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VI : La classification périodique des

éléments

1 Origines du tableau périodique

a De Dalton à Mendeleïev

En 1803 le chimiste anglais John Dalton, dans le développement de sa théorie atomique (voir chapitre
I), introduit des symboles pour les éléments, qu’il classe selon leur poids relatif :

En 1808, il complète sa liste à 36 éléments :

.
Dès les années 1830-­‐1850, les chimistes ont repéré des familles d’éléments présentant des propriétés
analogues. Par exemple le chlore (Cl), le brome (Br), et l’iode (I), ou encore le lithium (Li), le sodium
(Na), et le potassium (K). Johann Döbereiner regroupe ces éléments de propriétés analogues par
triades. Il remarque que la différence de masse atomique entre les deux premiers éléments de la triade
est à peu près la même que celle entre les deux derniers éléments de la triade.

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Ceci est encore mieux vérifié si on utilise les numéros atomiques (inconnus en 1850) plutôt que les
masses atomiques.

En 1862 le géologue Alexandre-­‐Émile Béguyer de Chancourtois a l’idée d’arranger les éléments en


hélice d’après leur poids atomique, en plaçant ceux qui ont des propriétés similaires les uns au-­‐dessus
des autres :

Il appelle son invention « Vis tellurique » car le Tellure y est situé au centre. On remarque qu’il manque
les gaz rares, encore inconnus à l’époque.

En 1864 l’anglais John Newlands remarque que les périodes comportent 7 éléments, comme les
octaves en musique, et appelle donc cela la « Loi des Octaves » :

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Cependant, cette idée musicale ne séduit pas les scientifiques de l’époque.

En 1869 le russe DmitriMendeleïev propose une classification où il range les éléments connus, mais où
il laisse des places vides lorsqu’il ne trouve pas d’élément chimique ayant les propriétés attendues. En
1971, sa classification prenait la forme suivante :

Pour les éléments manquants, Mendeleïev affirme qu’ils seront découverts ultérieurement, et il prédit
leurs propriétés physiques et chimiques. Ses prévisions se sont vérifiées par la suite avec une grande
précision.

b Classification actuelle

En 1895 Lord Rayleigh découvre le gaz rare Argon. Entre 1895 et 1900, William Ramsey découvre le
reste des gaz rares et les positionne dans le tableau périodique.

Peu après la découverte du proton en 1911, Henry Moseley a l’idée de classer les éléments selon leur
nombre de protons Z au lieu de leur masse atomique, levant certaines des incohérences du tableau
périodique de Mendeleïev.

La classification actuelle est organisée par blocs, qui reflètent la structure électronique des éléments.
Chaque bloc est caractéristique de la nature (s, p, d, ou f) du niveau auquel se trouvent ses électrons de
plus haute énergie.

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Remarquablement, cette classification basée sur la configuration électronique correspond
parfaitement aux classifications basées sur des propriétés chimiques. Cela est dû au fait que ce sont les
électrons de valence (c'est-­‐à-­‐dire ceux de plus haute énergie, qui arrivent en dernier dans une
construction progressive des configurations électroniques) qui sont responsables des propriétés
chimiques d’un élément.
En parcourant le tableau ligne après ligne, dans l’ordre croissant des numéros atomiques, on constate
qu’il traduit tout à la fois la règle de Klechkowski qui fixe l’ordre de remplissage des niveaux, et le
principe d’exclusion de Pauli, qui fixe une limite au nombre d’électrons pouvant occuper une sous-­‐
couche.

La plupart du temps le tableau périodique est présenté sous forme compacte, en mettant le bloc f en-­‐
dessous :

Il y a deux entorses au parallélisme entre les niveaux électroniques et les blocs du tableau périodique :
Les niveaux 5d et 6d, qui devraient se remplir après les niveaux 4f et 5f respectivement, reçoivent un
premier électron « par anticipation ». Le Lanthane et l’Actinium, qui sont les éléments concernés, sont
donc placés en première colonne du bloc d, et le bloc f est inséré entre les colonnes 1 et 2 du bloc d.

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L’Union Internationale de Chimie Pure et Appliquée (IUPAC) recommande cependant de ranger le
Lanthane et l’Actinium dans le bloc f (appelé « bloc des Lanthanides et Actinides »), car leurs propriétés
chimiques sont similaires à celles des autres éléments du bloc f.

Ci-­‐dessus, tableau périodique de l’IUPAC.


Les familles d’éléments ayant des propriétés chimiques semblables sont regroupées par couleurs :

Métaux alcalins tendance à perdre un e-­‐ et former un mono-­‐cation ex : Li+


Métaux alcalino-­‐terreux tendance à perdre 2 e-­‐ et former un di-­‐cation ex : Mg2+
Métaux de transition plutôt tendance à perdre des électrons
Lanthanides, Actinides
Autres métaux plutôt tendance à perdre des électrons
Métalloïdes souvent semi-­‐conducteurs
Halogènes tendance à gagner un e-­‐ et former un mono-­‐anion ex : Cl-­‐
Gaz rares inertes, gaz monoatomiques
Autres non-­‐métaux plutôt tendance à gagner des électrons

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2 Tableau périodique et propriétés des éléments

a Énergie de première ionisation

Un atome qui acquiert une charge en gagnant ou perdant des électrons devient un ion. Cependant, le
plus souvent, le terme « ionisation » désignera la perte d’électrons. Si un atome perd un électron, il
deviendra un ion portant la charge positive +1 :
! → !! + ! !
Pour arracher un électron à la force d’attraction qu’exerce sur lui le noyau, il faut fournir une certaine
énergie. Cette énergie est appelée énergie de première ionisation !! .
Elle peut être fournie par un rayonnement électromagnétique, ou par les chocs d’autres atomes
(température), ou bien au cours de réactions chimiques, l’électron étant alors récupéré par un autre
partenaire chimique.
Cette énergie sert à faire passer l’électron du niveau d’énergie où il se trouve au niveau !! . Plus ce
niveau d’énergie est haut, plus petite sera l’énergie qui le sépare du niveau !! . Par suite, l’électron le
plus facile à arracher est celui du plus haut niveau occupé de la couche externe.

Le tableau suivant donne les énergies de première ionisation en fonction du numéro atomique Z :

L’énergie d’ionisation augmente du début à la fin d’une période car la charge du noyau augmente
régulièrement. Quand on passe à une nouvelle période !! diminue brusquement, car on commence à
remplir une nouvelle couche, plus proche de !! que la précédente. Des brusques diminutions de !!
correspondent donc à des sous-­‐couches d complètement remplies, tandis que les légères diminutions
de !! qu’on observe à certains endroits correspondent à une sous-­‐couche s complètement remplie (B+)
ou à une sous-­‐couche p à moitié remplie (O+).

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c Électronégativité

On voit qu’autant l’énergie d’ionisation que l’affinité électronique traduisent la capacité d’un élément à
attirer vers lui les électrons. Cette propriété est appelée électronégativité. Afin de la quantifier, de
nombreux scientifiques ont développé une échelle.

L’échelle de Mulliken consiste à calculer la moyenne arithmétique de l’énergie d’ionisation et de


l’énergie de capture électronique :
1
!!"##$%&' = (!! + !!" )
2

L’électronégativité est une grandeur sans dimension. Pour pouvoir comparer l’échelle de Mulliken à
d’autres échelles, notamment celle de Pauling, on applique la transformation suivante :

!!"##$%&' = 0,187 !! + !!" + 0,17

Les énergies étant exprimées en eV

L’échelle de Pauling (1932) est la plus couramment utilisée. Au lieu des énergies d’ionisation et de
capture électronique, elle fait intervenir les énergies de dissociation D de molécules diatomiques.

Pauling exprime l’électronégativité!! d’un élément A en fonction de celle d’un élément B :

!!! + !!!
!! − !! = !!" −
2
Les énergies étant exprimées en eV.

Le premier terme !!" correspond à l’énergie de la réaction : !" → ! + !


Les termes !!! et !!! correspondent aux énergies des réactions : !! → ! + ! et !! → ! + !

!!! !!!! ! !
!!" − est donc l’énergie de la réaction !" → !! + !!
! ! !

Si un des deux atomes A ou B attire plus fortement les électrons, alors la liaison A―B permet à celui-­‐ci
d’acquérir de la densité électronique supplémentaire, au détriment de l’autre atome. Cette fraction
d’électrons supplémentaire voit ainsi son énergie diminuer, en passant de l’atome le moins
électronégatif au plus électronégatif. Lors de la réaction ci-­‐dessus, cette fraction d’électrons retourne à
son atome d’origine, et par conséquent son énergie augmente. Autrement dit, l’énergie de la réaction
! !!
est positive : !!" − !! !! > 0, ce qui implique que !! − !! > 0
!

Au contraire, s’il n’y a pas de stabilisation de AB par rapport à AA et BB par déplacement des électrons
! !!
de la liaison, alors !!" − !! !! = 0 , ce qui implique que !! = !!
!

Pour déterminer l’électronégativité d’un élément A on a donc besoin de connaître celle de B, ainsi que
les signe de !! − !! , c’est à dire de savoir lequel de A ou B est le plus électronégatif. Le dernier point
est effectué par intuition chimique. Par exemple HBr forme les ions H+ et Br-­‐ dans l’eau, donc !!" > !! .
Quant à la référence, Pauling utilise l’élément le plus électronégatif, le fluor (F), et lui attribue la valeur
arbitraire 4 :
!! = 4

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Toutes les autres électronégativités sont ensuite déterminées par transitivité.

Électronégativités des éléments selon Pauling

d Rayon covalent

Pour déterminer les rayons des atomes, on les assimile à des sphères solides. Cependant, les atomes ne
sont pas des sphères solides, et le rayon atomique est un concept difficile à définir. Par contre, la
distance entre deux atomes est facile à mesurer.
Si dans une molécule, deux atomes du même élément sont liés par une liaison covalente simple, on
appelle rayon de covalence de l’élément, la moitié de la distance entre les deux atomes :

De manière similaire, on peut définir des rayons à partir d’autres types de liaison. Ainsi on définit
également le rayon ionique et le rayon de Van der Waals , ou le rayon métallique.

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Lorsqu’on avance sur une ligne du tableau périodique, on ajoute des électrons sur la même couche.
Comme Z croit, les électrons subissent une attraction de plus en plus grande, et le rayon atomique
covalent diminue. Lorsqu’on passe à une nouvelle ligne, le rayon atomique croit brusquement car on
commence à remplir une nouvelle couche :

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e Polarisabilité

Lorsqu’un atome est placé dans un champ électrique, les charges positives et les charges négatives sont
attirées en sens opposés. Sous l’effet d’un champ le nuage électronique va donc se déformer et se
décaler par rapport au noyau :

Un atome pour lequel le centre de gravité des électrons va beaucoup se déplacer par rapport au noyau
est dit très polarisable.

Un atome avec un petit nuage électronique très près du noyau sera très peu polarisable, tandis qu’un
atome avec un nuage électronique grand et mou sera très polarisable. La polarisabilité suit donc la
même tendance que le rayon atomique.

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