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ŒUVRES COMPLÈTES
ÉDITION ÉDOUARD LABOULAYE
GARNIER FRÈRES, 1875
PREMIÈRES ATTAQUES.
PAR BERTOLINI1
1754
PAR D’ALEMBERT1
NOUVELLE ÉDITION
TOME PREMIER
A GENÈVE
MDCCXLIX
PRÉFACE.
LIVRE PREMIER
CHAPITRE PREMIER.
CHAPITRE PREMIER.
DU GOUVERNEMENT RÉPUBLICAIN ET
DES LOIS RELATIVES A LA DÉMOCRATIE1.
CHAPITRE PREMIER.
DIFFÉRENCE DE LA NATURE DU
GOUVERNEMENT ET DE SON PRINCIPE.
DU PRINCIPE DE LA DÉMOCRATIE.
DU PRINCIPE DE L’ARISTOCRATIE.
DU PRINCIPE DE LA MONARCHIE.
DU PRINCIPE DU
GOUVERNEMENT DESPOTIQUE.
CHAPITRE PREMIER.
DE L’ÉDUCATION DANS LE
GOUVERNEMENT DESPOTIQUE.
DE L’ÉDUCATION DANS LE
GOUVERNEMENT RÉPUBLICAIN.
CHAPITRE PREMIER.
IDÉE DE CE LIVRE.
DE LA PROMPTITUDE DE
L’EXÉCUTION DANS LA MONARCHIE.
DE L’EXCELLENCE DU
GOUVERNEMENT MONARCHIQUE1.
IDÉE DU DESPOTISME.
DE LA COMMUNICATION DU POUVOIR.
DES PRÉSENTS.
CHAPITRE PREMIER.
DU MAGISTRAT UNIQUE.
DE LA JUSTE PROPORTION
DES PEINES AVEC LE CRIME.
DE LA TORTURE OU QUESTION
CONTRE LES CRIMINELSa.
DE LA LOI DU TALION.
DE LA CLÉMENCE DU PRINCE.
CHAPITRE PREMIER.
DU LUXE1.
DU LUXE A LA CHINE.
DE LA CONTINENCE PUBLIQUE1.
DU TRIBUNAL DOMESTIQUE
CHEZ LES ROMAINS.
CHAPITRE PREMIER.
DE LA CORRUPTION DU
PRINCIPE DE LA DÉMOCRATIE.
CAUSE PARTICULIÈRE DE LA
CORRUPTION DU PEUPLE.
DE LA CORRUPTION DU
PRINCIPE DE L’ARISTOCRATIE.
DE LA CORRUPTION DU
PRINCIPE DE LA MONARCHIE.
DE LA CORRUPTION DU PRINCIPE
DU GOUVERNEMENT DESPOTIQUE.
PROPRIÉTÉS DISTINCTIVES
DE LA RÉPUBLIQUE.
PROPRIÉTÉS DISTINCTIVES
DE LA MONARCHIE.
PROPRIÉTÉS DISTINCTIVES DU
GOUVERNEMENT DESPOTIQUE.
DE L’EMPIRE DE LA CHINE1.
LIVRE NEUVIÈME.
CHAPITRE PREMIER.
COMMENT LA MONARCHIE
POURVOIT A SA SÛRETÉ.
DE LA FORCE DÉFENSIVE
DES ÉTATS EN GÉNÉRAL.
RÉFLEXIONS.
CHAPITRE PREMIER.
DE LA FORCE OFFENSIVE.
DE LA GUERRE.
DU DROIT DE CONQUÊTE1.
CHARLES XII1.
ALEXANDRE1.
NOUVEAUX MOYENS DE
CONSERVER LA CONQUÊTE.
CHAPITRE PREMIER.
IDEE GÉNÉRALE.
DIVERSES SIGNIFICATIONS
DONNÉES AU MOT DE LIBERTÉ.
DE LA CONSTITUTION D’ANGLETERRE1.
DE LA PUISSANCE LÉGISLATIVE
DANS LA RÉPUBLIQUE ROMAINE.
DE LA PUISSANCE EXÉCUTRICE
DANS LA MÊME RÉPUBLIQUE.
DU GOUVERNEMENT DES
PROVINCES ROMAINES.
FIN DE CE LIVRE.
CHAPITRE PREMIER.
IDÉE DE CE LIVRE.
DE LA LIBERTÉ DU CITOYEN.
DU CRIME DE LÈSE-MAJESTÉ.
DES PENSÉES.
DES ÉCRITS.
VIOLATION DE LA PUDEUR
DANS LA PUNITION DES CRIMES.
DE L’AFFRANCHISSEMENT DE
L’ESCLAVE POUR ACCUSER LE MAITRE.
DE LA MANIÈRE DE GOUVERNER
DANS LA MONARCHIE.
CHAPITRE PREMIER.
RAPPORT DE LA GRANDEUR
DES TRIBUTS AVEC LA LIBERTÉ.
ABUS DE LA LIBERTÉ.
DES TRAITANTS.
LIVRE QUATORZIÈME.
CHAPITRE PREMIER.
IDÉE GÉNÉRALE1.
CAUSE DE L’IMMUTABILITÉ DE LA
RELIGION, DES MŒURS, DES MANIÈRES,
DES LOIS DANS LES PAYS D’ORIENT.
DU MONACHISME .
CHAPITRE PREMIER.
DE L’ESCLAVAGE CIVIL.
VÉRITABLE ORIGINE DU
DROIT DE L’ESCLAVAGE.
ABUS DE L’ESCLAVAGE.
DES AFFRANCHISSEMENTS.
CHAPITRE PREMIER.
DE LA SERVITUDE DOMESTIQUE .
DE LA POLYGAMIE, SES
DIVERSES CIRCONSTANCESa.
DE LA POLYGAMIE EN ELLE-MÊME.
DE LA SÉPARATION DES
FEMMES D’AVEC LES HOMMES.
LIAISON DU GOUVERNEMENT
DOMESTIQUE AVEC LE POLITIQUE.
DE LA SERVITUDE DOMESTIQUE
INDÉPENDANTE DE LA POLYGAMIE.
DE LA PUDEUR NATURELLE1.
DE LA JALOUSIE.
DU GOUVERNEMENT DE
LA MAISON EN ORIENT.
DU DIVORCE ET DE LA RÉPUDIATION.
DE LA RÉPUDIATION ET DU
DIVORCE CHEZ LES ROMAINS.
CHAPITRE PREMIER.
DE LA SERVITUDE POLITIQUE.
DU CLIMAT DE L’ASIE.
CONSÉQUENCE DE CECI.
DE L’AFRIQUE ET DE L’AMÉRIQUE.
DE LA CAPITALE DE L’EMPIRE.
CHAPITRE PREMIER.
COMMENT LA NATURE DU
TERRAIN INFLUE SUR LES LOIS.
DU TERRAIN DE L’AMÉRIQUE.
FORCE DE LA SUPERSTITION.
CHILDÉRIC.
DES ASSEMBLÉES DE LA
NATION CHEZ LES FRANCS.
DE L’AUTORITÉ DU CLERGÉ
DANS LA PREMIÈRE RACE.
CHAPITRE PREMIER.
DU SUJET DE CE LIVRE.
DE LA TYRANNIE.
RÉFLEXION.
INFLUENCE DU GOUVERNEMENT
DOMESTIQUE SUR LE POLITIQUE.
PROPRIÉTÉ PARTICULIÈRE AU
GOUVERNEMENT DE LA CHINE.
EXPLICATION D’UN
PARADOXE SUR LES CHINOIS.
NOUVELLE ÉDITION
TOME SECOND
A GENÈVE
MDCCXLIX
On s’est beaucoup occupé de l’épigraphe du
tome Ier : Prolem sine matre crealam, on n’a rien dit
de celle du tome second. Il me paraît évident que le
sens en est : Ce que m’a enseigné l’étude de la nature
et de ses lois immuables.
.... Cithara crinitus lopas
Personal aurata docuit quœ maximus Atlas.
Hic canit errantem lunam, solisque labores ;
Unde hominum genus et pecudes, unde imber
et ignes ;
Arcturum, pluviasque Hyadas, geminosque
Triones ;
Quid tantum Oceano properent se tingere soles
Hiberni, vel quae tardis mora noctibus obstet.
VIRGILE, Æneid., I, 740 et suiv.
QUATRIÈME PARTIE
LIVRE VINGTIÈME.
DU COMMERCE.
DE L’ESPRIT DU COMMERCE.
ÉTABLISSEMENT PROPRE AU
COMMERCE D’ÉCONOMIE.
DE LA LIBERTÉ DU COMMERCE.
Là où il y a du commerce, il y a des
douanes. L’objet du commerce est l’exportation
et l’importation des marchandises en faveur de
l’État1 ; et l’objet des douanes est un certain droit
sur cette même exportation et importation, aus-
si en faveur de l’État. Il faut donc que l’État soit
neutre entre sa douane et son commerce, et qu’il
fasse en sorte que ces deux choses ne se croisent
point ; et alors on y jouit de la liberté du commerce.
La finance détruit le commerce par ses injus-
tices, par ses vexations, par l’excès de ce qu’elle
impose : mais elle le détruit encore, indépendam-
ment de cela, par les difficultés qu’elle fait naître,
et les formalités qu’elle exige. En Angleterre, où les
douanes sont en régie, il y a une facilité de négocier
singulière : un mot d’écriture fait les plus grandes
affaires ; il ne faut point que le marchand perde un
temps infini et qu’il aita des commis exprès, pour
faire cesser toutes les difficultés des fermiers, ou
pour s’y soumettre2.
1
Lisez : en faveur du particulier. Le com-
merce se fait et doit se faire pour le bien et
l’avantage du particulier ; le bien qui en ré-
sulte pour l’État en doit être la conséquence.
L’inverse de cette proposition, savoir que le
commerce doit se faire en faveur de l’État,
que l’avantage du particulier doit en être la
conséquence, conduit à des maximes et à
des règlements qui font perdre le commerce.
La Hollande pourrait nous en fournir des
exemples : cela n’empêche point qu’il ne soit
vrai que tout commerce qui tourne au mal-
être de l’État, doit être prohibé. (LLUZAC.)
2
Montesquieu oppose l’usage français qui
donnait à ferme ou à bail les traites ou
droits de douane, à l’usage anglais qui met-
tait l’impôt en régie. La ferme est une ad-
judication à forfait du revenu annuel de
l’impôt. Le fermier, qui n’a que son inté-
rêt particulier à faire valoir, pressure et vexe
le contribuable pour obtenir la plus grosse
somme d’impôt ; tandis que l’État, qui a la
régie dans ses mains, songe à l’intérêt pu-
blic, et ménage le contribuable, de crainte
que des exigences trop grandes ne nuisent à
l’industrie générale, et que le trésor ne perde
d’un côté ce qu’il gagne de l’autre. C’est le
régime anglais qui est en vigueur dans les
pays civilisés. V. sup. Liv. XIII, c. XIX.
CHAPITRE XIV.
BELLE LOI.
LOI DE RHODES.
DU COMMERCE DE LA NOBLESSE
DANS LA MONARCHIEa.
RÉFLEXION PARTICULIÈRE.
CHAPITRE PREMIER
AUTRES DIFFÉRENCES.
D’ALEXANDRE. SA CONQUÊTE.
DU TOUR DE L’AFRIQUEa.
CARTHAGE ET MARSEILLE.
RÈGLEMENT PARTICULIER.
PROBLÈME.
CHAPITRE PREMIER.
DE LA NATURE DE LA MONNAIE.
DE LA RARETÉ RELATIVE
DE L’OR ET DE L’ARGENT.
DU CHANGE.
CHAPITRE PREMIER.
DES MARIAGES.
DES FAMILLES.
DES FILLES1.
DE LA DURETÉ DU GOUVERNEMENT.
DE LA GRÈCE ET DU
NOMBRE DE SES HABITANTS.
DÉPOPULATION DE L’UNIVERS.
CONSÉQUENCES.
DES HÔPITAUX.
LIVRE VINGT-QUATRIÈME.
CHAPITRE PREMIER.
PARADOXE DE BAYLE.
CONSÉQUENCES DU CARACTÈRE DE
LA RELIGION CHRÉTIENNE ET DE
CELUI DE LA RELIGION MAHOMÉTANE.
DES ESSÉENS.
DE LA SECTE STOÏQUE1.
DE LA CONTEMPLATION.
DES PÉNITENCES.
DE LA MÉTEMPSYCOSE.
DES FÊTES.
CHAPITRE PREMIER.
DU MOTIF D’ATTACHEMENT
POUR LES DIVERSES RELIGIONS.
DES TEMPLES.
DES MONASTÈRES.
DU LUXE DE LA SUPERSTITION.
DU PONTIFICAT.
DU CHANGEMENT DE RELIGION.
DE LA PROPAGATION DE LA RELIGION.
CHAPITRE PREMIER.
IDÉE DE CE LIVRE.
LIVRE VINGT-SEPTIÈME1
CHAPITRE UNIQUE.
CHAPITRE PREMIER.
FAUX CAPITULAIRE.
AUTRE DIFFÉRENCE.
RÉFLEXION.
ORIGINE DU POINT
DE LA JURISPRUDENCE
DU COMBAT JUDICIAIRE.
DES DÉPENS.
DE LA PARTIE PUBLIQUE.
RENAISSANCE DU DROIT
ROMAIN ET CE QUI EN RÉSULTA.
CHANGEMENTS DANS LES TRIBUNAUX.
CHAPITRE PREMIER.
DE L’ESPRIT DU LÉGISLATEUR.
DES LÉGISLATEURS.
CHAPITRE PREMIER.
ORIGINE DU VASSELAGE.
DIFFÉRENTES MANIÈRES
DE PARTAGER LES TERRES.
DES SERVITUDES.
DU DOUBLE SERVICE.
DE LA NOBLESSE FRANÇAISE.
CHAPITRE PREMIER.
COMMENT LE GOUVERNEMENT
CIVIL FUT REFORMÉ.
RICHESSES DU CLERGÉ.
ÉTAT DE L’EUROPE DU
TEMPS DE CHARLES MARTEL.
CONFUSION DE LA ROYAUTÉ ET
DE LA MAIRERIE1. SECONDE RACE.
CHARLEMAGNE1.
LOUIS LE DÉBONNAIREa.
CAUSE PRINCIPALE DE
L’AFFAIBLISSEMENT DE LA SECONDE
RACE. CHANGEMENT DANS LES ALEUX.
QUELQUES CONSÉQUENCES
DE LA PERPÉTUITÉ DES FIEFS.
AVRIL 17491.
(NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES,
ou MÉMOIRES POUR SERVIR A
L’HISTOIRE DE LA CONSTITUTION
Unigenitus POUR L’ANNÉE 17491)
9 octobre 1749.
A LAQUELLE ON A AJOUTÉ
QUELQUES ÉCLAIRCISSEMENTS
A GENÈVE
MDCCL
DÉFENSE DE L’ESPRIT DES LOIS
PREMIÈRE PARTIE.
I.
PREMIERE OBJECTION.
RÉPONSE.
SECONDE OBJECTION.
RÉPONSE.
Il est vrai que l’auteur a cité Plutarque, qui dit
que la loi est la reine de tous les mortels et immor-
tels.
TROISIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
II.
PREMIÈRE OBJECTION.
RÉPONSE.
RÉPONSE.
TROISIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
QUATRIÈME OBJECTION.
Elle est tirée de ce que M. Domat a commen-
cé son ouvrage autrement que l’auteur, et qu’il a
d’abord parlé de la révélation.
RÉPONSE.
CINQUIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
SIXIÈME OBJECTION.
« L’auteur dit que la loi qui prescrit à l’homme
ses devoirs envers Dieu, est la plus importante ;
mais il nie qu’elle soit la première : il prétend que
la première loi de la nature est la paix ; que les
hommes ont commencé par avoir peur les uns des
autres, etc. Que les enfants savent que la première
loi, c’est d’aimer Dieu ; et la seconde, c’est d’aimer
son prochain. »
RÉPONSE
SEPTIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
Je suppose encore un moment que cette ma-
nière de raisonner soit bonne, et que, de ce que
l’auteur n’aurait parlé là que de la religion natu-
relle, on en pût conclure qu’il ne croit que la re-
ligion naturelle, et qu’il exclut la religion révélée.
Je dis que dans cet endroit il a parlé de la religion
révélée, et non pas de la religion naturelle ; car s’il
avait parlé de la religion naturelle, il serait un idiot.
Ce serait comme s’il disait : un tel être pouvait ai-
sément oublier son créateur, c’est-à-dire la religion
naturelle ; Dieu l’a rappelé à lui par les lois de la re-
ligion naturelle ; de sorte que Dieu lui aurait don-
né la religion naturelle pour perfectionner en lui
la religion naturelle. Ainsi, pour se préparer à dire
des invectives à l’auteur, on commence par ôter à
ses paroles le sens du monde le plus clair, pour leur
donner le sens du monde le plus absurde ; et, pour
avoir meilleur marché de lui, on le prive du sens
commun.
HUITIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
Et cette réponse est très-aisée. Ils l’ont appris
dans la révélation, s’ils ont été assez heureux pour
cela ; ou bien dans cette loi qui, en imprimant
en nous l’idée du créateur, nous porte vers lui.
L’auteur de l’Esprit des Lois a-t-il dit comme Vir-
gile : César partage l’empire avec Jupiter14 ? Dieu,
qui gouverne l’univers, n’a-t-il pas donné à de cer-
tains hommes plus de lumières, à d’autres plus de
puissance ? Vous direz que l’auteur a dit que, parce
que Dieu a voulu que des hommes gouvernassent
des hommes, il n’a plus voulu qu’ils lui obéissent,
et qu’il s’est démis de l’empire qu’il avait sur eux,
etc. Voilà où sont réduits ceux qui, ayant beaucoup
de faiblesse pour raisonner, ont beaucoup de force
pour déclamer.
NEUVIÈME OBJECTION.
RÉPONSE.
DIXIÈME OBJECTION.
IDÉE GÉNÉRALE.
CLIMAT.
TOLÉRANCE.
Tout ce que l’auteur a dit sur la tolérance se
rapporte à cette proposition du chapitre IX, livre
XXV. « Nous sommes ici politiques et non pas
théologiens ; et pour les théologiens mêmes, il y a
bien de la différence entre tolérer une religion, et
l’approuver.
« Lorsque les lois de l’État ont cru devoir souf-
frir plusieurs religions, il faut qu’elles les obligent
aussi à se tolérer entre elles. » On prie de lire le
reste du chapitre.
On a beaucoup crié sur ce que l’auteur a ajou-
té au chapitre X, livre XXV : « Voici le principe
fondamental des lois politiques en fait de religion.
Quand on est le maître dans un État de recevoir
une nouvelle religion ou de ne la pas recevoir, il ne
faut pas l’y établir ; quand elle y est établie, il faut
la tolérer. »
On objecte à l’auteur qu’il va avertir les princes
idolâtres de fermer leurs États à la religion chré-
tienne : effectivement c’est un secret qu’il a été dire
à l’oreille du roi de la Cochinchine. Comme cet
argument a fourni matière à beaucoup de décla-
mations, j’y ferai deux réponses. La première, c’est
que l’auteur a excepté nommément dans son livre
la religion chrétienne. Il a dit au livre XXIV, cha-
pitre I, à la fin : « La religion chrétienne, qui or-
donne aux hommes de s’aimer, veut sans doute que
chaque peuple ait les meilleures lois politiques et
les meilleures lois civiles ; parce qu’elles sont, après
elle, le plus grand bien que les hommes puissent
donner et recevoir. » Si donc la religion chré-
tienne est le premier bien, et les lois politiques et
civiles le second, il n’y a point de lois politiques et
civiles dans un État, qui puissent ou doivent y em-
pêcher l’entrée de la religion chrétienne.
Ma seconde réponse est que la religion du ciel
ne s’établit pas par les mêmes voies que les reli-
gions de la terre. Lisez l’histoire de l’Église, et vous
verrez les prodiges de la religion chrétienne. A-
t-elle résolu d’entrer dans un pays, elle sait s’en
faire ouvrir les portes ; tous les instruments sont
bons pour cela : quelquefois Dieu veut se servir de
quelques pêcheurs ; quelquefois il va prendre sur
le trône un empereur, et fait plier sa tête sous le
joug de l’Évangile. La religion chrétienne se cache-
t-elle dans des lieux souterrains ? Attendez un mo-
ment, et vous verrez la Majesté Impériale parler
pour elle. Elle traverse, quand elle veut, les mers,
les rivières et les montagnes ; ce ne sont pas les obs-
tacles d’ici-bas qui l’empêchent d’aller. Mettez de
la répugnance dans les esprits, elle saura vaincre ces
répugnances : établissez des coutumes, formez des
usages, publiez des édits, faites des lois ; elle triom-
phera du climat, des lois qui en résultent, et des
législateurs qui les auront faites. Dieu, suivant des
décrets que nous ne connaissons point, étend ou
resserre les limites de sa religion.
On dit : « C’est comme si vous alliez dire aux
rois d’Orient qu’il ne faut pas qu’ils reçoivent chez
eux la religion chrétienne. » C’est être bien char-
nel, que de parler ainsi. Était-ce donc Hérode qui
devait être le Messie ? Il semble qu’on regarde Jé-
sus-Christ comme un roi qui, voulant conquérir
un État voisin, cache ses pratiques et ses intel-
ligences. Rendons-nous justice : la manière dont
nous nous conduisons dans les affaires humaines
est-elle assez pure pour penser à l’employer à la
conversion des peuples ?
CÉLIBAT.
USURE.
RÉPONSE.
FIN DE LA DEFENSE.
1
C’est une réponse à la lettre insérée dans le
Journal de Trévoux que nous avons publiée,
Sup., pages 101 et suivantes. ’
2
Diodore, liv. XVIII, p. 601, édit. de Rhodo-
man. (M.)
3
Le Journal de Trévoux, dans le second
volume de février 1750 publia une se-
conde lettre qui a pour objet unique
l’appréciation faite par Montesquieu de la
réforme d’Antipater. Cette lettre est sans
intérêt ; elle prouve seulement que le rédac-
teur entendait autrement que Montesquieu
les mots de grand et de petit. Au reste, les
curieux trouveront les deux lettres dans les
Mémoires (ou Journal) de Trévoux, et dans
un volume intitulé : Pièces pour et contre
l’Esprit des Lois, publié à Genève en 1752,
chez Antoine Philibert.
REPONSE A LA DÉFENSE
DE L’ESPRIT DES LOIS1
24 avril 1750.
OU
EXAMEN DE LA RÉPLIQUE DU
GAZETIER ECCLÉSIASTIQUE A LA
DÉFENSE DE L’ESPRIT DES LOIS.
M DCC LI
Cette réponse au gazetier ecclésiastique est de la
Beaumelle, si connu au dernier siècle par ses démê-
lés avec Voltaire. Quoiqu’il soit évident à la simple
lecture que cette pièce ne peut être de l’auteur
de la Défense, et quoiqu’on y reconnaisse la main
d’un protestant, les ennemis de Montesquieu ne
manquèrent pas de lui attribuer un pamphlet qui
pouvait le compromettre. Il se crut obligé de don-
ner un démenti officiel à la calomnie, par une
lettre adressée sans doute à La Beaumelle, et dont
un exemplaire, imprimé sur une feuille in-8, est
conservé dans un recueil factice de la bibliothèque
Mazarine, à Paris. Cette lettre est ainsi conçue :
A M***
ou
EXAMEN DE LA RÉPLIQUE DU
GAZETIER ECCLÉSIASTIQUE A LA
DÉFENSE DE L’ESPRIT DES LOIS.
Sans date.
Monseigneur,
DE MONTPAYROUX2.
Livre XXVII.
MIRIVÉIS, III, 9.
Talion (la loi du). Est fort en usage dans les états
despotiques : comment on en use dans les
états modérés, VI, 19. Voyez Peines du talion.
Tockembourg, X, 6.