, soumises aux régimes des micro-
entreprises et à celui du réel simplifié. En effet, le régime du bénéfice
réel est réservé aux grosses entreprises, c'est-à-dire les entreprises de
vente dont le chiffre d'affaires annuel hors taxe dépasse 789 000 euros
(pour 2017 à 2019) et les entreprises prestataires de services dont le
chiffre d'affaires annuel hors taxe excède 238 000 euros (pour 2017 à
2019). En outre, sont aussi soumises au régime du bénéfice réel, certaines
entreprises qui optent pour ce régime. En effet, les entreprises qui relèvent
à titre obligatoire du régime de la micro-entreprise 1 ou du régime réel des
petites et moyennes entreprises (régime du réel simplifié) peuvent opter
pour le régime réel normal. Cette option doit être faite dans le courant
du mois de janvier et produit ses effets pour l’année en cours 2. Elle est
ensuite tacitement reconduite pour un an, sauf renonciation notifiée à
l’administration avant le 1er février de l’année suivant la période pour
laquelle l’option a été exercée ou reconduite tacitement.
§ 2. Déclaration de l’entreprise
L’évaluation du bénéfice réel est basée sur une déclaration du contri-
buable soumise à des conditions de délai et de forme.
A. Date de la déclaration
291 Obligations de l’entreprise et sanctions ¸ La déclaration (formu-
laire no 2031 et annexe no 2031 bis), avec les documents annexes, doivent
1. Le passage optionnel direct du micro au réel normal bénéficie des mêmes incitations que
le passage du micro au réel simplifié.
2. La loi de finances pour 2018 a aménagé les règles d’option pour un régime réel d’imposi-
tion pour l’année 2017 afin de tenir compte de la hausse du plafond du régime du micro-BIC,
en vue de permettre aux entreprises qui auraient basculé dans le régime micro-entreprise de ce
fait d’opter. Exceptionnellement, elles peuvent exercer l’option dans le délai de dépôt de la
déclaration de résultat (n° 2031-SD), à savoir au plus tard le 3 mai 2018.
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être transmis par voie électronique à la DGFiP 1 au plus tard le deuxième
jour ouvré suivant le 1er mai (CGI, art. 175 et 53 A). Toutefois, un délai
supplémentaire de 15 jours calendaires au-delà de la date limite de dépôt
des déclarations est accordé par l’administration 2.
Le défaut de production ou la production tardive de la déclaration peut
entraîner l’évaluation d’office du bénéfice imposable et l’application d’une
amende fiscale (LPF, art. L. 73-1°). Cependant, l’évaluation d’office n’est
applicable que si le contribuable n’a pas régularisé sa situation au plus tard
dans les trente jours de la modification d’une première mise en demeure
(LPF, art. L. 67). Dans une telle hypothèse, le contribuable demeurera
passible des pénalités pour retard de déclaration.
Si une entreprise éprouve des difficultés pour adresser sa déclaration
dans les délais, elle peut produire une déclaration provisoire. Ce document
doit comporter suffisamment d’indications chiffrées pour déterminer le
bénéfice, en précisant les éléments de la déclaration considérés comme
non définitifs. L’entreprise devra ensuite régulariser cette déclaration dès
que la production des comptes définitifs sera possible.
B. Forme de la déclaration
292 Les documents à fournir ¸ La déclaration doit être établie sur un
imprimé spécial fourni par l'administration (no 2031) et elle doit être
accompagnée de plusieurs documents comptables annexes présentés éga-
lement sur imprimés administratifs. L’ensemble de ces documents qui
constituent la liasse fiscale, doivent être datés et signés par l’exploitant
lui-même.
La liasse fiscale est composée d’abord d’un certain nombre de docu-
ments comptables :
– Bilan (actif et passif) 3.
– Compte de résultat.
– Tableaux des immobilisations et des amortissements.
– Tableau des provisions.
– État des échéances des créances et des dettes.
Les autres documents sont à caractère fiscal puisqu’il s’agit de :
– Tableau de détermination du résultat fiscal.
– Déficits et provisions non déductibles.
– Renseignements divers (montant des engagements, TVA, effectif du
personnel, affectation des résultats de l’exercice précédent).
– Élément soumis au régime fiscal des plus et moins-values.
– Tableau des écarts de réévaluation sur immobilisations amortissables
lorsque l’entreprise a procédé à une réévaluation légale de son bilan.
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Indépendamment des documents composant la liasse fiscale, l’entre-
prise doit joindre à sa déclaration un certain nombre d’autres documents
comportant des renseignements complémentaires : relevé détaillé de cer-
tains frais généraux ; attestation délivrée par les centres de gestion agréés ;
états des provisions pour investissements et des provisions pour hausse des
prix ; relevé des provisions inscrites dans la catégorie des frais à payer etc.
§ 1. Domaine d’application
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En harmonisation avec la législation comptable, les seuils limites de
chiffre d’affaires sont appréciés en faisant abstraction de la TVA et des
taxes assimilées (CGI, art. 302 septies A, I).
Lorsque le chiffre d’affaires d’une entreprise soumise au régime sim-
plifié dépasse la limite supérieure d’application de ce régime, cette entre-
prise n’est soumise au régime du bénéfice réel qu’à partir de l’année qui
suit celle du dépassement, sauf en cas de changement d’activité (CGI,
art. 302 septies A bis-III).
Relèvent également de plein droit du régime simplifié les entreprises dont
le chiffre d’affaires les situe dans les limites du régime des micro-entre-
prises mais qui exercent une activité qui les exclut de ce dernier régime.
1. Fondement de l’option
296 Les avantages réservés aux entreprises soumises au « réel » ¸
L'option par une entreprise imposable au régime micro en faveur du
régime du réel simplifié présente en général un certain nombre d'intérêts.
La première raison d’une telle option se rencontre lorsque le contri-
buable pense que le régime simplifié entraînera une imposition plus légère
que le régime de la micro-entreprise. Cette situation ne devrait pas être
fréquente, mais elle est possible puisque les frais professionnels sont pris
en compte sous la forme d’un abattement forfaitaire. Le régime réel peut
entraîner un accroissement des charges déductibles pouvant même éven-
tuellement conduire à l’apparition d’une situation déficitaire permettant
l’imputation des déficits sur le revenu global.
Une deuxième et importante raison pour une micro-entreprise d’opter
pour le réel consiste dans le désir de bénéficier d’un certain nombre de
mesures favorables qui sont réservées aux seules entreprises soumises au
régime du bénéfice réel. Ainsi, le bénéfice de la réduction de l’assiette
d’imposition consécutive à l’adhésion à un Centre de gestion agréé est
réservé aux entreprises soumises à un régime réel (de droit ou sur option).
Le désir de bénéficier de cette absence de majoration est donc une puissante
raison pour une option pour le réel simplifié. Par ailleurs, l’entreprise qui
relève du régime de la micro-entreprise et décide d’opter pour un mode réel
de détermination du résultat et adhère à un centre de gestion agréé bénéficie
d’une réduction de la cotisation d’impôt sur le revenu égale aux deux tiers
des dépenses exposées pour la tenue de la comptabilité et pour l’adhésion au
centre de gestion agréé 1. Cette réduction est plafonnée à 915 euros par an.
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De même, les avantages du régime temporaire de faveur pour les entre-
prises nouvelles créées dans certaines zones du territoire sont réservés aux
entreprises soumises au réel (exonération des bénéfices réalisés pendant
les deux premières années ; abattement des 3/4, de la 1/2 et du 1/4 sur les
bénéfices réalisés au titre de la 3e, la 4e et la 5e année d’activité) 1.
297 Le maintien de certains avantages des entreprises soumises au
régime micro ¸ Le désir de bénéficier de ces avantages réservés aux
entreprises soumises au réel est d'autant plus incitatif à l'option que le
passage d'une évaluation forfaitaire à une évaluation réelle ne fait plus
perdre un certain nombre d'avantages qui étaient autrefois réservés aux
contribuables soumis à l'évaluation forfaitaire.
Ainsi, au regard de l’exonération des plus-values de cession des immo-
bilisations, l’entreprise demeure exonérée même si elle a opté pour le réel
du moment que son chiffre d’affaires est inférieur aux limites prévues par
l’article 151 septies du CGI. De même, les contribuables placés, à la suite
d’une option, sous le régime simplifié peuvent, continuer à bénéficier de la
franchise en base de TVA dès lors que leur chiffre d’affaires n’excède pas
les limites prévues par l’article 293 B du CGI.
Enfin, l’option d’une micro-entreprise pour le régime du réel peut
trouver un intérêt dans la possibilité de réévaluer en franchise fiscale les
immobilisations non amortissables. L’article 39 octodecies du CGI autorise
les contribuables qui exercent pour la première fois l’option pour le régime
de l’évaluation réelle simplifiée à constater en franchise d’impôt les plus-
values acquises par les éléments non amortissables de leur actif immobi-
lisé. Une telle disposition est intéressante pour l’entreprise puisqu’en cas
de cession de ces éléments, les plus-values seront calculées à partir de la
valeur réévaluée, sauf si la cession intervient moins de cinq ans après la
création ou l’acquisition de l’entreprise. Dans ce cas, c’est alors le prix de
revient d’origine qui servira de base de calcul pour le montant de la plus-
value (CGI, art. 39 octodecies, II).
2. Conditions de l’option
298 La procédure ¸ L'option se fait par simple lettre adressée au Service des
impôts où sont déposées les déclarations de résultats. Elle doit être exercée
avant le 1er février de la première année au titre de laquelle le contribuable
souhaite bénéficier de ce régime 2. Elle est valable un an et reconduite
tacitement chaque année pour un an. Si l’entreprise désire renoncer
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à l’option pour un régime réel d’imposition, elle doit notifier son choix
à l’administration avant le 1er février de l’année suivant la période pour
laquelle l’option a été exercée ou reconduite tacitement.
B. Obligations comptables
300 Existence d’un régime réel super simplifié ¸ En principe, les entre-
prises soumises au réel simplifié sont astreintes aux mêmes obligations
comptables que toute entreprise imposée sur le bénéfice réel. Il leur est
cependant possible d'opter au titre de chaque exercice sur leur déclaration
de résultat pour le régime du réel super simplifié qui emporte des obliga-
tions comptables allégées.
Le régime du réel super simplifié se caractérise d’abord en ce que les
créances et les dettes sont constatées uniquement à la clôture de l’exercice.
En effet, en cours d’exercice, la comptabilité n’enregistre journellement
que le détail des encaissements et des paiements. Ce n’est qu’à la clôture
de l’exercice que doivent être enregistrées en comptabilité les créances non
recouvrées et les dettes non payées à cette date.
LA DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE 257
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La deuxième caractéristique du réel super simplifié concerne l’évalua-
tion des stocks et des travaux en cours qui peut s’effectuer selon une
méthode simplifiée. Leur coût de revient peut être calculé forfaitairement
conformément aux dispositions de l’article 4 LA de l’annexe IV au CGI.
Enfin, s’agissant des charges déductibles, l’option pour le régime du
réel super simplifié emporte des assouplissements concernant les frais
généraux. Ainsi, les frais généraux qui sont payés à échéance régulière et
dont l’échéance n’excède pas un an peuvent être déduits des résultats de
l’exercice en cours lors de leur paiement et ce, même si une fraction de ces
charges concerne l’exercice suivant ou l’exercice précédent. Cette possibi-
lité concerne principalement les primes d’assurance, les loyers, les intérêts
ainsi que les divers abonnements et cotisations annuels. De même, les
frais généraux accessoires payés en espèces peuvent être déduits sans
justification dans la limite de un pour mille du chiffre d’affaires réalisé
avec un minimum de 150 euros. Cette déduction concerne les frais géné-
raux accessoires qui se rapportent à l’activité de l’entreprise, pourboires,
cadeaux, réception, gratification de faible montant 1.
§ 1. Domaine d’application
302 Application aux petites entreprises ¸ Le régime des micro-entreprises
s'explique par le souci de ne pas imposer à certaines entreprises des
contraintes trop lourdes. Autrefois le régime était réservé aux entreprises
1. Une déduction forfaitaire est également admise pour les frais relatifs au carburant
consommé lors des déplacements professionnels de l’exploitant qui peuvent être enregistrées
forfaitairement d’après un barème publié chaque année.
258 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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bénéficiant de la franchise de TVA. Depuis la loi de finances pour 2018,
les deux régimes sont déconnectés. Une entreprise redevable de la TVA
peut ainsi relever du régime de la micro-entreprise pour l'imposition
du revenu professionnel. Pour l'imposition des revenus de 2017 à 2019,
bénéficient du régime micro-BIC les entreprises dont le chiffre d'affaires
ne dépasse pas 170 000 euros hors taxe pour activités de ventes (plus
exactement, les entreprises dont l'activité est la livraison de biens, de
ventes à consommer sur place et les prestations d'hébergement, à l'exclu-
sion de la location meublée autre que les meublés de tourisme et les
chambres d'hôtes) et 70 000 euros hors taxe pour les activités de presta-
tion de services (plus exactement, les entreprises réalisant des prestations
de services autres que celles visées ci-dessus) 1.
Le chiffre d’affaires pris en compte est celui de l’année civile précé-
dente (N-1), ou de la pénultième année (N-2) dans le cas où le chiffre
d’affaires de l’année précédente dépasse le plafond 2. De ce fait, en cas
de franchissement des limites de chiffre d’affaires pendant une seule
année, l’application du régime micro est maintenue. En revanche, en cas
de dépassement pendant deux années consécutives, l’entreprise passe
au régime réel l’année suivante, quel que soit le chiffre d’affaires qu’elle
réalise cette année-là. Si le chiffre d’affaires de l’entreprise redescend en
dessous du plafond, elle relève à nouveau de plein droit du régime de la
micro-entreprise au cours de l’année suivante.
En cas d’activité mixte (ex. un vendeur effectuant l’installation et
l’entretien), la condition du non-dépassement du plafond suppose que le
chiffre d’affaires hors taxe global annuel n’excède pas celui prévu pour les
activités de vente et que, à l’intérieur de ce plafond, le chiffre d’affaires
annuel afférent aux prestations de services n’excède pas celui prévu pour
les activités de prestation de services (CGI, art. 50-0, 1).
Lorsqu’un contribuable exploite personnellement plusieurs établisse-
ments, le montant du chiffre d’affaires global réalisé doit être pris en
considération pour déterminer si la limite légale est ou non dépassée
lorsqu’il y a unité d’entreprise 3. Les critères de l’unité d’entreprise sont :
l’identité d’objet des activités en cause, l’identité du lieu d’exercice des acti-
vités et l’identité de responsabilité d’exploitation 4. Il n’y a donc pas lieu
de globaliser les recettes dans le cas où un exploitant individuel détient
également une participation au sein d’une société de personnes.
1. Ces seuils sont actualisés tous les trois ans dans la même proportion que l’évolution
triennale de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.
2. CGI, art. 50-0. Cette règle a été introduite par la loi de finances pour 2018 (L. fin. 2018,
n° 2017-1837, 30 déc. 2017, art. 22 : JORF 31 déc. 2017 ; Dr. fisc. 2018, n° 1, comm. 14 ; FR
Lefebvre 01/2018, comm. 44).
3. Ainsi, trois salons de coiffure exploités par une même personne constituent une entre-
prise unique (CE, 9e et 8e ss-sect., 26 nov. 1999, no 180676, Dr. fisc. 2000, no 10, comm. 181).
4. CE 9 déc. 1988, no 37159, Dr. fisc. 1989, no 24, comm. 1153. – CE 28 déc. 1995, no 94-64
et no 94-65, Dr. fisc. 1996, no 38, comm. 1098.
LA DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE 259
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Les montants des chiffres d’affaires limites sont appréciés par année
civile de telle sorte que lorsque l’activité commence ou cesse en cours
d’année, le chiffre d’affaires limite doit être ajusté prorata temporis.
§ 2. Détermination du bénéfice
304 Bénéfice forfaitaire hors plus-values professionnelles ¸ Les contri-
buables admis au régime des micro-entreprises n'ont à déclarer annuelle-
ment que le montant de leur chiffre d'affaires (déclaration complémentaire
des revenus no 2042 C PRO). Ils sont alors imposés sur un bénéfice net
calculé après application d’un abattement forfaitaire pour frais.
Cet abattement est différent selon la nature des activités exercées par
le contribuable. Il est de 71 % du chiffre d’affaires pour les entreprises
de vente et de 50 % pour les entreprises prestataires de services. Ces
abattements ne peuvent pas être inférieurs à 305 euros. En cas d’activi-
tés mixtes, les abattements sont calculés séparément pour chacun des
chiffres d’affaires correspondant aux activités exercées de telle sorte que
la déduction minimale totale est de 610 euros.
1. Antérieurement à la loi de finances pour 2018, étaient par ailleurs visées les opérations
de location de matériels ou de biens de consommation, sauf lorsqu’elles présentaient un carac-
tère accessoire et connexe pour une entreprise industrielle et commerciale (CGI, art. 50-0, 2, f,
dans sa rédaction alors applicable).
260 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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tenir compte des amortissements pratiqués selon le mode linéaire. Par
conséquent, pour le calcul des plus-values ou moins-values réalisées à
l’occasion de la cession d’une immobilisation amortissable, il convient de
diminuer sa valeur d’origine des amortissements linéaires qui sont réputés
avoir été admis en déduction pour l’établissement de l’impôt.
L’ensemble de ces règles relatives à l’imposition des plus-values profes-
sionnelles ne devrait, cependant, pas trouver application en pratique face
à l’article 151 septies du CGI qui prévoit l’exonération des plus-values réa-
lisées par les contribuables dont les recettes n’excèdent pas des limites bien
supérieures à celles du régime micro 1 dès lors que l’activité a été exercée
pendant au moins cinq ans.
§ 3. Obligations et formalités
306 Les obligations comptables ¸ Les entreprises relevant du régime micro
sont astreintes aux mêmes obligations comptables que les entreprises
prestataires de services qui relevaient autrefois du régime du forfait.
Les entreprises relevant du régime des micro-entreprises doivent donc
tenir un livre-journal détaillant les recettes ainsi qu’un registre récapitu-
latif par année présentant le détail des achats.
Les entreprises doivent conserver l’ensemble des factures et pièces justi-
ficatives relatives aux achats, ventes et prestations de services qu’elles ont
réalisés (CGI, art. 50-0-5).
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précédent (CGI, art. 151-0) 1. Le versement libératoire de l’impôt sur
le revenu est de 1 % ou de 1,7 % du chiffre d’affaires ou des recettes
selon que l’auto-entrepreneur intervient dans le secteur des ventes ou
celui des prestations de services. Quant au versement libératoire des
charges sociales il est dans les mêmes conditions, de 12,8 % ou de 22 %
(pour 2018) du chiffre d’affaires ou des recettes 2. Si les taux peuvent
paraître attrayants, l’assiette constituée par le chiffre d’affaires et non le
bénéfice ne prend pas en compte la réalité des charges. Ce régime est donc
souvent plus avantageux par sa simplicité que par une réelle diminution
des prélèvements obligatoires. Il présente essentiellement l’avantage d’une
adéquation quasi-constante entre le montant des prélèvements obliga-
toires et le volume de l’activité.
309 Bibliographie ¸
A. de Bissy, Comptabilité et fiscalité, coll. Précis Fiscal, préf. P. Serlooten, LexisNexis,
2e éd. 2016.
A. BriCard, « Des trois régimes « auto-entrepeneur », « micro-entreprise » et « réel
simplifié », quel est le plus économique ? », RF compt. 05/2009, no 421, p. 8.
Ph. COLOmbié, « Auto-entrepreneur : pistes pour un audit fiscal de chaque projet », BF
Lefebvre 10/2009, p. 735.
Ph. COLOmbié, « Les aspects fiscaux de l’après auto-entreprise », BF Lefebvre 8-9/2011,
p. 589.
C. LOPater et O. FOuquet, « Réduire l’insécurité fiscale, nouvelle mission de la profes-
sion comptable et de l’ANC ! », FR Lefebvre 25/2015, inf. 2, p. 5.
O. FOuquet et C. LOPater, « La connexion comptabilité-fiscalité : comment suivre le fil
d’Ariane ? », Dr. fisc. 2016, n° 6, comm. 153.
O. FOuquet et C. LOPater, « De la connexion à la convergence fiscalo-comptable :
l’importance accrue de la doctrine comptable », FR. fisc. Lefebvre 18/16, n° 7.
1. BOI-BIC-DECLA-10-40.
2. CSS, art. 133-6-8.
3. CGI, art. 158,7.
262 L’IMPOSITION DES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
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Cette mesure a pour conséquence d’élever de façon importante le poids
effectif de l’impôt puisque, par exemple, pour les revenus concernés par la
tranche maximum de 45 %, le poids effectif de l’impôt sera de 56,25 % 1.
La majoration de la base d’imposition est tout de même écartée si
l’entreprise fait appel aux services d’un expert-comptable autorisé par
l’administration et ayant conclu avec cette dernière une convention, ren-
dant à l’entreprise des services analogues à ceux rendus par les centres de
gestion agréés 2.
1. 45 % x 1,25 = 56,25 %.
2. CGI, art. 158-7, 1o.
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SOUS-TITRE 3
L’imposition du revenu
global
311 Présentation ¸ L'impôt sur le revenu frappant l'ensemble des revenus du
contribuable personne physique, il importe, avant de préciser les modes
de calcul de cet impôt et de présenter les obligations des contribuables, de
déterminer les revenus imposés de la sorte.
SECTION 1. LA DÉTERMINATION
DU REVENU GLOBAL
312 Le principe ¸ Compte tenu de l'unicité de l'impôt sur le revenu et de sa
vocation à appréhender l'ensemble des revenus d'un foyer fiscal, la déter-
mination du revenu global suppose que l'on tienne compte, à la fois, de
la totalité des revenus perçus par chaque membre du foyer fiscal et de
l'ensemble des revenus perçus par la totalité des membres du foyer fiscal.
Ainsi, la détermination du revenu global suppose que l'on globalise les
revenus de chaque membre du foyer avant de traiter l'ensemble du revenu
au niveau, plus global encore, de la famille.
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– bénéfices des exploitations agricoles ;
– traitements, salaires, indemnités, émoluments, pensions et rentes
viagères ;
– bénéfices des professions non commerciales et revenus assimilés ;
– revenus de capitaux mobiliers ;
– plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de
toute nature.
1. CE 28 nov. 1986, 8e et 7e ss-sect., no 46.634, Dr. fisc. 1987, no 22, comm. 1049.
2. CE 26 avr. 1972, no 80.564, Lebon 319. – CE 31 juill. 2009, 10e et 9e ss-sect., no 301191,
M. Salas, concl. J. Burguburu, Dr. fisc. 2009, no 43, comm. 510.
3. CE 27 juin 1938, 8e ss-sect., Lebon 587.
4. CE 24 févr. 1971, no 78.783, Lebon 158.
L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL 265
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§ 2. La déduction des déficits
315 Le principe ¸ Il a été précisé, à propos de l'étude de l'imposition des
bénéfices dans la catégorie des BIC, que le déficit d'un exercice ne consti-
tue pas un déficit reportable sur les BIC de l'exercice suivant mais doit
être imputé sur le revenu global de l'exploitant. La règle, cependant, ne
s'applique qu'aux déficits subis lors de l'exercice d'une activité commer-
ciale ou industrielle professionnelle. Au contraire, les déficits générés par
une activité exercée à titre non professionnel ne peuvent pas être imputés
sur le revenu global.
1. CE 4 mars 1991, no 59234, Dr. fisc. 1991, no 19, comm. 1023. – Paris 19 mai 1994,
no 93-595 et 93-878, RJF 1994, no 8, 895.
2. CGI, art. 156, I-1 bis.
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exercée à titre non professionnel lorsqu’elle ne comporte pas de participa-
tion personnelle du contribuable, pour son compte ou celui d’un membre
du foyer fiscal, à l’accomplissement des actes nécessaires à l’activité indus-
trielle ou commerciale 1. En pratique, cette situation concerne essentielle-
ment les associés des sociétés semi-transparentes et les membres inactifs
d’une indivision. La restriction à la faculté d’imputation des déficits non
professionnels s’applique à l’ensemble des déficits provenant de l’exercice
d’une activité relevant des bénéfices industriels et commerciaux à quelque
titre qu’elle relève de ce régime et quelles que soient les modalités d’exploi-
tation de l’activité relevant des BIC (exploitation individuelle, indivision,
société de personnes) 2.
Les déficits provenant d’activités relevant des BIC exercées à titre non
professionnel ne peuvent pas s’imputer sur les bénéfices ou revenus nets
des autres catégories de revenus ou sur les bénéfices provenant d’activités
industrielles et commerciales exercées à titre professionnel. Ces déficits ne
peuvent s’imputer, conformément à l’article 156, I-1° bis du CGI, que sur
les bénéfices provenant des activités relevant des BIC exercées à titre non
professionnel, durant la même année ou les six années suivantes. C’est le
système de la « tunnélisation » des déficits non professionnels.
Le principe de non-imputation des déficits des activités industrielles et
commerciales non professionnelles comporte cependant une exception
lorsque les activités en cause font l’objet d’une liquidation judiciaire. Dans
ce cas, les déficits afférents à cette activité restant à reporter à la date
d’ouverture de la procédure sont imputables sur le revenu global. Cette
imputation est cependant subordonnée à la condition que les éléments
d’actifs affectés à l’activité en cause cessent définitivement d’appartenir,
directement ou indirectement, à l’un des membres du foyer fiscal.
Un régime propre aux déficits subis par les loueurs en meublé non pro-
fessionnels organise un système particulier 3. Ces déficits ne peuvent être
imputés que sur les revenus d’une activité de location meublée exercée à
titre non professionnel des dix années suivantes.
1. BOI-BIC-DEF-10 no 180. Ex. CAA Bordeaux 31 déc. 2002, 4e ch., no 00-148, Dr. fisc.
2003, no 22/23, comm. 414.
2. BOI-BIC-DEF-10 no 80 s.
3. CGI, art. 156, I-1° ter.
L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL 267
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personnelle et familiale du contribuable, l'imposition du revenu se fait
au niveau du foyer fiscal 1. Le foyer peut se limiter à une seule personne
(célibataire, veuf, divorcé) mais il comprend généralement les personnes
mariées ou partenaires à un pacs ainsi que leurs enfants.
Les conjoints peuvent cependant être imposés séparément dans cer-
taines situations de mésentente ou de séparation (non-cohabitation
d’époux séparés de biens, instance de séparation de corps ou de divorce,
abandon du domicile conjugal).
Quant aux enfants, ils sont rattachés de plein droit au foyer fiscal de
leurs parents lorsqu’ils sont célibataires, âgés de moins de 18 ans. Les
parents peuvent cependant demander l’imposition distincte s’ils disposent
de revenus personnels.
Les enfants célibataires de plus de 18 ans sont en revanche imposés
séparément à moins qu’ils demandent à être rattachés au foyer fiscal de
leurs parents si ceux-ci en sont d’accord et à condition que l’enfant soit âgé
de moins de 21 ans, ou de 25 ans s’il poursuit des études.
Dans toutes les hypothèses, le rattachement au foyer fiscal constitue
une option qui est irrévocable pour l’année considérée. Toutefois, l’admi-
nistration admet d’accorder le dégrèvement, au titre de l’exercice de la
juridiction gracieuse, dans le cas des contribuables ayant mal apprécié
les conséquences du rattachement 2. En revanche, elle refuse une telle
possibilité lorsque le dégrèvement est demandé à la suite de redressements
impliquant la mauvaise foi des intéressés 3.
1. CGI, art. 6.
2. BOI-IR-LIQ-10-10-10-20, n° 150.
3. BOI-IR-LIQ-10-10-10-20, n° 150.
4. CE 4 juin 1976, no 97.732, Dr. fisc. 1977, no 6, 176.
268 L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL
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320 Les conditions de la déduction ¸ La déduction des « charges » du
revenu global est réservée aux contribuables qui ont leur domicile fiscal
en France ou dans un DOM. Les personnes qui n'ont pas leur domicile
fiscal en France sont taxables sur leurs revenus de source française mais
ne peuvent pas déduire de charge de leur revenu global imposable en
France (CGI, art. 164-A). D'autre part, pour être déductibles, les charges
doivent être justifiées, ne pas avoir été retenues pour le calcul des revenus
nets catégoriels et avoir été payées au cours de l'année considérée.
La déduction des charges du revenu global s’effectue après l’imputation
des déficits catégoriels et des déficits antérieurs. Les charges déductibles
du revenu global ne peuvent créer ou aggraver un déficit. Aussi, en cas de
déficit global avant l’imputation des charges, aucune charge ne peut être
déduite. De même si les charges excèdent le revenu global positif, elles ne
peuvent être déduites du revenu global que dans la limite de son montant.
Une dernière condition de déduction des charges du revenu global est
qu’elles soient prévues par la réglementation fiscale. Parmi les diverses
charges prévues, on citera :
– les pensions alimentaires allouées en exécution des obligations ali-
mentaires définies aux articles 205 à 211, 367 et 767 du Code civil (CGI,
art. 156-II-2°) ;
– les versements sur un plan d’épargne retraite populaire (dit Perp 1) et
certaines cotisations sociales non déjà prises en compte dans la détermi-
nation des revenus catégoriels (CGI, art. 156-II-4o, 10o, 11o et 13o).
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pour l’intégralité de leur montant. Leurs titulaires sont tenus d’en faire la
déclaration à l’Urssaf. Les revenus d’activités professionnelles sont par ail-
leurs soumis, en tant que revenus d’activité, à la contribution au rembour-
sement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 %. Cette contribution est
organisée selon des modalités identiques à celles de la CSG, tant pour la
définition des revenus concernés que la base de calcul ou les modalités de
recouvrement. La CSG et la CRDS se calculent sur le bénéfice imposable
majoré du montant des cotisations sociales déductibles.
La liquidation de l’impôt sur le revenu suppose d’abord la prise en
compte de la situation familiale du contribuable. C’est le système du quo-
tient familial. D’autre part, certaines réductions d’impôt sont accordées
afin de tenir compte de la situation particulière de certains contribuables
ou de la nature particulière de certaines dépenses. La technique de la
réduction d’impôt est, en effet, en l’espèce, jugée préférable à celle de la
déduction du revenu global car l’avantage fiscal procuré est proportion-
nellement plus sensible pour les foyers aux revenus modestes que celui
procuré par les déductions.
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Les réductions d’impôt s’imputent sur le montant de l’impôt après le cas
échéant le plafonnement des effets du quotient familial.
Lorsque le montant des réductions d’impôt excède celui de l’impôt
progressif, le montant excédentaire ne peut s’imputer sur l’impôt cal-
culé selon un taux proportionnel (ex. plus-values professionnelles à long
terme). Il ne peut être question non plus du remboursement de la diffé-
rence ; il ne s’agit pas, en effet, de crédit d’impôt.
Les crédits d’impôts viennent également en diminution de l’impôt exi-
gible. Dans la mesure où ils constituent une créance du contribuable sur
l’État, il se produit une compensation avec l’impôt dû. En cas d’excédent,
le solde du crédit d’impôt est en principe restitué au contribuable. Comme
les réductions d’impôts, ces crédits d’impôt sont extrêmement divers. Par
exemple, peuvent donner droit à un crédit d’impôt les dépenses engagées
en vue de la formation du chef d’entreprise, de la recherche et l’innova-
tion, ou encore de l’emploi d’un salarié à domicile.
1. Pour une présentation de la réforme, L. fin. 2018, no 2017-1837, 30 déc. 2017, art. 28,
JORF du 31 décembre 2017 ; Dr. fisc. 2018, no 1, comm. 20 ; FR Lefebvre 1/2018, comm. 12.
2. CGI, art. 200 A, 1.
3. On rappelle que de nombreux régimes de faveur existent, en particulier pour certains
livrets réglementés (Livret A…), les PEA ou encore pour l’assurance-vie et les contrats de capi-
talisation. Sur l’assurance-vie, lire M. Leroy, « Actualité fiscale de l’assurance-vie », RFP 2018,
n° 2, étude 4. Sur le plan d’épargne en actions, A. de Bissy, « Le PEA dans tous ses états », in
Mélanges Ph. Neau-Leduc, LGDJ, 2018.
L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL 271
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Le taux global de la « flat tax » est de 30 %, soit 12,8 % de prélèvement
forfaitaire unique (PFU), au titre de l’impôt sur le revenu, et 17,2 % de
total de prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Sous réserve
de quelques cas, l’impôt est assis sur une assiette brute, à savoir qu’aucun
abattement pour durée de détention n’est pris en compte pour l’imposi-
tion des plus-values mobilières et qu’aucun abattement sur l’assiette n’est
applicable pour les dividendes. Le PFU s’applique y compris aux revenus
réputés distribués et la lecture des textes montre que le coefficient de
1,25 dont font généralement l’objet ces revenus lorsqu’ils sont soumis au
barème progressif de l’impôt sur le revenu n’est pas applicable 1. Les reve-
nus qui se voient appliquer le PFU n’étant pas soumis au barème progressif
de l’impôt sur le revenu, il en découle que la CSG afférente est exclue de
toute déduction du revenu global.
Toutefois, sur option expresse et irrévocable, le contribuable peut déci-
der de retenir l’ensemble des revenus, gains nets, profits, plus-values et
créances, dans l’assiette du revenu net global. L’option est globale, c’est-
à-dire qu’elle vaut pour tous les revenus susceptibles de relever du PFU de
l’année civile. Elle est exercée lors du dépôt de la déclaration d’impôt sur
le revenu. Dans un tel cas, ces revenus sont soumis au barème progressif
de l’impôt sur le revenu. Le contribuable se voit appliquer l’abattement
de 40 % prévu pour les dividendes issus d’une distribution régulière 2.
Il bénéficie de l’abattement pour durée de détention s’agissant des plus-
values 3. Une partie de la CSG est déductible du revenu global 4. En pra-
tique, cette option est intéressante uniquement pour des contribuables
faiblement taxés 5. Dans les deux hypothèses, les prélèvements sociaux sur
les revenus du patrimoine sont dus.
Antérieurement à la loi de finances pour 2018, le prélèvement forfai-
taire obligatoire non libératoire de l’impôt sur le revenu sur les revenus
de capitaux mobiliers était perçu au taux de 21 % pour les dividendes et
jetons de présence ordinaires et de 24 % pour les produits de placement
à revenu fixe. Il est désormais de 12,8 %, de sorte que son taux est aligné
sur celui du prélèvement forfaitaire unique 6. Concrètement, cela revient
1. V. ss 596.
2. V. ss 595.
3. Sont concernés les titres acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2018, v. ss 740.
4. Elle l’est à hauteur de 6,80 points.
5. Par exemple, à raisonner sur la taxation des dividendes, l’impôt sur le revenu au taux
progressif reste plus intéressant pour un contribuable soumis à la tranche marginale de 14 %
que le PFU, compte tenu de l’abattement de 40 % sur les dividendes (soit une assiette taxable de
60 %) et de la part de CSG déductible du revenu global. L’imposition est en effet de 24,65 %,
prélèvements sociaux inclus, contre 30 % dans le cas de la « flat tax » (14 x 60 % – 6,8 x 14 % +
17,2 % = 8,4 – 0,95 + 17,2 = 24,65 < 30). En revanche, le PFU est plus intéressant à partir de la
tranche d’impôt sur le revenu à 30 %, dès lors que le taux global d’imposition entre l’impôt sur
les revenus et les prélèvements sociaux est alors de 33,16 % > 30 % (30 x 60 % – 6,8 x 30 % +
17,2 = 33,16 > 30).
6. CGI, art. 117 quater, art. 125 A et art. 125 D. Pour ce qui est des prélèvements sociaux,
quelles que soient les modalités d’imposition ils sont généralement prélevés à la source.
272 L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL
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ainsi à prélever à la source l’impôt dès lors que l’acompte (le prélèvement
forfaitaire obligatoire non libératoire) est égal à l’impôt finalement dû (le
prélèvement forfaitaire unique), sauf choix du contribuable de soumettre
les revenus afférents au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
1. En l’absence de revenus, doivent être déclarés les éléments du train de vie qui figurent sur
la déclaration.
2. Depuis le 1er janvier 2015, toutes les entreprises doivent transmettre leurs déclarations
par voie électronique. Par ailleurs, pour tous les contribuables, la déclaration de revenus en
ligne est progressivement rendue obligatoire pour être généralisée en 2019. Généralement, la
date limite du dépôt de la déclaration d’ensemble des revenus est indiquée chaque année et se
situe courant mai, avec un délai supplémentaire pour les déclarations par Internet.
L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL 273
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Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu entrera en vigueur le
1er janvier 2019 1. Cette réforme, qui se substitue au régime du versement
des acomptes provisionnels et à celui de la mensualisation, ne modifie
pas les règles actuelles de calcul de l’impôt sur le revenu ni l’obligation de
déposer une déclaration des revenus de l’année N en N + 1.
329 Bibliographie ¸
B. BraChet, L’impôt sur le revenu. Enjeux et réformes, Ellipses, 1996.
M. bOuvier, « L’impôt sur le revenu : entre échange et solidarité ? », RF fin. publ. 2017,
no 140, p. 235.
P. FernOux, « L’impôt sur le revenu ou comment décourager l’activité profession-
nelle », RD bancaire et bourse, ingénierie patrimoniale, sept.-oct. 1999, p. 2.
1. Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, art. 10, 60 et 112, Dr. fisc.
2017, n° 1, comm. 8 ; FR Lefebvre 57/2016, inf. 4, p. 19 (prévoyant l’application du dispositif au
er
1 janvier 2018) – Ordonnance n° 2017-1390 du 22 septembre 2017, FR Lefebvre 37/2017,
inf. 8, p. 8 ; Dr. fisc. 2017, n° 39, act. 514 (reportant son entrée en vigueur au 1er janvier 2019)
– D. n° 2017-1676, 7 déc. 2017, JORF du 9 décembre 2017, Dr. fisc. 2017, n° 50, act. 660 (report
à 2019 des obligations des tiers déclarants) – Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de
finances rectificative pour 2017, art. 11, FR Lefebrve 2/2018, inf. 20, p. 36 ; Dr. fisc. 2018, n° 1,
comm. 7 (pour des aménagements techniques). Cf. « Prélèvement à la source : mise en ligne
d’un “kit du collecteur” », Dr. fisc. 2018, no 11, comm. 217.
2. CGI, art. 223 sexies.
3. Sur ce dispositif du quotient, v. ss 102 s.
4. Pour plus de détails, cf. CGI, art. 223 sexies II.
274 L’IMPOSITION DU REVENU GLOBAL
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M. L abé et M. gauthier, « Dispositif de prélèvement à la source et application aux
revenus du patrimoine », RFP 2017, n° 4, étude 9.
T. L ambert, « Que reste-t-il des lois du 15 juillet 1914 et du 31 juillet 1917 ? », in
Dossier spécial : Centenaire de l’impôt sur le revenu, RFFP 2017, n° 140, p. 209
G. MaLabOuChe, « L’impôt sur le revenu peut-il être réformé ? », RFFP 1996, no 54,
p. 183.
J.-Y. Nizet, « L’impôt sur le revenu, reflet d’une société marquée de très grandes inéga-
lités », RFFP 1999, no 67, p. 277.
G. OrsOni, « Unité et dualisme de l’impôt sur le revenu », RF fin. publ. 2017, no 140,
p. 223.
R. PeLLet, « La fusion de l’impôt sur le revenu (IR) et de la contribution sociale généra-
lisée (CSG). Brève synthèse de thèses opposées », RF fin. publ. 2016, no 136, p. 199.
E. PiChet, « Théorie générale des dépenses socio-fiscales et propositions de refonte du
système français des “niches” fiscales », Dr. fisc. 2017, n° 36, comm. 457.
E. PiChet, « La nouvelle donne fiscale du patrimoine et les conséquences de la politique
budgétaire du quinquennat », RFP 2018, n° 4, étude 9.
R. POirier, « Abandon de revenus indisponibles : le contribuable reste imposé », Dr. fisc.
2009, no 43, Act. 324.
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TITRE 2
LES DIFFICULTÉS
DE L’ENTREPRISE
330 Introduction ¸ Afin de résoudre les difficultés des entreprises, aussi bien
individuelles que sociétaires, le législateur a organisé diverses procédures.
Il convient aujourd'hui de distinguer, d'un côté, l'entreprise qui n'est
pas encore en état de cessation des paiements, mais qui, en raison de
difficultés insurmontables est placée sous la sauvegarde de justice et, de
l'autre côté, l'entreprise dont les difficultés ont déjà entraîné la cessation
des paiements et qui, pour cette raison est mise en redressement ou en
liquidation judiciaire. Si ces procédures ont des objectifs communs, elles
ne concernent pas les mêmes entreprises et donc reposent sur une éco-
nomie distincte. Lorsqu'on examine la situation fiscale de l'entreprise
en difficulté, il n'est cependant, pas nécessaire de distinguer les diffé-
rentes procédures car la problématique fiscale est largement indifférente
à l'organisation procédurale visant l'entreprise. L'étude des conséquences
fiscales des procédures collectives sera donc faite globalement même si le
moment venu, seront bien sûr précisées les conséquences fiscales spéci-
fiques de chacune de ces procédures 1.
Ce sont les effets des procédures collectives sur le fait générateur et le
montant de l’impôt qui constituent l’essentiel de l’incidence des procé-
dures collectives sur la situation fiscale de l’entreprise 2. Mais auparavant,
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il sera traité du sort de la créance du Trésor car, créancier de l’entreprise, sa
situation est également influencée par l’ouverture de la procédure.
En ce qui concerne les entreprises individuelles, il faut distinguer la déclaration d’ensemble des
revenus, que le contribuable demeure tenu de souscrire lui-même, de la déclaration de revenus
catégoriels se rattachant à l’activité objet de la liquidation judiciaire, qui doit être remplie par le
liquidateur (CE 28 juill. 2017, n° 398.632, RJF 11/2017, n° 1081, concl. E Crépey ; Gaz. Pal.
2017, n° 34, p. 70, obs. D. Voinot ; Bull. Joly Entr. diff. 1/2018, p. 54, obs. G. Dedeurwaerder).
1. CE 19 déc. 1980, no 14207 et 14208, 8e et 9e ss-sect., RJF 3/81 no 231. – CE 18 juin 1984,
no 10548 plén., RJF 8-9/84 no 100. – CE 22 mars 1985, no 43441, 7e et 9e ss-sect., RJF 6/85 no 895.
2. C. com., art. L. 622-24.
3. La contestation du calcul de l’assiette de l’impôt doit être faite par une réclamation
conformément aux dispositions du Livre des procédures fiscales (Cass. com. 3 févr. 2015,
n° 13-26.256, Sté. Cashtex et a. c/Comptable, chef du service des impôts des particuliers de Paris
1° et 2°, Act. proc. coll. 04/2015, n° 54).
4. Com. 10 mars 2004, no 01-01265, SARL Wilmort-Picardie Recup, Juris-Data no 2004-
2022938, RJF 8/9-2004, no 946.
LES DIFFICULTÉS DE L’ENTREPRISE 277
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par le tribunal au mandataire judiciaire pour l’établissement de la liste
des créances déclarées. D’après l’article L. 622-24 du Code de commerce,
ce délai n’est pas applicable en cas de « procédures judiciaires ou admi-
nistratives en cours ». Mais la jurisprudence considère que cela implique
l’existence d’une réclamation contentieuse 1. Or, en pareil cas, le juge-
commissaire doit seulement constater dans l’état des créances qu’une
réclamation ou une instance est en cours. Aussi, l’ordonnance du 12 mars
2014 a-t-elle prévu un allongement du délai jusqu’au dépôt au greffe
du compte rendu de fin de mission par le mandataire judiciaire en cas
de « procédure administrative d’établissement de l’impôt ». La Cour de
cassation a jugé que cette formule ne vise que le seul cas d’engagement
d’une procédure de contrôle ou de rectification de l’impôt, à l’exclusion du
simple processus d’établissement de l’impôt 2.
332 Forclusion ¸ Sauf à avoir été relevé de sa forclusion, le créancier de
l'entreprise qui n'avait pas déclaré sa créance perdait autrefois tout droit
au paiement et donc sa qualité de créancier. En contrepartie, cela entraî-
nait immédiatement chez le débiteur, du fait de la disparition de la
créance, un profit imposable par application de la théorie du bilan 3. Tou-
tefois, depuis la loi de sauvegarde de 2005, la sanction du défaut de décla-
ration des créances n’est plus leur extinction mais leur inopposabilité. En
procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, les créances non
déclarées sont inopposables au débiteur pendant l’exécution du plan. Il
s’ensuit que la créance ne disparaît pas tant que le plan est en cours d’exé-
cution (C. com., art. L. 622-26, al. 2), en sorte qu’il n’en résulte aucun
profit imposable pour le débiteur (sauf pour la créance à disparaître
pour un autre motif, telle la prescription). En revanche, l’inopposabilité
devient « définitive » en cas de succès du plan (C. com., art. L. 622-26,
al. 2), situation qui doit être assimilée à une disparition de la créance
entraînant la constatation d’un profit imposable, comme contrepartie
de l’impossibilité pour le créancier forclos de recouvrer sa créance mal-
gré le redressement de l’entreprise. En liquidation judiciaire, la créance
non déclarée est, d’après la jurisprudence, inopposable à la liquidation
judiciaire 4, le créancier forclos retrouvant alors son droit d’agir en paie-
ment à la clôture de la liquidation judiciaire, sauf s’il est atteint par la
prescription. La forclusion n’ayant donc pas en soi pour effet d’éteindre
la créance, elle n’a pas plus en soi pour effet d’entraîner la constatation
d’un profit imposable par le débiteur en liquidation judiciaire.
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333 Droit de poursuites individuelles ¸ L'article L. 643-11 du Code de
commerce prévoit que le débiteur est libéré de son passif impayé à la
clôture de la procédure. En effet le jugement de clôture de la liquidation
judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers
l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur. Cette disposition
qui entraîne l'extinction du passif après la clôture de la liquidation judi-
ciaire est générale et s'applique donc, également, aux créances fiscales.
Il existe cependant une exception au profit du Trésor qui, en cas de
condamnation pénale du débiteur, peut se faire rembourser les frais de
poursuite après la clôture des opérations de liquidation judiciaire 1.
Par ailleurs, le Trésor peut bénéficier, comme tous les autres créanciers,
d’une possibilité de reprise des poursuites individuelles au cas de condam-
nation à la faillite personnelle 2, à la banqueroute ou après la clôture pour
insuffisance d’actif au cas de fraude commise par le débiteur. Dans une
telle hypothèse, le comptable des impôts qui retrouve son droit de pour-
suite individuelle ne peut l’exercer qu’en obtenant un titre exécutoire du
président du tribunal de commerce 3.
334 Créances postérieures nées pour les besoins de l’activité pour-
suivie pendant la procédure collective ¸ Les créances fiscales pos-
térieures au jugement d'ouverture peuvent bénéficier du privilège de
procédure prévu par l'article L 622-17 du code de commerce qui permet
leur paiement à l'échéance. Souhaitant traiter de la situation de l'entre-
prise en difficulté et non du recouvrement de la créance du Trésor en
présence d'une procédure collective, on se contentera de signaler les deux
principales difficultés soulevées par cette disposition.
Le premier point, classique, consiste à répartir les créances fiscales
entre les deux périodes séparées par le jugement d’ouverture (créances
antérieures et créances postérieures). Le critère est alors celui du fait
générateur. Ainsi, pour l’impôt sur le revenu, le fait générateur résulte non
de la perception des revenus, mais de l’expiration de l’année au cours de
laquelle ils ont été perçus 4 ; quant à l’impôt sur les sociétés, il s’agit de la
clôture de l’exercice 5.
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Une deuxième difficulté résulte de l’introduction de la condition que la
créance soit née « pour les besoins du déroulement de la procédure ou de
la période d’observation, ou en contrepartie d’une prestation fournie au
débiteur pendant cette période » 1. Dans ces conditions, on peut penser
qu’au regard du dernier critère, les créances fiscales devraient être exclues
du régime des créances postérieures privilégiées puisqu’elles ne consti-
tuent pas la contrepartie d’une prestation fournie au débiteur par l’admi-
nistration fiscale 2. De même, la Cour de cassation juge que la créance de
taxe foncière n’est pas une créance née pour les besoins du déroulement
de la procédure 3. Mais elle considère qu’entrent dans les prévisions de
l’article L. 622-17 du Code de commerce les créances fiscales « inhérentes
à l’activité poursuivie après le jugement d’ouverture », formule qui semble
inclure les impôts nés pendant ladite activité et calculés sur des éléments
en lien avec celle-ci 4.
335 Créances postérieures nées des besoins de la vie courante du
débiteur ¸ En liquidation judiciaire, sont considérées comme préféren-
tielles les créances nées des besoins de la vie courante du chef d'entre-
prise 5. S’agissant des créances fiscales, entrent, selon l’administration 6,
dans cette catégorie, les créances de taxe d’habitation et de taxe foncière
personnelles de la personne physique débitrice, établies pour son loge-
ment personnel et/ou sa résidence secondaire ainsi que l’impôt sur le
revenu du débiteur personne physique dont l’origine des revenus est autre
que la continuation de l’activité.
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de poursuites 1. De même, la déclaration de créances dans une procédure
de redressement et de liquidation judiciaires interrompt la prescription
de l’action en recouvrement 2. Cet effet interruptif est prolongé jusqu’à
la date à laquelle la procédure collective parvient à son terme par le juge-
ment de clôture pour insuffisance d’actif 3.
1. C. com., art. L. 622-21 tel que modifié par l’ordonnance du 18 décembre 2008 (aupara-
vant, le délai était suspendu).
2. BOI-REC-EVTS-30-20, no 170. – CE 19 févr. 2014, 9e et 10e ss-sect., n° 344228, Dr. fisc.
2015, n° 12, comm. 227, note R. Vabres.
3. Com. 16 juin 1992, Cazabat, no 1120 P, RJF 8-9/92, no 1256. – Com. 4 avr. 1995, no 759
D, Degat, RJF 12/95, no 1430. – Com. 12 déc. 1995, no 2200 P, Recchia, RJF 7/96, no 937. – CE
2 juill. 2003, 9e et 10e ss-sect., no 236942, Delabie, RJF 10/2003, no 1172.
4. L’envoi d’une facture rectificative est nécessaire même si le caractère définitivement
irrécouvrable de la créance détenue sur le client résulte de sa liquidation judiciaire (CE
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la taxe versée indûment par imputation sur la taxe due pour les opérations
faites ultérieurement ; il pourra même se la faire restituer s’il a cessé d’être
assujetti à la TVA 1. Quant au débiteur qui reçoit la facture rectificative, il
doit alors reverser le montant de la TVA qu’il a déduite.
Ainsi le défaut de paiement est-il bien à l’origine d’une dette fiscale pour
l’entreprise défaillante.
339 Date du défaut de paiement ¸ Lorsque ce défaut de paiement intervient
dans le cadre d'un redressement judiciaire, la question se pose de savoir à
quel moment la créance est considérée comme irrécouvrable ; autrement
dit à quel moment le Trésor a droit au reversement de la déduction.
Il est jugé que l’irrécouvrabilité ne résulte pas du dépôt de bilan, ni
du jugement d’ouverture du redressement judiciaire 2. Le risque de non-
recouvrement justifie simplement la constitution d’une provision pour
créance douteuse.
Selon l’Administration une créance est considérée comme définiti-
vement irrécouvrable à la date où le créancier, ayant épuisé son droit
de poursuite à l’égard du débiteur, comptabilise sa créance en perte.
L’application de ces principes doit aboutir aux solutions suivantes, selon la
situation de l’entreprise. Lorsque l’entreprise est en liquidation judiciaire,
l’article 272-1 du CGI assouplit la solution traditionnelle en prévoyant que
l’imputation ou le remboursement de la taxe peuvent être effectués dès la
date de la décision de justice qui prononce la liquidation judiciaire sans
qu’il soit nécessaire d’attendre le certificat du liquidateur ou le jugement
de clôture 3. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce qu’à tout moment
et par tout moyen, dès avant le prononcé de la liquidation judiciaire, le
créancier établisse le caractère définitivement irrécouvrable de la créance
notamment dans les cas où il ne l’aurait pas déclarée en temps utile, ou en
aurait fait totalement ou partiellement abandon 4.
Si l’entreprise défaillante poursuit son activité, la récupération de la taxe
peut être effectuée à la date du jugement arrêtant le plan de redressement
et décidant la poursuite de l’activité de l’entreprise défaillante. La quotité
des créances demeurant impayées est, en effet, connue à cette date 5.
De même, lorsque l’entreprise est placée sous la sauvegarde de justice et
qu’elle bénéficie dans ce cadre d’un plan de continuation de l’entreprise,
28 mars 2012, 10e et 9e ss-sect., no 320470, Sté Saint Germain Automobile, Dr. fisc. 2012,
no 26, comm. 352, concl. J. Boucher ; RJF 6/2012, no 587 ; Bull. Joly Entrep. diff. 2012. 238,
note G. Dedeurwaerder).
1. CGI, art. 272. La demande peut intervenir dans la limite des délais de prescription même
après la clôture de la liquidation (CE 28 juill. 2011, 9e et 10e ss-sect., no 318872, Sté Myris,
Dr. fisc. 2011, no 54, comm. 574, concl. P. Collin ; RJF 11/2011, no 1145).
2. CE 27 mars 1991, 8e et 9e ss-sect., no 57777 : RJF 5/1991, no 567. – CE 11 déc. 1991, 9e et
8e ss-sect., no 71147, RJF 2/1992, no 185.
3. BOI-TVA-DED-40-10-20, no 1.
4. CE 1er juin 2005, no 260401, RJF 8-9/08, no 848.
5. BOI-TVA-DED-40-10-20, no 50.
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la fraction des créances dont il est fait abandon sera considérée comme
impayée à la date de la décision du tribunal arrêtant le plan.
Lorsque le plan de continuation est suivi d’un plan de cession de l’entre-
prise, la même décision du tribunal arrêtant le plan doit être retenue car
c’est à cette date que le prix de cession sera définitivement fixé, ce qui fera
apparaître son insuffisance par rapport au passif exigible et donc le carac-
tère définitivement irrécouvrable de la créance.
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fortement déficitaire de telle sorte que la cessation d’activité n’aura pas de
conséquence fiscale directe et que même les informations ou déclarations
incombant à l’entreprise ne sont pas effectuées.
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en ce qui concerne les contrats. L’annulation entraîne, en effet, l’anéan-
tissement rétroactif de l’acte. Ainsi, les sommes ou biens récupérés
quittent le patrimoine du cocontractant pour réintégrer l’actif de l’entre-
prise. Les conséquences fiscales de l’annulation des contrats se produisent
évidemment au regard des droits d’enregistrement mais l’annulation du
contrat a également d’importantes répercussions au cas où l’acte annulé
concerne une cession d’éléments d’actif.
§ 1. Droits d’enregistrement
344 Principes ¸ Afin de connaître les conséquences de l'annulation d'un
contrat au regard des droits d'enregistrement, il convient de déterminer
si le fait générateur subsiste malgré l'annulation ou bien s'il est anéanti.
L'article 1961 du CGI dispose que l'annulation de l'acte est considérée
comme anéantissant le fait générateur. Elle donne donc droit à la restitu-
tion des droits perçus.
Ce principe connaît cependant un tempérament important car il ne
joue que lorsque l’annulation n’est entachée aux yeux de l’administration
d’aucune cause de suspicion de telle sorte qu’il ne s’applique pas en pré-
sence d’une annulation amiable (même au cas de nullité absolue). Pour
qu’elle produise ses effets et permette la restitution des droits, l’annu-
lation doit non seulement être judiciaire (décision ayant l’autorité de la
chose jugée), mais encore résulter d’un véritable jugement contentieux.
S’agissant de l’annulation prononcée par le tribunal au titre des nullités
de la période suspecte, toute garantie est donnée à l’administration fis-
cale par le contexte économique et l’intervention judiciaire de telle sorte
qu’en toute hypothèse, l’annulation intervenant sur le fondement des
articles L. 632-1 et suivants du Code de commerce entraîne la disparition
du fait générateur et doit donner lieu à la restitution des droits payés.
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à la période pendant laquelle il a été dessaisi de la propriété du bien et
que par hypothèse, il n’a pu comptabiliser au titre de cette période. Cette
déduction qui est opérée en une seule fois est effectuée selon le plan
d’amortissement initial.
B. Annulation de la plus-value
347 Assimilation à une cession ¸ Après avoir réinscrit pour sa valeur ini-
tiale, le bien au bilan, l'entreprise en difficulté doit constater la dispa-
rition de sa créance sur le cessionnaire ou s'il avait déjà reçu le prix de
cession, il doit inscrire à son passif, une dette égale au montant du prix à
reverser. Ainsi, de l'annulation de la cession découle une perte de la plus-
value alors réalisée.
Pour le traitement fiscal de la perte de la plus-value, en application des
principes généraux du droit comptable et du droit fiscal, l’annulation de la
vente devrait faire apparaître une diminution de l’actif net de telle sorte
que la perte de la plus-value se traduirait par une déduction immédiate.
Une telle solution a, cependant, l’inconvénient de permettre de déduire
des bénéfices imposés au taux plein, des sommes qui avaient éventuelle-
ment supporté l’impôt au taux réduit (plus-values à long terme).
C’est pourquoi, en vertu de l’article 39 duodecies-9, alinéas 2 et 4 du
CGI, la disparition rétroactive du contrat est analysée comme une cession
de façon que l’annulation de la vente ait pour effet de dégager un résultat
(profit ou perte) inverse de celui qui a été constaté lors de la cession. En
application de cette solution, il convient de distinguer selon que la plus-
value annulée était à court ou à long terme.
1. BOI-BIC-PVMV-40-40-20, no 10.
286 LES DIFFICULTÉS DE L’ENTREPRISE
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Sous-section 4. Étapes de la procédure
348 Généralités ¸ Le déroulement de la procédure pourra entraîner une
modification sensible de la situation de l'entreprise selon la solution qui
sera retenue par le tribunal. Il faut donc étudier séparément les quatre
possibilités offertes au tribunal (continuation de l'entreprise, mise en
location-gérance, cession de l'entreprise, liquidation de l'entreprise) afin
d'en voir les incidences au regard du fait générateur de l'impôt.
§ 1. Continuation de l’entreprise
349 Absence de conséquences fiscales ¸ Pendant la période d'observation
la continuation de l'entreprise est normale. Elle n'a pas à être autorisée
par le tribunal 1. Après cette période, le tribunal peut, lors du jugement
arrêtant le plan, décider la continuation de l’entreprise 2. Quelle que soit
l’hypothèse, la continuation de l’activité n’entraîne pas de conséquence
fiscale particulière pour l’entreprise.
Il n’y a, en effet, aucune solution de continuité et les opérations réa-
lisées dans le cadre de la continuation de l’exploitation sont imposables
suivant les règles de droit commun. Il s’ensuit que pendant toute la durée
de la procédure, l’entreprise devra souscrire les déclarations annuelles
de bénéfice.
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§ 2. Location-gérance
351 Application du droit commun ¸ Bien que soupçonneux à son égard, le
législateur a prévu la possibilité exceptionnelle de confier l'exploitation
du fonds de commerce à un gérant libre. La location-gérance est sur-
tout envisagée comme préalable à une cession de l'entreprise, la cession
future intervenant au profit du locataire 1. Lorsque la location-gérance est
ainsi exceptionnellement possible, elle produit les conséquences fiscales
ordinaires. Trouve même application la responsabilité du loueur pour
les dettes fiscales de l’entreprise prévues par l’article 1684, 3 du CGI :
« Le propriétaire d’un fonds de commerce est solidairement responsable
avec l’exploitant de cette entreprise des impôts directs établis à raison de
l’exploitation de ce fonds ». Ainsi, le débiteur est-il responsable des impôts
directs, mais non des autres impôts, établis au nom du locataire-gérant.
Toutefois, depuis la loi « Sapin 2 » du 9 décembre 2016, la solidarité prend
fin dès que le contrat de location-gérance est publié. En outre, le texte pré-
cise que la solidarité ne s’applique qu’en cas de retard ou insuffisance de
déclaration faisant l’objet de majorations de 40 % ou 80 % et à condition
que le propriétaire ait connu ou n’ait pu ignorer les manquements ayant
conduit à l’application de ces majorations 2.
§ 3. Cession de l’entreprise
A. Imposition du résultat
352 Cessation d’activité ¸ De même que pour la location-gérance, le fait
que la cession de l'entreprise intervienne dans le cadre d'une procédure
collective 3 ne doit pas avoir, en principe, de conséquence particulière. La
cession produira ses conséquences ordinaires au regard des impôts directs
lorsqu’elle sera considérée comme entraînant une cessation d’activité.
Même si une exploitation bénéficiaire de l’entreprise est assez rare
compte tenu du contexte général de ses difficultés financières et de la
condition particulière de la cessation des paiements, se pose la question
de l’application éventuelle de l’article 1684-1 du CGI. Ce texte prévoit que
le cessionnaire d’une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale
peut être rendu responsable solidairement avec le cédant du paiement de
l’IR ou de l’IS afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l’année
de la cession jusqu’au jour de celle-ci et, éventuellement, les bénéfices
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de l’année précédente. Ce texte, concernant toute cession à titre onéreux,
qu’il s’agisse d’une vente forcée ou d’une vente volontaire, l’administration
considère que ses dispositions s’appliquent quelles que soient les circons-
tances de la cession, y compris en cas de cession intervenant dans le cadre
d’une procédure d’apurement du passif, qu’il s’agisse de l’article L. 626-1
du Code de commerce en cas de plan de cession ou de l’article L. 642-1 au
cas de liquidation 1.
Le cessionnaire n’est toutefois responsable qu’à concurrence du prix de
cession du fonds de commerce et ne peut être mis en cause, s’agissant des
cessions de fonds de commerce, que pendant 30 jours à compter du dépôt
de la déclaration de résultat si l’avis de cession et la déclaration de résultat
prévus à l’article 201 du CGI ont été déposés en temps utile et que, au
dernier jour du mois précédent la cession du fonds, le cédant est à jour
de ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscale. À défaut
de déclaration de résultat dans les délais, le délai de solidarité est porté à
90 jours et court à compter de l’expiration du délai imparti pour souscrire
cette déclaration de résultat.
1. BOI-REC-SOLID-20-30, no 10.
2. BOI-TVA-DED-60-20-10, n° 280.
3. CJCE 27 nov. 2003, aff. C-497/01.
4. En ce sens : BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-10, n° 10.
5. BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-10, n° 30.
LES DIFFICULTÉS DE L’ENTREPRISE 289
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pas exigé que le cessionnaire ait préalablement exercé la même activité
que le cédant ni qu’il poursuive strictement la même activité que celle
précédemment exercée par le cédant 1. Ce régime de la dispense concerne
l’ensemble des biens et des services procédant de l’universalité transmise :
marchandises neuves et autres biens détenus en stocks ; biens mobiliers
corporels d’investissement ayant ouvert droit à déduction ; biens mobi-
liers incorporels d’investissement ; immeubles et terrains à bâtir 2.
C. Droits de mutation
1. Taux du droit de mutation
354 Régime de faveur ? ¸ En ce qui concerne les droits de mutation, depuis
l'aménagement du tarif des droits sur les cessions de fonds de commerce
par la loi LME du 4 août 2008, la cession intervenant dans le cadre d'une
procédure collective ne bénéficie plus d'un régime spécifique 3. Il est tout
de même à noter que les cessions intervenant dans le cadre d’un plan de
cession peuvent bénéficier du crédit de paiement fractionné des droits
d’enregistrement 4. Les droits exigibles sont alors acquittés en cinq annui-
tés égales 5. Sont concernées les cessions intervenant en application des
articles L. 626-1, L. 631-22 et L. 642-1 du Code de commerce.
1. Ibid.
2. BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-10, n° 60.
3. En revanche, l’acquisition de droits sociaux de sociétés placées sous procédure de sauve-
garde ou en redressement judiciaire bénéficie d’une exonération de droit d’enregistrement.
4. CGI, ann. III, art. 396-3o.
5. CGI, ann. III, art. 404 D.
6. Com. 8 janv. 2002, Sté Ernest Gutmann et Yves Plasserand, Juris-Data no 2002-012631,
RJF 2002, no 866. – Com. 10 janv. 2006, no 02-13634, SARL ASC, Juris-Data no 2006-031578,
Rev. proc. coll. 3/2007, p. 154.
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C’est donc au moment de l’acte accompli par l’administrateur que naî-
tra la créance du Trésor. C’est également cette date qui fait courir le délai
de quarante-cinq jours pour procéder à la déclaration fiscale.
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contexte économique, social et financier dans lequel elle intervient 1.
L’Administration paraît s’être rendue à la position de la Cour de cassation
en admettant que pour déterminer la valeur de cession, il convient de
tenir compte « des conditions particulières de l’opération réalisée dans le
cadre d’une procédure collective » 2. Le principe paraît donc acquis que la
détermination de la valeur des biens cédés dans le cadre d’une procédure
collective doit prendre en considération l’ensemble des charges imposées
au repreneur, celles-ci devant aboutir à une réduction de la valeur du
bien cédé 3. En revanche, dans les termes du droit commun, l’impôt n’est
pas calculé seulement sur le prix de cession : il l’est aussi sur les charges
augmentatives du prix, c’est-à-dire celles incombant normalement au ven-
deur mais que l’acquéreur accepte de prendre à sa charge. Il en va ainsi, en
particulier, de la prise en charge des congés payés dus aux salariés pour la
période antérieure à la cession, fréquemment proposée par les repreneurs
pour rendre leur offre plus attractive aux yeux du tribunal 4.
§ 4. Liquidation de l’entreprise
358 Droit commun des ventes ¸ Les opérations de liquidation de l'entre-
prise entraînent la vente de tous les biens de l'entreprise. De telles ventes
produisent les conséquences fiscales habituelles indépendamment de
leur réalisation dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire.
Ainsi sera taxée à l'impôt sur le revenu l'éventuelle plus-value, aux
droits d'enregistrement la mutation de propriété, la cession intervenant
dans le cadre d'une cession globale pouvant cependant bénéficier du
crédit de paiement fractionné en cinq annuités 5 et à la TVA, l’opération
elle-même.
1. Com. 16 juin 1998, no 95-15689 : Dr. fisc. 1998, no 44, comm. 967.
2. BOI-CF-DG-40-20, n° 280.
3. Ex. Com. 26 mai 2009, no 08-14446, Sté Coubertin, Dr. fisc. 2009, no 26, comm. 388.
4. Com. 27 mai 2015, n° 14-744, Sté. Maîtrise et dissuasion sécurité privée, Dr. fisc. 2015,
comm. 429 ; RJF 10/15, n° 854.
5. V. ss 354.