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LE JOURNAL INTIME,
UN NOUVEAU GENRE LITTRAIRE ?
Communication de M. Alain GIRARD
{Paris)
au XVIe Congrs de V Association, le 28 juillet 1964.
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Quelques-uns de ces lments entrent en dosages variablesdans tout journal. La cration s'y prpare, mais il n'est pas
la cration.
Il serait ais de montrer que ni Adolphe, ni les romans de
Stendhal, ni le biranisme, ni les pomes de Vigny, ni les t
ableaux
de Delacroix, ni non plus les Approximations de
Du Bos, ou les romans de M. Green, pour prendre des
exemples plus rcents, ne seraient ce qu'ils sont en l'absence
du regard intrieur que des tres aussi fondamentalement
dissemblables n'ont cess de poser sur eux-mmes, sur leurs
difficults uvrer, comme sur leur peine vivre et s'in
srer dans le rel. Certes, la dmonstration pour chacun d'eux
relverait d'une exgse particulire, et des traits frappants
chez les uns ne se retrouveraient pas chez les autres. Cette
exgse vaudrait la peine d'tre tente et apporterait quelque
lumire sur les mcanismes obscurs, et les conditions mmes
de la cration littraire. Mais tGus ont russi, chacun sa man
ire,
produire une uvre, et en dfinitive, c'est cette
uvre qui compte.
Il en va de la valeur littraire d'un journal comme de sa
valeur spirituelle. S'il s'agit, en s'observant soi-mme, et en
faisant part de ses ractions personnelles, de manifester dans
le monde o nous vivons la valeur de l'individu, de dclarer
hautement qu'il ne peut y avoir de vraie grandeur que dans
le secret d'une conscience, le journal est un exercice salutaire
et recommandable. De mme encore, s'il s'agit en s'interrogeant de se chercher, en toute bonne foi, au risque de se
perdre et de sombrer, mais finalement de se conqurir et se
crer dans l'acte mme de se chercher et de se perdre, en
obissant l'injonction des anciens : Deviens qui tu es.
Mais si le rdacteur d'un journal considre que ce qui l'in
tresse,
lui, intresse aussi les autres, si le monde se rduit
sa personne, il est dangereux, moralement comme littrair
ement.
Dans l'ordre littraire, en effet, si l'on pense qu'on est
crivain parce qu'on tient un journal, on se trompe. Des
fragments, ou des miettes, si brillants soient-ils, n'ont ja
mais
compos une uvre. L'uvre suppose un effort
constant, des choix et des sacrifices incessants, une transposi-
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