Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Sara,+23112 60310 1 SMsofia
Sara,+23112 60310 1 SMsofia
Résumé : Cet article propose un état des lieux de l’affichage publicitaire à Casablanca. La
transformation de l’environnement public causée par la profusion des panneaux publicitaires a
entrainé un changement esthétique de la ville et un inconfort du citadin. Ce constat a engendré
une restructuration du secteur de l’affichage à travers un renforcement du cadre juridique. Le
but de cette réorganisation est de trouver un équilibre entre la manne financière de l’affichage
pour les collectivités locales et la protection du consommateur et de son environnement.
A Casablanca, les autorités locales ont mis en place un dispositif pour répondre à cette
problématique. En parallèle, au niveau national, le ministère de la Culture et de la
Communication s’engage activement afin de mener à bien la réorganisation de ce secteur.
Summary :
This article provides an inventory of print advertising in Casablanca city. The environment
transformation because of billboards profusion has led to a change in the aesthetics of the city,
which became a discomfort for the city dweller. This finding conducted to a restructuring of
print advertising through reinforcement of the legal framework. The aim of this new
reorganisation is to find a balance between the financial benefits of those billboards for local
authorities and the protection of the consumers and their environment.
In Casablanca city, the local authorities have put in place a mechanism to respond to this
problem. In parallel, at the national level, the Ministry of Culture and Communication is
getting engaged to carry out the reorganisation of this sector.
1
filalisophia@gmail.com
14/10/2020
1
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Introduction
La ville de Casablanca a toujours constitué un espace de vie, un abri collectif, un lieu
d’errance et de désirs, un lieu de plénitude et de transcendance.
Ville blanche, née d’un petit port, Casablanca a vu traverser les influences maghrébines, néo-
mauresques et européennes qui ont laissé leurs traces vivantes à travers une histoire
architecturale grandiose et un patrimoine Art nouveau qui lui vaut pour certains monuments et
bâtiments d’être protégés et inscrits « Monuments historiques ».
Imitant les principes des grandes agglomérations, la capitale économique a tendu ses bras à la
publicité, cette nouvelle puissance, poumon de l’économie néolibérale.
La publicité constitue un élément incontournable dans la vie citadine, présente dans tous les
médias et occupant une place de choix dans l’espace public, la publicité s’est imposée sous
ses diverses formes.
Ainsi, l’affichage publicitaire s’est infiltrédans l’espace public, a gagné divers terrains et s’est
installé majestueusement dans tous les espaces ; la multitude des enseignes lumineuses, les
gigantesques et multiples panneaux constituent un exemple concret de cet envahissement.
Modifiée, l’esthétique de la ville est désormais source d’un impérieux inconfort visuel et
environnemental.
L’espace de vie des citoyenss’est paré de nouvelles implantations, ces dernières creusent la
terre, s’enracinent dans les passages publics et prennent place confortablement sur les
trottoirs, les terrasses, les façades et les parcs.
Quelles sont les dispositions présentes et futures qui permettraient de concilier entre
l’affichage publicitaire et le respect du paysage urbain pour préserver les citadins et leur ville
de la densité de panneaux publicitaires tout en assurant les moyens qui permettraient
d’améliorer et de pérenniser la manne financière à la mairie de Casablanca ?
2
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
1-L’affichage publicitaire
L’affichage extérieur peut s’adapter à tous les environnements et prendre des allures
différentes et des aspects distincts, supports et affiches se distinguent par leurs tailles variées,
les petites affiches ou affichettes, elles prennent place principalement dans les lieux de
vente tels que les vitrines, et les grandes affiches, elles élisent domicile dans les grands
carrefours des zones urbaines et rurales. Les affiches interpellent par leurs doubles messages
verbaux et visuels accessibles à tous.
De l’affiche fixe (sur les panneaux, les murs et les vitrines), à l’affiche mobile (sur les bus, les
voitures, le tram…), de supports à taille humaine aux supports géants, d’images fixes aux
images animées, toutes les affiches se remarquent et captent l’attention sur le message à
véhiculer.
Grâce aux techniques de mobilité, d’interactivité et d’ingéniosité, l’affichage captive de plus
en plus l’attention des citadins et s’incruste ardemment dans tous les lieux de ces derniers :
lieux d’habitat, lieux de travail, lieux d’achat, lieux de distraction et d’agrément.
L’affiche est désormais une partie intégrante du paysage urbain.
1
- Babette AUVRAY-PAGNOSI, Langue de pub., Paris, Eyrolles, 2019,p. 195.
3
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
2-1-L’espace urbain
Défiant les règles environnementales de l’implantation, les panneaux publicitaires ont détrôné
les arbres, les vénéneux nouveaux nés ont pernicieusement surgi ici et là, le temps d’un éclair,
ils se sont multipliés, quadruplés voire décuplés.
Insigne, visible de loin par tous les citadins, l’affichage publicitaire est présent. Il permet aux
entreprises de se démarquer et d’informer le public de leurs existences.
Les affichess’agrandissent, s’étendent et s’élargissent, de simples à celles à double face, de
mécaniques aux numériques, les panneaux s’imposent et imposent leur diktat.
De par leur diversité, leur mobilité et leur durabilité, les affiches illustrent parfaitement cette
dégradation visuelle qui donne un nouveau visage de la ville marqué désormais par l’encre
indélébile de la publicité.
La scénographie casablancaise du vingt et unième siècle a changé de visage, l’éclosion des
panneaux publicitaires et leur envahissement ont généré une pollution visuelle omniprésente,
un environnement dénaturé.
Ainsi, d’un espace paisible, la ville est devenue un labyrinthe dans lequel se mêlent
producteurs et acteurs dans une course effrénée pour la conquête de l’espace urbain.
L’esthétique renouvelée grâce aux attraits modernes et aux apparences séductrices cible un
consommateur actif plutôt qu’un citoyen alerte.
Dans la capitale économique, la densité des panneaux diffère d’un arrondissement à un autre,
ainsi l’arrondissement d’Anfa qui représente 18% de la superficie globale de la ville,
concentre à lui seul plus de la moitié du parc des panneaux publicitaires, il s’agit de la plus
forte densité par rapport aux arrondissements périphériques comme Ben M’Sik ou Bernoussi.
2
Frédéric BEIGBEDER, 99F, 5,90E, Paris, Grasset, 2000, p.19.
4
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Docile, l’homme s’acclimate à son nouvel espace : « L’œil humain n’a jamais été autant
sollicité de toute son histoire : on avait calculé qu’entre sa naissance et l’âge de 18 ans, toute
personne était exposée en moyenne à 350000 publicités »3.
Fourvoyé, le citadin évolue dans un milieu inédit, sa vue est courtisée par des logos qui
s’incrustent en tous lieux : « Même à l’orée des forêts, au bout des petits villages, en bas des
vallées isolées et au sommet des montagnes blanches, sur les cabines des téléphériques, on
devait affronter des logos (...). Jamais de repos pour le regard de l’homo consommatus »4
En effet, le phénomène publicitaire ne consiste pas en une addition de publicités différentes,
c'est un système qui tend à occuper l’espace de l’activité humaine dans la cité et à enfermer
l’individu dans le phénomène de la consommation ;il s’agit de la conjonction de l'invasion
quantitative et idéologique.
Ce dahir énumère les zones où l’affichage est interdit, notamment le domaine public de l’Etat
et ses annexes (sauf cas exceptionnels), l’intérieur de la Médina et les remparts qui les
entourent, les monuments historiques, les sites classés et divers édifices religieux.
Ce dahir autorisait le Grand Vizir à étendre cette interdiction à toute autre partie de la ville ou
du centre urbain, aux abords de certains immeubles, édifices religieux, sites naturels, ouvrages
d'art, sources, rives des cours d'eau.
En vertu de ce dahir, aucune affiche publicitaire ne devait être installée à moins de cinq cents
mètres des abords d'une route, cette condition équivaut à une interdiction car aucun annonceur
n'accepte de placer son affiche à cette distance vue que l’affiche ne peut être visible.
3
Idem, p.61.
4
Ibid, p61.
5
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Il est dorénavant permis d’apposer des affiches visibles aux abords des routes du royaume à
savoir : le réseau national ou réseau des routes nationales et autoroutes,le réseau régional ou
réseau des routes régionales,le réseau provincial ou réseau des routes provinciales.
En ce qui concerne les autoroutes, l’élargissement a été confirmé par la loi n° 4-89, telle
qu’elle a été modifiée et complétée par la loi n° 21-03 qui interdit sur les autoroutes et leurs
bretelles « l’implantation de panneaux publicitaires sauf dans les aires de repos et des
stations-services ».
Pour des considérations liées à la sécurité routière, seule reste interdite à la publicité l’emprise
des routes.
L'utilisation des panneaux publicitairesexige un recours aux services communaux pour obtenir
les autorisations nécessaires et le règlement de droits fiscaux propres à chaque commune.
La demande d’autorisation est introduite au niveau de la commune, la plateforme Rokhas.ma
lancée en 2017, permet une dématérialisation du processus de demande et d’octroi des
autorisations pour l’affichage.
Concernant la ville de Casablanca, c’est le Conseil de la Ville qui est en charge des
autorisations. Une charte, un nouveau cahier des charges et un schéma directeur du mobilier
urbain d’affichage ont été validés le 7 février 2019 par les élus de Casablanca, établissant
ainsi des nouvelles règles concernant l’affichage urbain ; un délai de cinq ans est prévu pour
l’entrée en vigueur du nouveau cahier des charges.
En parallèle, cette nouvelle charte délimite des endroits où l’affichage est interdit tels que les
monuments historiques, les sites et les bâtiments classés, les lieux de culte, les édifications
constituants lepatrimoine architectural, les jardins et espaces verts, les abords
d’administrations et établissements publics, les écoles et universités.
6
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Selon Casa Prestations, société de développement local, dont l’un des rôles est la
modernisation de l’affichage publicitaire à Casablanca, il existe une grande anarchie dans le
secteur de l’affichage, à titre d’exemple, 58% des panneaux d’affichages sont anonymes dans
l’arrondissement du Maarif.
5
- Royaume du Maroc, Dahir n°1-04-257 du 25 kaâda 1425 (7 janvier 2005) portant
promulgation de la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle. B.O N°5288 - 03
février 05
7
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Les axes de cette sensibilisation se résument d’une part à acheter utile et aux meilleurs
rapports qualité prix et d’autre part à apprendre à connaitre les pièges, les arnaques et ses
droits pour se défendre en cas de litiges.
La loi n ° 31-08 (2011) relative aux droits des consommateurs, autorise l'Association pour la
protection des consommateurs à informer, promouvoir et défendre les intérêts des
consommateurs.
8
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Cette branche d'activité concerne directement et indirectement 10.000 emplois dans différents
secteurs d'activité : l'imprimerie, l'industrie de l’aluminium, le matériel électrique,
l’équipement en éclairage solaire, la manufacture des bâches, les bureaux d’études etc.
En 2017, l’investissement publicitaire global brut était de 6,4 milliards de dirhams dont 1,7
milliards de dirhamspour l’affichage, soit 26,5% de l’investissement publicitaire global brut.
En 2018, l’investissement publicitaire global brut était de 5,7 milliards de dirhams dont 1,4
milliards de dirhams pour l’affichage, soit 24,5% de l’investissement publicitaire globale brut.
En 2019, l’investissement global brutétait de 5,4 milliards de dirhams dont 1,0 milliard de
dirhamspour l’affichage, soit 18,5 % de l’investissement publicitaire global brut.
9
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
L’affichage urbain constitue une manne financière importante pour les recettes communales,
231 millions de dirhams d’investissement sont prévus pour l’année 2023 d’où l’importance
des revenus qui constituent un intérêt certain pour la ville de Casablanca.
Bien que juteux, ce marché est dans l’obligation de prendre en considération l’environnement
dans lequel il évolue.
L’idéal pour la capitale économique est de trouver un équilibre entre les différents éléments
en présence, l’environnement, les citadins et l’affichage.
10
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Conclusion
La société industrialisée a imposé de nouvelles normes de vie, elle exhibe un mode de vie où
les panneaux publicitaires se présentent comme une promesse à une vie meilleure mais aussi
comme un stimulant encourageant l’homme à assouvir une soif inaltérable de consommation.
Les images tout au long des avenues et des quartiers, des plus cossus aux plus modestes,
défilent à une vitesse vertigineuse. Couleurs criardes et attirantes, lumières éclatantes,
illustrations bigarrées et hétéroclites, textes répétitifs et omniprésents ensorcellent les
consommateurs et impriment dans leurs subconscients marques, logos et slogans dans le but
de créer une envie irrépressible d’acheter les produits vantés.
Sous les feux aveuglants de cette situation, des décisions ont été prises afin de gérer les
aspects environnementaux, réglementaires et financiers de l’affichage à Casablanca.
Ainsi une nouvelle charte, un nouveau cahier des charges, un schéma directeur du mobilier
urbain sont désormais à la rescousse des Casablancais et de leur mairie.
En parallèle, une charte déontologique sera adoptée par un comité professionnel indépendant
qui aura pour responsabilité le suivi des pratiques publicitaires permettant au secteur de
l’affichage une meilleure organisation.
Les nouvelles dispositions vont dans le sens des réponses à l’attente des Casablancais tout en
sauvegardant la manne financière de la mairie de Casablanca.
Quant au citadins, tels des acteurs cornéliens, ils continuent à évoluer dans leur scène où ils se
doivent d’être à la fois des consommateurs actifs et des consommateurs réfléchis qui ont pour
devoir de participer à la sauvegarde de leur environnement en contrôlant leur consommation.
La solution à cette dualité impose de nouvelles règles à savoir l'éducation à la consommation
pour préparer des consommateurs responsables, il s’agit de démystifier les différentes
méthodes qui conditionnent l’individu à l’achat.
Aujourd’hui, l’écho mondial des voix qui s’élèvent contre ces contradictions dissonantes est
envahissant, mais se dissout pour le moment par les intérêts tentaculaires qui s’imposent dans
un monde où l’encouragement à la consommation fait loi.
Les axes d’amélioration concernant l’affichage et la protection du consommateur portent sur
le renforcement du cadre juridique, le contrôle du respect des lois, l’appui au mouvement
consumériste, la communication et la sensibilisation des consommateurs.
11
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
Bibliographie
- BACHRANE Mostafa (2010), « L'affichage média au Maroc : projet de création d'une
agence conseil en communication » Mémoire. Disponible sur
https://www.memoireonline.com/09/11/4836/m_Laffichage-media-au-Maroc--projet-de-
creation-dune-agence-conseil-en-communication8.html .Consulté le 09/09/2020.
- EL AFFAS Aziza (2019), « Affichage urbain : Comment Casablanca veut en finir avec
l’anarchie »,L’économiste. Disponible sur https://prod.leconomiste.com/article/1043103-
affichage-urbain-comment-casablanca-veut-en-finir-avec-l-anarchie.Consulté le 01/10/2020.
- EL AFFASAziza (2019), « Affichage urbain : un gisement de plus de 230millions de DH en
2023 », L’économiste.Disponible sur https://www.leconomiste.com/article/1043106-
affichage-urbain-un-gisement-de-plus-de-230-millions-de-dh-en-2023 $.Consulté le
01/10/2020.
-EL AFFAS Aziza (2019), « Collectivités locales ; dématérialisation tous azimuts en 2020 »,
L’économiste. Disponible sur https://leconomiste.com/article/1054718-collectivites-locales-
dematerialisation-tous-azimuts-en-2020.Consulté le 01/10/2020.
- LAABID Rania (2017), « Casablanca :si tu ne parles toujours pas anglais, va te suicider",
l'affiche scandaleuse du british workshop », le 360. Disponible sur
https://fr.le360.ma//societe/casablanca-si-tu-ne-parles-toujours-pas-anglais-va-te-suicider-
laffiche-scandaleuse-du-british-130787.Consulté le 10/06/2020.
12
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
- L’actualité juridique Marocaine (2009),« le cadre juridique de la publicité aux bords des
voies de la communication routière de l’état ». Disponible sur
https://droitmaroc.wordpress.com/2009/12/08/le-cadre-juridique-de-la-publicite-aux-bords-
des-vois-de-communication-routieres-de-letat/.Consulté le 10/09/2020.
- Royaume du Maroc, dahir n° 1-02-212 du 22 Joumada II 1423 (31 août 2002) portant
création de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle. B.O n° 5036 du Dimanche
15 septembre 2002.
13
Revue Organisation et Territoires n°5, Octobre 2020 ISSN :2508-9188
14